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COMPTE-RENDU DE PARTIE
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Table des matières
AVANT-PROPOS...................................................................................................................3
INTRODUCTION....................................................................................................................4
Le golfe Persique et le Détroit d’Hormuz..................................................................4
La guerre Iran-Irak et la guerre des tankers.............................................................5
Le contentieux franco-iranien et l’opération Prométhée...........................................8
Un affrontement hypothétique : l’opération Mante Religieuse.................................9
DOSSIERS DE SCENARIO.................................................................................................10
France.....................................................................................................................13
Iran..........................................................................................................................15
DEROULEMENT DE LA PARTIE........................................................................................18
Une planification difficile..........................................................................................18
Méli-mélo dans le Golfe..........................................................................................18
Mélée ouverte en mer d’Oman...............................................................................21
COMMENTAIRES ET ANALYSE.........................................................................................25
Une forte appétence aux risques............................................................................25
Quelques inévitables erreurs et un coup du sort....................................................26
Une victoire totale mais à l’arraché.........................................................................27
CONCLUSION.....................................................................................................................28
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AVANT-PROPOS
En 2015, j’ai été sollicité par Dominique GUILLEMIN, un ami wargamer et chercheur au
Service Historique de la Défense, afin de l’assister dans un projet apparemment insensé :
réintroduire la pratique du wargame dans un cadre institutionnel (militaire et civil). J’ai
arbitré la première partie à Nantes en mai 2015, à l’invitation du professeur DELUMEAU
de l’Ecole Navale, et Dominique a animé la seconde quelques mois plus tard, lors de la
mission Jeanne d’Arc1 2016.
Contre toute attente, le projet s’est révélé viable : nous avons depuis animé plus d’une
trentaine d’autres parties, principalement à l’Ecole Navale et à l’université de Lille, mais
également à Paris IV Sorbonne et l’IRIS, les instituts de sciences politiques d’Aix et de
Strasbourg, le Service historique de la Défense (SHD) et le Centre d’Etudes Stratégiques
de la Marine (CESM).
Pour arbitrer ces parties, nous avons créé des règles en nous inspirant de celles du jeu
Harpoon V. Harpoon V est un excellent système, mais s’avère trop ambitieux car trop
détaillé pour des non initiés. Nous avons donc drastiquement simplifié les règles, de façon
à fluidifier le déroulement des parties. Nous avons également développé des scénarios
inspirés des opérations navales contemporaines. Le premier, qui a été joué la plupart du
temps, retrace les affrontements navals et aériens de la guerre des Malouines, en 1982.
Le second est basé sur l’opération PROMETHEE, un déploiement de la Marine Nationale
face à l’Iran en 1987-1988.
1 Le Groupe École d'application des officiers de marine (GEAOM), dit mission Jeanne d'Arc, est une
opération annuelle de la Marine nationale française qui termine la formation des officiers de marine issus
de l'École navale à bord d’un porte-hélicoptère (ici le Tonnerre).
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INTRODUCTION
Le golfe Persique est une mer quasi-fermée reliée par le détroit d’Hormuz à la mer
d’Oman, et de là, à l’Océan indien. Le Golfe et ses pays riverains contiennent les plus
importantes réserves d’hydrocarbures mondiales, et le détroit d’Hormuz voit passer depuis
des décennies une noria de navires alimentant en gaz et pétrole les pays d’Europe,
d’Amérique et d’Asie.
Dans les années 70, l’Iran s’affirme comme la puissance régionale du Moyen-Orient et le
principal allié des Etats-Unis dans cette région. Ses importants revenus pétroliers et sa
proximité avec Washington lui permettent de développer son outil militaire, en particulier
son armée de l’air. En quelques années, l’aviation iranienne s’équipe d’appareils
modernes (F-5 Tiger, puis F-4 Phantom et F-14 Tomcat) et fait former aux Etats-Unis des
centaines de pilotes et de techniciens.
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La guerre Iran-Irak et la guerre des tankers
Durant ce que l’on va appeler la guerre des tankers, les deux belligérants tentent
d’empêcher l’autre d’exporter du pétrole en s’en prenant aux infrastructures pétrolières, et
surtout aux navires suspectés de s’approvisionner chez l’ennemi. L’Irak lance ainsi de
fréquents raids aériens contre l’île de Kharg, principal terminal pétrolier iranien, et attaque
à l’Exocet les navires suspectés de commercer avec l’ennemi. L’Iran, de son côté, s’en
prend par différents moyens (marine de guerre, aviation, mines, vedettes, etc.) aux
navires à destination des pays du Golfe soupçonnés (à juste titre) de soutenir l’effort de
guerre irakien.
