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L’analyse d’image : « New Orleans, Louisiana, 1991 »

KIM Mir

Cette photographie s’intitule New Orleans, Louisiana, 1991. Elle fait partie de la série
photographique d’une des œuvres d’ Oh Hein Kuhn, Les américains, American Them. Elle présente
dans cette photo, un homme qui semblerait être « le typique policier américain ». Il a des sourcils
foncées, les yeux mis clos et le nez rond. Cependant Oh Hein Kuhn le met en scène d’une manière
déconcertante dans cette photographie. Quelles procédés, l’artiste, utilisent-elle pour faire ressentir
un tel sentiment chez le spectateur ?

Lorsque nous observons cette photographie pour la première fois, quelles informations nous
sautent aux yeux ? Nous pouvons remarquer un homme en uniforme de policier, situé au milieu
d'un fond sombre. Il regarde l’appareil photo en face de lui, mais il ne se tient pas parallèlement à la
caméra : son torse est en biais. Il laisse paraître une expression faciale pesante, donnant
l’impression qu’il porte le poids de son devoir professionnel. De plus, il est vétu d’un uniforme de
police, sur sa veste, on trouve une broche brillante sur sa poitrine gauche, ainsi qu’une insigne
cousue par points piqués le long de la ligne de finition blanche. Ces derniers renforcent la sensation
d’angoisse que son visage montre déjà . A travers sa posture et son expression faciale, nous pouvons
déduire sa position sociale et son idéologie.

Pour mieux comprendre la photographie d'Oh Hein Kuhn, il est nécessaire d’examiner les
styles de l'œuvre de Diane Arbus et de Weegee dans le milieu du XXe siècle. La série «Les
Américains, American Them» d'Oh Hein Kuhn s’inspire des approches de compositions et de
photographies des deux artistes. Cette série est principalement composée de sujets placés au centre,
ce qui est similaire aux photographies de Diane Arbus. D’un autre coté, elle offre une forte
impression visuelle par les différences de luminosité que l’on retrouve dans les photographies de
Weegee. Essayons maintenant de comprendre comment Oh Hein Kuhn parvient à rendre sa
photographie « déconcertante » .
Le livre de Susan Sontag intitulé Sur la photographie présente la composition
photographique de Diane Arbus, qui ressemble à celle d’Oh Hein Kuhn, comme il est cité ci-
dessous : « Dans les photographies de Diane Arbus, le sujet regarde toujours l'appareil photo. C'est
pourquoi il semble particulièrement étrange - plus étrange que si elle ne les avait pas regardés. »

Comme il est dit juste au dessus, Diane Arbus photographiaient des sujets qui étaient des
personnes sans troubles psychologiques ou psychomoteurs mais aussi des personnes à capacité
réduites.Diane Arbus les prenait en photos, en se tenant devant eux, appareil photo à la main.
Contrairement à la série intitulée « Le portrait du passager de métro, Subway Portrait » de Walker
Evans qui dissimulait son appareil photo dans ses vêtements pour capturer des expressions
naturelles chez les personnes qu’il choisissait de photographier. Le style de composition, utilisé par
Diane Arbus, tout comme Oh Hein Kuhn, est généralement considéré comme une certaine volonté
de montrer l'essence du sujet, c’est-à-dire de montrer ce à quoi la personne ressemble lorsque le
cliché est pris. Toutefois, le regard du sujet posé sur l’objectif de l’appareil, peut être perturbant
pour les spectateurs. De cette manière, la photographie d'Oh Hein Kuhn nous évoque une sensation
étrange par le regard inconfortable et fixe du policier.

De plus, les photographies d'Oh Hein Kuhn fournissent une intensité similaire à celles des
œuvres de Weegee. Ce dernier utilise intentionnellement les éclairages pour séparer le sujet du
fond. Par conséquent, même les plus petits détails tels que l'apparence, l'expression et la posture du
sujet sont révélés. Au moment où l'éclairage éclate, un effet intentionnel est créé. Cette approche
peut être comprise comme « Le Gestus », une théorie de Bertolt Brecht. « Le Gestus » est un terme
généralement appliqué à la mise en scène théâtrale. Il se réfère aux attitudes, au regard, à l'ensemble
du langage corporel dont dispose l'acteur pour exprimer une émotion ou une pensée spécifique.
Autrement dit, Oh Hein Kuhn utilise l’éclairage pour mettre en scène « le Gestus ». En particulier
lorsqu’elle use de l’éclairage pour isoler le sujet dans l'obscurité. Cette mise en scène donne la
sensation au spectateur que le sujet est seul, telle une sculpture détachée de l’espace qu’elle occupe.
Toute ces mises en scène , le jeu des lumières et la manière dont est prise la personne, nous laisse
nous demander si le sujet de la photographie est en fait un policier à La Nouvelle Orléans ou un
acteur jouant ce rôle. En d'autres termes, cela nous fait oublier la figure originale du sujet de la
photographie. L'effet de « Le Gestus », créé par Oh Hein Kuhn, nous éloigne encore un peu plus du
sujet initiale.

Ainsi, l'œuvre « New Orleans, Louisiana, 1991 » d’Oh Hein Kuhn peut être considérée
comme ayant créé une image unique en adoptant les approches techniques des artistes précédents
tout en combinant son propre style et sa propre approche personnelle. Elle ne fait pas table rase du
passé, elle crée une nouvelle image en utilisant les techniques déjà utilisées par des artistes tout en y
ajoutant sa singularité et son approche qui lui sont propres. D’une autre manière, elle nous offre une
nouvelle perspective au lieu de noms proposer une image stéréotypée de la police, et dans un sens
plus large, nous pouvons dire que l’artiste a cassé les stéréotypes ou les idées fixes sur les images
que nous avons l’habitude de voir.

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