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a souvent dit que
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Meccano. »
D
Le cinéma a 100 ans. Pour fêter l‘événement, nous

N ° 1
rencontrerons, tout au long de l‘année, quelques—uns des plus grands
cinéastes du monde. Après l‘Italien Nanni Moretti (TRA 2354)
et le Moscovite Nikita Mikhalkov (TRA 2362), le Breton Alain Resnais.

4—
De sa découverte de Douglas Fairbanks à ”Terminator 2”, celui
qui dit ”jouer” avec le cinéma parle de la mémoire

V — R
et de l‘imaginaire, disserte sur l‘art et la vie. Un peu philosophe, Alain ?

Alain Resnais

Le grand jeu
Ce Breton réservé et modeste n‘a tourné ble d‘Alan Ayckbourn, il tire deux films
que quatorze longs métrages. Ce qu‘il dé— étourdissants : Smoking, No smoking, un
plore. Il pense qu‘au—dessous de quaran— drôle de jeu sur la liberté, le libre arbitre...
te films on n‘est pas un vrai professionnel. et le hasard. Muriel, ou le Temps d‘un retour
Il aurait aimé en tourner un par an et abor— (avec Jean Cayrol) parle du souvenir et de
der tous les genres. Alors, il se dit « brico— la culpabilité. Et L‘Amour à mort (avec
leur du cinéma ». Mais ce bricoleur bricole Jean Gruault), de la mort, bien sûr, mais
des chefs—d‘œuvre. Chaque fois, il travaille comme personne n‘en avait encore parlé.
avec un auteur différent. Et, chaque fois, Car le plus intelligent et le plus rigoureux
c‘est toujours du Resnais. Sans jamais de nos cinéastes est aussi celui qui ose aller
trahir ni la poésie de Marguerite Duras le plus loin dans l‘émotion. La mémoire
(Hiroshima mon amour) ni la rigueur est au cœur de son œuvre. Mais avec son
scientifique d‘Henri Laborit (Mon oncle corollaire : l‘imaginaire. Ce seront donc les
d‘Amérique). D‘une pièce réputée injoua— deux pôles de cet entretien. itm—

E nt r e t i e n p a r
Coe t por o—> MoA R TE T R à M O I S
M. FRANCK / MAGNUM

Télérama N°2370 — 14 juin 1995 31


à

»— TELERAMA : Vous souvenez—vous du premier Mais je me souviens très bien de Robin des bois :
film que vous avez vu ? L‘Année dernière il y avait de l‘action et de l‘amour, et je suis deve—
ALAIN RESNAIS : Je ne suis pas tout à fait sûr, mais
à Marienbad nu tout de suite un fan de Douglas Fairbanks. Au—
je crois que c‘était à la maison. Mon cousin — le futur tre coup de cœur : Le Mystère de la tour Eiffel,
docteur Roblin — est monté, un après—midi, avec (1961).
de Duvivier. C‘était un film à épisodes. Il fallait
un Pathé—Baby. C‘était l‘époque où le logo de Pathé— « Abel Gance m‘a trois séances pour le voir en entier. Comme il n‘y
Baby était un poussin qui sortait de l‘œuf. On a dit : ”C‘est très avait qu‘un seul projecteur, tous les quarts d‘heure,
punaisé une serviette nid—d‘abeilles contre le mur la projection s‘arrêtait pour qu‘on puisse chan—
intéressant, mais
du salon. Tout à fait selon la tradition. Et il nous a ger de bobine. Et, chaque fois, j‘avais peur que le
projeté trois films : un morceau de La Maison han— c‘est trop tôt.” film ne reprenne pas.
tée, avec Harold Lloyd, un morceau d‘un dessin Puis il m‘a envoyé
animé futuriste, Le Lever du professeur Mecanicas, une lettre pour TRA : ous ces films étaient muets ?
et un documentaire image par image, très populaire A.R. : Complètement. Enfin, comme le dit Chris
me dire qu‘il
du temps du muet, La Naissance du haricot. C‘était Marker, c‘est assez drôle qu‘on les appelle ainsi,
assez magique : on voyait la séparation des cotylé— s‘était trompé. » car les acteurs n‘arrêtaient pas de parler. Plus
dons. J‘avais 5 ou 6 ans, je crois. J‘étais très content. que dans les films parlants. On devrait dire : films
pour sourds, ce serait plus juste.
TRA : Vos parents ont assisté à la séance ?
A.R. : Je ne pense pas qu‘ils soient restés. Mon cou— TRA : Vous vous en souvenez bien ?
sin avait 12 ans, mais il était très bien vu de ma A.R. : Quand on revoit un film qu‘on n‘a pas vu
famille, parce que c‘était un brillant élève. Il avait depuis dix, trente ou cinquante ans, on s‘aperçoit
toujours trois croix chaque semaine. Grâce à lui, toujours qu‘on a inventé des plans. C‘est pourquoi
cette séance de cinéma n‘avait rien de... disons cou— je prenais souvent la défense de Georges Sadoul,
pable. Ou d‘idiot. A Vannes, où nous habitions — et qui a fait pas mal d‘erreurs dans son Histoire du
sans doute dans beaucoup de villes de province —, cinéma. Je disais : c‘est normal, il ne peut pas
le cinéma, c‘était pour les crétins. Il y avait deux contrôler. L‘imagination fabrique des images.
salles : le cinéma Pasteur — laïque — et le cinéma
de la Garenne — catholique, puisqu‘il était dirigé par TRA : On ne peut pas être sûr de sa mémoire, par—
un missionnaire. Celui—là, on avait le droit d‘y aller. ce qu‘on n‘est pas sûr de son imaginaire ?
ciNEstar