Un cargo attaqué par les forces iraniennes dans le golfe Persique, date inconnue
L’intensification des attaques contre les navires neutres, puis l’accident survenu à la
frégate USS Stark2 amènent les marines occidentales à s’impliquer davantage dans le
golfe Persique. En mars 1987, le président Reagan donne suite à la demande de
protection des autorités koweïtiennes, et en juillet de la même année, la marine
américaine commence à escorter des navires marchands dans le golfe Persique
(opération Earnest Will). La première mission d’escorte s’achève d’ailleurs piteusement
pour l’US Navy car un des navires escortés, le pétrolier MV Bridgeton, est endommagé
par une mine mouillée peu avant par les pasdaran 3.
2 Le 17 mai 1987, la frégate est atteinte par erreur et sérieusement endommagée par 2 missiles AM.39
Exocet tirés par un avion irakien.
3 Egalement appelés « Gardiens de la Révolution Islamique », les pasdaran sont les membres d’une milice
créée par l’ayatollah Khomeyni et servant d’armée parallèle.
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Le USS Stark désemparé par 2 Exocet
Les Etats-Unis réagissent en envoyant des renforts dans la région, en particulier des
barges servant de base à des hélicoptères des forces spéciales et à des embarcations
légères. Dans la nuit du 21 au 22 septembre 1987, des hélicoptères américains
surprennent un bâtiment iranien, l’Iran Ajr, en train de mouiller des mines, et
l’arraisonnent. Ce revers dissuade les Iraniens de poursuivre leur stratégie de minage du
golfe Persique et les amène à utiliser d’autres moyens.
Le 16 octobre, le pétrolier MV Sea Isle City est atteint dans les eaux territoriales
koweïtiennes par un missile sol-mer Silkworm tiré depuis la péninsule de Fao (ou al-Fāw),
alors occupée par l’Iran. Trois jours plus tard, la marine américaine lance en représailles
l’opération Nimble Archer, au cours de laquelle des navires de guerre américains
détruisent au canon deux plates-formes pétrolières utilisées comme postes d’observation
et bases de vedettes par les Iraniens.
Une plate-forme du champ de Rostam incendiée lors de l’opération Nimble Archer, 19 octobre 1987
La vigoureuse riposte américaine, ainsi que la situation difficile du front irakien incitent
l’Iran à éviter les confrontations avec les Etats-Unis. Les attaques contre le trafic neutre
commercial continuent, mais les Iraniens ne s’en prennent qu’à des navires non protégés,
et dont l’attaque n’est pas susceptible de provoquer des représailles.
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La dégradation du front irakien, au printemps 1988, amène l’Iran à adopter de nouveau
une stratégie de minage du golfe Persique. Le 14 avril 1988, la frégate USS Samuel B.
Roberts heurte une mine iranienne et n’est sauvée que de justesse. En représailles, la
marine américaine lance l’opération Praying Mantis.
La frégate Sahand, accablée par trois Harpoon, deux AGM-123 Skipper II et deux bombes à sous-munitions
Le 20 août 1988, la guerre Iran – Irak prend fin. Elle a fait de 500.000 à plus d’un million
de morts et laisse deux pays exsangues. Pis, elle porte les germes de difficultés et de
tragédies à venir. Les épreuves subies par l’Iran 4 renforcent la détermination de ses
dirigeants à se doter de l’arme nucléaire, seul moyen à leurs yeux de sanctuariser le pays.
Pareillement, la gigantesque dette irakienne accumulée durant le conflit explique pourquoi
Saddam Hussein s’empare du Koweit durant l’été 1990.
4 L’Iran a subi l’essentiel des pertes lors du conflit et failli être battu par l’Irak, qui a utilisé des armes
chimiques sur une grande échelle, sans subir l’opprobre de la communauté internationale.
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Le contentieux franco-iranien et l’opération Prométhée
Les Etats-Unis ne sont pas le seul pays avec lequel l’Iran entretient des relations
exécrables. Les autorités iraniennes reprochent à la France le soutien qu’elle apporte à
l’Irak5 et son refus de régler un important contentieux financier entre les deux pays 6.
Pendant les années 80, les Iraniens essaient d’infléchir la position française à l’aide
d’attentats7, de prises d’otage8 et d’attaques de navires dans le golfe Persique.
