Vous êtes sur la page 1sur 346

GREGG BRADEN

- -
VERITE
ESSENTIELLE

www.editions-ariane.com
Autres livres de Gregg Braden
édités aux Éditions Ariane

Divine Matrice
Temps Fractal
Guérison spontanée des croyances
I.: éveil au point zéro

Vous pouvez dorénavant commander nos livres


directement sur le site internet de notre boutique

www.editions-ariane.com/boutique/

vous pouvez également commander tous nos livres


en librairie ou chez nos diffuseurs

Canada : ADA Diffusion-(450) 929-0296 - www.ada-inc.com


France, Belgique: DG DIFFUSION -05.61.000.999 -www.dgdiffusion.com
Suisse: Servidis diffusion -23.42.77.40 -www.servidis.ch/
GREGG BRADEN

,;.. ,;..

VERITE
ESSENTIELLE
Activer la mémoire
de nos origines,
de notre histoire
et de notre destinée.

Traduit del'américain par Louis Royer

~RIANE
www.editions-ariane.com
Titre original anglais :
Deep truth : lgniting the Memory of our Origin,
History, Destiny, and Fate
ISBN (version anglaise): 978-1-4019-2919-0
© 2011 par Gregg Braden
Publié par Hay House, lnc.: www.hayhouse.com

© 2012 pour l'édition française


Ariane tditions lnc.
1217, av. Bernard o.. bureau 101, Outremont, Qc Canada H2V 1V7
Tél.: (514) 276-2949, Fax.: (514) 276-4121
Courrier électronique: info@editions-ariane.com
www.editions-ariane.com
www.editions-ariane.com/boutique/
www.facebook.com/EditionsAriane
www.youtube.com/user/EditionsAriane/videos

Tous droits réservés

Mise en page: Entreprise KVSL


Couverture : Carl Lemyre
Traduction : Louis Royer
Révision : Monique Riendeau
Première impression: juillet 2012
ISBN: 978-2-89626-110-9

Dépôt légal: 3er trimestre 2012


Bibliothèque nationale du Québec
Bibliothèque nationale du Canada
Bibliothèque nationale de Paris

Diffusion
Canada: ADA Diffusion-(450) 929-0296-www.ada-inc.com
France, Belgique: D.G. Diffusion-05.61.000.999- www.dgdiffusion.com
Suisse: Transat-23.42. 77.40 - http://www.servidis.ch/

Gouvernement du Québec - Programme de crédit d'impôt


pour l'édition de livres - Gestion SODEC

Imprimé au Canada
TABLE DES MATIÈRES
Introduction .............................................................................. ix
. 1:
Ch apure Qut. sommes-nous.~ E n quete
' aeJ
notre taentite
•J • '
.......... 1

Chapitre 2 : La vérité profonde des suppositions fausses :


des découvertes qui changent tout ........................... 19

Chapitre 3 : Au bord du gouffre : Survivre aux points de bascule


du changement...................................................... 53

Chapitre 4 : L'histoire occulte de notre passé oublié:


des lieux qui ne devraient pas exister .................... 101

Chapitre 5 : Par hasard ou délibérément : témoignages


nouveaux sur les origines de l'humanité ............... 149

Chapitre 6 : La guerre ne fonctionne plus : pourquoi nous


sommes génétiquement programmés pour la paix .. 199

Chapitre 7 : La fin de la partie : réécrire notre histoire,


notre destinée et notre avenir................................ 241

Notes ................................................................... 283


Remerciements .................................................... 299
À propos de l'auteur ............................................ 303
« Toute vérité profonde
se caractérise par le fait que
son contraire est également
une vérité profonde. »
- NIELS BOHR (1885-1962)
PRIX NOBEL DE PHYSIQlJE
Un monde nouveau prendforme sous nos yeux. Parallèlement,
le monde révolu qui n'est plus viable lutte pourtant afin de se
maintenir. Les deux mondes traduisent les croyances qui les ont
engendrés. Les deux continuent d'exister - temporairement.

Depuis le terrorisme international, la ruine des économies et la


guerre jusqu'aux croyances intimes sur l'avortement, les relations
et la famille, les questions qui nous divisent reflètent notre vision
de nous-mêmes et du monde. Ces schismes marqués indiquent
également qu'il faut désormais aborder sous un autre jour les
relations qui nous tiennent le plus à cœur.

De récentes découvertes sur nos origines, notre passé et nos idées


arrêtées au sujet de notre existence incitent à revoir les croyances
traditionnelles définissant notre monde et nos vies - croyances
issues de présupposés inexacts dictés par une approche scientifique
insuffisante et désuète. Une fois ces croyances remaniées, les
solutions aux problèmes de la vie s'imposent naturellement et les
choix sont évidents.

Cet ouvrage cherche à dévoiler les vérités les plus profondes au


sujet de la vie humaine, sous le jour des découvertes scientifiques,
des vérités qu'on ne retrouve pas encore dans les manuels scolaires
ni dans les écoles; pourtant, elles sous-tendent notre vision du
monde, de l'autre et de nous-mêmes.
INTRODUCTION

Une seule question sous-tend le cœur même de notre


existence.
Il s'agit de la question tacite sur laquelle repose chaque choix
que nous effectuerons. Elle réside dans tous les défis que nous
aurons à relever et forme la base de toutes les décisions que nous
aurons à prendre. Si Dieu comptabilisait les questions qui préoc-
cupent le plus l'être humain, c'est celle-ci qui, sans l'ombre d'un
doute, aurait fait exploser le compteur, si bien que même Dieu
aurait perdu le compte du nombre de fois qu'elle aura été posée.
La question d'où découlent toutes les autres, celle qu'ont
posée sans fin un nombre incalculable d'individus au cours de
nos 200 000 années d'existence sur terre, c'est simplement : «Qui
sommes-nous ?»
Même si cette question semble simple et succincte, la réponse
entraîne des conséquences incontournables. Elle régit chaque
instant de notre vie; à travers sa lentille, nous nous percevons
dans le monde et nous percevons nos choix. Le sens que nous
accordons à ces trois mots est omniprésent dans le tissu social. Il
transparaît dans nos actes, depuis notre choix de nourriture, le
soin que nous prenons de nous-mêmes, de nos jeunes enfants et
de nos parents.
Notre réponse à la question de savoir qui nous sommes sous-
tend les principes fondamentaux de la civilisation. Elle influe
sur notre partage des ressources, comme la nourriture, l'eau,

ix
Vérité essentielle

les médicaments et autres éléments indispensables à la vie ; le


moment et les raisons de s'engager dans la guerre; et les bases
de notre économie. Nos croyances au sujet du passé, de nos
origines, de notre destinée et de notre sort justifient même notre
attitude pour ce qui est de choisir de sauver une vie humaine ou
d'y mettre un terme.
À l'aube du xx1e siècle, après plus de 5 000 ans d'histoire,
le comble de l'ironie, c'est que nous n'avons encore apporté
aucune réponse claire à cette question primordiale à notre sujet.
Et bien que cette introspection vaille d'y investir temps, éner-
gie et ressources, elle s'avère particulièrement critique à l'époque
actuelle, ici et maintenant, alors que nous affrontons l'une des
crises les plus graves pour la survie de notre espèce.

Un péril imminent
Une raison de découvrir notre identité l'emporte sur toutes
les autres. Ce n'est pas un hasard si, aujourd'hui, après avoir
employé la méthode scientifique pour résoudre les questions les
plus fondamentales à notre sujet, nous nous retrouvons dans un
pétrin terrible ici-bas, sur la Terre. Et il ne s'agit pas d'ennuis
banals, mais bien d'adversités dont les romans et les films à
succès sont faits.
Soyons bien clairs: ce n'est pas la Terre qui est dans le pétrin,
mais plutôt nous, ses habitants. Je peux affirmer avec certitude
que notre planète existera encore dans cinquante ans, dans cinq
cents ans. Peu importe les choix que nous effectuerons au cours
de cette période - les guerres que nous livrerons, les révolutions
politiques que nous appliquerons, le degré de pollution que nous
infligerons à l'atmosphère et aux océans-, le monde que nos
ancêtres appelaient le «jardin» suivra son cours au fil des mêmes
trois cent soixante-cinq jours ou deux cent cinquante-six jours
autour du Soleil chaque année, tout comme il le fait depuis les
4,55 derniers milliards d'années.

X
Introduction

Il ne s'agit donc pas de la planète en soi, mais plutôt de savoir


si oui ou non nous serons sur la Terre pour en profiter. Serons-
nous présents pour savourer les couchers de soleil et les mystères
sensuels de la nature? Serons-nous témoins de la beauté des
saisons, auprès de notre famille et de nos êtres chers ? Comme
nous le verrons dans un chapitre ultérieur, à moins que les choses
ne changent rapidement, les spécialistes sont d'avis que non.
Pourquoi? Parce qu'en ce qui concerne ce qui s'impose
pour notre survie et celle de nos enfants, nous nous approchons
dangereusement du «point de non-retour». Ce sont les conclu-
sions d'une étude indépendante sur les changements climatiques,
sous la direction conjointe de l'ex-Secrétaire d'État aux trans-
ports britannique, Stephen Byers, et de la sénatrice américaine,
Olympia Snowe (R-Maine), publiée en 2005. Selon cette étude,
pour ce qui est uniquement de l'environnement, nous risquons
d'atteindre le point de bascule et de perdre le fragile tissu qui
supporte la vie en moins de dix ans 1 • Pourtant, l'environne-
ment n'est que l'une des nombreuses crises que nous affrontons
aujourd'hui, dont chacune peut avoir une issue fatale pour l'es-
pèce humaine.
Les esprits les plus illustres de notre époque admettent que
nous allons au-devant de multiples catastrophes - depuis le péril
de guerre endémique, l'exploitation abusive de nos ressources et
les pénuries croissantes d'eau potable et de nourriture, jusqu'au
stress insensé que nous imposons aux océans, aux forêts, aux
rivières et aux lacs. Le problème, c'est que les spécialistes ne
s'entendent pas sur les solutions à apporter à ces dilemmes.

. commen t'.
. ... mais
AglT

Analyser au préalable un problème est parfois indiqué avant


d'agir. Plus nous en savons sur une situation épineuse, plus nous
avons la certitude de détenir les meilleures solutions au dilemme.
Une longue étude n'est cependant pas toujours indiquée. Il faut

xi
Vérité essentielle

quelquefois agir promptement pour surmonter la crise immédiate


et par la suite seulement en faire l'analyse détaillée grâce au sursis
obtenu par l'action décisive.
Un scénario fictif illustrera parfaitement ce que je veux dire.
Par un jour clair et ensoleillé, en compagnie d'un ami, vous
traversez l'autoroute afin de vous rendre de votre demeure, sur un
côté de la route, à celle de votre ami, de l'autre côté. Vous êtes en
pleine conversation animée quand, soudain, vous apercevez un
gigantesque semi-remorque qui fonce droit sur vous.
Un réflexe de lutte ou de fuite se déclenche instantanément;
il vous incite à agir. Comment? Vous devez décider rapidement
d'aller de l'avant ou de faire marche arrière jusqu'au moment de
pouvoir traverser sans danger. Votre ami et vous devez faire un
choix, et vite.
Vous voilà au beau milieu de l'autoroute, trois voies devant
vous et trois voies derrière. Votre dilemme : avez-vous le temps
d'avancer vers votre destination de l'autre côté ou vaut-il mieux
rebrousser chemin ? Pour arriver à une certitude absolue, vous
auriez besoin d'informations que vous n'avez pas à cet instant.
Vous ignorez, par exemple, si le camion est vide ou chargé.
Impossible également de préciser sa vitesse ou si le chauffeur vous
a aperçus sur la route. Et vous ne pouvez pas connaître la marque
de cet engin qui fonce sur vous ni savoir s'il fonctionne au diesel
ou au gaz.
Et voilà précisément de quoi il s'agit. Vous n'avez nul besoin
de connaître tous ces détails avant d'agir. À l'instant même où
vous traversez, vous avez toute l'information nécessaire pour
déterminer que vous êtes en mauvaise posture. Vous êtes bien
conscients tous les deux que votre vie est menacée. Inutile de
connaître ces détails pour admettre l'évidence : un semi-
remorque fonce sur vous ... et si vous ne bougez pas rapidement,
d'ici quelques secondes rien d'autre ne comptera plus!
Si ce scénario paraît un peu ridicule, il illustre précisé-
ment la position où nous nous trouvons sur la scène mondiale
aujourd'hui. En tant qu'individus, que familles et que nations,

xii
Introduction

nos chemins sont semblables aux tracés des deux amis sur l'auto-
route. Le camion monstrueux qui fonce sur nous représente la
tempête que nous préparent les crises multiples : bouleversements
climatiques, terrorisme, guerre, maladie, disparition de la nourri-
ture et de l'eau, et une foule d'autres approches non viables pour
gérer le quotidien sur terre. Chaque crise est potentiellement
capable de mettre un terme à la civilisation et à la vie humaine
telle que nous la connaissons.
Les causes précises de ces événements font l'objet de
débats, mais il n'en reste pas moins qu'ils se produisent en ce
moment même. Et, à l'image des deux amis qui décident d'al-
ler de l'avant ou de rebrousser chemin pour se mettre en sécu-
rité, nous pourrions analyser chaque crise pendant encore un
siècle ... Néanmoins, dans les faits, des peuples, des communau-
tés, des modes de vie ne survivront pas le temps qu'il faudrait
pour compiler toutes les données, publier les comptes-rendus et
débattre des résultats.
Car, pendant que nous évaluons la situation, les habitations
seront anéanties dans des séismes, des «super-tempêtes», des
inondations et par la guerre ; le sol qui a donné vie aux gens
cessera de produire de la nourriture ; les puits se tariront ; le
niveau des océans montera; les rivages disparaîtront - et des
personnes auront tout perdu, dont la vie. Même si ce genre de
scénarios paraît extrême, les événements que je décris sont déjà
survenus en Haïti, au Japon, dans le golfe du Mexique et en
Afrique frappée par les sécheresses. Et les choses empirent.
S'il est parfaitement logique de s'écarter du chemin du
semi-remorque avant d'analyser la situation, il est de même
parfaitement logique de se soustraire aux nombreux désastres
qui pointent à l'horizon avant qu'ils ne causent encore plus de
ravages.
Tout comme la direction que nous empruntons sur l'auto-
route déterminera si oui ou non nous parviendrons au domi-
cile de notre ami, notre décision d'agir face aux périls extrêmes
pour notre survie déterminera notre succès ou notre échec,

xiii
Vérité essentielle

notre survie ou notre disparition. Nos choix en vue de la survie


découlent tous de notre perception de nous-mêmes en ce monde
et de la manière dont notre pensée nous incite à agir.
Voici le message que véhicule ce livre: il faut agir avec sagesse
et promptement pour parer la collision qui nous attend sur la
route de la destinée que nous avons entrepris de traverser. Albert
Einstein le formula judicieusement : «Pour que l'humanité
survive et passe à des niveaux supérieurs, une pensée nouvelle
s' impose2 • » Élaborer une pensée de niveau supérieur, voilà ce que
nous devons faire aujourd'hui. Nous savons qu'il y a problème.
Les esprits les plus illustres de notre époque s'y consacrent déjà,
ainsi que les approches scientifiques de pointe, fondées sur les
théories les plus avancées. Si notre pensée était sur la bonne voie,
n'aurions-nous pas déjà plus de réponses et de meilleures solu-
tions? La preuve qu'il nous faut penser autrement, c'est que nous
ne les détenons toujours pas.

le Dilemme
Récemment, une foule de découvertes dans tous les domaines
scientifiques sont venues confirmer que des opinions de longue
date sur la vie, notre monde et notre corps doivent changer. La
raison en est toute simple : ces idées sont fausses. De nouveaux
éléments transforment notre pensée sur les éternelles questions
sur la vie, dont nos origines, l'apparition de l'espèce humaine,
la manière de survivre aux crises qui affligent notre monde et la
manière d'améliorer la situation. Malgré ces percées porteuses
d'espoir, nous avons un problème : il faudra peut-être plus de
temps pour qu'elles s'intègrent à un mode de pensée admis que le
temps que nous avons pour résoudre les crises. Le domaine de la
biologie illustre parfaitement ce point.
L' épigénétique, une science récente, se fonde sur l'approche
scientifique. Elle a démontré que le code génétique, «le
plan directeur de la vie», notre ADN, se transforme suivant

xiv
Introduction

l'environnement. Les scientifiques traditionnels hésitent à


évoquer le fait que cette influence de l'environnement sur l'ADN
va au-delà des toxines dans l'air et l'eau, des courants électroma-
gnétiques inondant les habitations à proximité des lignes à haute
tension, des postes de transformation et des tours de télépho-
nie cellulaire. Lenvironnement comprend aussi nos expériences
personnelles subjectives, telles nos croyances, nos émotions, nos
pensées.
Si, désormais, les faits scientifiques confirment que nous
pouvons modifier l 'ADN qui engendre des maladies fatales affli-
geant nos êtres chers, les manuels dont dépendent les médecins
occidentaux affirment que c'est impossible - que l'hérédité et des
facteurs hors de notre contrôle sont en cause. Heureusement,
tout cela commence à changer.
Grâce aux travaux de visionnaires scientifiques tel Bruce
Lipton, spécialiste des cellules-souches et auteur de The Biology
of Belief (La Biologie des croyances, Ariane Éditions), les éton-
nants résultats des dernières études s'infiltrent peu à peu dans les
manuels sur lesquels repose notre savoir médical. Néanmoins,
le conduit qui véhicule ces découvertes sur les cellules ainsi que
ceux qui mettent à jour nos connaissances sur les origines de
l'espèce humaine, de la civilisation et des détails de !'Histoire sont
d'une lenteur notoire. La période qui s'écoule généralement entre
le moment de la découverte scientifique et son compte-rendu, sa
publication, son acceptation - avant même qu'elle n'apparaisse
dans les manuels - est de huit à dix ans, parfois plus. Voilà où le
problème devient évident.
Les grands penseurs contemporains affirment sans détour
que les crises multiples font peser sur nous des menaces jamais
vues et qu'il faut les régler sur-le-champ. Nous n'avons pas huit
ou dix années pour imaginer comment nous adapter à la situa-
tion et éviter les dangers du terrorisme, de la guerre et de la
course aux armes nucléaires au Moyen-Orient. Il faut régler ces
questions dès maintenant.

XV
Vérité essentielle

Nos vieilles attitudes, dont la croyance en la survie du plus


fort, en le besoin de compétition et en notre séparation de la
nature, nous ont conduits au bord du gouffre. À notre époque,
nous affrontons la perte éventuelle de tout ce que notre civili-
sation estime. C'est précisément en raison de ce besoin d'une
pensée nouvelle que l'éternelle question de notre identité a plus
d'importance que jamais. Parallèlement, une forte accumulation
de preuves scientifiques donne lieu à une perception inédite du
monde qui apporte les éléments manquants à notre connaissance
et transforme notre vision de nous-mêmes.
À la lumière des récents éléments de preuve au sujet des civi-
lisations de l'ère glaciaire, des suppositions fausses sur l' évolu-
tion humaine, de l'origine et du rôle de la guerre historiquement
et de la valeur excessive que nous accordons aujourd'hui à la
compétition, il faut revoir les croyances les plus fondamentales
qui résident au cœur des décisions que nous prenons et de notre
mode de vie. C'est ici qu'intervient Vérité profonde.

La raison d'être de ce livre


Il ne manque assurément pas de livres traitant des conditions
inaccoutumées qui nous mettent en péril, mais aucun n'aborde
notre manière essentielle de les gérer. Comment déterminer les
décisions à prendre - quelles politiques appliquer, quelles lois
voter, comment instituer des économies viables, partager des
technologies vitales et concilier les différends qui divisent nos
sociétés et nos rapports, à moins d'avoir répondu à l'unique ques-
tion résidant au cœur de notre existence : Qui sommes-nous?
Comme individus, familles, nations et civilisation humaine
collective, il faut d'abord déterminer qui nous sommes avant
d'effectuer les bons choix. C'est particulièrement capital à l'heure
actuelle, tandis que chaque choix compte.

xvi
Introduction

Comment savoir quels choix faire avant de répondre


à l'unique question qui réside au cœur de chacun de
ces choix : qui sommes-nous précisément 7

En l'absence de réponse à cette question primordiale, prendre


des décisions vitales revient à tenter de pénétrer dans une maison
sans savoir où se trouve la porte. On peut toujours briser une
fenêtre ou démolir un mur, mais la maison serait par le fait
même endommagée. La métaphore convient particulièrement à
notre dilemme actuel. Notre famille humaine, qui est passée de
1,6 milliard en 1900 à 7 milliards en 2011, peut soit se servir de
la clé qu'offre la compréhension de notre identité pour franchir le
seuil des solutions réussies, soit abîmer notre demeure (la Terre et
nous-mêmes) en réagissant aux crises par un simple réflexe animé
de suppositions fausses issues d'une science incomplète.
Si nous acceptons les vérités de notre histoire sur terre, les
cycles de notre planète, ainsi que leur influence sur notre vie,
changent; nous comprenons alors ce que nous affrontons vrai-
ment, quelles sont nos options et quels choix s'offrent à nous.
Ce livre identifie six domaines de découverte (et les faits qu'ils
révèlent) qui transformeront radicalement notre ancien point de
vue sur le monde et sur nous-mêmes. Pour traiter les graves crises
actuelles, ces vérités sont les plus importantes à considérer.

- Vérité 1 : Pour désamorcer les crises qui mettent en péril


notre vie et notre monde, il nous faudra accepter ce que la science
révèle sur nos origines et notre histoire.
Les périls qui nous menacent sont sans précédent; nous
devons trouver une solution d'ici huit à dix ans. Mais comment
connaître les choix à effectuer, les lois à voter et les politiques à
appliquer à moins de découvrir qui nous sommes ? À la lumière
des découvertes récentes en science, les suppositions fausses et
de longue date sur l'évolution et les origines de l'humanité ont
perdu toute signification.
xvii
Vérité essentielle

- Vérité 2 : Puisque les systèmes éducatifs traditionnels se


montrent réticents quand il s'agit d'assimiler les nouvelles dé-
couvertes et d'explorer des théories inconnues, nous demeurons
bloqués sur des croyances obsolètes qui n'arrivent pas à gérer les
crises les plus graves de l'histoire humaine.
Nos choix de vie, de gouvernement et de civilisation, nous
les fondons sur notre perception de nous-mêmes, de nos rapports
mutuels et de notre relation à la planète. Depuis les 300 dernières
années, ces croyances sont issues de suppositions fausses promul-
guées par une science désuète. Par principe, lorsqu'elle fonctionne
telle qu'elle est censée opérer, la méthode scientifique possède des
mécanismes intrinsèques pour rectifier les hypothèses erronées.

- Vérité 3 : La clé qui permettra de surmonter les crises


menaçant notre survie repose sur des partenariats fondés sur
l'entraide et la coopération afin de s'adapter aux changements; il
faut mettre un terme aux accusations et aux blâmes qui entravent
ces alliances capitales.
Les crises multiples (quelques-unes sont le fait des humains,
d'autres sont naturelles) ont atteint le point de bascule et me-
nacent la survie de notre espèce. L'ère industrielle a définitive-
ment contribué aux gaz à effet de serre dans l'atmosphère, et il
faut assurément découvrir des sources propres et vertes de pro-
duction d'électricité et de combustible pour les sept milliards
d'habitants sur notre planète. Néanmoins:

• Fait : les changements climatiques ne sont pas


provoqués par l'homme. Des éléments scientifiques
démontrent que sur 450 000 ans, le climat a présenté
des cycles alternants de réchauffement et de refroi-
dissement environ tous les 100 000 ans, lorsque les
industries de l'homme n'existaient pas encore.
• Fait: au cours des cycles antérieurs de réchauffement
et de refroidissement, l'augmentation des gaz à effet
de serre était en décalage par rapport à l'élévation des
températures d'en moyenne de 400 à 800 ans.
xviii
Introduction

• Fait: il faudra une synergie et une collaboration sans


précédent pour façonner des modes de vie viables qui
nous permettront de nous adapter aux cycles naturels
de changement et de gérer les crises dues à l'homme.

- Vérité 4 : Des découvertes émanant de civilisations évo-


luées datant de la fin de la dernière période glaciaire révèlent
comment résoudre les crises actuelles, car ces ancêtres les ont
vaincues.
Si les révélations scientifiques issues de civilisations de l'ère
glaciaire bouleversent le parcours que les historiens attribuent à
l'humanité au cours des diverses ères de la planète, elles corres-
pondent toutefois aux annales les plus anciennes de notre passé
et aux vues autochtones d'un monde cyclique - où la montée et
le déclin des civilisations, les cataclysmes et les conséquences des
choix erronés se répètent.

- Vérité 5 : Grâce à des technologies de pointe, plusieurs


domaines scientifiques recueillent des preuves indubitables
confirmant que l'humanité résulte d'une conception mise en
œuvre spontanément, qu'elle n'est pas le produit de l'évolution
d'une forme de vie ayant émergé au hasard sur une longue pé-
riode de temps.
La science ne connaîtra peut-être jamais précisément les fac-
teurs ou les êtres responsables de la conception de l'humanité,
mais les découvertes remettent sérieusement en cause la théorie
de l'évolution et démontrent qu'il est virtuellement improbable
que nous soyons le produit de processus biologiques fortuits.

- Vérité 6 : Plus de 400 études spécialisées ont conclu que


la compétition violente et la guerre vont à l'encontre de nos ins-
tincts primordiaux de coopération et de soins mutuels. Autre-
ment dit, au cœur de notre nature la plus essentielle, nous ne
sommes tout simplement pas conçus pour la guerre !
Pourquoi la guerre a-t-elle alors joué un rôle si prépondé-
rant, influant sur notre histoire, sur nos vies et sur notre monde ?
xix
Vérité essentielle

On trouvera des éléments de réponse dans les annales de nos


premières expériences sur terre et dans les comptes-rendus ar-
chaïques contenant les instructions pour mettre fin à la « guerre
des âges» et vivre notre destinée optimale, au lieu de succomber
à un sombre sort.

En ces premières années du XXIe siècle, l'ampleur et le


nombre des crises qui convergent constituent une menace grave-
un danger imminent pour notre survie; ils sont conformes aux
tendances cycliques qui entraînaient le déclin et l'effondrement
de civilisations antérieures.
La clé de notre survie aux crises actuelles consiste à connaître
notre identité et notre position dans les cycles de la civilisa-
tion et de la nature, et à tirer des leçons des erreurs des sociétés
antérieures.
Alliée à la sagesse de notre passé, la science de pointe
confirme que nous avons encore les moyens de transformer notre
époque de crise en une époque d'émergence. Nous sommes en
mesure de façonner un monde tout neuf basé sur des principes
opérants et viables reposant sur la compréhension de nos vérités
les plus profondes.

Dans ce livre
Les sept chapitres de ce livre vous invitent à adopter un mode
de pensée puissant et peut-être neuf sur votre relation au monde.
Pour certains, ce mode de pensée n'aura rien de nouveau. Ils
auront peut-être eu la chance de grandir dans une famille qui
assimilait les découvertes récentes sur la civilisation et la vie pour
combler les lacunes de leurs points de vue spirituels, religieux ou
historiques.
Toutefois, pour ceux qui n'ont pas bénéficié d'une telle
éducation, les découvertes ci-dessous débouchent sur une voie
puissante et pratique de découverte de soi. Peu importe ce que
l'on croit, il est passionnant de prendre connaissance des preuves

XX
Introduction

incitant l'humanité à revoir le scénario classique sur qui nous


sommes, le temps que nous avons passé ici, et la raison qui fait
que «le monde semble s'effondrer».
Au fil des pages qui suivent, vous découvrirez :

• des preuves archéologiques pratiquement irréfutables


de l'existence de civilisations avancées nanties d'une
technologie évoluée, qui ont prospéré sur terre long-
temps avant l'époque généralement admise remon-
tant de 5 000 à 5 500 ans;
• pourquoi les guerres qui sévissent aujourd'hui
découlent d'un mode de pensée qui a vu le jour il y a
longtemps et pourquoi elles sont la continuation d'un
conflit ancien qui ne nous appartient même pas ;
• des preuves scientifiques démontrant que la vie
humaine est le produit d'une conception intelligente;
• l'ordre chronologique de l'activation du code de la
vie humaine dans la matrice au moment du premier
battement de cœur et lorsque la conscience s'éveille
lors du développement de l'être humain ;
• une chronologie revue des civilisations antérieures (et
leur position dans les cycles des ères de notre monde),
chronologie qui éclaire le sens des crises actuelles et
permet de déterminer les choix à effectuer.

Il est important que vous sachiez au préalable à quoi vous


attendre en parcourant ces découvertes. Voilà pourquoi les décla-
rations ci-dessous précisent ce qu'est ce livre et ce qu'il n'est pas.

• Vérité essentielle n'est pas un livre de science. Bien qu'il


présente une science de pointe incitant à revoir notre
relation au passé, aux cycles temporels, à nos origines
et à notre habitude de guerroyer, cet ouvrage ne se
conforme pas au format ni aux normes d'un manuel
scientifique ou d'une revue technique.

xxi
Vérité essentielle

• Ce n'est pas un article scientifique évalué par des pairs.


Les chapitres et les exposés de recherches n'ont pas été
soumis au processus d'examen par un comité certifié
ou une commission d'experts dont les antécédents
reposent sur un domaine unique d'étude, comme la
physique, les mathématiques ou la psychologie.
• Cet ouvrage est bien documenté. Il vise à être acces-
sible au lecteur - descriptions d'expérimentations,
études de cas, annales et expériences personnelles
viennent alimenter une perception de nous-mêmes
en ce monde qui nous donne pleins pouvoirs.
• Ce livre cherche à illustrer ce qu'on peut accomplir en
franchissant les frontières connues entre la science et la
spiritualité. En alliant les découvertes de la génétique
du xxe siècle, de l'archéologie, de la microbiologie et
le temps fractal, nous obtenons un cadre de référence
où replacer les bouleversements de notre ère et un
contexte qui nous permettra de les gérer.

En soi, l'exploration de notre perception de nous-mêmes


diffère d'une personne à l'autre - c'est un parcours unique,
intime et personnel. Cette différence découle de nos expériences
auprès de notre famille, de nos pairs et de notre société. On nous
a inculqué des explications de l'histoire et des origines de la Terre
et de l'humanité dans le but de donner un sens à notre monde -
des explications communément acceptées comme « des vérités»
par la collectivité à une époque précise.
Je vous invite à réfléchir aux découvertes présentées dans ces
pages et à examiner le sens qu'elles ont pour vous. Discutez-en
avec les personnes qui ont une valeur pour vous et voyez si
elles changeraient - et en quoi - l'explication que votre famille
transmet.
Vérité essentielle vise un objectif : nous accorder pleins
pouvoirs (à mesure que nous réglons les crises dans notre vie et
le monde) afin de saisir notre relation au passé. Pour acquérir ces

xxii
Introduction

pouvoirs, voici la dé : mieux nous nous connaîtrons, plus éclairés


seront nos choix.
Personne ne sait avec certitude ce que nous réserve l'avenir.
Selon la physique quantique, nous déterminons systémati-
quement notre avenir par les choix effectués à chaque instant.
Peu importe les défis qui nous attendent ou les choix que nous
aurons à faire, une chose est certaine : connaître notre iden-
tité et comprendre notre relation les uns aux autres, ainsi qu'au
monde, nous procurera l'atout évolutionnaire que nos ancêtres
ne possédaient peut-être pas jadis en présence de défis similaires.
Cet atout nous permettra de faire pencher la balance en notre
faveur. Et tout commence en prenant conscience des vérités les
plus profondes concernant notre existence et de la manière de se
reposer sur celles-ci à chaque instant pour tous nos choix.

- Gregg Braden
Santa Fe, Nouveau-Mexique

xxiii
CHAPITRE 1

Q1JI SOMMES-NOUS?
EN Q1JÊTE DE NOTRE IDENTITÉ

« Si nous ne comprenons pas qui nous sommes


et d'où nous venons, à mon avis, il nous sera difficile
de progresser vraiment. »
- LOUIS LEAKEY (1903-1972), ARCHÉOLOGUE ET NATURALISTE

« On peut imaginer des choses merveilleuses ou des choses


terribles, sans assumer la responsabilité du choix. Vous affirmez
avoir en vous le pouvoir de faire le bien et celui de faire le mal,
l'ange et le diable, mais en vérité vous n'avez qu'une chose en
vous - la capacité d'imaginer 1• » C'est en ces termes, tirés de
son roman Sphère, que feu l'auteur Michael Crichton décrit le
paradoxe de notre expérience humaine ainsi que la perçoit une
entité de l'espace; dans le cas présent, il s'agit d'une sphère extra-
terrestre qui repose au fond de l'océan depuis 300 ans. Bien qu'il
s'agisse de fiction, les révélations dans ce livre sont peut-être plus
vraies que nous n'aimerions le croire.
Vérité essentielle

Nous sommes en effet des êtres mystérieux faits d'extrêmes


et de contradictions qui se manifestent dans leur mode de vie
et leurs choix. Nous affirmons, par exemple, aspirer à la liberté,
mais nous nous laissons régir par la peur de ce que nous ferions si
nous jouissions de toute cette liberté. Le fait que chaque cellule de
notre corps se régénère nous rappelle que nous avons le pouvoir
de nous guérir (sans quoi, nous serions morts!), et pourtant
nous refusons de reconnaître ce pouvoir lorsqu'il s'agit de nous
guérir de nos maux. Nous prétendons également être animés de
compassion, mais nous sommes la seule espèce à infliger de la
souffrance à autrui pour obtenir de l'information ou par pur
divertissement. Nous affirmons vouloir la paix dans le monde,
tout en continuant à développer les armes les plus destructrices
jamais vues.
Lors de contacts éventuels avec d'autres univers, nous donne-
rons sans doute l'impression à des formes évoluées de vie intelli-
gente que nous sommes une espèce tourmentée aux prises avec le
conflit et qui oscille entre une destinée merveilleuse et les coups
mortels assénés par le sort que nous redoutons.
En cette seconde décennie du XXIe siècle, la réalité nous offre
une leçon d'humilité; les crises, extrêmes, et les contradictions
actuelles se démarquent crûment. En dépit des avancées sans
précédent de la science, nous n'avons toujours pas de réponse à la
question la plus fondamentale : Qui sommes-nous?

Le jury délibère toujours


Le Bureau du recensement des États-Unis fait savoir que
nous partageons notre planète avec sept milliards de membres de
la famille humaine. Bien qu'elle soit départagée en des groupes
distincts déterminés par la couleur de la peau, les lignées, la
géographie ou les croyances, l'origine de notre espèce représente
notre héritage collectif. Si un sondage de portée mondiale s'en-
quérait auprès de chacun d'où nous provenons tous, les réponses
relèveraient probablement de trois lignes de pensée :
2
Qui sommes-nous? En quête de notre identité

1. Nous sommes le produit d'une longue série de syn-


chronicités biologiques miraculeuses (l'évolution) sur-
venues au cours des deux derniers millions d'années.
2. Nous avons été créés, animés de vie et posés sur
la Terre directement par la main d'une puissance
supérieure.
3. Un schéma cosmique grandiose - une conception
intelligente - nous a façonnés tels que nous sommes,
et cette conception a été mise en œuvre il y a long-
temps par un être ou une chose que nous ne compre-
nons plus aujourd'hui.

Ce sommaire ne rend pas justice à ces points de vue, mais


sur ces trois explications, seules ou associées, reposent essentielle-
ment toutes les possibilités envisagées aujourd'hui.
Pendant des millénaires, les première et troisième explica-
tions n'existaient même pas. Jusqu'en 1859, le récit de notre arri-
vée ici-bas ne possédait essentiellement qu'une explication : celle
qu'invoquait la communauté religieuse. Fondée sur une interpré-
tation littérale de la Genèse, le document le plus ancien commun
aux trois grands monothéismes (le judaïsme, le christianisme et
l'islamisme), cette croyance conçoit que nous sommes ici-bas
dans un but précis et que nous y avons été placés par la main de
Dieu.
Cette notion demeure populaire au sein de certaines commu-
nautés et porte le nom de «créationnisme», une théorie issue
de la doctrine religieuse postulée par l'évêque anglican James
Ussher, il y a plus de 350 ans. Mariant diverses versions des inter-
prétations bibliques avec les naissances et les morts enregistrées
dans la Bible de son époque, l'évêque Ussher développa ce qui, à
son sens, était une chronologie exacte des événements bibliques
amorçant le premier jour de la création.
Selon ses calculs, Ussher détermina que le premier jour du
monde survint un dimanche 23 octobre en 4004 av. J .-C. - le
«début» biblique décrit par la Genèse 2 • Cette date servant de

3
Vérité essentielle

point de départ, il suivit les événements et les généalogies jusqu'à


la période que les créationnistes modernes, notamment les créa-
tionnistes «jeune Terre», acceptent généralement pour la planète,
soit 6 000 ans3.
Prenant cette période comme point de repère, Ussher calcula
ensuite les dates des événements bibliques majeurs liés à l'origine
et à l'histoire de l'humanité. Par exemple, il détermina qu'Adam
fut créé en 4004 av. J.-C., qu'Ève le fut peu après et qu'ils furent
expulsés du jardin d'Éden dans la même année. À cette époque,
les corrélations établies par Ussher furent imprimées dans les
versions autorisées de la Bible, et en 1701 l'Église d'Angleterre
admit officiellement sa chronologie.
La création unique de toute vie pendant la Genèse est l'une
des hypothèses créationnistes découlant directement des travaux
d'Ussher. Par ailleurs, la théorie veut qu'aucune espèce nouvelle
ne soit présente dans le monde actuel. Toute vie, présente ou
passée, dont la race humaine, est censée être apparue au moment
de la création originelle et est demeurée fixe et immuable.
Ces idées contredisent deux points importants de la science
moderne:

• Les géologues estiment que la Terre est vieille de


4,5 milliards d'années.
• La science traditionnelle accepte généralement que la
théorie darwinienne de l'évolution soit le processus
responsable de la diversité actuelle des espèces sur
terre.

Si, en raison des diverses interprétations de la durée d'un


jour ou d'une année biblique, les créationnistes «vieille Terre»
admettent parfois que notre planète a en effet 4,5 milliards
d'années, le principe d'évolution n'admet pour sa part aucune
latitude d'élucidation. La théorie de Charles Darwin dément
l'origine divine de l'être humain; et il ne semble y avoir aucun
compromis possible entre ces deux convictions.

4
Qui sommes-nous? En quête de notre identité

En 1836, Darwin rentra de son voyage historique sur le HMS


Beagle et publia ses conclusions vingt-trois ans plus tard, en
1859. De l'origine des espèces, son ouvrage, qui anéantit les para-
digmes d'alors, ébranla les fondements mêmes de croyances de
longue date sur nos débuts. Je le mentionne ici parce que, même
si nous aborderons cela en détail plus loin, pour la première fois,
la théorie de l'évolution défiait les positions religieuses, notam-
ment celles de l'Église chrétienne.
Néanmoins, je tiens à affirmer ici que si l'œuvre de Darwin
est très judicieuse, méticuleusement documentée et s'en tient aux
directives de la méthode scientifique, une forte accumulation de
preuves établit désormais qu'elle ne rend pas compte des événements
entourant l'origine humaine tels qu'on les connaît aujourd'hui. Elle
ne démontre pas non plus que nous serions le produit d'un processus
évolutionnaire.
Ce qui ne revient pas à dire que l'évolution n'existe pas ou
ne s'est pas produite. Elle a eu lieu. Et les fossiles témoignent
que de nombreuses espèces l'ont subie. Mais lorsque l'on tente
d'appliquer aux humains, à nous, les processus observés chez les
végétaux ou les animaux, les faits n'étayent pas la théorie.
Où donc en sommes-nous? Que faut-il croire? Lequel des
trois points de vue sur nos origines et notre histoire est valable ? Le
jury délibère toujours; le sujet même tend à déclencher des débats
enflammés. Si l'on se fie toutefois à ce qu'en disent les sciences,
l'évolution représente une explication de moins en moins viable
pour expliquer les complexités de l'existence humaine.
Autrement dit, l'évolution que l'on observe dans la nature
ne s'applique peut-être pas à nous. Vous en prendrez connais-
sance dans la prochaine section, certains éléments concernant la
famille humaine ne s'expliquent pas par la théorie del' évolution,
du moins celle que nous concevons aujourd'hui.

5
Vérité essentielle

Une théorie problématique


Depuis 1859, la communauté scientifique ainsi que l'essen-
tiel du monde «moderne» ont adopté l'évolution comme unique
théorie plausible quant aux origines de l'être humain et à la
manière dont nous avons atteint notre état actuel. Cette accep-
tation généralisée a déclenché une recherche de preuves maté-
rielles permettant d'étayer la théorie : les «chaînons manquants»
fossilisés censés étoffer les stades de notre parcours. Pour des
motifs aussi controversés que les fossiles eux-mêmes, ces chaînons
manquants à notre ascendance persistent à nous échapper depuis
les 150 dernières années.
Plus récemment, la quête de preuves sur nos ancêtres a séduit
notre imaginaire, car des revues prestigieuses et crédibles, dont
Science and Nature, ont publié des études et des illustrations en
couleur sur ces découvertes. Du jour au lendemain, ces crânes
retrouvés aux orbites creuses qui nous observent depuis les pages
glacées de couvertures de magazines se sont intégrés à notre arbre
généalogique. On les a même baptisés « Lucy» et « George», pour
éveiller en nous un sentiment d'appartenance.
Au cours des années 1960, je regardais les documentaires sur
notre télé noir et blanc et je consultais des articles sur la quête de
nos origines dans de magnifiques magazines, comme National
Geographic et le Smithsonian; les mises à jour sur le sujet me
semblaient quasi quotidiennes. Bien que les recherches se pour-
suivent à ce jour, les dernières découvertes se font plus discrètes,
mais elles suivent leur cours. Les zones les plus fertiles pour la
cueillette de fossiles sont situées dans des secteurs éloignés de la
Great Rift Valley orientale, en Afrique. Par exemple, dans le nord
de la Tanzanie, les fouilles de restes d'hominidés par plusieurs
générations de la famille Leaky - que perpétuent Louis S. B.
Leaky, sa femme Mary, leur fils Richard et d'autres de leurs
enfants - ont repoussé la date admise de l'apparition de l'homme
à il y a environ deux millions d'années.

6
Qui sommes-nous? En quête de notre identité

Au cours d'explorations entamées dans les années 1950, les


équipes Leaky passaient méticuleusement au tamis du sol meuble,
des pierres et de la poussière pour y récupérer des fragments d'os,
des dents, des outils en pierre et parfois des sections complètes
d'un squelette ayant appartenu à des êtres archaïques aux traits
humains. Ces êtres appartiennent à des stades du développement
humain portant des noms complexes comme Australopithecus
afarensis et Homo neanderthalensis.
Si ces découvertes et d'autres, similaires, sont impression-
nantes, et bien qu'elles aient étoffé notre connaissance du passé,
la quête des origines de l'homme n'a pas à son escient une seule
preuve nous reliant à ces formes de vie archaïques 4 •
Et ce chaînon ne sera peut-être jamais découvert. À mon sens,
bien que les fouilles en Afrique soient passionnantes et qu'elles
nous informent sur des formes de vie très anciennes, les frag-
ments retrouvés n'appartiennent probablement pas à l'histoire de
notre espèce.

Aux dernières nouvelles, le chainon manquant manque


toujours
Depuis la naissance de la théorie évolutionnaire en 1859
jusqu'à la rédaction de ce texte, on n'a jamais trouvé de preuve
évidente d'une espèce transitionnelle conduisant jusqu'à nous-
des fossiles démontrant que nos ancêtres évoluaient vers une
forme de plus en plus humaine. Et ce, en dépit d'une techno-
logie sophistiquée et d'une main-d'œuvre importante consacrée
à la question. Si on examine de plus près l'arbre généalogique
humain, on s'aperçoit que plusieurs des liens que l'on suppose
incontestés entre des découvertes de fossiles ne sont en réalité que
des liens présumés ou inférés.
Autrement dit, la preuve concrète qui nous relie aux vestiges de
ces créatures du passé n'a pas encore été établie (voir Figure 1.1).

7
Vérité essentielle

Dans De l'origine des espèces, Darwin admet ce manque de


preuves. Il reconnaît aussi qu'il est peut-être dû à un défaut dans
la façon des géologues d'envisager la Terre ou dans sa théorie de
l'évolution. Reprenons ses propos :
La théorie de la sélection naturelle impliquant l'exis-
tence antérieure d'une foule innombrable de formes
intermédiaires ...
. . . on peut se demander pourquoi on ne voit pas
autour de nous toutes ces formes intermédiaires.
Pourquoi ne trouvons-nous pas, dans toutes les
formations géologiques, une grande abondance de ces
formes intermédiaires?

ARBREHYPOTHtrlQUE
DE L'~VOLUTION HUMAINE

H. neanderthalensis ~ ...
./'
.. ··
.~ H. heidelbergensis ·:: ....• ··"

........•·••••••••• H. eœctu' ........ ~~flo'e,;e,,;,


.. ............
. ..·····
... ..··

Figure 1.1 : Illustration de la chronologie traditionnelle des ancêtres censés conduire


à l'être humain moderne. De telles séquences proviennent de l'interprétation des
témoignages fossiles.

8
Qui sommes-nous? En quête de notre identité

Bien que les recherches géologiques aient incontes-


tablement révélé l'existence passée d'un grand nombre
de chaînons qui ont déjà rapproché les unes des autres
bien des formes de vie, elles ne présentent cependant pas,
entre les espèces actuelles et les espèces passées, toutes les
gradations infinies· et insensibles que réclame ma théorie,
et c'est là, sans contredit, l'objection la plus sérieuse qu'on
puisse lui opposer5.

Réfléchissant à ce dilemme apparent, Thomas H. Morgan,


lauréat du prix Nobel de médecine en 1933, déclarait qu'en appli-
quant «les analyses les plus strictes pour discerner les espèces »,
nous n'avons «jamais vu un seul cas de transformation d'une
espèce en une autre6».
Deux découvertes de la fin du :xxe siècle feront peut-être la
lumière sur la raison pour laquelle le pont entre l'être humain
ancien et moderne pose problème et sur ce que révèle le chaînon
manquant à propos de notre histoire. Pour des motifs scienti-
fiques solides que nous examinerons à fond dans un chapitre ulté-
rieur, si l'Australopithecus afarensis et les Néandertals racontent
l'histoire de quelqu'un, ce n'est sans doute pas la nôtre.
Voici deux raisons précisant pourquoi.

Des fossiles fascinants, mais ce n'est pas nous!

En 1953, James Watson et Francis Crick établirent la première


« carte» des composants de la vie. Leur modèle de la molécule
d'ADN ouvrit la voie à une science entièrement nouvelle consa-
crée à l'identification des gens par les traits génétiques qui font
d'eux des êtres uniques, distincts de qui que ce soit d'autre.
De la couleur des yeux et des cheveux jusqu'au sexe et à la
prédisposition à certaines maladies, les codes déterminant l'appa-
rence et le fonctionnement de notre corps sont contenus dans
le plan de nos gènes, dans l'ADN. Une fois déchiffré le code

9
Vérité essentielle

qui détient les éléments de notre passé, la science qui consiste


à mettre en correspondance des segments d'ADN pour déter-
miner la paternité, identifier les personnes disparues et associer
les auteurs de crimes aux lieux des crimes en question est deve-
nue une pierre angulaire dans les domaines policier et médico-
légal. C'est désormais le fil de trame d'une série policière des
plus populaires dans l'histoire de la télévision: CSL· Crime Scene
Investigation.
En 1987, pour la deuxième fois dans l'histoire, on appliqua
à l'étude des origines humaines les procédés dont se servent les
investigations médico-légales de CS! et dont les résultats sont
désormais admis comme preuves jusqu'à la Cour suprême. En
2000, les chercheurs du Centre d'identification humaine à l'Uni-
versité de Glasgow publièrent les résultats de leurs comparaisons
de l'ADN d'une espèce censée avoir été parente de l'humanité
moderne7. Avec des collègues en Russie et en Suède, les scienti-
fiques ont évalué l'ADN d'un nourrisson néandertal exception-
nellement bien préservé qu'on avait découvert dans une grotte en
calcaire dans le nord du Caucase, à la frontière entre l'Europe et
l'Asie.
L'état remarquable de conservation des restes de l'enfant
est un mystère en soi. Normalement, seuls les spécimens gelés,
comme ceux qui ont été retrouvés dans les régions polaires,
sont si magnifiquement préservés. Cet état de préservation
permit de comparer un ADN vieux de 30 000 ans à celui de
l'homme moderne. C'était aussi la première fois que de telles
analyses purent être effectuées sur un corps déjà évalué par data-
tion au carbone. L'étude conclut qu'il n'existe qu'une possibilité
ténue d'un lien génétique entre les Néandertals et l'être humain
moderne. Le compte-rendu suggère que ce dernier ne descend
effectivement pas des N éandertals 8 •
Théoriquement, la comparaison génétique devrait résoudre
l'énigme de notre ascendance, et pourtant les résultats soulèvent
davantage de questions sur notre lignée évolutionnaire et nos
origines, questions qui débouchent sur une zone «interdite».

10
Qui sommes-nous? En quête de notre identité

L'expression premier homme moderne (PHM) ou premier


homme anatomiquement moderne (PHAM) s'est substituée à
Cro-Magnon et réfère à notre ancêtre le plus rapproché. Les scien-
tifiques estiment désormais que les différences physiques entre
les humains contemporains et ceux des PHM sont si subtiles
qu'elles ne justifient pas de scinder les regroupements. Autrement
dit, même si les humains d'autrefois ne se comportaient pas
comme nous, ils nous ressemblaient. Ou inversement, nous leur
ressemblons toujours : notre apparence n'a pas tellement changé
depuis l'apparition de nos premiers ancêtres sur terre il y a envi-
ron 200 000 ans. Ce fait s'avère problématique pour ceux qui
cherchent à étirer les changements évolutionnaires sur de longues
périodes en vue d'expliquer comment nous avons atteint notre
forme actuelle.
En 2003, des avancées en technologie génétique ont permis
d'établir des comparaisons encore plus ambitieuses avec l'ADN
ancien. En l'occurrence, des analyses ont mis en rapport les
Néandertals et nos premiers ancêtres confirmés, les PHM. Une
équipe de scientifiques européens compara de l'ADN provenant
de deux PHM, datant respectivement de 23 000 ans et 25 000
ans, à de l 'ADN de Néandertals remontant de 29 000 à 42 000
ans. Les conclusions, publiées dans Proceedings of the National
Academy of Sciences, précisaient : «Nos résultats contribuent
aux preuves recueillies de divers domaines, preuves qui rendent
très improbable d'hypothèse d'un "héritage néandertal9 ". »
Autrement dit, les Néandertals que films et bandes dessinées
décrivent comme des hommes des cavernes ne sont pas les
ancêtres du PHM. Nous ne sommes donc pas descendus d'eux;
ils ne peuvent être nos ancêtres.

11
Vérité essentielle

Le mystère de l'ADN «fusionné»

Depuis la découverte du code génétique, un nouveau


mystère est apparu au sujet des chromosomes qui distinguent les
espèces entre elles. Les chromosomes contiennent des instruc-
tions biologiques visant les membres d'une espèce et détermi-
nant par exemple la structure de leur squelette, la grosseur du
cerveau, leur métabolisme, etc. Les singes possèdent 24 paires de
chromosomes, 48 au total; les êtres humains en possèdent 23,
46 seulement au total. Par rapport à nos parents les plus proches,
il nous « manque» apparemment toute une série de chromo-
somes. Toutefois, notre constitution génétique est marquée par
une singularité intéressante.
À l'endroit où les chromosomes paraissent manquer dans
notre génome, on constate que le chromosome humain 2 est très
similaire et qu'il correspond aux chromosomes 12 et 13 du chim-
panzé, comme s'ils s'étaient combinés (fusionnés) en un morceau
d'ADN plus important 10 • Fait notable, cette fusion ne s'est
produite que chez les humains.
Voici en quels termes techniques l'article de la revue scien-
tifique Proceedings of the National Academy of Sciences (octobre
1991) décrit cette fusion : «Nous concluons que le locus cloné
dans les cosmides c8.1 et c29B est le vestige d'une ancienne fusion
entre téIo mères et qu'il marque le point où deux chromosomes
des singes ancestraux se sont fusionnés pour donner naissance au
chromosome humain 2 11 • » (Les italiques sont les miens.)
Autrement dit, les deux chromosomes apparemment absents
de notre ADN ont été découverts, alliés en un unique chromo-
some qui nous appartient en propre. Par ailleurs, d'autres traits
partagés par les gènes de l'humain et du chimpanzé sont presque
identiques12 •
Comment cette fusion de l'ADN s'est-elle opérée? Les scien-
tifiques l'ignorent. Mais les conclusions des études ont ouvert
une porte mystérieuse qui nous permettra de découvrir la
réponse. C'est le fait que ces chromosomes ont fusionné, et la

12
Qui sommes-nous? En quête de notre identité

manière dont ils l'ont fait, qui a incité les scientifiques à supposer
que seul un processus rare a pu donner naissance à ce phéno-
mène génétique13. Ces recherches révèlent que l'organisation de
l'ADN qui rend unique le chromosome 2 (et nous-mêmes) n'est
pas quelque chose que l'on peut attendre de la sélection naturelle
darwinienne.
Qu'a-t-il bien pu survenir dans un passé lointain pour
produire de telles altérations dans le code fondamental de la vie ?
Bref, nous l'ignorons. Une accumulation de preuves issues de la
comparaison entre la physiologie humaine et celle des primates
suggère néanmoins que l'Homo sapiens ne s'intègre pas vraiment
aux stades évolutionnaires traditionnels .

•••
Les données récentes tirées de l'ADN et l'absence de preuves
fossiles qui appuieraient la notion de l'évolution humaine à
partir de primates inférieurs indiquent plutôt que nous sommes
peut-être une espèce unique en soi. Au lieu de postuler que nous
descendons de formes antérieures de primates, cette théorie
soutient que nous en sommes distincts.
La comparaison des caractères primates et humains, comme
la densité osseuse, notre capacité à pleurer, à suer et le fait d'avoir
une chevelure et non une fourrure, vient appuyer cette théorie
tout en alimentant la controverse parmi les tenants du création-
nisme et de la thèse de l'évolution.
Si ces découvertes sont susceptibles d'engendrer plus de
questions qu'elles n'en résolvent, chaque étape de l'investiga-
tion contribue à accroître notre connaissance de nous-mêmes et
précise notre position dans l'univers et notre rôle dans la créa-
tion. Des témoignages supplémentaires fournis par les chro-
niques fossiles valident ces études, indiquant qu'en dépit de
caractéristiques communes avec des formes inférieures de vie,
nous nous sommes développés indépendamment de celles-ci, suivant

13
Vérité essentielle

une progression génétique qui nous est propre. Notre espèce est
peut-être beaucoup plus ancienne qu'on l'avait cru; et nous avons
peut-être très peu changé pendant notre séjour ici, par rapport à
l'évolution.
De toute évidence, les sources d'information étoffant le créa-
tionnisme et la thèse de l'évolution sont incomplètes; leurs inter-
prétations sont donc sujettes à révision à mesure qu'apparaissent
de nouvelles données.

Ce que nous ne sommes pas


La vérité de ce qui « est» apparaît parfois en déterminant
ce qui «n'est pas». Par élimination, nous parvenons à mettre le
doigt sur la compréhension que nous cherchons. C'est ainsi que
nous semblons assimiler les grandes leçons de la vie dans nos
rapports personnels avec nos bien-aimés, notre famille, nos amis
et nos collègues ainsi que dans les conflits ou la paix entre les
nations. Nous vivons ce que nous ne voulons pas avant de savoir
que nous ne le souhaitions pas.
Ce n'est qu'après avoir vécu la guerre à l'échelle mondiale,
par exemple, et ce, non pas une fois mais deux, que nous avons
décidé de l'interdire. Ce n'est qu'après l'inconcevable génocide au
milieu du :xxe siècle que nous avons décidé de ne jamais laisser
les événements en venir à cela.
À l'heure actuelle, plusieurs scientifiques, professeurs et cher-
cheurs traditionnels épluchent les découvertes du dernier siècle
pour noter ce qui est valable et ce qui ne l'est pas en ce qui a trait
aux origines de l'homme. Leurs observations sont si nombreuses
qu'on les publie presque quotidiennement. À dire vrai, on fait
état d'une telle quantité d'informations nouvelles que les revues
scientifiques - comme Science, par exemple - ajoutent désormais
un bulletin hebdomadaire à leurs publications mensuelles pour
garder leurs abonnés au fait des dernières découvertes.
Bien que toute cette entreprise vise à éclairer ce que le
xxe siècle a révélé, plusieurs des découvertes clés corroborant
14
Qui sommes-nous? En quête de notre identité

ou infirmant les problèmes investigués par les scientifiques ne


sont pas présentées dans nos manuels et nos salles de cours. Cela
signifie que nous investissons nos espoirs, notre confiance et nos
promesses d'avenir en une jeunesse qui étudie une science fondée
sur des principes désuets.
Apprendre à conduire une voiture sans d'abord connaître
les règlements routiers ne peut donner un conducteur habile ;
de même, réduire la nature aux atomes et aux molécules sans
connaître notre relation à ceux-ci ne pourra jamais mener à des
solutions valables aux crises actuelles. Que nous révéleraient les
découvertes du :xxe siècle à notre sujet et sur notre passé si nous
en tirions l'essence? Que démontre la science de pointe en ce qui
concerne qui nous sommes et qui nous ne sommes pas ?
La liste partielle ci-dessous donne une idée de la direction
que prendra peut-être la nouvelle science. Il est indéniable ...

• que la théorie des cellules vivantes mutant au hasard


{évoluant) sur de longues périodes n'explique pas les
origines ni la complexité de l'existence humaine;
• que le lien biologique entre les hommes et des formes
de vie similaires à l'homme dans notre généalogie
ancestrale n'est qu'une inférence, pas un fait;
• que les études sur l'ADN démontrent que nous ne
sommes pas descendants des familles de Néandertals,
comme on l'a d'abord cru;
• que nous n'avons que peu changé depuis l'apparition
des premiers hommes modernes {PHM), il y a envi-
ron 200 000 ans ;
• qu'il est peu probable que l'ADN qui fait de nous
des humains et qui nous rend uniques se soit formé
suivant les processus naturels de l'évolution.

Maintenant que nous avons une idée de ce que nous ne


sommes «pas», que nous révèle la science de pointe sur qui

15
Vérité essentielle

nous sommes ? La réponse représente la clé aux six chapitres


subséquents.
Il y a trois cents ans, la pensée scientifique entourant les lois
de la physique newtonienne nous a incités à concevoir l'univers,
notre monde et notre corps comme des parties d'une grande
machine cosmique - à savoir, des systèmes immenses et infimes
distincts les uns des autres, indépendants les uns des autres, et
remplaçables.
Il y a cent cinquante ans, Charles Darwin suggérait que nous
sommes le produit final d'un parcours de 200 000 ans, des survi-
vants à une compétition évolutionnaire qui ont lutté pour main-
tenir leur position sur terre et doivent continuer à se battre.
Par ailleurs, la science des cent dernières années nous incite
à croire que la technologie représente la solution à tous nos
problèmes et que grâce à elle nous allons vaincre la nature des
menaces à notre survie.
Ces idées se fondent toutes sur une croyance erronée décou-
lant d'informations scientifiques qui sont, au bas mot, incom-
plètes. Dans certains cas, elles sont même carrément fausses.
Avant de répondre à la question «qui sommes-nous?», nous
devons nous pencher honnêtement sur ces vérités que nous avons
prié la science de nous dévoiler. C'est ainsi que nous constatons
rapidement comment les fausses suppositions nous ont autrefois
conduits à stagner sur la voie de la découverte, comme si notre
quête de solutions aux mystères de la vie s'enlisait.
Les découvertes présentées dans les chapitres subséquents
sont bien réelles. Elles correspondent aux sujets d'actualité qui
devraient faire la une des journaux et des magazines classiques
partout dans le monde. En revanche, elles sont reléguées à des
revues et des bulletins techniques confinés à un lectorat d'érudits.
Voilà toutefois qui permet de comprendre pourquoi nos manuels
scolaires accusent un sérieux retard par rapport au fil des décou-
vertes. Mais cela peut aussi nous permettre d'avoir une idée de la
direction que les explorations prendront en ce qui concerne les
prochaines incursions dans les mystères de notre existence.

16
Qui sommes-nous? En quête de notre identité

Vérité 1 : Notre capacité de désamorcer les crises qui


menacent notre existence et notre monde dépend de
notre volonté d'admettre ce que dévoile la science à
propos de nos origines et de notre histoire.

17
CHAPITRE 2

LA VÉRITÉ PROFONDE DES


SUPPOSITIONS FAUSSES :
DES DÉCOUVERTES Q1JI
CHANGENT TOUT

«Si un concept s'avère parfois déroutant, ce n'est pas


parce qu'il est profond, mais parce qu'il est erroné. »
- E. 0. WILSON, BIOLOGISTE ET NATURALISTE

En 2008, deux frères firent paraître un film sur leur recherche


de réponse à certaines des questions les plus anciennes et peut-
être les plus insondables de la vie, dont « Qui suis-je? » et « Quel
est le sens de la vie ? ». Acclamé par la critique et primé par plus
de trente prix prestigieux, le film de Clifford et Jeffrey Azize est
bouleversant, sidérant. Il s'intitule tout simplement L'expérience
humaine 1•

19
Vérité essentielle

L'intrigue émouvante transparaît au fil des images de


rencontres uniques entre les frères et des enfants perdus au Pérou
ou des lépreux abandonnés au Ghana. Ces rencontres suscep-
tibles de bouleverser une vie les conduisirent, ainsi que les spec-
tateurs, à une compréhension plus profonde des expériences
universelles unissant la famille humaine.
Le film s'interroge sur les mêmes thèmes anciens et sans
réponse qui préoccupent l'homme depuis que nos premiers
ancêtres ont tenté de se figurer le cosmos et notre rôle au sein
de celui-ci, il y a 200 000 ans. Au fil des âges, nous avons fait
de notre mieux pour répondre aux « éternelles questions » sur la
vie : Qui sommes-nous? D'où venons-nous? Comment sommes-nous
arrivés ici? Où allons-nous? D'une époque à l'autre, les plus excel-
lentes méthodes disponibles furent mises à contribution.
Notre ère scientifique n'est pas différente. La science offre le
moyen d'explorer les mystères de ce monde et de notre corps, et
donne un sens aux choses de la vie apparemment absurdes.
Bien que j'aie reçu une formation scientifique et qu'on m'ait
inculqué ses méthodes, personne n'a jamais précisé ce qu'est la
science et pourquoi elle a si bien réussi dans son exploration du
monde.
Le brillant physicien Einstein décrivait en termes poétiques la
science comme étant «la tentative de faire correspondre la diver-
sité chaotique de notre expérience sensorielle à un système de
pensée qui suit une logique uniforme2 ».
Dans ses formes les plus pures, la science se dissocie de
l'émotion ou des attentes susceptibles de modifier la perception
du monde du scientifique. Faire appel aux procédures élaborées
antérieurement point par point par d'autres scientifiques - ce que
l'on nomme la méthode scientifique - assure aux chercheurs une
base solide lorsqu'ils aboutissent à des découvertes qu'ils partage-
ront avec le monde.
La datation de l'un des sites archéologiques les plus anciens
illustre parfaitement mon point. Pour dater au carbone 14 le site
de Gobekli Tepe en Turquie, les chercheurs firent appel à une

20
La vérité profonde des suppositions fausses ....

méthode solidement établie. Quand l'âge du site se révéla être


de 11517 à 11623 années - deux fois l'âge de Sumer, que l'on
a longtemps cru la plus ancienne civilisation du monde-, les
données étaient fondées sur une approche avérée, et on prit donc
les conclusions au sérieux.
Règle générale, la méthode scientifique décrit la séquence
d'étapes à suivre pour qu'une idée soit admise par la commu-
nauté scientifique. La Figure 2.1 illustre cette séquence.

LA MÉTHODE SCIENTIFIQUE
1. Nous observons un phénomène inexpliqué.
2. Nous développons une explication (hypothèse).
( 3. Nous vérifions cette hypothèse par une expérience qui nous procure des faits.
4. Nous évaluons ces faits .
a. Si les faits soutiennent l'hypothèse, nous obtenons alors une théorie.
. . . b. Si ce n'est pas le cas, nous devons retourner à l'étape 2,
1 modifier l'hypothèse et répéter le processus.

Figure 2.1 : Les quatre étapes de la méthode scientifique. Cette séquence offre
un moyen cohérent d'établir les faits et de découvrir où ils n'appuient pas notre
optique. L'excellence de la méthode scientifique dépend toutefois de la discipline et
de l'honnêteté de l'individu qui l'emploie.

Si je présente la méthode scientifique à ce stade du livre, c'est


pour une raison précise. La séquence de la Figure 2.1 montre
que si un fait nouveau apparaît et modifie une idée existante,
alors l'ancienne pensée doit être mise à jour pour faire place à
l'information nouvelle. La méthode permet - elle attend - que de
l'information nouvelle soit découverte au fil du temps et qu'elle
s'assimile à un corps de connaissances et de croyances. Lorsque
les physiciens découvrirent par exemple que l'atome n'est pas la
plus petite particule de matière et qu'il est constitué de particules
plus petites, les anciens modèles devinrent désuets. Ils firent place
à de nouvelles modélisations intégrant quarks, leptons, gluons,
etc. Cette mise à jour de la connaissance scientifique grâce aux

21
Vérité essentielle

faits avérés par de nouvelles découvertes permet à la science de


demeurer honnête, actuelle et pertinente.
Ne pas tenir compte de faits nouveaux et démontrés parce
qu'ils ne viennent pas appuyer une hypothèse scientifique exis-
tante n'est pas scientifique. C'est pourtant précisément ce qui se
produit aujourd'hui lors de la préparation de manuels scolaires
et de cours. Dans les chapitres subséquents, nous prendrons
connaissance de découvertes qui ne paraissent pas encore dans
le programme éducatif pour plusieurs raisons, dont la réticence à
renoncer aux anciens modèles et aux anciennes façons de penser.
Ce sont néanmoins ces découvertes mêmes qui permettent de
comprendre le passé tout en détenant la clé de choix avisés pour
l'avenir.
Outre des moyens cohérents d'explorer le monde naturel, la
science offre un langage qui donne la possibilité de communiquer
les conclusions de manière signifiante. Si un biologiste affirme
qu'un phénomène mystérieux survient chez l'embryon humain
après les trois premières mitoses, nous savons précisément à quel
stade de développement il fait référence.
Je tiens à souligner que d'autres langages sont employés pour
décrire le monde naturel. Certains, dont l'alchimie et la spiri-
tualité, existent depuis beaucoup plus longtemps que la science.
Même si celles-ci ne sont définitivement pas «scientifiques» (en
ce sens qu'elles ne reposent pas sur des découvertes avérées pour
expliquer la nature), elles nous ont permis de comprendre notre
relation au monde, et les uns avec les autres, depuis longtemps.

Pommes, aimants et l'ère scientifique


Règle générale, on admet que la science moderne et l'ère
scientifique ont débuté en juillet 1687. Isaac Newton publia
alors son ouvrage Philosophiae Naturalis Principia Mathematica
(en français, Principes mathématiques de la philosophie natu-
relle), un ouvrage qui a fait école et démontré les mathématiques

22
La vérité profonde des suppositions fausses ....

décrivant notre univers quotidien 3• Depuis plus de deux cents


ans, les observations de Newton sur la nature ont servi de fonde-
ment au domaine scientifique désigné physique classique.
Grâce aux théories sur l'électricité et le magnétisme de la fin
des années 1800 et aux théories d'Albert Einstein sur la relativité
du début des années 1900, la physique classique a réussi à four-
nir une explication aux «gros objets» dans l'univers : le mouve-
ment des planètes et des galaxies, la chute de pommes des arbres
{selon l'anecdote populaire, Newton aurait découvert la loi de la
gravité après qu'une pomme lui fut tombée sur la tête), etc. Cette
explication nous a si bien servis que grâce à la physique classique
nous avons été en mesure de calculer l'orbite de nos satellites et
d'envoyer des hommes sur la Lune.
Au début des années 1900, cependant, de nouvelles explo-
rations démontrèrent que les lois de Newton ne s'appliquaient
pas partout dans la nature. Sur l'univers infime des particules
dans l'atome jusqu'au comportement des atomes lors de la nais-
sance d'étoiles dans des galaxies éloignées, la physique classique
n'avait pas d'explications à fournir. Selon la méthode scientifique,
si la manière de penser existante ne parvient pas à expliquer ce
que nous voyons, alors il faut mettre à jour notre perception du
monde afin de tenir compte des nouvelles observations et décou-
vertes. Dans le domaine de la physique, cette attitude a produit
ce que nous appelons aujourd'hui physique quantique : l'étude à
une échelle infinitésimale des phénomènes régis par des forces
qui sous-tendent l'univers matériel.
Dès que la physique quantique eut fait son apparition, le
grand défi fut de marier les diverses vues représentées par la
physique classique et la physique quantique en une théorie unique
sur l'univers et la vie: une théorie unifiée. À date, on n'y est pas
parvenu. Quelques théoriciens ont résolu des fragments indivi-
duels du casse-tête, mais aucun n'a résolu le problème dans son
ensemble. À l'instar de fissures qui se forment sur un barrage une
fois qu'on a comblé les failles existantes, les théories naissantes

23
Vérité essentielle

ont répondu à certaines questions, mais en ont suscité d'autres là


où l'on ne supposait même pas l'existence de questions.
L'évolution de la théorie des cordes illustre parfaitement ce
point. En 1980, l'idée que l'univers était constitué de cordes
d'énergie invisibles qui vibrent laissait entrevoir la prochaine
grande révolution en physique. Cependant, plus les physi-
ciens examinaient la théorie à fond, plus cette idée présentait
des problèmes. « La théorie des cordes, c'était une bulle prête à
éclater», affirme le mathématicien Peter Woit de l'Université de
Columbia. « Les principes de base n'y étaient plus4• »
De même, l'équation d'abord prometteuse de Wheeler-
DeWitt (équation WD) en vue d'unifier les physiques classique
et quantique s'effondra rapidement lorsque les «clauses cachées»
devinrent évidentes. Pour accomplir cette tâche apparemment
impossible, l'équation WD omettait un facteur important qui
entraînait des problèmes : le facteur temps. Si cette omission faci-
litait les calculs, le temps fait partie de notre monde et de notre
vie. Sans celui-ci, les équations ne peuvent représenter adéquate-
ment le mystère qu'elles tentent de résoudre.
Pour le moment, la réalité crue est donc celle-ci: il y a main-
tenant plus d'un siècle que Max Planck a formulé les principes au
cœur de la théorie quantique. Après cent ans où des esprits scien-
tifiques les plus illustres travaillèrent sur les théories les plus avan-
cées en mathématiques et en physique, et évaluèrent les théories
les plus complexes dans les instituts de recherche les plus évolués
de l'histoire du monde, on s'attendrait logiquement à avoir résolu
les problèmes majeurs qui compromettent notre vision scienti-
fique du monde. Et ce, si nous étions sur la bonne voie.
Puisque nous ne le sommes pas, nous devons maintenant
envisager la possibilité d'être sur une fausse piste.

24
La vérité profonde des suppositions fausses ....

La science est-elle sur une fausse piste ?


Si les idées de base sur le fonctionnement de la réalité ne sont
que partielles, alors tous les cerveaux et toute la technologie appli-
qués à ces idées erronées n'obtiendront pas de réponses valides.
En dépit d'un siècle d'enseignements, de millions de manuels
publiés et de carrières entières consacrées aux théories, ainsi que
des considérables investissements économiques effectués pour
la construction et l'opération d'appareils des plus sophistiqués
pour les évaluer, si les idées sont fausses au départ, elles ne seront
jamais rectifiées en suivant la voie qui y a mené.
Cette préoccupation prédomine lors de tous les symposiums
et toutes les conférences scientifiques tenus à l'heure actuelle :
Sommes-nous sur la bonne voie? En ce qui concerne notre rela-
tion au monde, notre pensée est-elle juste et posons-nous les
bonnes questions ?
En 2010, dans un article de Prospect intitulé« Limpasse de la
science», le physicien James Le Fanu donne deux exemples préci-
sant pourquoi plusieurs critiques remettent en cause la valeur de
la science nouvelle et posent une question qui pèse plus lourd que
«La science est-elle sur la bonne voie5 ?» Le Fanu formule cette
question sans ambages, exprimant tout haut et publiquement ce
à quoi d'autres ont seulement fait allusion ou ce qui se chuchote
en privé. Voici la question : La science est-elle bloquée?
Le Fanu explique pourquoi il est facile de le supposer :

À une époque où les cosmologues peuvent inférer avec


certitude ce qui s'est produit quelques minutes après la
naissance de l'univers et où les géologues peuvent mesu-
rer le mouvement des continents au centimètre près, il est
troublant que les généticiens ne puissent nous dire pour-
quoi les êtres humains sont si différents des drosophiles
et pourquoi les neuroscientifiques ne peuvent nous dire
comment nous parvenons à nous souvenir d'un numéro
de téléphoné.