Je n‘ai pas pu retrouver le premier film que j‘y ai vu. A.R. : Vous vous souvenez de cette image devenue

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d rom r e t t e sn re
t n éae C S L I N R te s r me v e 1 s

une icône : Marilyn Monroe au—dessus — , devant l‘accueil du public — deux salles
de la bouche d‘aération, dans Sept Ans — | en 1961—1962, c‘était déjà beaucoup —, il
de réflexion ? Eh bien, quand on revoit ! ”Un siècle,
a pris la peine de m‘envoyer une lettre
le film, on s‘aperçoit que Billy Wilder | _— en me disant qu‘il s‘était trompé. Que le
n‘a jamais tourné ce plan. La prome— ce n‘est rien. film avait été fait à temps.
nade a bien lieu. Marilyn Monroëe s‘ar—
rête bien sur la bouche de chaleur, mais | _ TRA : A quel âge avez—vous eu votre pre—
elle est coupée à la taille. On ne voit
Peut—être
mière caméra ?
que ses jambes, et très brièvement, au A.R. : A 12 ans. Kodak a créé le 8 mm
cours d‘un travelling latéral. Le fameux est—il trop tôt pour pour concurrencer le 9,5. L‘image était
plan de Marilyn en pied, c‘est une pho— plus petite, mais la pellicule beaucoup
to de plateau. Mais tout le monde l‘a
inscrite dans le film — moi le premier.
parler de l‘influence plus solide. En même temps, il a sorti
une caméra qu‘il vendait à perte. Et mon
père, à Noël, me l‘a offerte. Et puis, en
TRA : Vous avez d‘autres exemples ? du cinéma sur | _— janvier, il avait complètement oublié :
A.R. : Je me souviens d‘une discussion « Qu‘est—ce que c‘est que cette caméra ?
entre Roger Leenhardt, Agnès Varda
les mœurs.” Quand on travaille si mal en classe, est—
et moi. Agnès était en train de tourner ce qu‘on a une caméra ? » Un drame hor—
La Pointe courte — que j‘allais monter. ——— umem _—
rible. Mais je l‘ai gardée quand même.
L‘image montrait Philippe Noiret et Sil—
via Monfort, au loin, tout petits dans le paysage. TRA : Et qu‘avez—vous tourné d‘abord ?
Mais on les entendait parler comme s‘ils étaient A.R. : J‘ai commencé un Fantômas, mais j‘ai dé—
tout près. Leenhardt protestait. Agnès insistait : couvert très vite le grand problème des films d‘ama—
« Mais si j‘en ai envie ? — Non, non, vous pensez teur. Pour faire du cinéma, il faut que les acteurs se
bien, Agnès, que si on pouvait faire des choses sentent engagés, donc qu‘ils soient payés. Le pre—
comme ça, il y a longtemps qu‘on les aurait faites. » mier jeudi, tout a bien marché, mais le deuxième,
Leenhardt était quelqu‘un que nous admirions c‘était : « Ma sœur fait sa communion solennelle. ».
tous — sans quoi l‘histoire ne serait pas amusante. Le troisième, c‘était : « Oui, mais je suis scout,
Alors, très fier de moi, je dis : « Mais, monsieur alors je ne peux pas ne pas aller à ma réunion de
Leenhardt (ou Roger, je ne sais plus), dans Bonne patrouille. » Et ainsi de suite. Il aurait fallu pou—
Chance, Sacha Guitry filme sa conversation avec voir tout tourner en un seul jeudi.
Jacqueline Delubac, dans une voiture, la caméra
fixée sur le capot. Puis, il y a un plan général de
la voiture blanche qui s‘enfonce dans le paysa—
ge, et la conversation continue, sans qu‘on soit
choqué le moins du monde. » Ça, je pouvais tou—
jours l‘affirmer, puisque Roger Leenhardt n‘avait
pas vu Bonne Chance, et qu‘à l‘époque on croyait
le film perdu. Moi, je l‘avais vu à sa sortie, et
j‘avais été totalement séduit.
Récemment, grâce à René Chateau, qui a re—
trouvé une copie et l‘a éditée en vidéo, j‘ai revu
Bonne Chance. Avec bonheur. Mais le dialogue
s‘arrête quand on voit la voiture s‘éloigner... Donc
j‘avais tout inventé, créditant Guitry d‘une auda—
ce... dont il aurait été parfaitement capable.

