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performance rituelle
Museu da Cadeira Brasileira
adrianadornasmoura@gmail.com
Keywords Agency
Design
Artifact/Object
Ancestralization
Knowledge Ecology
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Résumé
Au Brésil, durant les trois dernières décennies, le designer brésilien Ro-
drigo Almeida a introduit dans ses recherches les savoirs amérindiens dans son
processus créatif et, dans certains cas, dans l’aboutissement de ses projets.
Il s’agit de modèles d’agentivité dans lesquels le rôle de l’innovation s’intègre
aux valeurs et à l’écologie des savoirs des peuples autochtones. Dans l’objectif
d’analyser la relation entre l’art et le design à partir des travaux intitulés Subli-
minar (2018) et Exu (2019) de Almeida, nous traiterons tout d’abord des deux
questions abordées par Alfred Gell (2018) : le style et l’agentivité (agency).
Ensuite, nous étudierons la façon dont le processus d’ancestralisation dans le
design remet en cause la distinction entre l’artisanat, l’art et le design. Fina-
lement, nous nous interrogerons sur l’insertion du rite dans la transfiguration
de l’objet en artefact.
Abstract
Over the past three decades, Brazilian designers have applied Ame-
rindian forms of knowledge to their processes and practices of research and
design. This approach allows designers to apply models of agency in which
innovation is integrated with traditional values and the ecology of knowledge of
indigenous peoples. In this study, we use Rodrigo Almeida’s Subliminar (2018)
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and Exu (2019), a performance art piece, as the basis for reflecting on two is-
sues addressed by Alfred Gell (2018): style and agency. Our main objective in
this study is to reflect on how the process of ancestralization in design strains
the distinctions between handicraft, art and design. Finally, we aim to proble-
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une analyse des œuvres de la série Subliminar (2018) et Exu3 (2019) du designer
brésilien Rodrigo Almeida, dont la production en design est basée sur l’expressivité
des savoirs traditionnels des peuples autochtones et sur les rites afro-brésiliens.
Dans son travail, Almeida reprend le processus de fabrication de hamacs pour ré-
fléchir à l’action des artefacts et à leur transfiguration en objets de design. De plus,
le projet provoque une rupture avec l’usage de ces derniers, en les transformant
en objets pouvant être vêtu (wearables) afin de remettre en question les rites des
savoirs traditionnels. Basée sur une performance rituelle, l’œuvre nous permet de
concevoir tout un imaginaire de nouveaux usages sur le concept animiste des corps
présents dans les projets d’objets design contemporains.
La recherche réalisée ici n’est d’ailleurs pas sans liens avec, d’une part, la
culture populaire brésilienne et, d’autre part, une conception du design au-delà de
la rationalité moderne. Grâce à cette pratique d’expérimentations liée aux savoirs
traditionnels, le designer retrouve la puissance de la poétique de la relation entre
l’objet et l’artefact. De plus, les processus impliquant les matériaux, la forme, les
différents langages artistiques et les rituels religieux, dans le travail d’Almeida,
problématisent l’insertion du rite dans la transfiguration de l’objet en artefact. Le
design met en œuvre des processus interdisciplinaires entre l’art et l’anthropolo-
gie. Ce projet en design hors-norme opère systématiquement la transformation
des modes de conception et de production des objets. À partir de cette approche
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dans la culture amérindienne, entre le modèle et la réplique. Ainsi, les copies sont
considérées comme un geste créatif du passé qui donne une continuité à l’altérité et
à l’identité des peuples d’une même culture. Le contexte de production est influencé
par la capacité de chaque artisan à proposer une transposition cosmologique du
geste créatif, faisant intervenir l’agentivité de formes stylistiques qui révéleraient
l’identité ethnique d’un groupe. Dans ce cas, le développement du style n’exclurait
pas les imperfections du geste créatif ; cependant, il pourrait dénoter d’innom-
brables correspondances. Il n’est rien de plus qu’un modèle qui explique la relation
de membres d’un groupe ethnique avec leurs ancêtres.
