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CROISSANCE ET
DÉVELOPPEMENT DES PLANTES
Section 3 : physiologie de la croissance et du développement
I. ORIENTATION DE LA CROISSANCE : 192. — Il y a corrélation de croissance lorsque l’activité
TROPISMES d’un méristème (A) dépend étroitement de la présence
ou du fonctionnement d’un autre organe (B). Si on
187. — Un tropisme est une courbure des racines ou des supprime B, l’activité de A est modifiée. Ces corrélations
tiges qui oriente leur croissance par rapport à un facteur peuvent se traduire par une activation de la croissance
localisé d’un seul côté. ou, au contraire, un ralentissement, voire un arrêt de
188. — Le géotropisme est une orientation par rapport au croissance. Il s’agit alors d’une inhibition par corrélation.
sol. Il se manifeste dès la germination : la jeune tige et la
Liste 193. — La dormance est un arrêt ou un ralentissement de
jeune racine se courbent par rapport à la verticale, l’une vers
croissance ne résultant pas de l’action d’un autre organe,
le haut ayant un géotropisme négatif, l’autre vers le bas ou
mais des propriétés du méristème. Si on supprime B, le
géotropisme positif. C’est bien la pesanteur qui est la cause
fonctionnement de A dans ce cas n’est pas modifié. Les
du géotropisme, mais on en connaît mal les mécanismes.
dormances les mieux étudiées sont celles des embryons et
Ta b l e 189. — Le phototropisme est une orientation par rapport à des bourgeons.
la lumière. Si on enferme une jeune plante (pomme de
terre en germination) dans une caisse noircie intérieure-
B. Relations tige-racine
ment et percée d’un orifice latéral, la tige trouve le moyen,
grâce à son phototropisme positif, de passer par l’orifice. 194. — Parmi les corrélations de croissance, celles qui exis-
Index Les racines ont au contraire un phototropisme négatif. tent entre la racine et la tige sont les plus évidentes. Sur un
Le phototropisme serait dû à la destruction de l’auxine sol superficiel ou asphyxique, la plante présente de petites
du côté exposé à la lumière ; la face éclairée, ayant moins racines et corrélativement un appareil aérien réduit. Inverse-
d’auxine, croît moins vite, d’où il résulte l’orientation ment, les plantes semées sous couvert végétal, ou d’autres
vers la lumière. Cette théorie doit être complétée par un trop souvent broutées ou taillées, ont un faible enracine-
Glossaire effet du phytochrome auquel s’ajoute probablement celui ment préjudiciable parfois à leur implantation. On doit
de l’acide abscissique qui apparaîtrait du côté de la tenir compte de ces faits dans de nombreuses techniques
lumière par dégradation du carotène. agricoles telles que la taille des arbres fruitiers, le rythme
d’exploitation des plantes fourragères, etc.
190. — Les autres tropismes sont essentiellement
l’hydrotropisme et le chimiotropisme des racines attirées Chacun sait également les relations qui existent entre le
par l’eau et les éléments nutritifs des solutions du sol. développement du greffon et la vigueur des parties souter-
Les tropismes constituent donc des mouvements liés à la raines constituées par le porte-greffe qui est choisi en fonc-
répartition inégale de la croissance le long de l’axe. tion de l’importance que l’on désire accorder au dévelop-
D’autres mouvements ne sont pas liés à la croissance : ce pement de la couronne de l’arbre (cf. greffage, fasc. 2267).
sont les nasties, tels le déploiement et le reploiement de 195. — Les corrélations racine-tige sont évidemment
certaines folioles (légumineuses), des pétales (compo- d’origine trophique, le bon fonctionnement de l’une
sées), le mouvement journalier de l’inflorescence de étant à l’origine de la bonne alimentation de l’autre et de
tournesol. Enfin les mouvements révolutifs des tiges, phé- son grand développement. Cependant des transmissions
nomènes très répandus, permettent aux plantes grim- hormonales (vitamines et cytokinines) seraient égale-
pantes de s’enrouler sur un tuteur. ment à l’origine de ces relations.

II. CORRÉLATIONS DE CROISSANCE C. Corrélations entre bourgeons


196. — Sur une tige, tous les bourgeons édifiés au cours
A. Généralités du fonctionnement du méristème apical ne se dévelop-
191. — Sur la plante il existe de nombreux méristèmes et pent pas également. Les préséances entre bourgeons sont
l’on doit constater qu’ils ne fonctionnent pas tous en à l’origine de la forme générale des plantes : lorsque ce
même temps. Certains ont une activité qui augmente sont les bourgeons de la base qui sont favorisés, on dit
considérablement ; d’autres au contraire ont un fonction- que la ramification est basitone et le port de la plante est
nement résiduel ou nul. On dit qu’il s’établit au sein de la du type buisson. Lorsqu’au contraire, ce sont les bour-
plante un régime de préséances favorisant les uns, arrêtant geons du sommet qui se développent au détriment de
les autres momentanément ou même définitivement. ceux de la base, la ramification est acrotone et le port de

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la plante est du type arbre. Il existe d’ailleurs des inter- vers les bourgeons les plus proches de l’apex et enfin
médiaires entre l’arbre et le buisson. devient complète sur toute la longueur du rameau.
197. — Les bourgeons qui se développent sur les pousses La dormance est souvent une réaction photopériodique.
l’année même de leur formation donnent des rameaux anti-
Par exemple de jeunes peupliers placés dans des serres en
cipés. Les autres restent non fonctionnels et ne croissent que
jours longs présentent une croissance continue résultant
si le bourgeon apical vient à disparaître (par exemple à la
du fonctionnement du méristème apical. Si on les déca-
suite de la taille). On dit que le bourgeon apical exerce une
pite, les bourgeons axillaires prennent la relève ; ils
dominance (dominance apicale), les rameaux anticipés
étaient donc inhibés par dominance apicale. Placés en
ayant plus ou moins échappé à la dominance apicale.
jours courts, ces jeunes arbres cessent de croître et les
198. — La dominance apicale a d’abord été expliquée bourgeons latéraux deviennent dormants.
selon la vieille théorie trophique. Le bourgeon apical, le
mieux placé, est aussi le mieux alimenté en eau et aliments La photopériode joue donc un rôle déterminant dans
minéraux ; il se développe au détriment des autres situés l’établissement de certaines dormances. Ce n’est pas le
en dessous. L’inhibition des bourgeons dominés résulterait seul facteur ; des températures extrêmes, un assèchement
d’une carence alimentaire ; on observe d’ailleurs que les momentané de la plante interviennent dans d’autres cas.
rameaux anticipés se présentent sur les plantes les mieux
alimentées, ce qui confirme cette hypothèse. 202. — Les levées de dormances s’effectuent de façons
très variables. Certaines disparaissent d’elles-mêmes avec
199. — Néanmoins, la découverte de l’auxine et la possi-
le temps, généralement en quelques mois comme c’est le
bilité de remplacer le bourgeon apical par une applica- Liste
cas des bourgeons du tubercule de pomme de terre.
tion d’auxine, pour maintenir l’inhibition des bourgeons
dominés, ont fait prévaloir l’hypothèse que l’auxine syn- Le froid de l’hiver est cependant le facteur essentiel des
thétisée au niveau du méristème apical migrerait vers les levées de dormance des bourgeons des plantes des zones
bourgeons dominés où, à forte concentration, elle exer- tempérées. Il accélère la levée de dormance des bour-
cerait une action inhibitrice. geons de la vigne et des arbres fruitiers (pommier, ceri- Ta b l e
On a du mal à concevoir ce transport d’auxine du som- sier, abricotier). Dans les régions septentrionales, les exi-
met à la base d’un arbre. D’autres substances telles que gences en froid sont très rapidement satisfaites et les
les cytokinines jouent probablement un rôle ; l’hypo- plantes attendent les températures plus élevées du prin-
thèse trophique n’est pas à exclure entièrement. temps pour débourrer. Au contraire, en zone à hiver
doux, les dormances sont parfois incomplètement levées, I n dex
Parmi les techniques agricoles, la taille des arbres fruitiers
correspond très souvent à une levée complète ou partielle les débourrements sont capricieux, longs et irréguliers,
de la dominance apicale. peu favorables à la production fruitière. Notons qu’il
existe au sein de ces espèces une grande variabilité du
III. ARRÊTS DE CROISSANCE (DORMANCES) point de vue des exigences quantitatives de froid pour
Glossaire
lever la dormance et qu’il y a lieu, pour ces dernières
régions, de choisir des variétés peu exigeantes.
A. Dormance des bourgeons
200. — Sur de nombreuses plantes, on observe à la fin du 203. — D’autres facteurs peuvent intervenir. Certaines
printemps ou en été que la croissance du bourgeon apical levées de dormance sont soumises au photopériodisme,
s’arrête ; on s’aperçoit alors que les bourgeons latéraux comme celle des bourgeons du hêtre qui débourrent
sont également devenus incapables de croître, même si quand les jours sont suffisamment longs. Une période
l’on enlève l’apex, même si on les isole du reste de la sèche peut provoquer une deuxième floraison en août
plante. Ils sont dormants. Il faut attendre plusieurs mois chez certains arbres fruitiers (pommier, prunier) par
ou une saison pour les voir repartir, pour que la dor- levée de dormance précoce des boutons floraux, alors
mance soit levée. que, dans les conditions habituelles, c’est le froid de
l’hiver qui permet aux boutons d’éclater au printemps.
Certaines plantes, et en particulier les céréales annuelles,
ne présentent pas de bourgeons dormants. Au contraire, 204. — La levée de dormance des plantes à bulbe est
chez les arbres, les bourgeons dormants sont fréquents. obtenue artificiellement en leur appliquant une période
Ils permettent, en raison de leur faible activité métaboli- chaude et sèche suivie d’un traitement par le froid. Ces
que, de leur grande résistance au froid ou à la sécheresse, techniques sont utilisées au forçage (croissance et pro-
de faire passer à ces plantes le cap d’une saison difficile. Il duction hors saison) de certaines plantes ornementales.
en est de même des bourgeons, présents sur les bulbes et De même des traitements par des bains d’eau chaude (35
les tubercules. La dormance des bourgeons constitue à 45 °C) lèvent la dormance des lilas, forsythias, azalées.
donc une adaptation écologique intéressante permettant Certains produits chimiques sont efficaces comme
aux plantes pérennes de survivre. l’éther, utilisé dans les chambres d’éthérisation pour for-
201. — La dormance s’établit progressivement et résulte cer les lilas, ou comme la rindite, mélange de monochlo-
d’une inactivation liée à la dominance apicale. Chez la rhydrine, du glycol, de dichlorure d’étylène et de tétra-
vigne, par exemple, elle affecte en premier lieu les bour- chlorure de carbone, qui sert à lever la dormance des
geons de la base du rameau, qui sont les bourgeons tubercules de pomme de terre et permet de les planter
dominés depuis le plus longtemps ; elle progresse ensuite peu de temps après la récolte.

