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REVUE MÉDICALE SUISSE
Trou anionique
FIG 2 Strong Ion Difference (SID)
Pour caractériser une AM, il convient d’évaluer le trou anio- Représentation schématique de la différence en ions forts selon Stewart.
nique (TAN). Le TAN correspond à la différence entre les UA : autres anions forts.
concentrations plasmatiques des cations (Na+ et K+) et des Cations Anions
anions mesurés (Cl– et HCO3–) (figure 1). Le plasma étant
électro-neutre, il correspond donc à la somme des concentra- B +
A–
tions plasmatiques de tous les anions à l’exception du chlorure
et du bicarbonate. Dans des conditions normales, les anions
contribuant au TAN sont l’albumine, le phosphate et les anions Ions
organiques. Les autres anions (lactate, sulfate et l’ensemble forts Cl–
des autres protéines) y contribuent de manière très limitée Na + (100 %)
(< 2 mmol/l). Le TAN normal est de 12 ± 4 mmol/l. Un TAN dissociés)
> 16 mmol/l signe la présence quantitativement anormale dans
le plasma d’autres anions non dosés (sulfate, lactate, corps Lactate–
cétoniques, toxiques). Aux soins intensifs, s’ajoutent à cette UA–
SID
K+
HCO3–
faibles
Ca++
Mg++
En outre, l’hypoalbuminémie est relativement fréquente chez
les patients de réanimation et peut conduire à une sous-esti-
mation du TAN. La formule suivante permet de corriger le • La masse totale des anions faibles (Atot) : essentiellement
TAN pour l’albuminémie : a lbumine et phosphate.
TAN corrigé = TAN calculé + 0,25 × (40 – albuminémie mesurée [g/l]). Ce concept repose sur la loi de dissociation de l’eau (H2O
↔ H+ + OH–). Sur cette base, elle décrit un effet alcalinisant
des cations dont l’apport est, via la dissociation de l’eau, asso-
Différence des ions forts et anions faibles totaux cié à un apport d’OH-. A l’inverse, il y existe un effet acidifiant
(approche de Stewart) des anions (car associé à un apport de H+). Ainsi toute aug-
mentation relative du contenu en cation par rapport aux
Sans vouloir entrer dans les détails ni dans la controverse qui anions (SID) va être assortie d’une alcalinisation de la solution
l’entoure, la théorie de Stewart offre une vision complémen- et vice versa. La valeur normale du SID est de 40 ± 2 mmol/l.
taire de la composante métabolique des anomalies acido-ba-
siques.8,9 Très brièvement, selon cette théorie, la composante Les deux facteurs « métaboliques » d’une acidose sont donc le
métabolique d’une anomalie acido-basique n’est pas expli- SID et la valeur des anions faibles Atot. Une augmentation du SID
quée par des variations du taux plasmatique de bicarbonate. est associée à une alcalinisation du plasma, tandis qu’une aug-
Au contraire, ce taux, de même que celui des protons et donc mentation des Atot est associée à une acidification du plasma.
le pH, résulte d’un équilibre faisant intervenir trois variables
indépendantes : L’approche de Stewart permet d’expliquer certains troubles
• La PaCO2. acido-basiques comme l’AM associée à un apport excessif de
• La différence des ions forts (DIF ou SID en anglais) : chlore (cf. infra).10
(Na++K++Mg2++Ca2+) – (Cl–, lactates et autres anions forts)
(figure 2).
PRINCIPALES CAUSES D’ACIDOSE MÉTABOLIQUE
FIG 1 Calcul du trou anionique (TAN) AUX SOINS INTENSIFS
En pratique, le TAN est calculé de la façon suivante : Na++ K+ – (Cl– + HCO3–) ; Sur le plan physiopathologique, une AM peut s’expliquer par
valeurs normales 12 ± 4. Certaines formules omettent le K+ comme cet ion a une une augmentation de la concentration des anions organiques
faible concentration et est très finement régulé.
(par exemple, lactate ou bêta-hydroxybutyrate), un gain
Cations Anions d’anions exogènes ou par une perte de bicarbonates. La
K + figure 3 propose une systématique pour l’analyse d’un dé-
TAN
sordre acido-basique.
HCO3–
Acidoses métaboliques à TAN élevé
Un trou anionique augmenté indique une accumulation exo-
Na+ gène ou endogène d’acide, soit par augmentation de la pro-
Cl– duction, soit par défaut d’élimination.11
Acidose lactique
L’acidose lactique (AL) est l’une des causes principales d’AM
aux soins intensifs. Toute hyperlactatémie n’est pas néces
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