L’article se propose d’analyser trois idées : premièrement, mettre en relation
la formation d’un vocabulaire ancestral englobant l’idée d’une écologie du savoir
grâce à un écosystème qui intègre le designer au processus d’ancestralisation de
son style. Deuxièmement, expliquer la présence, dans ce style génératif, de l’au-
tofiction du sujet, qui relie l’ancestralité à l’innovation. Enfin, nous avons l’intention
d’étudier l’ambiguïté fonctionnelle des artefacts-objets, ayant comme orientation
l’agentivité esthétique provoquée par la performance rituelle.
d’écosystème du cosmopolitisme
Rodrigo Almeida5 né à Sorocaba, São Paulo, est autodidacte et développe
ses projets dans différents domaines du design, de la mode et de l’art, tels que le
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madisme conceptuel6 , ce qui lui permet de se rapprocher de différentes écologies
de savoirs. Il intègre les connaissances indigènes et afro-brésiliennes dans les
processus et méthodes du design. Ses projets articulent l’empirisme technique,
et les connaissances mythologiques et symboliques. Almeida (2019) explique
ainsi son procédé : « Je perçois l’influence de ma culture ancestrale brésilienne,
il existe une fusion mythologique et une charge dramatique qui me conduit dans
cette direction.7 »
Les techniques développées par Almeida prennent place dans une prise
de conscience des épistémologies des tropiques8 qui renforce les pratiques in-
terculturelles et qui encourage la métamorphose des gestes et des formes dans
le temps. Il s’agit d’incorporer au savoir contemporain le langage des racines
culturelles brésiliennes. Du choix de la palette de couleurs à l’étude des matériaux,
les relations interethniques se renforcent. Le dialogue entre les identités les plus
contrastées consolide la devise d’Almeida : « Nous sommes tous différents 9 . »
L’apport de son travail explique les tensions qui existent entre la reprise du culte
ancestral et l’utilisation d’informations issues des savoirs des peuples autochtones
qui rompent avec les chronologies et les stéréotypes culturels. De plus, sur scène,
il unifie les expériences plastiques avec la poétique des correspondances, explo-
rant les différentes alternatives de l’action post-dramatique de sa performance
Subliminal (2018), en utilisant le collage interdisciplinaire, mêlant le design, l’art
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locaux, révèle l’errance dans une instance poétique où la praxis fonde une icono-
logie de la relation. À propos de sa pratique du design, Almeida souligne : « Dans
mon travail, l’important est de créer une histoire, un récit de qui je suis. Je suis fils
de Noirs, d’Indiens et d’Européens. Nous sommes différents. Ces diversifications
des racines sont mon inspiration. Mes pièces doivent être le témoignage de ce qui
me matérialise dans les objets que je conçois10. »
vement de ces animaux, l’objet artisanal active les sens du corps et celui-ci devient
inséparable de l’objet. C’est à partir de cette performance que se déroule le rituel de
transfiguration. Le hamac (fig. 1) couvre le corps du chorégraphe Ricardo Januário
afin d’unifier le corps et l’objet. L’intervention rituelle, dans laquelle le hamac est
transformé en vêtement et le vêtement en animal, renvoie à l’idée d’une fonction
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entre les êtres se configure. Pour la pensée amérindienne, la relation entre le sujet
et l’artefact se construit selon la réinterprétation des rites de passage, associés
à différents événements de la vie : naissance, passage à la puberté, vie adulte,
vieillissement et mort. Pour chaque événement, il y a un marqueur temporel qui
symbolise un type différent de devenir.
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troduit plusieurs entités pour affirmer que les objets artisanaux sont des porteurs
d’esprit. Son projet de design met en valeur la présence d’êtres primitifs incarnés
par le geste chamanique. Il évoque, à travers l’expérience artisanale, des créations
qui brisent la nature utilitaire du mobilier et des vêtements, en inscrivant dans ses
créations un récit formel de divinités ancestrales.