25
Vérité essentielle

Le Fanu a raison. Son exemple des humains et des droso-


philes illustre parfaitement le problème.
Après l'achèvement du Projet génome humain (PGH) en
2001, les scientifiques apprirent avec étonnement que le plan
génétique de l'être humain est de 75 % plus petit que ce que l'on
attendait. Un écart considérable existe - il «manque» environ
75 000 gènes - et les scientifiques furent contraints de faire un
aveu difficile à propos de leurs suppositions antérieures. Avant
les résultats de ce projet, on avait cru qu'il y avait une corres-
pondance directe entre nos gènes et les protéines. Autrement dit,
chacune des protéines de notre corps est issue d'un seul gène
contenant les instructions pour la produire.
Après l'achèvement du PGH, il devint évident que cette idée
n'était pas seulement incorrecte, mais complètement erronée,
à cause de la conviction qu'une relation directe existe entre les
protéines et les gènes - une supposition fausse datant du milieu
du xxe siècle sur laquelle les scientifiques érigèrent tout un
système de valeurs. Pour finir, ils durent reconnaître que si un
nombre si petit de gènes nous distingue des formes inférieures
de vie, comme les drosophiles de Fanu ou la souris des champs,
alors ils avaient aussi tort quant à ce qui nous rend uniques.
Craig Venter, président d'une firme à la tête d'une équipe
cartographiant les gènes, identifia immédiatement le problème,
déclarant : «L'homme possède seulement 300 gènes uniques que
l'on ne retrouve pas chez la souris7• » Poussant plus loin les conclu-
sions de son équipe, Venter affirmait : «Cela m'indique que les
gènes ne peuvent pas expliquer tout ce que nous sommes 8 • »
Voilà un parfait exemple du dilemme engendré par une
supposition fausse et où celle-ci peut conduire. Si seulement
300 gènes nous distinguent de la souris, où chercher ce qui nous
rend si différents ? Si, comme le suggèrent les faits, la différence
ne réside pas dans l'ADN, alors où se situe-t-elle? La réponse a
ouvert une véritable boîte de Pandore dont les possibilités nous
mènent sur une voie de non-retour. Les scientifiques doivent
maintenant chercher la réponse à cette question ailleurs que dans

26
La vérité profonde des suppositions fausses ....

l'ADN du corps. Nous nous retrouvons ainsi dans le domaine


des champs non mesurés et des forces invisibles, un domaine où
les scientifiques ont toujours hésité à s'avancer.
Au bout du compte, la clé de ce qui nous rend si diffé-
rents d'autres formes de vie réside peut-être dans nos traditions
archaïques et nos croyances profondément ancrées. Presque
universellement, ces sources affirment que nous sommes infusés
de l'« étincelle» d'une mystérieuse essence qui nous unit éternel-
lement les uns aux autres, et de quelque chose d'invisible au-delà
de notre monde matériel. C'est cette étincelle qui nous distingue
des autres formes de vie sur terre.
La question derrière les commentaires de Le Fanu sur les
souris et les drosophiles est tout simplement celle-ci : si nous
étions vraiment sur la bonne voie et si nous posions les questions
justes, pourquoi n'avons-nous pas alors comblé les grandes failles
dans notre compréhension ? Pourquoi ne pouvons-nous pas expli-
quer la conscience humaine ni unifier la physique classique et la
physique quantique? Pourquoi le mystère des débuts de la vie
dans la matrice demeure-t-il intact? Et pourquoi ne savons-nous
pas qui sont les fondateurs des civilisations anciennes que l'on
fait remonter à l'ère glaciaire ? Serait-ce que, en ce qui concerne
notre perception de nous-mêmes en ce monde, nous avons été sur
une fausse piste et, en outre, que nous sommes bloqués sur cette
fausse piste qui nous oriente dans la mauvaise direction ?

De nouvelles découvertes ou une version améliorée des


vieilles découvertes ?
Ces lacunes dans nos connaissances, conjuguées à ce que l'on
conçoit comme des résultats de plus en plus faibles par rapport
aux sommes versées pour la recherche scientifique, incitent
quelques critiques à voir cette pause dans les percées comme une
stagnation. Autrement dit, si les sciences appliquées comme la
génétique et l'informatique continuent de progresser, les percées

27
Vérité essentielle

sont des raffinements de ce que nous connaissons déjà. Elles


reposent sur des progrès antérieurs.
Les avancées en technologie liées à la conservation de l'in-
formation, aux télécommunications, à la vitesse des micropro-
cesseurs et à la réduction des dimensions de nos ordinateurs à
mesure que leur puissance grandit sont moins des percées qui
éclairent les mystères du monde et davantage des développements
de principes déjà compris. Les puces électroniques l'illustrent
parfaitement.
La puce qui a donné naissance à l'ordinateur fut développée
en 1958. Elle s'appuyait sur la pensée scientifique del' époque qui
concevait l'information comme de l'énergie à conserver dans un
support matériel, qui doit se mouvoir le long de câbles physiques
reliant des appareils. À la base de ces idées, la première puce
commerciale ne requérait qu'un seul transistor pour opérer. Bien
qu'aujourd'hui la haute technologie des puces soit infiniment plus
sophistiquée que celle qui a fabriqué les premières puces en 1958
(certaines comportent maintenant plus de 125 millions de tran-
sistors), les puces récentes sont un perfectionnement superbe usant
de matériaux nouveaux, raffinant l'idée originale que l'informa-
tion est une «substance» qu'il faut conserver dans un support.
Parallèlement aux développements de la technologie des
puces reposant sur les anciennes conceptions de l'énergie, les
découvertes quantiques démontraient aux scientifiques que notre
monde n'est qu'énergie. Et l'énergie du monde constitue de l'in-
formation. Autrement dit, l'information est partout, imprégnée
dans l'énergie qui constitue tout. Cette réalisation profonde
indique que les données digitales dans nos livres et appareils de
communication n'ont pas à être captées et conservées sous forme
de «substances» dans un support matériel.
L'information peut plutôt être conservée à l'extérieur d'une
puce, en un lieu que la théorie quantique décrit comme le fonde-
ment de la réalité : le champ quantique. Ici, les propriétés qui
caractérisent le champ (holographie et intrication) suggèrent que
les limites de distance et d'espace qui contraignent les fabricants

28
La vérité profonde des suppositions fausses ....

actuels disparaîtraient grâce à une informatique quantique


parachevée.
Nous détenons déjà la connaissance. La technologie existe
déjà. Et même si des scientifiques avant-gardistes et visionnaires
tels que Seth Lloyd, professeur de génie mécanique au MIT
[Massachusetts Institute of Technology], ont démontré que
l'informatique quantique est possible dans le laboratoire, le plus
important changement requis pour accueillir de telles avancées
concerne moins la technologie que notre manière de la considérer.
Le fait d'accepter des théories reposant sur des suppositions
fausses empêche les scientifiques de fournir des réponses aux
grandes questions sur la vie et l'univers.

Des faits sources d'embarras


Si certains critiques s'interrogent pour savoir si la science est
bloquée, d'autres demandent si elle n'a pas échoué. Une courbe
de maturité accompagne tout système de croyances auquel
nous faisons appel pour comprendre le monde. À la naissance
de l'Église chrétienne au Ine siècle, par exemple, on croyait que
cette religion nouvelle détenait les solutions aux questions les plus
profondes sur l'existence de l'humanité. À mesure que la reli-
gion évoluait et que ses adeptes acquéraient une compréhension
plus fine, les croyances changèrent. Si l'Église procure toujours
une base sociale puissante aux familles et aux communautés, on
remet désormais en cause sa capacité d'apporter des réponses
utiles aux problèmes du quotidien.
Notre monde est sans doute meilleur; notre vie s'est amélio-
rée grâce aux bienfaits de la science. Cette dernière a certai-
nement raison sur certains points, et les percées scientifiques
continuent d'apporter des avantages, dont les progrès médicaux
qui ajoutent des années à notre longévité. Néanmoins, d'autres
domaines présentent des lacunes et des incohérences sur le plan
scientifique qui sont devenues des écueils opiniâtres dans nos
tentatives de déchiffrer les mystères de la vie et de la nature. Ce
29
Vérité essentielle

sont des faits flagrants : des théories incomplètes formant la base


de la démarche scientifique ... des problèmes non éclaircis qui
influent sur notre perception de nous-mêmes, malgré l'absence
d'explications complètes.
Outre l'inexistence d'une correspondance directe entre les
gènes et les protéines mentionnée plus haut, on compte d'autres
faits embarrassants pour la science - elle ne rend pas compte
du champ d'énergie qui rend possible l'intrication quantique,
elle n'a pas de théorie évolutionnaire expliquant les origines de
la vie et de l'humanité, et elle omet de reconnaître les indices de
civilisations évoluées du passé, en tant que partie d'un modèle
cyclique de la civilisation.
Le fait que la pensée traditionnelle n'ait pas réussi à résoudre
les mystères les plus occultes de notre existence jette le doute sur
ce que nous utilisons comme fondement pour notre réalité. La
méthode scientifique soutient que si des faits avérés n'appuient
plus une façon de penser, il faut réévaluer cette dernière9. Et avec
le nombre croissant de découvertes qui nous détournent de nos
convictions antérieures, nous ne pouvons plus écarter les faits
scientifiques que nous considérions comme anormaux autrefois ;
il faut les intégrer à la science traditionnelle. Dans les sections
subséquentes, nous verrons que certaines suppositions appar-
tiennent à des catégories de croyances qui nous empêchent de
progresser vers une vision vraiment viable du monde et du rôle
que nous y jouons.
Pour résoudre les crises actuelles en adoptant l'attitude dictée
par la science à l'égard de notre monde et de nous-mêmes, il
faudra se comporter en ce xx1e siècle comme les physiciens
durent le faire il y a un siècle. Tout comme ils ont dû modifier
leurs idées pour admettre les preuves de la théorie quantique,
nous devons nous ouvrir aux découvertes récentes qui ont boule-
versé quelques-unes des convictions scientifiques les plus ancrées.
Si nous n'y parvenons pas, nous demeurerons enlisés dans les
croyances et le mode de vie qui nous conduisent directement sur
la voie destructrice où nous nous retrouvons aujourd'hui.

30
La vérité profonde des suppositions fausses ....

Les suppositions scientifiques erronées


Partout dans le monde, notre perception de nous-mêmes
se réforme. Cette révolution incite à réécrire l'histoire de nos
origines, de notre passé, du temps que nous avons passé ici et de
notre destination future. Bien que cette révolution ait commencé
au début du xxe siècle, l'individu moyen préoccupé par ses
routines ne l'a pas remarquée, à moins d'appartenir au groupe de
scientifiques ayant consacré leur vie à comprendre le fonctionne-
ment de la vie et de l'univers.
En l'occurrence, pour les archéologues qui cherchent à inté-
grer dans la chronologie traditionnelle la découverte de civili-
sations avancées à l'ère glaciaire, et les biologistes qui publient
plus de 400 études examinées par les pairs démontrant que la
nature se fonde sur la coopération, non sur la survie du plus fort,
la révolution de pensée donne l'impression d'un fort séisme.
Elle rase tout, car les nouvelles idées broient les convictions
que chérit la science classique. Elle laisse un vaste sillage d'en-
seignements périmés, exigeant la réévaluation de traditions de
longue date et anéantissant l'héritage laissé par des carrières tout
entières. Pourquoi? Des découvertes démontrent l'inexactitude
de plusieurs «faits» scientifiques qui, depuis des siècles, servaient
à expliquer l'univers et notre rôle en celui-ci.
Un paradigme dépassé sur l'univers et notre relation à celui-
ci se fondait sur une série d'hypothèses scientifiques - de suppo-
sitions fausses - que l'on ne peut plus considérer comme des faits
à la lumière de preuves récentes. Voici quelques cas :

• Fausse supposition 1 : la civilisation a 5 000 à 5 500 ans.


• Fausse supposition 2 : la nature repose sur le principe de
«la survie du plus fort».
• Fausse supposition3: les origines de l'homme s'expliquent
par des événements fortuits au fil de l'évolution.

31
Vérité essentielle

• Fausse supposition 4 : la conscience est distincte de


notre monde matériel.
• Fausse supposition 5: l'espace entre les choses est vide.

Si on réfléchit au quotidien - soins prodigués à nous-mêmes


et à notre famille, solutions apportées à nos problèmes, choix
effectués -, on constate que l'essentiel du savoir collectif repose
sur l'acceptation de ces suppositions fausses, vestiges d'une
science désuète qui a vu le jour il y a 300 ans. Ce n'est peut-
être pas une coïncidence si, au cours de la même période, le monde
affronte les crises les plus graves - guerres, souffrances et maladies -
dans les annales de l'histoire. Ces idées sur nos origines chimiques
arides, sur notre arrivée récente sur terre et sur notre séparation
de la nature nous ont incités à croire que nous ne sommes que des
poussières dans l'univers et un aparté biologique dans le schème
global de la vie.
Il n'est pas surprenant que nous nous sentions impuissants
à secourir les êtres qui nous sont chers ou nous-mêmes lors de
grandes épreuves. Il n'est pas surprenant que nous nous sentions
tout aussi impuissants devant notre monde qui se transforme si
rapidement que l'on a dit qu'il «s'effondre comme un château
de cartes». A priori, il ne semble y avoir aucune raison de penser
autrement ou de croire que nous avons un contrôle sur nous-
mêmes ou sur les événements. Après tout, nos manuels ou nos
vues traditionnels n'autorisent rien d'autre ... jusqu'à ce que nous
réexaminions les découvertes des dernières années du xxe siècle.
Si les résultats de la recherche qui anéantit les paradigmes ont
été publiés dans d'illustres revues techniques, ils le sont dans la
langue abstruse de la science qui voile au profane l'envergure de
leur signification. Les gens sans formation scientifique ni techno-
logique ne mesurent pas l'impact des nouvelles découvertes parce
qu'on ne les inclut pas dans la discussion. Et c'est ici qu'intervient
notre révolution.
Au lieu d'obéir aux trois premiers siècles d'imagerie scienti-
fique qui nous représentent comme des êtres insignifiants apparus

32
La vérité profonde des suppositions fausses ....

grâce à une série miraculeuse de coups de chance biologiques


et qui ont survécu à 5 000 ans de civilisation comme victimes
impuissantes et distinctes d'un monde brutal, la science nouvelle
propose une optique totalement différente. Vers la fin des années
1990 et le début des années 2000, des études examinées par les
pairs ont révélé les faits suivants :

• Fait 1 : la civilisation a au moins deux fois les 5000 à


5500 ans admis par les chronologies traditionnelles 10 •
• Fait 2 : la nature dépend, pour sa survie, de la coopé-
ration et de l'aide mutuelle, pas de la compétition11 •
• Fait 3: la vie humaine montre des indices indubitables
qu'elle est le produit d'une conception intelligente12 •
• Fait 4 : nos émotions influent directement sur le
cours des événements dans l'océan d'énergie où nous
baignons13 .
• Fait 5: l'univers, notre monde et notre corps sont consti-
tués d'un champ d'énergie partagé- une matrice-qui
rend possible l'unité que l'on désigne sous le terme
«intrication »14 .

On dit que la «folie», c'est de répéter la même chose à l'in-


fini et de la même manière dans l'attente de résultats différents.
Tenter de résoudre les crises sans précédent de notre époque, les
considérer avec le même regard que ces croyances qui ont pavé
la voie pour en arriver là, n'a aucun sens. Et se comporter ainsi
maintenant, tout en sachant que ces croyances ne tiennent plus,
en a encore moins.
Pour relever les défis de notre époque, il faut consentir à nous
percevoir autrement, non comme nous nous sommes perçus
depuis au moins trois siècles. Et pour y arriver, il faut franchir
quelques frontières traditionnelles qui isolent les découvertes d'un
domaine scientifique de celles d'autres domaines. Et ce dépasse-
ment donne lieu à quelque chose de merveilleux.

33
Vérité essentielle

La science eut tort, puis elle eut raison !


Une chaîne de connaissances relie notre monde moderne au
passé, et chaque fois qu'elle se rompt, nous perdons un précieux
savoir sur nous-mêmes. Nous savons que cette chaîne s'est
cassée à deux reprises au cours de !'Histoire : lors de l'incendie
de la grande bibliothèque à Alexandrie, en Égypte, pendant la
conquête romaine, et en raison des édits bibliques du IVe siècle
apr. J.-C. À mon sens, plus nous nous rapprochons des enseigne-
ments originaux qui existaient avant leur disparition, plus nous
pouvons comprendre clairement ce que savaient nos ancêtres et
ce que nous avons oublié.
Durant l'essentiel de ma vie adulte, j'ai été à l'affût d'en-
droits intouchés par la modernité afin d'y découvrir les sources
de sagesse indigène ancienne. Mon parcours m'a conduit vers
quelques-uns des sites les plus extraordinaires sur terre. Dans
les magnifiques monastères du plateau tibétain aux humbles
couvents dans les montagnes d'Égypte et au Pérou méridional,
jusqu'aux parchemins de la mer Morte et aux traditions orales
des autochtones de par le monde, j'ai pris connaissance des récits
et étudié les annales. Bien que les traditions que j'ai rencontrées
semblent différentes les unes des autres, des thèmes communs se
glissent dans le tissu collectif de notre passé.
L'un des thèmes prépondérants est notre rapport à la nature
et à notre monde, un rapport dont l'étendue n'a été confirmée
que récemment par la science moderne. La question qui me
revient sans cesse est celle-ci : si nos ancêtres avaient une compré-
hension si poussée de la Terre et de notre relation à celle-ci, et si
la science ne valide cette relation que maintenant, alors qu'est-ce
que les civilisations évoluées du passé savaient d'autre que nous
avons oublié?

34
La vérité profonde des suppositions fausses ....

Les vérités profondes


Lors d'une conversation avec Albert Einstein, Niels Bohr,
physicien lauréat du prix Nobel, nota une contradiction appa-
rente à propos de ce que nous considérons comme une «vérité».
Il souligna qu'il existe deux types très différents de vérité : « De
l'une sont les propositions si simples et si claires que la proposi-
tion contraire est évidemment insoutenable. De l'autre, de celle
des "vérités profondes", sont les propositions dont le contraire
contient aussi une vérité profonde15. »
La croyance scientifique voulant que tout soit séparé de tout
le reste constitue une vérité profonde démontrée par l'expérience
Michelson-Morley en 188716 . C'était la culmination fort atten-
due des efforts de la communauté scientifique en vue de détermi-
ner une fois pour toutes s'il existait ou non un champ universel
d'énergie unissant toutes choses. Selon la pensée de l'époque,
si ce champ existait, il devrait être mouvant et ses mouvements
seraient décelables.
Les scientifiques de l'époque interprétèrent les résultats de
l'expérience comme démontrant que ce champ n'existait pas.
L'implication des résultats - la conjecture scientifique - fut que
tout est séparé de tout le reste. Cela signifiait que ce qui se passait
en un lieu avait peu, ou pas du tout, d'influence sur ce qui se
passait ailleurs.
Les conclusions de l'expérience Michelson-Morley servirent
de base à la théorie scientifique et aux enseignements scolaires.
De génération en génération, nous étions persuadés de vivre dans
un monde où tout est séparé du reste. Cette croyance transpa-
raît dans plusieurs aspects de notre vie et de notre société, de
notre perception de nous-mêmes et de notre relation à la Terre
jusqu'aux systèmes économiques qui profitent à certains, au
détriment des autres. Pendant près d'un siècle, les suppositions de
Michelson et de Morley {les deux scientifiques dont l'expérience
porte le nom) furent admises en tant que fait ... jusqu'à ce que
l'on réitère l'expérience 99 ans plus tard.

35
Vérité essentielle

En 1986, un scientifique nommé E. W. Silvertooth repro-


duisit l'expérience Michelson-Morley dans le cadre d'une étude
parrainée par les forces aériennes américaines. Nature publia
les résultats sous le titre sans prétention «Relativité spéciale».
À l'aide d'appareils beaucoup plus sensibles qu'à l'époque de
Michelson et Morley, Silvertooth décela en effet un mouvement
dans le champ. Et ce mouvement s'associait précisément au
mouvement de la Terre dans l'espace, tout comme Michelson et
Morley l'avaient prédit un siècle plus tôt17. Je présente cette expé-
rience ici pour illustrer comment une vérité profonde admise un
jour peut changer ultérieurement.

Les vérités profondes sont des propositions dont


le contraire contient aussi une vérité profonde.

C'est la relation vaste et mystérieuse entre les ventes


profondes de notre passé (les suppositions fausses que nous
acceptons depuis toujours comme des vérités) et celles naissant
des découvertes récentes (qui indiquent que ces «vérités» anté-
rieures sont inexactes) qui nous divise sur tous les plans de la
société actuelle. Ces schismes se manifestent en tout, depuis le
terrorisme et les guerres entre nations jusqu'aux convictions qui
déchirent les familles. S'ils ne sont pas contenus, ils posent un
danger imminent pour notre monde.
Ultérieurement, Bohr reformula le paradoxe des vérités
profondes en termes plus simples : «Toute vérité profonde se
caractérise par le fait que sa négation est également une vérité
profonde18 • » Dans l'exemple ci-dessus, ce que Bohr désigne
comme la « négation » de vieilles hypothèses scientifiques (la
découverte qui perd son sens en présence de faits nouveaux)
fait de son contraire une vérité profonde. Et voilà pourquoi la

36
La vérité profonde des suppositions fausses ....

nouvelle d'une découverte récente prend l'allure d'une arme à


double tranchant.
L'avantage, c'est que l'information nouvelle nous procure
une manière plus actuelle et sans doute plus juste de considérer
les choses. L'inconvénient, c'est que des paradigmes entiers ont
été érigés sur des suppositions fausses. Les programmes scolaires
approuvés par les conseils d'administration et dispensés en cours,
la carrière d'enseignants, d'auteurs et d'universitaires ayant
consacré leur vie à enseigner ce paradigme, ainsi que les déci-
sions publiques et les politiques que les tribunaux ont édictées en
lois, tout cela est basé sur ce que l'on admet comme «vrai» dans
notre société. Nous découvrirons peut-être que nos croyances sur
le réchauffement planétaire, par exemple, appartiennent à cette
catégorie de vérité profonde.
Quelques personnes se sentent dépassées par cette perspec-
tive de remanier les systèmes judiciaires, politiques et univer-
sitaires déjà en place pour qu'ils reflètent une vérité profonde.
Pourtant, comment espérer gérer ces graves crises en l'absence de
ce remaniement? De toute évidence, les pires menaces pour notre
vie et notre monde résident dans les croyances pour lesquelles
nous nous battons et mourons, car ces croyances se fondent
sur des hypothèses au sujet du passé. Voilà pourquoi la clé de
notre survie consiste à découvrir ces vérités profondes dans notre
nature même.

La pyramide du savoir
Dans notre monde, tout est doué de signification et tout a un
sens pour tout le reste. Ce qui se passe dans les océans a un sens
pour le climat des montagnes. Ce qui se passe dans un fleuve
a un sens pour la vie qui dépend de lui. Les choix que vous et
moi effectuons en exprimant nos croyances dans nos salons ou
à table ont un sens pour notre entourage immédiat, mais aussi
pour les gens qui habitent de l'autre côté du monde. La nature ne

37
Vérité essentielle

comporte pas de démarcations départageant une partie de la vie


d'une autre. C'est pour cette raison précise que je comprends mal
pourquoi nous fabriquons de telles démarcations lorsque nous
étudions l'univers et la nature.
Par exemple, nous considérons la géologie comme distincte
de la physique et imaginons que la biologie n'a rien à voir avec le
quotidien. Bien que cette distinction facilite l'étude des pierres
ou des créatures vivantes pendant quelques années à l'univer-
sité, à un moment, il faudra les voir comme appartenant à notre
réalité quotidienne pour qu'elles acquièrent une utilité. C'est
ainsi que l'étude scientifique de notre monde se transforme en un
paradigme entièrement nouveau du fait qu'un type de connais-
sances est lié à d'autres types de connaissances.
Les disciplines scientifiques sont structurées en une
hiérarchie. Cette relation s'illustre visuellement par une pyra-
mide inversée. La plus petite partie de la pyramide, la pointe
tout en bas, représente la clé pour tout ce qui est au-dessus. En
science, cette pointe, ce sont les mathématiques. Voilà pourquoi
les paroles de l'un des premiers scientifiques, Galilée [en italien
Galileo Galilei], demeurent vraies à ce jour comme au moment
de leur rédaction il y a cinq cents ans. Il déclara que l'univers
est comme un « grand livre qui se tient constamment ouvert
devant nos yeux, mais qui ne peut être compris si on ignore les
caractères dans lesquels il est écrit. Et ce livre est écrit en langue
mathématique19. »
Notre savoir mathématique est l'outil qui nous permet de
décrire ce qui survient dans chaque domaine de connaissance
successif, en s'élevant sur la pyramide, illustrée dans la Figure 2.2.

38
La vérité profonde des suppositions fausses ....

Figure 2.2 : La hiérarchie entre les sciences sous forme de pyramide de connais-
sances. Les mathématiques forment la base sur laquelle se fondent les sciences
subséquentes. Cette relation permet de concevoir qu'une modification dans la com-
préhension scientifique sur n'importe quel plan de la pyramide doit être prise en
considération par chaque science au-dessus si celle-ci doit s'en tenir à la conformité
scientifique.

Après les mathématiques, la physique forme la couche subsé-


quente de connaissances sur la pyramide ; les principes mathé-
matiques sont appliqués aux forces de la nature, ce que nous
appelons les «lois» de l'univers. Ces phénomènes, comme la
gravité, la vitesse de la lumière, etc., s'appliquent ensuite à l'étude
de la chimie, la strate suivante dans notre modèle. Par les proces-
sus chimiques, les forces de l'univers agissent sur les éléments de
la nature pour façonner les bases de notre monde, dont l'étude
est la géologie. L'expression de chaque champ de savoir sous-
jacent influe, directement ou indirectement, sur la manifestation
de la vie en notre monde. La biologie est l'étude de la vie ; et
au-dessus, la psychologie, est la science qui permet de déchiffrer
le comportement humain.
Deux éléments ressortent de ce diagramme simple :
1. chaque champ joue un rôle vital dans la nature et se
rattache directement au champ qui le précède ;

39
Vérité essentielle

2. si de nouvelles découvertes altèrent notre perception de


nous-mêmes n'importe où dans la hiérarchie, tout ce qui est
au-dessus doit refléter cette nouvelle attitude.
Par exemple, lorsque les principes quantiques d'intercon-
nexion (ubiquité quantique) sont apparus en physique, chaque
discipline scientifique au-dessus de la physique sur le diagramme
aurait dû refléter cette compréhension. Si la chimie a commencé
à adapter les notions et à les enseigner, la biologie continue de
professer que les champs d'énergie, comme le champ magnétique
du cœur, sont locaux et n'ont que peu, ou pas, d'effets sur l'envi-
ronnement qui entoure le corps.
En raison du cloisonnement des disciplines, la science livre
une lutte sans relâche pour se rattraper elle-même. À en juger par
le passé, plus la discipline est élevée dans le diagramme, plus elle
met du temps à refléter les découvertes. Récolter les bienfaits de
la science relève de nous et de la sagesse avec laquelle nous appli-
quons ce que nous découvrons.
E. O. Wilson, biologiste évolutionnaire, l'exprimait très juste-
ment: «Nous sommes submergés par l'information tout en étant
affamés de sagesse. Désormais, des "synthétiseurs", ces gens
capables de rassembler l'information juste au moment opportun,
de l'analyser de manière critique et d'effectuer des choix sages régi-
ront le monde 20 • » Depuis l'invention de la roue (qui sert soit au
transport, soit à la torture) à l'invention des armes (employées pour
obtenir de la nourriture pour la communauté ou s'entretuer lors
de guerres), le contraste entre connaissance et sagesse entraîne un
conflit dans l'espèce entière, et ce, depuis fort longtemps.
Plus loin, nous examinerons les raisons qui nous poussent à
lutter et pourquoi cette lutte tire peut-être à sa fin. Pour l'instant,
il suffit de dire que la valeur de la science se mesure peut-être
moins par ses échecs et plus par l'emploi que nous en faisons,
nos attentes par rapport à celle-ci et notre relation au savoir et à
la sagesse.

40
La vérité profonde des suppositions fausses ....

Au-delà de la connaissance et de la sagesse : le bon sens


À tous points de vue, le xxe siècle a été une folle randon-
née pour les peuples de la Terre. De 1900 à 2000, la population
est passée de 1,6 à plus de 6 milliards d'individus, nous avons
survécu à deux guerres mondiales et à trente ans de guerre froide,
nous avons frissonné à l'idée de 70 000 ogives nucléaires que seule
la pression sur un bouton pouvait déclencher, nous avons déchif-
fré le code génétique de la vie, marché sur la Lune et fabriqué
des ordinateurs qui donnent à ceux qui ont guidé les premiers
hommes dans l'espace l'allure de jouets d'enfant. Cent ans de la
croissance démographique la plus rapide et des plus graves périls
à notre survie en 5 000 ans d'histoire. Plusieurs historiens esti-
ment que le xxe siècle a été l'ère de la connaissance, et c'est tout
à fait compréhensible.
Les découvertes scientifiques sur la nature et la vie ont été
accompagnées de formidables observations sur notre passé. Des
documents écrits traitant des concepts fondamentaux de trois
religions majeures furent dévoilés au milieu du siècle. D'autres
interprétations furent données sur des objets archaïques prove-
nant d'Égypte, de Sumer et de la péninsule du Yucatan. Le
siècle dernier se prêta parfaitement au recouvrement de savoirs
séculaires. Nous continuerons sans doute à effectuer des décou-
vertes qui viendront éclairer davantage notre histoire, mais il est
évident qu'en ce nouveau siècle, nous vivons dans un monde très
différent de celui de nos parents et de nos grands-parents.
Le XXIe siècle sera perçu comme le siècle de la sagesse,
comme une époque où nous sommes contraints d'appliquer
ce que nous avons appris afin de survivre dans le monde que
nous avons créé. Pour y arriver, il faudra aborder nos problèmes
autrement que nous avions l'habitude de le faire. Nous serons
mis au défi de puiser à tout ce que nous savons et de l'employer
de manières novatrices, créatives et inédites. Pour y parvenir,
il faudra un autre type d'informations que celles des ouvrages
scientifiques débordant de théories, de preuves et de faits.

41
Vérité essentielle

Il faudra tempérer les faits du savoir scientifique - les données


des fiches techniques et les résultats de modèles informatiques,
de graphiques et de prédictions - grâce à la capacité qui nous
distingue des autres formes de vie. Il faudra faire appel à ce que
les générations d'autrefois appelaient simplement le bon sens, une
expression pas si banale.
C'est plutôt le genre d'attitude qui découle d'un processus
systématique et organisé où nous évaluons les connaissances
provenant de sources diverses, où nous les marions et les soupe-
sons avant de faire un choix. Et le facteur intangible qu'est le bon
sens, basé sur l'intuition ou l'instinct, n'intervient que quand
nous ne parvenons pas à une décision finale.
Cette attitude est excellente, car, dans certaines situations
récentes, c'est précisément cette qualité indéfinissable de la prise
de décision qui nous a peut-être sauvés de la catastrophe. Un
événement à l'apogée de la guerre froide illustre parfaitement le
pouvoir du bon sens.
Le 26 septembre 1983, Stanislav Petrov, un militaire sovié-
tique de haut rang, était chargé d'un système de détection rapide
conçu pour avertir en cas d'attaque américaine. Les tensions
culminaient, car les Soviétiques avaient abattu un peu plus tôt
dans le mois un gros-porteur civil transportant 269 passagers,
dont le sénateur américain Lawrence McDonald.
Trente minutes passé minuit, l'instant que Petrov et son
équipe de commandement espéraient ne jamais voir se produire
se produisit. Les voyants d'alerte clignotèrent, les sirènes reten-
tirent et sur l'écran des ordinateurs dans la pièce au sommet du
BMEWS (Système soviétique de détection rapide des missiles
balistiques), cinq missiles nucléaires en provenance des États-
Unis fonçaient tout droit sur l'Union soviétique. En quelques
minutes, Petrov devait faire le choix qu'il redoutait - riposter
ou pas-, bien conscient qu'à l'instant même le début potentiel
d'une troisième guerre mondiale et le sort de l'humanité étaient
entre ses mains.

42
La vérité profonde des suppositions fausses ....

Petrov et les hommes sous son commandement étaient des


militaires professionnels. Ils avaient été entraînés précisément en
vue d'une telle situation. Les instructions étaient claires. Dans
l'éventualité d'une attaque, Petrov devait appuyer sur l'interrup-
teur de son tableau de bord pour lancer la contre-attaque contre
les États-Unis. Il savait qu'après avoir déclenché cela, il mettait
en œuvre un système infaillible conçu pour démarrer une guerre
totale. Et une fois le bouton pressé, impossible d'interrompre la
séquence. À partir de ce stade, le système opérait sans l'interven-
tion humaine. « L'ordinateur principal ne me demandait pas quoi
faire», expliqua Petrov par la suite. « Il était conçu de telle sorte
qu'une fois le bouton pressé, personne ne pouvait plus intervenir
dans les opérations du système 21 • »
Aux yeux de Petrov, de ses opérateurs, et d'après les appareils,
l'urgence était bien réelle. Toutes les données concordaient. Le
système semblait fonctionner et, de l'avis des radars, la Russie
subissait une attaque nucléaire qui déclencherait une troisième
guerre mondiale.
Mais Petrov avait le sentiment que quelque chose n'allait pas.
Puisque seulement cinq missiles avaient été décelés, il ne s'agissait
pas d'une attaque américaine massive et, pour lui, ce n'était pas
logique. Les services de renseignements militaires n'avaient pas
envisagé le scénario ainsi.
Petrov devait agir sur-le-champ. Mais avant tout, il devait
déterminer clairement ce qui se passait. Avait-il juste le sentiment
que l'Union soviétique était victime d'une attaque nucléaire
américaine ou y avait-il autre chose ? Il prit sa décision en moins
d'une minute.
Petrov signala l'alerte à ses supérieurs et aux autres postes de
commandement, en précisant que la lecture était « fausse». Puis,
il attendit. S'il avait tort, les missiles entrants frapperaient leurs
cibles russes en quinze minutes. Après ce qui lui parut certaine-
ment un très long moment, lui-même ainsi qu'une foule d'autres
commandants partout en Union soviétique poussèrent un soupir

43
Vérité essentielle

de soulagement. Rien ne s'était produit : le réseau complexe des


satellites et des ordinateurs avait envoyé un signal erroné.
Ultérieurement, une enquête confirma que les lectures
avaient été causées par un «pépin» dans un radar.
Je divulgue cette histoire pour ce qu'elle illustre. En dépit
de toute une technologie sophistiquée qui disait à Petrov que
la Russie faisait l'objet d'une attaque et en dépit aussi des fortes
tensions de la guerre froide en 1983 et même de son condition-
nement militaire formé à suivre les ordres et les procédures,
Stanislav Petrov tempéra tout ce qu'il savait grâce à l'intangible
bon sens et à son intuition - une faculté que l'on n'enseigne pas
et que l'on ne peut absorber en comprimés. Dans le cas présent,
le bon sens d'un homme empêcha que ne se déclenche une troi-
sième guerre mondiale en septembre 1983. Vingt et un ans plus
tard, en 2004, l'Association des citoyens du monde reconnut
Petrov comme «l'homme qui a sauvé le monde» et lui rendit
hommage pour le courage d'avoir fait confiance à son instinct 22 •
Même si nul parmi nous, il faut l'espérer, n'aura à effectuer
un choix semblable à celui de Petrov en 1983, il ne fait aucun
doute que le bon sens permettra d'évaluer les connaissances que
la science met à notre disposition. Ce sera notre emploi intelli-
gent de ces connaissances, tempéré par une large dose de bon
sens, qui permettra de combler l'écart entre la science et son
application - l'ère de la connaissance et l'ère de la sagesse. Et il
n'est pas nécessaire que cela survienne à l'échelle mondiale.
Un de mes amis proches a été impliqué dans plus d'acci-
dents de la route en dix ans que moi-même en quarante ans de
conduite au volant. Heureusement, il a survécu à ces accidents,
n'ayant subi que des blessures relativement mineures.
Lorsqu'il relate ses expériences, ses comptes-rendus détaillés
laissent transparaître un thème commun. Dans chaque cas, il
était dans son droit. Il avait invariablement un feu vert. C'était
toujours à son tour d'avancer à un carrefour. Et il avait toujours
le droit de se garer là où il l'a fait parce qu'aucun signalement ne
l'interdisait.

44
La vérité profonde des suppositions fausses ....

Bien qu'il n'ait pas été en infraction, les conditions ne lui


permettaient peut-être pas de faire des choix avisés. Autrement
dit, le seul fait que le feu de circulation soit vert ne signifie pas
pour autant que l'on peut franchir l'intersection. Le simple fait
qu'aucun panneau n'indique que le trottoir à côté d'un quai de
chargement est un endroit mal avisé où se garer ne signifie pas
pour autant que les camions ne rentrent pas dans le trottoir.
Dans chaque cas, le bon sens aurait pu conseiller la prudence à
mon ami. Il insiste sur le fait qu'il a raison, et il a raison. Mais
cela ne veut pas dire qu'il était en sûreté.
L'exemple est peut-être vaguement absurde, mais il illustre
comment les règles sont censées servir d'indications; elles ne
garantissent pas absolument la sécurité.
De même, si les règles de la science n'ont plus de sens dans
le cadre des découvertes récentes, c'est probablement qu'elles ne
comportent qu'une information partielle. Mais le seul fait de ne
pas avoir encore toute l'information ne requiert pas pour autant
que nous continuions d'obéir aux anciennes méthodes simple-
ment parce que «c'est ainsi qu'on a toujours procédé».
Suivre le dogme scientifique à notre détriment n'a aucun
sens. C'est pourtant ce que nous faisons chaque fois que nous
enseignons aux étudiants des idées que nous savons ne plus être
vraies. Les chapitres subséquents le démontreront : il faut impé-
rativement allier sagesse, connaissances et méthode scientifique
au bon sens en cherchant à répondre aux questions sur la vie, la
guerre et la survie.
Si un argument conduit à une impasse, il faut se remettre
au travail et recommencer ou continuer dans cette impasse.
L'achèvement du Projet génome humain a marqué un énorme
cul-de-sac pour la génétique au début du millénaire. Le même
phénomène se reproduira peut-être avec la quête de la « particule
Dieu» en physique.
En toute honnêteté, je crois que nous cherchons des réponses
pour nous aider à comprendre le monde et à régler les problèmes
du quotidien. Pour y arriver, les connaissances ne suffisent

45
Vérité essentielle

nettement pas. En ce début de l'ère de sagesse, il nous faudra


faire appel à tout ce que nous avons à notre disposition pour
naviguer sur le territoire des vérités profondes qui font surface.
Je suis persuadé que la qualité indéfinissable qu'est le bon sens
viendra jouer un rôle décisif dans notre parcours.

Comment savoir ce qui est vrai?


Plusieurs des idées abordées dans ce livre sont des thèmes très
discutés aujourd'hui : des problèmes ayant entraîné quelques-uns
des débats les plus passionnés, voire à l'occasion violents. Il nous
faut une méthode cohérente pour évaluer les découvertes récentes
afin de vaincre les arguments du passé chargés d'émotion - des
batailles légales et médiatiques sur la théorie de l'évolution et
le créationnisme, aux manuels destinés aux enfants et à notre
manière de venir en aide aux autres nations en temps de crise.
Que nous révèle chacun de ces arguments ? Comment savoir
où finit la spéculation et où commencent les faits ? Quelle est la
différence entre un fait et une théorie? Combien de preuves faut-
il pour qu'une nouvelle théorie en supplante une autre?
Pour répondre à ces questions et m'assurer de ne pas mêler
les pommes avec les oranges, j'ai clarifié les termes employés qui
correspondent à ces thèmes chauds servant à justifier diverses
hypothèses - science, fait, théorie, preuve.
Comme nous examinerons des idées qui se fondent sur les
découvertes scientifiques, je définirai ces termes d'un point de
vue scientifique. Par exemple, une théorie scientifique sera définie
autrement qu'une théorie appartenant à la vie de tous les jours.
Une compréhension claire des termes et de leur usage permet-
tra d'établir un moyen fiable d'élucider les débats de l'heure -
une sorte de « matrice de vérité» qui donne lieu à une évaluation
cohérente de nos constatations. Allons-y donc ...

46
La vérité profonde des suppositions fausses ....

Qu'est-ce qu'un fait scientifique?

Définition : Un fait est« une chose possédant une existence


démontrable et réelle 23 ».

Exemple : Si nous nous trouvons à l'aéroport international


de Los Angeles à 16 h, heure légale du Pacifique, un jeudi, et
qu'un collègue nous demande au téléphone où nous sommes
sur le moment, alors c'est un fait que nous sommes dans une
ville spécifique, à un aéroport spécifique, à une heure spécifique,
un jour spécifique. Notre partenaire d'affaires peut téléphoner
au comptoir des réservations à l'aéroport de Los Angeles pour
confirmer avec l'agent que nous sommes bel et bien là, devant
lui. Le fait vient donc d'être vérifié par l'entremise d'un témoin
objectif qui n'en tire aucun bénéfice. Le fait nous révèle «ce qui
est», sans toutefois élucider comment les choses en sont arrivées
là. Autrement dit, le fait ne décrit pas quand ni comment nous
sommes arrivés à l'aéroport, même si nous formulons une hypo-
thèse à la base du fait, selon l'habitude des scientifiques.

Qu'est-ce qu'une théorie?

Définition : Dans la vie de tous les jours, une théorie n'est


guère plus qu'une idée infondée ou une conjecture. En science,
toutefois, une théorie possède un sens susceptible d'étonner
le profane. Une théorie est une proposition vérifiée et admise
comme vraie. C'est «une supposition basée sur une information
ou un savoir limité 24 ».

Exemple: Une théorie est basée sur des faits que nous connais-
sons sur le moment. Pour reprendre notre exemple précédent,
puisque nous sommes à l'aéroport- le fait observé-, il est logique
que notre partenaire d'affaires suppose que nous avons utilisé un
moyen de transport local pour nous y rendre. Cette supposition
est la théorie de notre partenaire sur la façon dont nous sommes

47
Vérité essentielle

arrivés à l'aéroport. Elle restera une théorie, voire une excellente


théorie, tant qu'aucune preuve ne viendra la contredire. En ce
qui concerne la théorie, de nouvelles preuves sont à même de
surgir sans limites de temps ou de quantité. Voilà la clé pour
comprendre une théorie. On peut la modifier à maintes reprises,
en sorte de prendre en compte les preuves nouvelles qui viennent
l'éclairer. Fait intéressant, une théorie n'a pas à être un fait.

Qu'est-ce qu'une preuve?

Définition: La preuve est «le témoignage ou l'argument qui


incite l'esprit à accepter une proposition comme vraie25 ».

Exemple: Le fait que l'agent à la billetterie confirme que


nous étions à l'aéroport de Los Angeles constitue le témoignage-
la preuve - qui poussa notre collègue au téléphone à croire que
nous étions réellement à cet aéroport.

Qu'est-ce qui constitue une preuve scientifique?

Définition : À la base des définitions précédentes, la preuve


scientifique est celle qui provient des faits et résulte de méthodes
d'investigation scientifiques.

Exemple : Évoquer l'évolution ou l'histoire de la civilisation


du point de vue des faits, de la théorie et de la preuve, en n'ou-
bliant pas le sens de ces termes, nous permettra d'en mesurer la
crédibilité. Les découvertes récentes sur les suppositions fausses
de la science moderne illustrent merveilleusement les vérités
profondes de Bohr.
De la conviction voulant que tout soit séparé du reste à la
notion que l'émotion n'a aucun effet sur le monde au-delà de
l'individu, la science semble stagner depuis les cent dernières
années dans sa compréhension de la nature de la réalité et de

48
La vérité profonde des suppositions fausses ....

notre rôle en celle-ci. En présence des crises menaçant notre


survie, crises dont le nombre et l'ampleur dépassent tout, il est
impératif, de l'avis des spécialistes, que nous passions au-delà des
suppositions scientifiques fausses qui ont entravé notre capacité
à gérer efficacement tout, de la guerre au terrorisme et aux chan-
gements climatiques.
Si la science est réellement «bloquée», il faudra, pour la dépê-
trer, respecter le processus d'inquisition et admettre ouvertement
les découvertes qui altèrent notre vision du monde.

Le moment, c'est maintenant


De toute évidence, nous ne savons pas tout au sujet du fonc-
tionnement de l'univers et de notre rôle en celui-ci. Même si les
recherches futures seront source de percées plus importantes,
comme dans l'analogie du camion sur l'autoroute (citée dans
l'introduction), il vaut mieux parfois effectuer des choix à partir
de ce que l'on sait déjà- pour survivre et raffiner nos décisions.
Une voix puissante de la communauté scientifique, sir Martin
Rees, professeur d'astrophysique à l'Université de Cambridge,
signale que nous avons seulement « 50 % de chance de survivre
au XXIe siècle sans revers importants 26 ». Si les catastrophes natu-
relles ont toujours été notre lot, un type nouveau de périls que
Rees dit «induits par l'homme» doit aussi être pris en compte.
Des études, comme celles publiées dans une édition spéciale
de Scientific American, « Crossroads for Planet Earth » [Carrefour
pour la planète Terre] (septembre 2005), reprennent les avertis-
sements de Rees, « Les cinquante prochaines années détermine-
ront de manière décisive si la race humaine - qui aborde une
période unique de son histoire- peut s'assurer du meilleur avenir
possible 27. »
La bonne nouvelle que diffusent les spécialistes presque
universellement néanmoins, est celle-ci : « Si les décideurs
élaborent un cadre juste, l'avenir de l'humanité sera assuré grâce

49
Vérité essentielle

à des milliers de décisions banales 28 • » C'est dans la minutie du


quotidien que les «avancées les plus importantes se réalisent 29 ».
Sans l'ombre d'un doute, nous aurons à prendre une foule
de décisions dans un proche avenir. Toutefois, je ne peux m'em-
pêcher de penser que l'une des décisions les plus marquantes,
et peut-être la plus simple, sera d'accueillir ce que la science
nouvelle démontre au sujet de qui nous sommes et de notre rôle
dans le monde.
Si nous acceptons, au lieu de refuser, les preuves indéniables
que les sciences apportent individuellement, alors tout change.
Et ce changement marquera un nouveau départ. Cette attitude
fait de nous une partie de tout ce que nous voyons et vivons ;
nous n'en sommes plus séparés. Voilà pourquoi les découvertes
récentes en physique ou en biologie ont un tel impact. Elles
remettent l'ensemble de l'humanité dans l'équation de la vie et
de l'univers. Elles nous inscrivent aussi dans le rôle consistant à
résoudre les graves crises actuelles, plutôt que de les laisser à une
génération future ou aux aléas de la destinée. En tant qu'archi-
tectes de notre réalité doués du pouvoir de réorganiser les atomes
mêmes, y a-t-il un problème que nous ne pouvons pas résoudre?
Y a-t-il une solution hors de notre portée ?
Pour quelques-uns, les possibilités que signalent les décou-
vertes récentes constituent une vision rafraîchissante du monde,
alors que pour d'autres elles ébranlent les fondements mêmes
d'une tradition de longue date. Il n'est pas rare que des scienti-
fiques de pointe hésitent à reconnaître les implications de leurs
recherches lorsqu'elles indiquent que nous sommes vraiment de
puissants créateurs dans l'univers. Il est parfois plus facile de s'en
tenir aux fausses suppositions de la science désuète que d'accueil-
lir une information qui modifie tout ce que nous avions compris.
Si c'est là notre attitude, nous vivons dans le mensonge. Nous
nous mentons sur qui nous sommes et sur les possibilités à notre
disposition. Nous mentons à ceux qui nous font confiance et qui
attendent que nous leur enseignions les dernières vérités sur notre
monde.

50
La vérité profonde des suppositions fausses ....

Quand je mentionne ce paradoxe au public, la réaction


rappelle souvent la citation sage de l'auteur de science-fiction
Tad Williams:« Nous mentons quand nous avons peur... peur
de ce que nous ignorons, peur de ce que les autres vont penser,
peur de ce que l'on pourrait découvrir à notre sujet. Mais chaque
mensonge consolide ce que nous redoutions 30. »
Lorsque les découvertes actuelles affirment que les enseigne-
ments d'autrefois ne sont plus vrais, il faut effectuer un choix.
Doit-on continuer à enseigner ces principes erronés et en subir
les conséquences? Si c'est ainsi que nous agissons, il faudra alors
répondre à une question encore plus profonde : De quoi avons-
nous peur? Pourquoi le fait de savoir qui nous sommes, comment
nous sommes arrivés ici et combien de temps nous sommes sur
terre est-il si menaçant pour notre style de vie?
Élucider ces points représente peut-être le plus grand défi
de l'histoire humaine. Pouvons-nous affronter la vérité que nous
avons souhaité découvrir? Avons-nous le courage d'accepter qui nous
sommes dans l'univers et le rôle que notre présence implique? Si la
réponse à ces questions est affirmative, alors il faut aussi assumer
la responsabilité qui vient du fait de savoir que nous pouvons
changer le monde en nous changeant nous-mêmes.
Nous avons déjà constaté que les croyances répandues qui
mènent à la haine, à la division et à la peur sont susceptibles de
détruire notre corps et d'anéantir notre monde plus rapidement
que nous ne l'aurions imaginé. Nous n'avons peut-être besoin
que d'une altération mineure dans notre perception de nous-
mêmes pour reconnaître que nous sommes en effet les architectes
de notre expérience. De l'avis des spécialistes, la survie de la civi-
lisation et de l'humanité dépend avant tout des choix que nous
effectuerons d'ici les prochaines années. Et ces choix exigent que
nous nous considérions nous-mêmes et que nous considérions
aussi notre rapport les uns aux autres et au monde d'une manière
complètement inédite.

51
Vérité essentielle

Notre ouverture à ces vérités profondes sur la vie déterminera


si nos enfants survivront à nos choix et s'ils auront la chance
d'explorer les prochaines vérités profondes une fois adultes.

Vérité 2 : la réticence des systèmes éducatifs


traditionnels à intégrer les découvertes nouvelles
et à explorer les théories novatrices entretient les
croyances désuètes qui n'abordent pas les crises
les plus graves de l'histoire humaine.

52
CHAPITRE 3

AU BORD DU GOUFFRE :
SURVIVRE AUX POINTS DE
BASCULE DU CHANGEMENT

« Chaque grande difficulté porte en elle


sa propre solution. Elle nous contraint à transformer
notre pensée pour la découvrir. »
- NIELS BOHR (1885-1962), PHYSICIEN LAURÉAT DU PRIX NOBEL

Nous risquons sérieusement de perdre tout ce que nous


chérissons individuellement et en tant que civilisation. À tous
les niveaux, les scientifiques nous avertissent, en termes clairs
et précis, que nous approchons dangereusement du point de
non-retour en ce qui concerne la destruction des systèmes natu-
rels qui supportent la vie. Parallèlement, l'impact croissant des
changements climatiques perturbe le monde, et cet impact s'est
produit plus rapidement qu'on ne l'avait imaginé. On a tendance

53
Vérité essentielle

à regrouper ces crises et à les traiter d'une manière unique et


sous une perspective tout aussi unique. De l'avis courant, tous
les points de bascule sont induits par l'homme. On estime
que nous, humains, avons suscité les problèmes - du réchauf-
fement climatique et d'une population globale non viable, à la
pauvreté extrême et aux pénuries de nourriture et d'eau - et que
nous devons les régler. En vérité, nous avons engendré quelques
problèmes, mais pas d'autres. Il est impossible de concevoir le
changement climatique sous le même angle que la culture des
aliments, l'usage des ressources naturelles et la protection de
notre population croissante.
Comme nous le verrons dans ce chapitre, la science qui nous
informe de l'existence des bouleversements climatiques démontre
également que nous n'en sommes pas responsables. Quatre cent
mille ans d'histoire prouvent clairement que la position de la
planète dans l'espace produit des schémas cycliques de réchauf-
fement et de refroidissement, et que l'augmentation des gaz à
effet de serre accuse un retard de plusieurs centaines d'années
par rapport au réchauffement. Paradoxalement, ce sont sur les
rythmes cycliques de température du globe - un facteur vital
hors de notre contrôle - que les ressources et l'énergie de nos plus
illustres esprits se concentrent afin d'enrayer ce phénomène.
Être au seuil de tous ces points de bascule simultanément
nous motive et nous offre l'occasion rare de transformer notre
manière de penser et de vivre. Les populations et leurs dirigeants
doivent collaborer et rassembler les ressources sur une échelle
sans précédent afin de s'adapter aux changements naturels que
nous affrontons tous ensemble - changements qui échappent à
notre contrôle. Et nous y parviendrons en considérant autrement
qui nous sommes et notre mode de vie.
Si nous optons pour cette voie au lieu de la méfiance et de
la division découlant du blâme, des accusations et des pénali-
tés économiques liées à un siècle de développement industriel, il
ne fait aucun doute que nous survivrons à nos crises. En outre,
nous transcenderons notre incapacité à gérer les facteurs qui les

54
Au bord du gouffre ...

engendrent. Les bienfaits issus de la coopération donneront nais-


sance à une civilisation durable sous le signe de la viabilité et de
l'entraide. Les pages qui suivent exposent les raisons pour adopter
ces comportements.

Résoudre les problèmes importants


Il n'y va pas de notre imagination.
Ce n'est pas une angoisse collective et tacite qui nous dit que
quelque chose dans notre monde change - quelque chose de très
important et de bien réel. Des laboratoires d'idées respectables,
tels le Worldwatch Institute fondé en 1974 pour procéder à des
recherches indépendantes sur les questions planétaires critiques
et le World Resources lnstitute fondé en 1982 pour analyser les
politiques environnementales, ainsi que l'UNESC01, vont plus
loin que les avertissements d'abord lancés par les mouvements
environnementaux des années 1960 et 1970. Ils affirment désor-
mais que l'époque contre laquelle ils nous ont mis en garde est
l'époque actuelle.
L'édition spéciale de la revue Scientific American, «Crossroads
for Planet Earth », confirme notre sentiment que l'époque sort de
l'ordinaire; elle affirme que notre race «aborde désormais une
période unique dans son histoire 2 ». Ce numéro avait pour but
d'identifier un nombre de crises planétaires qui, non maîtrisées,
ont le potentiel de mettre fin à l'existence humaine et à la civi-
lisation. Les conclusions étaient unanimes au sujet de maladies
nouvelles sans traitements, de nations fortes consommatrices
d'énergie qui épuisent nos ressources limitées, d'une pauvreté à
l'échelle mondiale jamais vue auparavant et du manque d'égards
pour les océans, les fleuves et les forêts tropicales. Il n'est plus
possible de continuer à vivre comme nous l'avons fait par le passé
et de croire que nous allons survivre encore un siècle. La planète
ne peut pas soutenir nos habitudes.
Les organisations mentionnées plus haut ont conscientisé
les populations sur le fait que tous les scénarios identifiés dans
55
Vérité essentielle

leurs comptes-rendus sont catastrophiques et qu'ils ont cours


maintenant. Les collaborateurs aux publications spéciales et
aux bilans ne sont pas les seuls à tirer ces conclusions sur notre
situation. Professeurs d'universités, scientifiques, communautés
de chercheurs de la CIA, voire le Pentagone qui considère les
crises actuelles comme des questions de sécurité nationale - tous
sonnent l'alarme. Ils déclarent à l'unanimité que nous sommes
déjà dans le pétrin. Nous avons déjà atteint le point de bascule
pour ce qui est de nos océans, de nos forêts, des conditions clima-
tiques et des animaux qui soutiennent la vie sur terre. Dans notre
relation à la nature, nous sommes déjà dans la position délicate
où l'inaction devant un désastre imminent n'est plus une option.
Pour éviter l'immense souffrance à l'horizon, il faut agir mainte-
nant et modifier notre manière de penser et de vivre.
La menace réitérée d'une autre guerre mondiale vient encore
compliquer ces problèmes. Ce qui distingue cette guerre de celles
du siècle dernier toutefois, c'est qu'elle est mue par ces crises que
décrit l'édition spéciale du Scientific American, plutôt que par des
conflits de frontières et de pouvoir. E. O. Wilson cerne le carac-
tère unique de notre position dans l'histoire en disant que nous
serons dans un « goulot» dans le temps lorsque les stress imposés
à nos ressources et nos aptitudes à résoudre les problèmes actuels
seront poussés à leurs limites3.
En 2003, Jeffrey Sachs, directeur du Earth Institute, à l'Uni-
versité de Columbia, résuma notre situation en des termes indu-
bitables et préoccupants :

Notre population compte près de sept milliards


d'individus. Et tous sont en quête d'une nourriture suffi-
sante, d'eau et d'énergie pour combler leurs besoins et
progresser économiquement. Mais en compilant tout,
nous sommes déjà une société mondialement non viable.
Le changement climatique, le stress hydrique, la dégra-
dation environnementale, l'extinction des espèces, tout
cela nous touche désormais de manière de plus en plus
douloureuse et dangereuse4.
56
Au bord du gouffre ...

Sachs affirmait aussi avec certitude que la science et la tech-


nologie des nations riches en ressources sont en mesure d'abolir
la pauvreté extrême qui contribue aux maintes crises des pays en
développement:« Pour la première fois dans l'histoire, la prospé-
rité économique mondiale que procurent les progrès scientifiques
et technologiques constants ainsi que l'accumulation de richesses
qui s'autoalimente permettent au monde d'éliminer totalement
la pauvreté extrêmes. »
J'apprécie les idées de Sachs. J'aime sa façon de penser. J'ai été
formé comme scientifique ... et je partage son avis : les technolo-
gies scientifiques - comme la purification de l'eau, la génération
et la distribution de l'électricité, la diffusion de médicaments
puissants contre la malaria, le VIH (sida) et l'hépatite - sont
capables de mettre fin aux souffrances de millions d'habitants de
pays en développement. J'espère que l'optimisme de Sachs, son
pouvoir et son influence apporteront au monde les bienfaits qu'il
envisage. Malgré tout, j'ai mon côté pratique.
Je sais qu'avant de pouvoir appliquer la technologie à l'échelle
qu'envisagent Sachs, moi-même ou d'autres, il faut d'abord
mettre en place l'idée qui donnera la priorité à ces objectifs. Ce
type de pensée exige de se détourner des croyances et des suppo-
sitions fausses qui ont conduit à plusieurs de ces crises. De toute
évidence, faire la guerre et épuiser les ressources limitées, comme
les réserves de combustible fossile, tout en ne cherchant pas vrai-
ment à réduire la pauvreté grandissante à l'échelle mondiale ne
sont plus des choix viables qui assureront la survie de notre civi-
lisation au-delà du prochain siècle. Si nous voulons rester ici, sur
terre, nous devons changer notre mode de vie. Pour y parvenir,
nous devrons modifier notre manière de penser, qui ne peut que
résulter d'une transformation profonde de notre perception du
monde et de nous-mêmes. La controverse qui entoure le réchauf-
fement planétaire illustre magnifiquement mon point de vue.

57
Vérité essentielle

Le changement climatique dans notre salon


En 2006, Al Gore, ex-vice-président, introduisit le change-
ment climatique dans les salons et les salles de classe partout
dans le monde. Lui-même et le cinéaste Davis Guggenheim
présentèrent la première de leur documentaire, An lnconvenient
Truth [Une vérité qui dérange], au Festival du film de Sundance.
Le film remporta deux oscars et, en 2007, Al Gore remporta le
prix Nobel de la paix, conjointement avec le Comité intergou-
vernemental des Nations unies sur le changement climatique (de
l'anglais IPCC).
Les discussions et la consécration entourant le film s'accom-
pagnèrent aussi de controverses. Dans le documentaire, Gore
présente des statistiques convaincantes et des images séduisantes-
d' énormes falaises de glace s'engloutissant dans l'Antarctique, des
ours polaires épuisés nageant dans les eaux presque dépourvues
de glace en quête de terre ferme pour se reposer. Et il affirme
deux choses sur notre monde : le changement climatique est déjà
en cours, et nous en sommes la cause. Parmi les divers problèmes,
le changement climatique devint soudainement prépondérant
pour ce qui est d'orienter les politiques à l'échelle mondiale. Et
parce que cela coïncidait avec une élection, il devint aussi un
facteur déterminant dans la course présidentielle de 2008.
Du jour au lendemain, la question du changement clima-
tique ne fut donc plus un dilemme intéressant réservé aux
experts. Les causes des bouleversements dans le climat terrestre
et les solutions devinrent, et restent, des sujets de conversation
de tous les jours et des sujets de discussion dans les processus
politiques. I..:opinion des candidats sur le changement climatique
influe sérieusement sur leur perspective d'être élus.
Même si plusieurs parmi nous sont conscients que le temps
qu'il fait dans leur jardin change, le débat sur les causes et la
signification de tout cela et sur ce qui va se passer démontre que
les points de vue sont fort partagés. La controverse repose sur la
réponse à deux questions clés :

58
Au bord du gouffre ...

• Le changement climatique est-il réel ?


• Les changements provoqués par les gaz à effet de
serre, comme le dioxyde de carbone, sont-ils causés
par l'être humain?

Le déluge de données venant appuyer la réponse à l'une ou


l'autre de ces questions suffirait à donner le vertige à n'importe
quel scientifique. Et le citoyen moyen ne peut que se sentir
dépassé devant cela. Il semble qu'un doctorat soit nécessaire juste
pour parcourir les rapports, sans parler d'y réfléchir. C'est pour-
tant la même information qui nous oriente dans la bonne direc-
tion et nous permet de comprendre ce qui se passe vraiment, et
de prendre des décisions avisées .

•••
Pour commencer, la seule manière de déterminer si notre
époque est anormale du point de vue climatique, c'est de compa-
rer le climat actuel de la Terre avec les conditions du passé. Ainsi,
nous pouvons évaluer si les variantes comme la température
moyenne au-dessus et sous l'équateur, par exemple, diffèrent
vraiment des températures d'il y a plusieurs siècles ou millé-
naires. Plus important encore, nous pouvons déterminer si les
variations de température constatées aujourd'hui relèvent d'un
cycle naturel. En 1999, un communiqué de presse annonçait la
réussite d'un projet scientifique qui apportait ces éléments.
Depuis des centaines de milliers d'années, chaque année, un
processus naturel « gèle» une annale du climat terrestre. Avec le
changement annuel des saisons, et la chute des températures,
une nouvelle couche de glace se forme et s'ajoute sur les calottes
polaires. Chaque nouvelle strate qui gèle conserve de l'oxygène,
du dioxyde de carbone et d'autres éléments et composés, de
même que la pluie, la neige, la vie microscopique, et la pous-
sière accumulée avant le gel. :Laccumulation annuelle recouvre

59
Vérité essentielle

et scelle ce qui a été recueilli l'année précédente, façonnant ainsi


une annale permanente dans l'épaisseur de la glace.
Tant que la glace des régions polaires demeure gelée, une
bibliothèque virtuelle contenant l'histoire de la planète inscrite
dans des milliers de strates formées au fil de millénaires s'offre
à nous. Ces annales informent les scientifiques sur les tempé-
ratures globales, l'ensoleillement, le niveau des mers et l'épais-
seur des calottes polaires dans le passé lointain de la planète.
Elles permettent aussi de déterminer si les conditions actuelles
sont «dans le champ » en ce qui concerne les cycles climatiques
normaux.
En juin 1999, une équipe scientifique internationale acheva
un forage jusqu'au fond des portions les plus épaisses de la
glace - le forage de Vostok, en Antarctique. Les échantillons de
strates de glace nous offrent une vision sur 420 000 ans dans le
passé, remontant plus loin que cela n'avait été possible jusqu'ici6 .
L'information tirée de ces noyaux glaciaires ainsi que les données
supplémentaires des couches de glace du Groenland représentent
des éléments solides permettant de comprendre le climat du
passé et de déterminer si les événements actuels appartiennent
aux cycles normaux.
Au cours des recherches pour mon livre Le Temps fractal
[Ariane Éditions], j'ai fait appel à la banque de données sur les
noyaux glaciaires établie en 1999 pour comparer avec les époques
antérieures les conditions actuelles de température, de force
magnétique, de rayonnements solaires et d'épaisseur de la glace.
À la base de cette information, nous pouvons répondre aux deux
grandes questions sur le climat terrestre :

Question 1 : Le changement climatique existe-t-il?


Réponse 1 : Définitivement, oui.

Question 2 : Avons-nous provoqué ce changement?


Réponse 2 : Définitivement pas.

60
Au bord du gouffre ...

Maintenant que nous détenons les réponses, examinons leur


source.
Puisque nous savons que le changement climatique existe
vraiment, la question suivante est : La Terre se réchaujfe-t-elle? La
réponse est oui, et puis, non. La Terre refroidit-elle? La réponse
encore une fois est très certainement oui, et puis ... définitive-
ment pas.
Il faut répondre oui et non aux deux questions parce que le
réchauffement et le refroidissement se sont tous deux produits à
l'époque qui fait l'objet de controverses et d'arguments. Vers la
fin du xxe siècle et au début du xx1e, des réchauffements et des
refroidissements records ont eu lieu, ainsi que d'autres extrêmes
climatiques - ouragans, pluies torrentielles, blizzards, tempêtes
de verglas, tornades et presque tout autre phénomène météorolo-
gique concevable.
En janvier 2011, par exemple, un froid arctique a envahi
le territoire américain, forçant la fermeture des bureaux et des
écoles en raison des basses températures records, soit -3 °C à
Tallahassee en Floride et -17°C à Bridgeport au Connecticut.
Par ailleurs, les régions de l'Australie-Occidentale furent noyées
sous 134 cm de pluies incessantes dans le même mois. De toute
évidence, nous vivons à une époque d'extrêmes climatiques. Il
ne s'agit plus maintenant de savoir si oui ou non un changement
est en cours, mais bien ce qui le cause et s'il est dû au réchauf-
fement ou au refroidissement de la planète. Voilà où on peut
s'en remettre à l'étude de l'histoire du climat et des cycles qui
déclenchent les altérations.
La controverse sur le réchauffement planétaire s'appuie essen-
tiellement sur les interprétations des rapports sur les températures
passées, rapports issus de deux sources différentes. Ce n'est qu'il
y a environ 130 ans, en 1880 plus précisément, qu'un registre
fiable du climat de l'ère « moderne» fut établi. Pour mesurer les
tendances du réchauffement et du refroidissement avant 1880, les
scientifiques s'en remettent à des méthodes indirectes - dont les
noyaux de glace mentionnés plus haut, les données fournies par

61
Vérité essentielle

les anneaux de croissance des arbres et les sédiments des fonds


marins. Les scientifiques alimentent et raffinent sans cesse notre
connaissance de l'histoire climatique planétaire en alliant ces
diverses sources.
Aujourd'hui, trois sources premières de données renseignent
les chercheurs sur le climat planétaire du passé. En bref, ces bases
de données sont gérées par :

• Le National Atmospheric and Atmospheric


Administration's National Climate Data Center
[Centre de données national pour l'administration
atmosphérique]
• Remote Sensing Systems [Systèmes de détection à
distance], à l'Université de l'Alabama, à Birmingham
• La Climatic Research Unit [Unité de recherches clima-
tiques] à l'Université d'East Anglia, en Angleterre

Par ailleurs, l'Institut Goddard pour les études spatiales de la


NASA recueille et gère des données.
Les scientifiques se fient essentiellement à ces bases de
données individuelles ou conjuguées pour se représenter les
tendances climatiques du passé et formuler des modèles pour
l'avenir. Toutes ces sources sont catégoriques : la Terre s'est
réchauffée au cours des 120 dernières années. À dire vrai, le
phénomène s'est produit à deux reprises : du milieu des années
1930 jusque vers la fin des années 1950, et vers la fin des années
1970 (voir Figure 3.1). Les spécialistes n'ont pas déterminé si ce
dernier cycle de réchauffement se poursuit ou s'il a pris fin et si le
refroidissement cyclique subséquent a déjà commencé.
La fin des années 1800 et le milieu du XXe siècle connurent
des périodes de refroidissement global. Au cours des années 1960
et 1970, les avertissements sur le réchauffement planétaire s'atté-
nuèrent en raison d'un passage soudain à des températures plus
fraîches.

62
Au bord du gouffre ...

Une réponse honnête à l'énigme du réchauffement et


du refroidissement doit être affirmative dans les deux cas. Ce
n'est peut-être pas la question que les gens souhaitent poser. La
prochaine partie de l'équation pour comprendre le changement
climatique consiste à déterminer comment ces courts cycles
de réchauffement et de refroidissement s'assimilent au tableau
plus vaste de l'histoire terrestre. Et voilà où les cycles du passé
dévoilent un scénario intéressant.

Index de la température des continents-océans

.6
,_ 1
1

1
1

1 1
'
~i
~- Moyenne 'anm elle ,. 1
,__ ~ -- Moyenne uinquennale
1
~ •

. ... ,
--+- -·
1 ~ ~

H l 11
t .J ~
1

- .4
,.
'.J ~

il ~ J ri
• 1
.
., ,1 A
~ r l
1 ' 1

1880 1900 1920 1940 1960 1980 2000

Figure 3.1 : L'illustration représente le changement moyen de la température des


continents-océans entre 1880, qui enregistra des records cohérents, et 2010. Les
barres verticales indiquent des zones d'incertitude, les lignes entre les points sont
la moyenne globale, et la ligne solide est la moyenne sur cinq ans. (Crédit : NASA
Goddard lnstitute for Space Studies)

La Figure 3.1 ne représente pas l'ensemble de la situation


immédiatement avant 1880. Les températures avant cette époque
apparaissent dans la portion à gauche du graphique - les stades
finaux d'une tendance au refroidissement qui avait duré de 1400
ans jusqu'au milieu des années 1860. Le phénomène est antérieur
aux relevés modernes, mais il est dûment noté dans les registres

63
Vérité essentielle

et les rapports techniques des navigateurs et dans les journaux


des pionniers.
Ces sources, associées aux autres méthodes de renseigne-
ments, comme la lecture des anneaux de croissance des arbres,
révèlent une époque plutôt rude nommée « petite ère glaciaire».
Ce refroidissement global, notamment dans les latitudes septen-
trionales, est censé avoir entraîné des changements considérables
dans le mode de vie d'alors. Il a peut-être provoqué la famine
en Irlande qui a débuté en 1845 et causé la mort de plus d'un
million d'Irlandais avant de prendre fin six ans plus tard, ainsi
qu'une foule d'autres mauvaises récoltes, la destruction du bétail
et la disparition de colonies au Groenland.
Certains estiment que les registres de température sur plus
de 130 ans reflètent une longue période. Mais du point de vue
de l'histoire de la Terre et des cycles climatiques, ce n'est que
très récent. Sur l'échelle temporelle des graphiques du passé de
la Terre, il ne s'agit que d'un bref bip. Pour élaborer de nouvelles
politiques, appliquer d'autres lois et exiger que la population
planétaire change son mode de vie, il faudrait plutôt examiner
l'ensemble de la situation. Puisque nous n'avons pas de mesures
directes des températures mondiales avant 1880, les scientifiques
font appel à d'autres méthodes pour les déterminer. Voilà où
interviennent les noyaux glaciaires mentionnés précédemment.

Preuves au frais
Grâce au forage au fond de la glace antarctique à Vostok, nous
sommes désormais en possession de données sur 420 000 ans que
nous pouvons comparer aux phénomènes actuels pour préciser
l'histoire exacte du changement climatique; cette comparaison
porte à réfléchir. Un coup d'œil aux données sur la température
des noyaux antarctiques dans la Figure 3.2 permet une constata-
tion immédiate : il existe un rythme définitif du réchauffement
et du refroidissement de la Terre, et ce rythme repose sur des

64
Au bord du gouffre ...

-2
~
-4
-6
-8

300

280

260
e8: 240

220

200

1.8
1.6 1--- - t i \ - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - Concentration de poussière - -
1.4
1.2
E 1
a.
a. 0.8
0.6
0.4
0.2

50 100 150 200 250 300 350 400


Milliers d'années

Figure 3.2 : La montée et la chute rythmiques des températures inscrites dans


les noyaux glaciaires de l'Antarctique démontrent sans l'ombre d'un doute que les
cycles terrestres de réchauffement et de refroidissement se sont produits à des
intervalles réguliers d'environ 100 000 ans depuis au moins 420 000 ans. (Crédit :
Petit/NOAA/GNU Free Documentation License)

cycles d'environ 100 000 ans. En outre, ces cycles gigantesques


en comportent d'autres plus courts. Les scientifiques savent
maintenant qu'il s'agit de cycles nichés, de cycles à l'intérieur de
cycles dans d'autres cycles, etc. Et les cycles opèrent suivant des
principes prévisibles et mesurables. Il s'agit de la position de la
Terre dans l'espace : l'inclinaison, l'oscillation et l'angle de notre
planète par rapport au Soleil et au noyau de la Voie lactée.
De l'avis des scientifiques, les cycles de températures de
100 000 ans sont provoqués par la forme variable de l'orbite de
la Terre autour du Soleil avec le temps - un phénomène naturel

65
Vérité essentielle

appelé excentricité. Le tracé de notre planète autour du Soleil


ressemble parfois à un ovale allongé, une ellipse; parfois, il s'ap-
parente davantage à un cercle. À mesure que le parcours s'altère
sur les 100 000 ans, la distance de la Terre au Soleil se modifie
également.
Ce cycle de 100 000 ans comporte une série de cycles plus
courts de 41 000 ans, associés à l'oscillation de la Terre. Ce
mouvement d'inclinaison nous fait pencher de 1,5 degré plus
près ou plus loin du Soleil. Il contient des cycles encore plus brefs
d'environ 21000 ans qui présentent d'autres cycles de 11 ans liés
aux taches solaires.
La ligne supérieure de la Figure 3.2, nommée «variation
de températures», montre les montées et les chutes cycliques
de températures comme l'indiquent les noyaux glaciaires de
l'Antarctique. Sur ce graphique en particulier, nous apercevons
un rythme similaire pour le CO2 au cours de la même période,
représenté par la ligne au milieu du diagramme et appelé
«dioxyde de carbone». Nous examinerons en détail le rapport
entre les températures et le dioxyde de carbone dans la section
qui suit. Les données de la Figure 3.2 suffisent à révéler deux faits
sur le changement climatique : 1. Les montées et les chutes de
températures sont cycliques; 2. Chaque grand cycle est constitué
de petits cycles nichés de réchauffement et de refroidissement.
Quand on observe les cycles sur des dizaines de milliers
d'années, la perspective élargie nous révèle que les changements
récents de températures relèvent d'un schéma bien établi. Dans
le cadre de ce schéma, les soi-disant anomalies actuelles se situent
tout à fait dans le registre de ce que l'on peut attendre du cycle
actuel. Voilà exactement de quoi il s'agit: connaître les cycles du
passé permet d'anticiper adéquatement le moment où ces cycles
se reproduiront.
En comprenant les rythmes de la nature, on peut relativiser
les extrêmes récents du climat. Et le schéma de réchauffement et
de refroidissement n'est que l'un parmi des facteurs qui obéissent
à ces cycles, dont la force du champ magnétique de la Terre,

66
Au bord du gouffre ...

l'intensité del' énergie solaire et l'épaisseur des calottes polaires.