5 La France est le deuxième fournisseur d’armes de l’Irak (après l’U.R.S.S.), et soutient l’Irak au point de lui
prêter 5 Super Etendard de la Marine Nationale, le temps que soient livrés des avions capables de tirer
l’Exocet (Mirage F1EQ).
6 En 1974, l’Iran prête un milliard de dollars à la France dans le cadre d’un accord de coopération nucléaire
(construction de l’usine Eurodif). Après la révolution islamique, l’Iran rompt l’accord et demande la
restitution du prêt, ce que la France refuse.
7 En particulier celui perpétré à Beyrouth le 23 octobre 1983 contre le poste « Drakkar », qui tue 58
hommes du 1er RCP.
8 Entre 1985 et 1988, différents groupes terroristes affiliés à l’Iran prennent en otage une douzaine de
français, dont le sociologue Michel Seurat qui mourra en captivité.
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Un affrontement hypothétique : l’opération Mante Religieuse
9 La frégate Jean de Vienne est historiquement entrée dans un champ de mines le 16 avril 1988 mais a
heureusement réussi à s’en extirper.
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DOSSIERS DE SCENARIO
Théâtre d’opérations
Le golfe Persique et la mer d’Oman sont fréquentés par de nombreux navires marchands
(principalement des cargos et porte-containers, mais aussi de grands pétroliers). La
navigation est particulièrement dense (approximativement un navire touts les 30 mn) dans
le détroit d’Hormuz. Le rail de navigation longeant la côte iranienne, qui dessert l’Iran et
les pays du nord du Golfe Persique (Arabie Saoudite, Bahrein et Koweit) est également
très fréquenté (un navire par heure en moyenne). D’autres lignes de navigation un peu
moins fréquentées (un navire toutes les 2 heures) convergent de la mer D’Oman au
détroit d’Hormuz, ou desservent le Qatar et les Emirats Arabes Unis. Le trafic maritime
civil repose également sur une multitude de boutres, qui naviguent entre les rives nord et
sud du golfe Persique, et de navires spécialisés (en particulier des remorqueurs) évoluant
surtout à proximité des plate-formes pétrolières entre le Qatar et les EAU.
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De nombreux navires militaires de pays tiers évoluent dans le théâtre d’opérations. Un
groupe aéronaval américain. La Middle East Task Force, basée à Bahrein, comprend une
dizaine de bâtiments de guerre et de soutien, dont un porte-hélicoptères. Ces navires
patrouillent principalement dans le nord du Golfe Persique mais il une ou deux unités se
trouvent à l’est du Qatar. Le détachement naval britannique, appelé Armilla Patrol (4
chasseurs de mines et 3 frégates), se trouve actuellement devant Khor Fakkan. L’union
Soviétique a déployé plusieurs navires dans le Golfe Persique et la mer d’Oman. Enfin,
les nations riveraines ont généralement au moins un bâtiment en mer en permanence.
Le trafic aérien neutre est également très dense. De nombreux avions de ligne sillonnent
le ciel de la région et rendent nécessaire l’identification des contacts aériens. Les vols
d’hélicoptères sont également fréquents, principalement entre les monarchies du Golfe et
les sites de production d’hydrocarbures (îles et plate-formes). Le trafic militaire est
également important : les deux belligérants font de fréquentes incursions dans le Golfe,
l’Arabie Saoudite y maintient en permanence des patrouilles de chasseurs, et les Etats-
Unis ont déployé dans la région des avions de guet aérien E-3F Sentry et des avions de
patrouille maritime P-3 Orion.
La densité du trafic dans le Golfe impose un strict respect des règles de navigation pour
éviter les collisions. A l’époque, l’AIS (Automatic Identification System) n’existe pas, et les
navires gèrent leur proximité avec les navires et aéronefs proches en les hélant. La
procédure consiste à contacter le bateau ou l’avion concerné par radio, sur les fréquences
internationales, à s’identifier et à lui demander de s’identifier à son tour. Un navire de
guerre interrogé de la sorte peut bien évidemment mentir ou garder le silence, mais tout
navire ou aéronef refusant de répondre devient bien évidemment suspect.
Enfin, l’Iran chiite entretient des relations exécrables avec les autres pays du Golfe
Persique (à l’exception notable du sultanat d’Oman), majoritairement sunnites. Les
Monarchies du golfe, faibles et divisées, soutiennent Irak mais craignent l’Iran. Ils
réagissent peu à ses provocations et recherchent le soutien occidental.