L’œuvre d’Almeida ne déplace pas l’objet de design hors de ses fonctions
utilitaires ou quotidiennes, mais elle propose clairement une indistinction, affirmant
que l’objet peut assumer de nombreuses fonctions. En termes plastiques, compo-
sitionnels et formels, ces objets renforcent le déroulement du style, imitant ainsi la
créativité divine. Le style est essentiel dans le processus d’ancestralisation, car il
remplit le rôle de répétition des modèles mythiques. Un exemple de ces correspon-
dances se trouve dans l’une de ses séries dans laquelle la fonction performative est
intégrée à la contemplation esthétique, et qu’il a nommé Exu13 L’intervention rituelle
est constituée par la logique de fonctionnement d’un produit qui se transforme en
l’image d’une divinité ancestrale. À l’instar de l’analyse présentée par Gell (2018),
Almeida ne s’oppose pas à la contemplation et à l’utilisation. L’agencement se
concrétise par l’esthétique relationnelle dans laquelle l’objet agit en interagissant
avec son utilisateur, le conduisant au rite de passage dans lequel la fonction mène
à la transfiguration. Et c’est grâce à celle-ci que l’artefact stimule sensoriellement
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l’utilisateur en fortifiant les affections. Sous la forme, son style nous montre, la
contiguïté spirituelle de l’ancestralité afro-brésilienne.
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Comme l’explique Lagrou (2009), les évocations visibles et sensorielles de l’artefact
suggèrent différentes transpositions avec des êtres invisibles. Son agentivité est la
procédure par laquelle il y a un déplacement de l’attention du sens vers l’efficacité.
Dans ce contexte, l’expérience esthétique se déroule dans la « prose du monde15 ».
En conséquence, l’instrumentalisation de l’objet est potentiellement réalisée par
l’agentivité esthétique. De cette manière, le design a la possibilité de rompre avec
la logique de la réification : « Ce n’est que lorsque le design supplantera les arts
purs ou les beaux-arts que dans les métropoles nous aurons une image semblable
à celle des sociétés indigènes. » (Lagrou, 2009)
Si nous consultons les analyses de Lévi-Strauss (2012), nous pouvons com-
prendre que le récit mythique éloigne Almeida de l’interprétation qui individualise le
créateur et qui relie l’idée de style à la notion de paternité ou à la filiation artistique.
Le style des œuvres d’Almeida possède des paramètres culturels qui favorisent une
correspondance spatiotemporelle avec les écosystèmes des peuples amérindiens
du Brésil. L’écologie du savoir représente ici le corpus ethnographique d’un lien entre
le passé et le présent. L’œuvre Subliminal (2018) est basé sur la poétique à partir
de laquelle les choses sont configurées par des relations transformationnelles.
La matière première et la technique constructive du hamac trouvent un équilibre
entre mythe et rituel, régionalisme et cosmopolitisme, corps humain et animal,
objet de design et artefact. Le caractère unique de la pièce révèle la dynamique
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Txana Ibu (propriétaire des japims), des oiseaux dits cassiques à épaulettes ». Le
japim, en plus d’être un oiseau tisserand, est celui qui imite le plus grand nombre
de chants d’autres oiseaux et animaux, selon le mythe Kaxinawa (Lagrou, 2009). Le
synchronisme entre l’expérimentation et le mouvement devient l’un des éléments
principaux de ce travail. Lang Ho (2010) pose une question sur le design brésilien :
qui s’attendait à ce que de telles stratégies si personnelles produisent un modèle
pour la pratique du design au 21e siècle ?
La série d’objets intitulée Exu (2019) est le dispositif par lequel l’ancestra-
lité de l’entité Exu est introduite par le processus d’ancestralisation réalisé par les
créations d’Almeida (fig. 2). En cherchant une affiliation à l’origine du Candomblé,
Almeida n’initie pas un rite d’incorporation de l’entité, mais la présente en probléma-
tisant l’autofiction de ses origines ancestrales, une déclaration de son ascendance
africaine.
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artisanaux de leur mémoire ancestrale « en fabulant » (Deleuze, 2014) sur les divi-
nités yoruba18 , qui font partie de leurs origines.