Observons donc d'abord ce que nous révèlent les cycles, puis
nous verrons ce qu'ils signifient.
La Figure 3.2 montre que les périodes cycliques de réchauffe-
ment sont transitoires ; elles durent de 15 000 à 20 000 ans avant
que les températures ne refroidissent. Il n'y a aucune raison de
supposer que les cycles futurs différeront des cycles passés, sauf
dans l'éventualité d'événements catastrophiques - un impact
de météore, une super facule solaire, un séisme mondial ou une
« supervague » galactique de pulsations électromagnétiques prove-
nant du centre de la Voie lactée.
C'est peut-être précisément ce que nos ancêtres autoch-
tones tentent de nous dire dans la langue de leur époque. Ils
ne possèdent pas de GPS, de satellites ni d'ordinateurs, mais ils
préservent la mémoire d'avoir vécu au fil des cycles et des chan-
gements que ces derniers entraînent dans le monde. Nous vivons
aujourd'hui au moment où un cycle (de réchauffement) s'achève
et où le prochain cycle (de refroidissement) commence.

Avons-nous provoqué le réchauffement climatique?


Les politiques récentes se sont opposées directement à l'inter-
prétation scientifique et à l'opinion publique concernant les liens
possibles entre le réchauffement climatique et l'augmentation de
certains gaz à effet de serre. Autrement dit, avons-nous, humains
de l'ère industrielle, causé ou contribué aux hausses de tempéra-
tures que nous constatons aujourd'hui?
Si j'ai été formé comme géologue et si j'ai exercé cette profes-
sion pendant dix ans à partir du milieu des années 1970, je ne
suis absolument pas climatologue. Bien que les preuves confir-
mant les cycles de réchauffement soient de nature géologique, je
me fie aux mêmes sources d'information que vous pour déter-
miner si la race humaine constitue un facteur significatif dans
ce phénomène. Pour ces données, je consulte les registres sur les

67
Vérité essentielle

taux de dioxyde de carbone (C0 2) et de méthane (CH4) dans


l'atmosphère d'autrefois.
Les premiers longs noyaux glaciaires forés par le projet Vostok
fournirent l'histoire de 150 000 ans de composition des gaz de
l'atmosphère, dont les gaz à effet de serre. Le forage de 1999 a
désormais fait remonter le temps jusqu'à 420000 ans. Grâce à
ces échantillons, les scientifiques peuvent observer la situation
d'ensemble (150 000 ans dans le passé) ou la situation d'ensemble
encore plus vaste (420 000 ans) pour mesurer l'interaction des
cycles de températures globales et de gaz à effet de serre. Et le
tableau d'ensemble que procurent ces données est ahurissant.
La Figure 3.3 est un graphique tiré de l'analyse de noyaux
glaciaires de Vostok. Trois types de données sont comparées les
unes aux autres pour découvrir le rapport, s'il existe, entre le

Records de température et de C02


- Température (EPICA dôme C)
- CO, {Vostok) Niveau actuel de C0 2 ---1~ 400
- CO, (EPICA dôme C)

2 10 - CO, (EPICA dôme C)


CO, (EPICA dôme C)
Température
Il)
:::1
.!r 5
e.
Il)

-s
-~ 0
;;
e
0

~ .5

200

·10
'---~-'-~~..__~_._~~-'---~---'~~-'-~~'--~-'
800 700 600 500 400 300 200 100 0
Milliers d'années

Figure 3.3 : Comparaison des cycles de taux de méthane (CH4) et de dioxyde de car·
bone (C02) avec les températures des 800 000 dernières années. Ces données tirées
des noyaux glaciaires de l'Antarctique démontrent que les taux de C02 sont en retard
sur \'augmentation des températures et ne sont pas la cause du réchauffement. (Crédit :
Leland Mclnnes/GNU Free Documentation Licence)

68
Au bord du gouffre ...

dioxyde de carbone (C0 2) au milieu du graphique, le méthane


(CH 4 ) au sommet, et les températures au bas. S'il existe un
rapport entre les températures et le C02 , ce n'est peut-être pas
celui que les alarmistes du climat avaient espéré établir.
Selon le magazine C02 Science, les chercheurs analysant les
noyaux firent une découverte remarquable qui eut une influence
décisive sur la controverse au sujet du réchauffement planétaire :
«Les changements dans le contenu en C0 2 atmosphérique ne
précèdent jamais les changements de la température de l'air lors
du passage de conditions glaciales à interglaciales ; et lors de la
transition de conditions interglaciales à glaciales, l'altération dans
la concentration en co2 retarde la modification de la tempéra-
ture de l'air7. » (Les italiques sont de moi.)
Une autre étude publiée dans Science ne laisse aucun doute
sur ce que démontrent les résultats : « Les enregistrements à haute
résolution des noyaux glaciaires antarctiques montrent que les
concentrations de dioxyde de carbone ont augmenté de 80 à
1OO parties par million 400 ans après le réchauffement des trois
dernières déglaciations 8 • » Une note technique supplémentaire
indique à quel point les corrélations entre les gaz à effet de serre
et les températures se fourvoyaient : «Le retard de l'augmenta-
tion des concentrations de co2 par rapport aux changements de
températures est de l'ordre de 400 à 1 000 ans pendant ces trois
transitions glaciales-interglaciales 9• »

Quelle est donc la conclusion en ce qui concerne toutes ces


données sur le changement climatique ? Comment répondre aux
questions dans l'introduction de cette section? Le changement
climatique est-il un fait? Avons-nous provoqué le réchauffement
planétaire? En l'absence d'une autre source d'information suggé-
rant le contraire, la vérité profonde sur le réchauffement plané-
taire va comme suit, selon les données actuelles :
Le réchauffement planétaire est une réalité de l'époque
moderne.

69
Vérité essentielle

• Le cycle de refroidissement qui suit le réchauffement


est également un fait de l'ère moderne.
• Les données des noyaux glaciaires démontrent que
les gaz à effet de serre, notamment le CO2 , ne sont pas
la cause du réchauffement planétaire, car les tempé-
ratures sont en retard sur les niveaux de gaz de 400
à 1000 ans.
• Les données obtenues des noyaux glaciaires montrent
qu'au cours des 400 000 dernières années, les taux de
col ont été aussi élevés, sinon plus, qu'aujourd'hui.
Il n'existait pas de sources industrielles pour ces gaz
autrefois.
• Nous sommes dans un cycle de réchauffement entamé
il y a environ 18 000 ans, à la fin de l'ère glaciaire du
pléistocène. Du point de vue historique, ces cycles de
réchauffement durent de 15 000 à 20 000 ans et sont
entrecoupés de brèves périodes de refroidissement,
comme la petite ère glaciaire au milieu du XIXe
siècle. Les cycles et les données suggèrent que notre
époque peut s'attendre à un cycle de refroidissement;
il est possible que nous entamions un tel cycle.
La famille moyenne obtient ses informations par les médias
principaux et les déclarations « officielles » des agences gouver-
nementales, dont le Comité intergouvernemental sur le change-
ment climatique. Je suis stupéfait du nombre de personnes dans
les auditoires partout aux États-Unis qui sont persuadées que le
réchauffement planétaire est une affaire close, que le problème
est récent et qu'elles doivent défrayer les coûts pour y remédier.
Mais si je suis stupéfait, je ne suis pas tout à fait surpris,
car les médias qui ont «popularisé» le réchauffement planétaire
déclarent aussi avec autorité que nous en sommes responsables.
Dans Une vérité qui dérange, Al Gore affirme carrément que
chacun d'entre nous est une cause de réchauffement planétaire,

70
Au bord du gouffre ...

mais que nous pouvons tous faire des choix qui réduiront notre
empreinte de carbone10 •
Si j'aime les idées de Gore au sujet des modifications de notre
mode de vie (il nous faut incontestablement passer à un mode de
vie écologique), j'hésite à admettre les raisons dont il se sert pour
les justifier. Contrairement au consensus que l'on présume générale-
ment parmi les scientifiques, ces derniers ne s'entendent pas sur le fait
que les gaz à effet de serre et l'industrie humaine seraient les causes
du réchauffement. De nombreuses sources précisent pourquoi
nous avons déclenché le réchauffement planétaire, mais pour ma
part j'aimerais en profiter pour laisser la parole à quelques-uns des
illustres scientifiques qui ont fait des vagues dans leurs commu-
nautés, voire risqué leur carrière, parce que, en toute conscience,
ils devaient aller à contre-courant sur la question.
La plupart des scientifiques reconnaissent que la Terre s'est
réchauffée, mais ils n'estiment pas que nous sommes en cause.
Voici un échantillon court, mais représentatif, de leurs commen-
taires; chaque commentaire s'accompagne du nom du scienti-
fique, de sa spécialité et de l'institution à laquelle il est attaché :
-Sallie Baliunas, astronome, Harvard-Smithsonian Center
for Astrophysics : « La récente tendance au réchauffement que
notent les registres des températures de surface ne peut être
causée par l'augmentation dans l'atmosphère de gaz à effet de
serre de facture humaine11 • »
-Khabibullo Abdusamatov, mathématicien et astronome,
Observatoire Pulkovo de l'Académie russe des sciences : «Le
réchauffement planétaire est le produit non pas d'émissions de
gaz à effet de serre dans l'atmosphère, mais d'un fort degré de
radiation solaire et d'une augmentation constante - presque sur
tout le siècle dernier - de son intensité ... Attribuer les proprié-
tés des "effets de serre" à l'atmosphère terrestre n'est pas corro-
boré scientifiquement... Les gaz à effet de serre chauffés qui
deviennent plus légers en raison de l'expansion montent dans
l'atmosphère uniquement pour diffuser la chaleur absorbée 12 • »

71
Vérité essentielle

-William M. Gray, professeur émérite, directeur du


Tropical Meteorology Project, Département des sciences atmos-
phériques, Université d'État du Colorado : «Ce petit réchauf-
fement résulte probablement d'altérations naturelles dans les
courants océaniques qui sont mus par les variations de salinité
dans l'océan. Les variations de circulation océanique demeurent
mal comprises. La race humaine n'a que peu ou rien à voir avec
les changements de température récents. Nous n'avons pas cette
influence13 • » Et : «À mon avis [le réchauffement planétaire] est
l'une des plus formidables supercheries que l'on ait infligée au
peuple américain 14 • »
-George V. Chilingar, professeur de génie civil et pétro-
lier, Université de Californie du Sud: «Les forces globales de la
nature indiquées ci-après sont responsables du climat terrestre :
1. La radiation solaire[...] 2. Le dégazage comme fournisseur de
gaz majeur pour les océans et l'atmosphère, et peut-être 3. Les
activités microbiennes [... ] Des estimations quantitatives de
l'ampleur et de l'étendue de leurs effets correspondants sur le
climat terrestre[...] démontrent que les changements climatiques
induits par l'homme sont négligeables 15. »
-lan Clark, géologue, professeur en sciences de la Terre,
Université d'Ottawa : «Cette portion de la communauté scienti-
fique qui attribue le réchauffement climatique au C02 s'appuie
sur l'hypothèse que l'augmentation du C02, un gaz à effet de
serre mineur en vérité, déclenche une réaction beaucoup plus
importante de vapeur d'eau qui réchauffe l'atmosphère. Ce
mécanisme n'a jamais été évalué scientifiquement, sauf dans les
modèles mathématiques qui prédisent un réchauffement consi-
dérable et qui sont déroutés par la complexité de la formation des
nuages - qui exercent un effet refroidissant[...] Nous savons que
[le soleil] était responsable du changement climatique autrefois ;
il jouera donc un rôle prépondérant dans les changements clima-
tiques actuels et futurs. Et fait intéressant ... l'activité solaire vient
d'entamer un cycle descendant 16 • »

72
Au bord du gouffre ...

-Chris de Freitas, professeur adjoint en géologie et en


sciences de l'environnement, Université d'Auckland : «Il existe
des éléments qui témoignent d'un réchauffement planétaire [...]
Mais le réchauffement ne démontre pas que le dioxyde de carbone
est en cause. Le climat se réchauffe ou se refroidit sans cesse. Il
existe des théories sur la variabilité naturelle du réchauffement.
Pour appuyer l'argument voulant que le dioxyde de carbone soit
en cause, les faits devraient discerner le réchauffement induit par
l'humain et le réchauffement naturel, mais on ne l'a pas fait 17• »
-David Douglass, professeur de physique et d'astrono-
mie, Université de Rochester : «Le schéma de réchauffement
observé, qui compare les tendances des températures à la surface
et dans l'atmosphère, ne comporte pas l'empreinte qui caracté-
rise le réchauffement à effet de serre. La conclusion incontour-
nable, c'est que la contribution humaine est insignifiante et que
les augmentations observées de dioxyde de carbone et d'autres
gaz à effet de serre ne participent que de manière négligeable au
réchauffement climatique18 • »
-Don Easterbrook, professeur émérite de géologie,
Université Western Washington : «Depuis 1900, le réchauffe-
ment planétaire a bien pu se produire sans influence du C02. Si
les cycles continuent comme par le passé, le cycle chaud actuel
devrait s'achever bientôt et toutes les températures devraient
refroidir légèrement jusqu'en 203519. »

Le nombre et la rigueur de ces opinions rendent incertaines


la solution à apporter et la direction à prendre avec le change-
ment climatique. Cette incertitude explique pourquoi la décision
à prendre concernant le changement persiste à fuir les person-
nages les plus puissants et influents de ce monde.

73
Vérité essentielle

l'espoir
En 2010, le monde entretenait tous les espoirs, car les diri-
geants mondiaux se réunissaient comme jamais auparavant au
Danemark pour déterminer comment réagir au changement
climatique; c'était le Sommet climatique de Copenhague. La
série de rencontres avait pour but d'envisager une forme d'ac-
tion et, avec un peu de chance, de s'entendre sur cette action, un
peu comme un traité qui aborderait le changement menaçant le
mode de vie sur terre.
Le début de la conférence fut marqué par l'espoir et une
coopération solide entre les dirigeants (plutôt qu'entre leurs repré-
sentants) ; présidents, premiers ministres, rois, reines et dicta-
teurs s'assemblèrent pour envisager un problème allant au-delà
des divergences politiques. À la fin de la conférence toutefois,
l'espoir donnait lieu à la déception, puis au désespoir quant à
l'aboutissement. En dépit des plus illustres cerveaux de l'heure
préparant la recherche qui avait réuni les dirigeants et les meil-
leures voies diplomatiques engagées pour permettre des accords,
les dirigeants du monde ne furent pas en mesure de travailler
ensemble pour trouver des solutions.
Ce qui s'est plutôt produit est ce qui donne son importance à
ce livre. À mon sens, ce Sommet représente une chance tragique-
ment ratée. Je l'affirme pour la raison qui suit.

l'occasion
À Copenhague, les dirigeants mondiaux avaient la chance
rare de démontrer à leur nation respective, ainsi qu'aux uns et
aux autres, qu'il existe un lien entre les peuples de toutes les
nations, un lien qui surpasse les frontières, les gouvernements,
les cultures et les croyances qui nous ont autrefois divisés. Ils
auraient pu s'entendre sur le fait que, par exemple, bien que
nous ne connaissions pas la cause du changement climatique,
celui-ci existe et sa menace pèse sur la civilisation. Les

74
Au bord du gouffre ...

rivages disparaissent, de vastes cités sont anéanties par des


phénomènes extrêmes, des populations entières et des modes
de vie disparaissent, et la capacité de cultiver la nourriture dans
l'hémisphère nord, où l'essentiel de l'humanité vit, diminue
rapidement.
Ils auraient simplement pu s'entendre sur le fait que bien
que nous ne sachions pas précisément pourquoi ces choses se
produisent, en tant que nations nous pouvions promettre d'in-
vestir nos ressources, notre argent, nos armées, notre technologie
et nos efforts pour faciliter la transition. Nos dirigeants auraient
pu se mettre d'accord sur quelque chose de semblable, mais ils
ne l'ont pas fait.
À maintes reprises, on fit remarquer à l'assistance que les pays
plus riches n'avaient pas accompli leurs devoirs. Ils ne compre-
naient pas l'attitude des nations défavorisées qui comptaient
des milliers de morts et essuyaient des pertes économiques de
milliards de dollars à cause du changement climatique en la
seule année 2008. Cette année-là, le cyclone Nargis au Myanmar
[Birmanie] fut responsable d'au moins 100 000 morts. La
tempête emporta des villages entiers, privant d'abris nombre
d'habitants. Puis 200 000 personnes furent victimes de pluies
torrentielles et d'inondations graves lorsque quatre tempêtes (Fay,
Gustav, Hanna et Ike) ravagèrent l'essentiel de l'infrastructure
d'Haïti et fragilisèrent le pays, qui dut affronter un séisme désas-
treux moins de deux ans plus tard. Le typhon Hagupit fit envi-
ron 70 000 morts en Chine et entraîna la disparition de 18 000
autres personnes après un tremblement de terre d'une magnitude
de 7,9 la même année.
Pour reprendre les paroles de l'économiste britannique
Nicolas Stern, président du Grantham Research lnstitute on
Climate Change and the Environment, l'issue du Sommet de
Copenhague sur le climat fut décevante, en partie à cause de
l'attitude des nations plus riches. Et même s'il y avait «moins
d'arrogance que lors des années précédentes [...], précisait-il, les
pays riches auraient pu s'y prendre de bien meilleure façon 20 ».

75
Vérité essentielle

L'occasion ratée
Au lieu de reconnaître le problème et d'admettre que l'in-
certitude règne quant à la cause des changements climatiques
(même si les données sur les cycles de réchauffement et de refroi-
dissement me semblent très convaincantes), les participants au
Sommet cherchèrent en premier lieu à mettre en faute des pays
et des industries spécifiques ; en deuxième lieu, ils accusèrent et
mesurèrent le degré de culpabilité de nations en particulier; et en
troisième lieu, ils voulurent pénaliser financièrement cette culpa-
bilité. De toute évidence, plusieurs ordres du jour se heurtaient
à Copenhague.
J'ai le sentiment qu'en cela tient toute l'occasion ratée pour
tant de dirigeants qui bénéficient d'un tel soutien de la part des
gens qu'ils représentent, qui possèdent tant en commun et qui
affrontent des enjeux si élevés ... et qui rentrent les mains vides.
Cette attitude explique aussi pourquoi le Sommet ne parvint pas
à élaborer un cadre significatif permettant d'aborder les maintes
crises dont personne ne met en doute l'existence.
Si c'est malheureux, ce n'est toutefois pas surprenant.
Le Sommet de Copenhague sur le climat illustre concrète-
ment les raisons qui m'ont poussé à écrire ce livre et une façon de
penser fondée sur les suppositions fausses de la science. L'échec
d'aboutir à un cadre significatif pour agir provient directement
d'un mode de vie reposant sur des suppositions scientifiques valo-
risant la rivalité et la séparation, non la coopération et l'unité.
Plus spécifiquement, notre civilisation se fonde sur la série
de fausses suppositions précisées ci-haut - la nature se base sur
la «survie du plus fort », tout est séparé de tout le reste, et la
conscience est distincte de notre monde physique.
Si les dirigeants mondiaux et leurs représentants avaient vrai-
ment compris et vécu suivant les vérités scientifiques profondes -
que l'univers, la planète et notre corps se composent d'un champ
d'énergie partagé, d'une matrice qui rend l'intrication possible,
que l'émotion influe directement sur le cours des événements

76
Au bord du gouffre ...

dans la matrice et que la nature compte sur la collaboration, non


sur la compétition, pour survivre -, ils auraient certainement fait
d'autres choix, et le Sommet de Copenhague sur le climat en
2010 aurait certainement produit de meilleurs résultats.
Si les participants avaient reconnu le Fait 1 (la civilisation a
au moins deux fois les 5 000 à 5 500 ans admis par les chronolo-
gies traditionnelles), ils auraient su que les changements clima-
tiques à l'origine de la conférence sont cycliques. Ils se sont déjà
produits et sont précisément les changements auxquels on doit
s'attendre pendant notre période de l'histoire cyclique.
Les vérités profondes fournissent les motifs scientifiques
solides de penser autrement que lorsque nous avons fait les choix
qui ont conduit aux crises actuelles. Penser autrement, dans le
cas du Sommet de Copenhague sur le climat, exigerait de cesser
de voir le monde comme une tarte avec un nombre limité de
portions dont certains pourraient profiter au détriment des autres
et de plutôt réaliser que nous pouvons fabriquer plusieurs tartes,
avec même de nouvelles saveurs, pour combler les besoins de
notre famille planétaire.
Les événements à Copenhague illustrent comment une petite
modification de notre pensée pourrait donner un résultat tota-
lement différent; les sections qui suivent démontreront le même
principe dans le cadre d'autres crises. Contrairement au change-
ment climatique et au réchauffement planétaire néanmoins, les
crises qui suivent sont directement liées aux choix que nous avons
effectués. Et de ce fait, elles constituent une occasion sans précé-
dent de transformer la pensée et les actions qui les ont suscitées.

Où sont passées toutes les espèces ?


En grandissant au nord du Missouri, j'appréciais fortement
mes randonnées d'été pendant les vacances scolaires. Du petit
matin jusqu'à la tombée du jour, je marchais seul sur les sentiers
qui sillonnent les forêts verdoyantes surplombant le fleuve

77
Vérité essentielle

Missouri. Je m'étonnais toujours qu'en regardant là-haut, je ne


puisse pas apercevoir le ciel au travers des branches, des feuilles
et des vignes.
Pour moi, ces expéditions dans les forêts du Missouri repré-
sentaient une remontée dans le temps, comme dans une jungle
préhistorique. J'avais l'impression, à tout moment, qu'une créa-
ture millénaire allait bondir sur le sentier, juste pour me faire
savoir qu'elle existait toujours, avant de disparaître dans sa
cachette mystique.
Essentiellement, je supposais que la forêt et tout son contenu
allaient jusqu'à l'infini, qu'ils avaient toujours existé et qu'ils
seraient à ma disposition ... à jamais. Je ne pouvais rien envisager
d'autre.
Aujourd'hui, le fleuve Missouri et son écosystème sont au
centre d'une histoire tragique causée par la technologie moderne.
En raison de «progrès » prenant la forme de barrages, de struc-
tures pour détourner l'eau et de canaux artificiels qui changent
la direction du courant dans le plus grand réservoir au pays, le
Missouri est l'un des fleuves les plus «en voie de disparition» aux
États-Unis, de même que la faune qui en dépend 21 .
Au moins trois espèces dans l'écosystème du fleuve Missouri
risquent l'extinction - deux types d'oiseaux et une espèce de
poissons. Chacun de ces animaux joue un rôle clé dans l' équi-
libre délicat de la chaîne alimentaire qui soutient l'écosystème. Le
Service américain de la pêche et de la faune a publié un rapport
recommandant de modifier les contrôles de facture humaine sur
le fleuve dans le but de permettre le retour des fluctuations natu-
relles de températures et de niveaux de l'eau, desquelles fluctua-
tions dépend la faune en danger22 •
Ce n'est que dans mon cours de science, à la fin du primaire,
près des forêts où j'adorais marcher, que j'ai appris la triste réalité
sur ces endroits merveilleux. Pour diverses raisons, l'histoire
démontre que les espèces ne durent pas toujours. À certaines
époques, l'impensable s'est produit : un désastre a eu lieu,

78
Au bord du gouffre ...

anéantissant toutes les espèces végétales ou animales de la face


de la Terre, lesquelles connurent l'extinction.
Même si quelques disparitions dépendaient de causes natu-
relles - le changement climatique ou, il y a 65 millions d'années,
la collision entre la Terre et un astéroïde-, je fus choqué d'ap-
prendre qu'elles étaient parfois dues à un phénomène plus fami-
lier: notre présence. Nous, humains, avons été la catastrophe qui
a supprimé, ou menacé, des espèces entières.
Le sort du dronte, aussi appelé dodo, vivant sur l'île Maurice
dans l'océan Indien, illustre ce phénomène. L'extinction de
cet animal est l'archétype même des extinctions induites par
l'humain.
Le dronte était un gros oiseau incapable de voler et pesant
environ 22 kg; les analyses d'ADN confirment que c'était un
cousin du pigeon. À l'arrivée des premiers explorateurs portugais
en 1507, l'île en comptait un nombre incalculable.
Puis, des facteurs humains - la déforestation, qui restreignit
les lieux de nidification du dodo, les chiens, les porcs et autres
prédateurs emmenés par les explorateurs, ainsi que la chasse, car
les oiseaux nidifiaient au sol, faisant d'eux des proies faciles -
vinrent rapidement réduire la population des dodos, jusqu'à ce
qu'elle ne soit plus viable. Les manuels affirment que le dernier
dodo a été aperçu en 1662, mais des témoignages visuels ont été
rapportés jusqu'en 1693.
Malheureusement, en près de 150 ans après notre première
rencontre avec ces oiseaux sans peur et incapables de voler, l'acti-
vité humaine a entraîné l'extinction du dodo. Ce fut le premier
cas documenté de l'ère moderne prouvant que des populations
vivantes ne sont pas indestructibles et que nous sommes capables
de chasser une espèce au point de la supprimer.
Et la même leçon s'est répétée plus récemment avec d'autres
espèces, dont le buffle d'Amérique; sa population a diminué de
75 millions dans les années 1870, jusqu'à moins de 1000 en
1 900. Et la baleine bleue, le plus grand mammifère, dont la
population a diminué de 350 000 avant l'avènement de la pêche

79
Vérité essentielle

à la baleine, jusqu'à 8000 à 14000 aujourd'hui. Plusieurs espèces


ont fait l'objet de chasse et frôlent désormais l'extinction. Comme
pour le buffle d'Amérique et la baleine bleue, une modification de
notre manière de penser au sujet de ces animaux est susceptible
de les sauver de la disparition. À moins que le nombre d'espèces
qui s'éteignent soit si considérable qu'il devienne impossible de
concentrer nos efforts de préservation sur une ou deux espèces.

Voilà précisément où nous en sommes aujourd'hui.


Contrairement à la croyance populaire, nous sommes loin
d'avoir découvert l'ensemble des créatures vivantes qui habitent
la Terre. Environ 18 000 nouvelles espèces sont identifiées chaque
année. Quelques-unes sont découvertes en des lieux tout à fait
inattendus. En juillet 2010, par exemple, les scientifiques obser-
vèrent onze nouvelles espèces d'insectes dans un site touristique
en France, le Parc national du Mercantour.
Bien que l'on découvre sans cesse de nouvelles espèces, l'ex-
tinction des formes de vie terrestres pour sa part s'accélère. On
estime qu'environ 26 000 espèces disparaissent chaque année,
certaines avant même d'avoir été découvertes. Voilà pourquoi
le Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, recommande ce
qui suit: «Pour s'attaquer aux causes premières de la perte de la
biodiversité, il faut lui donner la priorité dans tous les domaines
de la prise de décision et dans tous les secteurs économiques 23 • »
Le taux accéléré de disparition pour tant d'espèces nous envoie
un message clair, à nous la forme de vie qui est la source des
bouleversements sur la planète. La question qui se pose : Sommes-
nous à l'écoute?

80
Au bord du gouffre ...

Sommes-nous les prochains ?


Les biologistes évolutionnaires se consacrent à scruter le passé
pour mieux comprendre le présent et identifier les tendances qui
façonneront notre avenir. Presque à l'unanimité, les biologistes
s'entendent pour dire qu'à certaines époques de vastes secteurs
de la vie sur terre ont disparu. Ils attribuent ces disparitions à
plusieurs causes, et si les théories à leur sujet varient, l'issue, elle,
est invariable.
Les extinctions massives sont un phénomène avéré du passé.
Selon les biologistes, la Terre en a connu au moins cinq. L écart
entre chacune se mesure en centaines de millions d'années. La
première extinction massive, par exemple, se produisit il y a 440
millions d'années; la deuxième, il y a 370 millions d'années; la
troisième, il y a 245 millions d'années; et la quatrième, il y a 210
millions d'années. La cinquième et dernière extinction massive
fut il y a 65 millions d'années, alors que 60 à 80 % de la vie sur
terre fut anéantie. Si ces extinctions semblent s'être produites il
y a effectivement longtemps, elles ont toujours leur importance
aujourd'hui, car nous vivrons la prochaine24.
Les biologistes affirment en termes clairs que nous sommes
au cœur de la sixième extinction massive - et la disparition de
quantités formidables de formes de vie sur terre n'est pas soudai-
nement apparue aux scientifiques. E. O. Wilson estime que notre
planète voyait au moins 30 000 espèces disparaître chaque année
au début du :xxe siècle. Des estimations plus récentes indiquent
que le problème est peut-être encore pire qu'il le croit. Ce fait
préoccupant est assurément une mauvaise nouvelle. La bonne
nouvelle, c'est qu'un facteur clé distingue «notre» extinction
massive des précédentes. Voilà notre rayon d'espoir.
À l'été 2008, j'ai participé à une tournée de conférences
conjointes en Europe avec mon cher ami et collègue estimé
Bruce Lipton. Lui et moi venions de publier nos deux ouvrages
respectifs les plus récents La Biologie des croyances, et La Divine
Matrice, (l\riane Éditions) et nous avons décidé d'associer nos

81
Vérité essentielle

deux tournées de livres dans les pays de langue germanique pour


offrir nos connaissances ensemble. Lors d'un long trajet en train
de Zurich, en Suisse, à Francfort, en Allemagne, nous avons eu
l'occasion de nous détendre, d'apprécier la beauté champêtre de
l'Europe et d'échanger, autour d'un repas, quelques pensées sur
la vie, l'amour et l'avenir de la Terre - dans cet ordre précis.
Vers la fin du repas, j'ai posé à Bruce une question qui me
tenaillait depuis des années, mais le temps n'avait jamais permis
cette conversation ni une réponse à ma question.
«Sur le plan d'ensemble de la biologie et de la vie sur terre,
à quel point la situation est-elle préoccupante? Entre nous,
à quel point les choses se sont-elles détériorées vraiment?» lui
demandai-je.
Sa réponse me fit l'effet d'un coup de massue. Bruce, cet
homme que j'aime comme ami et que je respecte énormément
pour son intégrité professionnelle, m'offrit une réponse simple,
élégante et acérée comme celles qui ont popularisé ses ensei-
gnements. Reprenant la métaphore de nos ancêtres indigènes, il
évoqua le jardin qu'est la Terre, un jardin planétaire.
«Tout sur terre fait partie de ce jardin, dit-il, dont nous-
mêmes. Notre Terre mère réserve une approche pour ces choses
qui ne conviennent pas à son jardin - elles sont expulsées ! » Il
se retourna et me regarda directement par-dessus la table. Après
une vie passée à des études l'ayant mené à quelque chose de vaste
et de profond, il résuma la situation en quelques mots, l'œil
étincelant : « Ou nous nous figurons comment vivre en paix dans
le jardin de la nature et comment nous en occuper, dit-il, ou on
fera de nous du compost pour alimenter le reste du jardin !»
Avec son don pour la description et cette analogie du jardin,
Bruce venait de cerner notre situation et ce à quoi on peut s'at-
tendre à moins que quelque chose ne change, et vite. Il m'avait
aussi habilement révélé bien davantage. Il m'avait offert la clé sur
ce qui distingue notre époque d'extinction de celles du passé: si
les cinq premières extinctions semblent avoir été provoquées par
la nature (astéroïdes, changement climatique, etc.), la nôtre ne

82
Au bord du gouffre ...

l'est pas. Nous en sommes la cause. La sixième extinction massive


de la vie sur terre, dont la vie humaine, est induite par l'homme.
Selon Niles Eldredge, ancien curateur en chef du Hall of
Biodiversity à l'American Museum of Natural History : «Il est
indubitable que l'homme est la cause directe du stress infligé
aux écosystèmes et de la destruction des espèces à l'ère moderne
en raison d'activités telles que la transformation du territoire, la
surexploitation des espèces, la pollution et l'introduction d'es-
pèces étrangères 25. »
L'évaluation d'Eldredge n'est pas unique. Le Millennium
Ecosystem Assessment a été chargé d'étudier l'état des écosys-
tèmes et leur impact sur le «bien-être de l'homme». Le premier
de sept rapports planifiés fut publié en 2005. Bien que les analyses
se poursuivent et que les données continuent d'être recueillies, les
implications sont claires : « La dégradation actuelle de quinze des
vingt-quatre systèmes écologiques étudiés - dont l'eau potable, la
pêche, la régulation de l'air et de l'eau et la régulation du climat
régional, des dangers naturels et des insectes nuisibles - rend
vraisemblables des altérations brutales qui influeront sérieuse-
ment sur le bien-être de l'homme26 • »
Le rapport décrit plus spécifiquement le type de crises
auxquelles nous devons nous attendre si nos politiques d'utilisa-
tion de la terre et des ressources ne changent pas. Parmi ces «alté-
rations brutales», on pourrait compter l'apparition de nouvelles
maladies, d'abruptes diminutions de la qualité de l'eau, l'appa-
rition de «zones mortes» le long des côtes, l'effondrement des
zones de pêche et des modifications du climat régional. Ce qui
importe pour le Millennium Ecosystem Assessment se résume en
une phrase qui porte à réfléchir. La réalité crue, c'est qu'en effet
une espèce (nous) pose un danger aux autres dix millions d'espèces
sur la planète, ainsi qu'à elle-même.

83
Vérité essentielle

On ignore les crises jusqu'à ce qu'elles deviennent trop


flagrantes
Lorsque l'on demanda récemment à un conseiller financier
chevronné quand pourrait débuter la prochaine crise mondiale,
il répondit exactement de la façon dont je réponds moi-même
si l'on me demande quand débuteront toutes les crises redou-
tables prédites par les aborigènes pour «l'époque du nouveau
monde». Ce conseiller a répondu à la question en posant à son
tour quelques brèves questions pathétiques :

Quel événement attendez-vous pour comprendre que


nous sommes déjà en pleine crise? Jusqu'où devra encore
grimper le prix de l'essence pour que vos voisins s'aper-
çoivent que quelque chose ne va pas? Jusqu'où devras' éle-
ver le prix de l'or ou de l'argent? Combien de banques
devront faire faillite? Jusqu'où devra monter le taux de
chômage? Combien de villes devront faire banqueroute ?
Quel est le seuil à ne pas dépasser? Jusqu'à quel point
les choses devront-elles se détériorer avant que vous vous
rendiez compte de ce qui se passe réellement 27 ?

La réponse de ce conseiller financier constitue tout le sujet


de ce livre.
Les plus grands esprits de notre époque affirment que nous
sommes déjà en crise et que nous faisons face simultanément à
plusieurs situations critiques. Quel degré de rareté l'eau potable
devra-t-elle atteindre pour que nous reconnaissions l'existence du
problème ? Combien d'institutions financières devront s' écrou-
ler ? Combien de fois la population devra-t-elle doubler tandis
que les ressources diminueront? Jusqu'où devrons-nous frôler
une autre guerre totale ?
Une meilleure réponse à la question du «quand» serait celle-
ci: «Jusqu'où les choses devront-elles se détériorer pour que nous
reconnaissions que nous subissons déjà de multiples crises et que

84
Au bord du gouffre ...

nous nous dirigeons vers des problèmes encore plus graves si nous
ne changeons pas notre façon de voir les choses ?»
La liste des crises mentionnées dans les chapitres précédents
ne comporte sans doute rien d'étonnant pour les lecteurs de
ce livre, mais les humains ont en commun une étrange réac-
tion devant les mauvaises nouvelles, une attitude d'autant plus
prononcée que la situation est grave. Nous réagissons de deux
manières devant une information alarmante : ou bien nous la
minimisons jusqu'à !'insignifiance ou bien nous l'ignorons tota-
lement. Ce phénomène s'appelle «le préjugé de normalité» et il
a tendance à être plus fort chez les gens qui n'ont jamais eu à
affronter de situation extrême.
Par exemple, ceux qui ont connu la dépression des années
1930 savent ce que c'est d'avoir un taux de chômage de presque
25 %, de faire la queue sur plusieurs rues pour la soupe popu-
laire et d'attendre des heures pour obtenir une miche de pain
rationné. Ils comprennent aussi que le pire peut survenir très
rapidement. Ces gens y sont toujours préparés au cas où une
telle situation se produirait de nouveau. Pour la jeunesse améri-
caine d'aujourd'hui, la dépression des années 1930 fait figure
de sombre légende. Les vieilles photos en noir et blanc la font
paraître lointaine et impossible. Ils ne peuvent tout simplement
pas imaginer qu'une telle chose puisse se produire de nouveau.
La façon dont les gens ont réagi aux rumeurs de !'Holocauste
pendant la Deuxième Guerre mondiale nous offre un excellent
exemple du fonctionnement de ce préjugé dans notre psyché.
Quand, en 1944, des wagons remplis de Juifs quittaient les
ghettos de Hongrie et de Pologne en plein jour sous les yeux des
autres habitants restés sur place, ces derniers étaient convaincus
que les trains emportaient les « chanceux» vers des sites de relo-
calisation où ils trouveraient un meilleur foyer et un mode de vie
plus agréable. Même lorsque les rumeurs des horreurs des camps
de la mort circulaient dans la communauté, personne ne voulait
y croire. On les ignorait.

85
Vérité essentielle

En 2009, Kitty Williams, une survivante des camps de la


mort nazis, a raconté son histoire à la presse pour la première fois
depuis sa libération, survenue à la fin de la guerre28 • Avant de
se retrouver elle-même dans l'un des wagons filant vers le camp
d'extermination d'Auschwitz-Birkenau, elle et sa famille avaient
entendu parler, comme tant d'autres, de ce qui se passait, mais
elle n'avait pu l'accepter comme vrai.
Elle raconte:

De jeunes Polonais et sans doute aussi des Tchèques


frappaient à notre porte en disant qu'ils tentaient de
s'échapper en traversant la Hongrie pour se rendre en
Israël et, bien sûr, nous les nourrissions toujours et leur
donnions des provisions. Quand ils nous parlaient des
atrocités, je pense que nous ne les croyions pas vraiment.
L'esprit humain ne peut pas imaginer qu'une telle chose
puisse se produire. C'était de l'exagération, ce ne pouvait
tout simplement pas être vrai 29.

Comme d'autres qui avaient nié les rumeurs pendant long-


temps, Kitty et sa famille ont fini par devenir victimes des
horreurs dont on leur avait parlé. Elle-même a survécu et elle
peut raconter son histoire, mais plusieurs de ses amis ainsi que
des membres de sa famille furent parmi les 5,8 millions de gens
qui n'ont pas survécu. Ce que je veux souligner ici, c'est qu'ils
ont été prévenus, mais qu'ils n'ont pas accepté les faits qu'on leur
rapportait quotidiennement ou qu'ils n'ont pas pu croire .

•••
Dans la même veine, ce n'est un secret pour personne que
notre monde est en difficulté. Pour plusieurs, les problèmes
sont simplement trop gros et les solutions sont trop improbables
pour qu'ils agissent. Quand nous nous sentons dépassés par une
situation, il est souvent plus facile de l'ignorer. Ce qui est arrivé

86
Au bord du gouffre ...

au système économique mondial en 2007 en offre un excellent


exemple, bien que ce ne soit nullement comparable à l'amplitude
des souffrances causées par !'Holocauste.
Malgré les sérieux avertissements des analystes et des experts
financiers, personne ne voulait croire que le système financier
mondial était réellement en difficulté et que l'économie se diri-
geait dans une direction dangereuse. Tout le monde se disait que
le système était trop gros pour s'écrouler et que jamais les gouver-
nements ne le laisseraient s'effondrer. C'est précisément avec cette
attitude que l'on octroyait des prêts et que l'on dépensait de
l'argent à l'époque aux États-Unis.
En juillet 2008, j'ai eu à discuter avec le conseiller finan-
cier responsable des épargnes d'une amie à la retraite. Sa famille
m'avait téléphoné pour me demander de l'aider à placer ses actifs
en un lieu plus sûr. Au cours de ma conversation téléphonique
avec ce conseiller, je lui ai demandé comment nous pourrions
sécuriser le mieux possible certaines épargnes investies dans des
actions et des fonds communs de placement. La conversation ne
s'est pas du tout déroulée comme je m'y attendais.
Dès qu'il fut question de sécurité financière, la voix au bout
du fil s'indigna et devint même dédaigneuse. «Je suis un conseil-
ler financier professionnel. C'est mon métier.» J'ai alors compris
que la conversation prenait une mauvaise tournure. «Qu'y a-t-il
de plus sûr que des fonds communs de placement et des actions
Blue Chip ? Il y en a toujours eu. À long terme, on ne peut pas y
perdre.»
Je lui ai répondu ceci : «Je vous entends bien et j'aurais été
d'accord avec vous auparavant, mais ces actions ne sont sûres
que dans la mesure où le marché l'est également. Or, le marché
va mal. Les indicateurs traditionnels n'ont plus la même signifi-
cation. Les actifs tangibles comme l'or, l'argent et le pétrole ne
devraient pas être en hausse si les actions le sont. Il n'y a aucune
raison valable pour que le marché soit autant en hausse et dans
autant de secteurs, et pendant aussi longtemps. Le pire peut arri-
ver et, si c'est le cas, Mary [nom fictif] peut perdre tout ce que
son mari a gagné durant sa vie. »
87
Vérité essentielle

La réplique fut invraisemblable. «Le marché ne peut pas s'ef-


fondrer. Il est trop gros et trop fort. La dynamique est trop puis-
sante. » Moins de deux mois plus tard, le marché s'est effondré.
C'est avec ahurissement que j'ai regardé à la télévision chuter
les chiffres durant toute la journée. L écran LED affichant la
moyenne industrielle Dow Jones offrait un brouillage rouge
continu, les valeurs étant en chute libre à chaque fraction de
seconde.
C'était le 29 septembre 2008. I.:impensable venait de se
produire. Contrairement à ce que m'avait dit au téléphone le
conseiller financier deux mois plus tôt, de grosses institutions -
comme Freddie Mac, Fannie Mae, Lehman Brothers, Goldman
Sachs et Bear Stearns -, qui avaient toujours été trop puissantes
pour s'effondrer, venaient effectivement de s'écrouler.
À la fin de la journée, le marché boursier avait chuté de
777,68 points, un record historique. Cette perte de 1,2 billion du
marché boursier s'est traduite par d'énormes pertes personnelles
pour tous les gens qui y avaient investi et elle fut le début d'un
changement qui a eu des conséquences financières sur presque
tout le monde depuis.
Le lendemain, j'ai téléphoné à Mary, de l'aéroport, et les
nouvelles étaient plutôt mauvaises. Tristement, en moins de 48
heures, elle avait perdu presque la moitié de ses épargnes et de
celles de son mari, qu'ils avaient accumulées et protégées pendant
quarante ans de mariage. Le plus décourageant, c'est qu'elle
ne pouvait plus employer les soignants dont elle avait besoin
quotidiennement.
En regardant avec stupeur ce jour-là une quantité massive de
richesses s'échapper de l'économie américaine, je n'étais nulle-
ment étonné. Ceux qui suivent les politiques économiques liées
à l'intérêt national, à la dette nationale et aux prêts immobiliers
ne l'étaient pas non plus. La tendance existait depuis des années
et l'on avait reconnu les signes indubitables de l'effondrement
au moins quatorze mois avant qu'il ne se produise. Le 13 juin
2007, Richard C. Cook a publié un article pour le Centre de

88
Au bord du gouffre ...

recherche sur la mondialisation. La première phrase du rapport


disait tout : «C'est officiel : l'effondrement de l'économie améri-
caine est commencé30. »
Dans son article, Cook citait les travaux de deux économistes
éminents qui voyaient plus loin que les signes extérieurs d'un
marché boursier en plein essor. Steven Pearlstein, chroniqueur
du Washington Post et lauréat du prix Pulitzer, ainsi que Robert
Samuelson, collaborateur de Newsweek et du Washington Post,
ont vu tous les deux l'instabilité s'installer dans l'économie, et
ce, au même moment. I..:alerte rouge leur est apparue quand ils
se sont aperçus du nombre croissant de compagnies qui étaient
massivement endettées en comparaison de leurs revenus.
«Le prix des actions et les évaluations d'entreprises vont
chuter, a prédit Pearlstein. Les banques vont annoncer de doulou-
reuses pertes sèches, certains fonds spéculatifs vont fermer leurs
portes. Certaines compagnies seront forcées de faire faillite ou de
se restructurer3 1• »
Le message de Pearlstein, de Samuelson et d'autres était clair:
en 2007, les conditions étaient réunies pour un parfait ouragan
économique mondial sur la route duquel l'économie américaine
se trouvait directement. Bien sûr, tandis qu'ils prédisaient ce
scénario, même Pearlstein et Samuelson ne connaissaient sans
doute pas l'importance de la crise ni sa durée.
Je rapporte cette histoire ici afin de démontrer que l'on a
tendance à minimiser les crises ou à les ignorer jusqu'à ce qu'elles
deviennent évidentes et qu'il soit trop tard pour y remédier. Dans
ce cas-ci, elle était si évidente qu'elle se manifestait dans le porte-
feuille de tous. Les gens se sont mis soudain à poser les questions
essentielles : «Que s'est-il passé? Pourquoi? Comment cela a-t-il
pu arriver aussi rapidement?» Voilà le point essentiel à saisir dans
la présente partie de ce livre.
I..:effondrement économique mondial ne s'est pas produit
«rapidement» comme un événement indépendant. On ne peut
pas l'isoler du grand scénario des multiples points de bascule
auxquels fait face notre communauté mondiale. Tout comme le

89
Vérité essentielle

bouleversement climatique fut largement ignoré par les décideurs


politiques et par le public jusqu'à ce que les calottes polaires de la
planète commencent à fondre et que des îles se mettent à dispa-
raître sous le niveau de la mer qui s'élevait, l'effondrement de
l'économie a émis un signal pour ceux qui pouvaient prendre du
recul et regarder l'ensemble du tableau. Ce signal faisait partie de
ce que l'on pourrait appeler le «Code terrestre», nous indiquant
que les systèmes non durables ne peuvent plus continuer.
Comme je l'ai démontré dans Le Temps fractal, les systèmes
économiques suivent les mêmes rythmes naturels qui créent les
schèmes de la nature et les cycles climatiques. Parce que l'on peut
calculer ces schèmes et prédire leurs conditions récurrentes, on ne
devrait pas s'étonner que les conditions mondiales de l'effondre-
ment économique convergent de nouveau dans la même fenêtre
temporelle que tant d'autres systèmes non durables, dont l'aug-
mentation de la population, l'épuisement des ressources et les
cycles de la guerre.

Un monde aux systèmes détraqués


Tout le monde n'apprend pas de la même manière. Certains
individus le font par des heures de répétition, tandis que d'autres
retiennent instantanément l'information qu'ils lisent dans un
livre. Notre façon d'«entendre» l'information et ce que nous en
faisons ensuite sont étroitement liés à notre mode d'apprentis-
sage. De plus, précisément parce que nous apprenons tous diffé-
remment, il est bon qu'autant d'individus lancent le même appel
au changement planétaire de tant de façons diverses.
Quelque chose qui ne veut rien dire pour l'un peut en éveiller
un autre, et inversement. Ceux qui lancent l'appel le font peut-
être en décrivant la situation différemment - qu'il s'agisse du
point de vue technique du Scientific American et de l'institut
Worldwatch ou du langage simple d'Al Gore dans Une vérité qui
dérange -, mais le message disant que notre fragile mode de vie
est en difficulté est entendu partout dans le monde.
90
Au bord du gouffre ...

L'environnementaliste et auteur Lester Brown, fondateur et


ex-président de l'institut Worldwatch, est l'une des voix les plus
influentes dans les efforts qui sont faits pour éduquer et mobili-
ser les masses vers un changement conscient de notre mode de
vie. «Nous vivons une course entre les points de bascule de la
nature et nos systèmes politiques32 », dit-il. Dans une tentative
magistrale pour endiguer la souffrance de notre civilisation qui
s'écroule, il a publié un livre où il dit les choses franchement :
Plan B 3.0: Mobilizing to Save Civilization (W. W. Norton &
Company, 2008 33). Dans cet ouvrage, il décrit la situation telle
qu'elle était au moment de sa rédaction et il indique à quel point
elle pourrait empirer. Depuis, plusieurs de ses prédictions se sont
réalisées.
Il explique qu'un stade critique au sein de la nature - par
exemple, la baisse de population d'une espèce - indique un point
de non-retour pour le système en question. Il décrit ensuite l'état
d'un certain nombre de systèmes terrestres interdépendants et
précise où nous en sommes pour chacun par rapport au point de
non-retour.
Ce constat nécessaire qui donne à réfléchir offre l'espoir d'un
plan d'action tout en faisant bien ressortir les problèmes. Il ne fait
aucun doute que Plan B 3.0 change notre vision du monde. Pour
plusieurs organisations et agences ainsi que pour de nombreux
individus, le livre de Brown est l'ouvrage de référence essentiel
pour identifier les solutions potentielles.
Avec la publication de Plan B 3.0 et les efforts de l'insti-
tut Worldwatch, il existe un mouvement évident pour alerter le
grand public quant aux conditions menaçant la vie et la civilisa-
tion telles que nous les connaissons, et ce mouvement prend de
l'ampleur. Même si les divers rapports, études, livres et instituts
ne s'accordent pas tous sur chaque détail de la crise ou sur les
solutions possibles, ils ont tous identifié à leur façon certaines
préoccupations qui, en général, entrent dans les grandes catégo-
ries suivantes :

91
Vérité essentielle

• Crise 1 : une population mondiale insoutenable


• Crise 2 : les changements climatiques
• Crise 3: la pénurie croissante de nourriture et d'eau
potable
• Crise 4 : l'écart grandissant entre la richesse et
la pauvreté, la santé et la maladie, l'éducation et
l'analphabétisme
• Crise 5 : le risque de guerre croissant et la nouvelle
menace d'une guerre nucléaire

Notre époque se différencie des précédentes principale-


ment par le nombre, l'ampleur et la simultanéité des problèmes
auxquels nous faisons face aujourd'hui. Chaque point de bascule
mentionné plus haut comporte le potentiel de créer d'énormes
souffrances à la vie humaine et de conduire notre monde à un
arrêt pénible si nous ignorons la situation et ne faisons rien
pour la résoudre. Or, comme vous pouvez très bien le voir, les
problèmes sont tous déjà présents. Chaque problème identifié ici
a déjà atteint les proportions de crise prédites par les environ-
nementalistes, les scientifiques et les économistes il y a près de
quarante ans.
Voilà qui nous ramène à la question importante posée dans
la section précédente : « Quel événement attendons-nous pour
comprendre que nous sommes déjà en pleine crise ?» Il suffit de
savoir que nous vivons déjà chacune de ces crises. Voilà la réponse
et elle n'a pas besoin d'explications supplémentaires. Dans tout
le reste de ce livre, nous examinerons de plus près certaines des
crises qui paraissent en déclencher d'autres.
Nous commencerons par la Crise 1 : le nombre de gens
qui vivent dans notre monde. Ce facteur à lui seul augmente
la magnitude de la Crise 3 : la pénurie croissante de nourriture
et d'eau, et aussi celle de la Crise 4 : l'écart grandissant entre
la richesse et la pauvreté, la santé et la maladie, l'éducation et
l'analphabétisme.

92
Au bord du gouffre ...

Alors que chacune de ces crises découle d'un système déjà


détraqué, le stress créé dans le monde par la Crise 2, celle des
changements climatiques, a forcé notre mode de vie insoutenable
à atteindre un point de rupture au cours des dernières années. Ce
même stress a contribué à la Crise 5 : le risque de guerre croissant
et la nouvelle menace d'une guerre nucléaire. (Nous examinerons
cette crise au chapitre 6 : « La guerre ne fonctionne plus ».)
Quand nous examinerons ces crises, de nouvelles découvertes
nous aideront à distinguer les faits des fausses hypothèses.

Des gens encore et encore!


Le XXe siècle a donné lieu à plusieurs «premières»; certaines
sont bonnes, d'autres ne le sont pas tellement et d'autres encore
sont simplement ahurissantes. Depuis 1900, le monde a vu
apparaître les avions, la télévision, les ordinateurs, et nous avons
assisté aux premiers pas de l'homme sur la Lune. Il y a eu aussi
l'invention des puces électroniques, la découverte de l'.ADN et la
fission de l'atome. Nous avons également assisté à une explosion
démographique sans précédent.
Depuis la fin de l'ère glaciaire jusqu'à l'an 1650 environ, on
estime que la population totale de la planète était stable et de
moins de 500 millions de personnes. Cela veut dire que, pour les
neuf derniers millénaires, le nombre de gens vivant sur la Terre
et utilisant ses ressources n'était qu'environ la moitié du nombre
vivant en Inde aujourd'hui.
Après 1650, ce nombre a changé. L'illustration de la
Figure 3.4 nous montre comment la population de la Terre a
augmenté rapidement en seulement trois siècles et demi, et à quel
taux elle a doublé.

93
Vérité essentielle

6 ------·----------

5 - - - - - - - -·- - - -

~
E 4 -----------

"'
,;
~ 3 ------------ - -
§
E
-~ 2 - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -·

! 1 --------- --- --- --


~
0 f----+-----+----+-~---i~~..-i..-. .1111111
10 000 av. J..(. 8000 6000 4000 2000 1 apr. J.. (. 1000 2000

Figure 3.4 : Estimation de la population totale de la Terre, de 10000 av. J.-C. à


2000 apr. J.-C. L'abrupte augmentation à l'approche de l'an 2000 a commencé
en 1804 alors que la population mondiale atteignait le milliard. Cette croissance
spectaculaire sans précédent dans l'histoire du monde explique la pénurie de nour-
riture et d'eau potable ainsi que la disponibilité décroissante des terres cultivables
nécessaires pour soutenir notre famille planétaire. (El T, domaine public)

Entre 1650 et 1804, la population de la Terre, qui était restée


pendant très longtemps au-dessous de 500 millions, a soudai-
nement augmenté jusqu'à un milliard d'individus. Il n'a fallu
ensuite que 123 ans pour atteindre deux milliards. Après, il
semble que ça ne pouvait plus diminuer. Tandis que la population
terrestre augmentait jusqu'à trois, quatre, cinq et six milliards, le
nombre d'années requises pour atteindre un milliard de plus est
passé de cent ans à 33, 14, 13 et 12 ans respectivement. Alors
que notre famille planétaire a atteint le nouveau record d'environ
6,89 milliards en l'an 2010 et continue d'augmenter, le taux de
croissance semble avoir ralenti un peu, passant de 88 millions
de personnes par année en 1989, selon les Nations unies, à 75
millions par an actuellement34.
Le taux de croissance de la population au cours des dernières
années a alarmé les gouvernements, les universités et les agences qui
ont pour fonction de suivre ce genre d'information. Les données
citées plus haut constituent la preuve indéniable d'une tendance

94
Au bord du gouffre ...

insoutenable : le redoublement de la population mondiale sur une


échelle temporelle qui suit un rythme cyclique prévisible. Tandis
que la tendance actuelle donne à penser que le prochain redouble-
ment de notre famille planétaire, de quatre milliards {en 1974) à
huit milliards, aura lieu vers 2025, les experts croient que si cela
se produit vraiment ce sera la dernière fois qu'un redoublement se
produira avant le xxne siècle.
On peut douter d'un autre redoublement au cours du présent
siècle, en raison du nombre élevé de gens susceptibles d'être
impliqués dans les crises auxquelles nous devrons faire face
durant cette période. Nous ignorons si le prochain redoublement
sera empêché par une pandémie, par la pénurie d'eau et de nour-
riture ou par les décès dus à la guerre. Ce que nous savons avec
certitude, toutefois, c'est que chacune de ces crises potentielles
pose une menace très réelle qui, si elle se réalise, aura rapide-
ment des conséquences sur un grand nombre de personnes. Bien
qu'une diminution de population aussi spectaculaire soit rare, il
s'en est produit dans le passé.
La propagation de la maladie au XIVe siècle nous rappelle
indéniablement que la chose est possible. Entre 1348 et 1351, la
peste bubonique s'est répandue dans presque toute l'Europe. Bien
que les registres sporadiques de l'époque rendent difficile pour
nous de déterminer le nombre exact de décès causés par ce fléau,
il fut sans doute de 75 millions à 200 millions.
Les antibiotiques d'aujourd'hui rendent improbable un tel
taux de mortalité, mais ils ne sont efficaces que pour traiter les
infections bactériennes. I.:accroissement du nombre de nouvelles
infections virales pour lesquelles il n'existe aucun remède
connu, s'ajoutant aux voyages aériens de notre ère moderne qui
permettent aux gens de se transporter en quelques heures d'une
région lourdement infestée aux grandes villes les plus peuplées,
rend cette menace très réelle.
Pour toutes ces raisons, notre capacité à prévoir les tendances
démographiques nous procure un excellent instrument pour
composer avec un changement mondial et pour prédire les

95
Vérité essentielle

besoins d'un nombre croissant de gens envers la terre qui les


nourrit. La CIA décrit ainsi la nécessité d'une telle informa-
tion : «Le taux de croissance [démographique] est un facteur qui
détermine l'ampleur du fardeau imposé à un pays par les besoins
changeants de sa population en infrastructures (les écoles, les
hôpitaux, le logement, les routes), en ressources (la nourriture,
l'eau, l'électricité) et en emplois. On peut considérer une crois-
sance démographique rapide comme une menace pour les pays
voisins 35 • »
Comme l'exprime Joel E. Cohen, biomathématicien et direc-
teur du Laboratoire des populations de l'Université Rockefeller,
dans Scientific American : «Le plus haut taux de croissance démo-
graphique jamais atteint, d'environ 2,1 % par année, s'est produit
entre 1965 et 1970. La population mondiale n'a jamais augmenté
aussi rapidement avant le xxe siècle et il est improbable que cela
se produise de nouveau36. »
Ce qui est encourageant dans cette déclaration de Cohen,
c'est que l'explosion démographique semble avoir atteint un
sommet il y a quarante ans. D'un autre côté, la plupart des gens
nés durant cette période sont toujours vivants et doivent obtenir
la nourriture, l'eau, le logement et les emplois nécessaires pour
les soutenir dans leur espérance de vie, présentement estimée
à une moyenne de 67 ans mondialement. C'est ici que conver-
gent la politique, la technologie, le mode de vie et les coutumes
millénaires pour créer le foyer des crises auxquelles nous assistons
aujourd'hui.

Le Rapport de synthèse de l'UNESCO sur l'évaluation des


écosystèmes pour le millénaire
Avant d'aborder chacune de ces crises, on doit d'abord les
identifier clairement et succinctement. On peut ainsi séparer en
parties gérables une à la fois les problèmes qui semblent trop gros
pour être résolus globalement.

96
Au bord du gouffre ...

En raison de sa clarté, j'ai choisi le Rapport de synthèse sur


l'évaluation des écosystèmes pour le millénaire, rédigé par 1 300
collaborateurs scientifiques de 95 pays, comme résumé pour
relier ici certaines crises majeures. Les données qu'il renferme
décrivent l'impact de l'activité humaine sur les écosystèmes dont
nous dépendons et indiquent en détail comment la diminu-
tion des ressources affecte la qualité de la vie humaine. C'est la
violente compétition sur la perte de ces ressources qui alimente
les tensions internationales déjà grandes et augmente la menace
de guerre. Voici l'essentiel des quatre découvertes clés contenues
dans ce rapport de l'UNESCO :

1. Les humains ont modifié les écosystèmes plus rapi-


dement et plus largement au cours du dernier demi-
siècle qu'en toute autre période de l'histoire. Ils l'ont
fait surtout pour répondre rapidement à la demande
croissante de nourriture, d'eau potable, de bois de
construction, de vêtements et de carburant. Depuis
1945, on a converti à l'agriculture plus de terres qu'au
cours des XVIIIe et XIXe siècles réunis. Plus de la
moitié de tous les fertilisants d'azote synthétiques -
fabriqués depuis 1913 - utilisés sur la planète l'ont
été depuis 1985. Selon les experts, il en a résulté
une perte substantielle et largement irréversible de
la diversité de la vie sur terre, avec 10 à 30 % des
mammifères, des oiseaux et des espèces amphibies
menacés d'extinction à l'heure actuelle.
2. Les modifications des écosystèmes qui ont contribué
à des gains nets substantiels pour le bien-être humain
et le développement économique ont été accomplies
à un prix croissant, par la dégradation d'autres ser-
vices. Seuls quatre services écosystémiques ont été
améliorés au cours du dernier demi-siècle : augmen-
tation des récoltes, du bétail, de la production aqua-
culture, et séquestration accrue du carbone pour la

97
Vérité essentielle

régulation du climat mondial. Deux services - les


pêches de capture et l'eau potable - sont actuelle-
ment bien au-delà des niveaux pouvant soutenir
les demandes présentes, mais beaucoup moins les
demandes futures. Selon les experts, ces problèmes
vont diminuer substantiellement les avantages pour
les générations à venir.
3. La dégradation des services écosystémiques pourrait
empirer significativement au cours de la première
moitié de ce siècle, et elle fait obstacle aux Objectifs
de développement du millénaire des Nations unies.
Dans chacun des quatre futurs plausibles explorés
par les scientifiques, ces derniers projettent un pro-
grès dans l'élimination de la faim, mais à un taux
très inférieur à celui qui est nécessaire pour réduire
de moitié le nombre de gens souffrant de famine d'ici
2015. Les experts nous préviennent que des modi-
fications des écosystèmes, comme la déforestation,
influencent l'abondance d'agents pathogènes comme
la malaria et le choléra ainsi que le risque d' émer-
gence de nouvelles maladies. Par exemple, la mala-
ria compte pour 11 % de la charge de morbidité en
Afrique et, si on l'avait éliminée il y a trente-cinq
ans, le produit national brut du continent aurait aug-
menté de 100 milliards de dollars.
4. Le défi d'inverser la dégradation des écosystèmes tout
en répondant aux demandes croissantes peut être
relevé selon certains scénarios comportant des chan-
gements politiques et institutionnels significatifs.
Cependant, ces changements doivent être énormes
et ils ne sont pas commencés à l'heure actuelle. Le
rapport mentionne les options qui existent pour
conserver ou améliorer les services écosystémiques
en réduisant les compromis négatifs ou en exerçant

98
Au bord du gouffre ...

un impact positif sur d'autres services. Par exemple,


la protection des forêts naturelles non seulement
conserve la faune, mais fournit également de l'eau
potable et réduit les émissions de carbone37.

Résumant toute la recherche, toute l'expertise et toutes les


recommandations que l'Évaluation des écosystèmes pour le
millénaire (l'EM) a créées dans ce document, son conseil d'ad-
ministration conclut ainsi : « Il appartient aux sociétés humaines
d'alléger les tensions que nous faisons subir aux services natu-
rels de la planète tout en continuant à les utiliser pour améliorer
le mode de vie de tous. » Il poursuit : « Pour ce faire, il faudra
cependant effectuer des changements radicaux dans la façon de
traiter la nature à tous les échelons décisionnels, et trouver de
nouveaux modes de coopération entre le gouvernement, le monde
des affaires et la société civile. Les signes avertisseurs sont visibles
pour tous. Le futur repose maintenant entre nos mains3 8 • »
De toute évidence, en tant qu'espèce nous nous trouvons
dans une courbe d'apprentissage en ce qui concerne notre
mode de vie et nous sommes sur le point d'effectuer des choix
aux conséquences désastreuses. Comme nous l'avons vu lors du
Sommet de Copenhague 2010 sur le changement climatique, les
choix du passé ont été basés sur une vision du monde qui est à
tout le moins incomplète et qui, sous certains aspects, est abso-
lument erronée.
C'est l'un des domaines où le bon sens doit intervenir à tout
prix.

Bien faire les choses


Le bon sens nous dit qu'il est insensé de tenter de résoudre
les plus grandes crises de l'histoire de l'humanité à partir d'une
vision issue d'une compréhension incomplète du problème.
Nous découvrons que plusieurs outils auparavant utilisés ne
fonctionnent plus. Ils sont inefficaces pour régler les problèmes

99
Vérité essentielle

auxquels nous faisons face et qui ne font qu'empirer. Entre-temps,


notre avenir et notre survie sont en jeu.
Avec le grand nombre et la magnitude des crises que nous
affrontons aujourd'hui, les conséquences d'une mauvaise déci-
sion n'ont jamais été aussi grandes. En même temps, les occasions
n'ont jamais été plus claires. Les crises nous forcent à repenser
les vieilles idées et à mettre le cap sur une nouvelle direction
favorable à la vie. C'est précisément pour cette raison que nous
devons examiner longuement et lucidement les hypothèses de
base sous-tendant notre relation à nous-mêmes et au monde, et
nous demander pourquoi nous y croyons.
Alors, par où commencer? Comment nous voir différem-
ment dans le monde? Notre passé est le meilleur endroit pour
débuter.

Vérité 3 : La solution qui permettra de surmonter les crises


menaçant notre survie repose sur des partenariats fondés
sur l'entraide et la coopération afin de s'adapter aux chan-
gements; il faut cesser les accusations et les blâmes qui
entravent ces alliances capitales.

100
CHAPITRE 4

L'HISTOIRE OCCULTE DE
NOTRE PASSÉ OUBLIÉ :
DES LIEUX Q1JI NE DEVRAIENT
PAS EXISTER

« Ceux qui ignorent le passé sont condamnés à en


répéter les erreurs. »
- GEORGE SANTAYANA (1863-1952). PHILOSOPHE

Au cours de mes études durant les années 1960 et 1970,


on m'a appris que la civilisation avait commencé il y a environ
5 500 ans. Selon la pensée traditionnelle, c'est vers cette époque
que les deux plus anciennes civilisations, celle de Sumer et celle
d'Égypte, se sont développées dans la région où l'Afrique et l'Asie
se rencontrent. Le reste appartient à l'histoire, comme le dit le
dicton.

101
Vérité essentielle

À l'exception de quelques professeurs et manuels avant-


gardistes, on enseigne toujours la même histoire aujourd'hui.
Selon cette vision traditionnelle du passé, des peuples primitifs se
sont rassemblés vers 3100 av. J.-C. près de régions pouvant leur
fournir de la nourriture et de l'eau et ils se sont mis à construire
des maisons simples pour abriter leurs familles, des structures
qui ont évolué au cours des siècles jusqu'aux gratte-ciel d'acier et
de verre que nous voyons aujourd'hui. C'est une grande histoire
qui paraît tout à fait logique, mais elle pose toutefois un énorme
problème : elle ne concorde pas avec les preuves existantes, ce qui
fait qu'elle n'est pas fondée scientifiquement.
De plus en plus de preuves en provenance de divers endroits
du monde démontrent au-delà de tout doute raisonnable que les
«premières civilisations» selon l'histoire traditionnelle ne furent
pas du tout les premières. Les anciens Sumériens et Égyptiens
ont plutôt suivi les traces de civilisations antérieures et même
plus avancées sous certains aspects, et qui sont apparues puis ont
disparu il y a beaucoup plus de 5 000 ans. Bien que nous igno-
rions énormément de choses au sujet de ces civilisations qui sont
deux fois plus anciennes que ne le rapporte l'histoire tradition-
nelle, un fait reste absolument certain : l'histoire qui est ensei-
gnée dans nos institutions est partielle.
L'existence de ces civilisations plus anciennes suscite de
grandes questions qui n'ont pas encore de réponse. Qui les a
édifiées? D'où venaient ces gens? Et peut-être la question qui
s'avère la plus importante pour nous aujourd'hui: que leur est-il
arrivé? Comment ces grands centres urbains ont-ils pu exister
vers l'époque de la dernière ère glaciaire - des villes énormes et
des temples construits avec une technologie avancée que l'on
ne sait pas reproduire aujourd'hui - et disparaître ensuite de la
surface de la Terre ?
La réponse à ces questions contiendrait peut-être des indices
nous permettant de survivre aux crises que nous affrontons
aujourd'hui. C'est pour cette raison que j'ai placé parmi nos véri-
tés les plus profondes le sujet de notre histoire ancienne.

102
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

Sauver le passé
Fermant les yeux, j'écoutai le vent siffler parmi les branches
des grands arbres s'élevant autour de moi. Le souffle de la brise
matinale sur ma peau couverte de sueur et de poussière était un
véritable soulagement. Ce vent léger compensait agréablement la
chaleur humide qui régnait toujours dans l'après-midi en cette
fin d'été, dans le nord du Missouri.
De tels moments sont magiques. Je me suis dit que les peuples
anciens dont j'excavais le site ce jour-là avaient sûrement vécu
la même expérience en cuisant leurs aliments sur le foyer que
j'exhumais, des siècles plus tard. La sueur perlait sur mon visage
et des gouttes tombèrent sur le sol quand, ayant rouvert les yeux,
je me penchai pour enlever à la truelle une autre couche de terre.
Quelques semaines plus tôt, j'étais venu sur ce site archéo-
logique avec les élèves de ma classe d'anthropologie afin d'exa-
miner les vestiges de cet ancien village. On nous avait demandé
de participer à la mise au jour urgente de cette étonnante décou-
verte. Étonnante parce que la datation des premiers artefacts au
carbone 14 avait révélé qu'il s'agissait du village d'un peuple indi-
gène dont on croyait auparavant qu'il n'avait vécu là que beau-
coup plus tard. Le camp de chasse se trouvant sous mes pieds
constituait la première preuve que ce groupe de gens, les anciens
Hopewell (100-500 av. J.-C.), avait migré sur les promontoires
surplombant le fleuve Missouri beaucoup plus tôt qu'on ne le
croyait.
Lurgence de ces fouilles était due au fait que le site se trouvait
directement sur le chemin d'un projet d'autoroute qui couvrirait
la région. En raison de l'hiver qui rendrait la construction diffi-
cile, ainsi que pour des questions de priorité et de planification,
le projet ne pouvait être retardé. Dans quelques semaines, l' équi-
pement lourd traverserait le monticule où j'étais agenouillé et les
preuves de l'existence de ce site seraient rapidement enfouies sous
des tonnes d'asphalte et de béton ou détruites à jamais.

103
Vérité essentielle

Avant que ne débute la construction, personne ne connais-


sait l'existence de ce site. Comme c'est si souvent le cas pour
les découvertes archéologiques, ce ne sont pas des années de
recherches scientifiques qui ont attiré l'attention des autorités sur
ce site. Ce fut plutôt l'œil de lynx d'un opérateur d'équipement
lourd qui dégageait le secteur. Pendant un instant, alors qu'il
faisait s'élever au-dessus du sol la grosse lame d'acier de son bull-
dozer, il avait aperçu quelque chose de brillant. Peut-être parce
qu'il avait regardé exactement au bon endroit au bon moment
ou parce qu'il était assez curieux pour examiner ce qu'il avait
aperçu, ce travailleur de la construction a interrompu sa tâche
assez longtemps pour suivre le rayon de soleil se reflétant sur la
surface lisse et brillante d'une pièce de poterie enterrée depuis
des siècles.
C'est en raison de cette découverte effectuée par ce travailleur
que l'on demanda l'aide de ma classe. Nous avons dû œuvrer sous
la pression d'une échéance au lieu de suivre les règles normales
présidant à des fouilles systématiques fondées sur une documen-
tation élaborée. Ce n'était plus qu'une question de jours avant
que ne disparaissent les preuves de l'existence de ce site et de ses
anciens habitants.
Ce jour-là, j'étais seul sur les lieux. Le projet d'autoroute se
poursuivait, mais les classes avaient pris fin et, pour des raisons
d'horaire et d'argent, les fouilles officielles étaient considérées
comme terminées. Néanmoins, je voulais sauver le plus possible
de preuves de cette présence ancienne. En exhumant des frag-
ments d'os et de poterie, des éclats de silex et des pointes de flèche,
je me demandais dans quelle mesure cette découverte changerait
notre vision de l'histoire ancienne du cœur des États-Unis.
Je commençai ensuite à voir plus grand et à me poser une
question plus vaste : puisque notre connaissance dç l'histoire
locale change encore, se pourrait-il qu'il en soit de même à
l'échelle planétaire? Qu'est-il arrivé, que nous ne savons plus,
aux peuples et aux civilisations de notre passé lointain ? Des civi-
lisations avancées ont-elles existé longtemps avant les dates de la

104
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

chronologie, historique officielle? Si c'est le cas, qu'est-ce qui les a


transformées aussi radicalement? Je n'allais découvrir la réponse
à certaines de mes questions que quelques décennies plus tard.
En seulement quelques jours de fouilles dans la terre noire
de la vieille forêt, les fragments d'os et de poterie carbonisés ont
changé toute l'histoire ancienne des falaises du nord du Missouri.
Ils ont modifié la matière dispensée dans les classes d'histoire des
établissements d'enseignement secondaire et des universités de
tout le pays. Ils ont changé l'historique et la cartographie des
migrations du passé. Ils ont modifié le cours de la carrière des
archéologues et des historiens qui avaient fondé leur travail sur
des théories et des hypothèses faites à partir d'un savoir incom-
plet. Ils ont changé tout cela. Les nouvelles preuves l'imposaient.
Les chercheurs ne pouvaient pas ignorer l'existence d'arte-
facts matériels ainsi que la science les associant à une date précise
du passé. En outre, tout comme il a fallu réviser l'histoire des
civilisations locales établies le long des promontoires et des vallées
du nord du Missouri afin de rendre compte des nouvelles décou-
vertes effectuées grâce à nos fouilles, il faut maintenant modi-
fier l'histoire planétaire de l'humanité afin de rendre compte de
nouvelles découvertes fondées scientifiquement.