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Informations pratiques
Les opérations commencent le 21 avril 1988, à 0500. La mer est calme (force 2 sur
l’échelle de Douglas, 3 sur celle de Beaufort) mais la visibilité est initialement médiocre à
cause de la brume, qui devrait cependant se dissiper en milieu de journée. Le crépuscule
commence à 1900, et la visibilité est équivalente à celle pendant l’aube. La nuit tombe à
1930.
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France
Ordre de bataille
La TF 623.1 regroupe les bâtiments en opérations dans le Golfe Persique tandis que le
porte-avions et son escorte forment la TF 623.2 ; la force de guerre des mines déployée
en mer d’Oman est la TF 623.3. L’ALINDIEN peut réorganiser ce dispositif à sa
convenance. Les navires sont placés librement sur la carte, à l’exception du porte-avions
qui est en mer d’Oman.
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Objectifs des opérations et règles d'engagement
Les règles d’engagement doivent être précisées par l'ALINDIEN (amiral commandant la
zone Océan indien) à partir des consignes générales suivantes :
• Le navire de guerre choisi comme objectif principal peut être engagé sans préavis.
• Les navires attaquant une plate-forme doivent laisser au personnel 5 à 10 mn pour
évacuer les lieux avant d’ouvrir le feu.
• Un navire de guerre autre que celui sélectionné comme objectif principal peut être
engagé s’il adopte une posture menaçante, après plusieurs sommations.
• Un aéronef peut être engagé en légitime défense, ou après sommation s’il
s’approche en radiale pure et basse altitude à 15 nm de navires français.
• Toutes les cibles doivent être identifiées avec certitude avant l'ouverture du feu,
afin d'éviter d'engager une unité neutre ou amie.
• L’ALINDIEN peut autoriser l’ouverture du feu en dehors de ces règles
d’engagement si la situation l’exige.
Les opérations doivent être déterminées sans pour autant entraîner la France dans un
conflit ouvert avec l’Iran. Elles doivent être menées de façon à limiter au maximum les
pertes. Les dommages collatéraux doivent être évités à tout prix.
Pareillement, il est important de ne pas laisser les Iraniens effectuer des représailles
contre des navires ou plate-formes neutres pendant l’opération.
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Iran
Ordre de bataille
• Marine
le Joshan est en mer (bord nord-ouest de la carte). Les autres sont en état d’alerte, mais
divers problèmes (en premier lieu leur condition matérielle précaire) ne leur permettent
pas d’appareiller immédiatement. Les délais d’appareillage sont :
Tabarzin et Khanjar : 1 heure
Sahand : 2 heures
Sabalan : 4 heures
Kharg : 6 heures
Palang : 8 heures
Damavand : 12 heures
Les hélicoptères peuvent être déployés à bord de navires (destroyers ou pétrolier), ou sur
les bases aériennes et plate-formes pétrolières de Lavan, Kish, Abu Musa, Rostam Sirri,
Sassan, Reshadat et Rakish.
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• Armée de l’air
Les forces aériennes iraniennes ne disposent plus, compte-tenu des pertes et du manque
de pièces détachées que d’une soixantaine d’appareils partiellement opérationnels
(environ 25 F-5E Tiger II, 25 F-4 Phantom et 10 F-14 Tomcat), et n’ont pas de moyens de
se procurer de nouveaux aéronefs. Toute perte sera donc cruellement ressentie. L’Iran
dispose dans la région des moyens suivants :
Les aéronefs souffrent d’un manque criant de pièces détachées et peu d’entre eux sont
pleinement opérationnels. Seuls les chasseurs de Bandar Abbas disposent d’un radar
opérationnel. Les radars des autres appareils sont hors-service. L’avionique air-sol (viseur
de bombardement) et le brouilleur défensif des chasseurs est également inopérante.
Les senseurs des P-3F sont hors-service.
• Gardiens de la révolution
Les Gardiens de la Révolution Iranienne ont une vingtaine de vedettes à Abu Musa et
deux batteries de missiles terre-mer Silkworm (l’une à Bandar Abbas et l’autre à 20 nt au
sud de Kuhestak). Pour rappel, le tir de Silkworm dans le détroit d’Hormuz risque de
provoquer des représailles américaines.