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B. Dormance des semences 2. Dormance propre à l’embryon


205. — Lorsque des semences vivantes et pourvues de réser- 210. — Dans ce cas l’embryon, même débarrassé des
ves, placées dans des conditions d’humidité, de température enveloppes, est incapable de croître. Les dormances
et d’oxygénation favorables à la croissance, ne germent pas, embryonnaires sont classées d’après les moyens qui per-
on dit qu’elles sont dormantes. La dormance se traduit par mettent de les éliminer.
une inaptitude passagère des méristèmes de la plantule à 211. — a) Il y a dormance apparente lorsque, après inhibi-
fonctionner et assurer la sortie de la radicule. tion, l’embryon apte à la croissance, mais insuffisamment
développé, est incapable de percer les enveloppes. Il devra
Cette propriété de certaines semences joue un rôle écologi- continuer parfois longtemps sa croissance à l’intérieur de
que important : la dormance qui permet de différer la date la semence humidifiée avant de sortir et la manifestation
de germination des graines diminue les risques d’accidents extérieure de la germination sera ainsi retardée. C’est le cas
d’origine climatique encourus par l’espèce (sécheresse, des graines d’orchidées dont l’embryon est minuscule.
gel…) dans les conditions naturelles. En agriculture, elle
constitue la plupart du temps un inconvénient. Les plantes 212. — b) Les dormances de postmaturation s’éliminent
cultivées généralement sélectionnées depuis longtemps ne au cours de la conservation des semences au sec.
manifestent pas de dormance de graine très prononcée ; Les dormances de postmaturation des céréales disparais-
au contraire, les mauvaises herbes ainsi que d’autres espè- sent avec le temps au cours de la conservation au sec. Elle
ces non encore améliorées (comme les espèces fourragères, est assez longue chez l’orge et l’avoine qui ne germent
forestières, ornementales) peuvent présenter des dorman- franchement que 2 ou 3 mois après la récolte. De faible
ces prolongées ayant des incidences importantes sur les durée chez les blés à grains roux, elle est pratiquement
Liste
techniques de production. nulle chez le seigle et les blés à grains blancs qui germent
206. — La nature de ces dormances est très variable. sur pied en année humide. Ces dormances s’éliminent
par une préréfrigération des semences humides ou un
traitement par l’acide gibbérellique.
Ta b l e 1. Dormances liées à la présence des enveloppes
213. — c) Dormances levées par le froid et l’humidité. Les
de la semence (téguments de la graine et parfois
semences qui présentent ce type de dormance doivent,
du fruit).
pour germer, être exposées (parfois pendant plus de
Si on retire ces enveloppes, l’embryon se développe. La 2 mois) au froid et à l’humidité, c’est-à-dire aux condi-
semence est donc dormante dans son ensemble, mais tions rencontrées dans le sol au cours de l’hiver. La strati-
Index l’embryon, lui, n’est pas dormant : sa croissance est sim- fication est une technique fréquemment utilisée en horti-
plement soumise à une inhibition tégumentaire. En voici culture pour reproduire ces conditions. Elle consiste à
les principaux cas : placer les semences en couches alternées avec de la tourbe
ou du sable humide dans une caisse exposée au froid. On
207. — a) Téguments imperméables à l’eau. Les semences
note que les alternances de température les plus proches
mises en présence d’eau ne gonflent pas. C’est le cas des
Glossaire des conditions naturelles (5, 15 °C) sont plus efficaces
graines dures qui ne se ramollissent pas par trempage. La
qu’une température froide constante.
présence de graines dures est à signaler chez les légumi-
neuses (trèfles, luzerne, sainfoin) et les rosacées. Plus fré- 214. — Ces dormances se rencontrent chez de nombreu-
quentes en climat sec, les graines dures germent après ses semences d’arbres et d’arbustes (prunier, pêcher,
usure et scarification des téguments. Alors que la récolte noyer, rosier) qui germent après le froid de l’hiver.
à la main ou le ressemis, dans les conditions naturelles, D’autres plantes comme le muguet ont besoin de deux
ne modifie pas la dureté des graines, la récolte mécanique hivers pour satisfaire leur besoin de froid. Une première
diminue très sensiblement leur pourcentage. On peut période froide lève la dormance de la radicule, une
également lever ces dormances par traitement thermique période plus tiède permet une légère croissance et ce n’est
et lyophilisation des semences. qu’après une nouvelle exposition au froid, la dormance
de la gemmule étant levée, que la germination s’effectue
208. — b) Imperméabilité des téguments à l’oxygène. Ces normalement. Des dormances embryonnaires incomplè-
dormances sont levées si on enlève les enveloppes et égale- tement levées permettent parfois une germination don-
ment si on augmente artificiellement la teneur en oxygène nant une plantule à croissance paresseuse.
du milieu de germination (pépin de pomme). L’imper-
méabilité à l’oxygène n’est donc pas absolue, mais les Les dormances embryonnaires présentent beaucoup
besoins de l’embryon ne sont pas couverts, en particulier d’analogie avec la dormance des bourgeons, certains
lorsque la pellicule d’eau qui entoure la semence est trop mécanismes sont probablement semblables, l’acide abs-
épaisse, ou lorsqu’il se trouve dans les téguments des com- cissique jouant un rôle majeur. Cependant les dormances
posés réducteurs qui captent l’oxygène et l’empêchent des embryons se compliquent des corrélations pouvant
ainsi d’arriver jusqu’à la future plantule. exister entre la radicule et la gemmule de la jeune plante.
209. — c) Présence d’inhibiteurs chimiques dans les enve- 3. Dormances photosensibles
loppes. Ces inhibiteurs sont présents dans les fruits char-
nus à l’intérieur desquels les graines, malgré l’humidité, 215. — Du point de vue de leur comportement à la
sont incapables de germer. C’est aussi le cas des gloméru- lumière, on classe les semences en trois catégories :
les de la betterave, des semences d’atriplex, de radis. Ces l) Les semences présentant une photosensibilité positive
dormances sont levées par lavage à l’eau courante. ont besoin de lumière pour germer ou germent mieux à