La cible mobile de l'histoire


« I..:histoire est l'invention des historiens.» Cette phrase attri-
buée à Napoléon Bonaparte (1769-1821), empereur de France
autoproclamé, nous rappelle magnifiquement pourquoi il est
important que notre vision du passé demeure soumise aux révi-
sions nécessitées par la méthode scientifique, même quand de
nouvelles découvertes ne concordent pas avec les connaissances
historiques officielles. Nous demeurons ainsi honnêtes à l'égard
du passé, et nos historiens restent à la page.
Jusqu'au milieu du xxe siècle, l'histoire de la civilisation
semblait assez complète. L« histoire» traditionnelle indique

105
Vérité essentielle

qu'elle s'est développée par une progression continue d'améliora-


tions agricoles, technologiques et culturelles (voir la Figure 4.1).
Cette histoire linéaire paraît bien dans les manuels : des débuts
modestes ont abouti au monde complexe d'aujourd'hui. C'est
une histoire propre et ordonnée. Mieux encore peut-être, elle est
crédible.

._..Rome
.,__.Grèce
....... Vallée de l'lndus
..,___. Sumer
••----••Égypte
- 0
§ §
OO

§ § § § SC
~ 0~
~.Si ~
~-
§ §

Figure 4.1 : L'historique traditionnel de la civilisation. Ce graphique est une combi-


naison de diverses sources qui montre les dates du début et de la fin des principales
civilisations les unes par rapport aux autres. Notez que la civilisation sumérienne
est considérée traditionnellement comme la plus ancienne et que l'on croit qu'elle a
émergé il y a environ 5500 ans.

Chaque fois qu'un nouveau site archéologique vient ajou-


ter une autre pièce à l'histoire traditionnelle de notre passé, il
devient plus facile de donner le «feu vert» au reste de l'histoire.
Le problème, cependant, c'est que de plus en plus de preuves
ne soutiennent pas l'histoire officielle. Chaque fois que nous
découvrons une preuve qui ne concorde pas avec la chronologie
historique et que cette preuve est vérifiée par les meilleurs de
nos scientifiques, nous devons alors modifier cette chronologie
en l'y intégrant. La découverte de la vieille ville de Troie par

106
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

l'archéologue amateur Heinrich Schliemann en 1870 constitue


un bel exemple d'un tel ajustement.
Schliemann avait toujours été fasciné par l'Iliade - le récit
classique d'Homère portant sur la légendaire guerre de Troie- et
par le stratagème du cheval de Troie utilisé pour accomplir ce
qu'aucune armée n'avait encore réussi : la capture de la ville du
même nom. Il s'est posé ces simples questions: «Et si cette vieille
histoire racontée par les Grecs à leurs enfants n'était pas qu'une
légende? Et si elle était vraie? Et si l'Iliade était la description
d'un événement réel survenu il y a si longtemps qu'il n'en reste
que cette histoire? »
En écoutant son intuition, Schliemann s'est servi de l'Iliade
comme d'une carte géographique et, en suivant les repères qu'elle
lui fournissait, il a fait l'une des plus grandes découvertes archéo-
logiques du XIXe siècle. Il a excavé huit couches terrestres corres-
pondant à huit civilisations antérieures enfouies sous un petit
monticule, à Hissarlik (une région de la Turquie faisant partie
de l'Empire ottoman à l'époque), qui se trouvait à l'emplacement
exact où, selon l'Iliade, la bataille de Troie s'était déroulée.
Rendu à la neuvième couche de terre du site, Schliemann a
découvert les portes de la ville de Troie. C'est alors que le monde
a accepté la réalité matérielle de ce que l'on tenait auparavant
pour une simple légende, et que la chronologie historique fut
modifiée pour y inclure la découverte de Schliemann.
De même, la découverte par Hiram Bingham, en 1911, de
Machu Picchu, la présumée ville perdue des Incas, fut directe-
ment le fruit d'un examen rigoureux des mythes et des anciennes
légendes.
Pour tenir compte de ces deux découvertes, on a dû modifier
les manuels et les cours d'histoire afin de les mettre à jour, et
les historiens qui avaient basé toute leur carrière sur une seule
vision du passé ont dû s'ajuster en fonction des nouvelles décou-
vertes. De plus en plus de preuves scientifiques nous indiquent
maintenant que nous sommes dans une situation très similaire
aujourd'hui sur une échelle beaucoup plus grande.

107
Vérité essentielle

Figure 4.2 : À gauche : les vestiges de la cité «perdue» des Incas, Machu Picchu,
tels qu'ils apparaissaient en 1911 après que des archéologues eurent brûlé l'épaisse
végétation recouvrant le site. (Hiram Bingham, 1911 I domaine public) En médail-
lon : Machu Picchu aujourd'hui, avec les parties du complexe qui ont été recons-
truites. (Jerry Miner I sacredspaces.org) À droite : Une partie de l'ancienne ville de
Troie, que l'on croyait mythique jusqu'à sa découverte par l'archéologue amateur
Heinrich Schliemann en 1870. (iStockphoto: © MaxFX)

108
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

Des preuves récentes viennent faire planer de grands doutes


sur l'histoire traditionnelle de notre passé. La nouvelle histoire
qui émerge a des implications qui ébranlent les bases des leçons
d'histoire données dans les écoles durant près de trois siècles. Ces
implications comportent peut-être des indices nous informant
de la façon dont nous pourrions survivre aujourd'hui au type de
crise qui a provoqué la chute des grandes civilisations du passé.
109
Vérité essentielle

Des civilisations oubliées par le temps ?


Il a toujours existé des informations sur d'anciennes civili-
sations ainsi que des artefacts qui paraissaient trop fantastiques
pour être réels (plusieurs l'étaient sans doute), mais, depuis le
milieu du xrxe siècle, le nombre de découvertes entrant dans
cette catégorie a augmenté. Grâce au sonar, qui a permis la décou-
verte d'une ancienne cité engloutie dans le golfe de Khambhat,
en Inde, et grâce au géoradar, qui a révélé les vestiges non excavés
des plus vieux temples du monde, les récents progrès techno-
logiques ont contribué à un ensemble croissant d'informations
indiquant que notre vision du passé est loin d'être complète.
Bien sûr, toutes nos récentes découvertes étonnantes n'ont pas
lieu sur des sommets lointains ou dans des forêts vierges isolées.
Certaines se produisent près des plus grandes villes du monde,
où des centaines de milliers de touristes les visitent chaque année
avec émerveillement et les photographient tous les jours.
Penchons-nous maintenant sur quatre de ces découvertes.

Découverte 1

L'endroit: le plateau de Gizeh, en Égypte.

En quoi elle consiste : Des preuves matérielles situent la


construction du sphinx de Gizeh à une époque voisine de la
dernière ère glaciaire.

Ses implications : La preuve scientifique, qui fut produite au


moyen d'une méthodologie valide et fiable, prouve au-delà de
tout doute raisonnable que le corps de base du grand sphinx de
Gizeh existait à l'époque des pluies torrentielles qui ont suivi la
fin de la dernière ère glaciaire, ce qui lui donne l'âge de 7 000 à
9 000 ans. Les données vérifiées par les experts sont acceptées par
les géologues.

110
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

Le problème réside chez les historiens, qui doivent mainte-


nant concilier les nouvelles informations sur le sphinx avec la
chronologie traditionnellement établie.
Malgré qu'il y ait toujours eu des opinions conflictuelles et
d'ardents débats au sujet de découvertes ne concordant pas avec
l'histoire traditionnelle du passé, on a eu tendance à les écarter
en les traitant d'« anomalies». On dit qu'il a pu se glisser une
erreur dans les techniques de datation des objets, par exemple,
ou alors que les données sont peut-être exactes, mais qu'elles sont
mal interprétées. Depuis les années 1980, l'âge du grand sphinx
d'Égypte offre un parfait exemple d'une telle controverse, et le
débat sur le sujet s'est déroulé autant dans les grands médias que
dans les congrès scientifiques.
Le grand sphinx se trouve sur le plateau de Gizeh, tout près
du Caire. On croit traditionnellement qu'il a été construit entre
2 558 et 2 532 av. J.-C., ce qui voudrait dire qu'il est âgé d'envi-
ron 4500 ans. Toutefois, les travaux de l'égyptologue pionnier R.
A. Schwaller de Lubicz et ceux, ultérieurs, du chercheur indépen-
dant John Anthony West ont remis en question les dates recon-
nues jusque-là.
Lun des mystères du complexe du temple du sphinx et de la
grande pyramide ainsi que des autres monuments du plateau de
Gizeh, c'est que, contrairement à plusieurs autres temples de la
vallée du Nil, les monuments ne portent aucune inscription nous
informant de leur historique, ou du moins nous n'en avons pas
encore découvert.
À l'exception de quatre lettres de l'alphabet grec gravées près
de la chambre supérieure de la grande pyramide, dont on croit
qu'elles ont été inscrites plusieurs siècles après sa construction,
les archéologues n'ont trouvé aucune inscription ni aucun hiéro-
glyphe dans le sphinx ou dans la pyramide, ni aucun parchemin
ou papyrus dans aucune tombe, ce qui aurait pu nous indiquer
précisément la date de construction de ces structures massives et
leurs auteurs. En l'absence de telles preuves directes, nous devons

111
Vérité essentielle

examiner un autre type de preuve : les preuves circonstancielles.


C'est là qu'intervient la controverse.
À la fin des années 1980 ainsi que dans les années 1990,
John Anthony West réexaminait les travaux du spécialiste Lubicz
afin d'y trouver des indices sur l'âge du grand sphinx. Au début
du xxe siècle, durant quinze ans d'exploration et de recherche
sur les monuments de l'Égypte, Schwaller de Lubicz a décou-
vert que les explications traditionnelles concernant la date et les
méthodes de construction des diverses pyramides et du sphinx
ne concordaient pas avec ses propres observations. Il a alors remis
en question l'historique traditionnel d'un point de vue purement
géologique.
Il est communément accepté par les égyptologues, les géolo-
gues et les historiens que le corps de base du sphinx fut sculpté
sur place dans la pierre du plateau de Gizeh. À mesure que fut
créé ce monument au corps mi-humain et mi-lion, il fut entouré
par la tranchée qui existe encore aujourd'hui.
Debout dans cette tranchée, West et Schwaller de Lubicz
furent frappés tous les deux par les marques d'érosion présentes
sur les côtés du sphinx et à l'arrière, dont certaines sont très
profondes. Les experts s'entendent sur le fait que ces marques
sont indéniablement dues à l'érosion, mais l'explication clas-
sique veut qu'elles soient dues au vent ayant soufflé du sable sur
le monument. On attribue à l'action du vent au cours des siècles
les sillons qui sont clairement visibles aujourd'hui sur la surface
du sphinx (voir la Figure 4.3).
Un examen attentif des marques d'érosion a amené Schwaller
de Lubicz à remettre en question la théorie du sable soufflé par
le vent sur le monument. C'est que ces marques ressemblaient
davantage à de l'érosion due à de l'eau qu'à celle qui peut résul-
ter du vent. Il se trouve que les scientifiques qui ont fait des
recherches à la fin du xxe siècle furent d'accord.
En 1989, West a engagé Robert M. Schoch, un stratigra-
phiste et paléontologue de l'Université de Boston, pour poser
un regard scientifique sur ce mystère. Schoch s'est rendu sur

112
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

Figure 4.3 : Les marques d'érosion sur les épaules (encart) et sur le dos (en haut)
du grand sphinx d'Égypte sont les signes révélateurs d'une érosion fluviale, c'est-
à-dire l'usure causée par de grandes quantités d'eau se déplaçant rapidement sur
de longues périodes. La dernière fois que ce genre d'érosion a pu se produire dans
les déserts de l'Afrique du Nord, ce fut lors du changement climatique qui a suivi la
dernière ère glaciaire, il y a 8 000 à 12 000 ans. (© Gregg Braden)

113
Vérité essentielle

le plateau de Gizeh pour la première fois en 1990. Lors de ses


multiples voyages au cours des années suivantes, il a fait un
certain nombre de découvertes qui constituent d'importantes
contributions scientifiques à la résolution du mystère de l'âge du
grand sphinx. En outre, ses découvertes ont également ouvert la
porte à davantage de questions concernant des mystères encore
plus grands.
«J'ai découvert que les preuves géologiques étaient incompa-
tibles avec les affirmations des égyptologues, dit Schoch. J'en suis
venu à la conclusion que les plus anciennes portions du grand
sphinx, celles que j'appelle le corps de base, doivent dater d'une
période antérieure (au moins 5 000 ans av. J.-C. et peut-être
même 7 000 ou 9 000 ans), une époque où le climat était très
différent et comportait davantage de pluies1• »
Au cours des années qui ont suivi la première visite de Schoch
sur le plateau de Gizeh, son enquête sur les structures naturelles
et la géologie de la région environnante a conduit à de nouvelles
découvertes qui ajoutent à l'ensemble croissant des recherches
concernant l'origine et l'âge du sphinx. La première, c'est que
les marques profondes d'érosion sur le corps de ce monument
n'ont certainement pas été causées par le sable soufflé par le vent,
mais qu'elles sont «les traces révélatrices des intempéries2 ». De
plus, les fissures verticales visibles sur les murs de pierre entou-
rant la structure montrent «tous les signes d'une formation due
aux précipitations et au ruissellement 3 ».
Pour déterminer jusqu'où allaient les traces d'érosion sur
les parties enfouies du sphinx, Schoch et son équipe ont fait
des études sismiques semblables à celles que l'on effectue pour
découvrir jusqu'à quelle profondeur on doit creuser pour trouver
de l'eau. Essentiellement, il s'agit d'envoyer des ondes sonores
dans le sol, lesquelles sont réfléchies, par les surfaces enfouies,
jusqu'aux appareils de mesure placés au niveau du sol. Les études
menées sous le corps du sphinx ont révélé que les traces d'érosion
observées au-dessus du sol se poursuivent dans une partie de la

114
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

structure qui n'est pas visible et qu'elles possèdent, selon Schoch,


«une extraordinaire profondeur d'érosion souterraine4 ».
Les scientifiques s'accordent généralement sur le fait que
l'Égypte a connu une période de pluies abondantes après la
dernière ère glaciaire, il y a environ 12 000 ans. Les données
scientifiques indiquent que les pluies ont duré environ 4 000 ans
et qu'elles ont cessé il y a environ 8 000 ans. Les dates données
par Schoch pour la construction du sphinx sont de 5 000 à 7 000
ans av. J.-C., ou peut-être même de 9 000 à 11 000 ans), ce qui
le situe dans la période où des pluies abondantes ont inondé la
région saharienne de l'Égypte actuelles.
Bien que des preuves géologiques soutiennent ces conclusions
et qu'elles aient été acceptées par les géologues, elles posent un
énorme problème aux historiens.

Découverte 2

L'endroit: Gobekli Tepe, en Turquie.

En quoi elle consiste : Des preuves matérielles issues du


complexe cérémonial de Gobekli Tepe, la plus ancienne civili-
sation connue sur la planète, la font remonter scientifiquement à
11 500 ans, ce qui repousse la date de ce site à la fin de la dernière
ère glaciaire.

Ses implications : Ces preuves scientifiques démontrent


au-delà de tout doute raisonnable que la civilisation est au
moins deux fois plus ancienne qu'on ne le croyait auparavant.
L'archéologue allemand Klaus Schmidt savait qu'il avait fait une
découverte extraordinaire le premier jour où il a exploré Gobekli
Tepe (en turc : «la colline du nombril»). Un arbre unique se
dresse au sommet de la plus haute colline du site et les habitants
lui attribuent un sens sacré. Schmidt connaissait cette histoire
et il dit qu'il a su dès son arrivée sur les lieux qu'il y ferait une
découverte importante6. Explorant le site, il vit que les flancs de

115
Vérité essentielle

la colline étaient recouverts de morceaux de silex et portaient


les traces évidentes d'une occupation ancienne. « Dès la toute
première minute, dit-il, j'ai su que j'y passerais le reste de ma vie
si je ne repartais pas immédiatement7. » Il est resté, et il excave
toujours le site depuis ce jour déterminant de 1994.
Gobekli Tepe n'était pas entièrement inconnu des archéolo-
gues. C'est simplement quel' équipe à dominante américaine qui
l'avait découvert en premier trente ans plus tôt, en 1964, avait
présumé à tort que les monticules qui l'entouraient étaient des
lieux de sépulture datant d'une époque beaucoup plus récente.
Personne ne pouvait savoir ni même soupçonner à quel point
c'était loin de la vérité.
Il s'avéra finalement que le site de Gobekli Tepe était beau-
coup plus ancien qu'on n'aurait jamais osé l'imaginer. C'est la
découverte d'une vie, le rêve de tout archéologue. Comme l'a
écrit Patrick Symmes, le journaliste qui a fait un reportage sur
cette découverte pour le magazine Newsweek en février 2010 :
«Ce site n'est pas seulement ancien, il redéfinit l'ancienneté 8 . »
Quelle est son ancienneté ? La méthode scientifique-
ment reconnue pour déterminer l'âge de ce site fait remonter
à 11 550 ans les temples mis au jour jusqu'ici9 . À des fins de
comparaison, cela veut dire qu'ils ont été construits 6 000 ans
avant le cercle de pierres de Stonehenge, en Angleterre.
Le site de Gobekli Tepe contient un certain nombre de
temples circulaires de diverses grosseurs, mais dont l'agencement
semble similaire. Chaque temple possède deux grands piliers en
forme de T au centre et est entouré de piliers de moindre taille
disposés en cercle (voir la Figure 4.4A). Même si ce site n'est
pas aussi grand que celui de Stonehenge et qu'il ne comporte
pas les blocs horizontaux que l'on trouve là-bas, les pierres verti-
cales disposées en cercle rappellent sans équivoque les marqueurs
célestes et autres caractéristiques d'observatoire cosmique qui
nous sont familières depuis que nous connaissons Stonehenge.
Au printemps 2010, quatre temples circulaires et cinquante
piliers avaient été mis au jour. Cependant, l'imagerie radar

116
L histoire occulte de notre passé oublié ...

Figure 4.4A : L'agencement des piliers de pierre verticaux formant les cercles du site
de Gôbekli Tepe. (Cl Berthold Steinhilber / lait I Redux)

117
Vérité essentielle

Figure 4.48 : Gros plan des images gravées sur les piliers. (© Berthold Steinhilber
/lait I Redux)

souterraine montre que 15 à 20 cercles se trouvent encore sous la


surface du sol. Le plus grand de ces temples circulaires mesure envi-
ron trente mètres de diamètre et les plus hauts piliers sont d'environ

118
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

cinq mètres. Ce qui rend ce site particulièrement précieux pour les


archéologues, c'est qu'il paraît avoir été enterré intentionnellement,
environ 8 000 ans av. J .-C. Pourquoi? Mystère.
Cela signifie que les blocs sont toujours intacts, toujours
verticaux comme à l'époque de leur utilisation. En outre, ils sont
bien conservés. Environ la moitié des piliers découverts jusqu'ici
portent des images gravées en relief. Bien que celles-ci ressemblent
à des hiéroglyphes, on ne croit pas qu'elles constituent une forme
de langage. (Selon l'histoire traditionnelle, l'écriture n'est appa-
rue que 6 000 ans plus tard.)

•••
Sur les piliers sont représentées des figures animales,
comme des renards, des vaches et des lions, mais aucune figure
humaine. Toutefois, les piliers, eux, semblent symboliser des
formes humaines, avec des bras, des mains et des doigts, quoique
sans visage ni même de tête, ce qui a fait dire à certains histo-
riens qu'ils représentent des déités dotées de qualités humaines.
L'archéologue Glenn Schwartz, de l'Université Johns Hopkins, a
fait remarquer que, selon la Bible, l'homme a été créé à l'image
de Dieu, et qu'à Gôbekli Tepe «c'est la première fois que l'on voit
des humains ressemblant à des dieux 10 ».
Quand j'ai entendu parler de Gôbekli Tepe, ma première
réaction fut de penser qu'il y avait eu une erreur de datation dans
la méthode ou dans l'interprétation. On avait utilisé la technique
de datation au carbone 14, un procédé communément employé
pour déterminer l'âge d'une momie, par exemple, ou de la four-
rure des mammouths préhistoriques retrouvés congelés dans les
glaces de Sibérie.
J'étais sceptique au sujet de l'âge attribué au site, car je sais,
en tant qu'ancien géologue, que l'on ne peut pas dater des vestiges
de pierre. La technique du carbone 14 ne fonctionne que pour

119
Vérité essentielle

quelque chose qui a déjà été vivant et qui a absorbé le carbone de


son environnement pendant sa vie.
La datation préliminaire de Gobekli Tepe fut fondée sur
des échantillons provenant de deux sources différentes : 1) les
dépôts de charbon de bois (vestiges d'ancien bois) enfouis au
plus profond du site excavé jusque-là et appelés «échantillons
Hd », qui nous donnent une idée del' époque à laquelle le site fut
réellement occupé; 2) les dépôts de carbone trouvés sur certains
des piliers de pierre, appelés «échantillons Ua », qui ne peuvent
nous indiquer que l'époque à laquelle le site fut abandonné. (Les
appellations Hd et Ua sont des identificateurs uniques que les
chercheurs ont donnés à leurs échantillons.)
J'ai fait personnellement des recherches sur ce type de data-
tion pour m'assurer de sa fiabilité. Un dossier paru en 2007 dans
la revue scientifique The Holocene répondait précisément à mes
interrogations. Cette étude en profondeur concluait que le genre
de dépôts utilisés pour établir l'âge du site de Gobekli Tepe
pouvait en réalité être« daté au carbone 14 avec plus d'exactitude
qu'on ne le croyait généralement 11 ».
Une datation aussi précise ayant été établie, les résultats
des tests préliminaires ne sont rien de moins qu' étonnants.
Les échantillons « Hd » illustrés à la Figure 4.5, prélevés sur les
couches supérieures excavées jusque-là, remontent à 9559 av.
J.-C., plus ou moins 53 ans, ou à 11 570 ans! Alors que cette
date place déjà Gobekli Tepe parmi les plus vieux temples du
monde, on découvrira peut-être que les plus anciens sites d'occu-
pation sont beaucoup plus âgés. C'est que les échantillons utili-
sés pour la datation préliminaire ont été prélevés sur les portions
supérieures exposées par les excavations, qui ne représentent que
les plus récentes couches des plus anciens niveaux d'occupation.
Comme la base du site se trouve encore plus profondément dans
le sol, les couches les plus inférieures révéleront probablement
des dates plus anciennes. Les experts qui œuvrent sur le site
soupçonnent que les tests au carbone 14 des couches les plus

120
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

profondes repousseront la date de Gobekli Tepe à au moins


11 000 ans av. J.-C. (il y a 13 000 ans) et possiblement plus tôt
encore!
La Figure 4.5 constitue un bref résumé des échantillons
utilisés pour établir les dates. La colonne «Âge» indique l'âge
de chaque échantillon après affacturage dans les années av. J.-C.,
ainsi que la marge d'erreur figurant dans la colonne «Date
calibrée».

Numéro de
l'échantillon Date calibrée
Âge Partie du site
utilisé par le (années av. J.-C.)
laboratoire

Ua-19561 7560-7370 9370-9560 Enceinte C

Hd-20025 9110-8620 11110-11370 Couche Ill

Figure 4.5 : Quatre échantillons utilisés pour la datation au carbone 14 du site de


Gôbekli Tepe. Les échantillons« Hd », provenant des vestiges carboniques mention-
nés dans le texte, représentent les plus récentes couches des plus anciens niveaux
d'occupation. Ils remontent à entre 11517 et 11623 ans12 . On croit que, lorsque les
excavations auront atteint les niveaux d'occupation les plus profonds, la date du
site sera peut-être repoussée jusqu'aux dernières années de l'ère glaciaire, soit plus
de 12 000 ans en arrière.

Les mystères de Gobekli Tepe sont loin d'être résolus. Par


exemple, nous ne saurons jamais pourquoi tout le site fut recou-
vert vert 8000 av. J.-C. ni qui l'a construit au départ. Il faudra
peut-être des années ou même des décennies pour déchiffrer les
glyphes recouvrant les piliers ou pour savoir si le site a pu servir
à des fins astronomiques comme ce fut confirmé pour certains
temples mayas ou égyptiens. Selon Schmidt, il reste des décen-
nies de travail à effectuer, et quiconque s'attellera à la tâche de
percer les secrets de Gobekli Tepe découvrira peut-être qu'il y
faudra toute une vie.
121
Vérité essentielle

Robert Schoch et John Anthony West ont exploré person-


nellement le site de Gobekli Tepe en 201013 • Lune des questions
fréquemment posées par les critiques de la datation établie par
le géologue et égyptologue, qui place le grand sphinx à l'époque
de l'ère glaciaire, est celle-ci : « Où sont les tessons de poterie? »
Autrement dit, où sont les preuves matérielles des gens, de la
technologie et de la civilisation qui auraient dû exister pour créer
une structure comme celle du sphinx? En poursuivant l'explo-
ration du site, West a déclaré ceci: «Nous n'avons pas besoin de
tessons de poterie. Nous avons un gigantesque site cérémoniel
avec des reliefs sculptés14 • »

Découverte 3

L'endroit: le golfe de Khambhat, en Inde.


En quoi elle consiste : On a trouvé sous les eaux de l'océan
Indien la preuve matérielle de l'existence d'une civilisation
« perdue» remontant à environ 9500 ans.

Ses implications : Bien que cette découverte ait donné lieu


à une controverse, elle résulte des techniques employées pour
l'excavation du site et le prélèvement d'échantillons. La contro-
verse ne change rien au fait que l'on a découvert une ancienne
cité au large de la côte indienne, sous 37 mètres d'eau, ce qui
sous-entend que cette cité fut construite avant l'immersion des
terres et qu'elle existait donc à l'époque de l'élévation du niveau
de la mer qui s'est produite à la fin de la dernière ère glaciaire. Je
la présente ici comme une preuve supplémentaire que les autres
civilisations de la fin de l'ère glaciaire, comme celles qui ont
existé en Égypte et en Turquie, ne sont pas des anomalies isolées.
Il n'est peut-être pas étonnant que l'on découvre autant
d'anciennes civilisations sous les mers de notre globe. Une fois
qu'on les a découvertes, elles s'avèrent aussi les plus difficiles à
explorer. Néanmoins, au cours de tout le xxe siècle, on a trouvé

122
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

des cités « perdues » sous des lacs et des océans un peu partout
sur la planète. Des images granuleuses nous montrent des routes
et des murs trouvés au large de la côte de l'île de Bimini dans
les années 1960; on a fait des découvertes similaires près des
Bahamas ; une vidéo nous fait voir des structures pyramidales
massives trouvées au large de la côte japonaise en 1986. Il est
évident que nous sommes sur le point de découvrir une toute
nouvelle ère de l'histoire de l'humanité et que cela va changer
entièrement notre vision du passé.
En janvier 2002, la British Broadcasting Company (BBC)
a fait un reportage sur une découverte archéologique avec l'en-
thousiasme caractérisant généralement les histoires liées à des
cités perdues et des civilisations oubliées. La manchette se lisait
ainsi : «Une cité perdue qui pourrait nous forcer à réécrire l'his-
toire. » En lisant le reportage, je me suis souvenu des affirmations
semblables qui avaient été faites au sujet des manuscrits de la mer
Morte. Le journaliste Tom Housden émettait l'hypothèse que
leur découverte « puisse forcer les historiens et les archéologues
à reconsidérer radicalement leur vision de l'histoire ancienne15 ».
Plus j'avançais dans ma lecture, plus je me rendais compte
que cette découverte était différente de plusieurs autres.

- Premièrement, son emplacement était significatif : sous


37 mètres d'eau près de la côte ouest de l'Inde, le site se trouve à
un endroit inattendu pour une telle découverte. Ayant plongé à
de semblables profondeurs durant mes années d'études océano-
graphiques à l'université, je savais que quelque chose qui se trou-
vait sous nos yeux pouvait malgré tout passer inaperçu pendant
des années.
Par exemple, j'ai cherché une vieille épave au large de la
côte est de la Floride avec des amis en 1970. Nageant dans les
eaux tropicales, nous sommes passés plusieurs fois directement
au-dessus du monticule de vestiges incrustés dans le corail sans
nous rendre compte de leur présence à quelques mètres seule-
ment. C'est uniquement lorsque notre guide expert nous a

123
Vérité essentielle

indiqué l'épave que nous en avons remarqué la forme et que nous


nous sommes dirigés vers elle. Il n'est donc pas étonnant que
des navires aient pu traverser régulièrement une partie de l'océan
pendant des siècles sans que leur équipage ait aperçu les vestiges
d'une civilisation inconnue.
Le reportage de la BBC soulignait le fait que les scientifiques
indiens de l'Institut national de technologie océanographique ne
recherchaient pas les vestiges d'un ancien site qui remettrait en
question l'histoire du monde. Ils se trouvaient dans le secteur
pour tester la qualité de l'eau et l'impact de la pollution lorsque
leur équipement a capté des signaux inattendus. Quand ils ont
cherché d'où venaient ces signaux, leurs cartes sonar ont révélé
les formes régulières et les angles intentionnels qui sont les signes
révélateurs de la présence de murs érigés par une civilisation
humaine. Ils ont alors compris qu'ils venaient de découvrir une
cité oubliée.

- Le deuxième élément d'information qui m'a indiqué


que cette découverte n'avait rien de banal, ce fut la taille de ce
complexe sous-marin. Il ne s'agissait pas d'un site archéologique
typique identifié par un simple monticule ne mesurant que
quelques dizaines de mètres de diamètre, comme l'épave que
j'avais vue en Floride. Le site du golfe de Khambhat, tel que nous
le connaissons maintenant, se mesurait en kilomètres. Selon le
reportage, une bande de ruines qui avaient été préservées s' éten-
dait sur trois kilomètres dans une direction et sur huit kilomètres
dans une autre. En archéologie, c'est énorme. C'est pourquoi
cette découverte dans les eaux côtières de l'Inde est plus qu'un
ancien campement ou un seul temple. Il s'agit apparemment des
vestiges d'une très grande cité ancienne.

J'ai étudié l'histoire et l'archéologie de l'Inde. Rien dans la


chronologie traditionnelle de l'archéologie indienne ne ressemble
au contenu de cette découverte.
Les questions qui ont aussitôt surgi dans mon esprit furent
celles-ci : « Qui a construit cette cité? Pourquoi a-t-elle disparu? »

124
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

Et la question à la fois la plus importante et la plus évidente :


«Quel est son âge?» C'est cette dernière question qui suscite la
controverse.
L'âge établi initialement pour ce site en se basant sur les arte-
facts récupérés, dont des ossements humains, des dents, de la
poterie et des perles, dépassait la moyenne des autres découvertes
archéologiques effectuées dans le monde. Ce site était âgé de
9 500 ans, soit 5 000 ans de plus que les dates les plus lointaines
assignées aux sites mystérieux de Mohenjo Daro et d'Harappa,
qui furent découverts dans la vallée de l'inclus au cours des
années 1920.
Comme nous l'avons vu dans le cas de Gôbekli Tepe et du
grand sphinx, la datation d'un site aussi ancien pose un énorme
problème aux historiens. Les scientifiques s'accordent généra-
lement sur le fait que la dernière ère glaciaire s'est terminée il
y a environ 12 000 ans. Comme il fut mentionné au sujet des
marques d'érosion sur le sphinx, c'est après cette époque que la
température s'est réchauffée. Une période de pluies abondantes
a alors commencé, qui a duré environ 4 000 ans. La glace qui
couvrait une grande partie de l'hémisphère nord a commencé à
fondre et le niveau de la mer s'est élevé. Plusieurs régions côtières
ont alors disparu sous les eaux. Comme il est improbable (mais
non impossible) que de grandes cités comme celle qui fut décou-
verte dans le golfe de Khambhat aient été construites sous l'eau,
nous devons conclure qu'elles existaient avant le début des pluies.
Il faut donc qu'elles aient été construites pendant la dernière ère
glaciaire.
Au cours d'une interview sur BBC News Online, l'archéo-
logue Justin Morris, travaillant de concert avec le British
Museum, a expliqué pourquoi cette déduction pose un problème.
«Sur le plan culturel, dit-il, il n'y a aucune civilisation anté-
rieure à 2 500 av. J.-C. dans cette partie du monde16 • » Le cadre
temporel qu'il désignait ainsi reflète la pensée traditionnelle du
paradigme scientifique actuel, spécifiquement que la civilisation
elle-même n'a débuté qu'il y a 5 000 ans environ et qu'elle est

125
Vérité essentielle

d'abord apparue dans la région de l'Inde et du Pakistan actuel


il y a quelque 4 500 ans. Or, 2 500 av. J.-C., c'est 5 000 ans plus
tard que les dates établies au carbone 14 pour les artefacts trouvés
sur le site du golfe de Khambhat.
En commentant davantage la découverte du golfe de
Khambhat, Morris a fait remarquer que le processus de data-
tion au carbone 14 n'était pas sans posséder une marge d'erreur:
« Il faudrait poursuivre le travail avant de pouvoir affirmer caté-
goriquement que ce site appartient à une civilisation vieille de
9 000 ans 17• »
Morris a raison sur les deux points. Le processus de data-
tion au carbone 14 a subi sa part de controverses dans le passé
et il existe certainement des conditions susceptibles de fausser
les résultats. C'est précisément pour cette raison que les dates
établies au carbone 14 sont fournies généralement avec une
marge d'erreur.
Comme les études que j'ai lues et qui étaient fondées sur les
rapports initiaux n'incluaient pas cette marge d'erreur, je ne peux
pas fournir de période de temps précise au moment où j'écris
ces lignes. Cependant, il s'agit certainement de dizaines ou de
centaines d'années, dans le même ordre que les dates citées précé-
demment pour le site de Gobekli Tepe, non de milliers d'an-
nées, couvrant toute la durée de la civilisation telle que nous la
connaissons. C'est ici que le second commentaire de Morris est
particulièrement important.
Bien que la méthode de datation au carbone 14 soit accep-
tée scientifiquement et utilisée couramment, les techniques
employées pour ramener à la surface les premiers artefacts du site
du golfe de Khambhat afin de les dater ont été mises en question
autant par des scientifiques que par des historiens. Les objets ont
été extraits du site par une machine, ce qui n'est pas du tout
orthodoxe, au lieu d'être récupérés par une excavation méticu-
leuse au moyen de grilles précises permettant une exploration
systématique.

126
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

Il ne fait aucun doute que la profondeur du site et la mauvaise


visibilité inévitable ont quelque chose à voir avec le fait que
les artefacts ont été récupérés de cette façon. En réponse aux
critiques, les chercheurs ont dit que cette collection était desti-
née à une première observation afin de déterminer l'existence
même du site et de donner aux scientifiques une idée de ce qu'ils
auraient ensuite à explorer.
En me basant sur les découvertes préliminaires, je ne doute
pas qu'une excavation archéologique en bonne et due forme -
répondant à toutes les caractéristiques éprouvées de l'archéologie
sous-marine - sera effectuée bientôt dans le golfe de Khambhat.
D'ici là, cependant, nous ne pouvons affirmer avec une certitude
scientifique si les objets qui ont déjà été datés proviennent de la
même époque que les structures ou s'ils ont été transportés par
la mer et déposés sur ce site. D'ici à ce que la prochaine phase
d'excavation réponde à cette question, nous devons voir le site
pour ce qu'il est: une preuve supplémentaire qu'une civilisation
contemporaine de l'ère glaciaire fut oubliée à un certain moment
de l'histoire et qu'elle est maintenant engloutie sous presque
37 mètres d'eau. Il s'agit d'une cité dont les secrets pourraient
nous aider à acquérir une meilleure connaissance de notre passé
lointain.
Si le site du golfe de Khambhat confirme ce qu'indiquent
les preuves préliminaires et qu'il soutient l'ensemble croissant de
preuves démontrant l'existence de civilisations avancées durant
la dernière ère glaciaire, nous devrons alors reconsidérer nos
croyances présentes sur l'histoire de la civilisation. Dans une
interview à la BBC au sujet des implications d'un tel site, l'expert
et chercheur indépendant Graham Hancock a posé le problème
en des termes élégants : «Cela veut dire que tout le modèle des
origines de la civilisation sur lequel travaillent les archéologues
devra repartir à zéro 18. »

127
Vérité essentielle

Découverte 4

L'endroit: Caral, au Pérou.


En quoi elle consiste : On a daté scientifiquement de 5 000
à 6 900 ans la preuve matérielle de l'existence d'une civilisation
« perdue» dans le nord du Pérou.

Ses implications: La découverte d'une civilisation avancée qui


aurait disparu à l'époque à laquelle l'histoire traditionnelle situe
les débuts de la civilisation oblige les historiens à réécrire l'his-
toire des Amériques. La preuve matérielle fournie par le site de
Caral fait de cette civilisation la plus ancienne que l'on connaisse
à avoir existé dans les deux Amériques .

•••
Le manque de couleur est la première chose que j'ai remar-
quée en approchant du sommet de la crête. La vieille vallée se
déroulait à perte de vue, sans aucun arbre, ni champs de maïs, ni
jolies formations rocheuses comme celles que nous avions vues
ailleurs au Pérou. Sous un ciel invariablement gris surplombant
les montagnes s'élevant autour de nous, le sol plat et stérile s' éten-
dait uniformément dans toutes les directions.
J'avais attendu six ans pour me trouver là, mais je n'y étais
pas venu pour voir la monotonie du sol. Dans la vallée se pour-
suivaient les excavations d'un site qui, selon les archéologues
traditionnels, n'aurait pas dû exister et qui forcerait les historiens
traditionnels à réécrire tous les manuels et les cours d'histoire
partout en Amérique.
Sur 150 acres s'étendait devant nous - ma fiancée, mon guide
et moi - le site de l'ancienne cité de Caral, au nord du centre du
Pérou. Nous nous trouvions là à un moment très propice : c'était
le jour même où les résultats de la datation au carbone 14 de
plusieurs artefacts allaient être divulgués, ainsi que l'âge du site.

128
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

Un endroit oublié par le temps


Nous avons marché ensemble sur presque un kilomètre dans
les principales excavations, où mon guide nous avait préparé
une rencontre avec l'un des chercheurs œuvrant sur le site. J'ai
compris rapidement que nous avions des idées très différentes sur
le sujet de discussion qui allait suivre.
Le jeune archéologue voulait se concentrer sur ce qui avait
été mis au jour durant les six dernières années d'excavation. Il
est intéressant de noter que l'on n'avait trouvé aucune poterie
(l'explication officielle veut que la poterie n'ait pas encore été
inventée à cette époque), mais 32 flûtes en os d'oiseau ou d'un
autre animal. En y regardant de plus près, nous pouvions voir des
animaux, comme des singes et des oiseaux, gravés sur ces anciens
instruments. Ce qui rendait cette découverte particulièrement
intéressante, c'est que les animaux représentés ne vivent que dans
la région amazonienne du Pérou, à des heures de voiture de l'en-
droit où nous nous trouvions.
J'étais évidemment intéressé par tout ce que notre ami
archéologue avait à nous dire, mais tout ce qu'il ne disait pas
suscitait dans mon esprit la série familière de questions. Qui avait
construit ce site? D'où venaient ces gens? Étaient-ils issus d'une
lignée inca ou d'une société entièrement séparée des civilisations
andines connues? Que leur était-il arrivé?
La réponse officielle à chacune de ces questions était la
même : «Nous n'en savons rien.» Bien qu'il s'agisse là d'interro-
gations auxquelles s'attendaient les archéologues, je voyais bien
qu'il n'était pas facile pour notre guide de reconnaître que le site
qu'il excavait comportait autant d'inconnues. De toute façon, le
site de Caral est une anomalie pour plusieurs raisons.

Bien que l'existence du site fût connue des habitants dès 1905,
ce n'est qu'en 1994 qu'un renouvellement d'intérêt a suscité une
nouvelle tentative pour excaver le site afin d'expliquer le mystère
reposant dans le désert péruvien. En 1996, sous la direction de

129
Vérité essentielle

Figure 4.6: Au dessus: l'auteur sur le site d'excavation de Caral, au Pérou, en 2010.
C'est l'une des deux places circulaires découvertes sur ce complexe de 150 acres.(©
Martha Reich) En dessous: un gros plan de l'une des cinq pyramides en excavation.
(© Gregg Braden)

130
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

Ruth Shady Solis, directrice du musée d'archéologie et d'anthro-


pologie de l'Université de San Marcos, à Lima, au Pérou, et en
coopération avec Jonathan Haas, conservateur du Département
d'anthropologie du Field Museum de Chicago, dans l'Illinois, les
cinq pyramides et les deux places circulaires formant le cœur du
site principal ont été excavées et restaurées, et la datation scienti-
fique du site a alors débuté sérieusement.
Les résultats de leurs efforts conjoints furent tout simplement
étonnants. Avant que la datation au carbone ne repousse l'âge du
site jusqu'à une époque que les archéologues ont toujours crue
impossible pour la civilisation dans cette partie du Pérou, les
historiens croyaient en avoir terminé définitivement avec l'his-
toire de l'Amérique du Nord, de l'Amérique centrale et de l'Amé-
rique du Sud, comme me l'a expliqué l'un d'entre eux. L'histoire
comprend les cultures des Olmèques, des Mayas, des Aztèques et
des Anasazis, par exemple, et chacune correspond à une période
historique et apporte sa contribution à la civilisation. Cette
histoire a été racontée maintes et maintes fois dans les classes
d'histoire du monde entier.
La datation récente du matériel découvert à l'intérieur des
murs enfouis de Caral a changé tout cela.
Le jour même de notre arrivée, on devait révéler les résultats
de plusieurs datations au carbone 14. Parmi le matériel étudié se
trouvaient des fibres végétales situées dans les parties creuses des
murs enfouis ainsi qu'un rare système d'emmagasinage de l'in-
formation fait de nœuds de fibres appelés quipus. Aussi éloigné
que fût ce site, les tours de téléphonie cellulaire étaient actives ce
jour-là et le téléphone mobile de notre guide sonna alors que nous
achevions notre exploration.
Son expression se figea dès qu'il entendit la voix au bout du
fil. Il savait qu'il allait apprendre quelque chose d'important, que
nous saurions si nous nous trouvions sur le site d'une autre cité
inca inconnue auparavant et qui pourrait s' inclure dans la chro-
nologie traditionnelle de la civilisation, ou si l'histoire du monde
venait soudain de changer.

131
Vérité essentielle

Son visage s'éclaira d'un large sourire quand il entendit les


résultats, dont il nous fit part immédiatement. La datation scien-
tifique du site était confirmée. Chacun des laboratoires indépen-
dants avait retourné des dates du même ordre : quelque part entre
4900 et 3000 av. J.-C., soit 5000 à 6900 ans avant aujourd'hui,
ce qui faisait de ce site le foyer de la plus ancienne civilisation
(en termes d'architecture, d'astronomie, d'agriculture, d'art et de
mathématiques) connue dans les deux Amériques 19.
Comment une civilisation avancée et située aussi proche des
sites de l'Empire inca a-t-elle pu rester inconnue pendant aussi
longtemps, c'est là un mystère en soi. La liste des inconnues est
significative et leurs implications possibles n'ont rien pour plaire
aux historiens.
Ce n'est peut-être pas une coïncidence si les mystères du site
de Caral se rapprochent de ceux de Chaco Canyon, le site de
l'héritage mondial de l'UNESCO situé dans le sud-est du désert
américain. Il n'existe pas de documents écrits pour aucun des
deux sites ou, du moins, on n'en a pas encore découvert. Les
deux sites paraissent avoir comporté une nombreuse population,
et pourtant on n'y a trouvé que quelques corps remontant à une
période plus récente. Sur les deux sites, on semble avoir utilisé
une forme avancée d'architecture pour construire les édifices
de plusieurs étages qui ont survécu aux éléments (et qui, dans
le cas de Caral, ont perduré des milliers d'années). En outre,
autant pour Caral que pour Chaco Canyon, même s'il existe des
théories sur la raison pour laquelle les constructeurs de ces sites
ont abandonné le fruit de leur labeur, personne n'en connaît les
raisons avec certitude.

• ••
132
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

Alors que Caral est plus vieux de 5000 ans que la civilisation
maya, indigène de la région du Yucatan, au Mexique, nous décou-
vrirons peut-être que la clé de son mystère et de celui de Chaco
Canyon réside dans l'héritage laissé par les Mayas: les calendriers
décrivant les grands cycles temporels. L'époque actuelle de notre
monde, précisément identifiée par les calendriers mayas, a débuté
à peu près au moment où Caral fut abandonné, il y a 5000 ans,
et elle se terminera en décembre 2012, alors que commencera
la prochaine ère du monde. Nous découvrirons peut-être que le
savoir andin des cycles cosmiques préservé à Caral fait partie
en réalité d'une grande connaissance qui fut conservée, bien
que cachée, partout dans les Amériques au cours des siècles et
qui permettrait peut-être de comprendre les crises que traverse
aujourd'hui notre monde.

Le temps maya
Tout débat portant sur les réalisations des Mayas doit recon-
naître que leur civilisation est la plus sophistiquée qui soit. À
preuve, leur calcul des cycles cosmiques et temporels, effectué au
moyen de leurs calendriers. Les calendriers mayas sont toutefois
beaucoup plus qu'un calcul des jours situés entre la pleine lune et
la nouvelle lune. Les Anciens suivaient les cycles du temps ainsi
que les événements célestes qui se produisaient durant ces cycles.
On croit que le calendrier maya est la méthode la plus raffi-
née qui soit pour mesurer le temps galactique ainsi que le temps
local, un système dont des experts comme Michael D. Coe,
auteur de Ihe Maya, nous disent qu'il n'a pas «sauté un seul jour
en 25 siècles20 ».
La clé du « chronomètre» galactique maya était une période
de 260 jours appelée Tzolkin ou Calendrier sacré, entremêlée à
un autre calendrier de 365 jours, appelé Année vague. Ces deux
cycles progressaient comme les dents de deux roues, jusqu'au rare
moment où le Calendrier sacré correspondait au même jour de

133
Vérité essentielle

l'Année vague. Cet événement important marquait la fin d'un


cycle de 52 ans et faisait partie d'une plus grande période appelée
Grand Cycle.
Présentement, il n'existe aucun artefact représentant le
calendrier entier. Alors que les experts modernes sont capables
d'interpréter le système temporel maya à partir d'inscriptions et
de codex, un autre artefact ancien a préservé la vision maya du
temps sous la forme d'un calendrier unique qui est toujours en
usage aujourd'hui. Il s'agit de la Pierre du Soleil des Aztèques
(Piedra del Sol), le calendrier en forme de disque illustré à la
Figure 4.7.

Figure 4.7 : Il n'existe aucun artefact représentant le système complet des calen-
driers mayas. On croit que l'ancien calendrier aztèque illustré ici fut dérivé des
calculs temporels mayas. On voit clairement les thèmes des quatre âges précédents
dans les quatre boîtes entourant le glyphe central, qui représente l'âge présent.

134
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

Le disque original qui a servi de modèle à l'image de la


Figure 4.7 fut découvert au cours d'excavations sur la place prin-
cipale de la ville de Mexico en 1790. Dans Le Temps fractal, j'ai
expliqué en détail comment les inscriptions qu'il porte sont inter-
prétées et ce que l'on croit qu'elles révèlent. Plutôt que de repro-
duire ici ces explications, je me contenterai de dire que les images
sur le disque aztèque sont intactes, lisibles et toujours utilisées
aujourd'hui par les peuples indigènes d'Amérique centrale. Pour
ceux qui connaissent le langage du disque, il s'agit d'une belle
carte représentant notre relation au temps, depuis des milliers
d'années jusqu'à présent.

L'interprétation de la carte du temps


Les Mayas utilisaient les calculs inscrits dans la Pierre du
Soleil pour prédire comment les mouvements des corps célestes
affecteraient notre monde et la vie humaine sur de longues
périodes, qu'ils représentaient comme une série de cycles plus
courts. Le dernier cycle de la présente série se terminera au sols-
tice d'hiver du 21 décembre 2012. À cette date, le Grand Cycle
du présent âge du monde selon le calendrier maya se terminera et
un nouveau cycle débutera.
Un peu comme l'odomètre de certains véhicules se remet
à zéro après avoir atteint la marque des 100 000 kilomètres, le
calendrier maya se « réinitialise » à une nouvelle date de départ
quand le cycle recommence. Les chronométreurs mayas enco-
daient la date de la fin du cycle et le système qui suivait le dérou-
lement dans des tablettes massives et dans les temples qu'ils
construisaient sur tout le territoire occupé aujourd'hui par le
Mexique et le Guatemala.
Même si les prêtres mayas ont inscrit les dates clés de ces
cycles sur leurs monuments il y a plus de deux mille ans, ce
n'est qu'au début du xxe siècle qu'on en a saisi la signification
dans le cadre de notre calendrier grégorien et que ce message

135
Vérité essentielle

millénaire est devenu clair. Les travaux originaux du chercheur


Joseph T. Goodman (1905), confirmés par les archéologues J.
Eric S. Thompson (1927) et Juan Martinez Hernandez (1928),
concluaient à la date généralement admise pour le début du
Grand Cycle maya, connue sous le nom de corrélation GMT
en reconnaissance de la contribution de chacun de ces cher-
cheurs (bien qu'il existe toujours une controverse au sujet de
cette corrélation). Selon cette connaissance et les traditions des
prêtres mayas eux-mêmes, les anciens calendriers indiquent que
le dernier Grand Cycle a débuté à la date maya 0.0.0.0.0, ce qui
se traduit par le 11 août 3 114 av. J .-C. 21 •
Chaque fois que je rencontre une date aussi lointaine, j'ai
plus de facilité à la concevoir si je peux établir la relation avec
un événement qui se serait produit à la même époque. Ainsi,
mon point de référence pour le début du Grand Cycle maya est
celui-ci : son début, tel qu'il a été indiqué par l'ancien calen-
drier, correspond à peu près à l'époque où sont apparus les
premiers hiéroglyphes en Égypte ancienne. Entre cette époque
et aujourd'hui, le Grand Cycle englobe toute la période que nous
considérons typiquement comme l'histoire humaine connue.
Le mystère de la civilisation maya a peu de sens si on ne
situe pas cette dernière dans le contexte des civilisations avancées
qui l'ont précédée. Quand nous considérons les anciens Mayas
comme un maillon de la chaîne de connaissance qui se poursuit
dans la nuit des temps, une continuité de l'expérience humaine
commence à émerger en semblant se centrer autour d'un événe-
ment récurrent qui remodèle le paysage et l'existence de ceux
qui le vivent. Cet événement est si rare que personne ne peut le
vivre une deuxième fois. Sachant cela, nos ancêtres ont fait à leur
époque exactement la même chose que nous : ils ont consigné
leurs expériences. Ils les ont préservées dans de nombreux médias
tels que les inscriptions dans la pierre des murs des temples, dans
les codex des anciens parchemins et dans les histoires transmises
d'une génération à l'autre. Nous préservons les nôtres dans les
multiples médias que sont les enregistrements audio, les films et
les histoires contemporaines.
136
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

Au cours des années à venir, nous ferons vraiment de notre


mieux pour préserver, à l'intention des générations futures, tout
ce que nous aurons appris, pour la prochaine civilisation qui aura
à affronter un réchauffement ou un refroidissement planétaire,
des tempêtes géantes et les soulèvements sociaux qui surviennent
lorsqu'un mode de vie qui a fonctionné pendant des siècles
devient soudain ineffectif. La différence entre les témoignages de
nos ancêtres et les nôtres tiendra au fait que nous aurons appris
ou non à partir des expériences passées et que nous aurons effec-
tué ou non les choix nous permettant de survivre. Nous écri-
vons littéralement le dernier chapitre du cycle de notre âge au
moment où vous lisez ces lignes. Ce chapitre se déroule alors
que nos choix individuels se combinent pour former la réponse
collective à notre époque de l'histoire.

La suite de l'histoire
Quand je considère l'histoire des civilisations telle qu'elle est
enseignée aujourd'hui, certaines parties sont claires et d'autres
n'ont aucun sens. Par exemple, il est absurde que les plus
anciennes pyramides découvertes en Égypte, comme la grande
pyramide et les autres monuments du plateau de Gizeh, soient
plus sophistiquées sur le plan de la construction que celles qui
ont été érigées à une époque plus récente, il y a 2 000 ou 3 000
ans. (À la fin des années 1980, on a tenté de construire une
réplique de la grande pyramide à côté de l'originale sur le plateau
de Gizeh. Après un an de mésaventures et de difficultés tech-
niques, le projet fut abandonné.)
Qu'il s'agisse du grand sphinx d'Égypte ou des excavations
révélant le complexe des temples de Gobekli Tepe, en Turquie,
la preuve scientifique de l'existence de civilisations avancées dans
notre lointain passé est indéniable. La question qui se pose main-
tenant, ce n'est pas de savoir si ces anciennes civilisations ont
existé, mais plutôt de découvrir la signification de leur existence.

137
Vérité essentielle

Cette question en cache de plus profondes. Qui a construit ces


sites? Pourquoi ces peuples ont-ils disparu? Que savaient-ils
que nous ignorons? Les réponses à ces questions sont peut-être
cruciales pour nous permettre d'éviter de commettre à notre
époque les erreurs qui ont entraîné la chute de leurs civilisations.
Jusqu'ici, l'histoire traditionnelle n'a pas répondu à ces ques-
tions. En fait, comment le pourrait-elle ? Elle est incomplète.
L'histoire que nous enseignons aujourd'hui à nos enfants ne
révèle aucunement la véritable durée de notre existence sur la
planète, ni nos réalisations passées, ni les leçons apprises par des
civilisations antérieures et qui s'appliqueraient à nos défis d'au-
jourd'hui. Bref, la vision traditionnelle de l'histoire ne rend pas
compte de tout notre héritage planétaire.
Lorsque je travaillais pour l'industrie de la défense, au cours
de la guerre froide, j'ai appris une précieuse leçon qui m'a aidé à
comprendre ce qui se passe quand quelque chose ne semble pas
avoir de sens : c'est généralement parce que je ne dispose pas de
toute l'information nécessaire.
Par exemple, à l'époque, mon travail consistait à sortir des
données d'un programme informatique écrit par quelqu'un
d'autre et dont j'ignorais tout, de traiter ces données par un
processus logique que j'avais déjà développé, puis de fournir les
résultats à quelqu'un d'autre qui n'avait aucune connaissance de
ce que je venais de faire. C'était là une façon de faire appelée
«savoir compartimenté», selon laquelle on ne sait que ce que l'on
a besoin de savoir.
On me fournissait uniquement ce dont j'avais besoin pour
accomplir ma tâche tout seul, rien de plus. Comme seul quelqu'un
de haut placé dans la hiérarchie de l'organisation, avec une plus
haute autorisation de sécurité, voyait l'ensemble de notre logiciel
et ce que le programme effectuait, le système était plus sûr. Cette
façon de faire peut très bien fonctionner parfois, comme dans le
contexte d'un énorme programme de défense secret en temps de
guerre. Quand il s'agit de l'histoire de notre monde, toutefois, ce
n'est pas le cas.

138
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

L'histoire émergente
Je ne doute aucunement que l'on continuera de découvrir de
nouveaux sites et davantage d'artefacts quand le besoin de loger
et de nourrir sept milliards de personnes entraînera le forage
d'anciennes terres agricoles. Chacune de ces découvertes ajoutera
indubitablement à ce que nous savons déjà du passé. Les explo-
rations décrites dans ce livre, ainsi que d'autres du même genre,
sont essentielles pour créer le cadre de travail dont nous avons
besoin pour donner un sens à nos découvertes subséquentes. Sans
un tel cadre, nous risquons de mettre les nouvelles découvertes
dans la catégorie des « anomalies » et de perdre ainsi la chance de
voir par l'importante fenêtre qu'elles ouvrent sur le passé.
Les découvertes briseuses de paradigmes que nous avons
décrites dans ce chapitre, ainsi que d'autres, changent notre
vision du passé de deux façons. Premièrement, elles étendent
les frontières temporelles à l'intérieur desquelles on croit que
notre histoire s'est déroulée. Deuxièmement, elles modifient nos
croyances quant aux capacités de nos ancêtres. Une comparai-
son de la vision révisée de l'histoire et de la vision traditionnelle
permet de voir à quel point cette refonte est radicale.
Selon la comparaison établie à la Figure 4.8, il est clair que
l'histoire de la civilisation mondiale telle que nous l'avons établie
est incomplète. Ou plutôt, elle fait partie d'une histoire beau-
coup plus longue. Le moment que nous acceptons généralement
comme marquant le début de la civilisation tombe précisément
à la fin d'un cycle de 5 000 ans que nos ancêtres connaissaient
et marque le début du cycle que nous vivons aujourd'hui. Nos
ancêtres savaient que la transition entre les cycles approchait, car
elle a toujours lieu.
Tous les 5 125 ans, les changements naturels de la posi-
tion de la Terre dans l'espace créent un alignement céleste qui
signale la fin d'un cycle et le début du suivant. Les anciennes
traditions indigènes nomment communément soleils, mondes
ou âges du monde le temps qui s'écoule entre ces alignements.

139
Vérité essentielle

Les changements du climat, du niveau de la mer, de la civilisa-


tion et de la vie qui ont accompagné les âges du monde par le
passé ont été si considérables que l'on dit que le monde existant
prend fin quand ils se produisent. On appelle doctrine des âges du
monde la connaissance de l'existence de ces cycles et de ce qu'ils
provoquent.
On trouve aujourd'hui un bel exemple de ce genre de
connaissance chez les Hopis du désert du sud-ouest américain.
Leur tradition mentionne trois grands cycles temporels - trois
mondes antérieurs - ayant existé avant le quatrième où nous
vivons aujourd'hui. Selon cette tradition, chaque monde s'est
terminé par un grand cataclysme : le premier par des tremble-
ments de terre et l'engloutissement de continents, le deuxième
par une ère glaciaire et le troisième par une grande inondation.
Selon la prophétie, le quatrième monde, le nôtre, prendra fin au
cours de notre vie et nous vivrons bientôt dans le cinquième.
Bien qu' énoncée en des termes non scientifiques, la description
que font les Hopis des événements qui ont mis fin à chaque ère
ressemble étrangement à l'histoire de la Terre inscrite dans les
archives géologiques.
Par exemple, nous savons qu'il y a eu une période de grands
tremblements de terre et d'éruptions volcaniques qui ont causé
des ravages sur la planète il y a 20 000 ans. Nous savons que
l'ère glaciaire s'est terminée il y a environ 12000 ans et qu'il y
eut ensuite une période de fonte des glaces et de grandes pluies
qui a duré presque 4000 ans. C'est cette période que l'on associe
souvent au Déluge dont parle la Bible.
Selon les Hopis, les cycles temporels et naturels qui ont causé
des changements dans le passé amènent maintenant la fin du
monde présent, tandis que le prochain monde commence. Ce qui
rend la tradition hopi si crédible pour nous aujourd'hui, c'est son
exactitude. L'élément important, ici, c'est que les Hopis connais-
saient l'existence de ces cycles avant que le monde moderne puisse
la confirmer scientifiquement. Si leur connaissance des cycles passés
est si précise, quelle conclusion devons-nous tirer de leurs prédic-
tions concernant notre futur?
140
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

LA VISION TRADITIONNELLE LA VISION RÉVISÉE


DE NOTRE PASS~ DE NOTRE PASSÉ
1. La civilisation a évolué une seule 1. La civilisation s'est développée
fois au cours de l'histoire de l'hu- plusieurs fois dans l'histoire de
manité. l'humanité.
2. La civilisation s'est développée 2. La civilisation s'est développée par
linéairement, par une évolution cycles, chaque cycle évoluant pro-
progressive. gressivement.
3. L'histoire des civilisations du 3. Le plus récent cycle des civilisations du
monde s'étend sur environ 5 000 monde est d'une durée de 5000 ans.
ans.
4. La plus ancienne civilisation connue
4. La plus ancienne civilisation du est celle de Gèibekli Tepe, qui
monde est celle de Sumer, qui remonte à 9 500 av. J.-C.
remonte à 3 500 ans avant J.-C.
5. Les civilisations du passé étaient
5. Notre civilisation est la plus avan- capables de réalisations technolo-
cée de toute l'histoire du monde. giques que l'on ne peut reproduire
aujourd'hui.

Figure 4.8 : Comparaison entre la vision traditionnelle de notre passé et la nou-


velle interprétation fondée sur de récentes découvertes. Le contraste est frappant.
Il semble indiquer que notre civilisation n'est que la plus récente d'une série et que
nos expériences contemporaines sont semblables à celles du passé.

La révision de l'histoire du monde


Compte tenu de la tradition des Hopis, des Mayas et d'autres,
il est évident que si nous considérons notre passé selon la vision
traditionnelle, qui n'inclut que les cinq derniers millénaires, c'est
un peu comme de capter seulement les notes finales d'une grande
chanson à la radio. Même si nous aimons beaucoup ce que nous
entendons, ce ne sont que les dernières secondes de l'œuvre.
Depuis les excavations faites en Égypte par Napoléon à la
fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe, nous avons largement
établi notre connaissance de la montée et de la chute des civi-
lisations, des guerres, des conquêtes et des migrations sur l'in-
terprétation, par les historiens, de seulement 5 000 ans de notre

141
Vérité essentielle

passé, un instantané d'un moment du temps. Or, comme nous


le savons maintenant, cette période ne constitue en réalité que
quelques notes de la grande chanson de notre passé. C'est seule-
ment quand nous connaîtrons l'époque antérieure à celle qui est
couverte par l'histoire traditionnelle, soit les événements qui ont
eu lieu il y a plus de 5 000 ans, que nous pourrons entendre toute
la chanson.
Si nous n'avons pas écouté l'œuvre dans sa totalité, si nous
n'avons pas vu le tableau complet de notre passé, la période que
nous appelons l'histoire de la civilisation ne peut absolument pas
nous aider à expliquer comment nous sommes devenus ce que
nous sommes ni comment nous pouvons apprendre à partir des
erreurs de nos ancêtres et éviter celles-ci.
Heureusement, quand nous ajoutons à l'histoire tradition-
nelle l'existence factuelle de civilisations avancées à la fin de la
dernière ère glaciaire, un nouvel historique de l'humanité émerge
peu à peu, qui nous fait voir la continuité de l'expérience humaine
tout en nous procurant une nouvelle vision de nous-mêmes .

•••
La Figure 4.9 offre un historique révisé de l'histoire mondiale
qui tient compte des plus vieilles preuves de civilisation connues
et confirmées scientifiquement au moment où j'écris ces lignes.
Je ne serais toutefois nullement étonné de découvrir des preuves
supplémentaires dans des parties du monde qui ont été « cachées »
depuis 5 000 ans, par exemple ! '.Antarctique.

142
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

Repères de I'Âge du monde


Pluies

Grand Sphinx

Çatal H<iyuk .__Rome


....__.Grèce

Sumer
~gypte

~ ~ § ~ § § § § ~ --
~§ f
Figure 4.9 : Chronologie révisée des civilisations du monde, fondée sur les nou-
velles découvertes archéologiques. Cette chronologie inclut un site supplémen-
taire, celui de Çatalhoyük (non décrit dans ce livre), que la datation scientifique fait
remonter à 8 000 ou 10 000 ans. Notez la relation entre les civilisations connues
et les cycles des âges du monde (les grandes lignes verticales), séparés par des
périodes de 5125 ans.

La couche de glace recouvrant environ 98 % de ce mystérieux


continent possède une épaisseur moyenne d'au moins 1,5 kilo-
mètre et elle est en place depuis environ 15 millions d'années.
Comme le réchauffement de la planète en a réduit l'épaisseur en
quelques endroits et l'a fait fondre à d'autres endroits, je m'atten-
drais à ce que nous découvrions bientôt une preuve de l'exis-
tence d'anciennes civilisations qui s'y serait préservée longtemps,
ce qui veut dire que cette preuve y était probablement quand la
couche de glace était minimale, soit durant les ères interglaciaires
passées.
Les sites qui ont deux fois l'âge des civilisations connues -
comme la Rome antique, la Grèce et l'Égypte - nous aideront
peut-être à expliquer l'apparition «soudaine» de civilisations
qui semblent avoir été équipées d'un savoir sophistiqué dès leur
naissance. Nous découvrirons peut-être que le savoir implicite
dans la construction des pyramides égyptiennes, l'astronomie

143
Vérité essentielle

de Stonehenge et l'observation temporelle des Mayas est une


connaissance qui fut développée, puis préservée et transmise par
des civilisations encore plus anciennes.
L'agglomération des civilisations autour des grandes lignes
verticales des cycles des âges du monde est l'un des schèmes frap-
pants que nous constatons dans la chronologie révisée. Toute
l'histoire ancienne contenue dans notre vision traditionnelle s'est
déroulée à l'intérieur des cinq derniers millénaires du Grand
Cycle actuel. Selon la perspective présentée par la nouvelle chro-
nologie, toutes les civilisations connues, de la Rome, de la Grèce
et de l'Égypte antiques aux civilisations mayas, aztèques et incas,
semblent d'une apparition relativement récente à la lumière de la
chronologie élargie de l'histoire de l'humanité.
Chacune de ces anciennes civilisations possédait des systèmes
d'art, de science, de mathématiques et d'architecture sophisti-
qués qui se sont développés mystérieusement. Nous découvri-
rons peut-être que leurs grandes connaissances étaient le résidu
de réalisations similaires accomplies au cours de l'âge précédent
et que le savoir de leurs prédécesseurs provenait à son tour d'une
civilisation avancée antérieure. L'avenir le dira. Le secret de l'ori-
gine de ce savoir ancien réside peut-être dans la connaissance
des transitions entre les âges du monde, qui ont lieu tous les
5 000 ans environ.

Les leçons du passé


Albert Einstein a dit : «Il est indispensable que l'humanité
formule un nouveau mode de pensée si elle veut survivre22 • »
Relevant typiquement d'une vision intemporelle, ses paroles sont
aussi signifiantes aujourd'hui qu'au moment où il les a pronon-
cées, au milieu du xxe siècle.
Le message qui se révèle à mesure que nous découvrons la
vérité profonde de notre passé, c'est que l'histoire des civilisations
que nous enseignons dans nos salles de classe et qui est consi-
gnée dans nos manuels n'est pas l'histoire du monde. C'est plutôt
144
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

une partie d'une histoire beaucoup plus considérable, celle d'un


Grand Cycle, un âge du monde qui a débuté il y a 5 125 ans.
Quelle que soit la qualité de notre chronique de ce cycle, celle-ci
est incomplète. Elle ne dit rien de l'âge du monde qui a eu lieu
avant le nôtre ni de celui qui l'a précédée.
Par exemple, nous pouvons constater comment les cycles des
changements climatiques ont modifié notre mode de vie dans
le passé. Nous pouvons examiner les périodes de guerre et les
intermèdes de paix pour voir comment nos ancêtres composaient
avec les changements. C'est ainsi que nous pourrons trouver des
raisons de faire ce qu'Einstein proposait : formuler un nouveau
mode de pensée, renouveler notre vision de nous-mêmes, de
notre nature, de notre relation au monde, ainsi que les schèmes
de guerre et de haine qui ont prévalu par le passé.
H. G. Wells a dit un jour que l'histoire de l'humanité deve-
nait· « de plus en plus une course entre la connaissance et la
catastrophe23 ». Il y a sans doute davantage de vérité dans cette
assertion que nous ne voulons bien le reconnaître. Quand je
réfléchis à ces paroles et aux crises qui menacent notre civilisa-
tion en ce moment même, je ne peux m'empêcher de penser à nos
ancêtres et de me demander comment ils ont géré leurs crises.
Il est évident qu'ils ont réussi à survivre aux énormes chan-
gements climatiques survenus à la fin de l'ère glaciaire. Tout
comme nous sommes forcés de faire des choix pour nous adapter
à nos défis planétaires avant de posséder toutes les réponses, ils
ont dû faire la même chose, car, à leur époque comme à la nôtre,
la température augmentait, la glace fondait, le niveau de la mer
s'élevait et les littoraux disparaissaient sous l'eau. Même s'ils ne
comprenaient pas pourquoi leur monde changeait autant et aussi
rapidement, leur survie dépendait des choix qu'ils feraient.
Ce parallèle entre nous et nos ancêtres est essentiel.
Nonobstant les différences technologiques et démographiques,
les questions générales sont remarquablement similaires. Quand
nous regardons ainsi les énormes changements que subit notre
monde, chaque Grand Cycle devient une occasion d'apprendre à

145
Vérité essentielle

partir de nos erreurs passées et de faire des choix différents dans


des situations identiques.
Comme dans le film Un jour sans fin (un long métrage de
fiction paru en 1993 sous le titre original Groundhog Day, et
dans lequel Bill Murray jouait le rôle d'un homme piégé dans
une journée qui se répétait des dizaines de fois jusqu'à ce qu'il
repère le moment où il pouvait briser le cycle), le fait de savoir
comment nos ancêtres ont relevé le défi des crises qu'ils ont dû
affronter nous permettrait peut-être de faire des choix éclairés au
lieu de commettre les erreurs qui ont causé la chute des premières
grandes civilisations.
Cette façon de voir nous conduit à de nouvelles questions
auxquelles nous nous devons de répondre :

• Que pouvons-nous apprendre des civilisations dispa-


rues qui pourrait nous aider à éviter de commettre à
notre époque les mêmes erreurs qu'elles?
• Où en sommes-nous dans la « course» évoquée par
H. G. Wells entre la connaissance du passé et la
catastrophe ?
• Comment la découverte de civilisations avancées
remontant à une époque antérieure au début de l'his-
toire traditionnelle s'accorde-t-elle avec notre vision
du passé?
• Est-ce une coïncidence si le début de l'histoire
connue semble correspondre à la fin du dernier âge
du monde et au début de l'âge présent ?

C'est dans notre nature de raconter des histoires. Chaque


jour de notre vie, nous continuons à faire ce que les habitants de
ce monde ont toujours fait : nous parlons de nous-mêmes. Nous
consignons nos découvertes et nous décrivons nos expériences.
Nous faisons part de nos souffrances et de nos joies, de nos
surprises et de nos déceptions. Nous préservons les expériences

146
L'histoire occulte de notre passé oublié ...

qui ont laissé en nous des traces profondes et durables, à l'inten-


tion de gens que nous ne connaîtrons jamais et qui vivront à une
époque que nous ne verrons pas.
Lorsque nous combinons des millénaires de tradition orale
avec des preuves matérielles découvertes aux endroits précis
mentionnés par cette tradition, nous devons reconnaître ce qui
est une vérité embarrassante pour certaines personnes. De plus
en plus de preuves scientifiques nous conduisent à deux conclu-
sions indéniables :

1. Nous habitons ce monde depuis beaucoup plus long-


temps que ne le reconnaît l'histoire traditionnelle.
2. Il est arrivé à ce monde dans le passé quelque chose
qui a entraîné la fin de tout ce que nos ancêtres avaient
construit et aimé. Qu'il s'agisse du Déluge biblique,
des traditions du savoir indigène, de l'Épopée de
Gilgamesh ou de celle du Mahabharata, nous possé-
dons plusieurs histoires pour nous le rappeler.

Si ce qu'elles ont en commun est exact, ne serait-ce qu'en


partie, il est important que nous reconnaissions ces histoires
aujourd'hui. Nos ancêtres ont tenté désespérément de nous les
transmettre. Ils croyaient que les événements qu'ils vivaient à leur
époque se produiraient de nouveau à la nôtre. La preuve en est
maintenant évidente et leur message prend peu à peu tout son
sens.
De Gobekli Tepe au grand sphinx, de la civilisation de Caral
à celle des Mayas, des liens relient le monde moderne à notre
passé : qui nous sommes, d'où nous venons et depuis combien
de temps nous sommes ici. Les légendes et les mythes recèlent
l'histoire de notre espèce. Tout comme des orphelins cherchant
à savoir qui sont leurs parents, nous désirons connaître la vérité
sur nos origines. Quand nous reconnaissons la preuve de notre
véritable ancienneté, nous commençons à comprendre comment
utiliser l'expérience de notre passé collectif pour faire aujourd'hui

147
Vérité essentielle

les choix qui auraient pu aider nos ancêtres. C'est précisément


pour cette raison qu'il est vital de connaître la vérité profonde de
notre histoire.
Si de grandes civilisations sont apparues dans le passé, ont
duré des milliers d'années plus longtemps que la nôtre, puis
ont disparu si soudainement que leur souvenir fut réduit à
une légende dans notre mémoire, nous devons nous demander
ceci : la même chose pourrait-elle se produire de nouveau? Serait-
elle en train de se produire maintenant?
Ce sont nos découvertes qui nous révèleront les indices néces-
saires pour résoudre les profonds mystères de notre passé et pour
répondre à ces deux questions.

Vérité 4 : la découverte de civilisations avancées


remontant à la fin de la dernière ère glaciaire nous
fournit des indices pour surmonter les crises de notre
époque que nos ancêtres ont également affrontées.

148
CHAPITRE 5

PAR HASARD OU
DÉLIBÉRÉMENT : TÉMOIGNAGES
NOUVEAUX SUR LES ORIGINES
DE [HUMANITÉ

«Le mystère de la vie n'est pas un problème à résoudre,


mais une réalité à expérimenter. »
- FRANK HERBERT (1920-1986). ROMANCIER

Supposons que vous marchiez dans un champ en compagnie


d'un ami et que vous regardiez tous les deux au sol au même
instant. Vous apercevez alors une montre à vos pieds tandis
que votre ami voit une roche devant lui. Si vous vous deman-
dez mutuellement comment la montre a pu aboutir là, il y a des
chances que la réponse ne soit pas la même que si vous posiez la
même question au sujet de la roche. Tout ce que vous en savez,
c'est qu'un processus naturel a déposé cette roche à l'endroit où

149
Vérité essentielle

vous et votre ami l'avez trouvée. Il est fort possible qu'elle soit
là depuis des milliers d'années. Vous savez cependant tous les
deux qu'il ne peut en être ainsi dans le cas de la montre. Elle
est faite de pièces finement réglées qui n'ont pas été déposées
sur le sol aléatoirement par un processus naturel. Chaque partie
de l'appareil a été conçue, fabriquée et assemblée par quelqu'un
ou par une machine beaucoup plus récemment que la roche ne
s'est formée. C'est par cette simple analogie (que j'ai paraphra-
sée) que William Paley, un théologien du XVIW siècle, a amorcé
la discussion sur l'existence d'une intelligence sous-jacente aux
schèmes de la nature1.
Paley tira deux conclusions de son analogie :

- La première, c'est que si l'existence de la montre implique


celle d'un concepteur qui l'a construite et mise en marche, l'exis-
tence de systèmes naturels complexes et d'êtres vivants implique
celle d'un «horloger» cosmique, d'une force intelligente qui a
guidé la formation de l'univers et mis en marche la progression
de la vie.

