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Université Claude Bernard – Lyon 1

INSTITUT DE SCIENCE FINANCIERE ET D'ASSURANCES

Mémoire présenté
devant l’Institut de Science Financière et d’Assurances
pour l’obtention du diplôme d’Actuaire de l’Université de Lyon

le 30 novembre 2011

Par : M. Julien ROLLET


Titre: L’effet modérateur du reste à charge sur les dépenses de santé

Confidentialité : OUI (Durée : 2 ans)

Membre du jury de l’Institut des Actuaires Entreprise :

M. Jean-Michel EYRAUD Gras Savoye

Membres du jury I.S.F.A. Directeur de mémoire en entreprise :


M. Jean Claude AUGROS M. Ahoua ASSOUAN
M. Alexis BIENVENÜE
M. Areski COUSIN Invité :
Mme Diana DOROBANTU Mme Anne MARION
Mme Anne EYRAUD-LOISEL
M. Nicolas LEBOISNE
M. Stéphane LOISEL Autorisation de mise en ligne sur
Mlle Esterina MASIELLO un site de diffusion de documents
Mme Véronique MAUME-DESCHAMPS actuariels (après expiration de
M. Frédéric PLANCHET l’éventuel délai de confidentialité)
M. François QUITTARD-PINON
Mme Béatrice REY-FOURNIER Signature du responsable entreprise
M. Pierre RIBEREAU
M. Christian-Yann ROBERT
M. Didier RULLIERE
M. Pierre THEROND

Secrétariat Signature du candidat


Mme Marie-Claude MOUCHON

Bibliothèque :
Mme Michèle SONNIER

50 Avenue Tony Garnier


69366 Lyon Cedex 07
Résumé
Avec 11,8 % de son PIB en 2009, la France arrive au troisième rang des pays de l’OCDE
consacrant la plus grande part de leur PIB à la santé, derrière les Etats-Unis et les Pays-Bas.
Ce chiffre cache un système qui peine à trouver son équilibre entre un financement public qui
se réduit progressivement et les ménages qui émettent une demande de soins croissante
sous l’impulsion de nombreux effets d’offre comme le progrès technique.
Les désengagements récents de la Sécurité sociale ont conduit au transfert vers les ménages
d’une partie des dépenses de santé préalablement prises en charge par l’assurance maladie
obligatoire. Pour les Français, l’effet premier de ces transferts – l’augmentation du reste à
charge – a été amoindri par le rôle grandissant des complémentaires santé dans le
financement des soins qui, en couvrant de mieux en mieux les dépassements d’honoraires,
les équipements optiques ou les prothèses dentaires, ont parfois été pointées du doigt pour
leur contribution à la dérive du régime de base.
Le secteur complémentaire et notamment les contrats collectifs, marqués par une
augmentation brutale de leur taxation, doivent s’adapter à un système de protection sociale
en constante mutation. Face à des dépenses de santé en hausse et dans un contexte
économique morose, des solutions doivent être apportées afin de limiter la dérive des
régimes, tout en veillant à ne pas impacter lourdement les assurés. Les acteurs du secteur
complémentaire se doivent donc de bien maîtriser les déterminants des dépenses de santé
afin de concevoir des réponses efficaces autres que la simple augmentation des cotisations.
Le vieillissement de la population participe à la progression et à la modification de la
structure des dépenses mais d’autres facteurs comme le sexe, la localisation géographique ou
le secteur d’activité jouent également un rôle majeur dans la sollicitation des régimes
complémentaires. L’influence des déterminants non démographiques, comme le niveau de
gamme du régime, la situation économique ou le tiers payant est, elle aussi, très marquée.
Au cours de son histoire, l’Assurance Maladie a introduit de nombreux mécanismes tels que
le ticket modérateur ou la participation forfaitaire de 1 euro faisant du reste à charge
l’instrument principal utilisé pour assurer sa pérennité financière. Bien que l’effet
modérateur de telles mesures sur les dépenses globales de santé soit certain, il dépend au
niveau individuel de l’état de santé de l’assuré, de son adhésion ou non à un régime
complémentaire et de son niveau de vie. Ce dernier point soulève la question de la
conformité de ces dispositifs avec l’un des principes fondateurs de la Sécurité sociale,
l’égalité des Français devant l’accès aux soins.
Le secteur complémentaire n’est pas en reste et s’organise pour faire face à la dérive des
coûts, notamment par la construction de régimes visant à inciter les assurés à adopter un
comportement responsable, en favorisant la prévention, mais également en agissant sur leur
participation financière. Les leviers traditionnellement utilisés dans le cadre de contrats
collectifs visent principalement à restreindre les comportements abusifs, tant des
demandeurs que des offreurs de soins, et permettent de limiter le recours aux
augmentations de cotisations dont les conséquences peuvent parfois être brutales pour les
ménages.
Mots-clés : Dépenses de santé, secteur complémentaire, régimes collectifs.

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Abstract
With a contribution corresponding to 11.8 % of its GDP in 2009, France ranks third among
OECD countries having the biggest GDP contribution to health care, just behind the United
States and the Netherlands. This figure hides a system that is struggling to find a balance
between a public financing scheme that is gradually shrinking and households with a growing
health care demand driven by many supply effects such as technical progress.
The recent disengagements of the French Social security scheme have entailed a transfer of
health care expenses that used to be paid for by the compulsory sickness-insurance scheme
towards households. For French households, the prime impact of such transfers (i.e. the
increase of the remaining expenses to be paid for by them) has been softened by the growing
role played by complementary health insurances in the financing of health care which,
because of their increasingly better coverage of excess fees, optical equipments or dental
prostheses, have sometimes been criticized as contributing to the deterioration of the basic
health insurance scheme.
Complementary health insurances, and especially collective agreements which have been
noted for the brutal increase of their taxation, have to adapt to an ever-changing social
protection system. In the face of growing social expenses and in the context of an economic
downturn, solutions should be provided in order to minimize the deterioration of health
insurance schemes while ensuring that the insured are not heavily impacted. Therefore, it is
up to complementary health insurance operators to keep proper control over the
determinants of health expenses in order to devise effective responses other than merely
increasing contributions.
An ageing population contributes to the development and modification in the pattern of
expenses, but other factors such as gender, location or business segment also play a major
role in soliciting complementary health insurance schemes. The influence of non-
demographic determinants such as the range level of the scheme, the economic situation or
the use of the third party payment system, is also quite marked.
Over the course of its history, the health insurance scheme has introduced many mechanisms
such as the co-payment system or the 1 Euro flat-rate contribution, imposing it otherwise on
the main used instrument to ensure its financial sustainability. Although the moderating
effect of such measures on global health expenses is a sure thing, it depends, on the
individual level, on the insureds’ health status, on their having a supplementary health
insurance scheme or not, as well as on their standard of living. The latter point raises the
question of such mechanisms’ compliance with one of the founding principles of the French
social security: equality of access to health care for all French people.
Complementary health insurance operators are not idle in this field and are getting organized
in order to better address the increase of costs, especially through the creation of schemes
aiming at inducing the insured to adopt a responsible conduct, through the promotion of
prevention, but also by acting on their financial contribution. The levers traditionally used in
the context of collective agreements are mainly aimed at restricting abusive conducts both in
the demand and in the supply of health care and make it possible not to rely systematically
on contribution increases, which may sometimes have brutal consequences on households.
Keywords : Health expenses, complementary health insurances, collective agreements.
-3-
Remerciements
Je tiens tout d’abord à remercier mon Directeur de mémoire, Ahoua Assouan, qui m’a fait
bénéficier de son expérience et a su m’orienter tout au long de la rédaction de ce mémoire.
Je remercie également Philippe Maximin, Directeur du Département Prévoyance et Retraite
de Gras Savoye, qui m’a permis d’intégrer le service Actuariat après deux ans d’alternance en
son sein.
Tous mes remerciements à mes collègues de Gras Savoye et particulièrement à Valérie
Rosselin, Rozenn Treussier, Hélène Boucheau et Meriem Aissaoui, qui, par leurs remarques
pertinentes, ont fait avancer ma réflexion.
J’adresse de sincères remerciements à Anne Marion, Présidente du cabinet Actuarielles, pour
ses précieuses idées, notamment dans la définition du sujet.
Je remercie Jean-Marc Aouizerate pour ses conseils éclairés et sa disponibilité durant le
développement de cette étude.
Enfin, je remercie très chaleureusement ma famille et mes amis qui ont contribué par leurs
vifs encouragements à la réalisation de ce projet.

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Table des matières
Résumé ............................................................................................................................. 2
Abstract............................................................................................................................. 3
Remerciements.................................................................................................................. 4
Table des matières............................................................................................................. 5
Introduction .....................................................................................................................11
Chapitre 1 : Le contexte de l’étude ....................................................................................13
Introduction ..................................................................................................................14
1.1. Le système de protection sociale français................................................................14
1.1.1. Les différents types de systèmes de protection sociale ......................................... 14
1.1.1.1. Les modèles d’inspiration « bismarckienne » - les assurances sociales .......... 14
1.1.1.2. Les modèles d’inspiration « béveridgienne » - la Sécurité sociale .................. 14
1.1.1.3. Le modèle anglo-saxon..................................................................................... 15
1.1.2. Les différentes branches de la Sécurité sociale ...................................................... 15
1.1.2.1. La branche maladie .......................................................................................... 15
1.1.2.2. La branche accidents du travail - maladies professionnelles........................... 15
1.1.2.3. La branche famille ............................................................................................ 16
1.1.2.4. La branche vieillesse et veuvage (retraite) ...................................................... 16
1.1.3. Financement............................................................................................................ 17
1.1.4. Histoire de la Sécurité sociale ................................................................................. 17
1.1.4.1. Origines ............................................................................................................ 17
1.1.4.2. Les plans récents .............................................................................................. 19
1.1.4.2.1. La Loi Evin.................................................................................................. 19
1.1.4.2.2. Le plan Juppé............................................................................................. 20
1.1.4.2.3. La loi Douste-Blazy .................................................................................... 21
1.1.4.3. Vers une cinquième branche : la dépendance................................................. 22
1.1.5. Organisation de l’assurance santé .......................................................................... 23
1.1.5.1. L’Assurance Maladie ........................................................................................ 23
1.1.5.2. La couverture maladie universelle ................................................................... 23
1.1.5.3. Les organismes complémentaires.................................................................... 24
1.1.6. Le financement des dépenses de santé .................................................................. 25
1.1.7. Les différents acteurs complémentaires................................................................. 26
1.1.7.1. Les sociétés d’assurance .................................................................................. 26
1.1.7.2. Les institutions de prévoyance......................................................................... 27
1.1.7.3. Les mutuelles.................................................................................................... 27
1.1.8. Les différentes formules de garanties..................................................................... 28
1.1.9. Définition des contrats collectifs............................................................................. 30
1.1.9.1. Les régimes collectifs à adhésion obligatoire de base ..................................... 30
1.1.9.2. Les régimes collectifs à adhésion facultative ................................................... 31
1.1.9.3. Les régimes collectifs à adhésion obligatoire et facultative ............................ 31
1.1.9.4. Antisélection..................................................................................................... 31
1.1.9.5. Avantages fiscaux et sociaux............................................................................ 32
1.1.10. La classification des actes médicaux ..................................................................... 33

-5-
1.1.10.1. La Classification commune des actes médicaux (CCAM) ............................... 33
1.1.10.2. La classification des actes médicaux chez Gras Savoye ................................. 34
1.2. Le cadre de l’étude .................................................................................................35
1.2.1. Le rôle d’un courtier en assurance.......................................................................... 35
1.2.2. Présentation de Gras Savoye .................................................................................. 36
1.2.2.1. Histoire ............................................................................................................. 36
1.2.2.2. Chiffres clés ...................................................................................................... 36
1.2.2.3. Domaines d’intervention ................................................................................. 37
1.2.3. Périmètre de l’étude ............................................................................................... 38
1.2.3.1. L’infocentre de Gras Savoye............................................................................. 38
1.2.3.2. Retraitement des données............................................................................... 40
1.2.4. Démographie du portefeuille.................................................................................. 41
1.2.4.1. Les différents types d’assurés .......................................................................... 41
1.2.4.2. Effectif sous risque ........................................................................................... 41
1.2.4.3. Répartition des effectifs par type de bénéficiaire ........................................... 41
1.2.4.4. Evolution de la population sous risque en 2010.............................................. 43
1.2.4.5. Répartition des adhérents suivant le sexe et l’âge .......................................... 43
1.2.4.6. Répartition des adhérents suivant le collège................................................... 44
1.2.4.7. Répartition des adhérents suivant le secteur d’activité .................................. 45
1.2.4.8. Répartition géographique des bénéficiaires .................................................... 45
1.2.4.9. Taille de l’entreprise......................................................................................... 46
1.2.5. Dépenses de santé du portefeuille Gras Savoye..................................................... 47
1.2.5.1. Cadence de règlement ..................................................................................... 47
1.2.5.2. Ventilation des remboursements complémentaires par poste....................... 48
1.2.5.3. Ventilation des remboursements complémentaires par type de bénéficiaire 50
1.2.5.4. Contribution aux frais réels des différents intervenants ................................. 50
1.2.5.5. Analyse des taux de couverture....................................................................... 52
1.2.5.6. Fonction de répartition des frais réels pour les principaux actes.................... 53
1.2.5.7. Distribution du nombre d’unités consommées par assuré.............................. 54
1.2.6. Les provisions pour sinistres à payer (PSAP)........................................................... 55
1.2.6.1. Méthodes de comptabilisation de la charge de sinistres ................................ 55
1.2.6.2. Aspect légal ...................................................................................................... 56
1.2.6.3. Détermination des PSAP .................................................................................. 56
1.2.6.4. Méthode de Chain Ladder................................................................................ 57
1.2.6.4.1. Présentation .............................................................................................. 57
1.2.6.4.2. Application dans un cas standard ............................................................. 58
1.2.6.4.3. Application au portefeuille Gras Savoye................................................... 59
1.2.6.5. Méthode du cadencement............................................................................... 60
1.2.6.6. Recommandations ........................................................................................... 62
1.2.6.7. Méthodes stochastiques .................................................................................. 62
Conclusion ....................................................................................................................62
Chapitre 2 : Les déterminants des dépenses de santé .......................................................63
Introduction ..................................................................................................................64
2.1. Les déterminants démographiques .........................................................................64
2.1.1. L’âge ........................................................................................................................ 64
Préalable : la méthode de Whittaker-Henderson......................................................... 64
-6-
2.1.1.1. Des remboursements complémentaires qui progressent avec l’âge .............. 65
2.1.1.2. Des besoins qui changent avec l’âge................................................................ 66
2.1.1.2.1. Hospitalisation........................................................................................... 67
2.1.1.2.2. Consultations, Visites ................................................................................ 67
2.1.1.2.3. Médecine courante ................................................................................... 67
2.1.1.2.4. Pharmacie.................................................................................................. 67
2.1.1.2.5. Dentaire..................................................................................................... 67
2.1.1.2.6. Optique...................................................................................................... 68
2.1.1.2.7. Autres postes............................................................................................. 68
2.1.1.2.8. Synthèse .................................................................................................... 68
2.1.1.3. Analyse en composantes principales (ACP) ..................................................... 69
2.1.1.3.1. Présentation .............................................................................................. 69
2.1.1.3.2. Principe...................................................................................................... 70
2.1.1.3.3. Présentation des données......................................................................... 70
2.1.1.3.4. Matrice de variance-covariance................................................................ 71
2.1.1.3.5. Matrice des corrélations linéaires............................................................. 72
2.1.1.3.6. Espace des individus.................................................................................. 73
2.1.1.3.7. Espace des variables.................................................................................. 77
2.1.1.3.8. Représentation simultanée....................................................................... 79
2.1.1.4. Remboursements de la Sécurité sociale par âge ............................................. 81
2.1.1.1. Le vieillissement de la population.................................................................... 82
2.1.1.2. Le rôle de l’offre de soins dans l’augmentation des dépenses avec l’âge....... 83
2.1.1.2.1. Le progrès technique................................................................................. 83
2.1.1.2.2. L’effet de génération................................................................................. 84
2.1.2. Le sexe ..................................................................................................................... 85
2.1.2.1. Une sollicitation de la complémentaire supérieure chez les femmes............. 85
2.1.2.2. Le test du Khi-deux d’indépendance sur la probabilité de recours aux soins . 86
2.1.2.2.1. Méthodologie............................................................................................ 86
2.1.2.2.2. En pratique ................................................................................................ 87
2.1.2.3. Une influence du sexe plus ou moins marquée selon l’âge............................. 88
2.1.3. La localisation géographique................................................................................... 88
2.1.3.1. Carte de France des remboursements moyens par bénéficiaire..................... 88
2.1.3.2. Facteurs d’offre de soin.................................................................................... 90
2.1.3.2.1. La densité médicale................................................................................... 90
2.1.3.2.2. Le prix des soins ........................................................................................ 91
2.1.4. La composition familiale ......................................................................................... 94
2.1.5. Le collège................................................................................................................. 95
2.1.5.1. Une sollicitation de la complémentaire supérieure chez les cadres ............... 95
2.1.5.2. Cas particulier : la pose de prothèses dentaires et l’utilisation d’odds ratio .. 97
2.1.6. Le secteur d’activité ................................................................................................ 98
2.1.6.1. La classification ascendante hiérarchique ....................................................... 98
2.1.6.2. Démarche ......................................................................................................... 99
2.1.6.3. Mesure de la distance entre les individus : l’indice de dissimilarité................ 99
2.1.6.4. Méthode d’agrégation entre deux classes : l’indice d’agrégation................. 100
2.1.6.5. Inertie ............................................................................................................. 101
2.1.6.6. Algorithme itératif.......................................................................................... 101
2.1.6.7. Le dendrogramme .......................................................................................... 102