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Objectifs des opérations et règles d'engagement
Les officiers supérieurs dirigeant l’opération ont carte blanche pour en définir les modalités
précises (objectifs, règles d’engagement, etc.), pour peu qu’ils atteignent les objectifs
fixés.
Pour autant, les opérations s’inscrivent dans le cadre plus vaste de la guerre contre l’Irak,
ce qui impose certaines contraintes :
• Ne pas prendre l’initiative des hostilités (les Français doivent apparaître comme les
agresseurs) ; dès que l’ennemi a entamé les hostilités, toutes ses unités peuvent
être engagées librement.
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DEROULEMENT DE LA PARTIE
Les deux équipes ont, pour des raisons diverses (manque de temps et d’expérience,
imprécisions du dossier de scénario), éprouvé des difficultés pendant la phase de
planifications, mais sont au final parvenues à élaborer un plan d’opération cohérent.
Les premières heures de jeu sont peu animées. Les équipes peinent à prendre des
décisions et à les traduire en ordres concrets exploitables pour les arbitres. A 0500
cependant, les F-4E de Busher décollent pour rejoindre Bandar Abbas, tandis qu’un P-3
iranien part explorer la mer d’Oman. Sans radar, ce dernier n’a pas d’autre alternative que
la reconnaissance à vue. Malheureusement pour les Iraniens, l’appareil évolue dans le
sud de la mer d’Oman, à proximité des côtes omanaises et émiraties, et ne peut détecter
le groupe aéronaval français, qui est plus au nord. A 0530, le Clemenceau identifie le
comportement suspect de cet aéronef mais ne réagit pas. A 0600, le porte-avions lance
une patrouille de deux chasseurs.
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A 0650, c’est au tour du Joshan d’être hélé par la frégate américaine. Le patrouilleur reste
d’abord silencieux pour ne pas alerter les Français de sa présence, mais finit par
s’identifier devant les menaces américaines. L’information est prise, et comprise par la TF
623.1, qui découvre alors qu’un navire de guerre ennemi est à proximité.
A 0700, la frégate Sahand quitte Bandar Abbas, et plusieurs aéronefs (un Alizé et deux
AB-212 basés à Lavan) décollent. L’Alizé doit reconnaître les abords du détroit d’Hormuz ,
tandis que les AB-212 sont chargés de trouver les navires français dévoilés par la frégate
américaine. La reconnaissance iranienne s’avère au final inutile car au même moment, la
TF 623.1 arrive devant la plate-forme de Reshadat et intime l’ordre à ses occupants
d’évacuer les lieux au plus vite. Quelques minutes plus tard, les navires français ouvrent
le feu. Un coup heureux déclenche un incendie qui incinère la plate-forme.
10 BOL : Bearing Only Launch. Tir d’un missile dans la direction d’une cible, sans en connaître la position
exacte. L’autodirecteur du missile est activé dès son lancement.
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Le Lynx rejoint le patrouilleur iranien en quelques minutes et lui ordonne de se dérouter.
Le Joshan ne changeant pas de cap, l’hélicoptère l’engage avec un missile filoguidé
AS.12. Le navire iranien ouvre alors le feu avec son canon antiaérien de 76 mm. Fort
prudemment, l’hélicoptère descend à basse altitude, effectue des manœuvres évasives
puis se met hors de portée de l’artillerie ennemie. Le missile, abandonné à lui-même,
tombe dans la mer. Le Joshan met alors le cap au sud, en direction de la TF 623.1, tandis
que les hélicoptères partis de Lavan à 0700 l’informent de la position des navires français.
Durant les minutes qui suivent, l’escadre française envoie plusieurs ultimatum au
patrouilleur iranien, qui restent sans réponse. A 0800, la frégate Montcalm abat sur bâbord
et lance deux missiles MM40 Exocet, au moment où le Joshan tire son unique Harpoon.
Les Exocet, plus rapides que le Harpoon, atteignent leur cible en premier. Un des deux
missiles atteint le Joshan et le réduit à l’état d’épave incandescente. Le deuxième missile
continue sa route, manque de peu d’accrocher un destroyer soviétique en patrouille et finit
par atteindre un pétrolier se dirigeant vers le terminal pétrolier de Kharg.