- La seconde conclusion de Paley a trait à la probabilité que


des systèmes complexes et des êtres vivants dont l'existence est
interdépendante puissent «apparaître» par hasard. Dans le cas
de la montre, c'est seulement lorsque toutes les pièces sont fabri-
quées, réglées et assemblées précisément dans l'état où nous la
trouvons qu'elle peut faire ce pour quoi elle a été conçue : indi-
quer l'heure. L'important, ici, c'est que si l'une des pièces n'était
pas déjà fabriquée au moment d'assembler la montre ou si elle
s'en détachait par la suite et se perdait, la montre ne pourrait pas
exercer sa fonction.
« Si les diverses pièces avaient une autre forme que celle
qu'elles doivent avoir, dit Paley, ou si elles étaient d'une grosseur
différente, ou encore si elles étaient disposées d'une autre façon
ou dans un autre ordre, ou bien l'appareil ne fonctionnerait pas

150
Par hasard ou délibérément ...

du tout ou bien son mouvement ne remplirait pas la fonction


qu'on en attend 2 • »
Après avoir observé l'univers ainsi que le monde auquel il
appartenait à son époque, Paley en a conclu qu'ils fonctionnaient
de la même façon qu'une montre: «Toute indication d'ingénio-
sité et toute manifestation de conception existant dans la montre
existent dans les œuvres de la nature, à la seule différence qu'elles
y sont plus grandes et à un degré dépassant tout calcuP. »

Près de deux siècles après l'analogie de Paley, le biologiste


évolutionniste Richard Dawkins a écarté la possibilité de l'exis-
tence d'une telle intelligence dans son livre L'Horloger aveugle:

Le seul horloger est la force aveugle de la physique,


bien qu'elle se déploie d'une façon très particulière. Un
véritable horloger peut prévoir : il conçoit ses rouages
et ses ressorts, et il organise leurs interconnexions en
ayant un but à l'esprit. La sélection naturelle, ce proces-
sus automatique, aveugle et inconscient découvert par
Darwin, et dont nous savons maintenant qu'il constitue
l'explication de l'existence et de la forme apparemment
déterminée de toute vie, n'a pas de but dans son esprit. Il
n'a pas d'esprit. Il n'organise rien pour le futur. Il n'a pas
de vision, il ne prévoit pas, il ne voit rien du tout. Si l'on
peut dire qu'il joue le rôle d'horloger de la nature, il est
un horloger aveugle4.

Même si l'idée qui sous-tend la comparaison de l'horloger est


simple, ses implications ont de quoi briser un paradigme! Voici
pourquoi:
Notre vision de nos débuts terrestres constitue le fonde-
ment de notre vision de nous-mêmes. Ou bien la vie procède
d'une conception intentionnelle ou bien ce n'est pas le cas. Nous
sommes soit le produit d'une série aléatoire d'événements natu-
rels, soit le résultat d'une conception intentionnelle et intelligente.
C'est forcément l'un ou l'autre. Il n'a jamais été aussi important

151
Vérité essentielle

que maintenant de connaître la vérité. Les enjeux n'ont jamais


été aussi grands.
Cette question fut résolue par nos ancêtres à la satisfaction
de leur époque. C'est à ce jour une croyance avec laquelle nous
nous démenons et que nous devons résoudre à notre époque. En
outre, nous devons le faire dans le langage auquel nous faisons
confiance et sur lequel nous nous appuyons pour décrire notre
relation au monde : celui de la science. Cette croyance concerne
la vie humaine. Celle-ci commence quand exactement? Et se
termine quand? Qui a le droit d'y mettre fin?
Une question très différente et qui est peut-être la plus grande
de toutes, celle dont les implications sont les plus importantes, est
la suivante : d'où vient la vie humaine? Quelles sont nos origines?

Notre vision de nos origines est le fondement


de notre vision de nous-mêmes, de notre relation
à la planète, de nos interrelations, de nos capacités
et de notre destinée.

Ce sont là des questions énormes dont les réponses ont des


implications non moins énormes. Quand nous combinons les
réponses, elles possèdent un pouvoir que nous trouvons rarement
dans la réponse à une seule question : celui de nous unir en tant
qu'amis, famille et société, ou de faire tout le contraire. Toute
réponse qui ne soutient pas ce que nous avons été amenés à croire
a le potentiel de nous séparer en mettant en question le noyau
même des convictions sur lesquelles nos sociétés d'aujourd'hui
sont fondées.
La controverse entourant la pratique de l'avortement a suscité
des attentats à la bombe contre des cliniques, des menaces contre
les femmes désireuses de mettre fin à leur grossesse, l'assassi-
nat de médecins se livrant à cette pratique, et elle est devenue
un enjeu dans l'élection de dirigeants importants partout aux

152
Par hasard ou délibérément ...

États-Unis, année après année. Tout cela s'ajoutant aux violentes


protestations causées par les législations de divers États concer-
nant ce que nous pouvons enseigner à nos enfants, dans les écoles
et dans les manuels, au sujet de nos origines, il est évident que
nous devons éclaircir les faits liés à notre existence d'une façon
qui réponde aux besoins de notre monde du XXIe siècle. Plus tôt
nous y parviendrons, plus tôt nous commencerons à guérir la
haine et la souffrance qui déchirent notre tissu social depuis un
siècle environ.
Il s'agit essentiellement de notre mode de pensée, de nos
croyances et des réponses que nous apportons aux questions
ultimes de la vie.

Poser les bonnes questions


Quand John Ciardi, le célèbre traducteur de La Divine
Comédie de Dante, a écrit : «Les bonnes questions n'ont jamais
de réponse 5 », je me demande s'il n'avait pas à l'esprit la ques-
tion des origines de l'humanité. Ciardi a précisé sa pensée ainsi:
«[Cette question] n'est pas un écrou à resserrer, mais une graine
à planter pour en faire naître d'autres dans l'espoir de reverdir le
paysage des idées6 . »
Posait-il là la question qui est au cœur du débat juridique,
politique et scientifique le plus animé de l'histoire contem-
poraine : «D'où venons-nous?»
Le philosophe danois Soren Kierkegaard a dit un jour que
la vie humaine était « un mystère à vivre, non un problème à
résoudre7 ». Autant nous aimons la sensibilité poétique des paroles
de Kierkegaard, autant nous avons besoin de résoudre ce mystère.
Par ses implications religieuses et spirituelles, ce dernier joue
un rôle dans nos croyances les plus fondamentales et renferme
le secret de la création d'une civilisation durable. Il est évident
que nous devons élucider les origines de la vie si nous espérons
progresser comme société paisible, coopérative et compatissante.

153
Vérité essentielle

Cela signifie toutefois que nous devons poser les bonnes


questions et le faire de manière à leur apporter des réponses. Il
s'agit de résoudre deux mystères apparemment intemporels:

1. Comment la vie humaine a-t-elle commencé sur la


Terre?
2. Quand une vie humaine commence-t-elle dans
l'utérus?

Commençons par le commencement. Avant même d'en-


treprendre notre enquête sur ce double mystère, nous devons
répondre à une autre question encore plus fondamentale.
Au cours des premières années du XXIe siècle, alors que nos
microscopes sont tellement sensibles que nous pouvons assister à
la pénétration d'un œuf par un spermatozoïde et au «mariage»
de l'ADN qui donne naissance à une nouvelle vie, il nous reste
encore à nous entendre sur ce à quoi nous assistons exactement.
Aussi évidente que soit la vie, la communauté scientifique ne
s'entend toujours pas sur une définition claire de ce qu'est la vie.

Qu'est-ce que la vie ?


Le 20 août 1975 marque un tournant dans la connaissance
de notre place dans le cosmos. À 17 h 22 ce jour-là, une puis-
sante fusée Titan Centaur s'est élevée du Complexe 41 de Cape
Canaveral, en Floride, avec une cargaison sans précédent. Elle
portait le vaisseau spatial Viking!, le premier appareil conçu par
l'homme qui se poserait sur la surface de Mars, notre planète
voisine.
Un mois plus tard, Viking II a entrepris le même voyage de
800 millions de kilomètres que son jumeau. Il est parti du même
endroit, Cape Canaveral, porté par le même type de fusée qui
l'a propulsé vers la même destination que Viking!. Les deux
sondes Viking représentaient notre meilleur espoir de prendre les

154
Par hasard ou délibérément ...

premières photos en gros plan de la mystérieuse planète rouge et


de prélever des échantillons du sol. À la fin de leur vol, elles sont
passées à l'histoire pour avoir accompli les explorations plané-
taires les plus réussies. Bien que les derniers signaux du second
Viking aient été reçus en novembre 1982, le succès de ces missions
continue toujours d'alimenter la communauté scientifique.
Au milieu des années 1980, j'ai travaillé à Denver, au
Colorado, pour Martin Marietta Corporation, qui avait construit
les deux vaisseaux Viking. J'étais engagé comme développeur
informatique pour le volet défense de la compagnie, mais je me
suis retrouvé soudainement comme collaborateur de l'équipe de
scientifiques, d'ingénieurs et de gestionnaires du volet aérospatial
qui avait rendu possibles les missions sur Mars.
Au cours de nos conversations, et tirant profit de l'occasion
qui m'était fournie d'examiner des volumes de données faisant
état des ambitions du programme martien, j'ai découvert que les
missions Viking comportaient quelque chose de spécifique qui les
distinguait de toutes les autres missions effectuées par la NASA.
C'était cet unique objectif qui, de mon point de vue personnel,
justifiait le risque et le coût du projet.
J'ai déniché une brève déclaration dans un dossier contenant
une liste de points importants qui résumait les objectifs de la
mission Viking. À la fin de cette liste, à la suite d'explications en
jargon technique sur le climat de Mars, sur les caractéristiques
de la surface du sol martien et sur sa composition, j'ai trouvé
quelques mots effleurant la question qui me hantait depuis le
jour où j'avais vu en noir et blanc sur un petit écran de télé-
vision les premières missions spatiales habitées, dans les années
1960. L'objectif numéro 5 s'énonçait simplement comme suit : la
mission avait pour but de déterminer« s'il y a de la vie ou s'il y
en a déjà eu8 ».
En 1976, les scientifiques furent d'abord étonnés que l'on
n'ait trouvé aucune matière organique dans les échantillons du
sol martien prélevés par Viking. À l'époque, on croyait commu-
nément que l'on découvrirait quelque forme simple de vie dans ce

155
Vérité essentielle

sol supposément riche. Pendant trente ans, les données recueillies


par Viking I et Viking II ont fait l'objet de controverses, d'inter-
rogations, d'analyses et de contre-analyses. Un reportage publié
le 5 septembre 2010 par Science Daily fait état d'une nouvelle
théorie qui expliquerait pourquoi on n'a trouvé aucun signe de
vie il y a trente ans. En soi, le processus de détection aurait tué
tous les microbes présents, de sorte que la preuve de la présence
des éléments nécessaires à la vie aurait toujours existé9.
La recherche de la vie sur Mars - ou ailleurs dans l'univers-
offre un bel exemple du dilemme auquel font face aujourd'hui
les scientifiques ainsi que notre société. Que nous découvrions ou
non de la vie, cela dépend de la définition que nous donnons à ce
que nous cherchons. Tout d'abord, qu'est-ce que la vie?
En travaillant dans l'industrie de la défense au cours des
années 1980, j'ai découvert un fait étonnant qui demeure vrai
aujourd'hui, trois décennies plus tard: des scientifiques œuvrant
dans diverses disciplines répondent à la question différemment.
Ils le font en des termes spécifiques qui reflètent leur expertise
particulière. Par conséquent, même les experts ne s'entendent pas
sur une définition universelle de notre existence.
Par exemple, dans le manuel intitulé Chemistry, Matter, and
the Universe [«La chimie, la matière et l'univers»], la définition
de la vie semble plutôt stérile : « La vie est un schème compor-
temental exhibé par les systèmes chimiques quand ils atteignent
un certain type et un certain niveau de complexité10 • » Un peu
sec, n'est-ce pas? Je rapporte ici cette définition parce qu'elle est
tirée d'un ouvrage publié la même année que le lancement des
deux missions Viking et qu'elle reflète la pensée qui était alors
d'avant-garde.
En 1944, Erwin Schrôdinger, biothéoricien et physicien
réputé (créateur de la célèbre expérience de pensée dite du «chat
de Schrôdinger»), a émis l'hypothèse qu'un être est vivant s'il
«évite la détérioration dans l' équilibre11 ». Schrôdinger emploie
moins de mots dans sa définition, mais ce n'est sans doute pas
le meilleur moyen pour que l'individu moyen qui cherche des

156
Par hasard ou délibérément ...

signes de vie sache s'il les a trouvés. Sa définition fait référence à


une loi physique énonçant que la matière passe toujours du chaos
à l'équilibre. Tant qu'un être est vivant et qu'il fait tout ce que
font les êtres vivants, soit métaboliser, se réparer et se reproduire,
il est dans le chaos. Quand un être vivant ne peut plus faire
ces choses, il se détériore par décomposition dans l'équilibre des
éléments simples. Autrement dit, il meurt.
Dans l'édition du 22 mars 2002 de Science, le biologiste
moléculaire Daniel E. Koshland Jr. a développé une définition
possible de la vie 12 . Il a identifié sept conditions pouvant servir
de lignes directrices pour déterminer si un être est vivant ou non.
Brièvement, les êtres vivants :

1. Doivent être programmés pour se reproduire.


2. S'adaptent et évoluent en reflétant les changements
qui se produisent dans leur environnement.
3. Tendent à être complexes, hautement organisés, et à
posséder une structure compartimentée.
4. Ont un métabolisme qui leur permet de convertir
une forme d'énergie en une autre.
5. Peuvent se régénérer partiellement ou entièrement.
6. Peuvent réagir à leur environnement par des méca-
nismes de rétroaction.
7. Peuvent maintenir simultanément de multiples réac-
tions métaboliques13.

Bien que ces caractéristiques soient indubitablement précises


du point de vue des scientifiques qui les ont définies, elles
me laissent un peu insatisfait quand je les lis, comme s'il leur
manquait quelque chose. Sommes-nous simplement le produit
de « systèmes chimiques » ayant atteint un certain degré de
complexité ou de systèmes qui passent du chaos à l'équilibre ? La
beauté et la symétrie de la vie peuvent-elles réellement se réduire

157
Vérité essentielle

à quelque chose d'aussi banal et sans vie ou bien sommes-nous


plus que cela? La vie comporte-t-elle un élément mystique que la
science n'a pas encore mesuré ni même reconnu?
Si la vie est davantage que ce que laisse entendre la défini-
tion énoncée plus haut, c'est peut-être pour cette raison que l'on
n'a toujours pas déterminé si les sondes Viking en avaient trouvé
la preuve dans le sol de la planète la plus proche de la nôtre.
Peut-être avons-nous cherché la bonne chose au bon endroit,
mais d'une mauvaise façon. De nouvelles définitions ont tenté de
réintégrer la «vie» dans la vie, mais elles sont toujours de faibles
échos du mode de pensée de 1976.
Lune des raisons pour lesquelles une définition claire de la
vie nous échappe encore, c'est qu'elle suppose une connaissance
plus profonde de ses origines. La question de la nature de la vie
et celle de ses origines sont tellement liées qu'il est difficile de
répondre à l'une sans répondre à l'autre. Autrement dit, il nous
faut savoir ce qu'est la vie pour savoir quand elle commence, car
comment pourrions-nous savoir quand elle commence si nous
ne savons même pas ce qu'elle est? Ce dilemme apparent, cepen-
dant, est peut-être très utile, finalement, puisqu'il sous-entend
que si nous réussissons à répondre à l'une de ces deux questions,
nous serons en bonne voie de répondre aussi à l'autre.
La question de nos origines est un point d'interrogation
depuis toujours. Lart rupestre préservé dans les cavernes d'Aus-
tralie et d'Europe du Nord, et qui date de 20 000 ans à 35 000
ans, confirme que nous nous demandons depuis longtemps d'où
nous venons et comment nous sommes arrivés ici. Bien sûr, nous
nous posons toujours cette même question parce qu'elle n'a pas
reçu de réponse convenant au monde moderne.
Regardons-y donc de plus près. Quand il s'agit de la vérité
profonde de la vie et spécifiquement de la vie humaine, qu'est
précisément celle-ci ? Elle commence à quel moment? Où nous
situons-nous ?

158
Par hasard ou délibérément ...

Quand commence une vie humaine ?


On dit qu'au cours de nos conversations avec des gens que
nous ne connaissons pas, au travail, lors de réunions familiales
et d'occasions spéciales, il vaut mieux éviter d'aborder les sujets
suivants : la politique, la religion et l'avortement. Or, s'il n'est pas
acceptable de discuter des deux premiers sujets lors d'une réunion
sociale, il est difficile d'éviter la question de l'avortement. Qu'il
s'agisse des articles publiés dans les grands magazines, des débats
télévisés entre hommes et femmes en compétition pour diriger
les plus puissantes nations du monde, ou des lignes directrices
émises par le Vatican, l'avortement est au cœur de toutes les ques-
tions qu'on nous a encouragés à éviter par le passé : la politique
et la religion.
L'histoire nous démontre clairement que les questions
morales liées au moment où il est possible de mettre fin à une
grossesse et liées aussi à la méthode employée ont été résolues en
se fondant sur les valeurs et les croyances des diverses sociétés de
chaque époque. Les croyances sont profondément personnelles
et issues de la culture, du conditionnement, de la religion et de
la famille. Par conséquent, quand nous examinons l'avortement
dans cette perspective, il n'est sans doute pas étonnant que ces
questions persistent depuis si longtemps et ne soient pas vraiment
résolues dans notre société multiculturelle d'aujourd'hui.
En 1973, la plus haute cour américaine a tenté de régler la
question de l'avortement d'un point de vue juridique. Le 22
janvier de cette année-là, dans l'affaire Roe contre Wade, la
Cour suprême a pris une décision déterminante quant au droit
d'une femme de mettre fin à sa grossesse. Par un vote majori-
taire de 7 contre 2, la Cour a décrété que le droit à la vie privée
tel qu'énoncé dans le 14e amendement de la Constitution des
États-Unis incluait la décision d'une femme, prise en collabo-
ration avec son médecin, de se faire avorter. Le juge Harry A.
Blackmun a résumé ainsi cette décision : « Le droit à la vie privée
inclut la décision d'avorter, mais ce droit n'est pas absolu et il doit

159
Vérité essentielle

être examiné en fonction des importants intérêts de l'État14 • »La


Cour ajoutait un avertissement concernant la méthode utilisée
pour exercer ce droit. Elle précisait que le droit d'une femme de
mettre fin à sa grossesse devait être évalué en fonction des lois de
l'État où elle vit, comme si elle prenait une décision de vie ou de
mort.
Les lois varient dans les 50 États. Ainsi, même s'il s'agissait
d'une décision officielle prise en tenant compte des opinions des
scientifiques et des défenseurs du choix personnel, la décision
ultime était laissée à la discrétion des gouvernements locaux.
La légalité de l'avortement demeurait fondée largement sur les
valeurs et les croyances des communautés individuelles.
Dix-neuf ans plus tard, en 1992, la décision originelle de la
Cour suprême fut modifiée lors d'une contestation devant les
tribunaux afin de rendre compte d'un changement survenu dans
le langage employé pour désigner les différents stades de la gros-
sesse. Avant la décision de 1992, la durée moyenne de neuf mois
d'une grossesse complète était divisée, dans les documents juri-
diques, en trimestres représentant chacun un tiers de la période
de gestation. Par exemple, le premier trimestre comprenait les
trois premiers mois, le deuxième, les trois mois suivants, et ainsi
de suite. Le nouveau langage juridique était moins focalisé sur les
stades de la grossesse que sur le développement du fœtus.
Plus particulièrement, il s'agit de savoir si le fœtus est
«viable», c'est-à-dire s'il peut survivre une fois retiré de l'utérus.
Au lieu de diminuer la confusion, ce nouveau langage n'a fait
qu'attiser le mécontentement quant à la question de base. Partout
dans le monde, plusieurs personnes ont la forte impression que
le fœtus, viable ou non, est une vie humaine dès sa conception et
qu'il a donc les mêmes droits que tout être humain.
De toute évidence, l'avortement est toujours l'une des ques-
tions les plus controversées et les plus débattues dans notre
société. Avec un certain nombre d'élections locales et nationales
à l'horizon, les vues de chaque candidat sur le sujet influenceront
indubitablement les votes dans un sens ou dans l'autre. Selon

160
Par hasard ou délibérément ...

Kenneth T. Walsh, correspondant en chef de la Maison-Blanche


pour US. News & World Report : «Les "grandes" questions
reviennent [... ]. Ce sont les questions sociales qui ont divisé les
Américains pendant tant d'années, comme les droits des homo-
sexuels, l'avortement et les valeurs familiales 15. »
Même si nous ne savons pas précisément d'où nous venons
et pourquoi nous nous trouvons ici, sur la Terre, nous savons
avec une certaine certitude quand les différents stades de la vie
ont lieu dans l'utérus. Peut-être direz-vous : «Si nous connais-
sons ces stades et si nous savons quand ils débutent, alors où est
le problème?» C'est là qu'intervient la controverse. Parce qu'il
existe divers stades de vie, il existe différentes définitions de la vie
se rapportant à chacun. Ce seul fait nous oblige à être très précis
quand nous posons la question du moment exact du début de la
vie. Nous devons être informés suffisamment pour dire claire-
ment de quel stade nous parlons. Je fournis ici cette information
parce qu'une récente découverte peut nous faciliter les choses.
Les scientifiques ont identifié un moment mystérieux du
développement de l'embryon où les caractéristiques qui font de
nous ce que nous sommes (l'ADN qui définit nos traits humains)
apparaissent et s'installent. Même si cette découverte ne peut
nous dire ce qui est bien ou non quand il s'agit de choisir entre la
vie ou la mort, elle nous aide du moins à savoir de quel type de
vie nous parlons et quel type de choix nous faisons.

De la conception à la naissance : c'est toujours la vie


Historiquement, la branche de la science qui étudie la vie
elle-même - la biologie - s'appuie généralement sur quatre
critères pour définir la vie : le métabolisme, la croissance, la réac-
tion aux stimuli et la reproduction 16 • Quand un être possède ces
quatre caractéristiques, les biologistes considèrent qu'il s'agit d'un
être vivant.

161
Vérité essentielle

Les biologistes définissent généralement la vie selon


ces quatre critères : le métabolisme, la croissance, la
réaction aux stimuli et la reproduction.

Nous utiliserons cette définition de la vie comme point de


départ et nous y ajouterons notre opinion quant au moment où
la vie commence dans l'utérus.
Finalement, quelle que soit notre définition de la vie, il est
clair que, pour les humains, elle s'amorce par l'union de deux
cellules : un spermatozoïde et un ovule. Pour la majorité des
gens, cette union a lieu dans l'utérus. Létude de la vie dans l'uté-
rus est l'un des domaines scientifiques les plus mystérieux et les
plus fascinants. Même si nous possédons la technologie nous
permettant d'assister à la rencontre d'un spermatozoïde et d'un
ovule ainsi qu'à l'union des bagages génétiques qui formeront un
être humain, et même si nous pouvons décrire les mécanismes
qui rendent possible la vie humaine, il y a encore des choses qui
se produisent avant la naissance et que la science ne peut pas
expliquer.
Un résumé des stades du développement humain dans l'uté-
rus nous fournira un cadre de travail pour examiner la question.
Nous pourrons indiquer avec précision les moments du déve-
loppement où les divers changements qui définissent notre être
se produisent et où les stades de la vie apparaissent, depuis la
conception jusqu'à la naissance. Comme le même processus s'est
produit pour presque tous les lecteurs de ce livre, ce résumé sera
personnel. Je l'appliquerai à vous et à moi. Voici ce qui nous est
arrivé dans l'utérus de notre mère et qui a fait de nous ce que
nous sommes. Commençons donc ...

- Notre début. Nous explorerons plus loin dans ce chapitre


le sujet de l'origine de la vie selon le point de vue de la théorie de

162
Par hasard ou délibérément ...

l'évolution de Charles Darwin et selon la théorie opposée, celle


de la conception intelligente. Quand il s'agit de la preuve scien-
tifique du début de la vie, une chose est absolument certaine :
la matière vivante procède de la matière vivante. Bien que l'on
ait effectué des expériences examinant d'autres façons dont la
vie peut apparaître, il n'existe aucun cas scientifique documenté
démontrant qu'elle peut procéder de quelque chose qui n'est pas
déjà vivant.

On sait que la vie en général, et la vie humaine


en particulier, procède d'une matière biologique
déjà vivante.

En ce qui concerne ce qui se passe dans l'utérus de notre


mère, il faut toujours garder à l'esprit un fait important : la vie
commence avec la vie. Nous commençons à partir de l'essence
vitale. Le spermatozoïde et l'ovule qui s'unissent pour créer notre
«commencement» sont vivants et servent de conduits vivants à
l'essence vivante d'où nous émergeons.

- La fertilisation. Bien que l'on appelle souvent «instant


de la conception» le moment où un spermatozoïde et un ovule
humains s'unissent, il est plus exact de dire qu'il s'agit plutôt du
moment où le processus de la conception s'amorce. Il faut en réa-
lité vingt-quatre heures au noyau du spermatozoïde et à l'ovule
pour fusionner et partager l'information génétique de chaque
parent, et pour que la fertilisation ait lieu.

- Le zygote. Il est fascinant d'observer que, même si le


spermatozoïde et l'ovule qui s'unissent pour créer le début de
notre être constituent déjà deux cellules complètes et séparées
possédant toutes les caractéristiques biologiques de la vie, ils ne
forment qu'une seule nouvelle cellule quand ils s'unissent pour

163
Vérité essentielle

former une nouvelle entité. Autrement dit, la mathématique bio-


logique est ici celle-ci : 1 cellule + une cellule = 1 cellule, plutôt
que 1 + 1 = 2. Cependant, même si nous parlons d'un organisme
unicellulaire, cette nouvelle cellule est plus que chacune des deux
qui ont fusionné pour la créer. Elle contient un plus grand poten-
tiel que le spermatozoïde ou l'ovule. Cette union d'un plus grand
potentiel, c'est nous au premier stade de notre vie. À partir de ce
stade, c'est notre première cellule qui contient toutes les possibi-
lités ayant trait à ce que nous deviendrons.
J'aimerais faire ici une importante distinction. Le code géné-
tique qui comporte le potentiel de déterminer qui et quoi nous
deviendrons existe à ce stade précisément en tant que potentiel
uniquement. À ce stade, l'information génétique qui constitue le
modèle de la vie n'est pas pleinement active. J'aimerais également
noter que la science nouvelle de l' épigénétique démontre que le
potentiel que nous héritons de nos parents n'est pas «immuable»,
comme on le croyait auparavant, et qu'il peut se modifier dans
notre corps par des changements survenant dans notre environ-
nement physique, chimique et émotionnel 17.
Le terme scientifique employé pour désigner ce moment du
développement: le stade du zygote. Un zygote commence après la
fertilisation, quand le spermatozoïde et l'ovule sont devenus une
seule cellule. Ce stade dure jusqu'à la première division cellulaire,
quand notre cellule unique se scinde en deux cellules identiques
(voir la Figure 5.1). La durée d'existence d'un zygote avant sa
division en deux cellules ne semble pas faire partie du mécanisme
précis de l'univers.
La première division cellulaire ne se produit pas au même
moment pour chaque conception. La nature semble plutôt nous
laisser une certaine latitude au début de notre développement
quant au moment où se déclenchera ce processus qui se pour-
suivra jusqu'à notre premier souffle en ce monde. La première
division cellulaire a lieu généralement entre 12 et 20 heures après
la formation du zygote.

164
Par hasard ou délibérément ...

Figure 5.1 La période de temps entre la fertilisation et la première division cellulaire


varie en fonction des individus. Sur l'image ci-dessus, le processus de la division est
commencé et l'on voit la cellule unique du zygote se diviser en deux cellules iden-
tiques. Les fossettes qui sont visibles sur chaque cellule sont les noyaux contenant
l'information génétique. (iStockphoto : © Pete Draper)

- Le stade bicellulaire. À ce stade, nos cellules commencent


à obéir au mécanisme invisible de la nature et à se diviser réguliè-
rement. On peut prédire le moment de chaque division cellulaire
à partir de la précédente. Ce processus, appelé fission binaire,
se poursuit toutes les 12 à 20 heures. Pour résumer à partir du
moment de la fertilisation : la première division d'une cellule en
deux a lieu généralement entre la 47e et la 55e heure; la division
suivante, celle de deux cellules en quatre, a alors lieu 12 à 20
heures plus tard, et la troisième, celle où les quatre cellules se di-
visent pour en former huit, a lieu encore 12 à 20 heures plus tard.
Il se produit quelque chose de mystérieux et de merveil-
leux au stade octocellulaire de notre vie, approximativement 95
heures (3,9 jours) après la fertilisation. Cet événement étrange

165
Vérité essentielle

joue un rôle clé dans la détermination de la personne que nous


deviendrons et ajoute par conséquent une nouvelle dimension
aux choix difficiles que nous devrons faire éventuellement quant
aux stades de la vie humaine.

- Le stade octocellulaire. À ce stade, qui constitue un mo-


ment charnière, un processus mystérieux s'amorce dans nos cel-
lules, un phénomène que les scientifiques ne font que commencer
à comprendre et qu'ils ne peuvent donc pas expliquer entière-
ment. Au stade octocellulaire de la vie, le programme génétique
de notre ADN «entre en scène» et les caractéristiques qui déter-
minent ce que nous serons sont activées 18 •
Une étude publiée récemment par le magazine Nature (mars
2010) disait ceci: «Après la fertilisation, le génome embryonnaire
est inactif jusqu'à ce que soit amorcée sa transcription durant
la transition materno-zygotique19 • » Bien que les scientifiques
soient en mesure d'affirmer que ce changement, appelé expres-
sion génique embryonnaire, se produit vraiment, les méthodes de
recherche traditionnelles ne peuvent toujours pas expliquer préci-
sément pourquoi il a lieu.

Au stade octocellulaire du développement, un


processus mystérieux qui n'est pas encore bien
compris active le code de la vie.

Autrement dit, c'est à ce stade que les caractéristiques que


nous considérons comme humaines se mettent à l'œuvre pour
faire de nous ce que nous serons. Comme nous l'avons mentionné
plus haut, notre code génétique constitue en quelque sorte les
paramètres issus de l'usine cosmique de la vie pour nous intro-
duire dans le monde. Nous les possédons à la naissance, mais ils
ne sont pas immuables et ils peuvent se modifier avec le temps et
dans les conditions adéquates.

166
Par hasard ou délibérément ...

Figure 5.2 Au dessus : un embryon au stade octocellulaire, qui se produit approxi-


mativement 95 heures après la fertilisation. Un processus mystérieux commence
alors, par lequel l'information génétique de notre développement initial «entre en
scène». (iStockphoto: © alxpin) En dessous: le stade du blastocyste, où les cellules
se mettent à jouer divers rôles. Certaines se placent à l'intérieur pour former l'em-
bryon, tandis que d'autres se disposent à l'extérieur pour créer le placenta. C'est à
ce stade qu'apparaissent les premières cellules-souches. (iStockphoto : © geopaul)

167
Vérité essentielle

- La morula. Entre 12 et 20 heures après le stade octocellu-


laire, chaque cellule se divise de nouveau, ce qui crée les 16 nou-
velles cellules formant le stade suivant de notre développement.
Les cellules sont alors disposées en forme de mûre sphérique.
(Du latin morula, «petite mûre».) Jusqu'à ce stade, les cellules se
sont divisées en répliques identiques à l'intérieur de la membrane
qui les empêche de croître vers l'extérieur, la zona pelucida. Au
stade de 16 cellules, celles-ci commencent à changer de forme et
s'agglutinent, un processus appelé compaction cellulaire.

- Le blastocyste. Après le stade de la morula, qui se produit


environ cinq jours après la fertilisation, le stade du blastocyste
commence. L'embryon est alors une minuscule boule creuse.
Des différences se développent pour la première fois entre les
cellules qui se divisent, et les cellules centrales forment alors la
masse interne qui constituera l'embryon. C'est cette masse qui
contient les premières cellules-souches. Les cellules externes
s'aplatissent pour former la mince surface extérieure qui crée une
cavité remplie de fluide. C'est cette surface externe qui consti-
tuera le placenta. Le blastocyste est le «véhicule » qui, passant par
les trompes de Fallope, entre dans l'utérus et s'implante dans la
paroi de celui-ci pour former l'embryon.

- Le fœtus. Généralement durant la huitième semaine après


la fertilisation, le stade embryonnaire est terminé et nous deve-
nons un fœtus. Les organes sont alors physiquement présents,
mais seulement à un premier stade de fonctionnement. Bien que
nous puissions percevoir des changements dans notre environ-
nement, pour des raisons expliquées plus loin dans ce chapitre,
on croit que nous ne pouvons pas ressentir de douleur. C'est là
le dernier stade de développement jusqu'à la naissance du bébé.

168
Par hasard ou délibérément ...

La vérité profonde de la vie humaine


Lorsque nous parlons du début de la vie humaine, les stades
de développement décrits dans la section précédente nous
permettent de voir facilement pourquoi il existe autant d'opinions
et de points de vue différents. La vérité profonde, c'est que le début
d'une vie humaine est un processus plutôt qu'un événement. La vie
commence en tant que vie. Comme nous le verrons plus loin,
l'humanité ne peut pas encore créer de la matière vivante à partir
d'une matière qui ne l'est pas. Voyant ainsi ce qui se produit
dans l'utérus, il est évident que nos cellules sont «vivantes» d'une
façon différente à chaque stade du développement.
I..:essence vitale du spermatozoïde paternel et de l'ovule mater-
nel contient respectivement la moitié du matériel vivant néces-
saire à la formation d'un nouvel être. Quand le spermatozoïde
et l'ovule se rencontrent pour former «l'un» de nous, la première
cellule créée par leur union correspond à la définition biologique
de la vie en général. Nous sommes donc définitivement vivants
à partir de la première cellule de notre existence. Cependant, la
source de la controverse porte moins sur la vie des cellules que
sur le moment où nous acquérons les qualités que nous considé-
rons comme humaines. C'est ici qu'une connaissance claire de
ce qui se produit dans l'utérus et du moment où cela se produit
peut nous être utile.
Tandis que les scientifiques travaillent fort pour résoudre le
mystère de ce qui active le code génétique, il ne fait aucun doute
que cela se passe au stade octocellulaire. Comme nous l'avons
mentionné plus haut, c'est durant cette phase du développement
(le stade de l'expression génique embryonnaire) que nous acqué-
rons les caractéristiques héritées de nos parents, les traits renfer-
mant le potentiel de notre future existence. En cette matière,
justement, une vision unifiée de notre monde pourrait nous
procurer une compréhension que ne peut nous fournir la vision
isolée d'une seule discipline scientifique. Nous ne pourrions que

169
Vérité essentielle

bénéficier d'une transgression des frontières traditionnelles qui


ont toujours isolé les diverses sciences.
Des découvertes récentes en physique quantique nous
démontrent, au-delà de tout doute raisonnable, que nous sommes
entourés par un océan d'énergie vivante. Cela veut dire que nous
ne pouvons séparer la vie del' énergie qui l'entoure. Elles existent
conjointement. Elles sont en interaction. C'est par cette interac-
tion que nous faisons l'expérience de la vie. L'adoption d'un mode
de pensée holistique est peut-être essentielle pour comprendre
ce qui se passe lorsque survient l'activation de notre programme
génétique au stade de l'expression génique embryonnaire, et voici
pourquoi.
Le champ dans lequel nous baignons - que nous l'appe-
lions Divine Matrice, Esprit divin ou simplement le Champ-
remplit «l'espace vide» entre les choses. La biologie moderne
affirme aussi que ce champ fait partie de «l'environnement»
qui entoure les êtres vivants. Il s'agit là d'un concept important
quant au moment du début de la vie humaine et de ce qui se
produit au stade octocellulaire. L' épigénétique a démontré que
si le code génétique inscrit dans nos cellules dit à notre corps
comment fonctionner, le signal activant ce code semble provenir
de l'extérieur de la cellule20 • Autrement dit, il provient du champ
lui-même!
Nous savons cela grâce au processus de rejet cellulaire, qui est
commun après la transplantation d'un organe. Quand l'organe
d'un individu est placé dans le corps d'un autre individu, le corps
du récipiendaire ne reconnaît pas le nouveau tissu comme étant
sien et le traite donc comme un corps étranger en le rejetant.
Une percée s'est produite lorsque les scientifiques ont découvert
comment contrer le mécanisme de rejet afin que les organes
transplantés puissent bien fonctionner dans un nouveau corps.
Je présente souvent des séminaires en collaboration avec
le biologiste Bruce Lipton (que j'ai mentionné au chapitre
précédent). Lors de l'un de nos programmes, j'ai eu l'occasion
de me glisser à l'arrière de l'auditoire et d'écouter en tant que

170
Par hasard ou délibérément ...

participant. Comme nous le savons tous, il n'y a pas de hasard


dans la vie et il n'est donc pas étonnant que je sois entré dans la
salle au moment même où il décrivait un phénomène que j'avais
de la difficulté à comprendre. Il était question de transplantation
d'organes et des problèmes dont m'avaient fait part des amis qui
en avaient subi une.
Sur l'écran placé en avant de la salle, j'ai regardé mon ami
Bruce expliquer brillamment que lorsque l'intérieur d'une cellule
(le noyau contenant l'ADN) est enlevé de sa membrane origi-
nelle et placé dans la membrane d'une autre cellule possédant des
récepteurs différents (antennes) à sa surface, différentes portions
de l'ADN transplanté sont activées. Le point important, ici,
c'est que l'ADN est le même dans les deux cellules, mais que les
récepteurs différents captent différentes sortes d'informations en
provenance du champ qui les entoure. Autrement dit, les deux
cellules ont le même programme, mais des antennes différentes
accordées au champ environnant. Tout à coup, tout le problème
du rejet d'organe est devenu moins mystérieux, de même que
certains autres mystères.
Je fournis ici cette information parce que c'est seulement au
stade octocellulaire que se produit l'activation génétique. Cela
sous-entend que c'est uniquement à ce stade - celui de l'expres-
sion génique embryonnaire, environ quatre jours après la ferti-
lisation - que nos récepteurs cellulaires « s'éveillent» et captent
en provenance du champ le signal qui les ajuste de manière à
produire les caractéristiques qui font de nous des humains
uniques.

•••
171
Vérité essentielle

Dans la Figure 5.3, j'ai fait un résumé détaillé des caracté-


ristiques clés conduisant à la naissance ainsi que du stade moyen
auquel nous développons ces caractéristiques dans des conditions
typiques intra-utérines. J'en fais part ici simplement comme point
de référence scientifique : pour nous donner davantage qu'une
réaction émotive sur laquelle fonder notre opinion sur la vie et
ses débuts, et aussi comme point de référence quand nous nous
trouvons sans opinion éclairée.
Au cours de mes recherches pour savoir quelles étaient les
plus récentes découvertes sur les stades de développement de la
vie humaine, j'ai constaté que les différences entre les individus
rendent difficile de déterminer précisément dans le temps ce qui
se produit à chacun des stades. Pour cette raison, l'information
qui suit se veut une synthèse de l'opinion générale plutôt qu'un
tableau chronologique absolu de ce qui se passe dans l'utérus.

Qu'est-ce que cela veut dire ?


À ce stade, il est évident que, pour répondre à la question sur
le début de la vie humaine, nous devons dire clairement de quelle
forme de vie humaine nous parlons.
• Si nous définissons la vie humaine comme étant la
nouvelle cellule unique créée au stade de la concep-
tion, nous pouvons alors dire qu'elle commence dans
les vingt-quatre heures qui suivent la fertilisation de
l'ovule par le spermatozoïde.
• Si nous croyons que la vie humaine commence au
stade où l'ADN s'active pour nous donner les carac-
téristiques héritées de nos parents, elle commence
alors au stade octocellulaire, entre 2,9 et 3,9 jours
après la fertilisation.
• Si, comme on le croit dans certaines sociétés indi-
gènes, la vie se définit par la présence d'un battement
cardiaque, le cœur devient alors viable et commence
son travail vers le 22e jour après la fertilisation.

172
Par hasard ou délibérément ...

NQMBREQE
SIAru; IE.M~ ÉCQ:ULÉ CARACTÉRISTIQUES
CELLULES
Fertilisation : 2 cellules Environ 24 heures 23 chromosomes de la mère
Stade deviennent 1 après l'union et du père fusionnent pour
embryonnaire de lovule et du créer les 46 chromosomes qui
spermatozoïde définissent un être humain.
Le zygote 1 cellule Environ 11 heures La division cellulaire commence
après la fin de la et chaque cellule se divise tomes
fertilisation les 12 à 20 heures
2 cellules De 12 à 20 heures
après la dernière
division cellulaire
4 cellules De 12 à 20 heures
après la dernière
division cellulaire
8 cellules De 12 à 20 heures Les gènes sont activés. Le
après la dernière modèle des traits humains est
division cellulaire mis en mouvement de 71 à 95
1
heures ou de 2,9 à 3,9 jours
après le début de la fertilisation.
La morula 10-30 cellules Environ 4 jours Dernier stade avant que se
forme la cavité fluidique du
blastocyste
Le blastocyste 40-150 cellules Environ 5 jours Les cellules commencent à se
différencier.
18• jour On détecte le premier
battement cardiaque.
22• jour Le cœur fonctionne et pompe
le sang.
Le foetus 6 semaines Les ondes cérébrales sont
détectables.
8 semaines Fin du stade embryonnaire et
débuc du stade fœtal. Tous les
1
organes sont en place et 1' ouïe
est présente.
10 semaines Tous les organes fonctionnent;
le système osseux, le système
1
nerveux et le système
circulatoire fonctionnent.
12 semaines Les réflexes se développent.
Fin du premier trimestre de la
1 grossesse.

Figure 5.3 : Les stades de développement de la vie humaine, depuis la fertilisation


jusqu'à la douzième semaine, une période souvent appelée «premier trimestre».

173
Vérité essentielle

Certains considèrent que la présence d'ondes cérébrales,


qui survient vers la sixième semaine, est un signe évident de vie
humaine, bien que les études démontrent que la conscience n'est
présente que beaucoup plus tard, soit vers la 28e semaine.
Selon la décision de la Cour suprême qui a confié aux États
américains l'autorité voulue pour déterminer le moment où un
avortement peut être effectué, ainsi que le moyen utilisé, certains
médecins doivent informer la femme qui désire se faire avorter
qu'un fœtus âgé de 20 semaines peut éprouver de la douleur.
C'est l'un des points où la nouvelle technologie a changé cette
opinion. Une étude publiée dans le magazine de vulgarisation
scientifique Discover (l er décembre 2005) indique que le système
nerveux nécessaire aux sensations ne devient actif que vers la 28e
semaine.
Mark Rosen, un anesthésiste-obstétricien de l'Université
de Californie à San Francisco, a découvert avec ses collègues
que «le réseau nerveux aux endroits où l'on ressent la douleur,
dont la peau, n'atteint la partie émotionnelle correspondante du
cerveau» que vingt semaines plus tard qu'on ne le croyait en 1973
lorsque la Cour suprême a rendu sa décision dans l'affaire Roe
contre Wade2 1• Ce système interconnecté de nerfs et de fonctions
cérébrales décrit par Rosen doit d'abord être en place avant que
nous puissions vivre « le voyage magique de la conscience».
Dans un reportage publié en septembre 2009 dans Scientific
American, où l'on se demandait si notre expérience consciente
commençait dans l'utérus, durant la naissance ou après celle-
ci, on déclarait que le « substrat physique » du tissu nécessaire
à la transmission et à l'interprétation des signaux électriques à
l'intérieur du corps, le «système thalamocortical, qui procure à
la conscience son contenu hautement élaboré, entre en fonction
entre la 24e et la 28e semaine de gestation 22 ». C'est là un exemple
d'intervention de la nouvelle technologie pour jeter une lumière
nouvelle sur les divers stades de développement de la vie.
Au cours des années à venir, les progrès technologiques nous
aideront à comprendre encore plus précisément ce qu'est la vie.

174
Par hasard ou délibérément ...

Tout comme la science du début du XXIe siècle nous fournit


de l'information qui n'était pas disponible il y a quarante ans,
quand fut prise la décision dans l'affaire Roe contre Wade, nous
en saurons sans doute plus qu'aujourd'hui dans encore quarante
ans pour faire de meilleurs choix.
Nous pouvons toutefois affirmer ce qui suit avec certitude :
la vérité profonde de notre existence, c'est que la vie elle-même
commence lorsque les deux cellules vivantes, celle d'un spermato-
zoïde et celle d'un ovule, s'unissent pour créer la matière dont la
vie est faite. C'est seulement après la formation des huit premières
cellules que nous activons l'ADN qui nous procure les caracté-
ristiques que nous pouvons reconnaître comme étant humaines.
Une meilleure connaissance du moment où la vie commence
dans l'utérus nous conduira indubitablement à une meilleure
connaissance également de ce qui, pour certaines personnes,
constitue une question encore plus importante : comment la vie
elle-même a commencé et comment elle a commencé ici, sur la
Terre.

La conclusion de Darwin : l'évolution


Chaque épisode d'Au-delà du réel, qui fut l'une des séries télé-
visées de science-fiction les plus populaires, mettait en relief une
facette du monde tel que nous le connaissions à l'époque où cette
série était diffusée, entre 1963 et 1965. Ce fut particulièrement
vrai pour l'épisode final, intitulé « L'Origine des espèces23 ».
En 1963, nous vivions dans un monde très différent de celui
d'aujourd'hui. Nous émergions à peine de la crise des missiles
de Cuba et les images des nouvelles télévisées rappelaient aux
Américains à quel point ils étaient vulnérables à une attaque
atomique, tout en leur indiquant quoi faire s'il s'en produisait
une. (On peut dire en toute honnêteté que d'inciter les écoliers
à se cacher sous leur pupitre ne les aurait pas beaucoup proté-
gés en cas d'attaque nucléaire.) C'est aussi à cette époque qu'on

175
Vérité essentielle

a découvert les plus anciens restes fossilisés de nos ancêtres


humains dans les gorges d'Olduvai, en Tanzanie.
Depuis le milieu du XIXe siècle, les scientifiques cherchaient à
découvrir des preuves fossiles de la succession d'ancêtres humains
nous reliant aujourd'hui à nos débuts, une succession dont l'exis-
tence était fondée sur la « théorie de l'évolution». En raison des
idées proposées par Charles Darwin un siècle auparavant, on a
associé à nous les fossiles de créatures humanoïdes découverts en
Afrique et ailleurs dans le monde. En mentionnant plus haut la
théorie de Darwin, j'ai promis une description plus détaillée de
ses idées et de leurs implications. La voici donc.
Depuis 1859, la discussion scientifique des origines de l'hu-
manité fut centrée sur une idée connue sous le nom de «théorie
de l'évolution biologique». Bien que d'innombrables versions de
la théorie évolutionniste aient été développées dans d'innom-
brables salles de cours, bulletins scientifiques et manuels depuis
un siècle et demi, l'idée générale de l'évolution est demeurée
essentiellement la même. En bref, selon cette théorie, toutes
les formes de vie, y compris la vie humaine, proviennent d'un
même ancêtre. Depuis l'existence de ce dernier, elles ont évolué
sur une longue période jusqu'à devenir celles que nous connais-
sons aujourd'hui. Même si la théorie darwinienne n'explique
pas comment est apparu l'ancêtre de toutes les formes de vie, les
hypothèses tirées de cette théorie renferment la réponse.
Darwin a d'abord rendu publique sa théorie dans un livre
dont le titre est largement connu: De l'origine des espèces par voie
de sélection naturelle. En y regardant de plus près, on voit que
cet ouvrage publié en 1859 portait alors un titre plus long, qui
comportait deux parties et qui lui conférait un sens très différent.
Avant que l'on n'abrège le titre original du livre de Darwin, il
se lisait comme suit : De l'origine des espèces par voie de sélection
naturelle, ou la préservation des races favorisées dans la lutte pour
la vie2 4 .

176
Par hasard ou délibérément ...

Avec ce livre, Darwin semait à son époque les graines d'une


controverse qui continue de faire rage dans le monde moderne.
C'est la profondeur de la réaction émotive déclenchée par les
implications de ce livre ainsi que la façon dont ces idées sont
interprétées qui sont à la source des croyances divisant le plus les
gens et entraînant la justification de certaines des plus grandes
souffrances de l'histoire.
Darwin a formé sa théorie évolutionniste à partir d'observa-
tions personnelles faites au cours d'un voyage océanique entrepris
en 1835. Il a alors observé une plus grande variété de plantes et
d'animaux que ne l'avait fait aucun autre scientifique européen
de l'époque. Un extrait de son introduction nous fournit une
indication de ce que ce voyage signifiait pour lui :
À bord de l'HMS Beagle en tant que naturaliste, j'ai été
fortement frappé par certains faits concernant la distribution des
habitants sur le sol d'Amérique du Sud ainsi que les relations
géologiques des habitants anciens et actuels de ce continent. Ces
faits semblaient jeter de la lumière sur l'origine des espèces, ce
mystère des mystères comme l'a nommé l'un de nos plus grands
philosophes25 .
Une grande partie de la théorie de Darwin est fondée sur
des observations faites en étudiant les fossiles et la vie sauvage,
spécialement les espèces d'oiseaux aux îles Galapagos. C'est
seulement à son retour à Londres qu'il s'est rendu compte que les
spécimens qu'il avait recueillis de familles différentes de pinsons,
par exemple, étaient en fait des variantes de la même famille.
Il s'agissait alors pour lui d'expliquer les différences, comme
la taille et la forme du bec, chez les pinsons qui s'étaient dévelop-
pés isolément sur des îles séparées. La découverte additionnelle
de restes fossilisés de créatures ressemblant aux animaux de l'ère
moderne, bien que beaucoup plus gros, ajoutait au mystère qu'il
devait élucider.
En se servant des méthodes d'observation scientifiques et
rationnelles comme l'hypothèse, l'expérience et l'analyse, Darwin
a utilisé les meilleurs moyens de son époque pour expliquer ce

177
Vérité essentielle

qu'il avait découvert au cours de son voyage historique. Le résul-


tat de son travail l'a conduit à sa théorie del' évolution par sélec-
tion naturelle.
Essentiellement, la théorie de l'évolution par sélection natu-
relle proposée par Darwin affirme simplement ce qui suit :
Quand je considère l'essentiel de la théorie proposée par
Darwin il y a plus d'un siècle et demi, en regard des données
accumulées depuis par lui et par d'autres, les observations elles-

• Il se produit des changements chez une espèce (des


mutations aléatoires dues à l'environnement ou à des erreurs
de reproduction). Les membres d'une population qui subissent
des modifications leur permettant de vivre mieux, comme
un bec plus résistant pour briser des noix ou une couleur de
camouflage pour se protéger des prédateurs, ont un avantage
sur les autres membres de la même espèce qui n'ont pas ces
caractéristiques. Cette partie de la théorie est résumée dans
le terme« microévolution ».

• Avec le temps, et dans des conditions changeantes, les


traits qui assurent aux individus leur survie l'emportent sur
d'autres traits qu'ont des membres de la même espèce et qui
n'assurent pas leur survie. Parce qu'ils survivront plus long-
temps, les individus aux traits avantageux engendreront une
progéniture plus nombreuse qui aura aussi ces traits dési-
rables. Cette partie de la théorie darwinienne s'appelle «la
sélection naturelle».

• Finalement, les membres d'une espèce qui bénéficient


de ces changements évoluent jusqu'au point de ne plus
pouvoir s'accoupler avec des membres du groupe originel. Ils
forment alors une nouvelle espèce différente de celle de leurs
ancêtres. Ce processus s'appelle «spéciation».

178
Par hasard ou délibérément ...

mêmes ont du sens. Pour tout esprit honnête et ouvert, il ne fait


aucun doute que le processus d'évolution est très réel en soi. C'est
un fait confirmé par les archives fossiles des espèces qui ont vécu
dans le passé. Nous le voyons aujourd'hui dans la nature.
Le processus d'évolution est un fait au sein du règne végé-
tal et du règne animal, mais la grande question est celle-ci :
qu'en est-il dans notre cas? Autrement dit, l'évolution dont nous
sommes témoins autour de nous s'applique-t-elle également à la
vie humaine? Explique-t-elle comment nous en sommes arrivés
à «être» ce que nous «sommes» aujourd'hui? La «lutte pour la
vie» observée par Darwin dans la nature est-elle à la source de
la lutte humaine ayant cours dans le monde actuel ? Ce genre de
questions est au cœur des plus grandes controverses idéologiques
concernant le développement humain, dont les graines furent
semées il y a plus d'un siècle et demi.

Les objections aux idées de Darwin


Plusieurs des objections aux conclusions de Darwin semblent
porter moins sur l'idée d'évolution elle-même que sur les impli-
cations de sa théorie et sur les hypothèses qui en découlent. En
d'autres mots, Darwin spéculait sur des processus vitaux dont ni
lui ni personne n'avait été témoin. Il écartait tout doute quant
à l'application de ses théories à la vie existant au-delà du règne
végétal et du règne animal en général, et à nous spécifiquement.
Dans De l'origi.ne des espèces, il dit avoir l'impression que nous
résultons, comme d'autres formes de vie terrestres, d'une sélec-
tion évolutionnaire s'échelonnant sur de très longues périodes.
En une seule phrase dans la conclusion du livre, il résume clai-
rement ses idées sur le sujet. « De même, nous devons admettre
que tous les êtres organiques qui ont vécu sur cette planète
proviennent d'une seule forme primordiale26 • »
Certaines des objections aux théories de Darwin sont fondées
sur une aversion purement émotive de l'idée que nous ayons

179
Vérité essentielle

évolué à partir de formes de vie moins complexes. D'aucunes


s'appuient sur une doctrine religieuse voulant que la race
humaine soit «spéciale» et qu'elle ait été créée directement par
Dieu. Alors que la théorie de l'évolution est largement acceptée
aujourd'hui par la communauté scientifique, l'émergence d'une
nouvelle technologie a permis des découvertes dans des domaines
allant de la biologie cellulaire à la génétique, ce qui a conduit un
nombre croissant de scientifiques à se demander si la théorie de
Darwin constitue une explication complète de la vie et particu-
lièrement de la vie humaine.
Les principales préoccupations concernant l'évolution sont
issues de trois hypothèses qui sont essentielles à la théorie :

• L'hypothèse évolutionniste 1 : la vie peut surgir sponta-


nément d'une matière non vivante.
• L'hypothèse évolutionniste 2 : la nature ne fournit pas
à une espèce plus que ce dont elle a besoin pour vivre.
• L'hypothèse évolutionniste 3 : une espèce existante
peut évoluer lentement sur une longue période pour
former une nouvelle espèce.

Un examen plus approfondi de ces hypothèses à la lumière


des faits scientifiques connus et authentifiés nous montre que leur
acceptation intégrale pose de sérieux problèmes. Examinons-les
tour à tour.

Hypothèse évolutionniste 1
La vie peut surgir spontanément d'une matière non vivante

C'est sur cette première hypothèse que repose le titre de ce


chapitre : «Par hasard ou délibérément». J'ai rarement trouvé
possible d'employer le mot «jamais» quand il est question d'une
théorie scientifique, mais c'est ici le cas. C'est un fait scientifique
que l'on n'a jamais trouvé une forme de vie issue d'une matière

180
Par hasard ou délibérément ...

qui ne fût pas déjà vivante. Pour des raisons mystérieuses que les
scientifiques tentent d'élucider depuis au moins trois siècles, cela
ne s'est jamais produit.
Les évolutionnistes abordent souvent cette contradiction en
laissant entendre que même si nous n'assistons pas aujourd'hui à
une création spontanée de la vie, les conditions nécessaires à un
tel processus ont pu exister à un certain moment dans le passé,
puis être détruites par le développement même de la vie. Le fait
est qu'ils ne savent aucunement avec certitude si cela s'est déjà
produit. Personne ne le sait. C'est là le problème que pose cette
hypothèse.
La tentative scientifique moderne pour créer de la matière
organique à partir d'une «soupe» de matière inorganique rappelle
l'expérience notoire du chimiste et biologiste Stanley Miller et du
chimiste et physicien Prix Nobel Harold Urey à l'Université de
Chicago en 195227. L'expérience initiale fut menée en employant
des éléments et des composés dont les scientifiques du milieu du
xxe siècle croyaient qu'ils constituaient la première atmosphère
terrestre (vapeur d'eau, ammoniac, hydrogène et méthane) ainsi
que diverses formes de catalyseurs, comme la foudre simulée,
pour faire apparaître les plus simples formes de vie.
Même si aucune matière vivante n'a résulté de l'expérience,
l'étude rapportait la présence de cinq acides aminés à la fin du
processus. Cependant, quand les scientifiques ont évalué les
expériences antérieures, en 2008, ils ont constaté qu'en réalité
22 acides aminés avaient été produits. Bien que cela penche
en faveur des idées de Darwin, l'analyse a aussi révélé que les
modèles de la première atmosphère terrestre n'étaient pas exacts.
De nouvelles découvertes ont fait réviser la pensée scienti-
fique en ce qui concerne la première atmosphère terrestre. Quand
l'expérience de Miller-Urey fut répétée avec une autre composi-
tion chimique (vapeur d'eau, dioxyde de carbone et azote), elle
n'a produit aucun des éléments constituants de la vie. L'absence
de tout acide aminé a pratiquement mis fin à ces recherches.

181
Vérité essentielle

À partir de cette expérience et d'autres qui ont été effectuées


depuis, quelque chose paraît échapper à la science : un élément
manquant de la recette de la vie qui n'a jamais été présent dans
les expériences de laboratoire. Même quand les conditions de
température, d'humidité et de chimie semblent favorables à
l'apparition spontanée de la vie, il semble également qu'une force
supérieure aux propriétés chimiques soit nécessaire pour insuffler
la vie aux éléments de la création.
Cette force, ni la théorie de Darwin et de ses disciples ni la
connaissance traditionnelle de la science moderne n'en rendent
compte. Des trois hypothèses de la théorie évolutionniste, celle-ci
semble la plus faible, et je ne serais nullement étonné de la voir
disparaître du débat au cours du xxre siècle.

Hypothèse évolutionniste 2
La nature ne fournit pas à une espèce plus que ce dont
elle a besoin pour vivre

Essentiellement, cette hypothèse veut que les êtres vivants


ne développent que les traits qui leur sont utiles quand ils en ont
besoin et non avant. Ces nouveaux traits procurent aux indivi-
dus une meilleure capacité de survie et une plus grande longé-
vité, et ils seront transmis lentement aux autres générations par
le processus de la sélection naturelle. Dans le langage de cette
hypothèse : « La nature ne dote jamais une espèce de ce dont elle
n'a pas besoin pour son existence quotidienne.»
Même si cette hypothèse est fondée sur les observations de
Darwin et qu'elle peut expliquer le changement de taille du bec
des pinsons, qui leur permet de mieux casser les noix (augmen-
tant ainsi leur approvisionnement en nourriture), ou le change-
ment de couleur des papillons de nuit, qui leur permet de se
confondre avec l'écorce des arbres leur servant de camouflage
(les protégeant ainsi contre les prédateurs), l'hypothèse s'effondre

182
Par hasard ou délibérément ...

lorsque nous tentons de l'appliquer aux humains et particulière-


ment à la taille de notre cerveau. Voici pourquoi.
L'augmentation de la capacité cérébrale des humains
modernes est l'une des anomalies qui ne concordent pas avec la
théorie de l'évolution. En deux mots, notre cerveau est devenu
plus gros que nécessaire. Son augmentation de taille a donné
aux premiers humains des capacités qui, croit-on, dépassaient
celles qui étaient requises à l'Homo sapiens pour survivre il y a
200000 ans.
On peut l'illustrer très bien par un simple tableau montrant le
lignage ayant supposément conduit à l'humanité d'aujourd'hui.
Comme cet échantillon de nos ancêtres présumés est fondé sur
l'arbre de relations généralement accepté par les évolutionnistes,
je m'en servirai pour démontrer pourquoi la théorie de l' évolu-
tion ne semble pas pouvoir s'appliquer quand il s'agit de la taille
de notre cerveau.
La liste qui suit montre les plus récentes branches de l'arbre
évolutionnaire qui, croit-on, ont conduit jusqu'à nous, ainsi que
la grosseur approximative du cerveau de chaque ancêtre en cours
de route. La capacité est mesurée en centimètres cubes28 (cm3).
Même si les tailles du cerveau sont approximatives, elles
racontent une histoire qui a une incidence directe sur l'une des
hypothèses de base de la théorie de l'évolution. Il a fallu près
de deux millions d'années (environ 1,9 million d'années) pour
que la capacité cérébrale passe de 700 cm 3 à 1348 cm 3 (entre
l'Homo habilis et l'Homo heidelbergensis), une augmentation de
648 cm 3. Toutefois, il n'a fallu que 400 000 ans pour l'augmenta-
tion suivante de 102 cm 3 (entre notre plus proche ancêtre connu,
l'Homo heidelbergensis, et l'humain moderne). En matière d'évo-
lution, cette augmentation récente s'est produite en un clin d'œil
et, fait plus important encore, elle est survenue avant le moment
où l'on croit qu'elle était nécessaire.

183
Vérité essentielle

Capacité cérébrale
Nom Âge approximatif
approximative
Homo sapiens (humain moderne) 200000AAP 1450 cm 3

Homo heidelbergensis 600000 AAP 1348 cm 3

Homo habilis 2500000AAP 700cm 3

AAP = années avant le présent

Figure 5.4: Les capacités cérébrales des plus récents membres de la lignée humaine
communément acceptée. Les humains modernes sont apparus il y a environ
200 000 ans, avec une capacité cérébrale d'environ 100 cm3 supérieure à celle de
nos ancêtres de 400 000 ans plus tôt. Contrairement à l'idée de la théorie de I' évo-
lution, c'était plus que pour les besoins de l'époque, et cela n'a pas changé depuis.

Ce même cerveau qui nous rend capables d'une pensée


abstraite - ce qui nous permet de formuler des équations mathé-
matiques complexes et de simuler des possibilités dans notre
esprit avant de les choisir, ainsi que de créer les valeurs et les
croyances animant couramment la civilisation la plus avancée de
l'histoire du monde - possède des capacités dépassant de beau-
coup celles qui étaient nécessaires aux premiers représentants de
notre espèce pour survivre au quotidien quand ils sont apparus
il y a 200 000 ans. Selon la théorie de l'évolution, cela ne devrait
pas se passer ainsi. Comme Darwin l'a affirmé lui-même dans
sa théorie : «La sélection naturelle ne joue qu'en tirant profit de
légères variations successives ; elle ne peut jamais faire un grand
bond soudain, mais elle doit avancer lentement et sûrement à
petits pas29 • »
Si la taille de notre cerveau est un fait de l'existence humaine
qui pose un gros problème aux théoriciens de l'évolution, elle
n'est qu'un aspect d'un problème plus grand : la forme anato-
mique de l'humain moderne. Notre cerveau n'a pas beaucoup
changé depuis 200 000 ans, et notre corps non plus. Les fossiles
nous montrent que nous avons essentiellement le même corps
aujourd'hui que nos ancêtres d'il y a 200 millénaires. Laques-
tion qui se pose est celle-ci : pourquoi? Si l'évolution s'applique

184
Par hasard ou délibérément ...

réellement à nous autant qu'aux autres formes de vie, pourquoi


alors n'avons-nous pas changé au cours de toute cette période?
Lorsque nous nous penchons sur l'énigme du développement
de notre cerveau, la très intéressante observation du biologiste
évolutionnaire Stephen Jay Gould concernant les preuves fossiles
fournies par les archives géologiques et «l'étonnante improbabi-
lité de l'évolution humaine» n'en devient que plus significative30 •

Hypothèse évolutionniste 3
Une espèce existante peut évoluer lentement sur une longue
période pour former une nouvelle espèce

Selon cette troisième hypothèse de la théorie de l'évolution,


les mutations au sein d'un groupe peuvent aller jusqu'à créer une
espèce entièrement nouvelle : une forme de vie avec un ADN
si différent de celui des précédentes espèces dont elle est issue
qu'elle ne peut plus s'accoupler avec la population originelle. Le
plus gros problème que pose cette théorie, c'est qu'elle se fonde
sur la spéculation, non sur des faits. Au meilleur de mes connais-
sances, il n'existe aucune preuve qu'une espèce nouvelle fût déjà
issue d'une espèce existante. Dans le cas des humains, c'est sans
doute notre capacité d'adaptation, plutôt que le processus d' évo-
lution lui-même, qui correspond le mieux à ce qui a été observé
et que l'on a sans doute pris pour de l'évolution.
Par exemple, les tribus indigènes de l'Arctique et de la Sibérie
ont développé davantage de chair autour des yeux, ce qui les
protège de l'éblouissement constant du soleil reflété sur la neige
et sur la glace de leur habitat. Même si l'on croit que cette carac-
téristique est une réaction directe à leur environnement, il s'agit
d'un changement qui n'affecte que leur apparence.
Ces tribus ont vécu dans le difficile environnement des
régions polaires pendant au moins 10 000 ans et elles s'y sont
adaptées. Pendant ce temps, toutefois, elles n'ont pas évolué pour
former une nouvelle espèce humaine et rien n'indique qu'elles le

185
Vérité essentielle

feront. Génétiquement, ces gens appartiennent toujours à l'es-


pèce de l'Homo sapiens. Leur corps s'est simplement ajusté aux
conditions de l'environnement où ils vivaient.
Si les espèces évoluent avec un nouvel ADN plutôt que de
s'adapter au fil du temps, il est raisonnable de s'attendre à ce que
l'on découvre, quelque part au cours de la recherche qui a débuté
en 1859, au moins une forme transitoire dans les archives fossiles.
Au lieu de cela, comme l'illustre le cas des humains modernes
et des Néandertaliens, on a découvert que des espèces dont on
croyait que l'une était issue de l'autre ont vécu et disparu ensemble
à la même époque. Le fait que l'ADN des Néandertaliens soit très
différent du nôtre a placé ces derniers sur une branche à part de
l'arbre évolutionnaire humain et nous a laissés où nous étions au
départ. Au moment d'écrire ces lignes, il n'existe pas de preuve
matérielle d'une espèce transitoire pour soutenir cette hypothèse
d'évolution. Conséquemment, par exemple, il est impossible que
nous descendions des Néandertaliens.
S'exprimant en termes spécifiques et techniques, le paléon-
tologue et biologiste évolutionniste Steven M. Stanley ne laisse
planer aucun doute sur ce manque de preuve transitoire dans
les archives fossiles. «Les archives fossiles connues, dit-il, ne
présentent aucun exemple d'évolution phylétique accomplissant
une transition morphologique majeure et ne fournissent donc
aucune preuve que le modèle gradualiste puisse être valide31 • »
Même si Stanley et d'autres biologistes évolutionnistes tels que
Gould offrent de nouvelles raisons pour expliquer ce manque de
preuve, il n'en reste pas moins que ce manque est bien réel.
Les archives géologiques elles-mêmes montrent que la
majorité des espèces qui ont vécu sur la planète sont apparues
durant l'explosion cambrienne, une période qui équivaut, en
biologie, au big-bang des astrophysiciens. Ce fut durant l'ex-
plosion cambrienne, il y a environ 540 millions d'années, que
«les huit plans d'organisation majeurs des animaux en existence
aujourd'hui sont apparus, ainsi que 27 plans mineurs. Aucun
autre plan d'organisation ne s'est développé depuis 32 ». L'idée

186
Par hasard ou délibérément ...

à retenir ici, c'est que les éléments de base de la vie terrestre


semblent être apparus au cours d'une période relativement brève
et non comme les résultats d'un lent processus évolutionnaire
étalé sur une longue période.

L'évolution : les preuves correspondent-el/es à la théorie ?


Compte tenu des problèmes posés par les trois hypothèses de
base de la théorie darwinienne, où en sommes-nous? Dans De
l'origine des espèces, Darwin lui-même reconnaît le manque de
preuves démontrant qu'une espèce serait issue d'une autre:

[...] le nombre de variétés intermédiaires qui ont déjà


existé sur la Terre [doit] vraiment être énorme. Pourquoi
alors toutes les formations et les strates géologiques ne
regorgent-elles pas de tels liens intermédiaires ? La géolo-
gie ne révèle assurément pas une chaîne organique fine-
ment graduée; c'est sans doute là la plus sérieuse objection
que l'on puisse soulever contre ma théorie33.

Il est clair que la théorie de Darwin pose d'énormes


problèmes, particulièrement quand on l'applique aux humains.
Après qu'elle eut été remise en question pendant un siècle et demi
par certains des meilleurs esprits de notre temps et qu'elle eut
fait l'objet d'enquêtes sérieuses menées sous les auspices des plus
prestigieuses universités du monde, les problèmes subsistent. Ces
faits troublants ont conduit un nombre croissant de scientifiques
à aborder sous un autre angle la question des origines de la vie.
Ils nous offrent maintenant un tout nouveau point de
vue, fondé sur une question scientifique qui va directement au
cœur de notre existence : existons-nous en raison d'un plan
cosmique qui constitue les fondements de la complexité de la
vie? Autrement dit, sommes-nous ici intentionnellement? Si c'est
le cas et si la vie reflète une intention, tout comme la présence
d'une montre suppose celle d'un horloger, qui ou quoi en est
alors le concepteur ?
187
Vérité essentielle

Certains des meilleurs esprits de notre époque soupçonnent


la vie d'être une conception intentionnelle s'ajoutant au proces-
sus reconnu de la nature. Nous avons commencé ce chapitre en
posant la question suivante : qui sommes-nous? Nous pouvons
maintenant affirmer avec une certitude raisonnable que nous
sommes plus que ce que nous avons jamais osé imaginer et que
nous sommes aussi peut-être capables de tout ce dont nous avons
jamais rêvé. Même pour le plus sceptique des scientifiques, de
plus en plus de preuves indiquent que la force d'un certain type
de schème - une conception d'origine inconnue - sous-tend notre
existence et implique la présence d'une intelligence supérieure.

La vie : le produit d'une intention ?


De la même façon que la théorie de Darwin est représentée
par une expression qui en résume le contenu - l'évolution par
sélection naturelle-, l'explication de rechange, celle d'un plan
cosmique reflété dans la vie, porte également un nom : la théo-
rie de la conception intelligente. Selon le Center for Science and
Culture, un programme d'aide aux scientifiques et aux experts
qui examinent les preuves d'une conception intelligente, cette
théorie «soutient que certaines caractéristiques de l'univers et des
êtres vivants s'expliquent mieux par une cause intelligente que
par un processus aveugle comme la sélection naturelle34 ». Bien
que l'expression elle-même fût employée avant la publication du
premier livre de Darwin en 1859, par exemple dans des publica-
tions comme Scientific American (1847), elle est devenue d'usage
courant à la fin du xxe siècle.
Même si certains membres de la communauté scientifique
continuent à se demander si la nouvelle approche et les études
qui lui sont associées sont vraiment scientifiques, il n'en demeure
pas moins que les enquêtes sont menées par des professionnels
appartenant à des disciplines scientifiques reconnues, en utilisant
des méthodes scientifiques pour répondre aux questions que les
scientifiques du courant dominant ne se sont pas posées.
188
Par hasard ou délibérément ...

Avant que l'expression «conception intelligente» ne devienne


populaire en 1989, une autre théorie de rechange était présente
comme mouvement: le créationnisme. Tout comme les adeptes de
la théorie de Darwin s'appellent les darwinistes, ceux de la théo-
rie de la création s'appellent les créationnistes. Bien que le camp
de ces derniers compte plusieurs points de vue (le créationnisme
vieille-terre, le créationnisme jeune-terre et le créationnisme
progressif'), le thème général des trois est fondé sur le même prin-
cipe : un ou plusieurs êtres surnaturels - un dieu ou des dieux-
ont créé la vie, les humains et la nature. Je mentionne ici cette
théorie pour la distinguer de celle de la conception intelligente.
Bien que l'on associe souvent la théorie de la conception
intelligente à la théorie créationniste, elle ne lui est pas liée sous
sa forme la plus pure. La théorie de la conception intelligente ne
tente pas d'identifier une intelligence responsable des schèmes
de la nature et de la vie. Elle n'affirme même pas qu'une telle
intelligence existe. Elle propose simplement que la vie, plus parti-
culièrement la vie humaine, résulte d'une conception fondée sur
des processus complexes qui n'ont pas évolué naturellement. Bien
que certains partisans de la théorie de la conception intelligente
croient fortement que Dieu est en fait le concepteur, cette science
elle-même ne va pas aussi loin.
Dans la section précédente, nous avons résumé les hypothèses
clés de la théorie évolutionniste. J'aimerais faire de même pour
la théorie de la conception intelligente, puis examiner chaque
hypothèse en détail. La théorie de la conception intelligente est
fondée sur deux hypothèses clés :

• Hypothèse 1 de la théorie de la conception intelli-


gente: il existe un ordre dans l'univers.
• Hypothèse 2 de la théorie de la conception intelli-
gente: les complexités des systèmes vivants s'expliquent
mieux par un processus dirigé que par un processus
aléatoire.

189
Vérité essentielle

En termes profanes, l'idée générale de la théorie de la concep-


tion intelligente, c'est que les systèmes complexes et enchevêtrés
qui forment la base de l'univers sont si finement « accordés» pour
la vie qu'ils n'ont pu apparaître par hasard. Dans la même veine,
toujours selon la théorie, les complexités de la vie en général et de
la vie humaine en particulier ne peuvent être un accident biolo-
gique résultant de mutations aléatoires sur de longues périodes.