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2.1.6.8. Groupes obtenus............................................................................................ 103
2.1.6.9. Représentation des groupes sur le premier plan........................................... 104
2.1.7. L’état de santé....................................................................................................... 105
2.1.7.1. Les travaux de Zweifel.................................................................................... 105
2.1.7.2. Quelle mesure de la morbidité ?.................................................................... 105
2.1.7.3. Etude menée sur le portefeuille Gras Savoye................................................ 106
2.1.7.4. L’arrêt de travail ............................................................................................. 107
2.1.7.4.1. Définition................................................................................................. 107
2.1.7.4.2. Une mesure précise impossible .............................................................. 107
2.2. Les déterminants non démographiques.................................................................110
2.2.1. Le niveau de gamme du régime ............................................................................ 110
2.2.1.1. Les facteurs qui permettent d’apprécier le niveau de gamme du régime .... 110
2.2.1.2. Analyse sur un cas type .................................................................................. 111
2.2.1.2.1. Présentation ............................................................................................ 111
2.2.1.2.2. Constitution de groupes d’entreprises suivant le niveau de gamme de leur
contrat frais de santé .............................................................................................. 112
2.2.1.2.3. Dépenses 2010 par groupe ..................................................................... 113
2.2.1.2.4. Apport de ce type d’études..................................................................... 115
2.2.1.3. Le niveau de gamme des complémentaires : un facteur de détermination des
dépenses de santé....................................................................................................... 115
2.2.2. La situation économique et le taux de turnover................................................... 116
2.2.2.1. Les crises......................................................................................................... 116
2.2.2.2. La crise économique et les régimes frais de santé ........................................ 117
2.2.2.3. Taux de turnover et régimes frais de santé ................................................... 118
2.2.3. Le tiers payant ....................................................................................................... 120
2.2.3.1. Définition du tiers payant .............................................................................. 120
2.2.3.2. Etude du tiers payant sur les décomptes de pharmacie................................ 120
2.2.3.3. Explications..................................................................................................... 121
Conclusion ..................................................................................................................122
Chapitre 3 : Quels leviers face à une dérive de la charge de sinistres ? ............................123
Introduction ................................................................................................................124
3.1. Le rôle du reste à charge.......................................................................................124
3.1.1. Définition du reste à charge.................................................................................. 124
3.1.1.1. Préalable......................................................................................................... 124
3.1.1.2. Le ticket modérateur...................................................................................... 124
3.1.1.3. Les dépassements d’honoraires..................................................................... 126
3.1.1.4. La participation forfaitaire de 1 euro............................................................. 127
3.1.1.5. Le forfait hospitalier ....................................................................................... 127
3.1.1.6. Les franchises médicales ................................................................................ 127
3.1.2. La santé, un bien supérieur................................................................................... 127
3.1.2.1. Typologie des biens........................................................................................ 128
3.1.2.2. Dépenses de santé françaises et PIB.............................................................. 128
3.1.2.3. Les travaux de Newhouse .............................................................................. 129
3.1.3. L’effet modérateur du reste à charge dépend-il du niveau de vie ? .................... 130
3.1.3.1. Présentation des données.............................................................................. 130
3.1.3.2. Caractéristiques démographiques de la population...................................... 131
-8-
3.1.3.3. Lien entre niveau de vie et remboursements complémentaires................... 132
3.1.3.4. Lien entre niveau de vie et reste à charge ..................................................... 134
3.1.3.5. Taux d’effort................................................................................................... 135
3.1.3.6. Les modèles linéaires généralisés .................................................................. 136
3.1.3.6.1. Le modèle linéaire gaussien .................................................................... 136
3.1.3.6.2. La famille exponentielle .......................................................................... 137
3.1.3.6.3. Caractéristiques des modèles linéaires généralisés ............................... 137
3.1.3.6.4. Choix de la fonction de lien..................................................................... 137
3.1.3.6.5. Mesure de la qualité de l’ajustement : la déviance ................................ 138
3.1.3.6.6. Analyse des résidus ................................................................................. 138
3.1.3.7. Application des modèles linéaires généralisés sur le prix des montures ...... 139
3.1.3.1. Application des modèles linéaires généralisés sur le reste à charge du poste
optique ........................................................................................................................ 142
3.1.3.1.1. Modélisation du reste à charge non nul ................................................. 142
3.1.3.1.2. Modélisation de la probabilité d’avoir un reste à charge non nul.......... 143
Conclusion ................................................................................................................... 144
3.2. Focus sur les contrats collectifs .............................................................................145
3.2.1. Rappels de tarification .......................................................................................... 145
3.2.2. Le rôle de l’aléa moral........................................................................................... 146
3.2.2.1. L’aléa moral ex ante ....................................................................................... 147
3.2.2.2. L’aléa moral ex post ....................................................................................... 147
3.2.2.3. Elasticité-prix.................................................................................................. 147
3.2.2.4. Les mécanismes de lutte contre l’aléa moral ................................................ 148
3.2.3. La prévention......................................................................................................... 149
3.2.3.1. Définition........................................................................................................ 149
3.2.3.2. Le rôle de la prévention dans la réduction des dépenses de santé............... 149
3.2.4. Le rôle de l’actuaire : proposer des garanties en accord avec les besoins .......... 151
3.2.4.1. Connaissance du profil des dépenses ............................................................ 151
3.2.4.2. Simulation de l’impact d’un changement de garanties ................................. 152
3.2.5. Modifications des garanties .................................................................................. 153
3.2.5.1. L’hospitalisation ............................................................................................. 154
3.2.5.2. Les consultations / visites .............................................................................. 154
3.2.5.3. La pharmacie .................................................................................................. 155
3.2.5.4. L’optique......................................................................................................... 155
3.2.5.4.1. Limiter la fréquence de consommation.................................................. 155
3.2.5.4.2. Mieux allouer le budget grâce à une grille optique ................................ 155
3.2.5.5. Le dentaire...................................................................................................... 159
3.2.5.6. Autres alternatives ......................................................................................... 159
3.2.5.6.1. Comment se comporter face aux dépassements d’honoraires ? ........... 159
3.2.5.6.2. Les régimes à options.............................................................................. 160
3.2.5.6.3. Conjoints non à charge............................................................................ 160
3.2.5.6.4. Conjoints à charge................................................................................... 161
3.2.5.6.5. Demande préalable de devis................................................................... 161
3.2.6. Les réseaux de professionnels de santé................................................................ 162
3.2.6.1. Présentation ................................................................................................... 162
3.2.6.2. Les limites de ce système ............................................................................... 163
3.2.6.3. Test sur un cas-type ....................................................................................... 164

-9-
Conclusion ..................................................................................................................168
Conclusion générale........................................................................................................169
Bibliographie ..................................................................................................................171
Annexes..........................................................................................................................172
Annexe 1 : L’infocentre de Gras Savoye.......................................................................... 172
Annexe 1.1. Les tables des décomptes ................................................................... 172
Annexe 1.2. La table des adhésions ........................................................................ 173
Annexe 1.3. La table des personnes........................................................................ 173
Annexe 1.4. La table des entreprises souscriptrices ............................................... 173
Annexe 1.5. La table des périodes d’assurance ...................................................... 174
Annexe 1.6. La table des périodes d’adhésion........................................................ 174
Annexe 1.7. La table des produits........................................................................... 174
Annexe 1.8. La table des contrats ........................................................................... 174
Annexe 1.9. La table des alternatives ..................................................................... 175
Annexe 2 : Participation des différents intervenants par poste de dépenses................ 176
Annexe 3 : Méthode de Whittaker-Henderson .............................................................. 177
Annexe 4 : Contributions absolues des individus aux facteurs....................................... 179
Annexe 5 : Qualité de la représentation, contributions relatives des individus............. 180
Annexe 6 : Remboursements complémentaires moyens de chaque famille d’actes par
décile de revenus ............................................................................................................ 181
Annexe 6.1. Hospitalisation..................................................................................... 181
Annexe 6.2. Consultations / Visites......................................................................... 181
Annexe 6.3. Médecine courante ............................................................................. 182
Annexe 6.4. Pharmacie............................................................................................ 182
Annexe 6.5. Dentaire............................................................................................... 182
Annexe 6.6. Optique................................................................................................ 183
Annexe 6.7. Autres postes....................................................................................... 183

- 10 -
Introduction
Le 24 août 2011, François Fillon, Premier ministre, a annoncé l’augmentation de 3,5 % de la
taxe spéciale sur les conventions d’assurance (TSCA) sur les contrats de complémentaire
santé dits « solidaires et responsables », permettant de dégager près de 1,1 milliard d’euros
de recettes supplémentaires dès 2012. Une telle mesure a un impact majeur dans le pilotage
des régimes frais de santé et, associée à des dépenses en hausse continue, pousse les
différents acteurs complémentaires à imaginer de nouvelles mesures pour en limiter les
effets.

L’objet de ce mémoire est de présenter les principaux déterminants des dépenses de santé et
d’apporter des solutions face à une dérive des coûts notamment dans le cadre de contrats
complémentaires collectifs.

Le premier chapitre de ce mémoire s’articule autour de deux parties dont l’objectif est de
fixer le cadre dans lequel s’inscrit cette étude. Dans un premier temps, nous rappellerons les
caractéristiques de chacun des intervenants participant au financement des dépenses de
santé. Nous présenterons ainsi le système de protection sociale français et ses évolutions
récentes en analysant plus particulièrement le fonctionnement des contrats
complémentaires de type collectif à partir desquels a été réalisé ce mémoire.
La seconde partie du premier chapitre est consacrée à la présentation des données ayant
permis la réalisation de ces travaux. Après avoir expliqué le fonctionnement du courtier en
assurances Gras Savoye et de son infocentre, nous définirons le périmètre de l’étude et
analyserons le comportement de consommation médicale de la population caractérisant son
portefeuille. Enfin, nous spécifierons et introduirons deux méthodes permettant la
détermination des provisions pour sinistres à payer (PSAP).

Le second chapitre de ce mémoire est dédié à l’étude des déterminants des dépenses de
santé et notamment à l’influence de l’âge puisque l’argument du vieillissement de la
population est couramment utilisé pour expliquer la progression des dépenses de santé. Pour
ce faire, nous utiliserons plusieurs outils, comme la méthode de lissage non paramétrique de
Whittacker-Henderson ou l’analyse en composantes principales (ACP). Le rôle du sexe sera
mis en évidence à l’aide d’un test du Khi-deux, et, après avoir illustré l’influence de l’offre de
soins sur les dépenses, nous analyserons les différences de comportement entre cadres et
non cadres à l’aide du calcul d’odds ratio. Nous utiliserons une classification ascendante
hiérarchique (CAH) pour mettre en lumière des similarités entre les différents secteurs
d’activité dans lesquels sont regroupées les entreprises clientes de Gras Savoye. Dans le but
de mesurer le lien existant entre état de santé et dépenses, relation qui apparait à première
vue majeure, nous analyserons l’impact de la proximité de la mort sur le comportement de
consommation de soins. Enfin, nous verrons que des facteurs extérieurs, comme le niveau de
gamme du régime, la situation économique ou le taux de turnover jouent un rôle important
sur la détermination des dépenses de santé.

Le troisième chapitre de ce mémoire est consacré aux leviers permettant de faire face à une
dérive des coûts, notamment dans le cadre de contrats à caractère collectif. Le principal
instrument qui sera utilisé est le reste à charge dont le rôle dans la modération des dépenses

- 11 -
de santé est majeur. Nous mettrons en évidence l’importance de la prévention et
présenterons plusieurs outils comme les grilles de remboursements en optique dont l’objectif
est d’allouer plus efficacement le budget de régimes frais de santé en adaptant les garanties
complémentaires aux défauts visuels des assurés. Nous verrons que l’actuaire a un rôle
majeur à jouer dans la lutte contre la progression des dépenses, notamment par la
construction de régimes qui correspondent aux besoins des assurés. Enfin, nous mesurerons
l’impact sur les résultats de la mise en place des réseaux de professionnels de santé à l’aide
d’un exemple tiré du portefeuille Gras Savoye.

- 12 -
Chapitre 1 :
Le contexte de l’étude

- 13 -
Introduction
Ce chapitre vise à décrire précisément le cadre de cette étude. Dans un premier temps, nous
nous intéresserons au système de protection sociale français en détaillant l’organisation de
l’assurance santé, le rôle des principaux intervenants, la classification des différents actes
médicaux et les réformes de la Sécurité sociale menées depuis sa création jusqu’à nos jours.
Nous analyserons plus particulièrement les contrats complémentaires collectifs puisque les
données utilisées dans la suite de ce mémoire ont toutes été recueillies par ce biais. Dans un
second temps, nous verrons quelles sont les principales missions d’un courtier en assurances
et, après avoir caractérisé le comportement des assurés de Gras Savoye grâce à l’analyse de
leur démographie et de leurs dépenses de santé, nous présenterons deux méthodes de calcul
des provisions pour sinistres à payer, qui permettent d’assurer le règlement intégral des
engagements pris par le porteur de risque envers les assurés.

1.1. Le système de protection sociale français


1.1.1. Les différents types de systèmes de protection sociale
La protection sociale constitue un ensemble de dispositifs mis en place pour protéger les
individus contre les risques sociaux. Trois modèles cohabitent, dont deux en Europe.

1.1.1.1. Les modèles d’inspiration « bismarckienne » - les assurances sociales


Un système de protection sociale organisé selon le modèle « bismarckien » vise à protéger le
travailleur et sa famille à travers une assurance obligatoire à base professionnelle, financée
par des cotisations de Sécurité sociale assises sur les salaires et gérées par les caisses
d’assurance maladie. Le principe d’assurance liée au travail prévaut dans ce système trouvant
sa source en Allemagne.

Ce modèle porte le nom du chancelier prussien Bismarck qui instaura au cours du 19ème
siècle, pour répondre aux revendications de la classe ouvrière, un système d’assurances qui
garantissait le versement de prestations si une perte de salaire avait lieu suite à la réalisation
d’un risque social. Ce système protège à la fois les salariés et leur famille à travers une double
cotisation employeur/salarié. Dans ce modèle, cotisations et prestations sont
proportionnelles au salaire.

Dans les pays ayant adopté le modèle bismarckien, la couverture de certaines catégories de
population non couvertes initialement, comme les étudiants, a été intégrée.

