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CROISSANCE ET
DÉVELOPPEMENT DES PLANTES
Section 3 : physiologie de la croissance et du développement
I. ORIENTATION DE LA CROISSANCE : 192. — Il y a corrélation de croissance lorsque l’activité
TROPISMES d’un méristème (A) dépend étroitement de la présence
ou du fonctionnement d’un autre organe (B). Si on
187. — Un tropisme est une courbure des racines ou des supprime B, l’activité de A est modifiée. Ces corrélations
tiges qui oriente leur croissance par rapport à un facteur peuvent se traduire par une activation de la croissance
localisé d’un seul côté. ou, au contraire, un ralentissement, voire un arrêt de
188. — Le géotropisme est une orientation par rapport au croissance. Il s’agit alors d’une inhibition par corrélation.
sol. Il se manifeste dès la germination : la jeune tige et la
Liste 193. — La dormance est un arrêt ou un ralentissement de
jeune racine se courbent par rapport à la verticale, l’une vers
croissance ne résultant pas de l’action d’un autre organe,
le haut ayant un géotropisme négatif, l’autre vers le bas ou
mais des propriétés du méristème. Si on supprime B, le
géotropisme positif. C’est bien la pesanteur qui est la cause
fonctionnement de A dans ce cas n’est pas modifié. Les
du géotropisme, mais on en connaît mal les mécanismes.
dormances les mieux étudiées sont celles des embryons et
Ta b l e 189. — Le phototropisme est une orientation par rapport à des bourgeons.
la lumière. Si on enferme une jeune plante (pomme de
terre en germination) dans une caisse noircie intérieure-
B. Relations tige-racine
ment et percée d’un orifice latéral, la tige trouve le moyen,
grâce à son phototropisme positif, de passer par l’orifice. 194. — Parmi les corrélations de croissance, celles qui exis-
Index Les racines ont au contraire un phototropisme négatif. tent entre la racine et la tige sont les plus évidentes. Sur un
Le phototropisme serait dû à la destruction de l’auxine sol superficiel ou asphyxique, la plante présente de petites
du côté exposé à la lumière ; la face éclairée, ayant moins racines et corrélativement un appareil aérien réduit. Inverse-
d’auxine, croît moins vite, d’où il résulte l’orientation ment, les plantes semées sous couvert végétal, ou d’autres
vers la lumière. Cette théorie doit être complétée par un trop souvent broutées ou taillées, ont un faible enracine-
Glossaire effet du phytochrome auquel s’ajoute probablement celui ment préjudiciable parfois à leur implantation. On doit
de l’acide abscissique qui apparaîtrait du côté de la tenir compte de ces faits dans de nombreuses techniques
lumière par dégradation du carotène. agricoles telles que la taille des arbres fruitiers, le rythme
d’exploitation des plantes fourragères, etc.
190. — Les autres tropismes sont essentiellement
l’hydrotropisme et le chimiotropisme des racines attirées Chacun sait également les relations qui existent entre le
par l’eau et les éléments nutritifs des solutions du sol. développement du greffon et la vigueur des parties souter-
Les tropismes constituent donc des mouvements liés à la raines constituées par le porte-greffe qui est choisi en fonc-
répartition inégale de la croissance le long de l’axe. tion de l’importance que l’on désire accorder au dévelop-
D’autres mouvements ne sont pas liés à la croissance : ce pement de la couronne de l’arbre (cf. greffage, fasc. 2267).
sont les nasties, tels le déploiement et le reploiement de 195. — Les corrélations racine-tige sont évidemment
certaines folioles (légumineuses), des pétales (compo- d’origine trophique, le bon fonctionnement de l’une
sées), le mouvement journalier de l’inflorescence de étant à l’origine de la bonne alimentation de l’autre et de
tournesol. Enfin les mouvements révolutifs des tiges, phé- son grand développement. Cependant des transmissions
nomènes très répandus, permettent aux plantes grim- hormonales (vitamines et cytokinines) seraient égale-
pantes de s’enrouler sur un tuteur. ment à l’origine de ces relations.