Une montre dépourvue de ses parties est-elle encore une


montre?
L'un des arguments clés de la théorie de la conception intelli-
gente réside dans la complexité même de la vie et dans les impro-
babilités astronomiques que la machinerie complexe de la cellule
ou le système d'information de la molécule d'ADN se soient
formés spontanément comme résultat d'un processus aveugle
sur une longue période de temps. Dans De l'origine des espèces,
même Darwin a fait remarquer à quel point il était improbable
que la sélection naturelle soit la seule responsable de la grande
spécialisation que nous observons dans les organes et les tissus.
Il donnait comme exemple la complexité de l'œil, en affirmant
ceci : «J'avoue qu'il semble éminemment absurde de supposer que
l'œil, avec son inimitable habileté à ajuster le foyer à différentes
distances [...], aurait pu être formé par sélection naturelle 35. »À
la suite de cette observation et d'autres semblables, Darwin nous
a laissés tirer nos propres conclusions quant à la force ou aux
forces additionnelles qui pourraient être responsables de la nature
complexe de la vie.
De même, quand on demanda à Francis Crick, prix Nobel
codécouvreur de la molécule d'ADN, s'il était possible que la vie
soit apparue à la suite d'une série de circonstances fortuites, il a
répondu ceci:« Un homme honnête, armé de tout le savoir dont
nous disposons maintenant, pourrait seulement affirmer qu'en
un certain sens l'origine de la vie apparaît présentement comme

190
Par hasard ou délibérément ...

un miracle ou presque, tellement sont nombreuses les conditions


qui auraient dû être remplies pour qu'elle se poursuive36. »
Charles Darwin a fait ses observations en 1859. Presque un
siècle plus tard, avec l'avantage d'énormes progrès sur le plan
de la science et des méthodes expérimentales, Crick est arrivé à
des conclusions identiques. La nature complexe de la vie est le
thème de ces affirmations de Darwin, de Crick et des partisans
modernes de la théorie de la conception intelligente. Darwin
n'avait aucun moyen de savoir ce que nous savons aujourd'hui des
cellules et de l'ADN. Reconnaissant cela, 1. L. Cohen, mathéma-
ticien et membre de l'Académie des sciences de New York, l'a
résumé mieux que je ne saurais le faire : «À ce moment-là, alors
que nous avons compris le système ADN/ARN, le débat entre
les évolutionnistes et les créationnistes aurait dû cesser [... ]. Les
implications de l'ADN/ARN sont claires et évidentes37. »

Une complexité irréductible


La déclaration de Cohen nous fournit une clé pour
comprendre le rôle de la théorie de l'évolution dans notre
actuelle vision du monde. Quand Darwin a créé sa théorie, il
n'avait aucun moyen de savoir que même la plus simple bactérie,
le procaryote unicellulaire E-coli, requiert 2000 protéines diffé-
rentes pour exister et que chacune de ces protéines comporte en
moyenne 300 acides aminés qui font d'elle ce qu'elle est. Il ne
pouvait tout simplement pas connaître le degré de complexité
des éléments de base de la vie. L'un des plus forts arguments
pour la théorie de la conception intelligente est précisément cette
complexité ainsi que le fait que plusieurs des systèmes de la vie
manifestent ce qu'on appelle une complexité irréductible.
Cette expression technique exprime une idée très simple.
Elle signifie essentiellement que si une partie quelconque d'un
système cesse de fonctionner, tout le système tombe en panne.
On emploie souvent la comparaison de la montre, comme nous

191
Vérité essentielle

l'avons vu plus haut, ou du piège à souris pour illustrer cette idée.


Quand toutes les parties d'un piège à souris sont en place, celui-
ci fait ce pour quoi il a été conçu : il piège une souris ou tout
autre petit animal qui prend le fromage ou le beurre d'arachide
placé en guise d'appât et déclenche ainsi un levier qui lui assène
un coup mortel.
Pour qu'il fonctionne comme prévu, le piège est formé d'un
système de pièces dont chacune accomplit une tâche spécifique
menant au but recherché. Par exemple, il y a le délicat levier qui
tient l'appât et le puissant ressort qui retombe si fortement et si
rapidement quand l'appât est bougé que la souris ne sait même
pas ce qui l'a frappée. Le piège est un appareil très simple, mais
il ne fonctionnera pas s'il lui manque une seule de ses pièces.
Sans le ressort, le levier ne claquera pas. Sans le levier, le ressort
n'aura rien à déclencher. Parce que toutes les pièces sont néces-
saires pour que le système fonctionne, on peut dire que le piège à
souris ne peut pas fonctionner si on le prive de l'une d'elles. Voilà
donc un exemple de complexité irréductible.
La technologie avancée de notre époque nous a révélé de
nombreux exemples de la complexité irréductible de la vie.
Nous savons tous que le corps saigne brièvement quand nous
nous coupons un doigt ou quand nous nous éraflons un genou
et qu'ensuite le saignement cesse. Il cesse parce que le sang se
coagule à l'endroit de la blessure. Nous considérons la coagu-
lation comme allant de soi, mais c'est un autre bel exemple de
complexité irréductible.
Vingt protéines différentes doivent être présentes pour que le
sang se coagule et que le saignement cesse. Ce qui est intéressant,
c'est que si l'une des protéines est absente, le mécanisme de la
coagulation ne fonctionnera pas. Le saignement se poursuivra
alors jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de sang dans le corps. Les vingt
protéines doivent toutes travailler de concert pour exécuter leur
fonction.
En termes d'évolution, cela signifie que les vingt protéines
nécessaires devaient déjà être formées, et toutes au même endroit,

192
Par hasard ou délibérément ...

avant que le sang qui donne la vie à notre corps puisse se consti-
tuer. Voilà un exemple d'une fonction vitale qui n'aurait pu appa-
raître par l'évolution. Ce n'est pas la seule. Les cils vibratiles qui
permettent aux cellules de se déplacer dans le fluide possèdent
plus de quarante parties mobiles qui doivent toutes être présentes
pour que la cellule puisse nager. S'il leur manque une seule
partie, la cellule ne peut pas se déplacer.
On dit que la cellule humaine est la pièce de machinerie la
plus complexe que l'on connaisse. Jusqu'au milieu du xxe siècle,
on considérait les cellules essentiellement comme des petits sacs
de produits chimiques. Nous savons maintenant que la vérité est
tout autre. En fait, si nous pouvions agrandir une cellule pour
qu'elle ait la taille d'une petite ville, sa complexité surpasserait
celle de l'infrastructure nécessaire au fonctionnement d'une
municipalité. La structure d'une cellule comporte:

• Des ribosomes qui fabriquent les protéines.


• Le réticulum endoplasmique qui fabrique et trans-
porte d'importantes substances chimiques utilisées
par la cellule.
• Un noyau qui transporte les instructions relatives au
fonctionnement de la cellule.
• Les microtubules qui permettent à la cellule de se
déplacer et de changer de forme.
• Les cils vibratiles qui permettent à certaines cellules
de se déplacer dans le fluide.
• Les mitochondries qui produisent de l'énergie pour
la cellule.
• Une membrane qui communique avec l'environne-
ment et détermine ce qui pénètre dans la cellule et
ce qui en sort.

193
Vérité essentielle

Ce n'est là qu'un échantillon des parties fonctionnelles


impliquées dans des processus qui ont lieu à tout moment - par
exemple, en cet instant même où vous lisez ces lignes - dans
chacune des 50 milliards de cellules de notre corps. À mesure que
nous découvrons la fonction de chacun des processus, il devient
évident que toute la machinerie cellulaire devait déjà exister et
être en place pour que nos premières cellules puissent faire ce
qu'elles font. De la coagulation du sang aux cils vibratiles, voilà
de magnifiques exemples de complexité irréductible.

Par choix ou par hasard


Dans son manuel classique intitulé Biologie moléculaire
du gène, James D. Watson, prix Nobel et codécouvreur de la
molécule d'ADN, décrit ainsi l'unicité et le mystère des cellules
vivantes: «Nous devons admettre immédiatement que la struc-
ture de la cellule ne sera jamais comprise de la même façon que
celle de la molécule d'eau ou de glucose. Non seulement la struc-
ture exacte de la plupart des macromolécules contenues dans la
cellule demeure inconnue, mais nous ne pouvons connaître que
vaguement l'emplacement relatif38 de ces macromolécules. »
Dans le processus qui se déroule dans l'usine miracle de
chaque cellule de notre corps, quelque chose semble défier toute
explication par la pensée traditionnelle et les connaissances clas-
siques. Par conséquent, le message encodé dans chacune de nos
cellules revêt une signification encore plus grande.
Dans la nature, l'ordre est souvent vu comme un signe
d'intelligence. L'existence de schèmes prévisibles et reproduc-
tibles pouvant se représenter par des formules universelles est
un exemple de ce que signifie ce mot. Au cours d'entrevues
informelles vers la fin de sa vie, Albert Einstein a fait part de sa
croyance qu'un tel ordre sous-jacent existait dans l'univers, ainsi
que de son impression quant à l'origine de cet ordre. Durant
l'une de ces conversations, il a confié ceci : «Je vois un schème,

194
Par hasard ou délibérément ...

mais mon imagination ne peut s'en représenter le créateur [...].


Nous dansons tous sur un air mystérieux joué au loin par un
musicien invisible39 • » Dans notre recherche du sens de la vie, la
présence même de l'ordre est vue souvent comme un signe de
l'existence du «musicien invisible» dont parlait Einstein.
Même pour le scientifique le plus sceptique, il est évident
que l'ADN de la vie ressemble à une séquence d'information
complexe, à un programme disant à nos cellules .quoi faire et
quand. Même si les théories de la conception intelligente et de
l'évolution nous offrent d'utiles aperçus sur la nature de nos
origines, nous découvrirons peut-être que la fusion des concepts clés
des deux théories offre la meilleure explication des preuves obser-
vées jusqu'ici.
Une telle théorie hybride de la création tient compte des obser-
vations de l'évolution en affirmant que notre monde est ancien et
que les processus géologiques s'étendent, en fait, sur de longues
périodes. De plus, elle incorpore la vision de la conception intel-
ligente selon laquelle une force spéciale dépassant ce qui est
connu ou reconnu aujourd'hui par les scientifiques traditionnels
est responsable de la mise en mouvement des conditions dans
lesquelles la vie terrestre est apparue ainsi que de l'activation du
code génétique qui se produit précisément à trois divisions cellu-
laires après la fertilisation, alors que nous sommes des créatures
octocellulaires.
Pour dépasser le statisme de la controverse opposant la théo-
rie de l'évolution et celle de la conception intelligente, il s'agit
de définir ce que nous recherchons : une confirmation ou une
preuve?

Quand il s'agit de l'évolution par opposition à la


conception intelligente, recherchons-nous une
confirmation ou une preuve?

195
Vérité essentielle

Si nous recherchons une preuve pour soutenir l'une ou l'autre


théorie, nous devons alors être honnêtes : nous ne la trouverons
sans doute jamais. La seule façon dont nous pourrions réellement
prouver la validité de l'une ou l'autre des théories, ce serait d'être
directement témoins du processus. À moins d'un progrès quan-
tique dans la technologie du voyage dans le temps, cependant,
on peut dire tout simplement que «ça n'arrivera pas», car quel
que soit le phénomène qui s'est produit il y a longtemps pour
donner naissance à la vie en général et à la vie humaine en parti-
culier, nous n'étions pas là pour l'observer. De toute évidence,
le mieux que nous puissions espérer, c'est une confirmation. La
confirmation que nous trouverons pour les deux théories, ainsi
que notre volonté d'accepter ce que nous découvrirons, finira par
nous conduire à la vérité de nos origines.
Nous avons déjà agi ainsi avec des idées qui ne concordaient
pas avec de nouvelles découvertes et cela nous a conduits à
certaines des plus grandes révolutions de l'histoire des connais-
sances humaines. Quand l'idée newtonienne voulant que l'atome
soit une «chose» a cédé la place aux découvertes quantiques indi-
quant que l'atome était plutôt énergie, le monde de la physique
en fut transformé à jamais. Les idées de Newton fonctionnaient
assez bien pour permettre à la science d'avancer jusqu'à ce que
de nouveaux progrès ouvrent la porte à une meilleure compré-
hension. Nous assistons précisément au même processus en cher-
chant à connaître nos origines.
Pour l'instant, une théorie composite incorporant des
éléments de la théorie de la conception intelligente et de celle de
l'évolution semble être notre meilleure explication du mystère
et du miracle de la vie. Tout en reconnaissant les preuves maté-
rielles découvertes jusqu'ici, elle permet également l'intuition que
nous faisons partie de quelque chose de plus grand, une intuition
partagée par la majorité des habitants de notre monde.
Il est clair que la question des origines de la vie a d'impor-
tantes conséquences. Pour certaines personnes, l'exploration de ce
sujet ouvre la porte à des possibilités dérangeantes. Pour pénétrer

196
Par hasard ou délibérément ...

nos plus anciens mystères, nous devons nous voir différemment


dans nos relations mutuelles et aussi dans notre rapport à la vie.
Cela signifie que nous devons tout changer : le recours à la guerre
pour résoudre les conflits, le moment que nous choisissons pour
mettre fin à une vie humaine ainsi que la méthode utilisée, que
ce soit l'avortement, l'euthanasie ou le génocide.
Ce sont précisément ces réponses qui sont nécessaires
pour nous éloigner des émotions profondément enracinées qui
imprègnent chaque secteur de notre société, des systèmes d' édu-
cation aux systèmes médicaux. Nous ne sommes peut-être pas
tous d'accord sur la façon de traiter la vie, mais maintenant,
en présence des faits, nous avons davantage que des émotions
pour fonder nos croyances. De toute évidence, ce que nous ne
savons pas, et la signification que nous accordons à ce que nous
ne savons pas, indique la direction des prochaines découvertes.

Vérité 5 : Grâce à des technologies de pointe, plusieurs


domaines scientifiques recueillent des preuves indubi-
tables confirmant que l'humanité résulte d'une concep-
tion mise en œuvre spontanément et qu'elle n'est pas le
produit de l'évolution d'une forme de vie ayant émergé
au hasard sur une longue période.

197
CHAPITRE 6

LA GUERRE NE FONCTIONNE
PLUS : POURQ1JOI NOUS
SOMMES GÉNÉTIQ1JEMENT
PROGRAMMÉS POUR LA PAIX

« Nous vivons dans un monde de géants nucléaires et de


nains éthiques. Nous en savons davantage sur la guerre
que sur la paix, sur les tueries que sur la vie. »
- GÉNÉRAL OMAR N. BRADLEY (1893-1981).
EX-PRÉSIDENT DES ÉTATS-MAJORS INTERARMES

Avant sa mort, survenue en 1984, le cinéaste Sam Peckinpah


a dit ceci : «Chaque être humain est porteur d'une grande
violence. Si cette dernière demeure incomprise et non dirigée,
elle s'exprimera par la guerre ou par la démence1• »
Ces paroles de Sam Peckinpah reflètent la pensée dirigeante
quant à la violence humaine. Dans toutes les salles de cours et

199
Vérité essentielle

tous les manuels d'histoire du monde, on enseigne que les guerres


entre les peuples sont un phénomène aussi naturel que l'alter-
nance du jour et de la nuit, et qu'il en est ainsi depuis la nuit des
temps. Qu'il s'agisse des hommes et des femmes des cavernes qui
vivaient il y a dix mille ans ou bien des scientifiques fictifs traver-
sant un portail qui les projette un siècle plus tard dans l'univers,
nous sommes tellement habitués à nous considérer comme une
espèce belliqueuse que nous nous attendons à voir des scènes de
combats armés dans toute histoire humaine.
Évidemment, des dizaines d'études d'experts comme l'ar-
chéologue Lawrence H. Keeley, de l'Université de l'Illinois,
auteur des Guerres préhistoriques, contribuent à cette vision
de nous-mêmes. Se fondant sur l'interprétation érudite de ses
observations, Keeley est d'avis que la guerre est l'état naturel des
affaires humaines. Il écrit: «La guerre s'apparente au commerce.
Tous les humains la font 2 • »
Bien sûr, il est facile d'accepter ce genre de généralisation
abusive, mais celle-ci pose un gros problème, car elle n'est tout
simplement pas étayée par les faits. De nouvelles découvertes nous
ont conduits à une étonnante conclusion quant aux origines de la
guerre et du rôle qu'elle joue dans notre vie. En effet, les preuves
archéologiques récentes de l'existence des plus anciennes civilisa-
tions terrestres connues (Gobekli Tepe, le golfe de Khambhat et
Caral) indiquent que la guerre est peut-être en fait une habitude
qui s'est développée durant le présent cycle de 5 000 ans, plutôt
qu'un mode de vie naturel. Voilà un bel exemple où de fausses
hypothèses basées sur une information partielle mènent à une
justification de la violence comme option valable pour nous.
La découverte des plus anciennes civilisations terrestres
repousse notre histoire, ainsi que celle de la guerre et de la paix,
à la fin de la dernière ère glaciaire. La vision de nos ancêtres
qui émerge de cette datation nouvelle nous fournit un tableau
entièrement neuf de notre passé. Un nombre croissant de preuves
scientifiques indiquent que les guerres sur une grande échelle
comme celles que nous menions il y a un millénaire ne sont pas

200
La guerre ne fonctionne plus ...

du tout la pratique commune qu'on nous a fait croire. En réalité,


l'absence d'armes offensives et de mesures défensives, telles
que des murs protecteurs, chez ces civilisations indique que les
guerres sont liées à des conditions extrêmes comme les change-
ments climatiques et qu'elles ne constituent nullement un mode
de vie tout au long de l'histoire.
R. Brian Ferguson, professeur d'anthropologie à l'Université
Rutgers, fait partie du nombre croissant de scientifiques qui sont
en désaccord avec la vision traditionnelle de la guerre dans la
société humaine. « De mon point de vue, les archives archéo-
logiques planétaires contredisent l'idée que la guerre a toujours
constitué une caractéristique de l'existence humaine», dit-il.
Il résume ainsi l'essentiel des preuves nouvelles : «Les archives
démontrent plutôt que la guerre est largement un développement
survenu au cours des dix derniers millénaires3. »
La période mentionnée par Ferguson est fascinante, car elle
correspond à deux des longs cycles climatiques de 5 000 ans
décrits par les traditions indigènes comme étant les « grands âges
du monde». Autrement dit, l'actuel âge du monde, qui a débuté
il y a 5000 ans (ce qui est la durée de l'histoire de la civilisation
généralement acceptée), est la période au cours de laquelle ont eu
lieu les guerres étudiées par Keeley. La guerre a peut-être été une
activité courante durant le présent cycle de la civilisation, mais
elle ne constitue pas toute l'expérience humaine. Quelque part en
route, nous avons appris à résoudre nos problèmes par la guerre,
mais les preuves les plus récentes indiquent toutefois que ce n'est
pas là notre tendance naturelle.
Des déserts du Sud-Ouest américain aux montagnes péru-
viennes et aux déserts de Turquie, de nouvelles découvertes
démontrent que la rareté des conflits semble appuyer la thèse de
Ferguson. Les cycles de la guerre semblent posséder un flux et
un reflux, et ce n'est peut-être pas une coïncidence si ces flux et
reflux sont liés aux grands changements climatiques comme ceux
que nous observons aujourd'hui dans le monde. À la lumière de
ces nouvelles découvertes, la question qui se pose maintenant ne

201
Vérité essentielle

porte plus sur la cause des guerres de !'Antiquité, mais sur celle
de leur absence chez les plus anciennes civilisations.
Reconnaissant les nouvelles découvertes, Steven Pinker,
professeur de psychologie à l'Université Harvard, pense qu'il
serait pertinent de repenser les hypothèses traditionnelles sur les
causes de la guerre et de se concentrer sur le concept de paix. Au
lieu de nous demander pourquoi il y a des guerres, dit-il, nous
devrions poser la question différemment ou même en formuler
une autre. Nous pourrions nous demander, par exemple, pour-
quoi il y a la paix4 •
Son raisonnement est clair. Si nous pouvons trouver la cause
du flux et du reflux de la violence à grande échelle, nous trouve-
rons peut-être aussi le moyen de contrer la plus grande menace
à laquelle fait face l'humanité d'aujourd'hui. Reconnaissant la
tendance actuelle à une diminution de la violence et le fait qu'il
doit alors y avoir quelque chose de bon dans nos agissements,
Pinker dit ceci : « Il serait bien de savoir quoi exactement. »

le mystère de Chaco Canyon


«Une fois que l'on a entendu ce son, impossible de l'oublier.»
La voix de l'homme d'apparence surannée qui m'a dit cette
phrase résonne encore dans ma tête. Il avait raison. La grande
quantité de quartz contenue dans le sable sur lequel je marchais
produisait un son étrange, un craquement aigu qui se répercutait
sur les murs de grès du canyon s'élevant autour de moi. À chacun
de mes pas, le son du pas précédent s'estompait en même temps
que celui du pas suivant atteignait mes oreilles en se mêlant au
bruit du vent pour former un refrain continu accompagnant ma
marche.
Je trouvais paradoxal que chaque grain de sable ou de quartz
craquant sous mes pas ait déjà été enfermé dans le grès durci des
falaises bordant la piste. Sous d'innombrables tempêtes et inon-
dations ainsi que par des années de gel et de dégel, de minuscules

202
La guerre ne fonctionne plus ...

grains se sont détachés des murs pour devenir des fragments


encore plus petits craquant sous mon poids.
C'était par un matin de fin d'août, dans le haut désert
des Four Corners («les quatre coins»), une région au nord du
Mexique. J'avais rencontré ce vieil Amérindien sur la piste, plus
tôt ce matin-là. Pour des raisons que ni lui ni moi ne mettions
en doute, nous avions été attirés tous les deux vers le même site
cérémoniel, le même jour à la même heure. Nous avons alors
cheminé ensemble sur la piste sableuse qui se déroulait parallèle-
ment aux falaises jaunâtres s'élevant du fond de la vallée. Nous
étions venus là tous les deux pour apprendre quelque chose du
passé, lui de ses ancêtres par leur voix dans les cavernes, moi des
temples, des dessins et des indices qu'ils avaient laissés derrière
eux.
« Ici, il n'y avait pas de guerres », me dit cet homme au
moment où nous nous arrêtions tout près d'un monticule pour
reprendre notre souffle. «Les gens qui vivaient ici n'avaient pas
besoin de faire la guerre. »
Je lui demandai alors : «Vraiment? Comment le sait-on?»
Il me répondit ceci : «C'est l'un des plus grands mystères que
découvrent les scientifiques quand ils font des fouilles ici. Ce lieu
nous semble énorme, mais ce n'est qu'une partie de la commu-
nauté qui était établie ici. Plus de quatre mille personnes vivaient
dans cette vallée et dans ces constructions », me dit-il en ouvrant
les bras vers la vallée qui s'étendait devant et derrière nous. «Mais
ces gens vivaient pacifiquement. On n'a trouvé ici aucune arme.
Aucune. Il n'y a aucune trace de guerre. Aucune. Il n'y a pas de
fosses communes, pas de cendres, pas de cimetière. » Et il conclut
par cette phrase : «Nos ancêtres n'en avaient pas besoin, car ils
avaient appris à vivre autrement. »
J'écoutais très attentivement ce que me disait mon ami
amérindien. Ce qu'il ne savait pas, ce qu'il ne pouvait pas savoir,
c'est que l'information qu'il me livrait ce matin-là constituait la
raison même pour laquelle j'étais venu dans ces lieux.

203
Vérité essentielle

Nous nous trouvions sur le site de Chaco Canyon, au


Nouveau-Mexique, un endroit unique au monde. Ce site est
un mystère pour plusieurs raisons. Une multitude de théories
existent, qui tentent d'expliquer ce que nous voyons là, mais, en
vérité, nous ne savons pas grand-chose des anciens habitants de
Chaco Canyon. Nul ne sait où ils sont allés ni pourquoi ils ont
disparu. On ne peut être sûr de rien, car ils n'ont laissé aucun
témoignage écrit, pas sous une forme que nous connaissons
aujourd'hui du moins.
Ce que nous savons, par contre, c'est que, dans ce lieu qui est
l'un des plus isolés et des plus hostiles d'Amérique du Nord, un
peuple mystérieux venu de nulle part a construit, pour des raisons
qui restent obscures, des habitations, des communautés et des
centres cérémoniels sur une échelle sans précédent pour l'époque
et les suivantes. Ce peuple semble être arrivé là avec toute sa
technologie. Autrement dit, ces gens-là n'ont pas commencé par
un mode de vie primitif pour évoluer lentement, par étapes, sur
une longue période jusqu'à parvenir à cette sophistication qui
distingue ce site des autres de la région. Presque du jour au lende-
main, ils ont possédé le savoir-faire architectural nécessaire pour
construire des maisons de quatre étages et pour créer des réser-
voirs et des structures de détournement de l'eau afin de capter le
précieux liquide. Il en a résulté une agriculture qui a pu soutenir
une importante population et qui a atteint son sommet au début
du xne siècle de notre ère.
Même si, apparemment, ces gens ne connaissaient pas la
roue, ils ont construit des routes parfaitement droites s'étendant
sur des centaines de kilomètres dans toutes les directions, des
routes que l'on a reconnues comme telles grâce aux images four-
nies par les missions spatiales Apollo de la NASA au cours des
années 1970. Aussi subitement qu'ils sont apparus, ces gens ont
disparu. Bien que certaines théories attribuent leur disparition à
une sécheresse prolongée ou à d'autres phénomènes climatiques
extrêmes, nul ne sait vraiment qui ils étaient, d'où ils venaient et
pourquoi ils sont partis.

204
La guerre ne fonctionne plus ...

Mon vieux camarade avait raison. Après un siècle de


recherches, de fouilles difficiles et d'une étude intensive de la
tradition orale des descendants de ce peuple, on n'a toujours pas
trouvé de traces de guerres à Chaco Canyon. Le site ne comporte
aucun des murs protecteurs que l'on s'attendrait à voir dans un
complexe aussi énorme, aucune arme, aucune fosse commune ni
aucun squelette mutilé.
Comme s'il avait lu dans mes pensées, mon compagnon
amérindien répondit à ma question suivante avant même que je
la pose. Je me demandais en fait pourquoi ce site avait été choisi
pour construire un complexe aussi vaste. Pourquoi là?
«Ils l'ont construit ici en raison de ce qui se trouve sous le
sol, me dit-il. Chaco n'est pas le premier site à avoir existé ici.
C'est seulement le plus récent. Il est construit par-dessus celui
qui se trouvait ici auparavant, lequel avait été construit sur le
précédent ... »
Bien sûr, je le croyais, mais il me fallait quand même lui
demander ceci : «Comment pouvons-nous en être sûrs? Comment
savoir réellement qu'il y avait autre chose ici avant cet ancien
temple?»
Il n'eut aucune difficulté à répondre à ma question : «Les
Anciens nous le disent. »
Leurs histoires maintiennent vivant le souvenir de leurs
ancêtres, lesquels conservaient le souvenir de leurs propres
ancêtres.

•••
C'est seulement en 1993 que la science moderne a pu confir-
mer les histoires ancestrales. À l'époque, alors que je dirigeais
un groupe dans la région, nous avons rencontré une équipe de
chercheurs universitaires près de l'un des principaux sites de
Chaco Canyon. Ces chercheurs se trouvaient dans la région avec
un équipement de télédétection pour chercher des preuves d'une

205
Vérité essentielle

civilisation antérieure qui aurait existé à Chaco Canyon avant


que soit construit ce que nous y voyons aujourd'hui. À l'aide d'un
radar sophistiqué, ils ont pu «voir» sous les constructions exis-
tantes dans l'une des parties du site les mieux préservées. Quand
j'ai demandé à voir de mes yeux ce qu'ils avaient trouvé jusque-là,
l'opérateur du radar me le montra avec plaisir.
Bien qu'il soit impossible de savoir avec certitude, sans faire
d'excavations, ce que nous montrait le radar, un processus qui
nécessiterait la destruction du temple mis au jour, on apercevait
vraiment les signes d'anciens édifices sous la surface. Encore une
fois, mon compagnon amérindien avait raison. Une civilisation
inconnue avait vécu là avant, ces vestiges le prouvaient.
Tandis que les rayons du soleil projetaient de longues ombres
sur la vallée, une question me tenaillait : pourquoi n'y avait-il
aucune trace de fosses communes, d'armes ni de combats? À l'ex-
ception de quelques squelettes d'une époque ultérieure découverts
dans quatre chambres, on n'a trouvé aucun vestige corporel dans
cette vallée autrefois habitée par 4000 personnes. Les habitants
savaient-ils quelque chose que nous ne savons plus aujourd'hui?
Avaient-ils découvert, tout comme leurs successeurs, un mode
de vie et de travail qui ne requérait pas la guerre que notre civi-
lisation considère comme allant de soi ? I..:avenir le dira, car les
excavations se poursuivent.

Pas de murs, donc pas de guerres


Lune des anomalies qui caractérisent à la fois Caral et Chaco
Canyon, c'est l'absence de tout indice de guerre. Il s'agit d'une
chose très inhabituelle pour un site qui fut aussi peuplé. Sur les
autres sites de cette envergure, on trouve les restes de grandes
armées enfouis dans des fosses communes avec des têtes et des
membres sectionnés, des entailles de hache dans les crânes et
d'autres blessures communes à tous les anciens champs de
bataille. Nous ne trouvons rien de cela ici. Nous ne trouvons non

206
La guerre ne fonctionne plus ...

plus aucune preuve que ces gens avaient besoin de se protéger


contre quoi que ce soit.
À Chaco Canyon comme à Caral, il n'existe pas de grands
murs protecteurs ni de fossés autour des complexes, alors qu'il
y en a partout où les gens avaient besoin de se protéger. En fait,
en regardant au-delà des Amériques, dans les endroits comme
Gobekli Tepe, la plus vieille civilisation terrestre connue, on
s'aperçoit que c'est seulement pour les civilisations plus« récentes»
des cinq derniers millénaires, comme celles de l'Égypte, de Rome
et de la Grèce ancienne, que la guerre était un mode de vie. Il est
évident que nous n'avons pas toujours été l'espèce belliqueuse que
nous sommes aujourd'hui. La question qui se pose est celle-ci :
pourquoi?
Nos ancêtres avaient-ils trouvé un moyen de régler leurs
problèmes sans recourir à la guerre? Dans ce cas, peut-être pour-
rions-nous nous débarrasser de nos habitudes violentes comme
nous le faisons de toute autre mauvaise habitude ? Considérant
la sophistication des armes modernes et la magnitude de leur
pouvoir destructeur, il est plus important que jamais d'aborder
ces questions irrésolues.

les guerres de nécessité


« Les murmures allaient bon train hier, à Oslo, dans le hall
Nobel, à l'annonce que Barack Obama obtenait le prix Nobel
de la paix 2009. Lincrédulité y était plus grande que l'approba-
tion5. » Cette phrase d'un article de l'édition du 10 octobre 2009
du Sunday Times de Londres eut son équivalent dans les quoti-
diens, les commentaires télévisés et les réactions des particuliers
partout dans le monde. Le président américain nouvellement élu
n'était en fonction que depuis onze jours et il dormait profondé-
ment à la Maison-Blanche au moment où l'annonce fut faite sur
un autre continent.

207
Vérité essentielle

Obama est le troisième président américain à recevoir le prix


Nobel de la paix pendant son mandat (Theodore Roosevelt l'a
obtenu en 1906 et Thomas Woodrow Wilson en 1919), mais ce
n'est pas sa position à la Maison-Blanche qui suscitait la contro-
verse. C'était plutôt le fait qu'il n'avait encore rien accompli
durant son mandat. Les commentaires publics de Lech Walesa,
ancien prisonnier politique, récipiendaire du prix Nobel de la
paix en 1983 et ex-président de la Pologne (1990-1995), résu-
maient l'opinion de plusieurs. Interrogé par des journalistes, il
répondit ceci : «Qui? Quoi? Si vite? Il n'a encore fait aucune
contribution à la paix. Il propose des choses, il en amorce, mais
il n'a encore rien accompli6 . »
Quand Obama monta sur le podium pour recevoir son
prix, neuf mois seulement après son inauguration, l'étonne-
ment médiatique qui en avait accueilli l'annonce céda la place
aux murmures de l'auditoire présent à la cérémonie. Cette fois,
c'était pour une raison différente. Ce président qui venait de
recevoir le plus prestigieux prix mondial pour la paix commença
son discours en prenant une position très impopulaire au sujet
de la guerre.
Il commença par énoncer une évidence : «Je suis le comman-
dant en chef des militaires d'une nation qui est deux fois en
guerre.» Il poursuivit : «Je suis responsable du déploiement de
milliers de jeunes Américains qui iront combattre en pays loin-
tain. Certains y tueront et d'autres y seront tués. Je suis donc
venu ici aujourd'hui avec un sens aigu du prix d'un conflit armé,
et conscient des questions difficiles liées à la relation existant
entre la guerre et la paix ainsi que de notre effort pour remplacer
l'une par l'autre7. »
Même si ces propos d'Obama furent critiqués par plusieurs,
ce sont ses paroles suivantes qui ont fait douter les gens du bien-
fondé de sa candidature à ce prix. Le président a abordé de front
l'idée de la guerre:« Nous devons d'abord reconnaître une vérité
difficile à accepter : nous ne réussirons pas à éradiquer la violence

208
La guerre ne fonctionne plus ...

de notre vivant8 • » Il alla ensuite beaucoup plus loin au lieu de


faire état simplement des conditions mondiales présentes.
Voilà qu'il nous disait tout à coup que nous ne devions pas
nous étonner de voir davantage de conflits armés, précisant qu'il
y aurait des conditions où la guerre serait non seulement inévi-
table, mais légitime. «Il y aura des moments où les nations, indi-
viduellement ou collectivement, trouveront que l'usage de la force
sera non seulement nécessaire, mais moralement justifié9 • »C'est
cette phrase qui a suscité la controverse, l'indignation et la mise
en question des mérites d'Obama comme récipiendaire du prix
Nobel de la paix. Y a-t-il vraiment des moments où la guerre est
l'unique solution? Aussi nécessaire qu'elle puisse paraître, y a-t-il
des moments où elle peut être « moralement justifiée» ?
Plusieurs lecteurs de ce livre se souviennent de deux guerres
auxquelles les États-Unis ont choisi de participer pour cette
même raison :

1. La première fut la Première Guerre mondiale, dont


le président Woodrow Wilson a dit en 1917 qu'elle
serait « la guerre qui mettrait fin à toutes les guerres »
(d'après une expression employée pour la première
fois par l'auteur H. G. Wells après le déclenchement
de cette guerre en Europe en 1914). Dans sa déclara-
tion au Congrès, Wilson affirma que les valeurs de la
civilisation étaient en jeu et que tout serait perdu si
l'Amérique n'apportait pas son aide à l'Europe.
2. La seconde guerre considérée comme «moralement
justifiée» par les Américains fut la Deuxième Guerre
mondiale, dans laquelle les États-Unis se sont enga-
gés le 8 décembre 1941, au lendemain de l'attaque
de la base navale de Pearl Harbor. Puisque l'ennemi
était évident, que les enjeux étaient clairs et que la
mission était réalisable, la Deuxième Guerre mon-
diale fut appelée «la bonne guerre».

209
Vérité essentielle

La guerre qui mettrait fin à toutes les guerres


Avant sa mort, survenue à l'âge de 96 ans, mon grand-père
me parlait pendant des heures du monde tel qu'il l'avait connu
à son époque. Il était né en Europe centrale au début du siècle
dernier et il commençait toujours ses histoires en me disant que
le monde d'aujourd'hui était très différent de celui de sa jeunesse.
Même si je savais qu'il disait vrai, chaque fois que j'écoutais ses
histoires, je savais encore plus ce qu'il voulait dire. Il me parlait
d'un monde où des chariots tirés par des chevaux se parta-
geaient les routes avec les automobiles nouvellement inventées,
où plusieurs foyers n'avaient pas l'électricité et où les téléphones
étaient rares. Dans ce monde, il n'existait pas d'autoroutes et les
toilettes intérieures étaient un luxe.
Chaque fois qu'il me parlait des gens qu'il avait connus et des
emplois qu'il avait occupés, le ton de son récit finissait toujours
par changer à un moment donné. Il arrêtait de sourire et sa voix
n'était plus la même alors qu'il se rappelait trois moments de sa
vie où le monde avait été transformé : la grande dépression et les
deux guerres mondiales. Même s'il s'agissait d'expériences diffé-
rentes, elles étaient liées.
Mon grand-père était trop jeune pour servir dans la Première
Guerre mondiale, mais l'envergure de ce conflit ainsi que les
ravages exercés sur ses amis, sur les familles et sur la vie quoti-
dienne en Europe avaient laissé des souvenirs qui étaient devenus
des cicatrices au moment de la « grande guerre» suivante. Selon
l'information à laquelle avait accès l'individu moyen, y compris
mon grand-père, la Deuxième Guerre mondiale fut un conflit
qui avait du sens, du moins pour les gens de l'époque.
Tout au long de cette guerre, les plus puissantes armées du
monde se sont affrontées : celles des États-Unis d'Amérique, de
la Grande-Bretagne et de la Russie, contre celles de l'Allemagne,
du Japon et, temporairement, de l'Italie. Officiellement, tout le
conflit a duré quatre ans. (Je dis «officiellement» parce qu'une
certaine école de pensée affirme qu'il n'a jamais vraiment pris fin.

210
La guerre ne fonctionne plus ...

Même si des traités furent signés et que les troupes sont rentrées
chez elles, le découpage du monde à la fin de la guerre conti-
nue d'être un facteur clé de l'antagonisme qui attise les guerres
d'aujourd'hui.)
L'expression «bonne guerre» est devenue très populaire
en 1984 parce qu'elle constituait le titre d'un livre dont l'au-
teur, Studs Terkel, a reçu le prix Pulitzer : La Bonne Guerre.
Histoires orales de la Seconde Guerre mondiale. Mais comment
une guerre peut-elle être bonne? Selon le livre de Terkel et les
histoires de mon grand-père, le coût énorme de la Deuxième
Guerre mondiale, en vies humaines et en destruction complète
de villes centenaires, semble aussi justifié que peut l'être celui de
toute guerre. La plupart des historiens s'accordent pour dire que
le nombre de victimes de cette guerre fut d'environ cinquante
millions de personnes. Cinquante millions de vies humaines!
Quand nous y réfléchissons bien, compte tenu de l'impor-
tance que revêt à nos yeux notre propre vie, ce bilan est inima-
ginable. Pour mettre les choses en perspective, disons que le
nombre de vies perdues lors de la Deuxième Guerre mondiale
fut d'environ 2,5 % de la population mondiale au moment où
se termina le conflit en 1945. Il y a aussi deux raisons pour
lesquelles la Deuxième Guerre mondiale était justifiée : Adolf
Hitler et Pearl Harbor.
Quand l'Amérique est entrée dans cette guerre, la raison
était évidente. Dans l'esprit de ceux qui, chez les Alliés, soute-
naient l'effort de guerre, les États-Unis avaient été attirés dans
le conflit et avaient réagi par la défensive. On savait clairement
qui était l'ennemi. L'objectif aussi était clair, et ce fut clair égale-
ment quand il fut atteint. Quand on considère tous les facteurs,
le bien-fondé de l'engagement américain dans cette guerre ne fait
aucun doute. C'était une guerre défensive exprimant le vieux
combat classique entre le bien et le mal, un combat pour mettre
fin aux horreurs de l'Allemagne d'Adolf Hitler et une réaction
aux tentatives du Japon pour imposer sa domination sur le
monde. Les guerres produisent toujours des malheurs, mais les

211
Vérité essentielle

Alliés considéraient les idées et les méthodes allemandes, et plus


tard celles du Japon, comme une menace inacceptable aux prin-
cipes de la liberté et aux démocraties du monde.
Bien que le monde du milieu du xxe siècle fût certes diffé-
rent de celui d'aujourd'hui, les raisons qui étaient alors invoquées
pour justifier la guerre de cette époque-là le sont encore, plus
d'un demi-siècle plus tard, pour justifier les guerres actuelles. S'il
y a certaines similitudes entre le début de la Deuxième Guerre
mondiale et celui de la guerre contre le terrorisme, elles dispa-
raissent rapidement au profit des différences quand on examine
la situation de plus près.
Dans le tableau qui suit, j'ai mis en évidence certaines des
similitudes et des différences. Dans la première grande guerre
du xx1e siècle, la guerre contre le terrorisme, l'ennemi n'est pas
clairement défini, du moins pas au sens traditionnel du terme.
Qu'il s'agisse de l'uniforme pittoresque des armées qui se sont
affrontées au cours de la guerre civile américaine du milieu du
x1xe siècle, de l'originalité des casques des combattants de la
Première Guerre mondiale, de la bannière étoilée ou des svastikas
et du soleil levant japonais figurant sur les drapeaux durant la
Deuxième Guerre mondiale, chaque côté a toujours été claire-
ment identifié par son costume, ses armes et par le reste. Aucun
uniforme ni symbole ne distingue les parties en cause dans la
guerre contre le terrorisme.
On croyait inévitables les deux grandes guerres mondiales.
Dans chaque cas, on pensait qu'il était impossible d'éviter le
conflit et l'on croyait que la cause était «juste». Cela peut s'expli-
quer par l'époque à laquelle ces guerres ont eu lieu. À la lumière
des différences entre cette époque et aujourd'hui, et compte
tenu de la puissance des armes modernes et de la technologie
actuelle, nous devons nous poser la même question encore une
fois : la guerre est-elle le meilleur moyen de régler nos problèmes
aujourd'hui?

212
La guerre ne fonctionne plus ...

LA DEUXIÈME GUERRE MONDIALE LA GUERRE CONTRE LE TERRORISME


1. Les ~tats-Unis s'y sont impliqués après une 1. Les ~tats-Unis s'y sont impliqués après une
attaque-surprise sur le sol américain et la attaque-surprise sur le sol américain et la
perte de 2 400 vies humaines perte de 2752 vies humaines.
2. La raison de faire la guerre était identifiable 2. La raison de faire la guerre est définie
et clairement définie. différemment par les parties.
3. L'ennemi était clairement identifié. 3. L'ennemi est nébuleux.
4. Les frontières du conflit étaient clairement 4. Les frontières du conflit sont nébuleuses et
identifiées : des lieux précis à l'intérieur des non limitées aux pays.
pays. 5. L'engagement des forces est vu d'un côté
5. L'engagement des forces avait lieu générale- comme un conflit militaire qui indut les pertes
ment entre des puissances militaires civiles dans le coût de la guerre. De l'autre
entrainées et préparées au combat. côté, on traite les cibles militaires ou civiles
6. La guerre s'est terminée par une entente au pareillement et on ne fait pas de distinction
bout de quatre ans. entre les deux.
6. La guerre contre le terrorisme dure depuis
une décennie et aucune fin n'est en vue.

Figure 6.1 : Comparaison entre la dernière grande guerre, soit la Deuxième Guerre
mondiale, et la présente guerre contre le terrorisme.

La mort de 2 400 personnes à Pearl Harbor justifie-t-elle


celle des 405 000 soldats américains qui ont péri au cours des
quatre années qu'a duré la guerre qui s'ensuivit? Je ne connais
pas la réponse à cette question. La mort de 2 752 personnes lors
de l'attaque contre le World Trade Center justifie-t-elle celle de
plusieurs milliers de soldats américains et britanniques ou appar-
tenant aux 139 autres pays maintenant engagés dans cette guerre
qui dure depuis dix ans ? La guerre est-elle réellement inévitable,
comme l'a affirmé Barack Obama dans son discours d'accepta-
tion du prix Nobel? Je ne connais pas la réponse à ces questions-
là non plus, mais je sais ce que je ressens.
Selon les individus à qui l'on pose ces questions, le moins
que l'on puisse dire, c'est que les sentiments sont partagés. C'est
toutefois précisément le genre de questions qui doivent être
posées alors que nous avançons à ce moment de l'histoire avec

213
Vérité essentielle

la forme de guerre qui caractérise notre monde actuel. Il s'agit


essentiellement de notre conception de la guerre elle-même.
Comme je l'ai mentionné plus haut dans ce chapitre, on croit
généralement que la guerre ainsi que ses précurseurs sociaux que
sont la violence et la haine font naturellement partie de la condi-
tion humaine. Si notre seul point de référence est l'histoire des
cinq derniers millénaires, il est facile de voir pourquoi.

Les premières guerres du monde


Durant ma tournée européenne de la fin des années 1990,
j'ai eu l'occasion de réaliser un vieux rêve en un seul après-
midi. Mon horaire chargé ne comportait qu'une seule journée
de congé. Je pris donc un taxi avec quelques autres auteurs et
amis afin d'aller dans un endroit que je désirais visiter depuis très
longtemps : le musée du Louvre, à Paris.
Lors de tous les pèlerinages et toutes les tournées que j'avais
menés en Égypte au cours de la dernière décennie, j'avais décou-
vert très souvent que les artefacts que je désirais voir ne se trou-
vaient plus dans ce pays. Certains, comme les pièces choisies de
l'exposition itinérante du roi Tut, se trouvaient alors à Londres,
à San Francisco ou à Chicago. D'autres étaient entreposés au
British Museum ou au Louvre.
Ce jour-là, j'ai pu voir le calendrier zodiacal du temple de
Dendérah, les grands obélisques qui n'étaient plus à Karnak, et
bien d'autres choses encore. Autant j'avais désiré contempler ces
artefacts, autant autre chose m'attirait également dans ce musée,
quelque chose qui ne provenait pas de l'Égypte: la plus ancienne
documentation des grandes guerres de l'histoire du monde.
Après avoir travaillé dans l'industrie de la défense pendant la
guerre froide, dans les années 1980, et avoir vu de près comment
le monde a failli être plongé dans une troisième guerre mondiale,
je voulais constater par moi-même depuis combien de temps les
humains se faisaient ainsi la guerre sur une grande échelle. Je
me disais que les anciennes archives répondraient à certaines de
214
La guerre ne fonctionne plus ...

nos plus vieilles questions. Par exemple : sommes-nous réelle-


ment « programmés » pour la guerre ? La guerre est-elle inscrite
dans notre nature, comme le croit Lawrence Keeley, ou n'est-elle
qu'une habitude enracinée dont nous pourrions nous défaire tout
comme nous l'avons acquise?
J'espérais qu'en comprenant les origines de la guerre, je
percevrais plus distinctement les conflits qui menacent le monde
actuel. Le meilleur endroit pour commencer : les plus anciennes
archives relatant les premières guerres du monde.
Les fragments de la dalle de pierre qui se trouvait sous mes
yeux comportaient des indices de réponse. Ils illustraient une
guerre entre deux armées survenue il y a 4 700 ans, à Sumer.
Découverts en 1881, ces fragments d'une stèle de calcaire
portent les détails de la guerre entre Lagash et U mma, deux pays
qui n'existent plus. Cette «stèle des Vautours», comme on l'ap-
pelle, se trouvait à quelques centimètres de mes yeux dans la salle
lA du Département des antiquités mésopotamiennes du Louvre
(voir la Figure 6.2). Bien qu'il n'en subsiste que des fragments,
ce que ces derniers illustrent est clair : des guerriers casqués et
revêtus de leur armure, tenant des lances et marchant en forma-
tion de combat. Il y a aussi des images des conséquences : des
vautours dévorant des cadavres sur le champ de bataille.
La stèle des Vautours est un rare artefact montrant que les
Sumériens étaient organisés et connaissaient bien les techniques
de la guerre à grande échelle, et ce, lors de la transition au dernier
âge du monde, soit durant l'époque biblique.

La stèle des Vautours est l'archive la plus complète, mais


elle n'est pas la seule à illustrer l'exercice de la guerre à l'époque
de Sumer. C'est aussi à cette époque que le roi Mebaragesi, le
premier nom inscrit sur la « liste des rois» sumérienne historique,
a déclaré la guerre à ses voisins, les Élamites. Ce faisant, il a
amorcé ce qui fut peut-être le premier conflit Iran/Irak, qui eut
lieu dans la région qui est maintenant celle de Basra, en Irak, un
bastion qui a joué un rôle clé dans la guerre d'Irak du présent
siècle.
215
Vérité essentielle

Figure 6.2 : Fragments de la stèle des Vautours au musée du Louvre, à Paris. Cette
stèle commémorant la victoire de Lagash sur Umma constitue l'archive la plus com-
plète de la plus ancienne guerre à grande échelle du monde. Au dessus : ce frag-
ment montre les plus anciennes images connues de soldats marchant en formation.
(Crédit: Eric Gaba/GNU Free Documentation License) En dessous: cette partie de
la même stèle illustre le nom donné à la stèle. Des vautours dévorent les cadavres
laissés sur le champ de bataille après le carnage. (Crédit : Eric Gaba/GNU Free
Documentation License)

216
La guerre ne fonctionne plus ...

Ce n'est sans doute pas une coïncidence si des archives aussi


lointaines des premières guerres connues remontent à la même
époque que celle où les historiens situent les débuts de la civili-
sation et de l'écriture. Ce que cela sous-entend, c'est que l' évo-
lution des communautés et des sociétés fut en réalité une arme
à deux tranchants. Parallèlement aux avantages de la sécurité
et d'un bon approvisionnement en nourriture et en ressources
domestiques, des désagréments inévitables ont fini par conduire
à la guerre.
S'il en est ainsi des civilisations ayant existé au cours des
cinq derniers millénaires, qu'en est-il des plus anciennes? Qu'il
s'agisse de celle de Gobekli Tepe, de Çatalhoyük (un campement
néolithique de Turquie) ou des constructeurs du grand sphinx
et de Caral, la guerre était-elle une activité commune aux civili-
sations antérieures à 5 000 ans ? Impossible de répondre à cette
question sans prendre en considération d'autres facteurs fournis-
sant le contexte historique. Les changements climatiques et la
compétition pour les terres et les ressources en voie de disparition
semblent faire partie de ce contexte.
Un cimetière situé près du Nil, au Soudan, nous offre un
exemple du comportement que peuvent susciter des changements
majeurs dans l'environnement. Cette découverte, répertoriée
simplement sous le nom de « Site 117 », fut effectuée grâce à des
excavations faites au début des années 1960 par l'archéologue
Fred Wendorf, de l'Université méthodiste du Sud. Des tech-
niques modernes de datation la situent maintenant à l'époque de
la dernière ère glaciaire, soit entre 12 000 et 14 000 ans. On ne
peut savoir avec certitude ce qui s'est réellement passé sur le site
117, sauf qu'il s'agissait d'une guerre quelconque qui, toutefois,
n'a pas eu du tout l'amplitude de celles qui ont eu lieu à Sumer.
Bien qu'aucun document de l'époque n'en fasse état, la décou-
verte de ce site constitue peut-être la preuve de la première guerre
de l'histoire de l'humanité.
Dans ce cimetière du désert, on a découvert 59 squelettes
humains, dont 24 semblent être ceux d'individus décédés lors

217
Vérité essentielle

d'une guerre. Plusieurs portaient les traces de projectiles appa-


rentés à des armes de guerre. R. Brian Ferguson, le professeur
d'anthropologie de l'Université Rutgers cité plus haut, établit
un lien important entre les preuves recueillies sur le site 117 et
les brusques changements climatiques survenus dans la région
à cette époque. «Les gens du site 117, affirme-t-il, vivaient une
crise écologique. En raison de pluies diluviennes accrues et de
la gorge profonde creusée par le Nil dans cette région, la plaine
alluviale est restée sèche, privant les habitants de poissons et de
leurs autres denrées habituelles10 • »
De tous les squelettes humains découverts à ce jour et âgés de
dix millénaires ou plus, seul un petit nombre portent les traces
d'une violence personnelle, note-t-il1 1. C'est un fait important à
souligner, car cela indique que le conflit observé sur le site 117 ne
relevait pas nécessairement d'un mode de vie, mais d'une réac-
tion à des conditions spécifiques, peut-être climatiques, ayant
amené les gens à s'opposer les uns aux autres pour survivre.
L'ancienneté des vestiges humains du site 117 peut nous aider
à comprendre les origines de la guerre chez les civilisations. Lors
du passage antérieur où il fut question de la datation de l' érec-
tion du sphinx, j'ai fait remarquer que la fin de la dernière ère
glaciaire avait apporté un changement climatique majeur dans
tout l'hémisphère nord. À cette époque comme à la nôtre, cela
se passait où se trouvait la plus grande partie des terres exposées
et où vivaient le plus grand nombre de gens. C'est à peu près à
la même époque, soit il y a 10 000 ans, que les premières guerres
ont eu lieu dans la région qui forme aujourd'hui le nord de l'Irak.
Les vestiges de trois fermes comportent des murs défensifs et des
armes telles que des massues et des pointes de flèche, ainsi que
des squelettes humains. Ce n'est peut-être pas une coïncidence si,
une fois contractée, l'habitude de faire la guerre a persisté sur ce
site jusqu'à l'époque moderne, ce que Ferguson appelle la «vraie»
mère de toutes les batailles.
Les preuves indiquent clairement que la guerre ne constituait
pas la norme avant le «début» traditionnel de l'histoire, que l'on

218
La guerre ne fonctionne plus ...

situe à 5000 ans avant aujourd'hui. Elle semble avoir été rare et,
quand elle est survenue, la preuve des combats semble coïncider
avec des changements climatiques. C'est seulement à l'époque de
Sumer, au début du présent âge du monde, que la guerre est sans
doute devenue familière.
Depuis ce temps, les humains se sont engagés sans cesse dans
une forme de guerre quelconque. La question qui se pose mainte-
nant est celle-ci : les raisons de faire la guerre existent-elles toujours
ou avons-nous atteint un point où les coûts dépassent les avantages?
Autrement dit, la guerre est-elle désuète?

La première guerre ingagnable de /'histoire


Après la Deuxième Guerre mondiale, la Russie et les États-
U nis n'avaient pas la même vision du monde. La différence était
due à deux philosophies distinctes, l'une fondée sur le commu-
nisme et l'autre sur le capitalisme. Même si les deux pays avaient
combattu ensemble contre un ennemi commun durant la guerre,
il était clair, après la signature des traités et l'établissement des
frontières entre les nations européennes et asiatiques, que deux
sphères d'influence distinctes étaient en compétition sur la scène
mondiale.
C'est sur cette scène que les deux superpuissances ont entre-
pris la« guerre froide», qui dura quarante-quatre ans. S'il est vrai
qu'à son début, en 1947, la guerre froide se trouvait à la fin d'une
longue liste de guerres vécues par l'humanité, il était également
évident qu'il ne s'agissait pas d'une guerre ordinaire, en raison de
la technologie qui avait produit les premières bombes atomiques
à la fin de la Deuxième Guerre mondiale.
C'était la première guerre de l'histoire connue dont les armes
des antagonistes avaient le pouvoir de dévaster le monde entier.
Les radiations atomiques et les retombées nucléaires, ainsi que
la possibilité que des tonnes de débris soient projetées dans l'at-
mosphère au moment de chaque explosion, n'avaient jamais été

219
Vérité essentielle

des facteurs en jeu lors des guerres précédentes. Pour la première


fois, le sort de toute vie terrestre reposait entre les mains de
quelques individus contrôlant la machine de guerre entre deux
superpuissances.
Au plus fort du conflit, au milieu des années 1980, le nombre
d'armes - et de pays qui en possédaient - avait atteint des
proportions impensables pour toute personne raisonnable. Les
documents déclassifiés nous indiquent qu'en 1985 les stocks de
missiles nucléaires prêts à être utilisés entre l'Amérique et l'Union
soviétique étaient d'environ 65 000 unités.
Aujourd'hui, après vingt ans de négociations et de réductions
d'armements, il reste encore au moins 22 000 missiles nucléaires,
dont 8000 sont considérés comme «actifs». Ce fut la menace
des conséquences mondiales de l'emploi de ces armements qui a
conduit à la stratégie qui, croit-on, a empêché leur déploiement
durant la guerre froide.
Cette stratégie fut nommée destruction mutuelle assurée
(DMA). C'est une excellente appellation pour désigner les consé-
quences probables de l'emploi des armes nucléaires par les super-
puissances de l'époque. Forgée par les membres du gouvernement
Kennedy, elle signifie qu'advenant une guerre totale, l'agresseur
et la victime seraient tous deux détruits. Il n'y aurait ni traité ni
armistice, que peu de survivants, et aucun avantage pour le vain-
queur. Bref, ce serait une destruction complète.
Tout doute sur les effets d'une telle guerre fut écarté lors
d'une conférence sans précédent qui eut lieu à Washington, D.
C., le jour de !'Halloween 1983. Intitulée «Le monde après une
guerre nucléaire», cette conférence fut conduite par trois person-
nalités très respectées dans leur domaine respectif: Paul Ehrlich,
biologiste et auteur de La Bombe P [The Population Bomb]; Carl
Sagan, cosmologue et auteur de Cosmos [une série de vulgarisa-
tion scientifique]; et Donald Kennedy, ex-président de l'Univer-
sité Stanford. Ils ont présenté une argumentation puissante sur
l'impossibilité de gagner une guerre nucléaire12 .

220
La guerre ne fonctionne plus ...

Ainsi décrites publiquement pour la première fois, les consé-


quences d'un éventuel conflit nucléaire provoqué par la guerre
froide furent expliquées très clairement. Le résultat probable, un
phénomène appelé l'hiver nucléaire, fut décrit par un groupe de
chercheurs connu sous le sigle TTAPS (Truco, Taon, Ackerman,
Pollack, Sagan). En se basant sur des modèles informatiques
combinant les schèmes climatiques avec la fumée, la suie et les
retombées causées par l'incendie de grandes villes après une
guerre atomique, on pouvait prédire que la quantité de lumière
solaire qui atteindrait la Terre serait énormément amoindrie.
Parmi les effets, les modèles indiquaient une énorme baisse
de température due au manque de lumière solaire - un hiver
nucléaire -, qui durerait de quelques mois à quelques années,
selon la durée du conflit. Les scientifiques fondaient leurs
modèles sur des données réelles relatives à des effets similaires
causés à l'époque moderne par l'impact d'anciens astéroïdes et
par de massives éruptions volcaniques.
Les conférenciers présentaient divers scénarios tenant compte
des schèmes climatiques, de l'identité du premier agresseur,
des villes impliquées et du nombre d'armes utilisées de chaque
côté. Aucune issue n'était avantageuse. Non seulement ce fut la
première grande conférence sur l'hiver nucléaire, mais les consé-
quences environnementales du choix de la guerre en firent le
premier débat politique sur le climat.
Les simulations informatiques firent ressortir une chose très
clairement : le monde avait affaire à un nouveau type de guerre
dont les raisons n'avaient plus de sens puisque personne ne pour-
rait la gagner. La guerre froide était une situation perdante pour
les deux parties. Pour la première fois, l'idée d'une attaque au
moyen des armes les plus perfectionnées de l'époque avait rendu
la perspective de la guerre incompatible avec son but.
Juste avant sa mort, et peu de temps après les rapports
de TTAPS sur les années de la guerre froide, le futuriste
Buckminster Fuller fit une observation prophétique concernant
le rôle de la guerre dans le monde moderne : « Ou bien la guerre

221
Vérité essentielle

est désuète, a-t-il dit, ou bien les hommes le sont 13 • » Einstein


pensait la même chose en répondant à une question sur la façon
dont serait menée la prochaine guerre mondiale. «Je ne sais pas
avec quelles armes on fera la troisième guerre mondiale, dit-il,
mais on fera la quatrième avec des pierres et des gourdins 14 . »
Einstein et Fuller étaient sur la même longueur d'onde en
laissant entendre que, du jour au lendemain, les armes nucléaires
avaient rendu toute guerre inutile. Avant 1945, on justifiait les
guerres selon les deux idées suivantes :

1. On pouvait gagner une guerre.


2. Ce qui subsistait après le conflit était utilisable.

Les énormes arsenaux accumulés pendant la guerre froide


rendaient insensée toute guerre puisqu'il était impossible de
la gagner, au sens traditionnel du terme. Entre l'étendue de la
destruction initiale et les conséquences de la contamination
radioactive, qui rendraient toute terre improductive pendant
longtemps, l'utilité de la guerre pour les raisons invoquées dans
le passé se trouvait à jamais invalidée. Presque du jour au lende-
main, notre vision de la guerre telle que nous l'avions connue
depuis cinq millénaires est devenue obsolète.

Où avons-nous appris la guerre ?


La meilleure science de notre époque indique que les
premières guerres à grande échelle furent menées durant la tran-
sition entre la dernière ère glaciaire et le climat que nous connais-
sons aujourd'hui. Bien que la dernière ère glaciaire semble très
lointaine dans le temps, elle ne l'est pas dans le contexte de notre
histoire sur cette planète. Dix mille ans sur 200 000, cela nous
laisse 190 000 ans (soit 95 % de notre histoire) où nous ne possé-
dons aucune preuve de guerre à grande échelle dans l'humanité.

222
La guerre ne fonctionne plus ...

Ce fait semble indiquer que la guerre est un phénomène rela-


tivement récent. Deux perspectives sont possibles quant au rôle
de la guerre dans le passé. Ou bien il y a eu de grandes guerres
dans !'Antiquité et nous n'en avons simplement pas encore
découvert les preuves, ou bien nous avons trouvé la plus ancienne
preuve de guerre, ce qui signifie qu'elles sont une anomalie.
En examinant ces deux possibilités, j'ai dû me poser une
question plus essentielle encore : quelle que soit l'époque à laquelle
ont commencé les grandes guerres, où avons-nous d'abord appris à
faire la guerre? Sans films de violence à imiter, sans expérience
antérieure sur laquelle s'appuyer et sans modèles d'armes ni de
défenses, qui aurait même pu songer à fabriquer des armes dans
le passé ? Par exemple, qui aurait pu penser à utiliser une lame
d'acier effilée ou une lourde boule munie de pointes pour enlever
la vie à un autre être humain ?
Nous ne connaîtrons jamais la vraie réponse à cette ques-
tion, mais nous pouvons trouver des indices dans les plus anciens
comptes-rendus de nos plus anciennes expériences terrestres.
L'un de ces comptes-rendus est récemment réapparu après avoir
été banni par l'Église chrétienne au ne siècle. Il s'agit du Livre
d'Énoch, le prophète.
Il est clair que les premiers historiens de l'Église tenaient
ce livre en haute estime. On en trouve des mentions dans les
commentaires de spécialistes chrétiens respectés tels qu'Iré-
née de Lyon et Clément d'Alexandrie. Par exemple, Tertullien,
l'historien carthaginois du ne siècle, dit du Livre d'Énoch qu'il
est sacré, reconnaissant que les paroles d'Énoch étaient divine-
ment inspirées et que l'on devait leur accorder autant de crédi-
bilité qu'aux autres documents écrits, tels le Livre d'Isaïe et les
Psaumes 15 . Spécifiquement, Tertullien dit ceci: «Comme Énoch
a parlé dans les mêmes Écritures que le Seigneur et que "chaque
texte sacré convenant à l'édification est divinement inspiré'', ne
rejetons rien de ce qui nous appartient16 . »
Le Livre d'Énoch fut perdu pendant presque 1500 ans,
jusqu'à ce qu'une copie soit présentée à la Bodléienne, la

223
Vérité essentielle

principale bibliothèque de l'Université d'Oxford, où on le redé-


couvrit. Il fut par la suite traduit par Richard Lawrence en 1821.
Le Livre d'Énoch commence par un récit où le prophète
dicte à son fils Mathusalem l'histoire secrète de l'espèce humaine.
Mathusalem écrit que son père lui parlait pendant qu'il avait
«une vision céleste [...],les yeux grands ouverts 17 ». Dans cet état
altéré de conscience, Énoch révèle les raisons du déclin de l'hu-
manité ainsi que la source de la souffrance, y compris la guerre,
dont il était témoin à son époque. Nous trouvons là un des plus
anciens témoignages sur les origines de la guerre. Allant plus loin
que les références vagues qui accompagnent parfois les révélations
des anciens prophètes, Énoch raconte ses visions avec précision.
Il explique que certains «anges du ciel» ont divulgué à
l'humanité les secrets de la création bien avant que les premiers
membres de notre espèce aient vécu ici assez longtemps pour
avoir acquis la sagesse d'utiliser ce pouvoir de manière respon-
sable. Il donne en détail les secrets des herbes et des plantes,
du langage, de l'écriture et de l'alchimie qui furent révélés au
peuple de la Terre. Cependant, comme les humains n'avaient pas
la maturité nécessaire pour appliquer sagement ce qu'ils avaient
appris, ce savoir fut mal employé. Dans sa quête désespérée pour
connaître la nature de notre monde, Énoch demande qu'on lui
montre «tout ce qui fut caché». En réponse, il dit à son fils qu'on
lui a donné les noms réels des « anges qui sont descendus du ciel
sur la Terre, qui ont révélé des secrets aux fils des hommes et
qui ont séduit les fils des hommes pour qu'ils commettent le
péché18 ».
Nommant certains anges en particulier et disant quels
secrets chacun avait révélés, Énoch affirme dans son texte que
l'ange Ézéchiel, par exemple, a «enseigné aux hommes toute
espèce d'iniquité et révélé au monde toutes les choses secrètes
effectuées dans les cieux19 ». La partie de l'expérience d'Énoch
qui s'applique à l'origine de la guerre est sa description de ce que
l'ange Gadrel a appris au peuple de la Terre. C'est cet ange qui
«a fait connaître aux enfants des hommes les instruments de la mort,

224
La guerre ne fonctionne plus ...

la cotte de mailles, le bouclier et l'épée pour massacrer2°». [C'est


l'auteur qui souligne.]
Établissant une distinction entre le savoir et la sagesse issue
de son application dans notre vie, Énoch raconte comment les
secrets du ciel finirent par se perdre dans le monde de l'homme:
« La sagesse a voulu s'installer chez les fils des hommes, mais elle
n'a pas trouvé d'habitation 21 • » Il conclut ainsi cette partie de sa
vision : «La sagesse n'a trouvé sur la terre aucun endroit où habi-
ter; sa place est donc dans les cieux22 • »

•••
Le récit d'Énoch où il est écrit que les instruments de la
guerre ont été introduits chez les humains par des êtres d'un
autre monde appartient à la tradition chrétienne des débuts, mais
il n'est pas le seul à dire que des êtres venus d'ailleurs ont apporté
sur la Terre l'idée de la guerre et des instruments pour la faire.
Pas moins de 36 traditions - y compris Sumer et l'Égypte
ancienne, et jusqu'à l'époque moderne - font état de plus de
80 « dieux» de la guerre et de leurs relations avec les humains.
En plus de la théologie chrétienne familière relative aux anges
décrits par Énoch, les exemples incluent la tradition tibétaine
(Begtse), hindoue (Karttikeya), japonaise (Bishamon), celtique
(Teutatès), grecque (Arès), perse (Dev), maya (Buluc Chabtan),
aztèque (Mixcoatl), polynésienne/maorie (Maru), babylonienne
(Ninurta), germanique (1Jr), hittite (Wurukatte), akkadienne
(Zababa), finlandaise (Turris) et amérindienne (Ictinike).
Lorsque autant de traditions aussi diverses possèdent une
histoire sur le même thème, il n'est pas inhabituel de découvrir
que chacune s'est inspirée d'un même événement factuel qui
s'est produit dans le passé. Un exemple : le récit quasi universel
d'une inondation planétaire survenue il y a longtemps (et que
l'on croit maintenant due à la fonte des glaces et à une élévation
du niveau de la mer à la fin de la dernière ère glaciaire) et la façon

225
Vérité essentielle

dont chaque groupe raconte l'histoire du rôle qu'il a joué dans


le repeuplement d'un nouveau monde. J'ai entendu personnelle-
ment ces comptes-rendus de la part de peuples indigènes, dont
les Quechuas des Andes, les Uros du lac Titicaca, au Pérou, les
Bédouins du désert du Sinaï, ainsi que les Hopis, les Navajos et
les Pueblos du désert du Sud-Ouest américain.
Tout comme l'histoire du déluge semble universelle, le fait
que tant de traditions attribuent les origines et les techniques
de la guerre à une source supérieure jette une lumière nouvelle
sur une cause ancienne et absurde de la souffrance humaine.
Nous menons nos guerres habilement, nous croyons passionné-
ment aux motifs pour lesquels nous combattons et nous avons
justifié nos croyances depuis 5000 ans, mais est-il possible que
ces guerres ne soient pas les nôtres? Autrement dit, se pourrait-il
que nous soyons devenus il y a longtemps les adeptes naïfs d'une
ancienne croyance (la guerre) qui tirait son origine d'un autre
monde et que nous nous la soyons appropriée ?
Même si cela peut sembler assez invraisemblable à première
vue, lorsque nous combinons la preuve scientifique de l'absence
de guerre chez d'anciennes civilisations avec le thème presque
universel de l'origine de la guerre selon de nombreuses traditions,
nous acquérons une vision permettant de comprendre le pour-
quoi de toutes ces guerres insensées, ce qui nous amène à adopter
un nouveau point de vue pour abandonner l'habitude de nous
entretuer afin de régler nos différends.
S'il est vrai que nous avons appris d'une intelligence supé-
rieure «toute espèce d'iniquité», comme le dit Énoch, et que
cette intelligence a « fait connaître aux enfants des hommes les
instruments de la mort, la cotte de mailles, le bouclier et l'épée
pour massacrer», qu'est-ce que cela entraînerait de réaliser que les
guerres que nous menons sont l'idée de quelqu'un d'autre? Est-il
possible que nous puissions nous réveiller un beau matin, nous
regarder dans les yeux après cinq millénaires de violence, et nous
demander : « Où avions-nous donc la tête ? »

226
La guerre ne fonctionne plus ...

Je vous présente ce point de vue parce qu'il est réel. Il circule


autour des feux de camp sous le ciel étoilé du désert du Sinaï, en
Égypte, et dans les conversations imprégnées de compassion des
occupants des monastères bouddhistes de l'Himalaya. Ce point
de vue permet d'entrevoir une transition pacifique entre la souf-
france contemporaine et le monde nouveau qui naît en cette fin
de cycle. S'il nous faut des raisons de croire que nous sommes
davantage que les pires actes de haine qui ont ponctué notre
passé, il suffit de considérer les innombrables actes de bonté qui
sont accomplis tous les jours dans le monde ainsi que les œuvres
d'art qui nous rappellent constamment notre véritable nature.

Nous sommes foncièrement bons!


J'ai le sentiment qu'un désir commun unit tous les humains
du monde : notre profonde aspiration à la bonté. Nous voulons
croire que nous sommes de bonnes gens vivant dans un monde
qui est bon. Pourtant, nous sommes étrangement attirés par des
romans et des films où la bonté humaine s'oppose à l'aspect le
plus obscur de notre nature, et nous nous réjouissons quand cette
bonté triomphe. Nous sommes heureux quand l'innocence de
quelqu'un comme Forrest Gump (incarné par Tom Hanks dans
le film du même nom sorti en 1994) nous rappelle la nôtre.
La réalité de notre bienveillance innée a été exprimée clai-
rement et simplement par le théologien et philosophe Thomas
d'Aquin au XIIIe siècle:« La bonté de l'espèce transcende celle de
l'individu au même titre que la forme transcende la matière 23. »
Presque quatre siècles plus tard, le scientifique et philosophe
Francis Bacon lui a fait écho en écrivant ceci : «L'inclination à la
bonté est inscrite profondément dans la nature de l'homme24 • »
C'est l'unicité de notre espèce, jointe à notre bonté fondamentale,
qui ouvre la porte au changement durable dans notre vie.
Lors de mes voyages sur chacun des continents (à l'excep-
tion de l'Antarctique), j'ai retrouvé un trait commun chez tous

227
Vérité essentielle

les gens avec qui j'ai eu le privilège de partager des repas, la vie
quotidienne et des randonnées dans la nature. Qu'il s'agisse des
villageois et des moines vivant dans les montagnes lointaines du
Tibet, de la Bolivie et du Pérou, ou des vendeurs de rue des bazars
de l'Égypte, de l'Inde, du Népal et de la Thaïlande, ou encore des
interlocuteurs de passage rencontrés dans les pays d'Europe, dans
les villages et les bistrots d'Australie et d'Amérique du Nord, les
gens semblent fondamentalement « bons » par nature.
Quand je m'égarais, ils m'aidaient à retrouver ma route.
Quand j'étais affamé, ils étaient heureux de partager avec moi
le peu de nourriture qu'ils avaient. Quand j'étais blessé, ils m'ac-
cueillaient, même si j'étais un parfait inconnu. Ce ne sont pas là
des incidents isolés que je suis le seul à avoir vécus. Demandez
à quiconque a traversé les États-Unis ou franchi les frontières de
son pays. Chaque personne à qui vous poserez la question vous
racontera une autre anecdote sur notre famille planétaire et notre
bonté naturelle. C'est cette bonté qui nous montre au-delà de
tout doute raisonnable que nous sommes «programmés» pour la
paix, non pour le conflit.
Si nous considérons de près les problèmes et les points chauds
du monde actuel, nous voyons que les conflits n'ont pas lieu chez
les fermiers ou les villageois. Ce sont plutôt les organisations
qui tentent de changer la vie des gens - les gouvernements, les
entreprises et les mouvements politiques -, qui déclenchent les
querelles et la souffrance. En tant qu' individus et familles, nous
trouvons des moyens d'être heureux en toutes circonstances.
Qu'il s'agisse de mendiants sans domicile fixe, de travail-
leurs ou d'esprits brillants qui occupent des postes de pouvoir
politique et technique, tous semblent généralement rechercher la
même chose dans leur vie : la paix, la nourriture, un logement,
la santé, l'occasion de donner une belle vie à leur famille, et une
meilleure compréhension de leur place dans le monde.
Abraham Maslow, un des grands psychologues du xxe
siècle, s'est d'abord distingué par ses travaux sur le comporte-
ment social des primates. Vers la fin de sa vie, cependant, il s'est

228
La guerre ne fonctionne plus ...

consacré exclusivement à l'étude de la nature humaine, notant


«les merveilleuses possibilités et les profondeurs insondables » de
notre existence. Même en présence de collègues comme Sigmund
Freud, qui avançait que le désir sexuel, l'égoïsme et l'agressivité
constituaient notre nature fondamentale, les études de Maslow
l'ont conduit à croire que «tout le monde est décent à l'inté-
rieur25 ». Sa foi inébranlable en notre bonté a perduré jusqu'aux
derniers jours de sa vie, où il a écrit que l'humanité «est dotée
d'une nature supérieure» essentiellement et que notre espèce peut
être « merveilleuse par sa nature humaine et biologique26 ».
Au-delà des vœux pieux, notre «bonté» fondamentale est
corroborée par d'innombrables exemples qui démontrent le
pouvoir de cette qualité dans notre vie. Plus qu'un simple phéno-
mène moderne, des actes d'héroïsme sur les champs de bataille
aux récentes tragédies liées aux inondations, aux ouragans et au
terrorisme, il n'est pas rare de voir un être humain donner sa vie
pour l'un de ses semblables.
La plupart du temps, devant les circonstances qui menacent
l'un de nos congénères, l'instinct fondamental de préserver la
vie s'avère plus fort que notre propre peur, et nous agissons en
conséquence. Cet instinct semble si profondément inscrit dans le
tissu de notre nature que nous l'étendons même au règne animal.