1.1.1.2. Les modèles d’inspiration « béveridgienne » - la Sécurité sociale


Un système de protection sociale organisé selon le modèle « béveridgien » vise à fournir des
prestations uniformes à tous les membres de la société et est financé par l’universalité de
l’impôt. Il doit son nom à Lord William Beveridge, père du modèle, qui publia en 1942 un
rapport sur le « welfare state » organisant le système britannique de Sécurité sociale autour
de prestations et de cotisations calculées de manière uniforme et forfaitaire et gérées par
l’Etat. Système solidaire, il protège l’ensemble de la population mais offre des prestations
d’un niveau très bas, plus fondées sur les besoins que sur les revenus. Il répond à la règle des

- 14 -
3 U : Universalité (tout le monde bénéficie d’une couverture), Unité (une seule assurance) et
Uniformité (mêmes prestations pour tous).

1.1.1.3. Le modèle anglo-saxon


Un système basé sur le modèle anglo-saxon, comme au Japon ou aux Etats-Unis, est un
système mixte qui allie une assurance privée, une assistance pour les personnes défavorisées
financée par l’impôt et un système d’assurance maladie de type bismarckien (Medicaid) pour
les plus pauvres. Dans ce modèle, un nombre très important d’individus n’a pas de
couverture obligatoire.

Même si aucun pays européen ne correspond strictement à l'un ou l'autre de ces modèles,
chacun s'inspire majoritairement de l'un d'eux. Le système français de protection sociale,
bien que d’inspiration bismarckienne (les assurances sociales sont obligatoires et leur
financement demeure très majoritairement tiré des cotisations sociales), peut se classer
entre le système béveridgien et le système bismarckien.

1.1.2. Les différentes branches de la Sécurité sociale


La Sécurité sociale a pour objectif de protéger les individus contre quatre risques majeurs en
apportant aux assurés un soutien financier :
1. La maladie (maladie, maternité, invalidité, décès),
2. Les accidents du travail et maladies professionnelles,
3. La famille (dont handicap, logement...),
4. La vieillesse et le veuvage (retraite),

Ces risques constituent les quatre branches de la Sécurité sociale.

1.1.2.1. La branche maladie


L'Assurance Maladie a pour objectif de proposer aux assurés une couverture pour les
dépenses engagées à cause d’une maladie. C’est la Caisse nationale de l’assurance maladie
des travailleurs salariés (CNAMTS) qui définit, au plan national, la politique de l’Assurance
Maladie ; c’est elle qui pilote les organismes chargés de la mettre en œuvre, les 101 Caisses
primaires d’assurance maladie (CPAM).

Pour être remboursables, les actes doivent répondre à deux critères :


Etre dispensés par un établissement public ou privé autorisé, ou par un praticien ou
par un personnel paramédical dûment habilité à exercer,
Figurer dans la nomenclature des actes professionnels ou sur la liste des médicaments
et produits remboursables.

1.1.2.2. La branche accidents du travail - maladies professionnelles


La branche accidents du travail - maladies professionnelles de la Sécurité sociale a la charge
des risques professionnels auxquels sont confrontés les salariés des secteurs de l’industrie,
du commerce et des services. Cette branche est souvent gérée par les mêmes organismes
que la branche maladie. Son fondement est ancien, puisqu’elle relève de principes datés de
l’année 1898 ayant été repris dans la loi du 31 décembre 1946.

- 15 -
Elle gère plus particulièrement :
L’accident du travail : il correspond à un accident qui surviendrait pour toute
personne salariée ou travaillant pour un employeur, y compris pendant la période
d’essai ou les pauses, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit (parking, cantine
dans l’entreprise ou lorsque le salarié est en déplacement professionnel à la demande
de l’employeur),
L’accident de trajet : il représente un accident survenu sur le trajet aller ou retour
entre le lieu de travail du salarié et son domicile ou lors d’une mission effectuée pour
l’employeur,
La maladie professionnelle : plusieurs tableaux recensent les maladies qui sont
reconnues comme causées par le travail. Pour celles-ci, le salarié n’a pas à apporter la
preuve du lien entre son travail et la maladie dont il souffre. Si la maladie n’est pas
inscrite sur ces listes, l’assuré devra faire la preuve de son origine professionnelle.

La reconnaissance d’une maladie comme provenant d’un accident du travail, d’un accident
de trajet ou d’une maladie professionnelle permet une prise en charge totale par la Sécurité
sociale des soins et des actions de rééducation et une majoration des indemnités
journalières. Si la capacité de travail de l’assuré est diminuée, il percevra une rente. En cas de
décès de l'assuré suite à l’un de ces trois cas, les ayants-droit bénéficient d’une rente.

1.1.2.3. La branche famille


La branche famille de la Sécurité sociale a deux missions principales : aider les familles dans
leur vie quotidienne et développer la solidarité envers les plus vulnérables afin de lutter
contre la précarité. Pour ce faire, elle s’appuie sur un réseau de 123 Caisses d’allocations
familiales (CAF) piloté par la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF). Elles
proposent différents types de services sous forme de compléments de revenus, de conseils
aux familles, et d’équipements collectifs. Ses prestations les plus courantes sont les
allocations familiales, les aides à la famille, les aides au logement ou le revenu de solidarité
active. En 2009, 11 millions d’allocataires ont reçu 72 milliards de prestations par
l’intermédiaire de la branche famille.

1.1.2.4. La branche vieillesse et veuvage (retraite)


La Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) est chargée de la gestion de la retraite (et
de l’assurance veuvage via les retraites de réversion) des salariés de l'industrie, du commerce
et des services en France. Pour cela, elle s’appuie sur un réseau de 16 caisses régionales.

Les régimes obligatoires de retraites français sont construits sur le modèle de la répartition,
dans lequel les pensions versées aux retraités pendant une période donnée sont obtenues à
partir des cotisations payées par les actifs durant la même période. La répartition inclut donc
des mécanismes de solidarité intergénérationnels et intragénérationnels puisqu’ils organisent
des redistributions entre les différentes catégories socioprofessionnelles et les sexes.

La branche vieillesse gère également le minimum vieillesse, créé en 1956, qui offre la
garantie pour toute personne âgée résidant en France de bénéficier d'une somme minimale
pour vivre. L'accès à cette allocation minimum vieillesse est soumis à trois critères : être âgé

- 16 -
de 65 ans (ou 60 ans si la personne est invalide ou inapte au travail), remplir les conditions de
ressources financières suffisantes, et être en résidence régulière en France.

On dénombrait en 2009 17,88 millions de cotisants et 12,55 millions de retraités. Au cours de


cette même année, 91 milliards d’euros de prestations ont été versés, pour un déficit qui
atteignait 7,23 milliards d’euros.

1.1.3. Financement
Le financement de la Sécurité sociale est principalement assuré par des cotisations sociales
assises sur le travail, contenant une part salariale et une part patronale. Afin de diversifier le
mode de financement de la Sécurité sociale, la contribution sociale généralisée (CSG) a été
mise en place en 1990 pour financer l’Assurance Maladie et les prestations familiales par
l’impôt, prélevé à la source sur la plupart des revenus, à l’exception des prestations sociales
et familiales. La CSG permet notamment d’élargir l’assiette des prélèvements sociaux à
l’ensemble des revenus. On distingue également les contributions publiques, des versements
de l’État aux régimes de protection sociale correspondant au financement étatique de
certaines prestations. Les transferts, opérations internes à la protection sociale, qui visent à
garantir l’équilibre des régimes, voient leur part dans les recettes augmenter depuis 1990.
Enfin, les produits financiers connaissent des évolutions variables suivant les années, en
fonction de la situation de la trésorerie des régimes.

Figure 1 : Recettes des régimes de base en 2011 (Recettes totales consolidées : 426,7 Md€) - Projet de Loi de
financement de la Sécurité sociale 2011

1.1.4. Histoire de la Sécurité sociale


1.1.4.1. Origines
Au cours du 19ème siècle, différents mécanismes de protection contre les risques
apparaissent : la mutualité, qui consiste à épargner à titre individuel pour se prémunir contre
un risque et l’assurance.

La mise en place des premiers mécanismes de protection sociale est à attribuer aux classes
ouvrières, dès le 19ème siècle. Ils ont été fondés sur plusieurs constats : à Paris en 1826, sur
244 chutes d’échafaudages 72 sont mortelles et donc très pénalisantes pour les familles. De
même, les accidents du travail peuvent également s’accompagner par la perte de l’emploi et
- 17 -
parmi les maladies de l’époque, beaucoup sont professionnelles. La vieillesse entraine
souvent un transfert vers l’hospice. De ces constats vont naître les Sociétés de secours
mutuels, qui succèdent aux corporations de l’ancien régime, abolies en 1791 par le décret
d’Allarde. Ces nouvelles institutions sont reconnues par la loi Humann du 22 juin 1835.

La loi du 1er avril 1898 (Charte de la mutualité) encourage leur formation en édictant les
principes du mutualisme. Les mutuelles s’ouvrent alors à tous mais restent chères pour
l’ensemble de la population et reposent sur un principe d’adhésion volontaire.

Dans le même temps, un système d'aide sociale est créé. Il permet aux personnes ayant de
faibles ressources de bénéficier de prestations dans un principe de solidarité nationale.

La loi datée du 15 juillet 1893, dans l’article 3, met en place l’assistance médicale gratuite
pour tout français malade et sans ressource (aujourd’hui devenue couverture maladie
universelle ou CMU).

Le 27 juin 1904 est instauré le service départemental d’aide sociale à l’enfance et en 1905, les
vieillards infirmes et incurables bénéficient d’une assistance.

Les mutuelles ne bénéficiant qu’à un nombre limité d’individus, le début du 20ème siècle est
marqué par des tentatives de création d’assurance obligatoire contre certains risques
sociaux.

En 1898, dans le secteur de l’industrie, la loi reconnait la responsabilité de l’employeur en cas


d’accident du travail. Le salarié bénéficie alors d’une protection générale de la part de son
employeur, ce qui encourage ce dernier à s’assurer pour faire face à ce risque.

La loi du 5 avril 1910 permet la création d’un premier régime obligatoire d’assurance
vieillesse pour les ouvriers et les paysans.

Entre 1928 et 1930, deux lois instaurent une assurance obligatoire pour les risques maladie,
maternité, invalidité, vieillesse et décès pour les salariés titulaires d’un contrat de travail dans
les secteurs de l’industrie et du commerce. Un régime spécial pour les agriculteurs est créé
par la loi du 30 avril 1928. A cette époque, on évoque même l’idée de rendre l’assurance
obligatoire et de déléguer sa gestion à l’Etat.

Des allocations, financées par des prélèvements patronaux, versées par les futures caisses
d’allocation familiales sont créées dans la loi du 11 mars 1932. Elles succèdent à la « caisse de
compensation » créée par Émile Marcesche en janvier 1918.

Ainsi, avant la Seconde Guerre mondiale, la France dispose d’un premier système de
protection sociale. Celui-ci sera profondément renouvelé à la sortie de la guerre.

Sous l’impulsion du Général de Gaulle, la Sécurité sociale est mise en place en 1945 dans un
triple objectif : unité de la Sécurité sociale, généralisation à toute la population et extension
des risques couverts. Elle est construite sur une double influence allemande et anglo-
saxonne.

- 18 -
Le choix d’un réseau de caisses est entériné, au détriment d’une structure basée sur de
multiples organismes. Cependant, l’unité administrative n’est pas réalisée.

Une ordonnance datée du 19 octobre 1945 concerne les risques maladie, maternité,
invalidité, vieillesse, décès et permet d’uniformiser les prestations. En 1946, les allocations
familiales sont étendues à pratiquement toute la population et la loi du 30 octobre 1946
intègre l’indemnisation des accidents du travail à la Sécurité sociale.

En 1945, la généralisation de la Sécurité sociale à l’ensemble de la population est à l’ordre du


jour, comme le souhaitait le Général de Gaulle dans son programme présidentiel. Le texte à
l’origine de la Sécurité sociale, le plan Laroque, repose sur le principe de généralisation de la
couverture à toute la population, l’uniformité de la gestion et la gestion des caisses de la
Sécurité sociale par les représentants des assurés. Il aboutit à un échec, les régimes spéciaux
(particulièrement les professions agricoles) s’y opposent. En 1946, le régime général ne
concerne plus que les salariés de l’industrie et du commerce.

Aujourd’hui encore, les grands principes de 1945 ne sont toujours pas appliqués dans les
faits. Néanmoins, nous assistons, sur l’impulsion de nombreuses réformes, à des évolutions
tendant vers l’unité administrative de la Sécurité sociale, les différents régimes spéciaux
s’estompant peu à peu.

La Sécurité sociale peut finalement se définir comme une assurance obligatoire contre les
différents risques sociaux qui diminuent ou qui suppriment la capacité de travail ou de gain
d’un individu, ou qui créent des charges supplémentaires (famille).

1.1.4.2. Les plans récents

1.1.4.2.1. La Loi Evin


La protection sociale regroupe tous les mécanismes de prévoyance collective visant à
protéger les individus contre les conséquences financières en cas de réalisation de certains
risques sociaux. Si de nombreux textes règlementent cette activité en France, la loi n°89-1009
du 31 décembre 1989 dite Loi Evin fait office de texte fondateur. Elle concerne la prévoyance
complémentaire et la santé, mais pas la retraite, et a pour objectif de renforcer les garanties
offertes aux personnes assurées contre certains risques en réglementant principalement la
sortie de contrats collectifs.

Nous allons présenter les principaux articles de cette loi.

Article 1 : Il précise les différents acteurs du secteur complémentaire pouvant proposer une
couverture de prévoyance collective, tout en définissant les risques qui composent cette
activité.

Articles 2 et 3 : Après avoir rappelé les conditions de mise en place d’un contrat collectif, il
indique que les pathologies survenues antérieurement à la souscription du contrat ne sont
pas un motif d’exclusion et que le nouvel organisme proposant la couverture de prévoyance
doit prendre en charge ces pathologies.

- 19 -
Article 4 : C’est l’article majeur de cette loi. Il oblige les assureurs à maintenir aux salariés qui
quittent l’entreprise le même niveau de garanties. Ainsi, retraités, chômeurs ou invalides
peuvent bénéficier des mêmes prestations que celles du contrat collectif obligatoire en
vigueur. Le montant de leur cotisation ne doit pas être 50 % plus élevée que celle des salariés
actifs. Cet article a pour but de protéger les assurés lors d’un changement de statut et
d’éviter qu’ils ne souffrent dans ce cas d’une hausse non encadrée des tarifs.

Article 6 : Il prévoit que les augmentations de tarifs ne peuvent être individuelles. Ainsi, si
l’organisme assureur souhaite augmenter le tarif d’un adhérent suite à la dégradation de son
état de santé, il n’en a pas le droit. Il doit appliquer des hausses de tarifs uniformes à
l’ensemble des salariés ou des assurés ayant souscrit à cette garantie.

Article 7 : Il oblige les assureurs à constituer des provisions pour faire face aux engagements
pris envers les assurés.

Article 9 : Les remboursements effectués aux assurés au titre d’une maladie, d’un accident ou
d’une maternité ne peuvent dépasser le montant restant à leur charge après tous les
remboursements auxquels ils ont droit.

Articles 12 à 16 : Ils définissent les moyens d’information dont bénéficient les salariés
(notamment une notice détaillée des garanties ou un rapport sur les comptes du contrat dont
le contenu est fixé par décret).

La loi Evin a connu quelques modifications comme l’ajout de l’article 7-1 en 2001, visant à
maintenir la garantie décès des personnes en arrêt de travail. Cet article a eu de lourdes
conséquences financières pour les assureurs, ceux-ci devant constituer de nouvelles
provisions pour appliquer la réglementation.