Cependant, avec le vieillissement, les feuilles jaunissent et (plantes parthénocarpiques). Elle s’ajoute à la reproduc-
on constate alors qu’elles accélèrent la chute probable- tion sexuée chez certaines plantes (cirses, chiendent) qui
ment par action de l’acide abscissique dont elles sont sont alors des mauvaises herbes très envahissantes. Enfin
riches. A ce stade, on peut retarder l’abscission ou éviter d’autres plantes ne se reproduisent pas, ou très difficile-
la chute prématurée des fruits (pommes ou poires) en ment, par voie végétative dans les conditions naturelles ;
pulvérisant sur les vieilles feuilles et les fruits des auxines aussi de nombreuses techniques de multiplication végé-
synthétiques quelques semaines avant la maturité. tative artificielle ont été mises au point depuis très long-
227. — Le bourgeon apical et les jeunes feuilles récem- temps et continuent à être améliorées pour étendre le
ment développés accélèrent la chute des organes situés en bénéfice de la multiplication asexuée au plus grand nom-
dessous. Cette accélération s’exercerait également par bre de végétaux cultivés.
l’intermédiaire de l’auxine : en effet, des pulvérisations
d’auxine synthétique au printemps sur des organes jeu- B. Multiplication végétative naturelle
nes font tomber les fruits. Il est probable que d’autres
régulateurs de croissance interviennent dans ces corréla- 231. — La multiplication végétative naturelle peut se
tions, cependant l’hypothèse auxinique a conduit aux faire par simple fragmentation naturelle de la plante.
techniques agricoles d’éclaircissage chimique et de lutte Lorsque la ramification est abondante au niveau du sol,
contre la chute prématurée des fruits. les rameaux peuvent présenter des racines adventives et
s’ériger en nouvelle plante. C’est le cas de la touffe des
VI. MULTIPLICATION VÉGÉTATIVE graminées qui, bien qu’issue des bourgeons d’une seule
plante, est formée de tiges ayant pratiquement perdu
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toute liaison entre elles après disparition du maître brin.
A. Généralités Le tallage des graminées est à la charnière entre une sim-
228. — Au cours du développement végétatif, le méris- ple ramification et la multiplication végétative.
tome apical met en place des zones méristématiques qui 232. — C’est cependant par la production d’organes spé-
Ta b l e forment les rameaux. Les propriétés et le devenir de ces cialisés que l’on caractérise la multiplication végétative
méristèmes sont souvent semblables, à tel point qu’il est naturelle. Ces organes assurent très souvent la dissémina-
parfois difficile de distinguer la tige principale et ses tion et la conservation des nouvelles plantes.
ramifications. Un végétal apparaît donc comme une
multitude d’individus vivant en commun et partageant Les stolons (coulants du fraisier), les rhizomes (chien-
Index en particulier les aliments provenant des racines. dent) présentent des racines adventives au niveau de
leurs nœuds. Leurs bourgeons peuvent alors s’individua-
Ces individus peuvent prendre naturellement une cer- liser en nouvelles plantes tandis que les entre-nœuds qui
taine indépendance en émettant par exemple des racines les relient à la plante-mère dégénèrent. Certains rhizo-
adventives qui leur sont propres. On assiste alors à une mes tubérisés (pomme de terre) assurent par leurs bour-
multiplication végétative ou asexuée qui est l’obtention geons dormants une bonne conservation et, par leurs
Glossaire
de nouvelles plantes sans mise en jeu des organes sexuels réserves, un bon démarrage de la nouvelle plante.
et des processus de fécondation.
