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Brando: un acteur nommé désir

Julius Caesar
Jules César
Joseph L. Mankiewicz

Lundi 18 octobre 2021 à 20h | Auditorium Arditi


ÂGE LÉGAL: 7 ANS

Générique: USA, 1953, NB, DVD, 120', vo st fr dépouille de l’Empereur afin de la montrer à la
Interprétation: John Gielgud, Marlon Brando, James plèbe romaine, Marc-Antoine prend la parole,
Mason sous la bénédiction de Brutus. «You gentle Ro-
mans…» («Mes chers Romains…»). Débutant
1953. La renommée de Marlon Brando grandit doucement, il procède par une exhortation:
déjà depuis quelque temps. Pour la première «Friends, Romans, countrymen, lend me your
fois, le jeune acteur du Nebraska se frotte à la ears» («Amis, Romains, compatriotes, écoutez-
richesse de la prose de William Shakespeare, moi»). Marc-Antoine attire instantanément
sous la direction du récent lauréat des Oscars: l’attention du public.
Joseph Mankiewicz. Jules César — un film
essentiel au sein de la filmographie de Brando, à Cette scène, véritable moment pivot, est non
plus d’un titre. seulement essentielle au déroulé narratif,
mais elle révèle également le génie interpré-
La tragédie shakespearienne revisitée: Jules Cé- tatif de Marlon Brando, dont les répliques ont
sar, selon Rayan Chelbani, comité du Ciné-club su convaincre les critiques et le public de
l’époque. Il faut préciser que Mankiewicz avait
Seul acteur américain du film, Brando y donne pris un risque important en choisissant de
la réplique à des grands noms de la scène donner le rôle à Brando, car ce dernier était
britannique tels que James Mason (Brutus), connu pour sa mauvaise diction, et sa ten-
John Gielgud (Cassius) ou Deborah Kerr dance à murmurer ses textes plutôt que de les
(Portia), et campe pour sa part le rôle exigeant déclamer. Or, la prose shakespearienne exige
de Marc-Antoine. Bien qu’il apparaisse moins une manière spécifique de réciter, qui ne
que Mason et Gielgud, c’est bien son nom qui semblait guère correspondre à l’articulation
émerge en premier lors du générique d’intro- discrète et procédant par soubresauts typique
duction. C’est dire à quel point le metteur-en- de Brando (perceptible, par exemple, dans le
scène et la MGM misaient sur lui. rôle de Stanley Kowalski du Tramway nommé
Désir).
La scène du film la plus marquante, et celle
qui attirera notre attention ici, est celle de Le texte de Shakespeare est repris tel quel.
l’allocution ardente de Marc-Antoine. Elle se Toutefois, Brando lui apporte un éclat, une
situe à la suite de l’assassinat de César par les énergie qui tranche grandement avec les
conspirateurs. Après avoir apporté la autres acteurs du film. Autrement dit,
l’Américain se réapproprie la rhétorique du
célèbre dramaturge, en l’actualisant et en la
rendant vivante pour un public qui peut-être
n’avait auparavant jamais lu la pièce. Comme
l’a déclaré le cinéaste John Badham (à qui l’on
doit notamment La fièvre du Samedi soir), «on
doit énormément à Mankiewicz et Brando
d’avoir remis au goût du jour une si grande
pièce pour la rendre accessible à un public
contemporain». Une belle réussite en résumé,
au grand dam des critiques et des détracteurs.

À partir de Jules César, Marlon Brando a été


considéré comme «le plus grand acteur de
tous les temps» selon le magazine Life, de-
vançant l’acteur et metteur-en-scène
Laurence Olivier.
«I come to bury Caesar, not to praise him» («Je
viens enterrer César, non lui rendre hom-
mage»). Peut-être n’était-ce pas l’intention
originelle de Marc-Antoine de prononcer un
éloge funèbre au sujet de son défunt mentor
et ami. Quoi qu’il en soit, ses paroles ont assu-
rément convaincu le peuple de Rome… ainsi
que les spectateurs d’aujourd’hui et
d’autrefois.

Rayan Chelbani

Le comité du Ciné-club établit la programmation, rédige les articles de la revue, les fiches
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Prochain film:

▶ L’Équipée sauvage (Laslo Benedek, 1953)


25 octobre à 20h | Auditorium Arditi

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