En complément de la loi Evin, la loi du 8 août 1994, dite loi Veil, impose l’organisation de la
revalorisation future des prestations en cours de service à l’entreprise, et le maintien de la
garantie décès pour les personnes en arrêt de travail lors du changement d’assureur.
1.1.4.2.2. Le plan Juppé
Au milieu des années 1990, la situation financière de la Sécurité sociale pousse le
gouvernement à réformer structurellement le système de santé, tant dans son
fonctionnement que dans son organisation. Mise en œuvre par l’ordonnance du 24 avril
1996, dite plan Juppé, cette réforme contient plusieurs volets visant à instaurer les notions
d’efficacité, de sécurité et de qualité, avec une responsabilisation plus grande des
professionnels de santé.
Elle instaure les Lois de financement de la Sécurité sociale (LFSS) dont l’objectif est la
maitrise des dépenses de santé, dont le vote est confié au parlement. Celui-ci décide
annuellement de l’orientation de la politique de santé menée en France et prévoit des
objectifs en termes de recettes et de dépenses. C’est l’Objectif national des dépenses
d'assurance maladie (ONDAM) qui chiffre les dépenses prévisionnelles de l’Assurance
Maladie en France pour les soins de ville et d'hospitalisation dispensés dans les
établissements privés ou publics mais aussi dans les centres médico-sociaux.
Concernant l’hôpital, l’objectif en termes de dépenses est fixé région par région et
négocié par les agences régionales de l'hospitalisation qui étaient chargées de la

- 20 -
négociation avec chaque établissement. Ces agences ont laissé leur place en 2010 aux
agences régionales de santé de la loi « Hôpital, patients, santé et territoire », abrégée
en HPST et dite aussi loi Bachelot. Concernant les soins de ville, la Sécurité sociale
négocie directement avec les professionnels de santé mais se heurte à la difficulté de
mettre en place de sanctions en cas de non respect.
Elle instaure la CRDS (contribution au remboursement de la dette sociale) visant à
rembourser le déficit de l’Assurance Maladie et est basée sur le modèle de la CSG.
Initialement transitoire et prévue pour une période de 5 ans, elle a été maintenue et
est toujours en place à l’heure actuelle. Elle représente 0,5 % de tous les revenus :
revenus d'activité, de remplacement, du patrimoine, de placements mais aussi de
ventes de métaux, d'objets précieux, de bijoux, d'objets d'art ou de collection et
revenus des jeux de hasard.
Elle met en place l’Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES,
devenue Haute autorité de santé (HAS)) dont le but est d’évaluer l’utilité des
différents actes pris en charge par l’Assurance Maladie et les établissements
(évaluation tous les 5 ans débouchant sur une accréditation).
Elle accélère le développement des systèmes d’information afin de faciliter le pilotage
des régimes (carte VITALE et informatisation des cabinets médicaux pour une
meilleure communication entre les différents professionnels de santé).
1.1.4.2.3. La loi Douste-Blazy
La loi du 13 août 2004, dite Loi Douste-Blazy, vise à apporter des solutions face aux
importantes difficultés financières dont souffre l’Assurance Maladie, par une réforme
structurelle permettant la consolidation de ses trois piliers fondamentaux : l’égalité d’accès
aux soins, la qualité des soins et la solidarité.

Ses trois objectifs sont d’améliorer la coordination entre les professionnels de santé afin de
réduire le nombre de consultations, de responsabiliser le patient dans sa consommation de
santé, et d’améliorer l’usage des médicaments.

Ainsi, cette réforme prévoit :


Le choix, pour les plus de 16 ans, d’un médecin traitant qui devra être consulté avant
toute visite chez un spécialiste (sauf pour certaines disciplines comme
l’ophtalmologie, la gynécologie ou la pédiatrie). Si ce « parcours de soins » n’est pas
respecté, le patient subira des pénalités financières, matérialisées par une majoration
du ticket modérateur. L’objectif est d’améliorer le suivi des patients et de réduire les
dépenses en limitant les consultations non justifiées de spécialistes.
La mise en place d’un dossier médical uniformisé récapitulant tout le passé médical
des assurés. Permettant une meilleure connaissance du patient par le médecin
traitant, il vise à limiter les examens ou prescriptions redondantes.
La création d’une participation forfaitaire de 1 euro par acte médical et
l’établissement d’une charte de contrats dits responsables. Ces deux mesures visent à
responsabiliser les patients.
La mise en avant des médicaments génériques en réduisant leur délai de mise en
place sur le marché et leur prix, tout en encourageant leur prescription.
- 21 -
1.1.4.3. Vers une cinquième branche : la dépendance
Si les dépenses de santé des personnes dépendantes sont prises en charge par la Sécurité
sociale à travers la branche maladie, la CMU ou les complémentaires santé, la question du
financement des frais d’hébergement et d’assistance des personnes dépendantes se pose. En
effet, les différentes allocations ne suffisent pas à couvrir le coût d'une personne âgée
dépendante tant à domicile qu’en établissement d'accueil. De plus, les ressources consacrées
par l’Etat et les départements diminuent, alors que le nombre de personnes dépendantes
augmente.

Afin de consacrer plus de moyens à la perte d’autonomie, véritable enjeu de société, Nicolas
Sarkozy a proposé la création d’une cinquième branche de la Sécurité sociale : la
dépendance. Cette idée date de la campagne présidentielle de 2007 où le candidat Sarkozy
proposait la création « d'une cinquième branche de la protection sociale pour consacrer
suffisamment de moyens à la perte d'autonomie ». Elle n’en est encore qu’au stade du
projet. Elle permettrait de faire face à la part grandissante de personnes âgées dans la
société : trois millions de Français ont plus de 80 ans, 1,5 million ont plus de 85 ans et les
projections prévoient 1,4 million de personnes dépendantes en 2040 contre un peu plus de
1,18 million aujourd'hui bénéficiant de l'Allocation personnalisée d'autonomie (APA). Les
dépenses consacrées à la dépendance sont estimées à 22 milliards d'euros par an. Elles sont
financées par la Journée de solidarité, l'Assurance Maladie et une partie de la CSG.

Cette cinquième branche aura notamment pour objectif de financer de nouvelles places en
maisons de retraite médicalisées pour faire face à la croissance du nombre de personnes
dépendantes, âgées ou handicapées. Dès lors, les personnes concernées pourront choisir
librement entre vivre à leur domicile et être accueillies en établissement.

La création d’une cinquième branche de protection devait initialement être entérinée durant
l’été 2011 à l’issue d’un débat pour incorporer les mesures au Projet de loi de financement
de la Sécurité Sociale (PLFSS) pour 2012. Néanmoins, le gouvernement a semblé privilégier
deux échéances : des "mesures d'urgence" dès la fin 2011 et la création du "cinquième
risque" après la présidentielle de 2012.

Se pose néanmoins le problème du financement de cette branche. Nicolas Sarkozy ne semble


pas rejeter l’idée d’une assurance privée obligatoire au contraire de l’opposition, qui souhaite
que cette question relève de la solidarité nationale. En effet, en mutualisant le risque dans un
système par répartition classique, la prise en charge des personnes dépendantes pourrait
être immédiate, par solidarité intergénérationnelle. Les assureurs proposent une solution
intégrant une part d’assurance privée avec déduction fiscale des cotisations.

L’idée d’une reprise sur succession pour les familles qui ne s’occupent pas de leurs personnes
âgées est évoquée, comme celle de la suppression d’un jour férié ou d’une augmentation de
la CSG.

- 22 -
1.1.5. Organisation de l’assurance santé
En France, plusieurs intervenants cohabitent dans la prise en charge des dépenses de santé.

1.1.5.1. L’Assurance Maladie


L'Assurance Maladie, créée en 1945 en même temps que la Sécurité sociale, a pour objectif
d’assurer les individus contre les pertes financières en cas de maladie et de faire bénéficier
les assurés d’un revenu minimal en cas d’arrêt de travail. Elle remplit à la fois une fonction
d'assurance pure et une fonction de solidarité où les assurés les plus aisés payent l'assurance
des plus défavorisés : la prime n'est pas basée uniquement sur le risque, à l’inverse d’une
assurance classique. L’Assurance Maladie finance en moyenne 77 % des dépenses de santé
des ménages.

Trois principes fondamentaux ont motivé la création de l’Assurance Maladie :


L'égalité d'accès aux soins : il ne doit pas y avoir de distinction entre les assurés (le
salaire où leur localisation ne doit pas les pénaliser quant à l’accès aux soins),
La qualité des soins : les soins prodigués doivent être de très bonne qualité,
La solidarité et l’équité : l’institution garantit à chacun un minimum vital, idée que l’on
retrouve dans le principe : « Chacun doit contribuer à l'Assurance Maladie selon ses
moyens et recevoir en fonction de ses besoins ».

C’est à la CNAM qu’est confiée la gestion des branches maladie et accidents du travail -
maladies professionnelles de la Sécurité sociale. Elle est composée d'un régime général qui
accueille 80 % des français et de nombreux régimes spéciaux comme le régime agricole (géré
par la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole), le Régime social des indépendants
(qui couvre les artisans, commerçants, industriels et professions libérales) ou le Régime des
Mines, de la SNCF, de la RATP…

Dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, le régime d'Alsace


Moselle remplace le régime général. Ce régime géré en autonomie et de façon locale tient sa
source de l’ancienne appartenance de ces départements à l’Allemagne (1871-1918) où
Bismarck avait transposé les lois sociales obligatoires en vigueur dans son pays. Aujourd’hui,
plus de deux millions de personnes sont affiliées à ce régime. Les taux de cotisations y sont
plus élevés, mais les remboursements meilleurs.

1.1.5.2. La couverture maladie universelle


Pour toute personne n’étant pas couverte par le régime obligatoire d’Assurance Maladie et
résidant en France, un dispositif a été mis en place en 2000 pour garantir l’accès aux soins et
médicaments et leur remboursement : la couverture maladie universelle (CMU). Elle
remplace la « carte santé » en vigueur jusqu’en 1999.
Gérée par l’URSSAF, la CMU donne aux personnes en situation d’exclusion un droit immédiat
aux prestations en nature versées par l'Assurance Maladie, dans les mêmes conditions que
pour tous les assurés sociaux. En d’autres termes, leurs bénéficiaires doivent s’acquitter de la
part non prise en charge par l'Assurance Maladie.

- 23 -
Pour bénéficier de la CMU, il faut répondre à trois critères :
Résider en France de manière stable et régulière : trois mois de résidence pour les
Français et les étrangers et pour les personnes étrangères avoir un titre de séjour en
cours de validité ou un document attestant qu'elles ont demandé le renouvellement
du titre de séjour ou encore une attestation de dépôt de demande d'asile,
Ne pas bénéficier d’un autre régime d'assurance maladie obligatoire,
Au-dessus d'un revenu fiscal de référence, le bénéficiaire doit s'acquitter d'une
cotisation calculée sur les revenus dépassant ce seuil.

Pour les personnes disposant de peu de ressources (au 1er janvier 2010, moins de 7 611 € par
an pour une personne seule), il existe une complémentaire santé gratuite, la couverture
maladie universelle complémentaire (CMUC) qui permet de prendre en charge les dépenses
non prises en charge par le régime obligatoire, y compris pour le forfait journalier hospitalier
et la participation forfaitaire de 1 euro. Elle dispense également de l’avance des frais, par
l’intermédiaire du tiers payant. Elle concerne les 10 % des personnes les plus défavorisées de
la population.

1.1.5.3. Les organismes complémentaires


L’Assurance Maladie ne remboursant pas la totalité des dépenses de santé, un montant plus
ou moins important peut rester à la charge des assurés. L’adhésion à un régime
complémentaire, appelé également complémentaire santé ou plus familièrement
« mutuelle » permet de bénéficier de remboursements complémentaires à ceux de la
Sécurité sociale. Une complémentaire santé peut prendre en charge et très bien rembourser
des actes qui ne le sont pas par le régime obligatoire comme la chambre particulière,
l’ostéopathie ou l’opération de la myopie.

Contrairement à l’Assurance Maladie, elle n’est pas obligatoire et s’obtient contre le


paiement d’une cotisation à un des trois types d’organismes habilités à proposer des
complémentaires santé en France : les compagnies d’assurance, les mutuelles et les
institutions de prévoyance.

La Sécurité sociale se désengageant progressivement, les complémentaires santé jouent un


rôle de plus en plus important dans le remboursement des dépenses de santé.

On distinguera les contrats complémentaires, souscrits à titre individuel, des contrats


collectifs.

- 24 -
1.1.6. Le financement des dépenses de santé
Les comptes de la santé dressent chaque année un état des lieux du financement des
dépenses de santé. La dernière version, publiée en septembre 2010 fournit par exemple la
part de chaque contributeur dans le financement des dépenses.

Figure 2 : Part des différents intervenants dans le financement des dépenses de santé – Comptes nationaux
de la santé 2009 – DREES

1995 2000 2004 2005 2006 2007 2008 2009


Sécurité Sociale de base 77,1% 77,1% 77,1% 77,0% 76,3% 76,2% 75,5% 75,5%
Etat et CMU-C org. De base 1,1% 1,2% 1,4% 1,3% 1,4% 1,4% 1,3% 1,3%
Organismes complémentaires 12,2% 12,7% 13,2% 13,3% 13,4% 13,5% 13,7% 13,8%
dont Mutuelles 7,3% 7,7% 7,6% 7,7% 7,8% 7,7% 7,7% 7,7%
Sociétés d'assurance 3,3% 2,6% 3,0% 3,1% 3,2% 3,3% 3,5% 3,6%
Institutions de prévoyance 1,6% 2,4% 2,6% 2,5% 2,4% 2,5% 2,5% 2,5%
Ménages 9,6% 9,0% 8,3% 8,4% 8,9% 8,9% 9,5% 9,4%
Total 100% 100% 100% 100% 100% 100% 100% 100%

On observe que la part de la Sécurité sociale dans le financement des dépenses de santé est
restée stable entre 1995 et 2000 mais a sensiblement reculé depuis. Le rôle des
complémentaires s’est quant à lui accru depuis 1995, atteignant 13,8 % des dépenses en
2009. Enfin, les dépenses liées à la santé ont progressé pour les ménages, ceux-ci devant à la
fois financer les dépenses restant à leur charge après les remboursements de l’Assurance
Maladie et des organismes complémentaires mais également leurs cotisations, qui
augmentent dans la même proportion que le rôle des complémentaires s’accroit.

Les comptes de la santé mesurent différents agrégats permettant l’évaluation des dépenses
de santé. On distingue :
La Consommation médicale totale (CMT), qui représente la valeur des biens et
services médicaux consommés par les ménages. Elle est calculée comme la somme de
la Consommation de soins et biens médicaux (CSBM) et de la Consommation de soins
de médecine préventive (CSMP). Elle est évaluée à 179 milliards d’euros en 2009 dont
98 % correspondent à la CSBM.

En 2009, la CSBM était constituée de :

Figure 3 : Constitution de la CSBM 2009

Médicaments Autres biens


20% médicaux Dentistes
Transport 6% 6% Auxiliaires
2% medicaux
7%

Soins
ambulatoires
26%

Médecins Analyses
13% 2%
Soins Cures thermales
hospitaliers 0%
44%

- 25 -
Les dépenses courantes de santé (DCS) qui regroupent la CMT et :
les indemnités journalières (arrêts de travail),
les subventions reçues par le système de sante assimilées à des dépenses,
les dépenses de recherche et de formation médicales,
les dépenses de prévention collective,
les coûts de gestion de la santé.

Le montant des Dépenses courantes de santé (DCS) s’élevait en 2009 à 223,1 milliards
d’euros, dont les quatre cinquièmes (175,7 milliards) correspondent à la CSBM.

Les Dépenses totales de santé (DTS) permettant une comparaison des dépenses de
santé avec les pays membres de l’OCDE. Cet indicateur est exprimé en pourcentage
du PIB, afin de mesurer la part de la richesse consacrée à la santé.

Elles correspondent à la DCS,


Moins :
les indemnités journalières,
les dépenses de recherche et de formation médicale,
une partie des dépenses de prévention collective.
Plus :
les dépenses d’investissement du secteur hospitalier public,
les dépenses liées au handicap et à la dépendance.

Avec 11,8 % de son PIB en 2009, la France arrive au troisième rang des pays de l’OCDE
consacrant la plus grande part de son PIB à la santé, derrière les Etats-Unis et les Pays-Bas.

1.1.7. Les différents acteurs complémentaires


Trois acteurs au statut différent interviennent sur le segment des complémentaires santé,
chacun répondant à des règles de fonctionnement et de sécurité financière strictes :

1.1.7.1. Les sociétés d’assurance


Régies par le Code des assurances, les sociétés d’assurance sont soit :
Des Sociétés anonymes (SA) qui ont un statut de société commerciale (1),
Des Sociétés d’assurance mutuelles (SAM) ou des Sociétés de mutuelles d’assurances
(SMA) qui n’ont pas de statut commercial (2).