Colonna (2014) problématise ce nomadisme dans le domaine de l’autofiction
comme un effet chamanique qui élargit le soi du narrateur. Nous avons constaté que,
dans le cas des créations d’Almeida, des styles de déploiement similaires à un mo-
dèle d’intervention ritualisée et déclenchée par un design fictif fonctionnent. Nous
y trouvons la coexistence et le chevauchement de différents savoirs qui déploient
la généalogie ancestrale de l’œuvre. Le regard ethnologique porté sur les cultures
amérindienne et afro-brésilienne révèle que le design contemporain peut insérer,
dans ses processus, la simultanéité de la complexité systémique d’une écologie
du savoir. Les objets artisanaux, les objets de design, les objets d’art deviennent
inséparables, car ils unissent mémoire et savoirs sensibles, mythe et histoire,
esprit et matérialité, corps et objet, êtres et animaux. Ce serait donc une manière
d’articuler la forme, la pensée et la matière. Comme le stipule Ingold (2012), il s’agit
de transfigurer les êtres en objets artisanaux et les objets artisanaux en choses
vivantes. L’unification de l’entité avec la matière et celle du corps avec l’esprit vont
à la rencontre des fils vitaux (racines) qui apparaissent en surface.
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le cosmos est l’esprit. Pour les amérindien du Brésil, la connexion entre les êtres
provient d’une essence spirituelle, mettant en évidence leur configuration en ma-
tière d’artefacts artisanaux.
En ce qui concerne l’œuvre Subliminal (2018), il existe une corrélation basée
sur une existence incorporée entre les êtres : le corps, la fibre de Buriti, le hamac
et l’esprit des oiseaux19. L’œuvre rompt l’opposition entre l’artisanat, le rite et l’art.
L’intercorporéité de l’action conduit l’expérience esthétique à adopter l’idée de vie
sensible du point de vue amérindien. Le spectateur peut, à la manière d’un chaman,
percevoir le corpus invisible des êtres : hamac, corps et oiseau. Les gestes choré-
graphiques, en revanche, conduisent à la construction d’un imaginaire qui dessine la
présence de l’animal par l’ambiguïté fonctionnelle du hamac comme visage hybride.
Suivant la structure du récit mythique des amérindien, tout ce qui se passe dans le
corps est dévoilé par l’esprit. Par conséquent, les choses révéleraient la présence
spirituelle de l’oiseau dans le tissage des hamacs. Les fils seraient donc le lien entre
la vie et la mort, concrétisant avec style le processus d’ancestralisation du travail
de design développé par Almeida. De plus, dans la mythologie amérindienne, les
choses sont en elles-mêmes spirituelles. Si nous revenons à l’idée présentée par
Miller (2007), les artefacts corporels sont conçus comme ayant une agentivité hu-
maine et, pour cette raison, ils évoqueraient l’image d’un être. Cependant, Ingold
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(2012) fait une critique de cette idée et affirme qu’il n’y a pas d’agentivité, mais une
ligne imaginaire entre les êtres, il considère cette ligne comme un champ de forces
écologiques produisant un flux constant dont émerge notre force vitale
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nous fait analyser l’ancestralité et la production de l’expérience esthétique dans
le design comme des enjeux inséparables. Le travail d’Almeida remet en cause
l’ambiguïté de la fonction de l’objet, car le hamac renvoie à l’esprit ancestral par
l’intermédiaire de ceux qui l’utilisent et le fabriquent. La complexité de la pensée
amérindienne pointe vers une interaction écologique structurée dans un modèle de
sagesse écosystémique. L’agencement du hamac ne fait pas partie de la discussion
d’appropriation culturelle, mais au contraire, il améliore le rituel de l’utilisation des
formes dans la vie quotidienne. Dans l’exposition Oracules du Design, organisée
par Li Edelkoort et présentée à la Gaité de Paris, l’œuvre d’Almeida est considérée
comme une espèce de nomadisme :
« Le design se plie à cette exigence de mobilité et s’utilise à plusieurs, parce
que le partage sera l’idéal d’une société d’humains en perpétuel mouvement ; bien
plus qu’un style de vie, il s’agit ici d’une mentalité. La culture du design est définie
par la création de formes empreintes d’une vision à long terme. » (Edelkoort, 2015)
Il s’agit de réfléchir à la coexistence des connaissances dans le design.