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la lumière ; c’est le cas de la majorité des plantes comme IV. TUBÉRISATION
certaines graminées fourragères que l’on doit semer
superficiellement, de quelques espèces forestières et de 220. — La formation des tubercules est liée par corrélation
nombreuses mauvaises herbes. Notons que ces exigences négative à la croissance des tiges. Les tubercules de pomme
dépendent de la variété et du lot de semences et qu’elles de terre par exemple apparaissent alors que la tige cesse de
s’atténuent au cours de la conservation. croître en longueur ; la tubérisation de la betterave est
arrêtée au moment de la montaison. Tout facteur favorable
2) Les semences à photosensibilité négative germent à la croissance (fumure azotée élevée), même s’il augmente
mieux à l’obscurité qu’à la lumière. C’est le cas du quart le rendement final, retarde la tubérisation.
des espèces, dont quelques plantes ornementales (phace- 221. — La tubérisation est soumise à certaines condi-
lie, nigelle), l’ail et certaines adventices. tions de milieu, qui, lorsqu’elles sont favorables, sont
3) Les semences indifférentes germent aussi bien à la dites inductives. Parmi les facteurs capables d’induire la
lumière qu’à l’obscurité. Ces espèces peu nombreuses tubérisation, citons d’abord la photopériode. Certaines
sont importantes car on y rencontre les principales plan- plantes tubérisent uniquement ou tubérisent mieux lors-
tes cultivées qui ont probablement perdu leur caractère que les jours sont courts (pomme de terre, topinam-
de photosensibilité au cours de la sélection par l’homme. bour). D’autres au contraire le font en jours longs
216. — Le rôle de la lumière sur la germination n’est pas (oignons). Au sein de l’espèce, les variétés sont plus ou
trophique. Il obéit à l’effet phytochrome et résulte des moins sensibles au photopériodisme et il existe une
propriétés de ce pigment. Il faut remarquer que la photo- liaison entre cette sensibilité et la précocité. Les variétés
sensibilité des semences disparaît à la suite de l’ablation de pommes de terre précoces qui tubérisent en juin sont
des téguments ; elle est modifiée par des variations de peu sensibles à la longueur du jour, alors que les variétés Liste
teneur en oxygène du milieu, ce qui fait apparaître que la tardives exigent au contraire des jours plus courts pour
plupart des dormances, bien que levées par des moyens tubériser.
très différents, présentent beaucoup d’analogie. 222. — La température joue également un rôle détermi-
nant. D’une manière générale, les plantes tubérisent Ta b l e
4. Dormances secondaires mieux lorsque les températures, en particulier celles du
sol, sont fraîches, ce qui peut poser des problèmes
217. — Lorsqu’une semence humide est placée dans des
notamment dans les cultures en milieu artificiel.
conditions contraires à celles qui, d’habitude, lui permet-
tent de germer, non seulement elle ne germe pas, mais 223. — Il a été démontré que la nature et l’état de conser-
souvent devient incapable de germer même si on la replace vation du tubercule mère influencent la tubérisation. Ces I n dex
dans les conditions qui, au départ, lui auraient permis une facteurs semblent en particulier être à l’origine du
bonne germination. Cette semence a acquis des propriétés « boulage » des pommes de terre, tubérisation précoce
nouvelles que l’on appelle dormance secondaire. préjudiciable au développement végétatif et au rende-
ment de la culture. Cela confirme l’importance que l’on
On en distingue de nombreux cas : les semences à photo- doit attacher à l’origine du plant. Glossaire
sensibilité positive présentent une dormance secondaire
après avoir été mises à germer à l’obscurité. La lumière 224. — Les mécanismes de la tubérisation ne sont pas
induit une dormance secondaire chez les graines qui ne connus. Étant sensible au photopériodisme, le lieu de per-
germent qu’à l’obscurité. Le manque momentané d’oxy- ception de la lumière est évidemment la feuille. Le lieu de
gène a, par exemple dans un sol gorgé d’eau, induit sou- réalisation est éloigné (tubercules souterrains). Il est donc
vent une dormance secondaire (cas de la folle-avoine). naturel d’émettre l’hypothèse d’une transmission hormo-
nale de l’information reçue par les feuilles. On n’en con-
218. — L’aptitude à acquérir une dormance secondaire naît cependant pas la nature. La gibbérelline pulvérisée sur
s’estompe au cours de la conservation. Comme certaines le feuillage retarde la tubérisation des pommes de terre
dormances embryonnaires, elles sont levées par la strati- alors que les antigibbérellines ont l’effet contraire.
fication et parfois aussi par l’ablation des téguments.
Ces dormances présentent une grande importance V. CHUTE DES FEUILLES ET DES FRUITS
agronomique ; des dormances secondaires peuvent être
225. — La chute des feuilles et des fruits résulte de la pré-
induites au cours de la récolte, dans les silos humides ou
sence, à la base du pétiole, de la feuille ou du pédoncule
dans le sol. C’est le cas notamment des mauvaises herbes
du fruit, d’une zone d’abscission. Le fonctionnement de
qui se maintiennent dans le sol, parfois pendant de nom-
cette dernière dépend en premier lieu des conditions du
breuses années, à l’état de semences présentant une dor-
milieu dans lequel se trouve la plante. L’arrivée des jours
mance secondaire.
courts est, à l’automne, le facteur déterminant de la chute
des feuilles de nombreux arbres. Cependant, le fonction-
5. Dormance à évolution autonome ou endogène nement de cette zone est lié par corrélation à l’organe lui-
219. — Signalons enfin le cas curieux de semences con- même ainsi qu’au reste de la plante.
servées dans des conditions apparemment constantes et 226. — Le limbe de la feuille ou l’embryon contenu dans
qui ne germent bien chaque année qu’à une seule épo- le fruit inhibent, lorsqu’ils sont en pleine croissance, la
que. C’est le cas de l’oryzopsis miliacea qui ne germe bien zone d’abscission et par là-même la chute de l’organe
qu’à l’automne, saison par ailleurs favorable à la survie de caduc. Cette action s’exercerait, comme dans le cas de la
la plantule dans les conditions naturelles. dominance apicale, par l’intermédiaire de l’auxine.