(1) Les sociétés d’assurance proposent généralement des garanties pour un nombre
important de risques. Les remboursements de l’Assurance Maladie ayant été pendant
longtemps assez élevés, les sociétés d’assurance se sont peu intéressées au marché de la
santé. Les désengagements récents de la Sécurité sociale et la part de plus en plus
importante qu’occupe la santé dans le budget des ménages ont changé la donne. Les sociétés
d’assurance ont pour objectif de réaliser des bénéfices et peuvent diffuser leurs contrats par
des intermédiaires (courtiers ou agents généraux).

(2) Ces sociétés civiles à l’objet non commercial qui interviennent principalement dans le
domaine de l’assurance de dommages ne possèdent pas de capital social mais disposent d’un

- 26 -
fonds d’établissement. Les assurés y sont à la fois sociétaires et assurés : ils sont les seuls
détenteurs de l’entreprise et participent aux décisions de gestion de l’entreprise.

Les SMA et les SAM diffèrent sur quelques points :


les SMA ont un minimum de 300 adhérents contre 500 pour les SAM,
les SMA pratiquent une cotisation à montant variable alors qu’elle peut être fixe ou
variable chez les SAM (fixe ou variable en incendie, accidents, risques divers, transport
(IARDT) et fixe en assurance vie),
les SMA ne peuvent pas proposer de produits d’assurance vie et ne peuvent faire
distribuer leurs contrats par des intermédiaires d’assurance, contrairement aux SAM.

Le Code des assurances édicte des normes dites prudentielles qui contraignent les sociétés
d’assurance sur le montant de leur capital social, de leur marge de solvabilité, de leurs
provisions techniques et de leurs placements afin de garantir les engagements contractés
auprès des assurés.

1.1.7.2. Les institutions de prévoyance


Régies par le Code de la Sécurité sociale, les institutions de prévoyance protègent
exclusivement les salariés, anciens salariés et leurs ayants-droit contre les risques sociaux de
l’entreprise (maladie, incapacité, invalidité, dépendance et décès) par des contrats
traditionnellement collectifs. Elles peuvent également intervenir dans le domaine de
l’assurance vie. A but non lucratif, elles sont organisées sous la forme de sociétés de
personnes morales de droit privé et gérées paritairement par les entreprises (les membres
adhérents) et les salariés de ces entreprises (membres participants). Elles obéissent au
contrôle de la Commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance qui
vérifie leur engagement contractuel et prudentiel.

Il existe une cinquantaine d’institutions de prévoyance en France, couvrant près de 15


millions de salariés. Ce secteur est en phase de concentration et ne devrait regrouper, à
terme, qu’une dizaine d’entités afin de peser plus significativement sur le marché.

1.1.7.3. Les mutuelles


A but non lucratif, sans capital social et régies par le Code de la mutualité, les mutuelles
agissent dans le domaine de la protection sociale où elles ont une mission « d’intérêt général
» et sont chargées de mener une action de prévoyance, de solidarité et d'entraide (article
L.111-1 du Code de la mutualité). Bien que leur fonctionnement soit proche des sociétés
d’assurances mutuelles, il diffère par le fait que les mutuelles sont fondées sur l’absence de
sélection et le principe d’égalité de traitement des adhérents : le montant des cotisations est
indépendant du risque à couvrir (mais peut être fonction du salaire).

Les mutuelles sont organisées sous la forme de personnes morales de droit privé et ne
peuvent redistribuer à leurs membres les éventuels excédents. Elles sont soumises au
contrôle de la commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance et
sont régies par les mêmes règles prudentielles que les institutions de prévoyance et les
sociétés d’assurance. Comme pour les institutions de prévoyance, le secteur est en forte
concentration suite à la mise en place de nouvelles règles prudentielles difficilement
- 27 -
respectables pour les plus petites structures (ordonnance du 19 avril 2001 qui transpose aux
mutuelles les directives d’assurances européennes de 1992). On dénombre 5000 mutuelles
en France.

1.1.8. Les différentes formules de garanties


Les garanties proposées par les complémentaires santé interviennent après le
remboursement de la Sécurité sociale et peuvent s’exprimer sous plusieurs formes :
En pourcentage des frais réels (% FR). Si la garantie d’un soin s’élève à 100 % des frais
engagés, l’assuré ne subira aucun reste à charge (hors participation forfaitaire). En
l’absence d’un plafond de dépenses, une telle garantie peut engendrer un coût
important pour le régime. Il est courant d’observer des garanties à hauteur de 90 %
des frais réels, afin de couvrir convenablement les assurés tout en les
responsabilisant.
Ce type de garantie s’observe régulièrement en hospitalisation.
En pourcentage de la base de remboursement de la Sécurité Sociale (% BRSS). La
complémentaire peut proposer un remboursement à hauteur du ticket modérateur,
ou un montant plus important pour les actes mal remboursés par la Sécurité sociale
(optique, dentaire).
En pourcentage du remboursement de la Sécurité sociale (% RSS). Cette garantie a
pour assiette le montant du remboursement réellement effectué par la Sécurité
sociale.
En pourcentage du Ticket Modérateur (% TM). Comme pour les garanties exprimées
en pourcentage de la base de remboursement de la Sécurité sociale, une
complémentaire santé peut simplement rembourser le ticket modérateur (différence
entre la base de remboursement de la Sécurité sociale et le remboursement de la
Sécurité sociale) ou accorder une participation plus importante pour les actes mal
remboursés par la Sécurité sociale.
En pourcentage du plafond mensuel de la Sécurité sociale (% PMSS). Ce type de
garantie, utilisé couramment en maternité, est basé sur la valeur du plafond mensuel
de la Sécurité sociale (PMSS, 2 946 € en 2011). Un remboursement en pourcentage du
PMSS offre la garantie aux assurés d’une revalorisation annuelle fonction de
l’évolution des salaires.
Forfait en euros (€). Très courante en optique, une garantie exprimée sous la forme
d’un forfait permet aux assurés de bénéficier, en plus des remboursements de la
Sécurité sociale, d’un montant de dépenses maximum à la charge de la
complémentaire pour une période donnée (généralement un ou deux ans). Si les
dépenses engagées sont supérieures à la somme du remboursement de la Sécurité
sociale et du forfait, la différence sera à la charge de l’assuré.

Certaines garanties résultent de la combinaison de plusieurs assiettes. Par exemple, il est


courant de rencontrer des remboursements basés sur un pourcentage des frais réels avec un
maximum de x € par acte.

- 28 -
Pour chacune de ces formules, il convient de préciser si les garanties sont exprimées en
complément ou sous déduction des prestations versées par la Sécurité sociale :
Garantie sous déduction des prestations versées par la Sécurité sociale : une garantie
libellée sous cette forme prévoyant un remboursement à hauteur de 100 % de la base
de remboursement signifie que le total du remboursement de l’Assurance Maladie et
du régime complémentaire couvre simplement la base de remboursement, c’est-à-
dire que les éventuels dépassements resteront à la charge de l’assuré.
Garantie en complément des prestations versées par la Sécurité sociale : une garantie
libellée sous cette forme prévoyant un remboursement à hauteur de 100 % de la base
de remboursement signifie que le seul remboursement de la complémentaire santé
peut atteindre un montant égal à la base de remboursement de la Sécurité sociale en
plus du remboursement de l'Assurance Maladie obligatoire. Le remboursement total
couvrira donc la totalité de la base de remboursement et au moins une partie des
dépassements éventuels.

Dans tous les cas, les remboursements sont toujours limités aux frais réellement engagés par
les assurés : c’est le principe indemnitaire.

Le tableau suivant recense des exemples de calcul des remboursements complémentaires


dans le cas d’une prothèse dentaire de type SPR 50 d’un montant de 500 €.
Pour cet acte, la prise en charge de la Sécurité sociale est la suivante :
base de remboursement de la Sécurité sociale : 107,50 € (50 * 2,15 €),
taux de remboursement de la Sécurité sociale : 70 %,
ticket modérateur : 32,25 €,
dépassement de la base de remboursement de la Sécurité sociale : 392,50 €.

Figure 4 : Exemples de calcul des remboursements complémentaires dans le cas d’une prothèse dentaire de
type SPR 50 d’un montant de 500 €

Libellé de la garantie Remboursement


Sécurité Sociale Complémentaire Reste à charge
complémentaire total
250 % du Ticket modérateur 75,25 € 80,63 € 155,88 € 344,13 €
250 % de la base de
remboursement en plus du
75,25 € 268,75 € 344,00 € 156,00 €
remboursement de la Sécurité
sociale
250 % de la base de
remboursement diminué du
75,25 € 193,50 € 268,75 € 231,25 €
remboursement de la Sécurité
sociale
250 % du remboursement de
la Sécurité sociale en plus du
75,25 € 188,13 € 263,38 € 236,63 €
remboursement de la Sécurité
sociale
250 % du remboursement de
la Sécurité sociale diminué du
75,25 € 112,88 € 188,13 € 311,88 €
remboursement de la Sécurité
sociale
80% des frais réels diminué du
remboursement de la Sécurité 75,25 € 324,75 € 400,00 € 100,00 €
sociale
150 € de forfait par dent 75,25 € 150,00 € 225,25 € 274,75 €

- 29 -
1.1.9. Définition des contrats collectifs
Une couverture complémentaire aux garanties de la Sécurité sociale peut être souscrite de
deux façons : soit à titre individuel en s’adressant directement à un assureur, soit par
l’intermédiaire de son employeur qui peut faire bénéficier un groupe ou l’ensemble de ses
salariés d’un contrat collectif.

Les contrats collectifs sont souscrits par une entreprise (personne morale) au profit d’un
groupe d’individus liés entre eux (ses salariés) afin qu’ils bénéficient de garanties en
complément de celles proposées par le régime de base de la Sécurité sociale en cas de
maladie, d’incapacité, d’invalidité ou de décès.

On distingue plusieurs types de régimes collectifs.

1.1.9.1. Les régimes collectifs à adhésion obligatoire de base


Un contrat collectif à adhésion obligatoire prévoit que l’ensemble des salariés (ou une ou
plusieurs catégories d’entre eux, définies de manière objective, générale et impersonnelle) y
soient obligatoirement affiliés. Cela implique que chaque assuré doit cotiser même s’il est
déjà par ailleurs couvert par l’assurance de son conjoint. Dans ce type de contrats, on ne peut
pas distinguer les salariés par des critères relatifs à l’ancienneté, à la nature du contrat ou
l’âge.

Chaque assuré du groupe bénéficiera des mêmes prestations, et devra débourser le même
montant de cotisations. On peut néanmoins observer des régimes prévoyant des cotisations
de type :
« Famille » : l’adhésion du salarié entraîne de plein droit celle des ayants-droit,
« Adulte/enfant » : la cotisation est fonction du nombre d’adultes et d’enfants que
l’adhérent souhaite faire adhérer,
« Isolé/famille » : la cotisation est différente pour les salariés souhaitant être assurés
seuls et pour les salariés souhaitant assurer l’ensemble de leur famille,
« Isolé/duo/famille » : l’assuré peut choisir d’être assuré seul, avec la personne de son
choix (conjoint, concubin, partenaire pacsé, enfant ou ascendant à charge) ou avec
l’ensemble de sa famille.

Suivant les collèges, les garanties complètent celles de la Sécurité sociale mais peuvent
différer et la répartition des cotisations entre l'employeur et les salariés peut être elle aussi
différente, mais doit être uniforme à l’intérieur de chacun d’eux.

Le régime collectif obligatoire peut être mis en place par accord d’entreprise (négociation
entre l’employeur et les représentants des salariés), au niveau d’une branche professionnelle
ou de l’entreprise, ou par décision unilatérale de l'employeur.

Les régimes collectifs obligatoires permettent de bénéficier d’exonérations fiscales et


sociales.

- 30 -
1.1.9.2. Les régimes collectifs à adhésion facultative
Un régime collectif à adhésion facultative s’applique aux seuls salariés liés par une même
activité professionnelle ou par l'appartenance à un même groupe social qui désirent en
bénéficier. Ces contrats sont généralement touchés par le phénomène d’antisélection,
puisque la possibilité d’adhérer ou non est laissée aux salariés.

Les régimes collectifs à adhésion facultative font alors partie du domaine de l'activité sociale
et culturelle et peuvent être souscrits par le Comité d'Entreprise ou une par une association.
Ce type de régime ne bénéficie d'aucun avantage fiscal ou social et peut être assimilé à un
avantage en nature.

1.1.9.3. Les régimes collectifs à adhésion obligatoire et facultative


Une autre forme de régimes permet de lutter contre l’antisélection : les régimes à adhésion
obligatoire et facultative appelés également régimes à options. Ils permettent aux assurés de
bénéficier de meilleures garanties sur certains postes contre le paiement d’une cotisation
supplémentaire. Dans ce cas, les assurés à bas risque se contentent des contrats où le
montant des cotisations n’est pas élevé mais offrent des garanties faibles. Les salariés à haut
risque souscrivent quant à eux aux options proposant les meilleurs remboursements et
financent donc, en partie, le niveau supérieur de risque. Il y a donc un tarif et des garanties
différents selon les individus.

Figure 5 : Fonctionnement d'un régime de base et d'un régime base+option sur les remboursements
complémentaires

20 €

15 €

10 €

5€

0€
Base Base+Option

1.1.9.4. Antisélection
Le principal intérêt des contrats collectifs est la « mutualisation » des risques entre les
différents bénéficiaires permettant ainsi de lutter contre l’antisélection.

L’antisélection (ou sélection adverse) est un phénomène bien connu des assureurs,
notamment dans le domaine de la santé. Il représente une situation d’asymétrie
d’informations où l’assuré possède plus d’informations sur son risque que l’assureur. Si
- 31 -
l’assureur connait mal ses assurés, la prime qu’il leur demande est le coût moyen des
sinistres : ainsi, les individus dont la charge de sinistres est faible (les bas risques) n’ont pas à
intérêt à souscrire à l’assurance et seuls les hauts risques, pour lesquels le montant espéré
des prestations reçues est supérieur à la prime souscrivent au contrat. L’antisélection
entraine alors le départ des individus en bonne santé et l’adhésion des individus à « mauvais
risque » qui financent seuls le régime. C’est le cas, par exemple, d’un assuré jeune et en
bonne santé qui ne souscrit pas une assurance car il considère que le montant des primes est
trop élevé par rapport au montant espéré des prestations perçues, étant donnée la faible
probabilité de réalisation du risque.

Pour lutter contre l’antisélection, les entreprises ont mis en place pour leurs salariés (ou une
partie d’entre eux) des contrats collectifs obligatoires qui proposent aux salariés des
garanties uniformes quelque soit leur niveau de risque.

1.1.9.5. Avantages fiscaux et sociaux


Les contrats collectifs obligatoires sont synonymes d’équité entre les salariés. De ce fait, et
comme au moins une partie des cotisations sont payées directement par l’entreprise, ils
permettent aux employeurs de bénéficier d’exonérations de cotisations de Sécurité sociale
jusqu’à 6 % du PASS + 1,5 % de la rémunération annuelle brute du salarié avec un plafond de
12 % du PASS. Les salariés peuvent également déduire les cotisations (tant patronales que
salariales) de l’impôt sur le revenu à concurrence de 7 % du PASS + 3,5 % de la rémunération
brute annuelle avec un plafond de 24 % du PASS.

Désormais, pour bénéficier d’exonérations, les contrats doivent être collectifs, obligatoires,
responsables et solidaires, l’employeur devant participer à son financement.

Un contrat est qualifié de « solidaire » lorsque l’assureur n’applique aucune sélection


médicale (les bénéficiaires ne sont pas soumis à un questionnaire médical à l’entrée dans le
régime) et lorsque les cotisations ne sont pas calculées en fonction de l’état de santé de
l’assuré.