TRA : Et Agnès Varda a suivi son idée ?


A.R. : Oui, heureusement. Bien que Leenhardt
lui ait dit : « Le public n‘est pas prêt pour ces in—
novations : c‘est trop tôt. » C‘est bizarre, d‘ail—
leurs, que Leenhardt ait tenu ce discours. Ça ne
cadre pas avec lui, dont Les Dernières Vacances,
CINESTAR

filmé comme on écrit un roman, devançait son


époque. Plus tard, Abel Gance, croisé dans l‘anti—
chambre d‘un dentiste, m‘a dit la même chose. Ellen Burstyn
Moi, j‘étais très impressionné : rencontrer Abel et Dirk Bogarde,
Gance, dont le Napoléon m‘avait causé un tel
dans Providence
choc dans mon enfance, c‘était quelque chose !
Et il me dit : « Marienbad, c‘est très intéressant, (1976).
mais c‘est trop tôt ! » J‘ai dit : « Oui, je sais bien,
on n‘a peut—être pas assez réfléchi... » Et puis,

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le m ot o taéo it dic e s n l AUnvEZrE A L A < TON RR
8 —N oÀ 1 18

»— Et puis, j‘avais cette idée — évidemment très TRA : Et ça donne Providence, La vie est un roman,
naïîve — qu‘on pouvait faire comme dans certains Mon oncle d‘Amérique ou Smoking, No smoking.
films de science—fiction. Si, filmé de tout près, un Bricoleur, peut—être, mais bricoleur philosophe. Ce
lézard donnait l‘impression d‘être un monstre, fil— n‘est pas sur la technique que vous vous livrez à
més aussi de tout près, des enfants auraient sûre— des expériences, mais sur la vie de vos personnages.
ment l‘air d‘adultes. Malheureusement, quand j‘ai A.R. : C‘est vrai que je ne sépare pas beaucoup l‘art
reçu les bobines, j‘étais assez lucide pour me rendre et la vie. J‘aime bien cette définition — de Jean
compte que Juve, Fandor et Fantômas ressem— Giraudoux, je crois —, « Le théâtre n‘est pas l‘imi—
blaient toujours à des enfants... Mon esprit criti— tation de la vie. Le théâtre, c‘est la vie ».
que a donc arrêté ça très vite. Et c‘est dommage :
tout un Fantômas filmé par des enfants, ce serait TRA : Là, vous parlez en temps que spectateur ?
idéal ! Après, je n‘ai plus fait grand—chose. A.R. : En temps que cinéaste aussi. Mais c‘est vrai
que je suis un très bon spectateur de cinéma et de
TRA : Avez—vous retrouvé vos premiers essais, com— théâtre, et un très bon auditeur de musique... L‘art
me Jacques Demy quand Agnès Varda a tourné est un produit de la vie, comme la poire est un
Jacquot de Nantes ? produit du poirier. Je mange la poire et je mange les
A.R. : Non, tout a dû s‘autodétruire. Mais j‘ai vi— films de la même façon.
bré à Jacquot de Nantes !
Sabine Azéma TRA : Vous n‘avez pas fait de mise en scène de théâtre.
TRA : Le passé et l‘avenir, le souvenir et l‘ima— A.R. : Ce serait pour moi très difficile, à cause des
et Pierre Arditi,
ginaire... Vous êtes un cinéaste philosophe. huit jours qui précèédent la générale. Là, il faut tra—