Quand les corps reprennent les gestes ancestraux qui unissent les êtres (les plantes,
les animaux et le sujet), le travail réactive une intégration perdue depuis longtemps
en raison de l’opposition moderne entre la nature et la culture. Il nous appartient
de rechercher quelle forme d’interaction est utilisée par Almeida pour réaliser son
œuvre, car ces objets déclenchent un récit entremêlant les multiples matrices de
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Conclusion
Dans le but de réfléchir à l’émergence d’une cosmologie amérindienne dans
les processus et pratiques de design organisés par Rodrigo Almeida, cet article vise
à explorer l’utilisation de formes qui intègrent le rite, la mythologie, l’artefact, l’art et
le design. Nous avons analysé comment le processus d’ancestralisation mené par
Almeida fait remarquer une indistinction entre matière et esprit, sans pour autant
affirmer les binarismes qui distinguent l’artefact de l’objet et l’artisanat du design.
Les formes développées par Almeida sont liées aux mythes ancestraux indigènes
et afro-brésiliens à travers le dispositif de l’expérience esthétique. Notre propos
n’était pas de présenter seulement l’intérêt pour une écologie des savoirs dans
le design, mais surtout l’idée que la connaissance peut introduire une mentalité
écologique dans les gestes de création, d’expérimentation et de réflexion sur les
usages des formes dans le design.
À partir des notions de la poétique des relations de Glissant (1990), de
l’agencement de Gell (2018), des fils et des choses d’Ingold (2012) et de la vie sen-
sible de Coccia (2010), nous voulions comprendre comment toutes ces questions
dialoguent avec la cosmologie amérindienne sud-américaine. Sur la base du geste
subliminal d’Almeida, nous entendions montrer le tissage de la complexité qui unifie
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NOTES
1. Tous les animaux sont faits de personnes. N.D.T : 12. Nous pensons ici à l’idée de devenir-animal de
mythe de la tribu indigène Mamaindê. [Tra- Deleuze et Guattari (2012) comme assemblage
duction] de coexistence dans lequel se crée l’espace où
il est impossible de discerner la frontière entre
2. Selon Lagrou (2009, p. 39), l’univers des arte- l’homme et l’animal. Il ne s’agit pas de créer une
facts est de la même nature que le corps humain. mimésis, mais plutôt de créer une image par
La conception de la corporalité ne distingue correspondance.
pas l’objet ni l’artefact du corps. Les objets et
les artefacts partagent les mêmes référents 13. Dans ce cas en particulier, l’entité Exu a été évo-
symboliques. Cela justifie l’utilisation du terme quée par le designer pour mettre en œuvre les
artefacts-objets, puisque sa fonctionnalité a été signes visuels qui révèlent la présence de cette
constituée à partir de l’incorporation de l’altérité divinité à travers la couleur, la forme et la texture.
spirituelle de l’utilisateur. La couleur rouge est récurrente, ainsi que la
couleur noire, et les formes, motifs, textures,
3. Exu est l’un des esprits ancestraux liés aux matières rustiques et bandes expriment tous
pratiques des doctrines africaines : Umbanda les caractéristiques de cette divinité.
et Candomblé. C’est un guide qui propose une
médiation entre les êtres humains et les choses 14. Nous nous référons à la notion de conception
ou les mondes. Exu est également considéré d’urgence pour réfléchir à l’idée de durabilité
comme un protecteur spirituel des voies. et de territoire, car ce terme fait référence à la
préservation de l’environnement, des cultures,
4. Santos (2007) évoque l’écologie des savoirs des savoirs locaux et de leurs traditions.
afin de consolider l’importance de savoir-faire
populaires et la réinsertion des peuples les plus 15. Dans le sens de Merleau-Ponty (1969), « la
vulnérables au centre de la recherche scien- grande prose est l’art de capter un sens qui
tifique. n’avait jamais été objectivé jusque-là et de le
rendre accessible à tous ceux qui parlent la
5. Rodrigo Almeida Design Studio repéré à https:// même langue ».
www.rodrigoalmeidadesignstudio.com/
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RÉFÉRENCES
Almeida, R. (3 juin 2020). Interview accordée à Ingold, T. (2017) Les materiaux de la vie. So-
Adriana Dornas à Belo Horizonte Design Festi- cio-anthropologie (En ligne), Nº35, 23-43. DOI :
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