Les drageons, ou bourgeons adventifs, qui apparaissent
229. — La multiplication végétative présente de grands
sur les racines de certaines plantes (peuplier, prunier)
avantages : elle donne un clone, c’est-à-dire un ensemble
fournissent de nouveaux individus dont les rapports avec
de plantes ayant la même constitution génétique que la
la plante-mère s’atténuent et deviennent inutiles.
plante mère dont elles proviennent. En effet, tous les
individus d’un clone dérivent à la suite de nombreuses Les écailles des bulbes (gousse d’ail) donnent des plantes
mitoses d’une seule cellule, le zygote, origine parfois loin- naturellement séparées et les bulbilles, bourgeons aériens
taine de la plante mère. Il en résulte que, sauf cas particu- en vie ralentie susceptibles de reprendre une vie active
lier de mutation ou de dégénérescence infectieuse, toutes après séparation de la plante-mère et contact avec le sol,
ces plantes sont semblables et peuvent constituer une se comportent comme de véritables graines.
variété agricole homogène. Il faut cependant remarquer
que la multiplication végétative laisse la place à une cer-
C. Éclat de souche (ou division de souche)
taine variabilité de la descendance. C’est le cas déjà
signalé du lierre en arbre, variant obtenu à partir des 233. — Cette technique s’applique aux plantes herbacées
boutures prélevées sur l’inflorescence, très différent des ou aux arbustes dont l’appareil végétatif constitue une
individus qui résultent d’un bouturage des autres parties touffe ou une souche comportant plusieurs racines et
de la plante. rameaux. Elle consiste à en séparer des éclats, parties com-
Elle permet en plus une reproduction plus rapide et par- portant racines, rameaux et bourgeons, susceptibles de
fois plus sûre que la reproduction par graine et assure dans reprendre une vie autonome après avoir été replantés. De
bien des cas l’installation d’un peuplement végétal dense. nombreuses espèces horticoles et ornementales sont ainsi
multipliées : artichaut, groseillier, framboisier, dahlia, lilas.
230. — La multiplication végétative est obligatoire pour
les plantes qui n’ont plus la possibilité de se reproduire La division de souche ne pose pas de problème particu-
par la voie sexuelle, soit à cause du climat dans lequel on lier d’organogénèse puisque tous les organes vitaux sont
les cultive (topinambour, pomme de terre), soit à cause présents sur l’éclat ; il suffit d’éviter son dessèchement et
de l’amélioration génétique dont elles ont été l’objet en particulier celui des racines.
nes plantes à bulbes) et du bouturage d’organes floraux bourgeon, et, souvent, il en présente deux ou trois. Il faut
comme des pétales ou. des filets d’étamines (lis). que la sève circule dans le sujet, mais en un flux modéré et
Ces boutures sont placées sur du sable humide, le plus que l’ensemble soit dans le même « état physiologique ».
propre possible pour éviter les moisissures. Les jeunes On greffe le plus souvent au réveil de végétation à œil
plantes apparaissent à la base, au voisinage de la cicatrice, poussant ou au déclin (août, septembre) à œil dormant.
souvent au niveau des nervures. Elles dérivent générale- 246. — La greffe doit être effectuée avec des outils pro-
ment de cellules superficielles épidermiques ou sous-épi- pres pour éviter de propager par blessure certains virus
dermiques. L’utilisation d’auxines et de cytokinines peut ou autres parasites.
améliorer la reprise. Il importe que les coupes soient convenablement rafraî-
chies au couteau pour une bonne cicatrisation et que les
F. Régénération artificielle de plantes tissus vasculaires et les cambiums des deux partenaires
soient dès le départ en contact étroit, la concordance des
243. — Depuis quelques années, grâce aux méthodes
autres tissus n’ayant pas d’importance.
modernes d’asepsie, en utilisant des milieux aqueux soli-
difiés par la gélose, renfermant les aliments minéraux et La greffe est pratiquée avec succès sur les dicotylédones
organiques ainsi que certains régulateurs de croissance, ligneuses (arbres et arbustes) qui possèdent un méris-
on a réussi à régénérer des plantes à partir de très petits tème secondaire très actif et, à titre parfois expérimental,
fragments de végétal (technique de culture in vitro). sur les plantes herbacées comme la pomme de terre, la
tomate, le tournesol. Elle est généralement impossible
D’abord, en partant de méristèmes apicaux, petits amas chez les monocotylédones qui n’ont pas la possibilité de
Liste cellulaires prélevés à l’extrémité des tiges dont la dimen- former des tissus secondaires.