La preuve de notre bonté


Sur une route poussiéreuse à l'autre bout du monde, la
compassion et la bonté humaines furent démontrées clairement
lorsque la vie de quatre militaires américains fut sauvée en 2008.
Ce jour-là, le soldat de première classe Ross McGinnis opérait
une mitrailleuse sur l'écoutille couvrant l'intérieur du transport
de troupes blindé où il était de service avec quatre autres soldats.
Soudain, un combattant irakien a lancé une grenade dans l'ou-
verture. I..:engin a atterri à l'intérieur du véhicule, où les collègues
de McGinnis étaient piégés.

229
Vérité essentielle

McGinnis était entraîné à survivre. Il aurait pu mettre en


pratique son entraînement et sauter au sol depuis la tourelle afin
de sauver sa propre vie, ce qui aurait été parfaitement sensé de
sa part. Ce n'est pas ce qu'il a fait, et c'est pourquoi ce récit est
impressionnant.
Il s'est plutôt laissé tomber à l'intérieur du véhicule pour
servir de bouclier vivant contre la grenade qui allait exploser
quelques secondes plus tard. Il est mort instantanément quand
son corps a absorbé l'impact, sauvant ainsi ses camarades. « Si
[Mcginnis] n'avait pas fait obstruction avec son corps, il ne fait
aucun doute que personne ne s'en serait tiré», a dit le conducteur
du véhicule, qui fut blessé par des fragments de l'explosion 27•
Lors d'une cérémonie à la Maison-Blanche, Ross McGinnis
est devenu le quatrième soldat de la guerre d'Irak à recevoir
la médaille d'honneur, qui fut présentée à ses parents par le
président George W. Bush.
« L'Amérique honorera toujours le nom de ce brave soldat qui
a donné sa vie pour son pays et qui fut porté en terre à l'âge de 19
ans», a déclaré le président. Le sacrifice de Ross McGinnis nous
rappelle notre vraie nature : nous nous soucions extraordinaire-
ment des autres et ce souci s'exprime par un réflexe lorsqu'une vie
est en jeu. Par ailleurs, ce n'est pas seulement la vie humaine qui
déclenche notre réaction de bonté .

•••

230
La guerre ne fonctionne plus ...

Le 8 novembre 2007, l'impensable s'est produit dans la vie


de Vern Newell. Ce n'est pas le fait que sa maison fut en feu qui
lui a fait risquer sa vie deux fois. C'était plutôt ce qui se trouvait
encore à l'intérieur : ses dix chiens. Après avoir réussi à pénétrer
une première fois pour en sortir quelques-uns, il savait que les
autres mourraient s'il ne faisait pas quelque chose. Les pompiers
qui se trouvaient sur les lieux le savaient également, mais ils ont
quand même tenté de l'empêcher de retourner dans le brasier. «Il
[le pompier] a tenté de me retenir», raconte Newell. «Il me tenait
des deux mains, mais je l'ai presque frappé au menton 28 • »
N ewell a réussi à sauver ses dix chiens, et tous ensemble
ils ont regardé leur maison non assurée s'engouffrer dans les
flammes et brûler jusqu'au sol. Quand on lui demanda pourquoi
il avait risqué ainsi sa vie pour des animaux, il a répondu tout
simplement ceci : « Ils sont ma famille. »
Les gens reconnaissent la bonté chez les autres et veulent y
participer. La petite ville où Newell vit avec ses chiens n'est pas
une exception. Ses concitoyens ont immédiatement commencé à
dresser des plans pour reconstruire la maison incendiée.
Nous avons tous déjà entendu parler de gens qui ont risqué
leur vie pour sauver d'autres gens ou des animaux. Vern Newell
fut chanceux, car il a survécu à sa témérité et tout s'est bien
terminé. Ce n'est cependant pas le cas pour tout le monde.
Le jour de Noël 2010, un Texan de 62 ans a perdu la vie en
tentant de sauver des flammes sa famille, y compris son labrador
retriever. Au petit matin, Frank Kruse a tiré sa femme et sa nièce
de la maison en feu. Sa famille était désormais en sécurité, mais
leur labrador de 13 ans, Sugar, n'était visible nulle part. Frank est
donc retourné à l'intérieur pour trouver le chien, mais on ne les
a jamais revus, ni l'un ni l'autre. Ce jour de Noël, le feu dont il
avait sauvé sa famille a pris sa vie et celle de Sugar2 9•

•••
231
Vérité essentielle

C'est dans des moments comme ceux que je viens de décrire


que quelque chose en nous «surgit» et que notre vraie nature
transparaît brillamment. C'est précisément en de tels moments
que nous voyons ce qui nous distingue de plusieurs autres formes
de vie. Il aurait été beaucoup plus facile et certainement accep-
table pour les individus mentionnés plus haut de penser plutôt à
sauver leur propre vie dans ces situations critiques. Cependant,
devant ce choix, quelque chose en eux a transcendé la raison et
ils ont agi en faveur d'un autre être vivant.
Même quand nous échouons, comme dans le cas de Frank
et de son chien Sugar, l'important, c'est que nous avons essayé.
Quelque chose en nous choisit de risquer notre vie et même
de mourir, si nécessaire, pour sauver un autre être vivant. Ces
dernières années, des histoires similaires ont été diffusées par les
médias, dont certaines se rapportaient à des chevaux dans les
canyons inondés de l'Ouest américain, ainsi qu'à des chiens, des
chats et même des hamsters sauvés de maisons en flammes par
leurs propriétaires, au risque de leur vie.
Après le 11 septembre 2001, un projet peu connu compre-
nait un porte-à-porte des immeubles résidentiels endommagés
de Manhattan, des hôtels écroulés et des maisons incendiées, en
vue de retrouver les animaux de compagnie qui avaient été aban-
donnés dans le chaos. La récompense de ceux qui ont ainsi risqué
leur vie dans des édifices instables, à travers une fumée toxique, a
ému aux larmes les reporters qui suivaient le projet.
Un à un, les animaux ont été récupérés. Affamés, déshydra-
tés, mais vivants, ils agitaient la queue ou ronronnaient douce-
ment au contact des humains. Encore une fois, au cours des
heures et des jours qui ont suivi cette triste journée, l'ampleur de
la tragédie aurait certainement justifié l'acceptation de la perte de
vies animales comme conséquence d'une telle catastrophe. Mais
non.
Dans ces moments-là, nous voyons ce qu'il y a de plus essen-
tiel dans la nature humaine. Dans notre état le plus fondamen-
tal - libérés des obstacles et des fausses hypothèses qui nous

232
La guerre ne fonctionne plus ...

amènent à croire que nous sommes désavantagés, cupides, bernés


ou engagés dans une compétition pour survivre -, nous formons
une espèce gentille, compatissante et généreuse : nous sommes
pleins de bonté. Sur le plan le plus fondamental de notre exis-
tence, dans les moments de crise, nous nous prouvons sans cesse
la vérité de notre nature. Les histoires que j'ai rapportées ici, ainsi
que des milliers d'autres, nous le démontrent au-delà de tout
doute raisonnable.
Mais même temps, nous formons aussi une espèce de survi-
vants. Quand nous sommes poussés aux extrêmes, la nécessité
du moment peut déclencher en nous le pouvoir et la capacité
de transcender notre nature fondamentale et de devenir des
guerriers. Nous pouvons devenir violents quand il le faut. Nous
pouvons frapper quelqu'un et lui enlever la vie pour protéger notre
famille et nous-mêmes. Nous pouvons trahir notre instinct de
bonté afin de survivre. Ce sont alors les conditions dans lesquelles
nous nous trouvons qui deviennent le catalyseur.
Notre violence peut être déclenchée par des circonstances que
nous croyons menaçantes pour nous en tant qu' individus, pour
notre famille, notre communauté ou notre nation. Ces circons-
tances peuvent être réellement menaçantes ou seulement perçues
ainsi. Ce qui importe, c'est que nous nous sentons menacés. Que
nous soyons seuls ou avec d'autres, nous pouvons trahir notre
nature pacifique quand :

• nous nous sentons personnellement menacés,


• nous sentons que notre famille l'est,
• nous sentons que notre vie l'est.

C'est lorsque nous trahissons notre «bonté» fondamentale


que nous sommes témoins des plus sombres aspects de nous-
mêmes. C'est peut-être précisément à cause de ces conditions
que nos ancêtres les plus lointains ont choisi la guerre il y a
10 000 ans. Ayant affronté des changements climatiques et une
pénurie des nécessités de la vie - nourriture, eau, ressources,

233
Vérité essentielle

partenaires pour se reproduire-, ces gens ont vu leur besoin de


compétition surpasser dans leur esprit les avantages de la coopé-
ration. Ou bien ils se sont sentis menacés personnellement ou
ils ont cru que leur famille l'était, ou que le mode de vie auquel
ils étaient habitués se trouvait en danger. En présence de ces
menaces, ils ont trahi leur nature profonde.
Comme pour toute généralisation en ce qui concerne les
gens, il y a toujours des exceptions. Dans chaque société, des
statistiques semblent réfuter l'existence de notre bonté alors que
des individus expriment les traits humains les plus sombres que
la plupart d'entre nous abhorrent et s'efforcent d'éviter. Presque
toutes les générations ont connu les pires cauchemars, la terreur
que l'on peut qualifier «d'incarnation du diable» à cause de
tueurs en série comme Jack l'Éventreur ou Ted Bundy, qui
semaient la panique dans des quartiers paisibles.
En de rares occasions, de tels individus accèdent à des postes
de pouvoir. Utilisant leur charisme pour séduire des armées
entières afin qu'elles réalisent leurs plans, ils commettent des
atrocités contre les autres races, les autres nations et même
contre leur propre peuple, des actes impensables pour les gens
sains et raisonnables. Cependant, de tels moments d'obscurité
pour notre espèce illustrent davantage ce que nous faisons dans
des circonstances extrêmes plutôt que ce que nous sommes par
nature. Heureusement, les Pol Pot (nom réel : Saloth Sar), les
Adolf Hitler, les Saddam Hussein, ainsi que les organismes terro-
ristes, sont l'exception plutôt que la règle.

Le secret réside dans la coopération


Selon les historiens, le XXe siècle fut le plus sanglant de toute
l'histoire connue3°. Quand j'ai pris connaissance de cette affir-
mation, j'ai d'abord cru à une erreur. Par exemple, les Croisades
ou les conquêtes romaines en Europe et au Moyen-Orient ont
fait plus de victimes à leur époque que les deux guerres mondiales

234
La guerre ne fonctionne plus ...

du :xxe siècle. Toutefois, quand nous considérons les choses d'un


point de vue mathématique, nous ne pouvons que donner raison
aux historiens. Les chiffres sont vraiment bouleversants.
Au cours de la Deuxième Guerre mondiale seulement, envi-
ron 50 millions de personnes sont mortes au combat ou par des
atrocités associées à ce conflit3 1• Le nombre de morts a conti-
nué à augmenter même après la guerre, et ce, jusqu'à la fin du
siècle. En 1999, 80 millions d'hommes, de femmes et d'enfants
de tous âges avaient perdu la vie par la violence due à des conflits
ethniques, religieux et idéologiques, soit cinq fois plus que par
l'épidémie de sida et tous les désastres naturels survenus durant
la même période. C'est pour cette raison qu'on a dit du xxe siècle
«qu'il a tué la paix32 ».
En plus des guerres dues à des querelles de frontières et à la
pénurie des ressources, un nouveau type d'atrocité est apparu au
siècle dernier : la tentative de «nettoyage» des sociétés en vertu de
raisons idéologiques dépassant celles des guerres traditionnelles.
En 1948, les Nations unies ont adopté le mot génocide pour dési-
gner ce genre de massacre afin qu'il puisse être défini clairement
et banni de la politique planétaire. Je livre ici ces terribles statis-
tiques parce que la pensée qui les a rendues possibles offre un
triste exemple de ce à quoi on peut aboutir en perpétuant de
fausses hypothèses scientifiques et en les poussant à l'extrême.
La pensée sous-jacente à toutes les formes de génocide, et
directement exprimée par certaines d'entre elles, est liée aux
observations de la nature effectuées par Darwin, aux descrip-
tions qu'il en a faites dans ses écrits et à leur interprétation par
d'autres. Cette pensée se reflète dans les idées d'ouvrages philo-
sophiques tels que le célèbre « Petit livre rouge», officiellement
titré Citations du président Mao Tsé-toung, et Mein Kampf[Mon
combat], le livre qui exposait la vision mondiale d'Adolf Hitler.
Ces deux publications ont servi de justification à l'assassinat
d'au moins 40 millions de personnes : 30 millions en Chine et
10,8 millions pour les génocides juif et polonais de la Deuxième
Guerre mondiale.

235
Vérité essentielle

Dans son livre De l'origi.ne des espèces, Darwin exprimait clai-


rement sa croyance que l'élimination des plus faibles membres
d'une espèce, qu'il avait observée dans la nature, s'appliquait
également aux humains :

Ce n'est peut-être pas une déduction logique, mais,


dans mon imagination, il est beaucoup plus satisfaisant
de considérer les actes instinctifs comme celui du coucou
qui rejette ses frères adoptifs ou celui de la fourmi qui fait
des esclaves [...] comme les petites conséquences d'une
loi générale menant à l'avancement de tous les êtres orga-
niques, nommément en se multipliant, en se diversifiant,
en laissant vivre les plus forts et mourir les plus faibles 33 .

Dans Mein Kampf, Hitler a paraphrasé cette idée :

Dans la lutte pour leur pain quotidien, tous les


faibles, les malades ou les moins déterminés succombent,
tandis que la lutte des mâles pour les femelles ne procure
qu'aux plus sains le droit de se perpétuer. De plus, la lutte
est toujours un moyen d'améliorer la santé et le pouvoir
de résistance d'une espèce, et, par conséquent, elle est la
cause d'un plus grand développement34.

Si l'œuvre d'Adolf Hitler semblait faire écho à celle de


Darwin, il ne fait aucun doute que les propos de Mao ont été
inspirés par De l'origine des espèces. Cet homme considérait ses
ennemis comme des «non-gens» qui ne méritaient pas d'être
traités comme des humains. L'un des slogans de son époque
s'énonçait ainsi : «Les fondements du socialisme chinois reposent
sur Darwin et sa théorie de l'évolution35. »
Plus tard dans sa vie, Darwin a semblé faire marche arrière
relativement à certaines affirmations draconiennes contenues
dans De l'origine des espèces. Contrairement à ses premières
conclusions concernant la force supérieure de certains individus,
ses derniers travaux faisaient état de stratégies de survie fondées
sur l'unité et la coopération plutôt que sur «la survie des plus
236
La guerre ne fonctionne plus ...

forts». Dans son livre suivant, De la descendance de l'homme, il a


résumé ainsi ses observations : «Les communautés qui compor-
taient le plus grand nombre de membres les plus sympathiques
se développaient le mieux et produisaient le plus grand nombre
de rejetons 36 • »
Darwin a peut-être entrevu la fausseté de certaines de ses
affirmations, mais il était trop tard. De l'origine des espèces était
devenu un classique et il sert toujours de base aujourd'hui à une
pensée qui nous éloigne manifestement de notre instinct naturel
de coopération et de bonté.
Au début du xx:e siècle, le naturaliste russe Petr Kropotkine
a renforcé de ses propres observations les derniers travaux de
Darwin. À l'instar de ce dernier, qui avait observé les effets de
l'évolution chez certaines espèces d'oiseaux lors de son voyage
de découverte au cours des années 1830, Kropotkine a publié
le résultat de ses propres observations effectuées lors d'expédi-
tions scientifiques dans l'un des plus difficiles environnements
du monde : le nord de la Sibérie. Il explique comment il a décou-
vert que la coopération et l'unité faisaient la réussite d'une espèce
plutôt que la survie des plus forts.
Dans son ouvrage classique intitulé L'Entraide : un facteur
d'évolution (1902), Kropotkine montrait les avantages obtenus
dans le monde des insectes par la capacité instinctuelle des four-
mis à vivre en société coopérative plutôt que compétitive :

Leurs nids merveilleux, leurs constructions relati-


vement supérieures à celles de l'homme, leurs chemins
pavés et leurs galeries voûtées à la surface du sol, leurs
halls et leurs entrepôts spacieux, leur récolte et leur
« maltage» du grain, leur méthode rationnelle de déve-
loppement des œufs et des larves, leur construction de
nids spéciaux pour élever les aphidés - les vaches des
fourmis - et enfin leur courage, leur détermination et
leur intelligence supérieure, tout cela étant le résultat
naturel de l'aide mutuelle qu'elles pratiquent à chaque
stade de leur vie affairée et laborieuse37.
237
Vérité essentielle

Pour John Swomley, professeur émérite d'éthique sociale


à l'école de théologie St. Paul de Kansas City, il ne fait aucun
doute qu'il est à notre avantage de trouver des façons pacifiques
et coopératives de construire les futures sociétés planétaires.
Citant les preuves présentées par Kropotkine et d'autres cher-
cheurs, Swomley établit que la coopération, plutôt que la compé-
tition, joue davantage qu'un rôle dans le succès d'une société.
D'une manière simple et directe, il explique que la coopération
est «le facteur clé de l'évolution et de la survie38 ». Dans un article
publié en février 2000, Swomley cite Kropotkine, affirmant que
la compétition à l'intérieur d'une espèce ou entre espèces «est
toujours dommageable à l'espèce. De meilleures conditions sont
créées par l'élimination de la compétition au moyen de l'aide et
du soutien mutuels39 ».
Dans son discours d'introduction au symposium de 1993 sur
les aspects humanistes du développement régional, qui a eu lieu
à Birobidzhan, en Russie, le coprésident Ronald Logan a offert
un contexte pour que les participants voient la nature comme un
modèle de réussite pour les sociétés. En une référence directe à
Kropotkine, il affirmait :

Si nous demandons ceci à la nature : « Qui sont les


plus forts : ceux qui se font continuellement la guerre
ou ceux qui s'entraident?» nous voyons aussitôt que les
animaux qui acquièrent l'habitude de s'aider mutuel-
lement sont indéniablement les plus forts. Ils ont plus
de chances de survivre et ils atteignent dans leur sphère
respective le plus haut développement de l'intelligence et
de l'organisation corporelle4°.

Un peu plus loin dans le même discours, Logan citait les


travaux d'Alfie Kohn, auteur de No Contest: The Case Against
Competition, décrivant en des termes non ambigus ce que ses
recherches avaient démontré concernant une quantité béné-
fique de compétition dans des groupes. Après avoir commenté
ainsi plus de 400 études sur la coopération et la compétition,

238
La guerre ne fonctionne plus ...

Kohn concluait ainsi : «La quantité idéale de compétition [...]


dans tout environnement, les salles de cours, le lieu de travail, la
famille, le terrain de jeu, est aucune [... ]. [La compétition] est
toujours destructrice4 1• »
Le milieu de la nature est largement reconnu comme un
terrain de démonstration pour des expériences d'unité, de coopé-
ration et de survie chez les insectes et les animaux. D'après les
leçons que nous enseigne la nature, il est indéniable que l'unité
et la coopération sont avantageuses pour les êtres vivants. Des
stratégies éprouvées que nous observons dans le monde qui nous
entoure peuvent nous servir de modèles pour notre propre survie.
Cependant, pour les appliquer, il faut tenir compte d'un autre
facteur qui existe dans notre monde et qui n'apparaît pas dans le
règne animal. En tant qu'individus et en tant qu'espèce, avant de
changer notre mode de vie, nous devons savoir généralement «où
nous allons» et ce que nous y trouverons. Il nous faut savoir si le
résultat en vaudra la peine.
De plus en plus de preuves scientifiques indiquent qu'en l'ab-
sence de conditions nous incitant à des actions animales, nous
préférons, quand nous en avons l'occasion, vivre dans la paix et
la compassion qui correspondent à l'aspect bienveillant de notre
espèce. Autrement dit, les conditions de la vie semblent corro-
borer ce que la science a découvert. Quand les trois conditions
que nous privilégions dans la vie sont remplies - c'est-à-dire que
nous nous sentons en sécurité, que notre famille est en sécurité et
que notre mode de vie est sûr -, nous laissons notre vraie nature
transparaître dans tous nos actes. Comment savoir avec certitude
que ces trois conditions sont remplies ? Le poète Carl Sandburg,
lauréat du prix Pulitzer, a répondu à cette question en quelques
mots : «Un jour, une guerre sera déclarée, mais personne ne
viendra42 • »

239
Vérité essentielle

Vérité 6. Plus de 400 études spécialisées ont conclu


que la compétition violente et la guerre vont à l'en-
contre de nos instincts primordiaux de coopéra-
tion et de soins mutuels. Autrement dit, au cœur de
notre nature la plus essentielle, nous ne sommes tout
simplement pas conçus pour la guerre !

240
CHAPITRE 7

LA FIN DE LA PARTIE : RÉÉCRIRE


NOTRE HISTOIRE, NOTRE DESTINÉE
ET NOTRE AVENIR

«La destinée n'est pas une question de chance,


mais de choix. »
- WILLIAM JENNINGS BRYAN (1860-1925),
AVOCAT ET POLITICIEN AMÉRICAIN

En 2007, la sortie du film Sans plus attendre [Maintenant


ou jamais, titre au Québec], (The Bucket List), a incité beaucoup
d'individus à réfléchir à leur vie et à ce qu'ils aimeraient accom-
plir tandis qu'ils sont encore suffisamment en santé pour le faire.
Sans en révéler les détails à ceux qui n'ont pas encore vu ce film,
je dirai que la ligne générale de l'intrigue est celle-ci : vers la
fin de leur vie, deux hommes {incarnés par Morgan Freeman
et Jack Nicholson) s'interrogent sur ce qu'ils ont toujours voulu
accomplir, mais qu'ils n'ont jamais fait, pour diverses raisons.

241
Vérité essentielle

Lorsque se présente leur dernière chance de réaliser leur rêve


respectif, chacun dresse une liste de ses ambitions de toujours :
une « bucket list ». Le reste du film nous montre les changements
qui surviennent dans leur vie et la guérison de leurs blessures
émotionnelles tandis qu'ils travaillent ensemble pour réaliser
leurs rêves.
Au cours d'une conversation avec ma mère peu de temps
après la sortie de ce film, je lui ai demandé quelle était sa propre
bucket list : quels endroits elle aurait aimé visiter et quelles choses
elle aurait aimé faire dans sa vie.
Elle a répondu à ma question en m'expliquant qu'elle était
le produit d'une autre époque et d'une autre mentalité, et qu'elle
n'avait jamais vu la vie de cette façon-là. Née tout de suite après
la grande dépression, elle avait grandi en apprenant à prendre
soin des autres et à pourvoir à leurs besoins avant de penser à ses
propres rêves et désirs.
Depuis qu'elle était toute petite, ma mère avait pris soin de
son entourage. Devenue adulte, elle s'était occupée de gens dont
l'existence était ravagée par la maladie ou le divorce. Elle avait
pris soin de ses parents jusqu'à leur mort (son père, à l'âge de 96
ans) ; des gens avec qui elle avait travaillé pour le gouvernement
pendant plus d'un quart de siècle; de mon frère et moi, ses deux
fils qu'elle avait élevés seule au cours des années 1960 après un
douloureux divorce. Tout au long de cette vie de sacrifice où elle
faisait passer les besoins des autres avant les siens, ma mère avait
mis ses plus grands rêves sur la glace. C'est en pensant à tout cela
que je lui ai demandé d'accorder la priorité à ses rêves.
Je l'ai d'abord encouragée à noter ses plus grandes ambitions,
puis à allonger la liste en rêvant sans se limiter. Je lui ai rappelé
que je l'aiderais à aller partout où elle voudrait aller sur la planète,
à voir tout le monde (vivant) qu'elle désirait voir et à faire tout
ce qu'elle avait toujours voulu faire. Même si j'étais absolument
certain qu'elle vivrait encore longtemps, je voulais qu'elle quitte
ce monde sans aucun regret, sans se dire : «Si seulement j'avais
fait ... ))

242
La fin de la partie ...

Elle a commencé à me lire sa liste à voix haute. Je ne fus


nullement surpris par son contenu, car je connais bien ma mère.
Ce n'était pas une liste de voyages dans des pays lointains ni de
croisières sur des paquebots luxueux. Loin de là. Sa liste bucket
était modeste et simple.
En haut de liste figurait une dernière visite à ses plus vieux
amis, qui étaient restés au Missouri quand elle avait déménagé
pour vivre plus près de chez moi, dans le Sud-Est. Ensuite, elle
énuméra les actions qui seraient utiles à d'autres : garder sa
maison en bon état en la faisant repeindre afin que les prochains
propriétaires n'aient pas à le faire, aménager le terrain pour que
mon frère et moi n'ayons pas à le faire quand elle ne serait plus là,
et créer un beau jardin dans la cour. Voilà.
Quand je lui ai demandé si elle aimerait commencer tout de
suite à faire les choses indiquées sur sa liste, soit le jour même,
elle secoua la tête, ne laissant ainsi planer aucun doute sur son
intention. «Non, pas maintenant, dit-elle. La vie est trop mouve-
mentée. Attendons que ça se calme un peu. »
Pensant qu'elle faisait allusion à l'économie, à la fermeture
des banques et à l'agitation générale régnant dans le monde, je lui
demandai alors : «Mais quand ? »
Elle me répondit : «Je ne sais pas. Reprenons notre souffle.
Nous regarderons ma liste de nouveau quand les choses seront
redevenues normales. »
Je répliquai : «Normales? Que veux-tu dire par là?»
C'est la réponse de ma mère à cette question qui m'incite à
rapporter ici cette conversation. Son sentiment est partagé par
des gens de tous âges vivant dans tous les pays du monde.
«Tu sais, me dit-elle, quand les choses seront redevenues
comme avant. »
Je regardai dans les yeux ma mère qui ne mesure qu'un mètre
quarante-deux. Je savais que le monde dont elle désirait revoir
l'existence avant de se permettre de réaliser ses rêves n'existe
plus. Selon toute probabilité, la « normalité» dont elle se souvient
et qu'elle souhaite voir revenir est définitivement disparue. Si

243
Vérité essentielle

l'on peut se fier à l'histoire passée, une fois que notre monde
commence à prendre une nouvelle direction, comme il le fait
aujourd'hui, c'est comme s'il suivait une« loi» mystique de l'uni-
vers le faisant sans cesse avancer. Impossible de retourner en
arrière. Tout comme nous pouvons rarement revenir à un état
antérieur dans nos relations, notre vie de couple, nos emplois et
les endroits où nous avons vécu, il est improbable que le monde
de 2008 ou 2006, ou d'avant, redevienne présent, et cela, pour
une raison très simple et inéluctable : il a disparu.

Ce qui fonctionnait avant ne fonctionne plus maintenant


Ma mère et moi avons toujours discuté de l'état du monde et
de la tournure qu'il prenait. Ces dernières années, son optimisme
quant aux gens, aux gouvernements et à notre avenir a cédé la
place au sombre tableau d'une planète brisée qui a raté de belles
occasions et qui se retrouve aux prises avec des problèmes inso-
lubles. Après avoir écouté patiemment pendant des années mes
propos optimistes sur le monde magnifique qui est à notre porte,
et reconnaissant les choix difficiles que nous devons faire pour
que ce monde existe réellement, elle termine souvent la conversa-
tion par quelques mots qui résument tout.
Dans le style direct, précis et éloquent qui lui est propre, elle
dit simplement ceci : «J'abandonne. Le monde est un gâchis. Il
court tout droit à la catastrophe.» Comme elle perçoit chaque
fois mon incrédulité, elle ajoute avec une étincelle dans les yeux
et un sourire qui me dit qu'elle m'aime malgré tout: «Tu peux
me citer là-dessus. »

•••
244
La fin de la partie ...

Si nous considérons les systèmes réglant notre mode de vie


qui semble avoir atteint ses limites, il est facile de voir pourquoi
plusieurs personnes partagent l'opinion de ma mère. Tellement
de choses sur lesquelles nous nous sommes appuyés pendant
des générations (dont l'argent, la guerre, les emplois que nous
pouvions obtenir dans une excellente entreprise où nous nous
sentions en sécurité pour le reste de notre vie) ne s'appliquent
plus. Elles ne fonctionnent plus. Cependant, si nous regardons
honnêtement tout ce qui ne fonctionne plus, nous voyons un
certain schème se dessiner : les seules choses qui se «brisent» sont
les systèmes qui ne sont plus durables sous le stress d'un monde
en changement.
Les réalités comme l'économie, les longues dictatures, la
force militaire employée pour maintenir la paix dans quinze
zones guerrières du monde et l'abjecte pauvreté régnant dans des
pays riches en ressources naturelles constituent des exemples de
modes de vie insoutenables qui ont atteint leur point de rupture.
Tout cela se passe sous le parapluie d'une civilisation alimentée
par cette ressource non durable que sont les carburants fossiles.
Si l'économie mondiale reposant sur la croissance constante
des marchés et sur un système dont certains bénéficient au détri-
ment des autres a fonctionné pendant un siècle environ, elle n'est
plus durable pour un autre siècle. Si la production d'électricité
pour un groupe de puissances mondiales qui brûlent une source
limitée de pétrole, de gaz et de charbon, détruisant l'air même
qui nous est précieux, a fonctionné pendant un siècle ou à peu
près, elle ne peut pas se poursuivre pendant un autre siècle.
Ce sont là des exemples de la courbe d'apprentissage de notre
civilisation. Si nous pouvons transcender le jugement les décla-
rant bons ou mauvais, ils deviennent simplement une partie de
notre passé. Ils ont fonctionné et ils ont accompli ce pour quoi
ils avaient été conçus au moment de leur création. Ils nous ont
conduits où nous sommes aujourd'hui et nous ont permis de
construire une civilisation planétaire qui n'existait pas aupa-
ravant, fournissant de la chaleur, de la lumière et le moyen de

245
Vérité essentielle

cuire des aliments en des endroits qui n'avaient jamais joui de


ces commodités. Ils nous ont permis aussi de voyager d'un bout
à l'autre de la planète en une seule journée.
Ils ont également créé une énorme brèche dans les écono-
mies du monde et exploité le travail de peuples indigènes ainsi
que d'une grande partie des ressources globales afin d'en faire
bénéficier un nombre relativement restreint de gens. Nos choix
nous ont servis sous certains aspects et nous ont nui sous d'autres
aspects. Le fait que plusieurs des systèmes que nous avons choisis
s'effondrent en même temps nous fournit une rare occasion de
faire de nouveaux choix. Nous devons choisir où nous irons à
compter de maintenant et comment nous définirons le monde
nouveau qui émerge déjà.
C'est précisément pourquoi il est si important que nous
connaissions la vérité sur nos origines, sur notre héritage et sur
notre existence. Quand nous saurons qui nous sommes, depuis
combien de temps nous habitons cette planète et si nous sommes
ou non le produit d'un accident biologique de la nature, nous
pourrons faire les choix éclairés qui nous permettront de nous
adapter à notre monde en transformation .

•••
Depuis le début de ce livre, vous avez eu l'occasion de réflé-
chir à la vision traditionnelle de l'humanité telle que fournie par
la science et redéfinie à la lumière de nouvelles découvertes. Si
vous êtes intérieurement déchiré par les grandes questions exis-
tentielles - Quand la vie humaine commence-t-elle? D'où notre
espèce vient-elle? Depuis combien de temps sommes-nous ici?
Sommes-nous condamnés ou non à vivre dans un monde de
guerres et de souffrances perpétuelles ? -, vous avez pris connais-
sance de faits nouveaux susceptibles de vous aider considérable-
ment à résoudre ce conflit intérieur.

246
La fin de la partie ...

Même si mes carrières dans les industries de l'énergie, de la


défense et de la communication furent très différentes les unes
des autres quant à leur but et leur direction, un thème commun
les unissait. Tout comme plusieurs de nos expériences vécues dans
une partie de notre vie s'appliquent à d'autres expériences vécues
plus tard, ce thème déborde aussi dans ma vie quotidienne.
Le voici : chacune de mes carrières comportait un emploi que
j'ai accepté en période de crise : la crise énergétique des années
1970, la crise nucléaire de la guerre froide des années 1980, et la
crise militaire de l'information impliquant une incompatibilité
entre divers systèmes informatiques, ce qui a nui à leurs efforts de
coordination durant la guerre du golfe Persique en 1990. Chacun
de ces postes était en retard sur la réalité et excédait son budget
au moment où je m'y suis investi. De même, nous nous retrou-
vons tous à l'heure actuelle dans un monde en crise, et les solu-
tions pour résoudre ces crises sont dépassées et à court de budget.
Je crois que les parallèles que j'ai observés dans d'autres secteurs
de la vie s'appliquent également ici.
Un principe qui était valide pour les entreprises où j'ai
travaillé l'est également pour nous et pour notre monde : quand
nous connaissons la vérité d'une situation, les choix deviennent
clairs et les décisions sont évidentes. Ce fut l'une des grandes
leçons que j'ai apprises dans le monde des affaires, et ce principe
s'applique à ce qui se passe aujourd'hui à l'échelle planétaire.

Une communauté planétaire : pas de retour en arrière


Ce n'est un secret pour personne: nous sommes devenus une
société planétaire. Que nous lui donnions ce nom officiel dans
les bulletins de nouvelles ou que nous en parlions comme d'une
conspiration tacite sur les lignes radiophoniques ouvertes de fin
de soirée, le fait est qu'elle existe. Les marchés boursiers régissant
l'économie mondiale sont déjà planétaires et les transactions s'ef-
fectuent continuellement, sept jours sur sept, vingt-quatre heures

247
Vérité essentielle

sur vingt-quatre. Les produits alimentaires tropicaux vendus


dans nos supermarchés en plein hiver sont cultivés à l'autre bout
du monde et transportés quotidiennement jusqu'à nous par
avion, par bateau et par camion. La voix qui répond au numéro
que nous composons à trois heures du matin pour obtenir de
l'aide concernant une réservation de voyage ou une assistance
technique pour notre ordinateur provient sans doute d'un centre
d'appel situé quelque part de l'autre côté du globe.
De toute évidence, nous vivons à une époque où la ligne
qui nous sépare des « autres » sur le plan du commerce, de
l'argent, de la technologie et même du gouvernement est deve-
nue floue. Puisque nous sommes déjà une société planétaire, nos
choix personnels dans nos foyers, dans nos familles et dans nos
communautés ont des implications mondiales. La mondiali-
sation elle-même a commencé longtemps avant que toutes ces
choses soient seulement possibles. Un document de travail du
Bureau national de la recherche économique, intitulé « Quand
la mondialisation a-t-elle commencé?», fut publié en 2002 par
l'European Review ofEconomie History. Cette étude démontre que
la capacité d'influencer les marchés, la main-d'œuvre et les prix
des produits de consommation existe depuis près de cinq siècles.
On y décrit trois degrés de mondialisation ainsi que leur impact
passé ou présent sur la civilisation moderne 1•
- La première ère de la mondialisation fut définie par
le commerce qui s'effectuait sur de grandes distances avant le
XVIIIe siècle. À l'époque, les articles importés par l'Europe, en
provenance d'autres parties du monde, comprenaient les épices,
le sucre, la soie et d'autres produits introuvables sur les marchés
locaux. Comme ces articles n'étaient pas en compétition avec
ceux des marchés existants, leur présence ne créait pas de remous
économiques. Par conséquent, il résultait de cette mondialisation
que des gens avaient chez eux de belles et bonnes choses prove-
nant de pays lointains, tandis que leurs voisins ne les avaient

248
La fin de la partie ...

pas. L'impact de la mondialisation a cependant changé lors de


sa deuxième ère.

- La deuxième ère de la mondialisation a commencé au


début du XIXe siècle, lorsque l'Europe s'est mise à importer des
articles tels les grains et les textiles. Comme on en produisait
déjà sur les marchés européens, ces importations ont créé la pres-
sion de la concurrence des marchés pour des biens qui existaient
déjà à l'intérieur. Durant cette période, la formation de nouvelles
entreprises commerciales a donné naissance à de nouveaux par-
tenariats et la concurrence a eu pour résultat la réglementation
des prix.

-Nous sommes aujourd'hui dans la troisième ère de la mon-


dialisation. Nous échangeons toujours des produits qui entrent
en compétition avec ceux qui existent déjà dans une région ou un
pays donné, mais une autre force modifie maintenant l'impact
de la mondialisation sur notre vie. Les technologies et les compé-
tences sont en compétition au-delà des frontières, des océans et
des fuseaux horaires. Ce type de mondialisation exerce un autre
genre de pression sur les marchés planétaires et sur les économies.
Comme il est très différent du commerce d'objets et de denrées
qui s'effectuait au cours des trois derniers siècles, il ne s'insère
pas très bien dans les modèles existants de tendances et de cycles.
Pour cette raison, les experts ont de la difficulté à nous dire à quel
genre d'impact à long terme nous pouvons nous attendre de la
mondialisation actuelle.

Nous ne savons pas exactement ce que nous réserve l'ave-


nir de la mondialisation, mais les opinions ne manquent pas
quant aux effets qu'elle a exercés jusqu'ici sur le monde. Dans
un bref essai pour le magazine Newsweek, le journaliste Thomas
Friedman a expliqué comment les émeutes sanglantes qui ont
eu lieu lors du sommet du G8 en Italie en 2001 et de celui du
G20 à Pittsburgh, aux États-Unis, en 2009 reflétaient les craintes
populaires que la mondialisation soit bonne uniquement pour

249
Vérité essentielle

les affaires et beaucoup moins avantageuse pour la population.


«Mais la mondialisation n'a pas détruit le monde, elle l'a seule-
ment écrasé», écrivait Friedman. «Et à long terme, cela peut
profiter à tout le monde, spécialement aux pauvres2 • »
La chancelière allemande Angela Merkel semble d'accord.
Lors de la cérémonie d'ouverture de la foire d'Hanovre, elle a
déclaré : « On craint toujours que la mondialisation réduise notre
richesse, mais je ne le crois pas. Elle peut nous être bénéfique,
à condition que nous voulions investir et nous engager ferme-
ment3. » Les critiques de la mondialisation voient la chose d'un
tout autre œil.
Bien que Friedman et Merkel divergent d'opinion sur les
détails, ils s'entendent généralement sur le fait que les contes-
tataires craignent moins le changement du niveau de vie que le
contrôle de plus en plus grand exercé par les multinationales sur
la vie des gens. Plus pertinente peut-être est la crainte que l' indi-
vidu moyen soit impuissant à empêcher ces compagnies de faire
des choses qui soient bonnes pour leur chiffre d'affaires, mais
mauvaises pour l'humanité et pour la durabilité de la vie sur la
planète.
À l'évidence, la mondialisation sous sa forme actuelle est une
arme à deux tranchants. Elle n'est pas un processus démocratique
et elle est financée par ceux qui en profitent le plus. Il est tout
aussi évident qu'il s'agit d'une réalité de la vie. Nous sommes
définitivement planétaires et nous ne pouvons plus revenir en
arrière. S'il ne fait aucun doute que le monde des affaires, les
banques et l'industrie fonctionnent maintenant comme des enti-
tés planétaires, qu'en est-il des gouvernements? Nous dirigeons-
nous vers une forme de gouvernement planétaire ou, comme
l'affirment certains, y sommes-nous déjà?

250
La fin de la partie ...

Vers un gouvernement planétaire ?


Lors de presque chaque sommet, chaque congrès et chaque
interview à laquelle je participe, on me pose toujours une certaine
question, que ce soit en public ou en privé. On me demande si je
crois que nous vivrons bientôt sous une forme de gouvernement
planétaire et, si c'est le cas, quand cela se produira. J'aborderai
cette section de la même manière que je réponds à cette question.
Premièrement, je n'ai pas de ligne téléphonique privée avec la
Maison-Blanche ni avec les dirigeants du monde. Je ne peux pas
lire dans leurs pensées, j'ignore ce qu'ils mijotent et je ne sais pas
non plus pourquoi ils prennent telle ou telle décision. J'ai accès
aux mêmes sources d'information que les gens qui me posent
ces questions. C'est la manière dont j'utilise ces sources, jointe à
ma pensée systémique, qui m'aide à comprendre ce monde qui
semble parfois absurde.
Quand je travaillais comme informaticien dans l'industrie
de l'énergie et dans celle de la défense, par exemple, une partie
de ma tâche consistait à écrire des programmes informatiques
recherchant des schèmes. Comme je l'ai expliqué dans Le Temps
fractal [Ariane Éditions], ce fut pour moi l'occasion parfaite de
faire formellement et professionnellement ce que j'avais fait à
l'occasion depuis l'enfance : chercher des schèmes chez les gens,
dans la vie et dans la nature. En tant que professionnel, j'utilisais
simplement la technologie des ordinateurs à haute vitesse pour
examiner d'énormes quantités de données, afin de les trouver
plus rapidement. Durant mon séjour dans l'industrie, je cher-
chais des schèmes géologiques dans les roches pétrolifères ou des
schèmes d'erreur dans les systèmes logiciels sophistiqués.
J'observe toujours les schèmes qui existent dans le monde,
mais ceux que je cherche maintenant se trouvent dans le passé.
Les schèmes cycliques de l'histoire du monde, la guerre et la paix,
l'effondrement des économies, le développement et le déclin des
civilisations - ainsi que notre capacité à les calculer - forment la
base de mes réponses aux questions portant sur notre avenir.

251
Vérité essentielle

Je ne sais pas précisément ce que le futur nous réserve. Ce


que je sais, cependant, c'est que les cycles du passé sont porteurs
de schèmes qui nous indiquent ce à quoi nous pouvons raison-
nablement nous attendre dans les temps qui viennent. Si nous
avons la sagesse de reconnaître ces schèmes, nous nous accor-
derons ainsi un avantage et nous aurons une bonne idée de ce
que l'avenir nous apportera. Nous saurons aussi à quels moments
- les points de choix - les changements que nous choisirons de
faire auront le plus de chances de succès4 •
En ce qui concerne les changements cycliques qui ont eu lieu
au cours de l'histoire, les cycles que j'observe sont connus des
dirigeants qui ont fait du monde ce qu'il est aujourd'hui. D'après
les anciennes descriptions indigènes de ce qui s'est produit durant
le changement mondial précédent, d'après les traditions orales
des nomades tibétains qui m'ont raconté, autour d'un feu de
camp à la fin des années 1990, les changements climatiques
cycliques, d'après les probabilités et les trajectoires temporelles
qui m'ont été rapportées par des chamans sur les hauteurs des
Andes du sud du Pérou après le 11 septembre 2002, et d'après
les anciens glyphes mayas illustrant ces cycles sous la forme de
calendriers sophistiqués, ce n'est un secret pour personne que
nous vivons une période de changement qui a été prédite, anti-
cipée, accueillie et crainte depuis la dernière fois que cela s'est
produit, il y a environ 5 000 ans.
Parmi les changements auxquels nous assistons aujourd'hui:
la plus grande transformation des pouvoirs, de la richesse, de la
technologie et de l'information de toute l'histoire connue. Je ne
m'étonnerais donc pas de voir une mondialisation des gouverne-
ments, allant de pair avec celle des affaires, de l'industrie et de
la finance. La gouvernance planétaire existe déjà. Si les années
qui ont suivi la Deuxième Guerre mondiale nous fournissent un
indice sur la façon dont elle sera appliquée, il s'agira d'un proces-
sus qui se déroulera dans le temps plutôt que d'un événement qui
aura lieu à un moment précis.

252
La fin de la partie ...

Les fondations d'un gouvernement mondial, à l'instar d'une


grande coopération planétaire, se construisent depuis que le
monde a été réparti en nouvelles nations et économies à la suite
de la Deuxième Guerre mondiale. La consolidation des affaires
en blocs de commerce, telles l'Union européenne (UE, créée en
1993), l'Union africaine (UA, fondée en 2001) et !'Association
des nations du Sud-Est asiatique (ANSEA, établie en 1967),
voilà comment différentes nations ayant des intérêts communs
forment de grandes organisations qui leur sont bénéfiques tant
individuellement que collectivement.
De plus, la consolidation des devises, comme nous l'avons vu
en Europe avec l'euro; la monnaie appelée eco pour l'Afrique de
l'Ouest, qui doit entrer en usage en 2015; le dollar est-caribéen;
et une devise partagée proposée pour les Émirats arabes unis, le
Bahreïn, l'Arabie saoudite, le Koweït, l'Oman et le Qatar sont
tous des éléments de coopération qui signalent l'existence d'une
plus haute forme de gouvernance.
Ma réponse à la question de savoir si nous nous dirigeons vers
une forme de gouvernance planétaire est donc oui, parce qu'elle
est déjà là et qu'elle se développe de plus en plus sur une échelle
de plus en plus grande. Retournerons-nous jamais au monde du
passé? Sans doute que non. La gouvernance planétaire est-elle
une bonne ou une mauvaise chose? Je n'en sais rien, car cela
dépend de la façon dont elle sera mise en place.
La formation de l'Union européenne peut fournir un exemple
en microcosme de ce qui est possible si les mêmes grandes lignes
sont appliquées à l'échelle mondiale. Les buts avoués de l'UE
étaient clairs depuis le début. Celle-ci fut créée avec «l'objectif de
mettre fin aux guerres fréquentes et sanglantes entre pays voisins,
qui ont culminé avec la Deuxième Guerre mondiale5 ». La voie
que l'UE avait choisie pour atteindre ses objectifs était tout aussi
claire : les « quatre libertés» de circulation.

• Circulation des biens


• Circulation des services

253
Vérité essentielle

• Circulation des gens


• Circulation de l'argent

Aujourd'hui, l'UE est formée de 27 pays. Chacun conserve


sa langue, sa culture, ses arts, son mode de vie et toutes les
autres caractéristiques qui font son unicité, mais la disparition
des restrictions commerciales et voyagistes a fait advenir une ère
que tous les Européens que j'ai rencontrés personnellement et
qui vivent ce système de l'intérieur considèrent comme positive.
En prenant l'UE comme exemple de ce qui peut se produire
lorsque diverses nations œuvrent ensemble à des objectifs
communs, il est évident que la gouvernance mondiale peut
s'avérer une bonne chose. Si elle entraîne la réduction ou l' élimi-
nation des barrières empêchant que soient satisfaits les besoins
essentiels de chaque homme, de chaque femme et de chaque
enfant de la planète, et cela, sans compromettre leur unicité, il
est évident qu'il s'agirait d'un changement positif. Si les nécessi-
tés de la vie - la nourriture, l'eau, les médicaments, l'électricité
et la technologie - étaient rendues accessibles à tous les membres
de notre grande famille planétaire, et si en même temps nous
travaillions ensemble à résoudre les points de crise qui menacent
notre avenir, sans doute que le monde bénéficierait alors d'une
telle gouvernance.
L'un des objectifs avoués de la formation de l'UE était d' éli-
miner la compétition violente pour les ressources qui a causé les
effusions de sang, les souffrances et les guerres du passé. Si une
telle coopération se réalisait à l'échelle planétaire et comportait
le partage des ressources humaines et naturelles, il est alors tout
à fait possible que les guerres pour l'obtention des ressources
deviennent choses du passé. La réalisation de ces objectifs contri-
buerait beaucoup à répondre aux trois critères déjà cités qui nous
rendent violents et belliqueux : les menaces à notre vie, à notre
famille et à notre mode d'existence.
Évidemment, la gouvernance mondiale comporte aussi
un côté sombre. Si les systèmes et les politiques qui la font

254
La fin de la partie ...

fonctionner sont fondés sur autre chose que les « quatre libertés »
de l'UE, les avantages nommés plus haut ne pourraient jamais
se matérialiser. Si, par exemple, les principes de la gouvernance
étaient fondés sur la cupidité, le contrôle, le profit commercial
et la corruption, les gens souffriraient toujours des disparités de
fortune, du manque des nécessités de la vie, et du désespoir de
pouvoir changer leur situation. Si c'était le cas, la gouvernance
mondiale serait alors le pire scénario, apparenté au futur sombre
et terrifiant décrit par George Orwell dans son roman 1984.
Tout dépend donc de la manière dont elle s'effectuera.

•••
Un certain nombre d'options ont déjà été proposées pour
gérer le stress sans précédent que les changements mondiaux font
subir aux systèmes sur lesquels repose notre mode de vie. Pour
que ces solutions soient efficaces, quelque chose devra se produire
qui ne s'est jamais produit encore dans l'histoire connue des cinq
derniers millénaires du moins. Les problèmes - une population
de dix milliards d'individus, la pénurie croissante de nourriture
et d'eau, la propagation de maladies endémiques, l'adaptation
aux changements climatiques - sont si énormes qu'une seule
nation, ni même une collectivité de nations, ne peut les résoudre.
Pour la première fois dans l'histoire du monde, des solutions
doivent être appliquées à l'échelle planétaire. Pour ce faire, la
coopération de plusieurs des nations les plus grandes et les plus
puissantes s'avère nécessaire. L'urgence des crises que nous affron-
tons ouvrira la porte à une occasion sans précédent et aux choix
qu'elle entraînera. Les solutions seront-elles appliquées dans un
esprit de coopération et d'aide mutuelle, ou bien le seront-elles
avec les mêmes craintes qui ont conduit à des problèmes par le
passé et détruit tellement de choses qui nous étaient précieuses ?
Si nous en sommes présentement à divers stades de concep-
tion, de recherche d'appuis et de mise en application de certains

255
Vérité essentielle

plans pour résoudre les crises identifiées au chapitre 3, il existe


un projet déjà très développé et très connu du public, et qui a
reçu un financement important. Ce projet fut articulé il y a
plus d'une décennie, au tournant du millénaire. En septembre
2000, la 55e séance de l'Assemblée générale des Nations unies
a adopté la « Déclaration du Millénaire», une résolution propo-
sant de nouveaux partenariats planétaires pour atteindre une
série d'objectifs liés à un certain nombre de préoccupations
mondiales 6 •
Ces objectifs, maintenant connus sous le nom d'Objectifs
de développement du millénaire (ODM) des Nations unies, sont
construits autour d'un ensemble d'initiatives auxquelles 192 pays
et 23 organisations internationales ont déjà accepté de souscrire7•
Les éléments clés de ce plan ambitieux sont énumérés dans la
liste d'objectifs fournie plus bas.
Chaque objectif comporte des sous-objectifs conduisant à la
gouvernance, aux politiques, aux actions et aux normes néces-
saires pour atteindre cet objectif particulier. Parmi les plus ambi-
tieuses réalisations sur lesquelles se sont entendus les membres :
celles qui feront éliminer la pauvreté extrême dès l'année 2015.
Les huit objectifs déclarés sont les suivants :

• Objectif1 : éradiquer la faim et la pauvreté extrêmes.


• Objectif2: réaliser l'éducation primaire universelle.
• Objectif3: promouvoir l'égalité des sexes et valoriser
les femmes.
• Objectif4 : réduire la mortalité infantile.
• Objectif5 : améliorer la santé maternelle.
• Objectif6: combattre le sida, la malaria et les autres
maladies.
• Objectif?: assurer la durabilité environnementale.
• Objectif 8 : développer un partenariat planétaire
pour le développement.

256
La fin de la partie ...

Ces objectifs sont manifestement imposants. Il est clair


également que chacun requiert une action considérable pour être
atteint. Mis ensemble, ces huit objectifs forment le noyau d'un
changement radical dans la manière de gérer les crises, grâce à
une coopération sans précédent à l'échelle planétaire. Pour que
ce genre de coopération se réalise, il faut mettre en place un
cadre de travail pour les politiques et la gouvernance nécessaires
à l'atteinte des objectifs. Toutefois, avant que ce cadre de travail
puisse même être envisagé, notre vision du monde et de nous-
mêmes doit subir un changement radical. C'est là qu'entre en jeu
le leadership qui rendrait possible l'atteinte de ces objectifs, soit
une forme de gouvernance planétaire. C'est précisément ce que
les Nations unies proposent pour satisfaire aux besoins de notre
monde en crise.
Les objectifs de développement du millénaire (ODM)
semblent entrer dans deux catégories d'efforts : les objectifs 1
à 6 identifient des crises actuelles spécifiques qui existent toutes
en ce moment ; si les objectifs 7 et 8 sous-entendent des crises
humaines, un examen plus poussé de ces initiatives montre
qu'elles créent un cadre de travail pour une plus grande coopéra-
tion dans des projets à venir.
L'objectif 8.A, un des sous-objectifs du document décri-
vant les ODM, affirme le besoin de «développer davantage un
système commercial et financier non discriminatoire, ouvert,
réglementé et prévisible8 ». Pour définir cet objectif, on emploie
un langage complexe qui semble lié aux déclarations précédentes
sur les nouveaux types de devises et sur les systèmes monétaires
et commerciaux consolidés. Ce genre d'objectif porte ces projets
bien au-delà des efforts d'assistance, de secours et d'aide huma-
nitaire souvent associés aux projets antérieurs des Nations unies.
Je vous encourage à vous familiariser avec ces objectifs en
les examinant sur le site Internet des Nations unies (UN.org).
Si les récents changements survenus sur la scène mondiale en
sont un indice, nous pouvons nous attendre à ce que les Nations
unies adoptent une meilleure visibilité et une plus grande

257
Vérité essentielle

responsabilité, et à ce qu'elles exercent un rôle plus puissant dans


la gestion des crises de notre temps. Nous avons tous intérêt à
bien connaître ce plan.

la naissance d'un monde nouveau


Plus haut, nous avons examiné l'idée maya du temps et des
cycles temporels terrestres en synchronie avec ceux du cosmos.
Par leurs prophéties orales, les Mayas ont laissé des descriptions
de ce qui pourrait arriver durant les années de transition d'un âge
du monde au suivant. Ils savaient à quoi s'attendre, car, à l'instar
de nos ancêtres communs, ils avaient connu de tels cycles par le
passé et ils étaient conscients de la nature fractale de ces derniers.
Autrement dit, ce que le calendrier maya nous présente comme
la fin d'une ère et la «naissance» de la suivante dans le cosmos
correspond à la naissance que nous vivons tous en venant dans
ce monde. Du point de vue maya, il est impossible de séparer les
deux, et voici pourquoi.
La durée moyenne de notre séjour dans l'utérus maternel
(notre période de gestation) est d'environ 260 jours tandis que
le temps moyen que met la Terre à effectuer un énorme parcours
sur son orbite (la précession des équinoxes) est d'environ 26 000
ans. Sous l'aspect des schèmes, les 260 jours qui précèdent notre
naissance sont une fractale des 26 000 ans que met la Terre à
«accoucher» d'un nouveau cycle précessionnel.
Les Mayas savaient que les conditions changeaient à chaque
naissance pour faire place à la vie nouvelle. Dans le cas des cycles
des âges du monde, le changement consiste en la brisure des
choses qui ne fonctionnent pas devant les changements, afin de
faire place à celles qui fonctionnent. C'est précisément ainsi que
nos ancêtres indigènes voyaient notre époque de l'histoire : la
naissance cosmique d'un nouveau cycle de vie.
Ils savaient qu'ils auraient à développer un nouveau mode
d'existence à chaque nouveau cycle. Plusieurs ont interprété

258
La fin de la partie ...

2012, qui termine le calendrier maya, comme la date signalant


la fin du monde. Cependant, une meilleure compréhension des
traditions mayas révèle qu'il ne s'agit aucunement de la fin du
monde en soi, mais plutôt de la fin d'un âge du monde et d'un
mode de vie.
La fin de quelque chose est toujours suivie par le début
d'autre chose. La fin de notre âge du monde constitue donc le
début d'un nouveau cycle, la naissance d'un monde nouveau.
Carlos Barrios, anthropologue, historien et Ajq'ij (prêtre de céré-
monie et guide spirituel) maya, a résumé ainsi la chose du point
de vue des Mayas d'aujourd'hui, au cours d'une conversation
qui a eu lieu à Santa Fe, au Nouveau-Mexique, en 2002 : «Le
monde ne prendra pas fin. Il sera transformé. Les indigènes ont
des calendriers et ils savent les interpréter avec précision, ce qui
n'est pas le cas des autres9. »
L'analogie entre la naissance d'un individu et celle d'un
âge nouveau est pertinente. Elle est encore plus significative si
nous l'appliquons à la situation mondiale actuelle. Qu'il s'agisse
de notre sortie de l'utérus ou de l'émergence du sixième âge du
monde selon les traditions amérindiennes, le processus, une fois
amorcé, est un cheminement à sens unique qui nous transporte
dans un état d'où nous ne pourrons pas revenir. Dans les deux
cas, impossible pour nous de retourner d'où nous venons.
La raison pour laquelle nous ne pouvons pas retourner dans
l'utérus de notre mère est évidente, mais la raison pour laquelle
nous ne pouvons pas revenir dans le monde du passé l'est moins.
N'empêche que nous faisons un voyage à sens unique. Nous ne
pouvons retourner dans le monde du passé parce qu'il n'existe
plus. Il s'est transformé sous nos yeux pendant que nous vivions
le changement.
Voici la clé pour bien comprendre le message des Mayas
concernant notre époque. Le monde dans lequel nous avons
grandi et auquel nous nous sommes habitués n'était pas une
destination. Il ne pouvait jamais constituer un mode d'être
permanent parce qu'il n'était tout simplement pas durable.

259
Vérité essentielle

Le monde du milieu du XXe siècle était un jalon, un point


annonçant une courbe, qui nous a conduits à un autre mode de
vie. Si nous en doutons, nous n'avons qu'à regarder les modes de
vie du passé pour voir que l'ère de la douzaine d'œufs à 0,57 $,
du litre de lait à 0,49 $ et du litre d'essence à 0,31 $ est révolue.
Disparues également les valeurs et les loyautés qui définissaient
nos emplois, nos familles, ainsi que l'indépendance des individus
et des nations du monde.
Pour toutes ces raisons, le monde dont ma mère attend la
réapparition ne reviendra jamais et la vie ne redeviendra jamais
«normale». La vie d'aujourd'hui est la nouvelle normalité et elle
nous mène dans une seule direction: en avant. Nous ne pouvons
pas en arrêter la course, mais il nous est possible de la diriger.
Nous ne pouvons pas arrêter le changement, mais il nous est
possible de le guider vers un atterrissage plus doux.
C'est ici qu'intervient la vérité essentielle : nous sommes tous
mieux équipés pour faire les choix qui définiront notre avenir
quand nous comprenons les cycles, les échecs et les erreurs du
passé.

Destin ou destinée ?
Où allons-nous donc à partir d'ici? Où pouvons-nous aller?
Que nous soyons d'accord ou non sur le pourquoi du change-
ment mondial, le fait est qu'il a eu lieu. Plutôt qu'un changement
qui suit son cours, il semble que celui dont nous faisons tous
partie maintenant ne fait que commencer et qu'il s'accélère. Il
se produit sans doute plus vite qu'aucun visionnaire n'aurait pu
le prédire, plus vite que nous ne pouvons le décrire dans nos
manuels et nos salles de cours. C'est ici que notre cheminement
spirituel et scientifique s'accomplit sur la route de la vie et de
notre avenir. Cette route ne peut mener qu'à deux choses : ou
bien elle pavera la voie à notre destinée ou bien elle nous enfer-
mera dans notre destin. Nous saurons très bientôt quel choix
nous avons fait comme nations et comme planète.
260
La fin de la partie ...

Notre destination ultime sera la conséquence de toutes


les crises majeures de notre temps si elles ne sont pas résolues.
Comme nous l'avons vu déjà, il existe cinq crises décisives.

• Crise 1 : une population mondiale insoutenable


• Crise 2 : les changements climatiques
• Crise 3: la pénurie croissante de nourriture et d'eau
potable
• Crise 4 : l'écart grandissant entre la richesse et
la pauvreté, la santé et la maladie, l'éducation et
l'analphabétisme
• Crise 5 : le risque de guerre croissant et la nouvelle
menace d'une guerre nucléaire

Chacune de ces crises a le potentiel de mettre fin à la civi-


lisation et à la vie telles que nous les connaissons aujourd'hui.
Chacune est déjà présente dans son secteur. Comme elles se
produisent déjà toutes, chacune a établi une sorte de trajectoire
au bout de laquelle elle finira par nous conduire avec le temps si
nous n'intervenons pas. L'explosion démographique, par exemple,
a établi une trajectoire comportant des intervalles de plus en plus
brefs entre les doublements de population, de sorte que notre
famille planétaire comptera dix milliards d'individus en 2050. Si
nous n'intervenons pas, voici ce qui attend notre famille plané-
taire : les conséquences ahurissantes de la compétition entre dix
milliards de personnes pour obtenir de la nourriture, de l'eau,
des emplois et un logement, ce qui fera diminuer les ressources
vitales dans seulement quarante ans.
Si nous appliquons la même vision à chaque secteur de crise,
il est facile de voir que chacun, sans notre intervention, a le
potentiel de nous conduire à une issue terrible. De ce point de
vue, nous pouvons considérer le destin comme ce qui arrivera si
nous connaissons l'existence de la crise et que nous ne faisons
rien pour y remédier. C'est le président Ronald Reagan qui a

261
Vérité essentielle

peut-être su le mieux exprimer cela, dans son discours inaugural


de 1981 : «Je ne crois pas à un destin qui nous tombera dessus
quoi que nous fassions. Je crois à un destin qui nous tombera
dessus si nous ne faisons rien 10 • » Quant aux cinq crises identi-
fiées par les meilleurs esprits de notre époque, le choix de ne rien
faire pour les résoudre équivaudrait à réaliser en tant que destin
les plus sombres prophéties de guerre et de mort.
Quand nous réfléchissons au destin et à la destinée, l'impor-
tante distinction entre les deux devient évidente. Si nous pouvons
voir le destin comme une gestion passive des difficultés qui nous
échoient, la destinée, par ailleurs, est le produit de l'action.
Notre destinée doit être mise en mouvement pour se réaliser.
Dans le cas des crises que nous affrontons, cette action vient
sous la forme de nos choix. La destinée, c'est ce qui nous attend,
comme individus et comme collectivité, lorsque nous faisons les
choix qui conduisent à la réalisation de notre meilleur potentiel.
William Jennings Bryan a résumé magnifiquement la nature de
la destinée quand il a dit : «La destinée n'est pas une question
de chance, mais de choix. Ce n'est pas quelque chose qu'il faut
attendre, mais qu'il faut réaliser11 • »

•••
Je pense que les crises de notre temps sont intimement liées
à notre destinée. Le fait qu'autant de secteurs de notre vie soient
redéfinis et qu'autant de changements convergent en une si brève
période de temps, presque du jour au lendemain, me semble
davantage qu'une simple coïncidence. Nous pouvons considérer
cette convergence comme une vérification cosmique. En l'espace
de quelques brèves années, nous avons vu lesquels de nos choix
de civilisation sont efficaces et lesquels ne le sont pas. Nous
pouvons voir quels systèmes sont durables et lesquels ne le sont
pas. Sachant ainsi quels systèmes ont failli, nous devons alors

262
La fin de la partie ...

choisir : adopterons-nous un nouveau mode de vie qui comblera


nos besoins par des moyens propres et durables, respectueux de
notre monde et de nous-mêmes, ou bien nous combattrons-nous
mutuellement pour promouvoir des modes de vie insoutenables
qui finiront par échouer de nouveau et nous entraîner devant les
mêmes choix plus tard?
Les modes de vie qui ne fonctionnent pas sont ceux que nous
voyons s'écrouler en ce moment même : les systèmes économiques
criblés de dettes, les soins de santé surchargés, l'usage croissant
de carburants fossiles épuisables pour procurer de l'énergie à une
population mondiale en expansion. Ils appartiennent tous au
changement de langage du code de la civilisation. Si nous obser-
vons comment nos choix quotidiens s'insèrent dans l'ensemble,
leur rôle devient clair. Nos choix individuels sont les fondements
collectifs du nouvel âge du monde.

Si nous examinons l'ensemble des choses sur la Figure 7.1,


il est clair que les conditions qui terminent un cycle deviennent
les bases du suivant. Il est clair également qu'il se trouve entre
les cycles un espace où aucun des deux n'est présent : un point
de choix. C'est là que nous nous trouvons : près de la fin du long
point de choix de 36 ans entre 1980 et 2016 qui marque la fin
de notre cycle de 5125 ans 12 • Ainsi, alors que les crises énumé-
rées du côté gauche de la Figure 7.1 constituent les réalités de
notre époque, le fait qu'elles convergent à la fin du cycle nous
fournit l'occasion de changer les schèmes avant de commencer le
nouveau cycle indiqué du côté droit de la figure.