A.R. : C‘est une appellation qui me fait peur, parce L‘Amour à mort vailler vingt—trois heures sur vingt—quatre et garder
que ça supposerait que je réfléchisse beaucoup. (1984). en tête toute la pièce. Au cinéma, on peut procéder
Non, je suis un bricoleur du cinéma. On a souvent par paliers. Quand on a deux minutes utiles dans
Personne n‘avait
dit que je jouais avec lui comme on jouait autrefois une journée, elles peuvent être bonnes ou mau—
avec son Meccano. J‘ai envie de voir ce qui va se encore parlé vaises, mais elles sont acquises. Donc, on peut les
passer si je mets tel type d‘engrenage avec tel type ainsi de la mort. modifier, le lendemain, le surlendemain ou au
de démultiplication. moment du montage. Il me semble que si je fai—
sais une mise en scène de théâtre, je serais sur une
mer d‘incertitude. Et je me sentirais obligé de te—
nir compte de tous les avis qu‘on prodigue à un
metteur en scène de théâtre avant la générale. A
ce moment—là, on ne s‘amuse plus.

TRA : Et vous tenez à vous amuser ?


A.R. : Il faut qu‘il y ait du plaisir. Et pour ceux qui
font le film et pour ceux qui le regardent...
Il y a des mots qui me laissent toujours réveur :
« C‘est un film qui dérange. » Oui, c‘est très bien,
mais si ça dérange, ça va fabriquer des réactions qui
feront que ça ne dérangera plus.

TRA : Comment ça ?
A.R. : Goebbels, d‘une part, Lénine, de l‘autre, ont
dit, chacun à sa manière : « Le cinéma est, de tous
les arts, le plus important, parce qu‘il permet de
dicter au spectateur des lignes de conduite. » Or,
à
2
S depuis cent ans, le cinéma est pacifiste à 98 %...

d
5 est—ce qu‘il n‘y a plus de guerres ?
3
8 Evidemment, on parle sur un siècle, ce qui n‘est
rien. Il faut des centaines et des centaines d‘années
aux marées pour modifier le contour des falaises de
la pointe du Raz. Peut—être est—il trop tôt pour par—
ler de l‘influence du cinéma sur les mœurs. Surtout
que, maintenant, les données du problème vont
être modifiées. Avec le câble, le satellite, les cas—
settes, des milliers de films oubliés sortent de
l‘ombre. C‘est un phénomène peut—être aussi impor—
tant que l‘invention du cinéma.

TRA : Qui aura quelles conséquences ?


A.R. : Se trouver confronté, au hasard, avec l®
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R on o drce
o b d c é on d SD sce VC AN ot À 7 N R E S ”N A O1 3

saient, il faudrait réinventer la littéra—


Sur le tournage de Mélo.
ture, le cinéma, la peinture...
« L‘art est un produit de A.R. : En matière de cinéma, par exemple,
la vie comme la poire est ce serait amusant de voir si la syntaxe du
un produit du poirier. » récit serait modifiée. Probablement pas.
Car, à ma connaissance, tous les films du
monde utilisent une syntaxe occidentale
à la Griffith. Quand j‘étais petit, je m‘ima—
ginais que les films japonais devaient être
complètement différents quant à la tech—
nique du cadre et du montage. Mais non.