Un contrat est qualifié de « responsable » s’il vérifie un certain nombre de conditions visant à
encourager les assurés à respecter le parcours de soins coordonnés, tant en termes
d’obligations que d’interdiction de prises en charge. Il ne doit pas prendre en charge :
la majoration du ticket modérateur prévue par la Sécurité sociale en cas de
consultation hors du parcours de soins,
la contribution forfaitaire de 1 euro,
les trois franchises mises en place en janvier 2008 (médicaments, actes paramédicaux
et transport sanitaire qui seront détaillées en partie 3),
un forfait plafonné à 8 € sur les dépassements d’honoraires sur les actes cliniques et
techniques des spécialistes consultés hors du parcours de soins.

- 32 -
Les contrats responsables sont tenus de garantir de bons niveaux de prises en charge pour les
prestations effectuées dans le cadre du parcours de soins :
au moins 30 % du tarif opposable des consultations du médecin traitant ou médecin
correspondant,
au moins 30 % du prix des médicaments prescrits à vignette blanche,
au moins 35 % du tarif servant de base aux remboursements de l’Assurance Maladie
pour les frais d'analyses et de laboratoire,
au moins deux actes de prévention à hauteur de 100 % du ticket modérateur qui sont
définis sur la liste établie par le Ministère de la santé.

Cette notion de "contrats responsables" a été introduite dans la réforme de l’Assurance


Maladie d’août 2004.

Les contrats responsables et solidaires sont éligibles à une exonération de la Taxe sur les
conventions d’assurance (TCA) de 7 %. Ainsi, les contrats qui ne respectent pas les règles
permettant d’obtenir ce caractère responsable et solidaire sont beaucoup plus chers que les
autres et deviennent beaucoup moins intéressants pour le consommateur : les contrats
solidaires et responsables représentent l'essentiel du marché de la complémentaire santé.

Enfin, on distingue les contrats collectifs dont l’assiette de cotisation est :


le Plafond mensuel de la Sécurité sociale (PMSS) : Le PMSS est couramment utilisé
dans le calcul de certaines cotisations et prestations sociales ; son mode de calcul,
basé sur l’évolution des salaires, permet une revalorisation annuelle des cotisations,
le salaire, qui permet d’intégrer un mécanisme de solidarité entre les salariés,
un montant fixe en euros : le montant des cotisations étant fixe, une assiette en Euro
ne permet pas de suivre l’évolution du coût moyen des prestations.

Plus que la mutualisation des risques, les contrats collectifs obligatoires offrent une réduction
des coûts pour l’employeur (avantages fiscaux) tout en lui permettant de se valoriser à
travers une politique sociale avantageuse (couverture supplémentaire proposée aux salariés).
En réduisant l’antisélection, ils font bénéficier les assurés d’une couverture complémentaire à
un tarif plus intéressant que s’ils s’assuraient seuls et facilitent ainsi l’accès aux soins.

1.1.10. La classification des actes médicaux


1.1.10.1. La Classification commune des actes médicaux (CCAM)
Afin de décrire les actes médicaux et paramédicaux réalisés par les professionnels de santé,
l’Assurance Maladie a mis en place une nomenclature appelée Classification commune des
actes médicaux (CCAM). Elle devrait recenser, à terme, l’ensemble des actes réalisés par les
professionnels de santé et être renommée Classification commune des actes de
professionnels de santé (CCAPS).

Elle vise à classer les actes pouvant être effectués sur toutes les parties du corps humain et à
les hiérarchiser suivant quatre critères (durée, stress, compétence technique et effort

- 33 -
mental) par rapport à un acte dit de référence, afin d’en encadrer la facturation.

La CCAM est organisée hiérarchiquement sous forme de libellés codés décrivant 7 100 actes
et se veut évolutive. Elle est le fruit d’un travail réalisé pendant plusieurs années par près de
500 experts pour le compte de la Haute autorité de santé au sein de sa Commission
d'évaluation des actes professionnels.

Les actes décrits dans cette nomenclature sont ceux pratiqués par des professionnels dont la
compétence relève des professions médicales. Leur codification est composée de quatre
lettres et trois chiffres :
la première lettre pour la zone anatomique concernée,
la deuxième pour l'organe ou la fonction de la zone anatomique concernée,
la troisième pour l’acte,
la quatrième pour la technique mise en œuvre,
et enfin trois chiffres permettant de distinguer les actes qui présenteraient quatre
lettres clés identiques.

A chaque codification sont associés un tarif et une description permettant de reconnaître et


de distinguer précisément cet acte.

La CCAM a succédé en 2005 au Catalogue des actes médicaux (CdAM) en milieu hospitalier
et, pour les actes techniques, à la Nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) en
secteur libéral et hospitalier (qui reste encore en vigueur pour les actes cliniques médicaux,
et les actes des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux).

La dernière version de la CCAM porte le numéro 23 et est datée du 25 janvier 2011.

1.1.10.2. La classification des actes médicaux chez Gras Savoye


Afin de présenter synthétiquement les remboursements complémentaires effectués tout en
fournissant aux clients un détail suffisant, Gras Savoye a regroupé les différents actes sur
lesquels les garanties complémentaires interviennent sous la forme de familles et de sous
familles. L’organisation en est la suivante :

Famille 1 : Hospitalisation

La famille « Hospitalisation » prévoit les remboursements des frais de séjour, des honoraires
hospitaliers, des actes de chirurgie, du forfait journalier, de la chambre particulière et du
transport.

Famille 2 : Consultations/Visites

La famille « Consultations/Visites » contient les remboursements liés aux consultations et


visites de Généralistes et Spécialistes, aux indemnités et majorations et aux autres
praticiens.

- 34 -
Famille 3 : Médecine courante

La « Médecine courante » représente les frais liés à la radiologie et aux laboratoires, aux
actes techniques ainsi qu’à la chirurgie et aux auxiliaires médicaux.

Famille 4 : Pharmacie

Famille 5 : Dentaire

Tous les actes ayant trait au dentaire sont regroupés dans cette famille : soins dentaires,
prothèses dentaires, orthodontie et si les garanties du contrat le prévoient l’implantologie.

Famille 6 : Optique

L’optique regroupe les remboursements des verres et montures (ou si la garantie le prévoit
du forfait optique), des lentilles, et de la chirurgie réfractive, acte qui a pour but de corriger
les défauts visuels à l’aide d’une opération.

Famille 7 : Autres postes

Les prothèses médicales, la maternité et l’ensemble des autres actes n’étant pas cités
préalablement appartiennent à cette famille.

1.2. Le cadre de l’étude


1.2.1. Le rôle d’un courtier en assurance
Plusieurs canaux existent pour la distribution des contrats d’assurance :
Canal 1 : la vente directe qui nécessite d’avoir en interne des compétences multiples
et variées,
Canal 2 : un courtier, qui est intermédiaire entre l’entreprise d’assurance et les clients,
Canal 3 : les agents généraux, des personnes qui travaillent pour une seule
compagnie,
Canal 4 : les guichets bancaires,
Canal 5 : internet.

Gras Savoye appartient au canal 2 : le courtage.

Le courtier en assurances a un rôle d’intermédiaire entre un client et un assureur : il ne vend


pas directement des contrats d’assurances et n’est donc pas porteur de risques.

Initialement, le courtier conseille le client en analysant ses risques afin de lui proposer des
garanties en accord avec ses besoins. Il peut participer à la rédaction d’un cahier des charges
visant à spécifier les garanties et souhaits du client qui lui permettra de négocier le contrat au
meilleur tarif en faisant jouer la concurrence entre les organismes d’assurance dont la qualité

- 35 -
et la solvabilité sont incontestables. Le courtier lance des appels d’offre et négocie les
conditions tarifaires.

Le courtier est également amené à innover en concevant des contrats sur-mesure pour
répondre à des demandes particulières. La connaissance qu’il a des besoins des assurés fait
souvent du courtier le créateur de formes nouvelles d’assurances.

Lorsque le contrat est souscrit, il propose à l’assuré des modifications qui portent sur des
sujets variés comme le montant des capitaux assurés ou la définition des risques. Lorsque
survient un sinistre, le courtier défend le dossier de son client face à la compagnie et tente
d’obtenir le règlement le plus rapide possible.

Le courtier travaille toujours dans l’intérêt du client. Ainsi, si un contrat d’assurance est
déficitaire, l’organisme assureur peut demander une augmentation des cotisations. Le
courtier fera alors bénéficier le client de son expertise en lui proposant des solutions
adaptées et de son poids auprès de l’assureur (ce qui est particulièrement vrai pour les
courtiers de taille importante).

Enfin, si frais de santé et prévoyance peuvent être assurés par deux compagnies distinctes,
un des avantages de travailler avec un courtier est la possible externalisation des risques
comme le décès accidentel dans des institutions plus spécialisées, ce qui permet de réduire
les coûts.

Clairement, le courtier est indépendant des sociétés d’assurances et est rémunéré sous
forme de chargements, le plus souvent définis comme un pourcentage des cotisations reçues
par l’assureur.

1.2.2. Présentation de Gras Savoye


1.2.2.1. Histoire
La société Gras Savoye est née à Lille en 1907 de la rencontre entre Gustave Gras et Pierre
Savoye, deux assureurs nordistes, qui décident de se spécialiser dans la couverture des
risques dans les industries textiles. Ils étendent ensuite leurs activités aux industries minières
et chimiques puis à l'automobile et au transport maritime. L'entreprise ouvre un premier
bureau à Paris en 1928 avant d'y transférer son siège social en 1941. Le premier bureau à
l'international ouvre à Madrid en 1966. L'expansion internationale du groupe se poursuit et
atteint une nouvelle dimension en 1997, après le partenariat avec le groupe britannique
Willis. Gras Savoye est aujourd'hui implanté dans plus d'une trentaine de pays et compte des
clients dans plus d'une centaine.

1.2.2.2. Chiffres clés


Depuis 1992, Gras Savoye est le premier courtier d’assurances en France avec un chiffre
d’affaires de 563 millions d’euros en 2010. Gras Savoye emploie près de 3 500 collaborateurs
dans le monde dont un tiers dans les filiales étrangères.

- 36 -
Figure 6 : Répartition du chiffre d'affaires de Gras Savoye par secteur en 2007

Assurances de
personnes
26%

IARD
Transport 45%
6%

Credit, Caution,
Risques
politiques
2% Automobile Particuliers
16% 5%

Gras Savoye bénéficie d’une trentaine d’implantations en France métropolitaine, cinq dans
les Départements et Pays d’Outre Mer, d’un réseau de filiales étrangères dans 32 pays et
d’une couverture géographique mondiale avec son partenaire Willis.

1.2.2.3. Domaines d’intervention


Gras Savoye intervient majoritairement auprès des entreprises, principalement de grands
groupes du CAC 40 ou de grosses PME. Gras Savoye s’adresse à tous types de clients, et
notamment aux particuliers, qui souhaitent, par exemple, souscrire une assurance auto, une
assurance immobilière ou encore une complémentaire santé. Gras Savoye propose de plus en
plus d’offres packagées dans des domaines aussi divers que ceux de la téléphonie mobile ou
des cartes bancaires, contre la perte et le vol notamment. Gras Savoye est présent sur tous
les aspects de la vie quotidienne d’un individu.
Figure 7 : Cartographie des domaines d’intervention de Gras Savoye

- 37 -
1.2.3. Périmètre de l’étude
L’objectif de cette section est de décrire le fonctionnement de l’infocentre à partir duquel les
données de notre étude ont été extraites. Nous présenterons le processus ayant permis de
construire une nouvelle base de données, exploitable facilement et répondant entièrement à
nos besoins. Nous décrirons également les retraitements effectués pour rendre les
données le plus exploitable possible : cette étape est primordiale pour mener à bien les
analyses qui suivront et nous avons choisi d’y consacrer un temps important afin de garantir
la fiabilité et la pertinence des résultats.

Les données sur lesquelles est bâtie cette étude ont toutes été extraites via le logiciel SAS à
partir de l’infocentre Gras Savoye. Leur traitement a été majoritairement effectué avec ce
logiciel en association avec le logiciel libre R, notamment lors de la réalisation d’une analyse
en composantes principales (ACP) ou d’une classification ascendante hiérarchique (CAH).

Cette étude concerne uniquement les assurés couverts par un contrat de frais de santé (et
non de prévoyance, que Gras Savoye gère également dans certains cas). Soulignons
également le fait que l’intervention de la complémentaire n’est pas requis pour chaque
dépense de santé à charge des assurés (notamment pour les actes de pharmacie ou lorsque
l’assuré dépasse le plafond sur certaines de ses garanties). Dans ce type de cas, ces
informations ne sont pas portées à notre connaissance (aucune ligne de décompte n’est
créée) : les dépenses de santé présentées dans cette étude ne concernent donc pas
l’ensemble de la consommation des assurés de Gras Savoye, mais une part très significative.

Les données sur lesquelles nous travaillons sont obtenues à partir de l’ensemble des actes
médicaux survenus durant l’exercice 2010. Un taux de PSAP de 1,556 %, dont le calcul est
décrit en 1.2.6, a été intégré afin de tenir compte des prestations versées au titre de
l’exercice 2010 mais non encore connues à la date d’observation (30 juin 2011). Nous
décrirons dans la suite de ce chapitre deux méthodes d’évaluation des PSAP.

1.2.3.1. L’infocentre de Gras Savoye


L’infocentre de Gras Savoye contient à la fois des données relatives à la démographie, aux
dépenses de santé, aux cotisations et à l’arrêt de travail mais ne restitue pas les différentes
garanties en vigueur sur les régimes gérés. La structure des principales tables ayant permis la
réalisation de cette étude, disponibles sous format SAS, est présentée en Annexe 1. Leur mise
à jour est réalisée mensuellement.

Bien que cette base de données soit des plus complètes, nous avons décidé de regrouper sur
une seule table l’ensemble des informations utiles à notre étude afin de rendre les
traitements statistiques plus simples. En effet, à l’issue de cette opération, aucune liaison
entre les différentes tables ne serait à effectuer. Ainsi, après avoir sélectionné attentivement
les variables nécessaires à la réalisation de notre étude, nous avons construit une table
contenant une ligne pour chaque personne ayant adhéré à un contrat géré par Gras Savoye
en 2010 et regroupant l’ensemble des informations relatives à cet assuré, tant en termes de
démographie que de prestations.

- 38 -
Pour chaque individu, les 37 variables suivantes sont renseignées :
le numéro de personne,
le numéro d’adhésion,
le type de bénéficiaire (adhérent, conjoint ou enfant),
le sexe de l’assuré,
la date de naissance de l’individu,
l’âge de l’individu calculé au 31 décembre de l’année 2010,
la génération à laquelle appartient l’assuré,
le numéro de Sécurité sociale de l’individu,
le département de résidence de l’individu,
la zone géographique de résidence : celle-ci est obtenue en regroupant plusieurs
départements. On distingue ici Paris, l’Ile-de-France, les grandes métropoles
françaises, et les autres régions.
le département dans lequel est situé l’établissement dont l’adhérent de référence est
salarié,
le collège de l’individu : cette donnée n’est pas systématiquement renseignée,
puisque de nombreux contrats ne distinguent pas les cadres des non cadres,
le type de contrat (présence d’une option ?),
le poids de l’individu, c'est-à-dire l’exposition au risque de l’individu dans l’année
calculée au prorata du temps de présence,
la catégorie de l’individu (actif, ANI, inactif, licencié ou maintien de garanties),
l’ancienneté dans l’alternative,
l’ancienneté dans le portefeuille
le nom du Groupe dont est salarié l’individu,
la référence Gras Savoye, identifiant unique pour les différents contrats,
le nom de l’établissement souscripteur,
l’effectif de l’établissement souscripteur, calculé au prorata du temps de présence sur
l’année,
la taille du Groupe dans lequel est salarié l’individu.
le secteur d’activité de l’établissement, obtenu à partir des codes NAF3,
la compagnie d’assurance qui assure le contrat de frais de santé,
le nom du contrat dont bénéficie l’assuré,
la date d’effet du contrat,
la date de résiliation du contrat,
l’ancienneté du contrat,

- 39 -
le libellé du produit,
le libellé de la police d’assurance,
une variable binaire permettant de savoir si le contrat a été résilié durant l’année N,
une variable binaire permettant de savoir si le contrat a été souscrit durant l’année N,
le numéro de l’établissement auquel appartient l’individu,
le nom de l’alternative d’adhésion,
le régime auquel appartient l’assuré (détaché, expatrié, impatrié, régime général,
local, outre-mer ou TNS),
les montants dépensés durant l’année pour chacun des actes (frais réels,
remboursements Sécurité sociale, remboursements d’une première mutuelle,
remboursements complémentaires et reste à charge),
le nombre d’actes (ou d’unités d’actes, notamment pour les prothèses dentaires)
consommés durant l’année.