Le Harpoon est engagé par le système antiaérien Masurca de la frégate Duquesne, sans
succès. Il se verrouille sur l’aviso Victor Schoelcher, et traverse sans dommages le mur de
feu édifié par l’artillerie du Suffren et des avisos escorteurs. Leurré par le Schoelcher, le
missile poursuit sa route et acquiert le Bory, qui parvient à le leurrer à son tour. Continuant
sa route, il croise celle de la frégate Montcalm, qui l’engage avec son système antiaérien
courte portée Crotale et avec sa pièce de 100 mm. Le Harpoon échappe aux défenses de
la frégate, mais manque de nouveau sa cible. Il poursuit sa route et finit par frapper une
des plate-formes du complexe de Sassan.
La destruction du Joshan fait basculer la partie dans un autre schéma. Les hostilités entre
la France et l’Iran sont désormais clairement ouvertes, et le centre de gravité des
opérations bascule vers la mer d’Oman.
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Mêlée ouverte en mer d’Oman
A 0815, le Clemenceau met en l’air une nouvelle patrouille de Crusader. Ces derniers sont
repérés quelques minutes plus tard par le radar de Bandar-e Jask, lorsque les deux
chasseurs prennent de l’altitude. L’équipe iranienne saisit la valeur de cette information et
comprend que le groupe aéronaval français est à proximité. Elle décide d’organiser une
reconnaissance avec la seule unité disponible, un hélicoptère basé à Bandar-e Jask. Au
même moment, le radar du Clemenceau détecte à nouveau un P-3 Orion iranien, ayant
décollé il y a peu de Bandar Abbas.
Contre toute attente, les Français décident d’envoyer leurs chasseurs éloigner l’intrus,
bien que celui-ci soit fort loin (plus de 100 nautiques du porte-avions). A 0825, le radar de
Bandar Abbas, aidé par la frégate Sahand, détecte enfin l’Alizé qui patrouille à l’entrée du
détroit d’Hormuz. Les Iraniens décident de faire décoller deux chasseurs en alerte +15
pour abattre l’appareil français.
A 0831, les deux Crusader interceptent le P-3 Orion iranien et le somment de quitter les
lieux. L’avion de patrouille maritime n’a pas d’autre choix que d’obtempérer, et se replie
vers le nord. Les deux Crusader prennent position un peu plus au sud.
A 0840, les deux F-4 Phantom décollent de Bandar Abbas. L’Alizé capte les émissions de
leurs radars et se déroute vers le sud à très basse altitude, en appelant à l’aide. Les
Français ordonnent aux deux Crusader de lui porter assistance. Quelques minutes plus
tard, les chasseurs des deux camps se détectent mutuellement au radar. Les Phantoms
iraniens tirent chacun un missile moyenne portée Sparrow, à guidage radar, que les deux
chasseurs français parviennent à éviter. Désormais au contact, les quatre appareils
engagent alors un combat tournoyant, au canon et au missile courte portée.
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A 0850, alors que le combat aérien prend fin, un hélicoptère AB-212 décolle de Bandar-e
Jask pour localiser la flotte française. Il n’en aura pas le temps : il est rapidement détecté
par le Clemenceau puis abattu par une patrouille de Crusader qui vient de décoller.
A 0900, alors que la TF 623.1 attaque la plate-forme de Sassan, les deux camps
organisent des raids aériens pour frapper l’adversaire. L’équipe française a décidé
d’attaquer les navires iraniens repérés dans le détroit d’Hormuz et organise un raid de
plusieurs Super Etendard escortés par pas moins de quatre Crusader.
De leur côté, les Iraniens travaillent à un plan très bien pensé et ambitieux consistant à
attaquer le porte-avions Clemenceau simultanément de trois directions à la fois, afin de
saturer les défenses françaises. Le premier groupe est composé de quatre Phantom de
Bandar Abbas, dont deux gréés en chasse, et doit attaquer par l’ouest. Le second,
également composé de 4 Phantom de Bandar Abbas (tous armés de bombes), doit lui
attaquer par le nord, en passant à proximité de Bandar-e Jask. Le troisième raid est
constitué des deux chasseurs-bombardiers de Chah Bahar (gréés en bombardiers), et
doit attaquer par l’est. Les plans de vol sont étudiés de façon à ce que les trois groupes
convergent approximativement au même moment sur l’objectif. La difficulté est qu’il est
impossible de coordonner parfaitement les trois groupes étant donné que la position
exacte de la cible n’est pas connue.
Peu avant 1000, les appareils des deux camps commencent à décoller. A 1010, le groupe
d’attaque ouest iranien et le raid français entrent en collision à l’entrée du détroit
d’Hormuz. Les chasseurs iraniens tirent des missiles moyenne portée Sparrow, sans
succès, et les appareils engagent alors un combat tournoyant.