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Cependant, avec le vieillissement, les feuilles jaunissent et (plantes parthénocarpiques). Elle s’ajoute à la reproduc-
on constate alors qu’elles accélèrent la chute probable- tion sexuée chez certaines plantes (cirses, chiendent) qui
ment par action de l’acide abscissique dont elles sont sont alors des mauvaises herbes très envahissantes. Enfin
riches. A ce stade, on peut retarder l’abscission ou éviter d’autres plantes ne se reproduisent pas, ou très difficile-
la chute prématurée des fruits (pommes ou poires) en ment, par voie végétative dans les conditions naturelles ;
pulvérisant sur les vieilles feuilles et les fruits des auxines aussi de nombreuses techniques de multiplication végé-
synthétiques quelques semaines avant la maturité. tative artificielle ont été mises au point depuis très long-
227. — Le bourgeon apical et les jeunes feuilles récem- temps et continuent à être améliorées pour étendre le
ment développés accélèrent la chute des organes situés en bénéfice de la multiplication asexuée au plus grand nom-
dessous. Cette accélération s’exercerait également par bre de végétaux cultivés.
l’intermédiaire de l’auxine : en effet, des pulvérisations
d’auxine synthétique au printemps sur des organes jeu- B. Multiplication végétative naturelle
nes font tomber les fruits. Il est probable que d’autres
régulateurs de croissance interviennent dans ces corréla- 231. — La multiplication végétative naturelle peut se
tions, cependant l’hypothèse auxinique a conduit aux faire par simple fragmentation naturelle de la plante.
techniques agricoles d’éclaircissage chimique et de lutte Lorsque la ramification est abondante au niveau du sol,
contre la chute prématurée des fruits. les rameaux peuvent présenter des racines adventives et
s’ériger en nouvelle plante. C’est le cas de la touffe des
VI. MULTIPLICATION VÉGÉTATIVE graminées qui, bien qu’issue des bourgeons d’une seule
plante, est formée de tiges ayant pratiquement perdu
Liste
toute liaison entre elles après disparition du maître brin.
A. Généralités Le tallage des graminées est à la charnière entre une sim-
228. — Au cours du développement végétatif, le méris- ple ramification et la multiplication végétative.
tome apical met en place des zones méristématiques qui 232. — C’est cependant par la production d’organes spé-
Ta b l e forment les rameaux. Les propriétés et le devenir de ces cialisés que l’on caractérise la multiplication végétative
méristèmes sont souvent semblables, à tel point qu’il est naturelle. Ces organes assurent très souvent la dissémina-
parfois difficile de distinguer la tige principale et ses tion et la conservation des nouvelles plantes.
ramifications. Un végétal apparaît donc comme une
multitude d’individus vivant en commun et partageant Les stolons (coulants du fraisier), les rhizomes (chien-
Index en particulier les aliments provenant des racines. dent) présentent des racines adventives au niveau de
leurs nœuds. Leurs bourgeons peuvent alors s’individua-
Ces individus peuvent prendre naturellement une cer- liser en nouvelles plantes tandis que les entre-nœuds qui
taine indépendance en émettant par exemple des racines les relient à la plante-mère dégénèrent. Certains rhizo-
adventives qui leur sont propres. On assiste alors à une mes tubérisés (pomme de terre) assurent par leurs bour-
multiplication végétative ou asexuée qui est l’obtention geons dormants une bonne conservation et, par leurs
Glossaire
de nouvelles plantes sans mise en jeu des organes sexuels réserves, un bon démarrage de la nouvelle plante.
et des processus de fécondation.
Les drageons, ou bourgeons adventifs, qui apparaissent
229. — La multiplication végétative présente de grands
sur les racines de certaines plantes (peuplier, prunier)
avantages : elle donne un clone, c’est-à-dire un ensemble
fournissent de nouveaux individus dont les rapports avec
de plantes ayant la même constitution génétique que la
la plante-mère s’atténuent et deviennent inutiles.
plante mère dont elles proviennent. En effet, tous les
individus d’un clone dérivent à la suite de nombreuses Les écailles des bulbes (gousse d’ail) donnent des plantes
mitoses d’une seule cellule, le zygote, origine parfois loin- naturellement séparées et les bulbilles, bourgeons aériens
taine de la plante mère. Il en résulte que, sauf cas particu- en vie ralentie susceptibles de reprendre une vie active
lier de mutation ou de dégénérescence infectieuse, toutes après séparation de la plante-mère et contact avec le sol,
ces plantes sont semblables et peuvent constituer une se comportent comme de véritables graines.
variété agricole homogène. Il faut cependant remarquer
que la multiplication végétative laisse la place à une cer-
C. Éclat de souche (ou division de souche)
taine variabilité de la descendance. C’est le cas déjà
signalé du lierre en arbre, variant obtenu à partir des 233. — Cette technique s’applique aux plantes herbacées
boutures prélevées sur l’inflorescence, très différent des ou aux arbustes dont l’appareil végétatif constitue une
individus qui résultent d’un bouturage des autres parties touffe ou une souche comportant plusieurs racines et
de la plante. rameaux. Elle consiste à en séparer des éclats, parties com-
Elle permet en plus une reproduction plus rapide et par- portant racines, rameaux et bourgeons, susceptibles de
fois plus sûre que la reproduction par graine et assure dans reprendre une vie autonome après avoir été replantés. De
bien des cas l’installation d’un peuplement végétal dense. nombreuses espèces horticoles et ornementales sont ainsi
multipliées : artichaut, groseillier, framboisier, dahlia, lilas.
230. — La multiplication végétative est obligatoire pour
les plantes qui n’ont plus la possibilité de se reproduire La division de souche ne pose pas de problème particu-
par la voie sexuelle, soit à cause du climat dans lequel on lier d’organogénèse puisque tous les organes vitaux sont
les cultive (topinambour, pomme de terre), soit à cause présents sur l’éclat ; il suffit d’éviter son dessèchement et
de l’amélioration génétique dont elles ont été l’objet en particulier celui des racines.

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D. Marcottage l’apparition d’un cal de cicatrisation, masse amorphe de cel-
lules de grande taille, sorte de parenchyme qui prend nais-
234. — Le marcottage consiste à provoquer l’apparition sance au niveau des tissus lésés. Puis les ébauches méristé-
de racines adventives sur un rameau qui n’en présente matiques apparaissent soit au sein du cal de cicatrisation,
pas habituellement, et alors qu’il est encore fixé au pied- soit à partir de tissus voisins préexistants (épiderme ou
mère. Il s’agit donc d’une organogénèse artificielle. parenchyme plus ou moins profond). Les cellules qui parti-
Souvent il suffit de maintenir le rameau légèrement enterré cipent à cette régénération ont subi une dédifférenciation et
à la base ; des racines se développent au niveau des nœuds. se trouvent libérées des corrélations qui inhibent cette orga-
La marcotte est ensuite sevrée puis repiquée, comme un nogénèse dans les conditions naturelles.
éclat de souche. Il faut parfois faciliter l’émission de racines : 238. — Si, chez certaines espèces, toutes sortes d’organes
pour cela on peut opérer une légère torsion du rameau au sont susceptibles d’être bouturés, toutes ne peuvent se
niveau de son contact avec le sol. On pratique parfois une bouturer. La reprise dépend de l’organe choisi, de son âge
incision annulaire, en particulier sur les rameaux lignifiés. et de sa position sur la plante-mère, de la saison ainsi que
Lorsque le rameau ne se prête pas à l’enfoncement dans le des conditions dans lesquelles est placée la bouture.
sol (brachyblastes du pin) on peut utiliser un cornet de
239. — Lorsque la bouture est une tige ou un rameau, il
terre ou un tampon de mousse permettant de maintenir
y a formation de racine ou rhizogénèse, les parties aérien-
l’humidité (fig. 21). Enfin dans le cas où il y a blessure
nes étant issues de bourgeons préexistants. On opère
(torsion, incision) l’utilisation de l’A.I.A. ou des auxines
selon une des deux techniques suivantes :
de synthèse (ex. : acide naphtalène acétique) favorise la
formation des racines. – bouturage en vert (rameau feuillé) utilisé pour de très
Liste
nombreuses plantes herbacées (géranium, pélargo-
nium zonale). Ces boutures sont rabattues (ou
habillées), c’est-à-dire que l’on supprime les parties
b a inutiles et en particulier le feuillage pour limiter
l’évaporation ; Ta b l e
e – bouturage en sec en utilisant des rameaux aoûtés ayant
perdu leurs feuilles et présentant des bourgeons en
repos végétatif. C’est le cas de nombreux arbres et
b arbustes (peuplier, vigne, troène…).
c I n dex
240. — Pour obtenir un bon enracinement, il faut
d’abord que les facteurs de la croissance soient à leur
Fig. 1. – Préparation d’une marcotte par incision niveau favorable (eau, oxygène, température). La pré-
a : circulation de la sève ascendante par le bois ; b : sève sence de bourgeons sur la bouture ainsi que les réserves
descendante par le liber ; c : incision annulaire ; e : cornet de alimentaires que peuvent renfermer ses parenchymes
terre ou tampon de mousse. Glossaire
sont des éléments de réussite. La rhizogénèse est amélio-
rée, et parfois même rendue possible dans certains cas,
235. — Le marcottage est fréquemment utilisé en arbori- par des applications d’acide indole acétique (A.I.A.) ou
culture fruitière, suivant deux techniques : d’auxines de synthèse, telles que l’A.N.A.
– le marcottage simple par couchage ou provinage, con-
Les auxines, ou souvent des mélanges d’auxines, sont
sistant à ployer un rameau pour l’enterrer à une cer-
appliqués sur la blessure par saupoudrage, trempage ou
taine distance du pied (vigne) ;
à l’aide d’une pommade. La nature des mélanges, les
– le marcottage en butte ou cépée, où les nombreux rameaux concentrations, la durée du traitement varient avec
obtenus en recépant ou rabattant la tige principale au voi- l’espèce, la variété, la saison. Il faut savoir que les auxi-
sinage du sol sont ensuite buttés : leur base enterrée s’enra- nes qui améliorent la rhizogénèse inhibent fortement la
cinera (ex. : noisetier, doucin, paradis, St-Julien) . croissance ultérieure des racines. Il ne faut pas qu’elles
soient trop longtemps en contact avec la bouture, condi-
E. Bouturage tion qui est généralement réalisée dans la pratique, car
236. — Le bouturage consiste à prélever, sur un végétal, les auxines sont détruites par les microorganismes pré-
une portion d’organe (ou bouture) et à la placer en con- sents dans les sols.
ditions favorables pour qu’elle forme une nouvelle 241. — La formation de tige ou caulogénèse est réalisée
plante. Le plus souvent, il s’agit d’un fragment de rameau dans le cas de bouture de racines ne présentant pas natu-
(tige) comportant un ou plusieurs yeux ou bourgeons. rellement de bourgeons. Assez exceptionnelle, elle est
Mais parfois on peut bouturer une feuille ou un morceau possible chez certains arbres comme le paulownia, le
de feuille ou même certaines racines et pièces florales. catalpa, et certaines racines tubérisées comme la chicorée
237. — La bouture doit, pour reprendre, régénérer les orga- endive.
nes vitaux qu’elle ne possède pas du tout, racines et parfois 242. — Enfin certains bouturages se font à partir de frag-
tiges et bourgeons. Cette organogénèse artificielle se fait à ments de plante ne comportant ni tige ni racine et impli-
partir de cellules déjà différenciées appartenant à des tissus quent la régénération de ces deux types d’organes. C’est
qui ne sont pas destinés à produire ces organes dans les con- le cas du bouturage épiphylle réalisé à partir de feuilles
ditions naturelles. On constate, au niveau de la blessure, normales (bégonia rex) ou de feuilles tubérisées (certai-