TRA : Un monde dans lequel les œuvres


d‘art s‘autodétruiraient au fur et à me—
sure, ce serait épouvantablement triste.
A.R. : Oui, puisqu‘un des grands plaisirs
de l‘art c‘est de mélanger la mémoire
avec ce qu‘on voit.
L‘autre jour, j‘ai pris un très grand
plaisir à voir La Princesse aux huîtres,
de Lubitsch, qui date de 1919, parce

€. GÉORGES / sYGMA
qu‘en—même temps je voyais des scènes
que Lubitsch allait retourner de nom—

imotiron
2 s N@ŒVP— breuses fois : en 1925, en 1930, en 1935.
»»— des films de tous les âges peut aus— Si je n‘avais vu que La Princesse aux
si bien créer une espèce de grisaille et huitres, et aucun autre film de Lubitsch,
pr
engendrer l‘indifférence que permettre, Se je me serais beaucoup moins amusé.
au contraire, une réflexion beaucoup 1959
plus aiguë, puisque ce qui était réservé Hiroshima mon amour TRA : Pensez—vous que l‘avenir du ciné—
à une élite de cinéphiles appartient 1961 ma soit menacé ?
tout à coup à tout le monde. A.R. : Le roman populaire a été affaibli
LAnnée dernière
Prenez, par exemple, L‘Age d‘or, de par la bande dessinée ; et la bande des—
à Marienbad sinée, par les séries télévisées, genre
Buñuel, interdit par la censure pen—
dant des années, eh bien, aujourd‘hui,
1963 Mission impossible. Mais le cinéma et
vous allez dans n‘importe quelle Fnac
Muriel le théâtre, eux, sont toujours là.
et vous repartez avec votre Age d‘or
1966
dans la poche. La guerre est finie TRA : Certains progrès techniques, com—
1967 me les images de synthèse, ne risquent—
TRA : Nous sommes privilégiés, nous Loin du Vietnam ils pas de modifier beaucoup les films
qui pouvons désormais voir et revoir à 1968 du futur ?
volonté les films que nous aimons. Je t‘aime,je t‘aime A.R. : Mais c‘est du para—cinéma. Regar—
A.R. : Mais si notre époque est capable 1974 dez les jeux vidéo — je ne les connais
d‘archiver, elle est aussi capable de dé— Stavisky pas du tout, mais je vois bien que c‘est
truire ces archives avec une seule bombe. 1976 un commerce qui marche —, est—ce qu‘ils
La puissance de destruction et la puis— Providence ont tué le cinéma ? Pas plus que le des—
sance de conservation grandissent en sin animé. Tout ça coexiste. Les ima—
1980
même temps. Certains peintres, d‘ailleurs, ges de synthèse, c‘est très bien — mais
voudraient qu‘on brûle les musées, pour
Mon oncle d‘Amérique quand on en a besoin. C‘est un apport.
que les gens aient envie de voir la pein—
1983 Comme l‘a été la couleur. Comme le se—
ture contemporaine. La vie est un roman ra, bientôt, sans doute, le relief. Comme
Mais les musiciens aussi regrettent 1984 le sont les différents formats.
d‘être sans cesse comparés à Mozart, LAmour à mort Tenez, je m‘attendais à détester 7er—
à Beethoven ou à Schubert : les siècles 1986 minator 2. Or, j‘y ai retrouvé tout le
qui nous ont précédés ne jouaient guère Mélo charme du film à épisodes : le scénario
que la musique de leur temps. Nous, les 1989 est construit exactement de la même
cinéastes, il n‘y a pas si longtemps, nous I want to go home manière. Passés les deux ou trois pre—
étions tranquilles : les vieux films res— 1992 miers effets qui m‘ont fait rigoler, je n‘y
sortaient si rarement qu‘ils ne concur— Gershwin (moyen métr) ai plus pensé, j‘ai suivi l‘histoire, j‘ai
rençaient pas les nôtres. 1993 été ému, j‘ai marché. L‘essentiel demeu—
re : « Il était une fois. » ©
Smoking, No smoking
TRA : Si tous les livres, les films, les Propos recueillis par
tableaux du monde entier disparais— ee Claude—Marie Trémois

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