Le chef de patrouille français accroche une cible et tire deux missiles Magic, qui ratent. En
retour, un pilote iranien tire un missile Sidewinder, qui manque également sa cible.
Rapidement, les pilotes français, qui ont l’avantage du nombre et d’avoir un appareil plus
agile que le lourd Phantom, prennent l’avantage. Le leader français abat un appareil au
canon, tandis que son ailier en détruit un autre au missile. Les pilotes des deux Phantoms
gréés en bombardiers n’ont pas d’autre choix que de larguer leurs bombes pour tenter de
défendre leur vie. Ils sont cependant vite coiffés par leurs homologues français, et détruits
par des missiles Magic.
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Les Super Etendard ont désormais le champ libre. A 1015, ils repèrent la frégate Sahand
et le patrouilleur Tabarzin dans le détroit d’Hormuz. Deux minutes plus tard, ils lancent sur
chaque navire deux missiles air-mer AM.39 Exocet. La frégate est atteinte par deux
Exocet et incendiée. Le patrouilleur est frappé par un missile et explose.
Les Français, qui exultent à juste titre, prennent la précaution de faire décoller une
nouvelle patrouille de combat. Cette patrouille est détectée à 0820 par le radar de Bandar-
e Jask lorsqu’elle prend de l’altitude. Le radar dirige alors les groupes d’attaques nord et
est vers le groupe aéronaval français.
A bord du Clemenceau, c’est la douche froide lorsque le groupe d’attaque centre est
détecté, à 17 nautiques au nord du porte-avions. La patrouille de combat tente de
s’interposer, mais l’un des deux Crusader est abattu par un missile Sparrow tiré par un
des Phantom, tandis que l’autre ne parvient pas à se mettre en position de tir. Surpris,
l’escorteur d’escadre Du Chayla ne parvient pas à engager les assaillants et seul le
Clemenceau est en mesure d’ouvrir le feu. Si le tir de l’artillerie antiaérienne est inefficace,
le système antiaérien Crotale abat un des avions.
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L’un après l’autre, les trois appareils survivants larguent un chapelet d’une douzaine de
bombes sur le porte-avions. La chance sourit aux français, car aucune d’entre elles
n’atteint le Clemenceau.
L’équipe française n’a cependant pas le temps de se remettre de ses émotions, car de
nouveaux contacts aériens (le groupe est, parti de Chah Bahar) est détecté à une
trentaine de nautiques à l’est. Le Crusader restant l’intercepte, et est engagé sans succès
au missile Sparrow. Il tire alors ses deux Magic sur un des Phantom, mais les deux
missiles ratent. Sans missiles, il abandonne une poursuite, désormais hasardeuse, pour
libérer l’arc de tir de l’escorteur d’escadre Du Chayla. Ce dernier tire une salve de deux
missiles SM1MR qui, sans surprise, ratent leur cible (ils ne sont pas conçus pour engager
une cible volant au raz des flots).
Le Clemenceau, une fois de plus livré à lui-même, met en œuvre son armement. Les
pièces de 100 mm ouvrent le feu, sans grand effet, tandis que le système Crotale refuse
de fonctionner.
Les deux appareils, à leur tour, passent à l’attaque. Et une fois de plus, la chance
française tient : les bombes encadrent le porte-avions sans l’atteindre.
Cette ultime attaque clôt la partie, qui s’achève sur une victoire française totale : l’Iran est
humilié et a subi des pertes rédhibitoires (une frégate, deux patrouilleurs, six chasseurs-
bombardiers Phantom et un hélicoptère AB-212), tandis que les forces françaises ont
atteint leurs objectifs sans déployer de force excessive ni subir de pertes importantes (un
avion et son pilote perdus).
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COMMENTAIRES ET ANALYSE
Les plans d’opérations des deux camps ne sont pas parfaits (la planification du raid sur la
plate-forme de Sirri est erronée ou tout au moins insuffisante) mais restent satisfaisants,
dans la mesure où chaque camp a défini un objectif prioritaire et a assigné des moyens et
une ligne de conduite cohérents avec cet objectif.