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nes plantes à bulbes) et du bouturage d’organes floraux bourgeon, et, souvent, il en présente deux ou trois. Il faut
comme des pétales ou. des filets d’étamines (lis). que la sève circule dans le sujet, mais en un flux modéré et
Ces boutures sont placées sur du sable humide, le plus que l’ensemble soit dans le même « état physiologique ».
propre possible pour éviter les moisissures. Les jeunes On greffe le plus souvent au réveil de végétation à œil
plantes apparaissent à la base, au voisinage de la cicatrice, poussant ou au déclin (août, septembre) à œil dormant.
souvent au niveau des nervures. Elles dérivent générale- 246. — La greffe doit être effectuée avec des outils pro-
ment de cellules superficielles épidermiques ou sous-épi- pres pour éviter de propager par blessure certains virus
dermiques. L’utilisation d’auxines et de cytokinines peut ou autres parasites.
améliorer la reprise. Il importe que les coupes soient convenablement rafraî-
chies au couteau pour une bonne cicatrisation et que les
F. Régénération artificielle de plantes tissus vasculaires et les cambiums des deux partenaires
soient dès le départ en contact étroit, la concordance des
243. — Depuis quelques années, grâce aux méthodes
autres tissus n’ayant pas d’importance.
modernes d’asepsie, en utilisant des milieux aqueux soli-
difiés par la gélose, renfermant les aliments minéraux et La greffe est pratiquée avec succès sur les dicotylédones
organiques ainsi que certains régulateurs de croissance, ligneuses (arbres et arbustes) qui possèdent un méris-
on a réussi à régénérer des plantes à partir de très petits tème secondaire très actif et, à titre parfois expérimental,
fragments de végétal (technique de culture in vitro). sur les plantes herbacées comme la pomme de terre, la
tomate, le tournesol. Elle est généralement impossible
D’abord, en partant de méristèmes apicaux, petits amas chez les monocotylédones qui n’ont pas la possibilité de
Liste cellulaires prélevés à l’extrémité des tiges dont la dimen- former des tissus secondaires.
sion n’excède pas quelques dixièmes de millimètres, on a
pu obtenir en quelques mois une plante entière normale. 247. — Une des conditions principales de la réussite est
Le méristème apical étant indemne de parasite, cette néanmoins l’affinité existant entre les deux partenaires,
technique a permis de régénérer des variétés saines de qui se traduit par l’aptitude à la reprise et à la vie normale
Ta b l e pommes de terre, d’œillet, de dahlia, à partir des ancien- avec des courants communs de sève. Lorsque cette apti-
nes variétés qui étaient atteintes de dégénérescence virale tude n’existe pas, il y a incompatibilité.
chronique. L’affinité ne se manifeste que pour des plantes de parenté
De même il a été possible de faire apparaître des plantu- voisine. Elle est généralement très bonne entre les varié-
les sur de nombreux cals ou tissus ainsi cultivés grâce à tés d’une même espèce, souvent bonne entre espèces voi-
Index l’utilisation en particulier d’auxine et de cytokinine selon sines et parfois suffisante entre genres très proches : poi-
des proportions adaptées (asperge, tabac). rier (pirus), sur cognassier (cydonia).
Enfin, pour un nombre d’espèces encore limité, il a été Lorsque l’affinité est moindre, on observe au niveau de la
possible à partir de cellules parenchymateuses isolées greffe un bourrelet accentué ou une différence de diamè-
(carotte, tomate) ou même de grains de pollen (tabac, tre des deux parties (sujet et greffon) préjudiciable à la
Glossaire vigueur et à la longévité de l’arbre.
datura) d’obtenir des embryons comparables à ceux issus
de la reproduction sexuée et donnant de nouvelles plantes. L’incompatibilité rencontrée dans les autres cas a généra-
lement un effet immédiat mais peut parfois être différée
G. Greffage dans le temps, la mort du greffon ne se produisant que
plusieurs années après le greffage à la suite de tumeurs ou
nécroses (cas du noyer Juglans regia greffé sur J. nigra).
1. Définition
244. — Le greffage est une opération consistant à réunir 3. Applications et incidences biologiques
un rameau, appelé greffon ou scion, prélevé sur une 248. — Il existe un très grand nombre de modalités et de
plante, à la tige d’une autre plante qui constitue le porte- techniques de greffage largement utilisées en horticul-
greffe ou sujet. ture, en viticulture (cf. fasc. 2300), en arboriculture frui-
Lorsque la greffe est réussie ou « reprise », les plaies sont tière (cf. fasc. 2260) et d’ornement, pour multiplier des
cicatrisées et une soudure permet le passage des sèves plantes ligneuses ne pouvant se bouturer ou se marcotter
entre les deux individus. Des échanges et une complé- et dont les semences ne reproduiraient pas les caractères.
mentarité s’établissent, le porte-greffe étant pourvu de Le greffage n’augmente pas le nombre d’individus ; il
racines alors que le greffon est généralement seul à porter permet de multiplier les espèces intéressantes (espèces
des feuilles et des bourgeons. Au cours du greffage, il y a améliorées) au détriment de celles qui le sont moins
formation de tissus de cicatrisation, édification de nou- (espèces sauvages), parfois en utilisant les propriétés
veaux tissus conducteurs et départ en croissance de intéressantes de leurs organes souterrains (vigueur du
méristèmes déjà existants. franc, résistance au calcaire du cognassier, résistance au
phylloxera de la vigne américaine).
2. Conditions du greffage Il s’agit d’une reproduction conforme, avec laquelle en
245. — Il faut éviter le dessèchement en prélevant un gref- principe on retrouve les propriétés du greffon. En effet,
fon petit et défeuillé, en ligaturant la greffe et en masti- une même variété (par ex. de pomme) greffée sur divers
quant les sections. Si l’utilisation d’un petit greffon est pré- porte-greffes, est toujours reconnaissable. De même un
férable, il lui faut cependant au moins un œil, ou cognassier dont une branche a reçu un greffon de poirier