1.2.3.2. Retraitement des données


Un retraitement préalable à l’étude des dépenses de santé a été effectué afin d’éliminer les
informations n’appartenant pas au périmètre de cette étude, tout comme les valeurs
aberrantes et les décomptes incomplets. L’objectif du retraitement des données a donc été
de fiabiliser les informations de la base de données. Les cas suivants ont été traités :
Cas des régularisations : les lignes présentant des remboursements complémentaires
négatifs ont été éliminées. Elles correspondent en réalité à des régularisations, c'est-
à-dire à l’annulation de certains paiements qui n’auraient pas du être effectués par le
centre de gestion. Pour ne pas fausser les données, nous avons donc, dans le même
temps, supprimé les lignes de décomptes positives qu’elles visaient à annuler.
Cas de frais réels nuls ou de frais réels inférieurs à la somme des remboursements des
différents intervenants : certaines lignes de décomptes présentaient des montants de
frais réels nuls ou inférieurs à la somme des remboursements des différents
intervenants. Dans ce cas, ceux-ci ont été remplacés par la somme des
remboursements effectués par les différents intervenants.
Cas des remboursements complémentaires nuls, de données manquantes ou de
données aberrantes : une première analyse descriptive des données a permis de
mettre en évidence ces différents types d’anomalies présentes dans la base de
données. Pour chaque acte, une valeur plancher et une valeur plafond ont été
déterminées à partir de la distribution de chaque acte afin d’éliminer les valeurs
aberrantes probablement dues à des erreurs de saisie. Ce travail a concerné
également la démographie de la population et n’a pu être réalisé que manuellement.

Globalement, cette étude porte sur les données recueillies sur 1064 entreprises clientes et en
partenariat avec 81 organismes complémentaires. La base de données analysée au final
comporte 1 024 340 individus (lignes) caractérisés chacun par 37 variables (colonnes).

- 40 -
1.2.4. Démographie du portefeuille
Cette partie vise à présenter de façon détaillée la population composant le portefeuille Gras
Savoye à partir de statistiques descriptives.

1.2.4.1. Les différents types d’assurés


La plupart des contrats de notre portefeuille laissent la possibilité à l’assuré de faire
bénéficier de ses garanties les membres proches de sa famille : ces contrats sont
pluribénéficiaires, à la différence des contrats monobénéficiaires, réservés aux seuls
adhérents. Les différents types bénéficiaires de nos contrats frais de santé collectifs sont
donc :
les adhérents : salariés des entreprises clientes, ils adhèrent à un contrat et payent
donc la prime,
les ayants-droit (personnes assurées par le lien familial qui les lie à l'adhérent) :
conjoints (époux, concubin ou partenaire lié à l’adhérent par un PACS) ou enfants.

1.2.4.2. Effectif sous risque


On définit la durée d’exposition au risque pour chaque assuré comme le nombre de jours où
celui-ci a adhéré à un régime complémentaire sur une période donnée. En divisant cette
valeur par la longueur de la période d’observation également exprimée en jours, on obtient
un indicateur appelé coefficient d’exposition au risque. L’effectif sous risque représente alors
la somme des coefficients d’exposition au risque pour l’ensemble des assurés du portefeuille.

Cette notion permet de ne pas comptabiliser de la même manière un assuré ayant adhéré six
mois et un assuré ayant adhéré toute l’année. Pour réaliser cette étude, nous avons ainsi
affecté un poids différent de l’unité aux individus qui n’étaient pas présents à la fois au 1er
janvier 2010 et au 31 décembre 2010 afin de tenir compte de leur plus faible durée
d’adhésion à un régime complémentaire. Les effectifs mentionnés infra sont tous calculés au
prorata du temps de présence dans l’année.

En appliquant cette définition, nous considérons que la sollicitation du régime


complémentaire est uniforme quelque soit la durée d’assurance. Cependant, cette hypothèse
ne se vérifie pas forcément en pratique puisque l’été est traditionnellement synonyme de
dépenses de santé inférieures.

1.2.4.3. Répartition des effectifs par type de bénéficiaire


Le tableau suivant présente la répartition des effectifs assurés en 2009 et 2010 par type de
bénéficiaire. Pour les calculs, la notion retenue est celle des effectifs sous risque qui sont
donc calculés au prorata du temps de présence dans un régime.

- 41 -
Figure 8 : Démographie 2010 du portefeuille Gras Savoye

Exercice 2009 Exercice 2010


Eléments Démographiques Evolution
Effectifs Poids Effectifs Poids
Adhérents 336 591 43,8% 371 371 43,8% 10,3%
Conjoints 164 686 21,4% 181 433 21,4% 10,2%
Enfants 267 492 34,8% 295 055 34,8% 10,3%
Cumul des bénéficiaires 768 769 100% 847 858 100% 10,3%
Coefficient familial 2,28 2,28

Figure 9 : Répartition familiale des bénéficiaires Figure 10 : Répartition familiale des adhérents

Couple avec
Enfants enfant(s) Adhérent sans
35% enfant
Adhérents 35%
44% 43%

Couple sans
Conjoints Adhérent avec
enfant
21% enfant(s)
14%
8%

Les adhérents représentent la majeure partie des effectifs assurés tant en 2009 qu’en 2010
(44 % durant ces deux années, malgré une évolution de 10 % de ceux-ci). Ce constat semble
logique, puisque ce sont les adhérents qui souscrivent au contrat et sont donc les seuls
membres d’une famille à être obligatoirement affiliés. Les conjoints représentent 21 % des
effectifs : ceux-ci peuvent être couverts par une autre complémentaire santé (par exemple
celle de leur employeur), comme les enfants (35 % des effectifs en 2010) qui peuvent adhérer
également sur la mutuelle du conjoint de l’assuré principal s’il en dispose d’une.

Le tableau précédent indique également la valeur du coefficient familial. On définit cet


indicateur comme le poids d’un adhérent dans les effectifs, c'est-à-dire le rapport entre le
nombre de bénéficiaires et le nombre d’adhérents. Dans le cas du portefeuille Gras Savoye,
2,28 personnes bénéficient en moyenne du contrat d’un adhérent.

La répartition familiale des adhérents montre la part importante des adhérents seuls (sans
conjoint et sans enfant assuré), qui représentent 43 % des adhérents. 35 % des adhérents
font bénéficier tant leur conjoint que leurs enfants de leur complémentaire santé et 14 %
uniquement leur conjoint. Enfin, 8 % des adhérents sont seuls bénéficiaires d’un contrat frais
de santé complémentaire, avec au moins un de leurs enfants.

- 42 -
1.2.4.4. Evolution de la population sous risque en 2010
Le graphique suivant représente l’évolution de l’effectif sous risque par mois au cours de
l’exercice 2010. Les effectifs sont calculés au prorata du temps de présence dans le mois.

Figure 11 : Population assurée mensuellement sur l'exercice par type de bénéficiaire

900 000 100%


800 000
80%
700 000

Variation des adhérents


600 000 60%
Effectif

500 000
40%
400 000
300 000 20%
200 000 0,0% 0,2% 0,3% 0,4% 0,0% 0,2% 0,6% -0,1% 0,8% 0,4% 0,3% 0,2%
0%
100 000
0 -20%
Janvier Février Mars Avril Mai Juin Juillet Août Septembre Octobre Novembre Décembre
Adhérents Conjoints Enfants Variation des adhérents

Nous constatons une stabilité de l’effectif sous risque au cours des mois. Les plus fortes
variations du nombre d’adhérents ont eu lieu en juillet (+0,6 %) et en septembre (+0,8 %)
alors qu’une baisse du nombre d’adhérents a eu lieu août (-0,1 %).

1.2.4.5. Répartition des adhérents suivant le sexe et l’âge


Les statistiques contenues dans le tableau suivant représentent la répartition des adhérents
suivant le sexe et l’âge moyen des différents types de bénéficiaires :

Figure 12 : Caractéristiques démographiques des adhérents

Nombre d'adhérents en 2010 371 371


% de Femmes 32%
Age moyen Adhérents 41,1
Age moyen Conjoints 42,9
Age moyen Enfants 10,4

Le portefeuille Gras Savoye est ainsi majoritairement constitué d’adhérents hommes (68 %).
L’âge moyen des adhérents s’élève à 41,1 ans, les conjoints étant en moyenne plus âgés que
les assurés (42,9 ans). Enfin, l’âge moyen des enfants est de 10,4 ans, soit environ 30 ans de
moins que leurs parents.

- 43 -
La prise en compte à la fois du sexe et de l’âge des adhérents permet de construire la
pyramide des âges suivante :

Figure 13 : Pyramide des âges des adhérents

Plus de 65 ans 4 060 6 885

De 60 à 65 ans 3 083 8 715

De 55 a 60 ans 7 679 19 979

De 50 a 55 ans 10 434 26 570

De 45 a 50 ans 13 701 32 641

De 40 a 45 ans 16 113 35 124

De 35 a 40 ans 18 818 37 922

De 30 a 35 ans 19 456 35 550

De 25 a 30 ans 18 486 34 455

De 18 a 25 ans 7 497 13 532

Moins de 18 ans 317 351

30 000 20 000 10 000 0 10 000 20 000 30 000 40 000 50 000


Effectifs

Femmes Hommes

Cette représentation met en évidence le poids important des hommes. La classe d’âge la plus
représentée dans la population, avec 56 740 adhérents (15 % des adhérents) est celle des 35-
40 ans.

1.2.4.6. Répartition des adhérents suivant le collège


La base de données de Gras Savoye ne restitue pas en lecture directe le collège des
adhérents. Pour l’obtenir, nous n’avons d’autre choix que de nous reporter au paramétrage
réalisé en gestion, puisque certains contrats prévoient des garanties différentes suivant le
collège. Nous avons représenté sur le graphique ci-dessous la répartition des adhérents de
notre portefeuille suivant le type de contrat (cadres, non cadres, employés, techniciens et
agents de maîtrise (ETAM), et ensemble du personnel) :

Figure 14 : Répartition des adhérents et moyennes d’âge par type de contrat

Cadres/ETAM
6% Cadres
18%

Non cadres
Type de contrat Moyenne d'âge
30%
Cadres 41 ans
Non cadres 40,4 ans
ETAM 38,1 ans
Cadres/ETAM 36,5 ans
Ensemble du personnel 41,9 ans
Ensemble du
ETAM personnel
4% 42%

- 44 -
Plus de 40 % des adhérents bénéficient d’un contrat « ensemble du personnel », c'est-à-dire
que les garanties sont les mêmes pour tous les salariés quelque soit le collège.
Nous pouvons noter que les cadres occupent un poids important dans la population
comparativement aux données nationales (8,8 % de cadres en France selon l’INSEE).

1.2.4.7. Répartition des adhérents suivant le secteur d’activité


Gras Savoye établit un classement régulier de ses entreprises clientes selon leur secteur
d’activité. Ce travail a un double intérêt, puisqu’il permet aux équipes commerciales
d’effectuer une veille constante du portefeuille et aux équipes techniques de réaliser de
nombreux repères sectoriels « benchmarks », visant à comparer les garanties, les
comportements de consommation et les spécificités de chaque secteur. Pour une précision
accrue, le portefeuille est segmenté selon seize secteurs. Les principales caractéristiques
démographiques (le pourcentage de femmes, l’âge moyen, le pourcentage de cadres et le
pourcentage d’adhérents résidant en Ile de France) de chacun d’entre eux sont présentées
dans le tableau ci-dessous.

Figure 15 : Caractéristiques démographiques des différents secteurs d’activité

% de
Secteur Poids Age moyen % Cadres % IDF
femmes
Agroalimentaire 5% 32% 45,7 31% 19%
Automobile 3% 23% 43,0 27% 13%
Chimie 3% 26% 46,1 36% 9%
Communication 6% 48% 42,9 47% 52%
Construction 10% 30% 38,5 54% 44%
Distribution 7% 41% 39,7 41% 27%
Electronique 2% 35% 42,1 52% 15%
Energie 4% 14% 42,3 18% 30%
Environnement 8% 22% 42,8 24% 31%
Finance 2% 53% 44,8 58% 53%
Metallurgie 3% 17% 43,2 34% 17%
Pharmacie 2% 64% 42,1 34% 40%
Services 22% 37% 40,0 51% 32%
TIC 12% 26% 37,6 34% 44%
Tourisme 2% 52% 35,5 25% 56%
Transport 8% 25% 42,6 19% 16%

Le secteur des services est de loin le plus représenté avec 22 % des adhérents, suivi par celui
des technologies de l’information et de la communication, puis par le secteur de la
construction (10 % des adhérents). Chaque secteur d’activité a des caractéristiques
démographiques propres.

1.2.4.8. Répartition géographique des bénéficiaires


Les bénéficiaires des contrats collectifs complémentaires gérés par Gras Savoye ne sont pas
repartis de manière homogène sur le territoire. Les différences constatées reflètent le
maillage territorial de Gras Savoye en France : les zones bénéficiant du plus fort nombre de
bénéficiaires sont toutes proches d’une antenne locale de Gras Savoye.
La région Ile-de-France (Siège social), le Nord (Lille), l’Alsace (Strasbourg), l’Isère (Grenoble),
le Rhône (Lyon), la Haute Garonne (Toulouse), les Bouches du Rhône (Marseille), la Gironde

- 45 -
(Bordeaux), la Loire Atlantique (Nantes) bénéficient tous, en effet, d’un nombre élevé de
bénéficiaires.

Figure 16 : Carte de France des bénéficiaires

1.2.4.9. Taille de l’entreprise


On segmente le portefeuille Gras Savoye selon la taille des entreprises clientes. Les résultats
sont les suivants :

Figure 17 : Segmentation du portefeuille Gras Savoye selon la taille des entreprises clientes

Effectifs Nombre d'entreprises


Moins de 100 adhérents 736
De 100 à 500 adhérents 224
De 500 à 1000 adhérents 49
De 1 000 à 5 000 adhérents 45
De 5 000 à 10 000 adhérents 6
Plus de 10 000 adhérents 4
Total 1064

- 46 -
Gras Savoye travaille au quotidien avec de nombreuses entreprises de taille variée.
Néanmoins, on constate, au niveau national, que plus l’entreprise est de taille importante,
plus l’accès à la complémentaire santé se généralise.

1.2.5. Dépenses de santé du portefeuille Gras Savoye


Cette partie a pour but de présenter l’évolution des prestations versées par Gras Savoye
depuis 2007, et s’intéresse plus en détails à la ventilation de ses remboursements sur
l’exercice de survenance 2010.

1.2.5.1. Cadence de règlement


La cadence de règlement présente la proportion de la charge des sinistres payée au fur et à
mesure des années. Les colonnes du tableau correspondent aux exercices de survenance
tandis que les lignes représentent les périodes de règlement. Les poids indiquent alors la part
de la charge de sinistre relative à un exercice de survenance payée au cours de la période
correspondante. La cadence de règlement construite dans cette partie contient les
règlements relatifs aux exercices 2007 à 2011.

Figure 18 : Cadence de règlement

Année de survenance 2007 2008 2009 2010 2011

Période de règlement Montants Poids Montants Poids Montants Poids Montants Poids Montants

de jan à déc 2007 189 843 228 € 86,5%


de jan à déc 2008 28 466 986 € 13,0% 207 891 993 € 86,4%
de jan à déc 2009 1 046 098 € 0,5% 31 723 439 € 13,2% 250 877 106 € 86,5%
de jan à déc 2010 1 056 713 € 0,4% 38 311 957 € 13,2% 285 928 304 € 88,9%
de jan à juin 2011 958 989 € 0,3% 35 790 950 € 11,1% 151 520 863 €
Total 219 356 312 € 100% 240 672 145 € 100% 290 148 052 € 100% 321 719 254 € 100% 151 520 863 €
PSAP 0 € 0 € 294 761 € 5 006 883 € -
Total (yc PSAP) 219 356 312 € 240 672 145 € 290 442 813 € 326 726 137 € 151 520 863 €
Règlements jusqu'au 30/06/2011

PSAP (Provision pour Sinistres A Payer Survenance 2007 2008 2009 2010 2011
calculée sur le portefeuille Gras Savoye) Taux 0% 0% 0,102% 1,556% -

Nous remarquons que le délai de forclusion de deux ans en vigueur en assurance santé est
bien respecté ici, puisque les règlements sont effectués, pour chaque exercice de survenance,
au maximum deux ans après la date de soins.