Il est frappant de constater que les deux équipes ont fait le choix d’une prise de risque
élevée. Les Iraniens ont adopté une stratégie du type « tout ou rien » en choisissant
d’attaquer le centre de gravité du dispositif adverse. Ce choix, tout à fait légitime, consiste
à accepter des risques importants, en vue de gains potentiels importants eux aussi. Les
Français, quant à eux, ont décidé d’exposer leur porte-avions pour protéger au maximum
la TF 623.1. Cette décision est, elle aussi, légitime, mais offre à l’Iran l’opportunité d’une
victoire majeure.
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Quelques inévitables erreurs et un coup du sort
Plusieurs petites erreurs ont été commises pendant la partie, et c’est tout à fait normal. Il
ne s’agit que de péché véniels inévitables, en aucun cas incohérents ou absurdes. La
première chose à relever tient aux interactions avec la frégate américaine Samuel B.
Roberts. Les deux équipes se sont dévoilées lorsqu’elles sont été hélées, alors qu’elles
auraient pu mentir. Une occasion de rester caché a été perdue.
La façon dont les navires étaient disposés au sein de la TF 623.1 n’était pas optimale. Elle
a permis au Harpoon d’accrocher successivement trois navires. Les Français ont été très
chanceux de ne pas perdre un navire dans l’échange de tirs. Il aurait été préférable
d’adopter une formation en ligne de front dès la détection du Joshan.
L’organisation du raid français appelle quelques commentaires. Mobiliser les deux tiers de
la chasse française pour escorter un raid m’a initialement semblé être une erreur. La
tournure des évènements a une fois de plus transformé une possible erreur en précieux
atout. La puissance de la chasse française a permis d’abattre quatre appareils iraniens et
de protéger efficacement les Super Etendard (qui ont coulé par la suite deux navires de
guerre). On peut par contre déplorer le sous-emploi de certains appareils, en particulier,
les Super Etendard qu’il fallait à mon sens utiliser pour renforcer la défense aérienne du
groupe aéronaval.
L’organisation des raids iraniens ne soulève par contre aucune réserve. La collision entre
le groupe d’attaque ouest et le raid français est un impondérable, certes dramatique pour
l’équipe iranienne, et ne relève pas de choix hasardeux. Il n’y avait pas mieux à faire,
compte-tenu de ce que les joueurs savaient.
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Une victoire totale mais à l’arraché
Le caractère sans appel de la victoire française ne signifie pas pour autant que l’équipe
iranienne a démérité. Elle a élaboré un plan d’opération risqué mais cohérent, et a dans
l’ensemble bien joué, faisant plutôt moins d’erreurs que son homologue française. Les
Français ont certes bien joué eux aussi, mais leur victoire tient avant tout à leur chance
insolente. Ils ont, à plusieurs reprises, été favorisés par le sort.
Un rapide calcul statistique montre qu’il y avait deux chances sur trois pour qu’un navire
de la TF 623.1 soit atteint par le Harpoon, et autant pour que le Clemenceau soit touché
par au moins une bombe. Il y a avait donc presque 90 % de chances pour que les
Français aient un navire sérieusement endommagé, et donc soient déclarés perdants. La
victoire française n’a tenu qu’à quelques bons jets de dés ...
Bien que cela puisse être légitimement frustrant pour l’équipe iranienne, cela n’a rien de
surprenant ni de scandaleux. Le hasard, la chance ont une place importante dans les
opérations réelles (comme en témoigne la destruction rapide et inattendue du cuirassé
Hood par son homologue allemand Bismarck pendant la bataille du détroit du Danemark,
le 24 mai 1941), ce qui amenait Bonaparte à préférer un général chanceux à un qui soit
compétent.
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CONCLUSION
Ce fut une très belle journée, à la fois agréable et pleine d’enseignements. Après une
inévitable période de rodage, pendant la matinée, les équipes se sont organisées et se
sont fort bien comportées. La victoire française, totale mais sur le fil du rasoir, est au final
secondaire car l’essentiel n’est pas là. Un wargame conçu et animé comme un serious
game, ne vise pas à désigner un vainqueur et un vaincu, mais se pose comme un outil
pédagogique et prospectif.
Plus précisément, ce wargame avait plusieurs objectifs affichés : initier les participants à
la pratique du wargame de façon à ce qu’ils puissent mesurer par eux-même le potentiel
et les limites de l’outil ; mettre en exergue de façon dynamique et efficace un épisode clé
de l’histoire navale contemporaine ; infuser la culture militaire (ici navale) en insistant sur
la complexité et l’intrication des opérations militaires ainsi que sur l’importance de la
planification. Nous espérons que ces objectifs ont été atteints.
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