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CROISSANCE ET DÉVELOPPEMENT DES PLANTES
TA 2012
portera des poires sur le rameau qui est issu du greffon et utilisant les réserves. La plante meurt après la fructifica-
des coings sur le reste de l’arbre. tion. C’est le cas de la betterave, de la carotte, du poireau,
249. — Cependant, il existe des interactions entre les deux du chou, de l’oignon.
partenaires. Elles peuvent affecter la forme, la couleur et la 254. — Les plantes vivaces à une seule floraison présen-
saveur des feuilles et des fruits, ce qui a été constaté pour tent un développement végétatif durant plusieurs
des greffes entre espèces ou genres voisins. Un poirier années. Chez l’agave, par exemple, les grandes feuilles
greffé sur cognassier porte des fruits de formes légèrement charnues forment une vaste rosette pouvant vivre cin-
différentes, plus colorés et plus savoureux. Les tomates quante ans. Puis, en peu de temps, se développe une
greffées sur tabac renferment de la nicotine normalement immense tige florifère ; les réserves sont utilisées et la
produite par les racines de cette dernière plante. plante meurt après la fructification.
Elles retentissent sur la croissance et la précocité de flo-
raison du greffon (voir corrélation de croissance). Cha- b) Plantes polycarpiques
cun sait, par exemple, qu’un poirier greffé sur cognassier 255. — Les plantes polycarpiques fleurissent plusieurs
a un développement moindre, une vie plus brève que le années de suite. Tous les méristèmes ne sont pas mis à
même poirier greffé sur franc. Par contre le poirier sur fleur la même année ; il en reste qui, généralement inhibés
cognassier fructifie plus tôt (trois ou quatre ans) que le ou dormants, protégés à l’intérieur de bourgeons, assurent
poirier sur franc (huit ou dix ans). la survie et la floraison des années suivantes. Ces plantes
sont vivaces, on dit encore pluriannuelles ou pérennes.
Chez les arbres et les arbustes, ces bourgeons se ren- Liste
contrent sur toutes les parties aériennes de la plante.
VII. MISE À FLEUR Chez les plantes herbacées vivaces dont les parties aérien-
nes après fructification sont détruites, les bourgeons se
A. Généralités situent au ras du sol, au niveau de la rosette (pâquerette,
pissenlit) ou sur des stolons plus ou moins développés Ta b l e
(graminées vivaces). Enfin ils peuvent être nettement
1. Divers cas de mise à fleur enfoncés dans le sol sur des rhizomes ou des bulbes.
250. — La mise à fleur représente un changement phy-
siologique important du méristème apical qui produit les 2. Phases du développement reproducteur
fleurs puis cesse définitivement de fonctionner. Plusieurs I n dex
catégories de plantes se distinguent à ce sujet. 256. — A part quelques cas exceptionnels, où des fleurs
peuvent apparaître sur des plantes très jeunes (par exem-
a) Plantes monocarpiques ple à l’aisselle des cotylédons de l’arachide), les fleurs ne
251. — Les plantes monocarpiques ne fleurissent qu’une se forment pas avant que la plante ait développé un cer-
seule fois dans leur vie. Tous les méristèmes apicaux sont tain nombre de feuilles (7 chez le blé, 13 chez la tomate).
Glossaire
mis à fleur la même année, la plante fructifie et meurt.
Parmi elles : On appelle phase juvénile la période de vie de la jeune
plante pendant laquelle on ne connaît pas de moyen de la
252. — Les plantes annuelles fleurissent l’année du semis mettre à fleur. Courte chez les annuelles, la phase juvénile
et leur durée de vie, généralement inférieure à un an, est peut être longue chez les pérennes et en particulier chez
parfois limitée à quelques mois. Ces plantes, au dévelop- certains arbres.
pement rapide, passent une partie de l’année, normale-
ment les saisons défavorables à la vie active, sous forme La phase inductive de la floraison est une période de la
de graines. C’est le cas de nombreuses plantes herbacées vie de la plante qui suit la précédente et pendant laquelle
parmi lesquelles le pois, le haricot, de nombreuses cruci- il est possible de lui conférer l’aptitude à fleurir.
fères, les céréales de printemps, dont la croissance et le
Enfin la phase d’initiation florale est celle au cours de
développement se poursuivent sans interruption.
laquelle se forment les organes floraux, observables au
D’autres, comme le colza et les céréales d’hiver dont les moins sous forme de primordia.
cycles doivent normalement comporter une période de
froid, passent dans les conditions naturelles l’hiver en
terre, ce qui entraîne un ralentissement plus ou moins B. Facteurs de la floraison
marqué de leur croissance. Ces plantes appelées parfois 257. — Certaines espèces végétales, après avoir accompli
« annuelles hivernantes » se rapprochent beaucoup des leur phase juvénile, correspondant à la production d’un
bisannuelles. certain nombre de feuilles, fleurissent quelles que soient
253. — Les plantes bisannuelles fleurissent au cours de les conditions du milieu dans lequel elles vivent (c’est le
l’année qui suit celle de leur germination. Le développe- cas du mouron des oiseaux). Cependant de nombreuses
ment végétatif et le développement reproducteur sont autres, probablement en raison d’une stricte adaptation
nettement séparés. Durant la première période de végé- aux conditions climatiques et édaphiques de leur habitat
tation, la plante forme des feuilles assimilatrices dispo- (adaptation qui leur permet de boucler leur cycle de
sées le plus souvent en rosette. Des réserves s’accumulent, reproduction avec un risque limité) n’accomplissent leur
particulièrement dans les organes tubérisés. Après le phase inductive et d’initiation de la floraison que sous
repos hivernal, la tige s’allonge et les fleurs se forment, certaines conditions.