263
Vérité essentielle

Ages du monde Futurs âges


passés du monde
~ Age présent Nouvelilge ~
~J(" 't ~ de512Sans de512Sans ~J(" 't ~
~~~ ~~~

Caractéristiques du cycle actuel Caractéristiques du prochain cycle


• Une population Insoutenable • Population soutenable ?
Contrôle du changement climatique Adaptation au changement climatique ?
Pénurie de nourriture et d'eau Réserves suffisantes de nourriture et d'eau ?
• Pauvreté croissante • Fin de la pauvreté ?
Menace d'une guerre mondiale Fin des guerres?
Civilisation fondée sur la compétition Civilisation fondée sur la coopération ?

Figure 7.1 : Nous sommes la génération qui établit le pont entre deux cycles tem-
porels: la fin du cinquième cycle d'une série d'âges du monde de 5125 ans chacun
et le début du sixième, qui inaugure la série suivante. En plus de joindre un cycle
au suivant, les traditions anciennes et indigènes nous rappellent que, comme géné-
ration de jonction, nos choix déterminent quelles croyances du dernier cycle nous
conserverons comme bases du prochain.

Réécrire notre histoire: version 2.0


Nous vivons notre existence en fonction de nos croyances. Ce
simple fait mène à la réalisation qu'au-delà de tout ce que nous
pouvons faire au cours de notre vie, les croyances qui précèdent
nos actions sont les fondements de tout ce que nous chérissons,
rêvons, devenons et accomplissons. Nos rituels en début de jour-
née, la technologie qui améliore notre existence, celle qui détruit
la vie par la guerre, nos routines personnelles, les rituels commu-
nautaires, les cérémonies religieuses - en fait, notre civilisation
entière - sont fondés sur notre vision de nous-mêmes et de notre
relation au monde.

264
La fin de la partie ...

Quand on s'en rend compte, il est normal de se demander


d'où viennent nos croyances. La réponse vous étonnera peut-être.
À peu d'exceptions près, nos croyances proviennent de ce
que d'autres personnes nous ont dit de notre monde. En d'autres
mots, la lentille à travers laquelle nous voyons le monde et faisons
nos choix les plus importants est constituée de ce que la science,
l'histoire, la religion, la culture et notre famille nous ont dit du
monde et de nous-mêmes.
En ce qui concerne les faits de l'histoire, de l'évolution et
de la vie elle-même, ces «autres personnes» ont souvent été,
pour les trois derniers siècles, les savants et les organisations
qui préservent et enseignent nos traditions scientifiques les plus
précieuses. C'est là que le véritable pouvoir de la science prend
une nouvelle signification.
Au-delà de la satisfaction que nous trouvons dans notre
recherche de la «vérité », les réponses de la science sur nous-
mêmes et sur notre rôle dans le monde sont les fondations sur
lesquelles nous construisons notre monde et définissons notre
manière de résoudre les problèmes de la vie.
Et comment la meilleure science de notre époque nous défi-
nit-elle ? Historiquement, on nous a appris que nous sommes
d'insignifiantes créatures apparues comme un «accident» biolo-
gique survenu tard dans l'histoire de la planète et ayant peu de
conséquences sur l'ensemble des choses pendant leur présence ici.
Et quand nous ne serons plus là, l'univers ne s'apercevra même
pas de notre absence.
Si cette description semble dure, l'idée générale est sans doute
assez proche de ce que plusieurs d'entre nous ont été conditionnés
à croire. La science du siècle dernier nous a amenés à croire que
la vie elle-même est le produit d'une combinaison apparemment
impossible d'éléments et de conditions ayant existé il y a long-
temps; que l'humanité n'est qu'un produit de ces événements
aléatoires et que nous sommes essentiellement des animaux, et
donc belliqueux par nature; que la civilisation d'aujourd'hui est
l'aboutissement de 5 000 ans d'ingéniosité humaine, de créativité

265
Vérité essentielle

et de technologie, et que nous avons la capacité de maîtriser la


nature et d'exploiter les ressources de la terre.
Ce n'est sans doute pas une coïncidence si, durant cette
même période où l'on nous a demandé d'accepter ces croyances,
l'humanité a subi d'énormes pertes par la guerre, d'immenses
souffrances par le génocide, et les pires dommages à l'environne-
ment dont nous dépendons pour vivre. Ce sont précisément ces
croyances qui, souvent, nous donnent un sentiment de petitesse
et d'impuissance devant les plus grandes difficultés de la vie.
Et si nous étions plus que cela? Se pourrait-il que nous soyons
réellement des êtres uniques et puissants portant un déguise-
ment? Et si nous étions les délégués d'un potentiel miraculeux,
nés en ce monde pour accomplir une belle destinée que nous
avons simplement oubliée dans les conditions qui nous ont enfer-
més dans l'apathie de l'impuissance ?
Par exemple, comment notre vie changerait-elle si nous
découvrions que nous sommes nés avec le pouvoir d'inverser
le cours des maladies ? Si nous découvrions que nous pouvons
choisir la paix dans le monde, l'abondance dans notre vie et même
la durée de celle-ci? Si nous découvrions que l'univers lui-même
est directement affecté par un pouvoir que nous nous sommes
caché pendant si longtemps que nous avons oublié qu'il était
nôtre? Un changement de paradigme aussi radical changerait
tout. Il modifierait notre vision de nous-mêmes, de l'univers et
de notre rôle dans celui-ci. C'est précisément ce que les actuelles
découvertes de pointe nous démontrent.

266
La fin de la partie ...

La hiérarchie
de la pensée
Pensée fondée sur de fausse•
hypothèses scicnd fiqucs

6. Règlement des problèmes 6 . Règlement des problèmes


par la compétition, par la coopération,
la force la compréhension
et le conflit. et l'aide m utuelle.

5. Linéaire, à sens unique. 5. Cyclique; les conditions


et les crises se répètent.
4. Séparation
et indépendance. 4. Connexion et
interdépendance.
3. Séparation
et impuissance. 3. Connexion et liaison.

2. Événement fortuit 2. Rare combinaison


de processus aléatoires. de systèmes préconçus.

1. Processus de conception di rigé.


1. Événement fortuit I Hasard

Figure 7.2 : Une différence dans la compréhension de la vie et de l'histoire révolu-


tionne notre vision de nous-mêmes et notre façon de résoudre nos problèmes. Des
relations personnelles à la civilisation planétaire, le choix de la coopération ou de la
compétition, illustré au niveau 6, résulte de notre vision de la vie aux niveaux 1 à 5.
Les découvertes scientifiques décrites dans les chapitres précédents nous donnent
les raisons de nous voir autrement alors que nous faisons les choix qui détermine-
ront notre destinée ou qui deviendront notre destin.

Au chapitre 2, nous avons vu que la pyramide du savoir


scientifique est hiérarchisée. Quand on effectue une nouvelle
découverte quelque part sur cette pyramide, les sciences qui se
trouvent au-dessus d'elle doivent changer afin de demeurer scien-
tifiques. Un peu de la même façon, notre vision de nous-mêmes
est hiérarchisée et suit la même règle générale.
Il est facile de voir qu'en nous considérant comme le produit
d'un accident biologique, comme séparés et indépendants de
notre entourage et de notre environnement, et même séparés de
nous-mêmes (les fausses hypothèses de la science), la conclusion
naturelle est de résoudre nos problèmes par la force et le conflit.

267
Vérité essentielle

Quand nous nous considérons comme séparés et impuissants, le


conflit a du sens.
Il est facile également de voir que lorsque la science révèle
que nous sommes davantage que ce que l'on nous a amenés à
croire au sujet de nos origines, de notre relation à la nature et
à nous-mêmes (les nouvelles découvertes), la force et le conflit
n'ont plus aucun sens. La révélation de vérités aussi essentielles
rend immédiatement désuètes les vieilles idées sur la résolution
des problèmes. Comme le démontre l'histoire qui suit, la volonté
de se voir selon une nouvelle perspective peut changer toute une
façon de vivre. Cette volonté ouvre même parfois la porte à la vie
elle-même.

•••
En 2003, Aron Ralston s'est retrouvé à un moment détermi-
nant de sa vie. Grimpeur habile connaissant bien les montagnes
du Colorado, il avait quitté son emploi d'ingénieur chez Intel
pour consacrer plus de temps à sa passion. En mai de cette
année-là, il explorait les étroites crevasses du canyon Blue John de
l'Utah lorsque, soudain, l'inconcevable se produisit. Au moment
où il sautait par-dessus une crevasse de deux mètres de profon-
deur, le rocher sur lequel il avait pris son élan céda tout à coup.
«Je m'amusais avec insouciance dans un endroit magnifique
et soudain ... merde! Je suis tombé au ralenti, j'ai vu le rocher
s'en venir sur moi, j'ai levé les bras pour m'y soustraire et il m'a
écrasé la main l3. »
En quelques secondes, sa vie a basculé. Son bras était coincé
entre le rocher de 350 kilos et la paroi du canyon. Il est resté
ainsi captif pendant six jours. Il n'avait pas de cellulaire (inuti-
lisable dans la région) et personne ne savait où il se trouvait.
Dans son sac : deux burritos, du chocolat, un caméscope et une
petite quantité d'eau. Il savait qu'il y avait peu de chances que
quelqu'un l'aperçoive dans cette crevasse.

268
La fin de la partie ...

Le cinquième jour, il s'est résigné à mourir à cet endroit.


Il a gravé son épitaphe sur la paroi rocheuse à l'aide d'un petit
couteau et il a même enregistré ses dernières volontés et son testa-
ment avec la caméra. Puis il se passa quelque chose qui vint tout
changer. Au milieu de la nuit, il rêva qu'un jeune garçon le regar-
dait dans les yeux en lui demandant : «Papa, est-ce qu'on peut
jouer maintenant? »
Ralston comprit qu'il avait eu une vision du futur et de ce
qui était encore possible. C'est cette possibilité - de savoir qu'il
serait père un jour - qui le fit changer d'attitude devant sa situa-
tion. Ce qui est survenu ensuite a fait l'objet de livres, de repor-
tages télévisés et du film 127 heures, sorti en 2010.
Le lendemain matin, Ralston trouva comment utiliser son
corps comme levier contre la paroi du canyon. Il brisa exactement
au bon endroit son bras coincé. À l'aide de son petit couteau de
poche, il découpa sa chair, ses muscles et l'os brisé afin de se
dégager du rocher. I.:opération dura une heure. Ensuite, il sortit
du canyon et marcha jusqu'à ce que deux excursionnistes le
trouvent et fassent venir de l'aide.
Ralston a survécu à cette épreuve. Il a maintenant une
prothèse et il continue à grimper dans les montagnes et les
canyons comme auparavant. Sa volonté de changer d'attitude,
son courage de donner suite à son choix, et sa détermination
à vivre ont touché des milliers de gens partout dans le monde.
Ralston retourne parfois au canyon Blue John, à l'endroit exact
de l'accident, pour des raisons personnelles.
«Je retourne à cet endroit où j'ai tellement réfléchi à ce qui
est important dans la vie, à mes relations, et où j'ai éprouvé le
désir intense de m'en sortir pour retourner à l'amour et à l'amitié,
à la liberté au lieu de la captivité14 • »

•••
269
Vérité essentielle

Aron Ralston a eu une prise de conscience qui a changé sa


vision de lui-même et de sa situation, et ce changement lui a
sauvé la vie. Bien sûr, nous n'avons pas besoin de tomber dans
une crevasse d'un canyon de l'Utah pour faire cette prise de
conscience, et j'espère que cela n'arrivera plus à personne, mais
l'expérience de Ralston peut nous apprendre quelque chose.
Tout comme il a choisi la liberté au lieu de la captivité, nous
faisons à chaque instant des choix qui ont les mêmes consé-
quences. Si nous ne choisissons pas la liberté procurée par un
mode de vie durable, nous restons captifs des nombreuses crises
que nous connaissons aujourd'hui en nous accrochant au vieux
mode de vie insoutenable du passé. Je crois que notre liberté
commence par l'engagement personnel à savoir qui nous sommes
dans l'univers. Quand nous prenons un tel engagement, notre
vision de nous-mêmes et notre façon d'agir changent. C'est
inévitable, car le changement est dû à une compréhension plus
profonde.

La nouvelle histoire de notre vie


Selon la hiérarchie de la nouvelle pensée illustrée à la
Figure 7.2, résumons les vérités essentielles révélées dans les
chapitres précédents et imaginons la nouvelle histoire de la vie
humaine qu'elles nous révèlent.

- Vérité 1 : Pour désamorcer les crises qui mettent en péril


notre vie et notre monde, il faudra accepter ce que la science
révèle sur nos origines et notre histoire.

• Fait : Nous vivons à un point de basculement de la


civilisation où nous affrontons le plus grand nombre
de crises majeures vécues par l'humanité en 5 000
ans d'histoire connue.

270
La fin de la partie ...

• Fait: La panne planétaire des systèmes économiques,


des soins de santé et des systèmes de production et de
distribution de carburants fossiles est un symptôme
de pratiques insoutenables fondées sur de fausses
hypothèses scientifiques.
• Fait : Pour savoir quels choix effectuer, quelles lois
passer et quelles politiques appliquer, nous devons
connaître la vérité sur nos origines et notre histoire.
• Fait : Les fausses hypothèses des vieilles croyances
concernant l'évolution et les origines de l'humanité
ont maintenant peu de sens en présence des nouvelles
découvertes scientifiques.

- Vérité 2 : Puisque les systèmes éducatifs conventionnels


se montrent réticents quand il s'agit d'assimiler les nouvelles dé-
couvertes et d'explorer des théories inconnues, nous demeurons
bloqués sur des croyances obsolètes qui n'arrivent pas à gérer les
crises les plus graves de l'histoire humaine.

• Fait: Les principes solides de la méthode scientifique


ont la caractéristique intégrée de s'autocorriger en ce
qui a trait aux fausses hypothèses.
• Fait : Depuis trois siècles, nous avons basé nos choix
concernant la vie, le gouvernement et la civilisation
sur notre vision de nous-mêmes et notre relation au
monde, un savoir fondé sur les fausses hypothèses
d'une science désuète.

- Vérité 3 : La solution qui permettra de surmonter les crises


menaçant notre survie repose sur des partenariats fondés sur
l'entraide et la coopération afin de s'adapter aux changements; il
faut cesser les accusations et les blâmes qui entravent ces alliances
capitales.

271
Vérité essentielle

• Fait: Il nous faut absolument trouver des moyens


propres, verts et durables de fournir de la nourriture,
de l'électricité et du carburant aux sept milliards
d'habitants de notre planète.
• Fait: Même sil' ère industrielle a certainement contri-
bué à la présence des gaz à effet de serre dans l'atmos-
phère, le changement climatique auquel nous assis-
tons aujourd'hui n'a pas été causé par les humains.
• Fait: La preuve scientifique nous révèle que, sur une
période de 420 000 ans, le climat terrestre est passé
par des cycles de réchauffement et de refroidissement
à des intervalles d'environ 100 000 ans alors qu'il
n'existait pas d'industries humaines.
• Fait: Les cycles de réchauffement terrestre des
420000 dernières années montrent que l'augmenta-
tion des gaz à effet de serre traîne derrière celle de la
température par environ 800 ans.
• Fait: Il faudra des alliances, une synergie et un travail
d'équipe d'une ampleur sans précédent pour créer un
mode de vie durable qui nous aidera à nous adapter
aux cycles naturels du changement ainsi qu'aux crises
causées par l'homme.

- Vérité 4 : La découverte de civilisations avancées remon-


tant à la fin de la dernière ère glaciaire nous fournit des indices
pour surmonter les crises de notre époque que nos ancêtres ont
également affrontées.

• Fait: Les révélations scientifiques de l'existence de


civilisations presque contemporaines de l'ère glaciaire
bouleversent l'histoire traditionnelle.
• Fait: Les nouvelles découvertes de la science soutiennent
la vision indigène d'un monde cyclique, avec la montée

272
La fin de la partie ...

et le déclin des civilisations, des crises catastrophiques,


et les conséquences de mauvais choix qui se répètent.
• Fait: Depuis l'apparition des premiers humains
modernes, nous avons traversé de grands cycles
planétaires qui peuvent nous instruire, dont :
- deux cycles de 100 000 ans d'ères glaciaires,
- cinq cycles de 41 000 ans de changements de
l'angle de l'orbite terrestre (obliquité),
- quarante cycles d'âges du monde de 5125 ans
chacun,
-huit oscillations orbitales de 25 695 ans (précession
des équinoxes).

- Vérité 5 : Grâce à des technologies de pointe, plusieurs do-


maines scientifiques recueillent des preuves indubitables confir-
mant que l'humanité résulte d'une conception mise en œuvre
spontanément; celle-ci n'est pas le produit de l'évolution sur une
longue période de temps d'une forme de vie apparue au hasard.

• Fait: Le débat sur les origines de l'humanité doit


faire la différence entre la preuve et la confirmation.
• Fait: Comme aucun être vivant aujourd'hui n'a été
témoin des débuts de l'humanité, nous devons nous
appuyer sur des confirmations pour expliquer notre
existence.
• Fait: Les nouvelles preuves ne soutiennent pas la
théorie traditionnelle de l'évolution par sélection
naturelle telle qu'elle s'applique aux humains.
• Fait: La plupart des grandes familles animales
qui existent à ce jour sont apparues sur la planète
au moment du «big-bang» biologique : l'explosion
précambrienne de la vie sous diverses formes, surve-
nue il y a environ 154 millions d'années.

273
Vérité essentielle

• Fait: I..:organisation de l'information biologique sous


la forme de l'ADN, combinée à de multiples exemples
de complexité irréductible, s'ajoute à l'ensemble
croissant de preuves démontrant que les processus
aléatoires ne peuvent expliquer l'existence humaine.
• Fait : Les humains modernes sont apparus il y a
environ 200000 ans et nous sommes aujourd'hui
presque identiques à ces premiers membres de notre
espèce.
• Fait : Alors que la science n'identifiera peut-être
jamais précisément qui ou quoi est responsable de
l'existence de l'humanité, la preuve d'une conception
intelligente est fortement présente.

- Vérité 6 : Plus de 400 études spécialisées ont conclu que


la compétition violente et la guerre allaient à l'encontre de nos
instincts primordiaux de coopération et de soins mutuels.

• Fait : Les études scientifiques démontrent d'une


manière concluante que la nature est fondée sur un
modèle de coopération et d'aide mutuelle plutôt que
sur la compétition violente et la guerre.
• Fait: Pendant un siècle et demi, nous avons construit
une civilisation basée sur des modèles de compétition
violente et sur la fausse hypothèse du darwinisme,
soit «la survie du plus fort».
• Fait: Nous sommes des êtres non violents par nature,
mais nous pouvons devenir violents quand l'une ou
l'autre des trois conditions suivantes sont remplies :
nous nous sentons menacés, nous sentons que notre
famille l'est, ou nous sentons que notre mode de vie
est en péril.

274
La fin de la partie ...

• Fait : La guerre sur une grande échelle semble une


réaction acquise à partir des difficultés de la vie
plutôt qu'un trait humain naturel.

Ces six vérités essentielles fondées sur des faits scientifiques


ne peuvent plus être ignorées lorsque nous pensons à notre
manière de régler les problèmes qui nous incombent. Comme
nous basons sur notre vision de nous-mêmes notre mode de vie,
notre façon de régler les problèmes et de construire nos commu-
nautés, nos nations et nos civilisations, il est plus important que
jamais de prendre ces vérités en considération. Au lieu de voir
les crises mondiales comme des barrières qui nous empêchent
d'avancer, nous nous apercevrons peut-être qu'elles sont en réalité
des portails que nous devons franchir pour accélérer le processus.
Dans mon livre La Divine Matrice [Ariane Éditions], j'ai
raconté l'histoire d'un ami qui avait quitté tout ce qu'il aimait, y
compris sa carrière, ses amis et sa famille, pour aller vivre dans la
beauté sauvage du nord du Nouveau-Mexique. Je lui ai demandé
pourquoi il avait tout laissé derrière lui pour aller s'isoler dans le
grand désert.
Il commença par me dire qu'il y cherchait sa «voie spiri-
tuelle». Du même souffle, cependant, il me dit également qu'il
n'avait pas pu la trouver parce que trop de problèmes s'étaient
« mis en travers» de sa route : il avait des tracas avec la famille
qu'il avait quittée, ses projets d'avenir professionnels semblaient
sérieusement compromis, le stress causé par son déménagement
et par ses problèmes lui avait créé de nouveaux ennuis de santé,
et les hommes qui construisaient son nouveau foyer spirituel
semblaient travailler en fonction d'un horaire très différent de
celui qu'il avait convenu avec eux. Sa frustration était évidente.
J'ai rapporté cette histoire pour illustrer un point qui peut
s'appliquer encore plus à la situation mondiale d'aujourd'hui.
Je suis d'avis que nous sommes incapables d'autre chose
que d'une évolution spirituelle. Autrement dit : en tant qu' êtres
spirituels, nous sommes capables uniquement d'expériences

275
Vérité essentielle

spirituelles. Quelle que soit l'apparence des situations, quels que


soient les obstacles sur notre route et quelle que soit la « conspira-
tion» de l'univers pour nous écarter de notre cheminement spiri-
tuel, il est impossible de séparer de notre voie spirituelle tout ce
qui nous arrive au quotidien. En fait, je crois que ces événements
sont notre cheminement spirituel.
Tout comme j'ai offert cette possibilité à mon ami, j'affirme
que les conditions actuelles de notre monde ne sont pas un
accident. Elles ne se sont pas produites du jour au lendemain
et ne disparaîtront pas toutes seules. Comme je l'ai mentionné
plus haut, le fait qu'autant de crises convergent en une si courte
période de temps ne peut pas être une coïncidence. C'est main-
tenant, alors que nous passons d'un âge du monde à un autre,
que nous devons faire les choix qui définiront le prochain cycle.
Vivrons-nous notre destinée grandiose ou scellerons-nous notre
destin dans la guerre et la souffrance ?

Où allons-nous à partir d'ici ?


Sans le moindre doute, ce livre expose de grandes idées.
Devant les crises identifiées dans les chapitres précédents, il est
facile de se sentir chacun dépassé et insignifiant. Pourtant, nous
avons encore à peine effleuré les aspects les plus profonds de
ces sujets. Partout dans le monde, en diverses langues, il existe
une opinion commune quant aux crises que nous affrontons :
les problèmes semblent trop gros pour que nous puissions les
résoudre individuellement. Par où commencer?
La réponse à cette question est brève. Pour certains, elle
semblera simpliste. Néanmoins, la simple élégance de la nature
rend possibles de grands changements à partir de petites expé-
riences, car les choix que nous faisons au quotidien se fondent à
ceux des autres pour former notre réponse collective aux crises
de notre temps.

276
La fin de la partie ...

Nos choix individuels deviennent notre réponse


collective à notre époque de l'histoire.

C'est dans notre façon de mener notre existence quotidienne


que l'essence de nos choix- la coopération ou la compétition, le
pouvoir de l'amour ou de la peur - imprègne le champ qui inter-
connecte tout ce qui existe. Ce sont aussi ces choix qui finissent
par transparaître dans notre manière de gérer les crises mondiales.
Soyons clairs : cela ne veut pas dire que nous ne faisons rien. En
fait, c'est tout le contraire. Il s'agit de l'action, celle qui apparaît
chaque jour dans notre façon de vivre.
Tous les jours, nous avons entre les mains le pouvoir d'aider
les autres ou de leur nuire. Par exemple, facilitons-nous les choses
au véhicule qui nous précède sur la route en ralentissant pour
permettre au chauffeur de retrouver la sortie qu'il a manquée,
ou bien l'ignorons-nous au risque de notre vie et de la sienne
en continuant à toute vitesse sur notre voie parce qu'il nous a
«coupés»? Réagissons-nous à l'hostilité d'une caissière d'épicerie
qui traverse une mauvaise journée ou comprenons-nous que son
impolitesse n'est pas dirigée contre nous personnellement?
J'ai vu de mes yeux fonctionner avec succès en divers endroits
les principes de la cohérence fondée sur le cœur, dans la salle de
conférences d'une entreprise comme dans un théâtre rempli de
5 000 personnes. Le secret, c'est que le monde change lorsque
nous changeons. Dans un monde baignant dans un champ
reconnu par la science et qui connecte tous les cœurs entre eux,
la question porte moins sur la manière d'atteindre les PDG des
multinationales et les dirigeants des nations que sur ce que nous
choisissons de placer dans le champ quantique ou la matrice
énergétique qui nous connecte tous 15.
Si les faits exposés dans ce livre nous donnent des raisons
de nous voir différemment, cette différence s'exprime dans tous

277
Vérité essentielle

nos actes quotidiens. Dans cette optique, les grandes catégories


suivantes sont des exemples de choix quotidiens ayant le potentiel
d'exercer un impact planétaire. En fait, ces choix précis peuvent
faire pencher la balance de la paix et de la vie en notre faveur en
temps de crise.

- Les médias. De plus en plus de preuves indiquent que les


images et les mots dont nous nous entourons affectent la réalité
de notre monde, ce qui conduit à une question fondamentale :
quand nous regardons un film ou écoutons la radio en compagnie
de nos amis ou de notre famille, ne faisons-nous que nous diver-
tir sans plus ou bien, comme l'indiquent les études, créons-nous
les composantes du monde dans lequel nous vivons? Les parallèles
entre les scénarios cinématographiques apocalyptiques de la fin
du xxe siècle et les crises uniques de notre temps sont frappants
et peuvent illustrer précisément ce point. Il est évident que les
médias jouent ici un rôle important. Pour cette raison, notre
choix de soutenir les images et les dénouements positifs qui vont
dans le sens de la vie envoie un message puissant aux studios qui
produisent les films.

- L'alimentation. L'une des choses les plus simples et les plus


saines que nous puissions accomplir pour faire pencher en notre
faveur la balance du commerce conscient, c'est d'encourager et de
soutenir les entreprises vendant des produits bio cultivés locale-
ment. Quand nous mangeons « local », nous éliminons l'énorme
empreinte carbonique laissée par la combustion du carburant
nécessaire au transport jusqu'à nos supermarchés, par avion, par
bateau et par camion, des fruits et légumes saisonniers cultivés
sur des fermes commerciales à l'autre bout du monde. La plupart
des épiceries vendent maintenant des produits bio. Chaque fruit
et légume devrait porter une étiquette indiquant son origine et
son mode de culture. Plusieurs communautés possèdent aussi des
coopératives alimentaires et des restaurants qui soutiennent les

278
La fin de la partie ...

entreprises locales et organiques «de la ferme à la table». Cher-


chez-les dans votre région.

- Les affaires. Bien sûr, personne ne veut retourner au mode


de vie «primitif» du passé et nous n'avons certainement pas be-
soin de le faire, mais nous disposons d'options écologiques pour
les articles dont nous avons besoin à la maison et au bureau.
Par exemple, nous pouvons acheter des serviettes de papier, des
mouchoirs et du papier hygiénique faits de matières recyclées qui
réduisent les coupes d'arbres. De plus, nous pouvons nous procu-
rer des produits en plastique moulé fabriqués à partir de matières
recyclées - y compris des bouteilles, des contenants de yaourt et
même des brosses à dents - au lieu d'utiliser des ressources déjà
en quantité insuffisante.

- La vie consciente. En ce qui concerne l'impact de nos


choix sur le monde, les ressources pour guider nos décisions
ne manquent pas. Le présent ouvrage a créé un cadre de tra-
vail permettant d'améliorer notre vision de nous-mêmes, mais
d'autres auteurs se sont consacrés à une meilleure compréhension
de la vie consciente. Comme tout le monde n'apprend pas de la
même façon, nous avons la chance de disposer d'une myriade
d'approches pour créer le monde plus coopératif qui émerge en
ce moment. Les livres suivants sont des ouvrages bien écrits qui
explorent sous divers aspects très intéressants des secteurs spéci-
fiques de la vie consciente :

• Évolution spontanée. Comment cocréer un avenir positif,


par Bruce Lipton et Steve Bhaerman (Ariane, 2011).
• Voluntary Simplicity: Toward a Wizy of Lift That Is
Outwardly Simpk, Inwardly Rich, par Duane Elgin
(HarperCollins, 2010).
• Promise Ahead: A Vil"ion ofHope andActionfor Humanity's
Future, par Duane Elgin (HarperCollins, 2001).

279
Vérité essentielle

• Global Shift: How a New Worldview Is Transforming


Humanity, par Edmund J. Bourne (New Harbinger/
Noetic Books, 2009).
• Le Plan B. Pour un pacte écologique mondial, par Lester
R. Brown (Hachette Littérature, 2008).
• L1ntelligence intuitive du cœur. La Solution Heartmath,
par Doc Lew Childre et Howard Martin (Ariane,
2005).

Le choix nous appartient


Nous avons commencé ce livre en posant une simple ques-
tion, celle qui est sous-jacente à chacun de nos choix, à chaque
difficulté que nous affrontons, celle qui est à la base de chacune
de nos décisions : qui sommes-nous?
À la lumière de ce que nous avons découvert tout au long de
cet ouvrage, nous voyons maintenant pourquoi il est extrême-
ment important de répondre à cette question. C'est nécessaire.
C'est vital. La façon dont nous y répondrons déterminera notre
vision de nous-mêmes ainsi que notre mode de vie. Cette ques-
tion surgit dans tous les aspects de notre existence, tant dans
notre façon de prendre soin de nos enfants que dans notre façon
de traiter nos parents âgés. Elle fonde les principes gouvernant
notre partage des ressources comme la nourriture, l'eau, les médi-
caments et les nécessités de la vie; le moment et la raison d'aller
en guerre ; la base de notre économie ; nos croyances quant à la
destinée et au destin; l'opportunité de sauver une vie humaine;
l'opportunité de mettre fin à la vie. Bref, notre réponse à cette
question se trouve au cœur de la civilisation elle-même.
En définitive, qui sommes-nous ? Bien que nous ayons sans
doute perçu la réponse intuitivement au cours de notre vie, la
science sur laquelle nous nous appuyons maintenant et à laquelle
nous faisons confiance a validé notre intuition.

280
La fin de la partie ...

Qui sommes-nous?
Nous sommes des êtres mystérieux d'origine mystérieuse.
Nous sommes apparus sur la Terre tels que nous sommes
aujourd'hui il y a environ 200000 ans, soit trente cycles d'âge du
monde et deux ères glaciaires. Notre corps porte les signes indé-
niables d'une conception intelligente. Nous venons en ce monde
en parlant le langage silencieux du cœur qui communique avec le
champ qui donne naissance à toutes choses et qui les relie entre
elles. Nous sommes les architectes de civilisations avancées qui
datent d'au moins la fin de la dernière ère glaciaire, et sans doute
d'avant. Nous sommes des êtres puissants qui deviennent violents
quand ils craignent pour leur vie, pour celle de leur famille et
pour leur mode d'existence.
C'est seulement durant les 5 125 années du présent âge du
monde que nous avons développé l'habitude de la guerre sur une
grande échelle. Les conditions insoutenables de notre monde
nous ont conduits aux points de crise où nous devons connaître
la vérité sur nos origines et sur l'histoire afin de choisir notre
plus haute destinée, ou bien nier ces vérités et sombrer dans les
profondeurs de notre destin le plus obscur.
Maintenant que nous avons répondu à la question « Qui
sommes-nous?» l'autre grande question porte sur notre avenir.
Quel héritage laisserons-nous à ceux dont nous serons les
ancêtres? Les livres d'histoire de nos enfants diront-ils que nous
avons privilégié la coopération plutôt que la compétition et que
nous avons appris l'amour plutôt que la peur?
Ou bien diront-ils que nous avons raté la plus belle occa-
sion de 5000 ans d'histoire humaine, celle de saisir la chance
que nous avions de remplacer les fausses croyances du passé par
la vérité permettant de réaliser notre destinée? Nous avons déjà
répondu à ces questions en nos propres termes. Nous devons
cette fois vivre nos paroles. Fonderons-nous le nouveau monde
émergent sur les vérités essentielles de notre existence ?
Nous n'aurons pas à attendre longtemps pour le savoir.

281
NOTES

Introduction
1. L'Institut de recherche en politiques publiques de Grande-Bretagne, le
Centre américain pour le progrès et l'Institut australien ont formé un
groupe de travail indépendant composé de politiciens, de scientifiques
et d'hommes d'affaires, coprésidé par Stephen Byers et par la sénatrice
américaine Olympia Snowe, afin d'étudier la question du réchauf-
fement planétaire. "Rapport: Global Warming Near Critical Point",
Presse associée (24 janvier 2005). Source : http://www.msnbc.com/
id/6863557/ns/us_news
-environment.
2. Albert Einstein, cité dans un article intitulé ''.Atomic Education Urged
by Einstein", The New York Times (25 mai 1946) et cité ultérieurement
par Michael Amrine, "The Real Problem ls in the Hearts of Man", The
New York Times Magazine (23 juin 1946).

Chapitre 1
1. Michael Crichton, Sphere {New York: Alfred A. Knopf, 1987), p.
348-349.
2. Jonathan Sarfati, ''.Archbishop's Achievement: James Ussher's Great
Work Annals of the World ls Now Available in English,'' Creation
Ministries International. Site Internet : http://creation.com/
archbishops-achievement.
3. Ibid.

283
Vérité essentielle

4. Thomas Hunt Morgan, Evolution and Adaptation (New York: The


Macmillan Company, 1903), p. 43.
5. Charles Darwin, On the Origin o/Species (Seattle: Pacifie Publishing
Studio, 2010), p. 236.
6. Evolution and Adaptation, p. 43.
7. Université de Glasgow, "Rare Tests on Neanderthal Infant
Sheds Light on Early Human Development", ScienceDaily
(4 avril 2000). Site Internet : http://www.sciencedaily.com/
releases/2000/03/000331091126.htm.
8. Ibid.
9. Hillary Mayell, "Neandertals Not Our Ancestors, DNA Study
Suggests", National Geographic News (14 mai 2003). Site Internet:
http://news.nationalgeographic.com.
10. Yuxin Fan, Tera Newman, Elena Linardopoulou et Barbara J.
Trask, "Gene Content and Function of the Ancestral Chromosome
Fusion Site in Human Chromosome 2q13-2q14.1 and Paralogous
Regions", Genome Research, vol. 12 (Cold Spring Harbor Laboratory
Press, 2002), p. 1663-1672. Site Internet: http://genome.cshlp.org/
content/12/11/1663.full.
11. J. W. IJdo, A. Baldini, O. C. Ward, S. T. Reeders et R. A. Wells,
"Origin ofHuman Chromosome 2: An Ancestral Telomere-telomere
Fusion", Proceedings of the National Academy of Sciences of the
United States of America, vol. 88, no 20 (15 octobre 1991), p.
9051-9055.
12. "Gene Content and Function of the Ancestral Chromosome Fusion
Site in Human Chromosome 2q13-2q14.1 and Paralogous Regions".
13. "Origin ofHuman Chromosome 2: An Ancestral Telomere-telomere
Fusion".

284
Notes

Chapitre 2
1. The Human Experience, sous la direction de Charles Kinnane
(Grassroots Films, 2011). Site Internet : http://www.grassrootsfilms.
com/films.html.
2. Albert Einstein, The Theory of Relativity and Other Essays (New
York : MJF Books, 1950), p. 53.
3. Isaac Newton, traduit par Andrew Motte, Newton's Principia: The
Mathematical Principles ofNatural Philosophy, première édition
américaine (New York: Daniel Adee, 1846). Source: http://rackl.
ul.cs.cmu.edu/is/newton.
4. Lee Gomes, "String Theory Skeptic", Forbes Magazine (21 septembre
2009). Site Internet : http://www.forbes.com/forbes/2009/0921/
opinions-peter-woit-physics-ideas-opinions.html.
5. James Le Fanu, "Science's Dead End", Prospect, no 173 (21 juillet
2010). Site Internet : http://www.prospectmagazine.co.uk/2010/07/
sciences-dead-end.
6. Ibid.
7. Tom Abate, "Genome Discovery Shocks Scientists", San Francisco
Chronicle (11 février 2001). Site Internet : http://articles.sfgate.
com/2001-02-11/news/17583040 _ l_ chemical-letters-president-of-
celera-genomics-human-genome-project.
8. Ibid.
9. Frank L. H. Wolfs, ''Appendix E: Introduction to the Scientific
Method", Département de physique et d'astronomie, Université de
Rochester, New York. Site Internet : http://teacher.pas.rochester.edu/
phy_labs/appendixe/appendixe.html.
10. Andrew Curry, "Gobekli Tepe: The World's First Temple?"
Smithsonian (novembre 2008). Site Internet: http://www.smithso-
nianmag.com/history-archaeology/gobekli-tepe.html.
11. Ronald Logan, "Opening Address of the Symposium on the
Humanistic Aspects of Regional Development", Prout Journal, vol. 6,
no 3 (septembre 1993).
12. Michael J. Behe, "Evidence for Intelligent Design from Biochemistry".
D'un discours prononcé au congrès "God and Culture Conference", de
l'institut Discovery (10 août 1996). Site Internet : http://www.arn.org/
docs/behe/mb_idfrombiochemistry.htm.

285
Vérité essentielle

13. Glen Rein et Rollin McCraty, "Structural Changes in Water and DNA
Associated with New Physiologically Measurable States'', Journal of
Scientific Exploration, vol. 8, no 3 (1994), p. 438-439.
14. E. W. Silvertooth, "Special Relativity", Nature, vol. 322 (14 août
1986), p. 590.
15. Nids Bohr, "Discussion with Einstein on Epistemological Problems in
Atomic Physics", Albert Einstein: Philosopher-Scientist, P. A. Schilpp
(éd.) (1949), p. 240.
16. A. A. Michelson et Edward W. Morley, "On the Relative Motion of the
Earth and the Luminiferous Ether", American Journal of Science, vol.
34 (1887), p. 333-345.
17. "Special Relativity".
18. Max Delbruck, Mind from Matter? An Essay on Evolutionary
Epistemology (Hoboken, NJ : Blackwell Publishers, 1985), p. 167.
19. Peter Machamer, The Cambridge Companion to Galileo (Cambridge,
U.K. : Presses universitaires, 1998), p. 64.
20. E. O. Wilson, Consilience: The Unity of Knowledge (New York :
Vintage Books, 1999), p. v.
21. Anastasia Lebedev, "The Man Who Saved the World Finally
Recognized'', MosNews.com (21 mai 2004). Source : http://www.
worldcitizens.org/petrov2.html.
22. Ibid.
23. The American Heritage College Dictionary, troisième édition (Boston :
Houghton Miffiin Company, 1993), p. 489.
24. Ibid., p. 1406.
25. Ibid., p. 1096.
26. Opinion émise par Sir Martin Rees, professeur à la Société royale de
recherche de l'Université de Cambridge et citée par Andrew Walker,
"Sir Martin Rees: Prophet of Doom?" BBC News (25 avril 2003). Site
Internet : http://news.bbc.co.uk/1/hi/in_depth/uk/2000/newsma-
kers/2976279.stm.
27. George Musser, "The Climax of Humanity'', Scientific American,
édition spéciale "Crossroads for Planet Earth" (septembre 2005), p.
44.
28. Ibid., p. 47.

286
Notes

29. Ibid., p. 47.


30. Tad Williams, To Green Angel Tower, tome 1 (New York: DAW Books,
1993), p. 771.

Chapitre 3
1. Millennium Ecosystem Assessment (MA) Synthesis Report,
Organisation des Nations unies pour!' éducation, la science et la culture.
Compilé par 1 300 scientifiques de 95 pays, le rapport nous prévient
que les conséquences dommageables de la détérioration environne-
mentale pourraient s'aggraver considérablement au cours du prochain
demi-siècle. Site Internet : http://portal.unesco.org/en/ev.php-URL_
ID=2664l&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html.
2. "The Climax ofHumanity", p. 44-47.
3. Ibid., p. 44.
4. Lindsay Patterson, "Jeffrey Sachs on Trying to Feed Nine
Billion People by 2050", EarthSky: A Clear Voice for Science
(26 octobre 2009). Site Internet : http://earthsky.org/food/
jeffrey-sachs-on-trying-to-feed-9-billion-people-by-2050.
5. Jeffrey Sachs, "Can Extreme Poverty Be Eliminated?" Scientific
American, édition spéciale "Crossroads for Planet Earth" (septembre
2005), p. 56.
6. J. R. Petit, et al., "Climate and Atmospheric History of the Past 420,000
years from the Vostok Ice Core, Antarctica", Nature, vol. 399 (3 juin
1999), p. 429-436. Site Internet : http://www.nature.com/nature/jour-
nal/v399/n6735/abs/399429a0.html.
7. Craig Idso, Keith Idso et Sherwood B. Idso, "Ice Core Studies Prove
C0 2 Is Not the Powerful Climate Driver Climate Alarmists Make It
Out to Be", C0 2 Science, vol. 6, no 26 (juin 2003). Site Internet: http://
www.co2science.org/articles/V6/N26/EDIT.php.
8. H. Fischer, M. Wahlen, J. Smith, D. Mastroianni et B. Deck, "Ice
Core Records of Atmospheric C0 2 Around the Last Three Glacial
Terminations", Science, vol. 283, no 5408 (1999), p. 1712-1714.
9. Ibid.
10. Discours de clôture d'Al Gore, An Inconvenient Truth. Transcription
sur: http://en.wikipedia.org/wiki/An_Inconvenient_Truth.

287
Vérité essentielle

11. Liste partielle des scientifiques opposés à l'opinion scientifique offi-


cielle concernant le réchauffement planétaire. Site Internet : http://
en.wikipedia.org/wiki/List_of_scientists_opposing_the_mainstream_
scientific_assessment_of_global_warming.
12. Ibid.
13. Ibid.
14. Ibid.
15. Ibid.
16. Ibid.
17. Ibid.
18. Ibid.
19. Ibid.
20. Benito Müller, "No Trust Without Respect: Adaptation Quick Start
Funding at the Cross Roads", Institut des études énergétiques d'Ox-
ford (mars 2010). Site Internet : http://www.oxfordenergy.org/pdfs/
comment_01_03_10.pdf.
21. "Lower Missouri River Ecosystem Initiative Final Report 1994-1998",
version 3, USGS Columbia Environmental Research Center (décembre
1998). Site Internet : http://infolink.cr.usgs.gov/AboutlnfoLINK/lmrei-
final.pdf.
22. Ibid.
23. Emma Woollacott, "Loss of Biodiversity Could Damage World
Economy, Says UN", TG Daily (11 mai 2010). Site Internet : http://
www.tgdaily.com/sustainability-features/49704-loss-of-biodiversity-
could-damage-world-economy-says-un.
24. Niles Eldredge, "The Sixth Extinction", ActionBioscience.org, Institut
américain des sciences biologiques (juin 2001). Site Internet : http://
www.actionbioscience.org/newfrontiers/eldredge2.html.
25. Ibid.
26. "News Release: Experts Warn Ecosystem Changes Will Continue to
Worsen, Putting Global Development Goals at Risk", Institut des
Ressources mondiales (2005). Site Internet : http://archive.wri.org/news.
cfm?id=324.

288
Notes

27. Porter Stansberry, "Time Is Running Out", Stansberry's Investment


Advisory (janvier 2011).
28. "Kitty Williams Finally Tells Her Survivor Tale," Institut de l'éduca-
tion sur !'Holocauste. Site Internet: http://ihene.org/nebraska-survivor-
stories/kitty-williams-finally-tells-her-survivor-tale.html.
29. Ibid.
30. Richard C. Cook, "It's Official: The Crash of the U.S. Economy
Has Begun", Centre de recherche sur la mondialisation (14
juin 2007). Site Internet : http://www.globalresearch.ca/index.
php?context=va&aid=5964.
31. Ibid.
32. Lester R. Brown, "Is Our Civilization at a Tipping Point?" Hunger
Notes, Service d'éducation sur la faim dans le monde. Site Internet :
http://www.worldhunger.org/articles/09/editorials/brown_tipping.htm.
33. Plan B 3.0: Mobilizing to Save Civilization (New York : W:W. Norton
& Company, 2008).
34. Département des affaires économiques et sociales des Nations unies,
tableaux démographiques. Site Internet : http://www.un.org/esa/popu-
lation/publications/sixbillion/sixbilpartl.pdf.
35. "Population Growth Rate", The World Factbook, Central Intelligence
Agency. Site Internet : https://www.cia.gov/library/publications/the-
world factbook/rankorder/2002rank.html?countryName=Fiji&countr
yCode=fj&regionCode=au&rank= 136.
36. Joel E. Cohen, "Human Population Grows Up", Scientific American,
édition spéciale "Crossroads for Planet Earth" (septembre 2005), p.
48.
37. Millennium Ecosystem Assessment (MA) Synthesis Report.
38. Ibid.

Chapitre 4
1. Robert M. Schoch, "The Great Sphinx", site Internet officiel : http://
www.robertschoch.com/sphinxcontent.html.
2. Ibid.
3. Ibid.

289
Vérité essentielle

4. Ibid.
5. Ibid.
6. Description des excavations avec des images du site et une entrevue du
chef archéologue Klaus Schmidt. Sean Thomas, "Gobekli Tepe: Paradise
Regained?" Fortean Times UK. Site Internet : http://www.forteantimes.
com/features/articles/449/gobekli_tepe_paradise_regained.html.
7. Ibid.
8. Patrick Symmes, "Hiscory in the Remaking", Newsweek (19 février
2010). Site Internet : http://www.newsweek.com/2010/02/18/history-
in-the-remaking.html.
9. Ibid.
10. Ibid.
11. K. Pustovoytov, K. Schmidt et H. Parzinger, "Radiocarbon Dating of
Thin Pedogenic Carbonate Laminae from Holocene Archaeological
Sites", Holocene, vol. 19 (Ier décembre 2009), p. 1153-1160.
12. Radio Carbon Context Database. Site Internet: http://context-database.
uni-koeln.de/cl 4. php?vonsite=389.
13. Robert M. Schoch, "Turkey", site Internet officiel: http://www.roberts-
choch.com/turkey.html.
14. Ibid.
15. Tom Housden, "Lost City 'Could Rewrite History"', BBC News
(19 janvier 2002). Site Internet : http://news.bbc.co.uk/2/hi/south_
asia/1768109.stm.
16. Ibid.
17. Ibid.
18. Ibid.
19. Description et reportage photographique sur Caral, Pérou. Site Internet:
http://www.go2peru.com/caral.htm.
20. Michael D. Coe, Breaking the Maya Code (New York : Thames &
Hudson, 1999), p. 61.
21. Richard L. Thompson, Mysteries of the Sacred Universe: The Cosmology
of the Bhagavata Purana (Alachua, FL : Govardhan Hill Publishing,
2000), p. 225.

290
Notes

22. Albert Einstein, cité dans l'article "Atomic Education Urged by


Einstein", The New York Times (25 mai 1946), et cité ultérieurement
par Michael Amrine, "The Real Problem Is in the Hearts of Man", The
New York Times Magazine (23 juin 1946).
23. H. G. Wells, The Outline of History: The Whole Story of Man (New
York : Garden City Books, 1949), chapitre 40.4. Site Internet : http://
www.ibiblio.org/pub/docs/books/sherwood/Wells-Outline/Text/
Part-II.htm.

Chapitre 5
1. William Paley, Natural Theology (New York :Presses universitaires
d'Oxford, 2006). Discussion en ligne de la comparaison entre Dieu et
l'horloger : http://en.wikipedia.org/wiki/Watchmaker_analogy.
2. Ibid.
3. Ibid.
4. Richard Dawkins, The Blind Watchmaker: Why the Evidence Reveals
a Universe Without Design (New York: W:W. Norton & Company,
1986), p. 5. Site Internet : http://hyperphysics.phy-astr.gsu.edu/nave-
html/faithpathh/dawkins.html.
5. Lee Thayer, Pieces: Toward a Revisioning of Communication/Life
(Greenwich, CT : Ablex Publishing Corporation, 1997), p. 62.
6. Ibid.
7. Attribué à S0ren Kierkegaard. Site Internet : http://www.goodreads.
com/quotes/show/204183.
8. "Viking Mission Objectives Summary", National Aeronautics and Space
Administration, Planetary Data System. Site Internet : http://starbrite.
jpl.nasa.gov/pds/viewMissionProfile.jsp?MISSION_NAME=VIKING.
9. "Did Viking Mars Landers Find Life's Building Blocks?
Missing Piece Inspires New Look at Puzzle'', ScienceDaily (25
septembre 2010). Site Internet : http://www.sciencedaily.com/
releases/2010/09/100904081050.htm.
10. Richard E. Dickerson et Irving Geis, Chemistry, Matter, and the
Universe (Menlo Park, CA : Benjamin-Cummings Publishing, 1976),
p. 529.

291
Vérité essentielle

11. Erwin Schrôdinger, What Is Life?: with "Mind and Matter" and
''Autobiographical Sketches" (Cambridge, U.K. : Presses universitaires,
1992). Site Internet : http://dieoff.org/pagel50.htm.
12. Daniel E. Koshland, Jr., "The Seven Pillars of Life", Science, vol. 295,
no 5563 (22 mars 2002), p. 2215-2216. Site Internet : http://www.
sciencemag.org/content/295/5563/2215.full.
13. Ibid.
14. Roe v. Wade, U.S. Supreme Court, Case 410 U.S. 113 (1973).
Site Internet : http://www.law.cornell.edu/supct/search/
display.html?terms=abortion&url=/supct/html/historics/
USSC_CR_0410_0113_ZO.html.
15. Kenneth T. Walsh, ''Abortion, Gay Rights Are Back Ahead of
2012 Election", U.S. News & World Report (10 mars 2011). Site
Internet : http://www.usnews.com/news/articles/201 l/03/10/
abortion-gay-rights-are-back-ahead-of-2012-election.
16. Critères biologiques de la vie. Encyclopédie Britannica en ligne. Site
Internet : http://www.britannica.com/EBchecked/topic/340003/life.
17. Bruce Lipton, Biologie des croyances, Ariane Éditions 2006.
18. Nadine L. Vastenhouw, Yong Zhang, lan G. Woods, Farhad Imam, Aviv
Regev, X. Shirley Liu, John Rinn et Alexander F. Schier, "Chromatin
Signature of Embryonic Pluripotency Is Established During Genome
Activation", Nature, vol. 464 (8 avril 2010), p. 922-926.
19. Ibid.
20. Biologie des croyances.
21. Elise Kleeman, "When Does a Fetus Peel Pain?" Discover (décembre
2005). Site Internet : http://discovermagazine.com/2005/dec/
fetus-feel-pain.
22. Christof Koch, "When Does Consciousness Arise in Human Babies?"
Scientific American (2 septembre 2009). Site Internet : http://scientifi-
camerican.com/article.cfm?id=when-does-consciousness-arise.
23. Narration de l'introduction de« L'Origine des espèces», dernier épisode
de la série télévisée Au-delà du réel, saison 4. Site Internet : http://
homepage.eircom.net/~odyssey/Quotes/Popular/SciFi/Outer_Limits.
html.
24. Œuvres complètes de Darwin en ligne : http://darwin-online.org.uk/
contents.html.

292
Notes

25. On the Origin of Species, p. xii.


26. Ibid., p. 246.
27. Notes décrivant l'expérience Miller-Urey. Site Internet : http://www.
chem.duke.edu/~jds/cruise_chem/Exobiology/miller.html.

28. Compilation des caractéristiques humanoïdes, y compris la capacité


crânienne. Site Internet : http://en.wikipedia.org/wiki/Template:Homo.
29. On the Origin of Species, p. 89.
30. Stephen Jay Gould, Wonderful Life: The Burgess Shale and the Nature
ofHistory (New York: WW. Norton & Company, 1989), p. 24.
31. Steven M. Stanley, Macroevolution: Pattern and Process (San Francisco:
W.M. Freeman and Co., 1979), p. 39.
32. "Explosion ofLife", The Shape ofLife, PBS. Site Internet: http://www.
pbs.org/kcet/shapeoflife/episodes/explosion.html.
33. On the Origin ofSpecies, p. 151.
34. Définition de la conception intelligente selon l'institut Discovery,
Centre pour la science et la culture. Site Internet : http://www.discovery.
org/csc/topQuestions.php.
35. On the Origin of Species, p. 82.
36. Francis Crick, Life ltself: lts Origin and Nature (New York: Simon &
Schuster, 1981), p. 88.
37. 1. L. Cohen, Darwin Was Wrong: A Study in Probabilities (Greenvale,
NY: New Research Publications, 1984), p. 4, 5 et 8.
38. James D. Watson, Tania Baker, Stephen P. Bell, Alexander Gann,
Michael Levine et Richard Losick, Molecular Biology of the Gene
(Menlo Park, CA : W. A. Benjamin, 1977), p. 69.
39. Alice Caprice (éd.), The Expanded Quotable Einstein (Princeton, NJ :
Presses universitaires, 2000), p. 220.

Chapitre 6
1. Attribué à David Samuel "Sam" Peckinpah, cinéaste et scénariste améri-
cain. Site Internet : http://www.quotegarden.com/violence.html.
2. R. Brian Ferguson, "The Birth ofWar'', Natural History, vol. 112, no 6
(juillet/août 2003), p. 28-35.

293
Vérité essentielle

3. Ibid.
4. Steven Pinker, "Why Is There Peace?" The Greater Good Science Center,
Université de la Californie à Berkeley (1" avril 2009). Site Internet :
http://greatergood.berkeley.edu/article/item/why_is_ there_peace.
5. Catherine Philip, "Barack Obama's Peace Prize Starts a Fight", The
Sunday Times (10 octobre 2009). Site Internet : http://www.timeson-
line.co.uk/tol/news/world/us_and_americas/article6868905.ece.
6. Ibid.
7. "Full Text ofübama's Nobel Peace Prize Speech", la Maison-Blanche à
MSNBC.com. Site Internet : http://msnbc.msn.com/id/34360743/ns/
politics-white_house.
8. Ibid.
9. Ibid.
10. "The Birth of War".
11. Ibid.
12. Andrew J. Pierre, "The Cold and the Dark: The World after Nuclear
War", Foreign Affairs, critique de livre (automne 1984). Site Internet :
h tt p: //www. foreignaffai rs. corn/ art ides/ 3 8 8 9 3/ andrew-j-pierre/
the-cold-and-the-dark-the-world-after-nuclear-war.
13. Buckminster Fuller, The New Yorker (8 janvier 1966). Source : http://
www.quotationspage.com/quote/24952.html.
14. Alice Caprice (éditrice), The New Quotable Einstein (Princeton, NJ :
Presses universitaires, 2005), p. 173.
15. Richard Laurence (traducteur), The Book of Enoch the Prophet (San
Diego : Wizards Bookshelf Secret Doctrine Reference Series, 1983), p.
iv.
16. Ibid., p. iv-v.
17. Ibid., p. 1.
18. Ibid., p. 77.
19. Ibid., p. 9.
20. Ibid., p. 85.
21. Ibid., p. 47-48.
22. Ibid., p. 47.

294
Notes

23. Saint Thomas d'Aquin (Summa Contra Gentiles, vol. 11) cité par Arthur
O. Lovejoy, The Great Chain of Being: A Study of the History of an
Idea {Cambridge, MA: Presses universitaires de Harvard, 1936), p. 76.
24. Cette citation est extraite de l'ouvrage classique de Francis Bacon sur la
nature humaine, OfGoodness and Goodness of Nature. Ce chapitre
particulier, "Essays, Civil and Moral" (chapitre XIII), est disponible en
ligne dans la série des classiques Harvard (1909-1914). Site Internet:
http://www.bartleby.com/3/ 1/13.html.
25. Adapté de l'introduction de l'éditeur, par Richard Lowry, pour la troi-
sième édition de Toward a Psychology ofBeing, d'Abraham H. Maslow
(New York : Wiley, 1999).
26. Ibid.
27. "The Story of SPC Ross A. McGinnis", U.S. Army. Site Internet : http://
www.army.mil/medalofhonor/mcginnis/profi.le/index.html.
28. "Man Risked Life Again and Again to Save His Dog in House
Fire", For the Love of the Dog, un blogue (8 novembre 2007).
Site Internet: http://fortheloveofthedogblog.com/news-updates/
man-risked-life-again-and-again-to-save-his-dogs-in-house-fire.
29. Penny Eims, "Man Dies in Fire while Trying to Save
His Favorite Dog", Examiner (26 décembre 2010). Site
Internet : http://www.examiner.com/dogs-in-national/
man-dies-fire-while-trying-to-save-his-favorite-dog.
30. Eric Hobsbawm, "War and Peace in the 20th Century", London
Review of Books (février 2002). Les statistiques de Hobsbawm
montrent qu'à la fin du xxe siècle plus de 187 millions de personnes
avaient perdu la vie à cause de la guerre.
31. Matthew White, "Worldwide Statistics of Casualties, Massacres,
Disasters and Atrocities", The Twentieth Century Atlas. Ces statis-
tiques particulières proviennent d'un communiqué de presse daté du
20 décembre 1999, émis par la Munich Reinsurance Company. Site
Internet : http://users.erols.com/mwhite28/warstat8.htm.
32. Jonathan Steele, "The Century that Murdered Peace", The Guardian
(12 décembre1999). Site Internet : www.guardian.co.uk/world/1999/
dec/ 12/theobserver4.
33. On the Origin of Species, p. 133.

295
Vérité essentielle

34. Adolf Hitler, "Chapter XI: Nation and Race", Mein Kampf, vol. 1 : A
Reckoning (1925). Site Internet : http://www.hitler.org/writings/Mein_
Kampf/mkv lchl l .html.
35. Stéphane Courtois, Nicolas Werth, Jean-Louis Panné, Andrzej
Paczkowski, Karel Bartosek et Jean-Louis Margolin, The Black Book
of Communism, traduit par Jonathan Murphy et Mark Kramer
(Cambridge, MA : Presses universitaires de Harvard, 1999), p. 491.
36. Charles Darwin, The Descent of Man (Amherst, NY : Prometheus
Books, 1998), p. llO.
37. Petr Kropotkine, Mutual Aid: A Factor of Evolution (1902) (Boston :
Porter Sargent Publishers, 1976), p. 14.
38. Dr John Swomley, "Violence: Competition or Cooperation'', Christian
Ethics Today 26, vol. 6, no 1 (février 2000), p. 20.
39. Ibid.
40. Ronald Logan, "Opening Address of the Symposium on the
Humanistic Aspects of Regional Development", Prout Journal, vol. 6,
no 3 (septembre 1993).
41. Ibid.
42. Attribué à Carl Sandburg, mais paraphrasé à partir d'un poème
en allemand de Bertolt Brecht. Site Internet : http://ask.metafilter.
com/56968/What-if.

Chapitre 7
1. Kevin H. O'Rourke et Jeffrey G. Williamson, document de travail
7632 du Bureau national de la recherche économique, "When Did
Globalization Begin?" (avril 2000). European Review of Economie
History, vol. 6, no l, p. 23-50. Site Internet: http://www.nber.org/
papers/w7632.
2. Thomas L. Friedman, "Globalization'', Newsweek (2010). Site
Internet : http://201O.newsweek.com/top-1 O/most-overblown-fears/
globalization.html.
3. Gregory Hale, "No Need to Fear, Globalization Is Here", InTech
(juin 2008). Site Internet : http://www.isa.org/InTechTemplate.
cfm?Section=Talk_To_Me&template=/ContentManagement/
ContentDisplay.cfm&ContentID=69717.

296
Notes

4. Gregg Braden, Le Temps fractal (Ariane, 2010).


5. "1945-1959: A Peaceful Europe-The Beginnings ofCooperation",
Europa: The History of the European Union. Site Internet : http://
europa.eu/abc/history/1945-1959/index_en.htm.
6. «Déclaration du Millénaire des Nations unies», adoptée par l'Assem-
blée générale le 8 septembre 2000. Site Internet : http://un.org/
millennium/declaration/ares552e.htm.
7. «Objectifs de développement du millénaire pour 2015 », Nations unies.
Site Internet : http://www.un.org/millenniumgoals/bkgd.shtml.
8. Objectif de développement du millénaire 8.A : «Développer davantage
un système commercial et financier non discriminatoire, ouvert, régle-
menté et prévisible», Nations unies. Site Internet: http://www.un.org/
millenniumgoals/global.shtml.
9. Narration par Carlos Barrios. Transcrit par Steve McFadden, "Steep
Uphill Climb to 2012: Messages from the Mayan Milieu" (2002). Site
Internet : www.redrat.net/thoughts/prophets/index.htm.
10. Premier discours inaugural du président Ronald Reagan le mardi 20
janvier 1981. Vidéo et transcription au Centre Miller des Affaires
publiques, Université de la Virginie. Site Internet : http://millercenter.
org/scripps/archive/speeches/detail/3407.
11. Attribué à William Jennings Bryan. Site Internet : http://schipul.com/
quotes/1051.
12. Le Temps fractal (Ariane, 2010).
13. Publication sur le forum du magazine Singletrack, qui
rapporte l'histoire d'Aron Ralston en ses propres termes. Site
Internet : http://www.singletrackworld.com/forum/topic/
great-article-about-the-utah-guy-who-severed-his-own-arm-today.
14. Ibid.
15. Le Temps fractal.

297
REMERCIEMENTS

Ce livre est la synthèse de recherches, de découvertes et de


mon cheminement personnel pour répondre à certaines des
plus grandes questions de notre existence. Tout au long de ma
vie d'adulte et même avant, j'ai croisé sur ma route plusieurs
personnes qui m'ont procuré les connaissances m'ayant ensuite
conduit au message véhiculé par cet ouvrage. Il faudrait un
livre complet pour nommer chacune d'elles, mais ces pages me
donnent l'occasion d'exprimer ma gratitude à ceux et celles dont
les efforts ont directement contribué à l'existence de ce livre. Je
suis particulièrement reconnaissant aux personnes dont les noms
suivent.
Chacun des membres du personnel de Hay House, lnc. Mes
remerciements les plus sincères à Louise Hay et Reid Tracy pour
leur vision et leur façon extraordinaire de faire de l'édition. À
Reid Tracy, président et chef de la direction, ma plus grande
gratitude pour son soutien et sa confiance indéfectible en mon
travail. À Jill Kramer, directrice éditoriale, mille mercis pour ses
opinions honnêtes et sa guidance, pour sa présence constante
quand je lui téléphone, et pour les années d'expérience qu'elle
met à profit lors de toutes nos conversations.
Carina Sammartino, mon agente publicitaire ; Alex Freemon,
mon directeur de projet ; Jacqui Clark, directrice de la publicité ;
John Thompson, directeur des ventes; Margarete Nielsen, direc-
trice opérationnelle; Nancy Levin, directrice des événements; et

299
Vérité essentielle

Rocky George, le parfait ingénieur du son. Je n'aurais pu imagi-


ner meilleure équipe pour travailler avec moi ; sa compétence et
son enthousiasme sont inégalables, et je suis fier des excellentes
publications que Hay House introduit dans notre monde.
Merci à Ned Leavitt, mon agent littéraire, pour sa sagesse et
son intégrité à chaque étape du processus. Grâce à ses conseils
pour faire publier nos livres dans le monde tumultueux de l' édi-
tion, notre message d'espoir a atteint plus de gens que jamais et
dans davantage de pays. En outre, je lui suis particulièrement
reconnaissant de notre amitié et de sa confiance en moi.
Merci également à Stephanie Gunning, mon éditrice deve-
nue une amie, pour sa diligence et son expertise, ainsi que pour
l'énergie qu'elle investit dans tout ce qu'elle fait. Surtout, merci
de m'avoir aidé à trouver les mots nécessaires pour traduire d'une
façon agréable et intelligible les complexités de la science et les
vérités de la vie. Elle pose toujours les bonnes questions de la
bonne façon, ce qui me permet de faire les meilleurs choix.
Je suis fier de faire partie de la famille virtuelle qui s'est
constituée autour de mes livres tout au long des années, entre
autres Lauri Willmot, mon chef de bureau depuis 1996. Elle a
ma profonde admiration et mon respect, car elle est toujours là
quand il le faut. Merci à Robin et Jerry Miner, de Source Books,
pour leur amitié, leur amour et leur soutien depuis tant d'années.
Merci aussi à Rita Curtis, mon chef d'entreprise, dont j'apprécie
la vision d'avenir, la capacité de nous faire avancer et, surtout,
l'amitié.
Merci à ma mère, Sylvia, et à mon frère Eric pour leur amour
indéfectible et leur foi en mon travail. Même si notre famille
biologique est plutôt restreinte, nous avons découvert ensemble
une famille d'amour élargie, plus grande que nous n'aurions pu
l'imaginer. Je leur suis immensément reconnaissant pour tout ce
qu'ils apportent quotidiennement dans ma vie. À Eric, ingénieur
audiovisuel et gourou technique extraordinaire, un merci très
spécial pour sa patience dans les divers endroits, parfois difficiles,

300
Remerciements

où nous travaillons. Ma fierté de faire ce travail en sa compagnie


s'ajoute à celle d'être son frère dans la vie.
Merci à la seule personne qui me voit à mon meilleur et à
mon pire, ma fiancée Martha. Son amour profond, son amitié
et sa sagesse qui m'accompagnent au quotidien sont la constante
sur laquelle je compte pour traverser les difficultés. Elle ainsi que
les deux êtres poilus qui partagent notre vie, Woody et Nemo,
forment la famille pour qui il vaut toujours la peine de rentrer
chez moi. Ma plus profonde gratitude pour tout ce qu'elle me
donne, pour tout ce qu'elle apporte dans ma vie.
Un autre merci très spécial à tous ceux et toutes celles qui
ont soutenu mon travail, mes livres, mes enregistrements et mes
conférences au cours des années. Leur confiance m'honore et
j'apprécie profondément leur contribution passionnée à l' émer-
gence d'un monde nouveau. Leur présence m'a appris à devenir
un meilleur auditeur pour entendre les mots qui me permettent
de transmettre notre message d'espoir. À tous, je suis reconnais-
sant pour toujours.

301
À PROPOS DE LAUTEUR
Auteur à succès au palmarès du New York Times, Gregg
Braden est connu dans le monde entier comme un pionnier de
l'union de la science et de la spiritualité. À la suite d'une carrière
réussie comme géologue informatique pour Phillips Petroleum
durant la crise de l'énergie des années 1970, il a travaillé comme
concepteur de systèmes informatiques chez Martin Marietta
Defense Systems durant les dernières années de la guerre froide.
En 1991, il est devenu le premier directeur des opérations tech-
niques chez Cisco Systems, où il a supervisé le développement
de l'équipe de soutien mondial qui assure aujourd'hui la fiabilité
d'Internet.
Pendant plus d'un quart de siècle, Gregg Braden a visité des
villages de montagne et des sanctuaires éloignés, examinant des
textes oubliés afin d'en découvrir les secrets intemporels. Son
travail a fait l'objet d'un reportage sur la chaîne Histoire, la
chaîne Découverte, la chaîne SyFy, ainsi que les réseaux ABC et
NBC.
À ce jour, les découvertes de Gregg Braden lui ont fait écrire
des ouvrages destructeurs de paradigmes, dont L'Ejfet Isaïe, La
Guérison spontanée des croyances, La Divine Matrice et Le Temps
fractal. Aujourd'hui, son œuvre est publiée en dix-sept langues,
dans trente-trois pays. Elle nous démontre, au-delà de tout doute
raisonnable, que la clé de notre avenir réside dans la sagesse du
passé.

303
Vérité essentielle

Pour plus d'informations,


veuillez contacter le bureau de Gregg Braden
à l'adresse suivante :
Wisdom Traditions
P.O. Box 3529 Taos, NM 87571
Tel.: 561 799-9337
www.greggbraden.com
info@greggbraden.com

304
Autre livre de la même collection

DAVID WILCOCK

Investigations sur le champ de conscience unitaire


L'histoire cachée et la science de pointe expliquant les prophéties
de transformation sociale et d'éveil spirituel de l'après-2012, tome I et II

Une remarquable synthèse de connaissances scientifiques cachées


et de prophéties oubliées, Investigations sur le Champ de conscience
unitaire révèle un grand nombre d'importants secrets: la transfor-
mation de !'ADN, la science de la conscience, les tunnels spatiotem-
porels, les voyages à l'aide de portes des étoiles, la géométrie sacrée,
les anciennes conspirations, le temps multidimensionnel, le calen-
drier maya, et un étonnant nouveau modèle des champs d'énergie
galactiques responsables de notre évolution biologique, mentale et
spirituelle.
Plus de deux millions de personnes ont vu le spectaculaire cour
d'horizon des prophéties entourant l'année 2012 que David Wilcock
présente dans son documentaire, disponible sur Internet, 1he 2012
Enigma. Il développe à présent sa vision en nous présentant ses
investigations poussées dans les sciences alternatives, ainsi que ses
profondes intuitions sur l'avenir qui nous attend. Contrairement aux
perspectives apocalyptiques mises en scène dans plusieurs films à gros
budgets, Wilcock croit que l'année 2012 marquera un point tournant
pour l'acceptation généralisée d'une plus vaste réalité - et il présente
dans ce livre plusieurs des fondements conceptuels d'un tel Âge d'or.
Autre livre de la même collection

WILLIAM ARNTZ, BETSY CHASSE, MARK VICENTE


Que sait-on vraiment de la réalité ?
Découvrir ks possibilités infinies ~ transformer sa réalité ~ tous ks jours

Que sait-on vraiment de la réalité ? est un formidable ouvrage


scientifique. Grâce à la collaboration de plus d'une douzaine de cher-
cheurs et de théoriciens, il nous fait traverser le miroir de la physique
quantique pour accéder à un univers plus étrange et plus vivant que
tout ce que l'on aurait pu imaginer. Il nous emmène ensuite plus loin,
jusqu'aux limites de nos connaissances actuelles sur la conscience, sur
la perception, sur la chimie corporelle et sur la structure du cerveau.
De quoi nos pensées sont-elles faites ? De quoi la réalité est-elle consti-
tuée ? Et surtout, comment une pensée peut-elle transformer la nature
de la réalité ?
Le film à succès (1 million de DVD vendus) n'était que le début
du voyage. Ce livre utilise les idées, les concepts et les incroyables
connaissances scientifiques du film comme point de départ pour
explorer en détail les fondements du nouveau paradigme, la physique
quantique de nos processus internes et les limites externes de l'univers
connu. Nous mène-t-il aussi de l'autre côté du connu ? À vous de le
découvrir...
Autre livre de la même collection

LYNNE MCTAGGART

Le Champ Je la cohérence universelle


« Un ouvrage fascinant sur la véritable nature de la vie. "

La science vient tout juste de commencer à prouver ce que les


anciens mythes et les religions ont toujours prétendu, c'est-à-dire qu'il
existe bel et bien un champ d'énergie reliant toutes choses.
Infatigable journaliste d'investigation, Lynne McTaggart nous
révèle l'histoire fascinante de scientifiques de pointe qui découvrent
ce qu'ils nomment le champ du point ziro, c'est-à-dire un océan de
vibrations subatomiques situé dans l'espace entre les objets et reliant
tous les éléments de l'univers.
C'est aussi l'histoire de l'émergence d'un nouveau paradigme
scientifique sur un univers en interrelation et sur le fonctionnement
de notre monde et de notre corps. Ainsi, on y découvre que l'esprit
humain et le corps ne sont pas dissociés et distincts de leur milieu,
mais forment plutôt une force pulsante qui interagit constamment
avec cette vaste mer d'énergie.
En fait, Le Champ (publié antérieurement sous le titre L'Univers
informé) remet en cause la vision du monde réductionniste décrivant
les êtres vivants comme séparés et isolés les uns des autres, et propose
une perspective d'unité. Il montre que notre potentiel humain est
beaucoup plus grand que ce que la science nous révélait sur nous-
mêmes jusqu'ici.
Original, fouillé et reposant sur de solides sources, ce livre en est
un d'espoir pour notre monde actuel.
Autre livre de la même collection

LYNNE MCTAGGART
La science de l'intention
Utiliser ses pensles pour transformer sa vie et k monde

Ce livre est un ouvrage révolutionnaire, une exploration inédite


de la science de l'intention.
C'est également le premier livre qui vous invite à participer acti-
vement à sa recherche originale.
S'appuyant sur les conclusions de recherches sur la conscience
humaine menées par d'éminents scientifiques du monde entier, La
Science de /'intention démontre que la pensle est une rlalitl tangibk
ayant k pouvoir d'influencer ks choses. La pensée génère sa propre éner-
gie bien palpable dont vous pouvez vous servir pour améliorer votre
vie, aider les autres autour de vous, et changer le monde.
Dans La Science de /'intention, Lynne McTaggart, auteure à
succès de réputation internationale, journaliste scientifique primée et
figure de proue parmi ceux et celles qui se consacrent à l'étude de la
conscience humaine, présente un palpitant roman policier scientifique
et vous entraîne dans un voyage époustouflant jusqu'aux confins de
la conscience. Elle dresse le profil de pionniers hauts en couleurs
dans la science de l'intention et travaille avec plusieurs équipes de
scientifiques de renom, notamment le physicien Fritz-Albert Popp de
l'Institut international de biophysique en Allemagne et le Dr Gary
Schwartz, professeur de psychologie, de médecine et de neurologie à
l'Université de l'Arizona.
Autre livre de la même collection

BRUCE H. LIPTON, STEVE BAERMAN


Évolution spontanée
L'humanité est à la veille d'une évolution spontanée

Crise économique mondiale... Crises environnementales ... Des


guerres qui n'en finissent plus. Le monde est dans un état critique.
Nous avons tous entendu des histoires de gens qui ont vécu une
guérison apparemment miraculeuse, mais la même chose peut-elle se
produire pour notre monde ? Selon le biologiste cellulaire Bruce H.
Lipton, c'est non seulement possible, mais c'est déjà en train de se
produire.
Tout autour de nous, on peut voir la preuve que nous sommes
prêts à faire un incroyable pas en avant dans l'évolution de notre
espèce. Dans Évolution spontanée, cet expert de renommée interna-
tionale dans la nouvelle science de l'épigénétique fait équipe avec le
philosophe politique Steve Bhaerman pour offrir une nouvelle histoire
pleine d'espoir sur le destin évolutif de l'humanité.
Évolution spontanée révèle comment le fait d'améliorer notre
compréhension de la biologie et de l'histoire humaine nous aidera
à mieux traverser ces temps troublés. En nous libérant des vieilles
croyances qui maintiennent le statu quo, et en fondant notre vie
et l'avenir du monde sur cette nouvelle vision encourageante, nous
pouvons provoquer l'évolution spontanée de notre espèce.
CONFÉRENCES
ARIANE ÉDITIONS

ÉMERGENCE D'UN NOUVEAU MONDE :


L'ENGAGEMENT S'INTENSIFIE

Nos conférenciers présenteront la vision, les étapes et les


défis d'une société appelée à transformer complètement ses
institutions, sa relation à la nature, sa compréhension de la
spiritualité et de la vie au-delà de cette planète.

Dates des conférences


"
Montréal
les 29 et 30 octobre 2012 (octobre 2013)

Toulouse
les 4 et 5 mai 2013 (mai 2014)

Chili/Argentine
(janvier 2013, 2014 et 2015)

311
ÉMERGENCE D'UN NOUVEAU MONDE
L'ENGAGEMENT S'INTENSIFIE

Mouvement fédérateur

Divers éléments d'information convergent à cette heure pour


stimuler un mouvement fédérateur à l'intérieur de la mouvance
spirituelle que vivent le Québec et la France. Les lecteurs des
Éditions Ariane sont bien au fait que les institutions actuelles de
l'humanité sont appelées à se transformer de façon majeure. À
tour de rôle, les peuples manifesteront leur opposition au joug
politique, religieux ou économique et chercheront des voies alter-
natives de fonctionnement en société. Ces voies alternatives sont
en train d'être révélées à ceux qui sont prêts à les vivre. Déjà, sur
le plan de la relation avec la Terre nourricière, plusieurs initia-
tives sont bien en marche. Cependant, pour vous, chers lecteurs,
l'intérêt premier est aussi de recevoir, des êtres qui guident l'hu-
manité, une vision et des outils catalyseurs de la transformation
aujourd'hui essentielle. Comment émergera le Nouveau Monde?
Comment pouvons-nous participer à la transition de la
présente société à une société de paix? Comment transformer nos
institutions actuelles de prime abord si puissantes ? Comment
sera organisée la société dans le Nouveau Monde? Par exemple,
quelle forme prendront nos cités ?
Quelle relation aurons-nous avec la nature et plus particu-
lièrement avec la conscience dans la nature? Enfin, comment
évolueront les premiers contacts avec les frères de l'extraterre et
de l'intraterre?

313
Se rassembler
Les défis qui nous attendent sont importants et il devient
essentiel de s'accorder un moment pour se rencontrer tous
ensemble et partager, pour s'encourager tout au long du chemin.
Tel sera le but de nos conférences tout en présentant notre rapport
sur l'émergence du Nouveau Monde ainsi dernières initiatives à
ce sujet.
Nous proposons un événement sur deux jours. Le premier
jour sera organisé de façon plus traditionnelle, mais le deuxième
sera interactif et structuré en vue de créer une ambiance favori-
sant un ressenti réel de notre nature profonde. Potentiellement
une expérience de groupe puissante « guidée» Afin de stimuler
des prises de conscience collectives importantes.

Triangle d'émergence du Nouveau Monde


Nos conférences viseront aussi à créer un lien spécial entre
trois régions de la planète. On nous informe qu'en Amérique
du Nord, la Californie et le Québec sont particulièrement
sensibles au processus planétaire en cours. En Europe, plusieurs
régions autour de la Méditerranée le sont aussi, surtout le sud
de la France et le sud-est de l'Espagne. En Amérique du Sud,
on remarque le Brésil et les Andes, notamment la région de la
Patagonie, (Argentine, Chili). Ariane Éditions organise donc ses
conférences afin d'optimiser un lien énergétique et information-
nel entre le Québec, la France et l'Amérique du Sud. Les dates des
conférences sont choisies de telle sorte que chacun puisse profiter
d'un moment de l'année inspirant avant tout par la beauté de la
nature. Ainsi, au Québec, ces conférences auront lieu au début
octobre, pour son festival d'arbres en couleurs. Dans le sud de la
France, cela se passera au mois de mai, alors tout en fleurs. Et en
Patagonie, ces conférences se tiendront en janvier, qui correspond
à l'été austral.
Marc Vallée, Éditeur
info@editions-ariane.com
CONFÉRENCES AU Q!JÉBEC

Montréal
les 29 et 30 octobre 2012 (octobre 2013)

Auteurs conférenciers :
"
Bruce Lipton
Daniel Meurois
Olivia Boa
Rosanna Narducci
Pierre Lessard
Lise Coté
Musique : Michel Garnier

Pour informations et l'achat des billets


visitez notre site web
www.editions-ariane.com
ou téléphonez au :
514-276-2949
info@editions-ariane.com

315
CONFÉRENCES EN FRANCE

Toulouse
les 4 et 5 mai 2013 (mai 2014)

Auteurs conférenciers :
"
Lee Carroll
Bruce Lipton
TomKenyon
Rosanna Narducci
Pierre Lessard
Et plusieurs autres
Musique et art visionnaire

Pour informations et l'achat des billets


visitez notre site web
www.editions-ariane.com
ou téléphonez au :
0561026827/0681390467
assodanslavie@gmail.com
Visitez notre site web, afin d'avoir toutes les
informations sur nos publications,
nos conférences, et nos auteurs.

www.editions-ariane.com

Rejoignez-nous sur notre Facebook


afin de participer aux discussions,
donner vos opinions sur différents sujets et recevoir
toutes les informations sur nos pubications,
nos conférences, ainsi que nos spéciaux du mois.

www.facebook.com/EditionsAriane

Suivez nous et abonnez-vous


sur notre chaine youtube, afin de visionnez les videos
de nos conferences et de nos auteurs.

www.youtube.com/user/EditionsAriane/videos

Pour de plus amples informations,


Courriel : info@editions-ariane.com
Tel. : (514) 276 2949
Vous pouvez dorénavant
commander nos livres
directement sur le site internet
de notre boutique.

www.editions-ariane.com/boutique/
Exemples de livres publiés par les ~ditions Ariane

Tom Kenyon - Les Hathors - (2012)


Alejandro Junger - Clean - (2012)
David Wilcock- Investigations sur le champ ... - (2012)
Rosanna Narducci - Conclave 11:11:11 - (2012)
Tal schaller - Naissance d'une Humanité consciente - {2012)
Lise Coté - Le féminin Sacré actualisé - {2012)
José Arguelles - Le livre du Trône - (2012)
Daniel Meurois - Pionnier de l'Éveil - (2012)
Michael Brown - Le processus de la Présence - {2012)
Pierre Lessard - Histoire sacrée, Pérou Tome 1 - (2011)
Kryeon - 2012 Le Grand Rassemblement - (2011)
Claire Heartsong- L'union des flammes jumelles - (2011)
Michael J. Roads -Avecles yeux de l'amour, tome 1et2 - {2011)
James Tyberonn - Les chroniques des gardiens de la Terre - (2011)
Lee Caroll - Les Douze couches de l'ADN - (2011)
Lee Caroll - Entretiens avec Kryeon - {2011)
Bruce H. Lipton - Évolution spontanée - {2011)
Penney Peirce - Fréquence - (2011)
Neale DonalD Walsch - La Mère de l'invention - (2011)
Neale DonalD Walsch - Quand tout change changez tout - (2011)

Procurez-yous tous nos livres ay


www.editions-ariane.com/boutique/
en librairie ou chez nos distributeurs.
Canada : ADA Diffusion-(450) 929·0296-www.ada-inc.com
France. Belgique : DG DIFFUSION -05.61 .000.999-www.dgdiffusion.com
Suisse : Servidis diffusion-23.42.77.40-www.servidis.ch
LORSQUE DE NOUVELLES DÉCOUVERTES
METTENT EN QUESTION DES CROYANCES EXISTANTES,
IL EST TEMPS DE REPENSER CES CROYANCES !

Un monde nouveau émerge sous nos yeux tandis qu'un monde


ancien et non viable lutte pour persister. Ces deux mondes
reflètent les croyances du passé. Ils coexistent, mais seulement
pour l'instant. Lequel choisirez-vous?

Gregg Braden, scientifique visionnaire et auteur à succès, affirme que les


grandes questions qui nous divisent et qui semblent sans lien entre elles
- la guerre, le terrorisme, l'avortement, le suicide, le génocide, la peine de
mort, la pauvreté, l'effondrement économique et la guerre nucléaire -
sont en fait liées. Elles découlent toutes des fausses hypothèses d'une
science désuète qui nous ont conduits au bord du désastre et ont failli
nous faire perdre tous les précieux acquis de notre civilisation.

VÉRITÉ ESSENTIELLE nous fournit la preuve irréfutable que :


• 1'évolution ne peut expliquer à elle seule

Vous aimerez peut-être aussi