sion n’excède pas quelques dixièmes de millimètres, on a
pu obtenir en quelques mois une plante entière normale. 247. — Une des conditions principales de la réussite est
Le méristème apical étant indemne de parasite, cette néanmoins l’affinité existant entre les deux partenaires,
technique a permis de régénérer des variétés saines de qui se traduit par l’aptitude à la reprise et à la vie normale
Ta b l e pommes de terre, d’œillet, de dahlia, à partir des ancien- avec des courants communs de sève. Lorsque cette apti-
nes variétés qui étaient atteintes de dégénérescence virale tude n’existe pas, il y a incompatibilité.
chronique. L’affinité ne se manifeste que pour des plantes de parenté
De même il a été possible de faire apparaître des plantu- voisine. Elle est généralement très bonne entre les varié-
les sur de nombreux cals ou tissus ainsi cultivés grâce à tés d’une même espèce, souvent bonne entre espèces voi-
Index l’utilisation en particulier d’auxine et de cytokinine selon sines et parfois suffisante entre genres très proches : poi-
des proportions adaptées (asperge, tabac). rier (pirus), sur cognassier (cydonia).
Enfin, pour un nombre d’espèces encore limité, il a été Lorsque l’affinité est moindre, on observe au niveau de la
possible à partir de cellules parenchymateuses isolées greffe un bourrelet accentué ou une différence de diamè-
(carotte, tomate) ou même de grains de pollen (tabac, tre des deux parties (sujet et greffon) préjudiciable à la
Glossaire vigueur et à la longévité de l’arbre.
datura) d’obtenir des embryons comparables à ceux issus
de la reproduction sexuée et donnant de nouvelles plantes. L’incompatibilité rencontrée dans les autres cas a généra-
lement un effet immédiat mais peut parfois être différée
G. Greffage dans le temps, la mort du greffon ne se produisant que
plusieurs années après le greffage à la suite de tumeurs ou
nécroses (cas du noyer Juglans regia greffé sur J. nigra).
1. Définition
244. — Le greffage est une opération consistant à réunir 3. Applications et incidences biologiques
un rameau, appelé greffon ou scion, prélevé sur une 248. — Il existe un très grand nombre de modalités et de
plante, à la tige d’une autre plante qui constitue le porte- techniques de greffage largement utilisées en horticul-
greffe ou sujet. ture, en viticulture (cf. fasc. 2300), en arboriculture frui-
Lorsque la greffe est réussie ou « reprise », les plaies sont tière (cf. fasc. 2260) et d’ornement, pour multiplier des
cicatrisées et une soudure permet le passage des sèves plantes ligneuses ne pouvant se bouturer ou se marcotter
entre les deux individus. Des échanges et une complé- et dont les semences ne reproduiraient pas les caractères.
mentarité s’établissent, le porte-greffe étant pourvu de Le greffage n’augmente pas le nombre d’individus ; il
racines alors que le greffon est généralement seul à porter permet de multiplier les espèces intéressantes (espèces
des feuilles et des bourgeons. Au cours du greffage, il y a améliorées) au détriment de celles qui le sont moins
formation de tissus de cicatrisation, édification de nou- (espèces sauvages), parfois en utilisant les propriétés
veaux tissus conducteurs et départ en croissance de intéressantes de leurs organes souterrains (vigueur du
méristèmes déjà existants. franc, résistance au calcaire du cognassier, résistance au
phylloxera de la vigne américaine).
2. Conditions du greffage Il s’agit d’une reproduction conforme, avec laquelle en
245. — Il faut éviter le dessèchement en prélevant un gref- principe on retrouve les propriétés du greffon. En effet,
fon petit et défeuillé, en ligaturant la greffe et en masti- une même variété (par ex. de pomme) greffée sur divers
quant les sections. Si l’utilisation d’un petit greffon est pré- porte-greffes, est toujours reconnaissable. De même un
férable, il lui faut cependant au moins un œil, ou cognassier dont une branche a reçu un greffon de poirier
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