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2012TA CROISSANCE ET DÉVELOPPEMENT DES PLANTES

1. Facteurs trophiques Si on sème une variété d’hiver, soit au printemps en


258. — La théorie des facteurs trophiques est très zones septentrionales, soit à l’automne dans les pays à
ancienne. Elle lie l’aptitude à la floraison aux conditions hiver doux, elle restera longuement à l’état végétatif, pro-
préalables de la nutrition minérale et carbonée de la duira de nombreuses feuilles et finira par épier mais
plante. Elle est fondée sur des observations courantes : une beaucoup trop tard en saison. Il en résulte que les céréa-
forte fumure azotée retarde de quelques années la produc- les n’ont pas de besoin absolu de froid ; elles sont préfé-
tion des fleurs dans les vergers, alors que les plantes faible- rantes et les besoins sont variables au sein de l’espèce.
ment fumées fleurissent plus rapidement. L’activité photo- 262. — Age favorable à la vernalisation : il n’est pas néces-
synthétique a des effets inverses : les plantes ombragées saire que la céréale ait atteint un grand développement
fleurissent moins que celles qui sont exposées au soleil. On pour être vernalisée. Les températures froides sont effica-
a donc été conduit à opposer l’azote (N) provenant de la ces même si on les applique à des semences en voie de
nutrition minérale au carbone (C) de la photosynthèse en germination. Cela prouve que ces plantes ont une phase
considérant le rapport C/N des bourgeons ou de la sève juvénile très courte ou inexistante.
qui leur arrive. On remarque que, lorsque ce rapport est
supérieur à 15 ou 20, les conditions sont remplies pour Il en résulte aussi qu’il est possible de vernaliser artificiel-
que la plante fleurisse. Mais cela n’est pas général et la lement à l’aide d’appareils frigorifiques de grandes quan-
découverte des autres facteurs de la floraison, à partir tités de semences humidifiées et que, les plantules verna-
de 1920, a fait passer la théorie trophique au second plan. lisées étant très peu développées, il est encore possible de
les semer avec les moyens ordinaires.
Liste 2. Vernalisation 263. — Vernalisation artificielle : elle est réalisée de la
manière suivante : le grain sec est imbibé avec au moins
259. — La vernalisation est une transformation opérée
20 litres d’eau pour 100 kg de grains et le mélange doit
par le froid, qui confère à certaines plantes l’aptitude à
être parfaitement homogénéisé. Douze heures à la tem-
fleurir et à d’autres l’aptitude à fleurir plus vite. On dit
pérature ordinaire permettent le démarrage de l’activité
Ta b l e que les premières ont des besoins absolus de froid alors
respiratoire. Le grain est alors placé en chambre froide (+
que les autres sont simplement préférantes.
1 à + 3 °C) sous faible épaisseur (10 à 20 cm). Le grain
Dans les conditions naturelles, c’est le froid de l’hiver qui sera brassé pour éviter les fermentations et l’élévation de
est efficace, permettant aux plantes de fleurir au prin- température. Il faut éviter la dessiccation en surface soit
temps d’où le nom (printanisation = vernalisation) en mouillant à nouveau et en mélangeant, soit en cou-
Index donné à ce phénomène. vrant avec des toiles humides.
L’état vernalisé ne se traduit pas par un changement La vernalisation artificielle permet de semer au prin-
morphologique. Rien ne permet de distinguer un apex temps des blés d’hiver dans le cas où l’on a été fortement
vernalisé d’un témoin qui ne l’est pas. Les cellules ont retardé ou lorsque les semis d’automne ont gelé. Cepen-
acquis de nouvelles propriétés que l’on ne reconnaîtra dant l’intérêt est minime en grande culture, où il est en
Glossaire que plus tard. général préférable et plus facile de semer des variétés
alternatives ou de printemps. Cette technique, au con-
260. — L’état vernalisé est réversible ou irréversible selon traire, peut être d’un grand secours dans certains cas par-
les espèces : lorsque le végétal est transporté de condi- ticuliers comme celui des pépinières de sélection.
tions favorables en conditions très défavorables à la ver-
nalisation (températures plus élevées par exemple), deux 264. — État vernalisé et dévernalisation : l’état vernalisé
cas peuvent se présenter. Certaines plantes fleuriront se transmet à tous les bourgeons et aux tiges issues d’une
normalement, d’autres au contraire produiront des plantule vernalisée.
ébauches végétatives. Il y a dévernalisation (rencontrée Les températures les plus efficaces se situent autour de
par exemple chez le seigle). Ces dernières plantes devront 4 °C. Des températures plus élevées ou plus basses ont
à nouveau être vernalisées pour fleurir. une action moindre.
Nous allons analyser quelques exemples de plantes ayant L’effet des températures basses est cumulatif ; une variété
besoin de vernalisation : qui a besoin, par exemple, de 1 mois de froid, peut être ver-
a) Cas de plantes annuelles : céréales nalisée par plusieurs séquences de températures froides
séparées de périodes plus chaudes, à condition que la durée
261. — Besoins de froid : les besoins de froid des céréales
cumulée des séquences froides soit au moins d’un mois.
diffèrent selon les variétés. Dans les régions à hivers
froids, on rencontre deux catégories extrêmes : les varié- Si la température des périodes chaudes est excessive (par
tés de printemps que l’on sème en mars et qui épient en exemple 35 °C pour le seigle) il y a perte de l’état verna-
mai-juin, et les variétés d’hiver, semées habituellement lisé ou dévernalisation.
en automne et épiant comme les précédentes après avoir b) Cas de plantes bisannuelles : betterave
végété pendant les périodes froides de l’hiver. Entre ces
deux extrêmes, il existe des variétés intermédiaires dites 265. — Parmi les espèces et les variétés du genre Beta
alternatives, que l’on sème au cours de l’hiver. (betterave), il y a des plantes annuelles (betteraves sauva-
Il est facile de montrer que c’est l’exposition aux tempé- ges), qui fleurissent l’année du semis et qui ne présentent
ratures froides qui confère aux céréales d’hiver l’aptitude pas d’exigence thermique particulière, et des plantes
à monter et à fleurir en même temps que les autres, les bisannuelles qui fleurissent la deuxième année après
variétés alternatives ayant des exigences intermédiaires. l’hiver (betteraves cultivées).

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CROISSANCE ET DÉVELOPPEMENT DES PLANTES
TA 2012
Les besoins en froid des différentes variétés sont plus ou 270. — Pour certaines plantes, les exigences photopério-
moins élevés : il suffit d’une période froide au printemps diques s’ajoutent aux besoins de vernalisation et souvent
pour faire monter et fleurir les variétés fourragères peu leur succèdent. On appelle thermophase et photophase la
exigeantes. Les exigences des betteraves sucrières mieux durée de la vie de la plante pendant laquelle elle peut
améliorées sont pratiquement absolues. combler ses exigences. Par exemple, pour le blé d’hiver, la
La période juvénile de la betterave et des autres plantes thermophase précède la photophase qui précède elle-
bisannuelles est longue et dure, dans les conditions natu- même la floraison, les variétés de printemps n’ayant pas
relles, toute une année. de thermophase à accomplir.
Tous les bourgeons présents sur la tige de betterave au Si la photopériode favorable ou inductive (eupériode) est
cours de la vernalisation et ceux qui en sont issus sont suivie d’une photopériode défavorable (dyspériode),
vernalisés, ce qui entraîne leur floraison et par consé- deux cas peuvent se produire.
quent la mort de la plante. Certaines plantes continuent à fleurir normalement ; leur
c) Cas de plantes vivaces : chrysanthème des jardins floraison est définitivement induite. C’est le cas de l’ivraie.
266. — Les exigences en froid de cette espèce peuvent être D’autres, au contraire, présentent à nouveau une crois-
fortes ou faibles selon la variété. Comme toutes les plan- sance végétative. Dans ce cas la floraison est réversible
tes vivaces ayant besoin de froid, elle présente la particu- (mouron des champs, perilla, blé).
larité d’avoir des bourgeons incapables momentanément
de subir efficacement le froid ou d’être facilement et b) Photopériodisme de différents groupes de plantes
rapidement dévernalisables. Ces bourgeons de la base des 271. — Certaines plantes très particulières peuvent for- Liste
tiges, restés ou redevenus végétatifs, assurent la pérennité mer leurs fleurs à l’obscurité totale. C’est le cas des plan-
de la plante. tes issues de la germination de semences riches en réser-
267. — Les mécanismes de la vernalisation sont loin ves (tubercules et bulbes) comme la jacinthe et le
d’être connus. narcisse. Elles n’ont pas besoin de lumière pour effectuer
leur cycle et sont dites aphotiques. Ta b l e
On note que l’état vernalisé est réalisé dès leur naissance
pour les plantes qui n’ont aucune exigence. Par ailleurs 272. — D’autres plantes fleurissent indépendamment de
un apex vernalisé (comme celui d’une plantule de blé) la longueur relative de l’éclairement au cours du cycle de
édifie des bourgeons qui seront eux-mêmes vernalisés. 24 heures. Il leur suffit d’une quantité de lumière pou-
Ce serait donc une propriété inscrite dans le patrimoine
héréditaire des cellules, c’est-à-dire des noyaux. vant leur assurer le minimum trophique, c’est-à-dire la
I n dex
photosynthèse indispensable à leur survie. Cette quantité
Cependant, l’état vernalisé se transmet par greffage d’une de lumière est apportée par une photopériode minimum
tige florifère sur une plante végétative. La gibbérelline peut, (Pm). C’est le cas du mouron des oiseaux, de certains
dans certains cas, remplacer le froid. Cela fait penser à une tabacs (var. Wis. 38). Ces plantes sont dites photo-apé-
action hormonale sans que l’on connaisse sa nature. riodiques (cf. fig. 22). Glossaire
3. Photopériodisme 273. — Enfin, parmi les plantes dont la floraison est sen-
sible à la longueur du jour, nous distinguerons les plantes
a) Introduction de journées longues (PJL) ou héméropériodiques et les
268. — Des réactions photopériodiques ont été signalées plantes de journées courtes (PJC) ou nyctipériodiques.
au cours de diverses manifestations de la croissance :
1. Les plantes héméropériodiques se subdivisent en deux
tubérisation, dormance des bourgeons, chute des feuilles,
groupes :
etc. Cependant c’est l’action de la photopériode sur la
mise à fleur qui est la plus connue et que l’on désigne – les plantes héméropériodiques absolues ne fleurissant
généralement sous le nom de photopériodisme. C’est en pas, si la longueur du jour n’est pas supérieure à une cer-
utilisant la variété de tabac Maryland Mammoth, vers taine durée appelée photopériode critique (Pc) ; parmi
1920, que l’influence de la durée du jour sur la floraison a les plantes de journées longues, aux exigences absolues,
été montrée d’une manière décisive. En effet, si, en été, nous citerons le mouron des champ, l’épinard, l’avoine,
on place ce tabac à l’obscurité pendant une partie de la le vulpin, le ray-grass, la fétuque, la fléole, le trèfle ;
journée, il fleurit. Inversement si, en hiver, on prolonge la – les plantes héméropériodiques préférantes fleurissant
période d’éclairement en mettant une lampe allumée au- d’autant plus rapidement et abondamment que les
dessus de la plante, celle-ci reste végétative. jours sont plus longs. C’est le cas des céréales et notam-
269. — Alors que la vernalisation est un processus qui ment du blé de printemps qui fleurit plus rapidement
prépare à la floraison et qui permet à la plante de parcou- lorsqu’on le sème tard. Cependant, parmi les céréales,
rir uniquement sa phase inductive, le photopériodisme il est des variétés précoces qui sont peu sensibles à la
est à la fois inducteur et réalisateur de la floraison. Une photopériode et des tardives aux exigences photopé-
photopériode favorable rend la plante apte à fleurir et la riodiques plus prononcées. Nous voyons là encore une
fait fleurir. variabilité du comportement au sein de l’espèce à
l’égard d’un facteur climatique.
Contrairement aux plantes en cours de vernalisation que
l’on ne peut distinguer d’un témoin non vernalisé, une Parmi les plantes de journées longues préférantes on
plante soumise à une photopériode favorable se recon- trouve : la betterave, le navet, la laitue, le pois, le muflier,
naît par la production d’ébauches florales. le pétunia.

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2012TA CROISSANCE ET DÉVELOPPEMENT DES PLANTES

274. – 2. Les plantes nyctipériodiques se divisent égale-


ment en deux groupes :
– les plantes nyctipériodiques absolues ne fleurissant pas
si la photopériode est supérieure à une certaine valeur
dite photopériode critique (Pc). La photopériode per-
mettant à ces plantes de fleurir et de survivre se situe
donc entre deux limites, Pc et Pm. C’est le cas de la
variété de tabac M. mammoth, du Xanthium pensylva-
ticum, de Perilla ocymoïdes, du café, du pharbitis.
– les plantes nyctipériodiques préférantes fleurissant plus
rapidement en jours courts qu’en jours longs. Parmi
elles on trouve le soja, le coton, le chanvre, le riz, la
canne à sucre.
275. — Sur la figure 22 sont portés schématiquement les
nombres de jours nécessaires à la mise à fleur de ces diffé- 0 Pm 24 heures
rentes catégories de plantes en fonction de la photopé- Photo-apériodique
riode. La photopériode est d’autant plus efficace que le
nombre de jours nécessaires est plus faible.
(2)
Liste Il est à signaler que la valeur de Pm et Pc varie selon la
nature des plantes et que la Pc d’une plante de jours
longs peut être inférieure à la Pc d’une plante de jours
courts, si bien que certaines photopériodes, voisines de (1)
12 h, peuvent faire fleurir aussi bien des PJC que des PJL.
Ta b l e
276. — Plantes à exigences complexes. De nombreuses
plantes, pour accomplir leur cycle, exigent deux séquen-
ces successives de longueur du jour dont l’ordre semble
imposé. Par exemple : bryophyllum, crassulacée des
régions chaudes, ne fleurit que lorsqu’à une période de
Index jours longs (JL) succède une période de jours courts
(JC), alors que Campanula medium, d’Europe, demande
la séquence JC-JL pour fleurir. 0 Pm P 24 heures
Héméropériodiques
Pour les céréales, le froid peut être remplacé par les JC,
Glossaire mais certaines variétés de graminées fourragères comme
le ray-grass « Mlle Pature » ne fleurissent qu’après avoir
(1)
été soumis à la séquence JC-froid-JL.
Ces exigences complexes, plus ou moins absolues, parfois
interchangeables, traduisent une adaptation des plantes
aux séquences naturelles particulières des différents cli-
mats. Elles soulignent la variabilité du comportement des
plantes en fonction du lieu et de l’année climatique. (2)
c) Mécanismes du photopériodisme
277. — Il est évident que la réception de l’information
lumineuse se fait par les feuilles et on a pu montrer dans
certains cas qu’il suffisait d’une seule feuille placée en
conditions photopériodiques inductives pour mettre à
fleur les méristèmes, même éloignés, de la plante. 0 Pm Pc 24 heures
Des expériences menées en conditions climatiques artificiel- Nyctipériodiques
les ont permis de montrer qu’en réalité ce n’était pas la lon-
gueur du jour mais celle de la nuit (qui lui est évidemment Fig. 2. – Schéma montrant le comportement
complémentaire dans les conditions naturelles) qui com- photopériodique de diverses plantes.
mande la réaction photopériodique. Lorsque les jours sont En abscisse : longueurs des jours auxquels sont maintenues les
plantes (en heures). Pm : photopériode correspondant au minimum
courts (par exemple 9 heures) et les nuits longues (15 h) les trophique ; Pc : photopériode critique. En ordonnée sont portés les
PJC fleurissent alors que les PJL restent végétatives. Si on nombres de jours nécessaires à la mise à fleur (d’après Chouard).
interrompt l’obscurité par un éclairement au milieu de la 1. Comportement absolu.
nuit, les PJL fleurissent et les PJC restent végétatives. 2. Comportement préférant

La durée de l’éclairement et l’intensité lumineuse suffi-


sante pour interrompre efficacement la nuit sont très fai-
bles et sans incidence notable sur l’assimilation chloro-

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Document à usage pédagogique


CROISSANCE ET DÉVELOPPEMENT DES PLANTES
TA 2012
phyllienne, ce qui prouve que l’alimentation carbonée de floraison des PJL. Comme pour beaucoup de phénomè-
la plante n’est pas le facteur déterminant. nes biologiques, on est conduit à émettre l’hypothèse
d’un équilibre entre plusieurs substances hormonales,
278. — La composition spectrale de la lumière donnée sans pour autant connaître leur mode d’action dans ce
aux plantes pour interrompre la nuit est importante. Le cas particulier.
rouge clair est très efficace alors que le rouge sombre est
peu efficace et inhibe l’effet du rouge clair. Il s’agit d’un 279. — L’étude de la mise à fleur des plantes montre une
effet phytochrome, ce pigment étant le photorécepteur. adaptation stricte à certains facteurs du milieu qui corres-
pondent aux conditions de leur habitat d’origine et leur
Il reste que le lieu de réalisation de la floraison est éloigné permet d’accomplir leur cycle avec une bonne sécurité.
de la feuille et que le phytochrome lui-même ne peut
En dehors de cet habitat, se posent des problèmes d’adap-
migrer. Comment est transmise cette information, quelle
tation que l’agriculteur résout par un choix judicieux des
est la nature du vecteur qui la transmet et comment
espèces et variétés à ensemencer.
peut-elle se traduire au niveau de l’apex ? Autant de ques-
tions auxquelles il est encore impossible de répondre. La connaissance des exigences particulières de chaque
L’acide gibbérellique fait fleurir certaines PJL placées en groupe de plantes du point de vue de sa mise à fleur est
dyspériode mais n’est pas efficace sur les PJC. L’acide abs- utile pour entreprendre des cultures en milieu entière-
cissique, au contraire, pulvérisé alors que les plantes sont ment ou partiellement contrôlé (culture sous serre ou
exposées en jours longs, fait fleurir les PJC et inhibe la sous abri).

Liste

Ta b l e

I n dex

Glossaire

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