La cadence de règlement indique qu’une grande majorité de règlements (près de 86 %) sont


effectués durant l’exercice de survenance : la liquidation des paiements est donc très rapide
en assurance santé. Cette proportion est stable sur quatre ans, malgré une forte
augmentation des remboursements sur la période étudiée, passant de 219 M€ à près de 330
M€.

- 47 -
Figure 19 : Prestations payées par exercice de survenance et PSAP

350 000 000 €


326 726 137 €

300 000 000 € 290 442 813 €

250 000 000 € 240 672 145 €


219 356 312 €

200 000 000 €

150 000 000 €

100 000 000 €

50 000 000 €

0€
2007 2008 2009 2010
Prestations payées PSAP

1.2.5.2. Ventilation des remboursements complémentaires par poste


Le diagramme circulaire suivant permet de visualiser les familles d’actes qui sollicitent le plus
le régime complémentaire.

Figure 20 : Ventilation des remboursements complémentaires par famille d’actes

Autres Postes Hospitalisation


7% 12%
Optique
23% Pharmacie
13%

Médecine
courante
Dentaire
19% Consultations, 13%
Visites
13%

Avec respectivement 19 % et 23 % des remboursements complémentaires totaux, le dentaire


et l’optique sont les plus gros contributeurs aux dépenses totales.

Afin de détailler ces résultats et de mettre en évidence une éventuelle évolution entre les
exercices 2009 et 2010, nous avons construit un tableau présentant la somme des
remboursements complémentaires par exercice de survenance et par poste.

- 48 -
Figure 21 : Ventilation des remboursements complémentaires par poste de dépenses

Nature Survenance 2009 Survenance 2010 Evolution 2010/2009


Corrigée
des actes Montants Poids Montants Poids Non corrigée
de l'effectif
Frais séjour 10 255 417 € 3,5% 12 169 425 € 3,7% 18,7% 7,6%
Honoraires/Chirurgie 8 671 802 € 3,0% 9 620 086 € 2,9% 10,9% 0,5%
Forfait journalier 5 039 999 € 1,7% 6 409 786 € 2,0% 27,2% 15,3%
Chambre particulière 7 396 826 € 2,5% 8 619 187 € 2,6% 16,5% 5,6%
Transport 973 112 € 0,3% 1 118 798 € 0,3% 15,0% 4,2%
Hospitalisation 32 337 155 € 11,1% 37 937 283 € 11,6% 17,3% 6,3%
Généralistes 18 683 139 € 6,4% 19 553 625 € 6,0% 4,7% -5,1%
Spécialistes 20 047 919 € 6,9% 20 800 810 € 6,4% 3,8% -6,0%
Indemnités majorations 1 613 818 € 0,6% 1 615 227 € 0,5% 0,1% -9,3%
Autres praticiens 45 187 € 0,0% 70 601 € 0,0% 56,2% 41,6%
Consultations, Visites 40 390 064 € 13,9% 42 040 263 € 12,9% 4,1% -5,7%
Radiologie/Laboratoire 17 787 571 € 6,1% 20 082 370 € 6,1% 12,9% 2,3%
Actes techniques/Chirurgie 5 926 986 € 2,0% 6 895 163 € 2,1% 16,3% 5,4%
Auxiliaires médicaux 12 584 644 € 4,3% 14 720 888 € 4,5% 17,0% 6,0%
Médecine courante 36 299 201 € 12,5% 41 698 422 € 12,8% 14,9% 4,1%
Pharmacie 37 465 246 € 12,9% 42 370 386 € 13,0% 13,1% 2,5%
Soins dentaires 8 539 221 € 2,9% 8 521 057 € 2,6% -0,2% -9,6%
Prothèses dentaires 34 748 814 € 12,0% 39 130 132 € 12,0% 12,6% 2,1%
Orthodontie 12 261 720 € 4,2% 13 898 208 € 4,3% 13,3% 2,7%
Implants 1 615 076 € 0,6% 2 080 745 € 0,6% 28,8% 16,8%
Dentaire 57 164 830 € 19,7% 63 630 141 € 19,5% 11,3% 0,9%
Verres 30 688 902 € 10,6% 35 647 463 € 10,9% 16,2% 5,3%
Montures 16 663 625 € 5,7% 18 863 650 € 5,8% 13,2% 2,6%
Forfait Optique 9 708 992 € 3,3% 12 838 303 € 3,9% 32,2% 19,8%
Lentilles 6 101 593 € 2,1% 7 229 073 € 2,2% 18,5% 7,4%
Kératotomie 613 524 € 0,2% 719 351 € 0,2% 17,2% 6,3%
Optique 63 776 636 € 22,0% 75 297 840 € 23,0% 18,1% 7,0%
Prothèses médicales 5 901 094 € 2,0% 6 963 928 € 2,1% 18,0% 7,0%
Maternité 6 312 595 € 2,2% 7 030 892 € 2,2% 11,4% 0,9%
Divers 10 795 992 € 3,7% 9 756 982 € 3,0% -9,6% -18,1%
Autres Postes 23 009 681 € 7,9% 23 751 802 € 7,3% 3,2% -6,4%

Total (y compris PSAP) 290 442 813 € 100% 326 726 137 € 100% 12% 2%
Nombre d'adhérents 336 591 371 371 10,3%
Remboursements moyens par adhérent 863 € 880 € 2,0%

Les verres (10,9 % des remboursements), les prothèses dentaires (12 % des remboursements)
et la pharmacie (13 % des remboursements) sont les trois postes qui sollicitent le plus le
régime complémentaire.

Les autres praticiens, avec 56 % d'augmentation entre 2009 et 2010, le forfait optique (+32,2
%) et les implants (+28,8 %) sont les trois postes qui ont le plus augmenté, en volume, entre
2009 et 2010.

En tenant compte de la croissance du nombre de bénéficiaires entre 2009 et 2010, les


remboursements ont progressé en moyenne de 2 % par adhérent entre ces deux années,
contre 12,5 % sans tenir compte de l’effet de l’augmentation de l’effectif assuré.

- 49 -
1.2.5.3. Ventilation des remboursements complémentaires par type de
bénéficiaire
Le graphique suivant présente la répartition par type de bénéficiaire des remboursements
complémentaires effectués en 2010.
Figure 22 : Ventilation des remboursements complémentaires par type de bénéficiaire
100%
7%
90% 20% 17%
22% 23% 23% 12%
30%
80%
70% 26%
26%
26% 26% 25%
60% 22%

50%
40% 81%

30% 57%
55% 51% 51% 52%
48%
20%

10%
0%
Hospitalisation Consultations, Médecine Pharmacie Dentaire Optique Autres Postes
Visites courante
Adhérent Conjoint Enfant

Avec 55 % des remboursements complémentaires reçus en 2010, les adhérents sont les plus
gros contributeurs aux dépenses du portefeuille. Ce chiffre s’élève à 24 % pour les conjoints
et 21 % pour les enfants et sont à rapprocher du poids de chaque classe dans la population
(43 % d’adhérents, 21 % pour les conjoints et 34 % pour les enfants). Ainsi, alors que la part
des conjoints dans les remboursements est proche de leur poids dans la population, celle des
enfants est beaucoup plus faible et celle des adultes beaucoup plus forte : les adhérents
consomment donc plus que les enfants.

1.2.5.4. Contribution aux frais réels des différents intervenants


Le paragraphe 1.2.5.2 montrait que deux familles, le dentaire et l’optique, pesaient plus que
les autres dans les dépenses du portefeuille Gras Savoye. Nous avons souhaité observer, si,
pour chaque famille d’actes, les différents intervenants contribuaient tous dans les mêmes
proportions au financement des dépenses et avons construit un tableau représentant, sur la
base des frais réels, le poids de la Sécurité sociale, de la première mutuelle et des
remboursements complémentaires. Ce tableau est présent en annexe 1, le graphique suivant
synthétisant les résultats :

- 50 -
Figure 23 : Contribution aux frais réels des différents intervenants par famille de dépenses

100% 1% 4% 3% 0% 7%
13% 14%
90%
80% 39% 40% 41%
41%
70%
60% 0%
0% 0% 57% 66%
0%
50%
81%
40%

30% 60%
55% 57% 58% 2%
1%
20%
28% 26%
10%
2%
0% 3%

Hospitalisation Consultations, Médecine Pharmacie Dentaire Optique Autres Postes


Visites courante
Sécurité Sociale Première mutuelle Complémentaire Assurés

Sur l’ensemble des dépenses de santé comptabilisées au titre de 2010, la Sécurité sociale a
contribué à hauteur de 43 % des frais réels, une première mutuelle pour 1 %, l’organisme
complémentaire pour 51 %, le reste à charge des assurés atteignant 6 %. Cependant, cette
statistique générale cache des disparités dépendant de la famille d’actes.
60 % des frais réels liés à l'hospitalisation sont pris en charge par la Sécurité sociale et
39 % par l'organisme complémentaire. Cependant, ces statistiques incluent la
chambre particulière et le forfait journalier, non pris en charge par l’Assurance
Maladie, ce qui fait baisser son poids dans le financement de l’hospitalisation dans
son ensemble. En ôtant ces deux postes de notre étude, les remboursements de la
Sécurité sociale atteignent 71 % des frais réels, contre 28 % pour la complémentaire.
Les remboursements de l'Assurance Maladie représentent même 80 % des frais réels
pour les frais de séjour. L’hospitalisation est donc une famille d’actes globalement
bien remboursée par l’Assurance Maladie.
La Sécurité sociale prend en charge 55 % des dépenses liées aux consultations et
visites (61 % pour les généralistes et 44% pour les spécialistes, ce qui peut s’expliquer
par des dépassements d’honoraires plus nombreux pour ces derniers), contre 41 %
pour l'organisme complémentaire. Comme pour l'hospitalisation, le reste à charge
pour les ménages est faible (4 %).
La typologie de remboursements de la médecine courante est proche de celle
observée pour les consultations et visites (reste à charge de 3 % pour les ménages).
Néanmoins, l'Assurance Maladie prend plus largement en charge les actes de
radiologie/laboratoire (62 % des frais réels) que les auxiliaires médicaux (50 %).
La part de financement de la Sécurité sociale dans la pharmacie s'élève à 58 % contre
41 % pour l'assurance complémentaire. Le reste à charge est alors presque nul.
Le dentaire est beaucoup moins bien remboursé par la Sécurité sociale que les
précédents postes et cache de grosses disparités entre les différents actes : les soins
dentaires sont couverts à hauteur de 60 % par l’Assurance Maladie tandis que les
prothèses dentaires le sont à 17 % ; elle ne participe pas au financement des implants.

- 51 -
Enfin, le régime obligatoire ne participe qu’à hauteur de 28 % des dépenses
d’orthodontie. Le rôle de la complémentaire est donc primordial pour cette famille
d’actes, notamment en ce qui concerne les prothèses dentaires et l’orthodontie. Au
global, le reste à charge s’élève à 13 % des frais réels. Enfin, il est à noter que 28 % des
dépenses liées au dentaire sont prises en charge par l’Assurance Maladie et 57 % par
l’assurance complémentaire.
L’optique est également très mal remboursée par l’Assurance Maladie puisque celle-ci
ne participe qu’à hauteur de 3 % des frais réels, contre 81 % pour l’organisme
complémentaire. Les actes comme la kératotomie ou les lentilles ne sont pas ou peu
remboursés. Le rôle de la complémentaire sur l’achat d’un équipement optique est
donc primordial.
Enfin, la Sécurité sociale participe modestement au financement des autres postes (26
% pour l’Assurance Maladie contre 66 % pour l’assurance complémentaire).

1.2.5.5. Analyse des taux de couverture


On définit le taux de couverture comme le rapport entre les dépenses de santé remboursées
à l’assuré et les dépenses de santé totales. Ainsi, plus cet indicateur est proche de 100 %,
moins la sollicitation de l’assuré est importante (hors cotisation de la complémentaire). On
représente sur le graphique suivant les taux de couverture constatés en 2010 sur le
portefeuille Gras Savoye par famille d’actes. Au total, celui-ci s’élève à 94 %, ce qui signifie
qu’en moyenne, pour 100 € dépensés, 6 € resteront à la charge de l’assuré après
remboursements de la Sécurité sociale, d’une première mutuelle et de l’organisme
complémentaire.

Figure 24 : Taux de couverture par famille d’actes

Hospitalisation
100%
95%
Autres Postes Consultations, Visites
90%
85%
80%
75%

Optique Médecine courante

Dentaire Pharmacie

Ce graphique met en évidence un niveau de couverture variable suivant la famille d’actes. Il


est excellent pour la pharmacie et l’hospitalisation dont la prise en charge par l’Assurance
Maladie est traditionnellement forte. En revanche, il est beaucoup plus faible pour le
dentaire et l’optique (87 % et 66 %). Enfin, les consultations, visites et la médecine courante
présentent de bons taux de couverture (respectivement 96 % et 97 %).
Notre infocentre ne contenant que les décomptes où la complémentaire gérée par Gras
Savoye intervient, il est à noter que ces taux de couverture sont globalement majorés. Ils

- 52 -
représentent, plus précisément, le taux de couverture moyen constaté lorsque la
complémentaire est sollicitée. A titre d’exemple, il serait plus faible s’il intégrait les dépenses
de pharmacie non remboursées.

1.2.5.6. Fonction de répartition des frais réels pour les principaux actes
Les graphiques suivants représentent les fonctions de répartition des frais réels pour six actes
sélectionnés.

Figure 25 : Fonction de répartition des frais réels pour les principaux actes

Consultations - Généralistes Consultations - Spécialistes

100% 100%
90% 90%
80% 80%
70% 70%
60% 60%
50% 50%
40% 40%
30% 30%
20% 20%
10% 10%
0% 0%
0€ 20 € 40 € 60 € 80 € 100 € 120 € 0€ 20 € 40 € 60 € 80 € 100 € 120 €

Optique - Montures Optique - Verres

100% 100%
90% 90%
80% 80%
70% 70%
60% 60%
50% 50%
40% 40%
30% 30%
20% 20%
10% 10%
0% 0%
0€ 100 € 200 € 300 € 400 € 500 € 600 € 0€ 100 € 200 € 300 € 400 € 500 € 600 €

Dentaire - Prothèses "SPR 50" Hospitalisation - Chambres particulières

100% 100%
90% 90%
80% 80%
70% 70%
60% 60%
50% 50%
40% 40%
30% 30%
20% 20%
10% 10%
0% 0%
0€ 100 € 200 € 300 € 400 € 500 € 600 € 700 € 800 € 900 € 0€ 200 € 400 € 600 € 800 € 1 000 €

Les fonctions de répartition des frais réels laissent apparaître des comportements tarifaires
différents en fonction de l’acte :
81 % des consultations de généralistes sont réalisées pour un montant équivalent à la
base de remboursement de la Sécurité sociale : les tarifs appliqués pour cet acte ne
comprennent que peu de dépassements d’honoraires,
39 % des consultations de spécialistes coûtaient 23 € en 2010. La fonction de
répartition adopte une allure par paliers, reflétant les majorations de la base de
remboursement pour les différentes spécialités,
- 53 -
50 % des montures coûtent moins de 152 €,
La fonction de répartition des verres est proche de celle des montures, la médiane
étant néanmoins plus faible (122 €)
Le prix des prothèses dentaires « SPR 50 » croit plus linéairement. 50 % des prothèses
posées de type « SPR 50 » coûtent entre 430 € et 595 €.
Alors que le prix d’une chambre particulière est dans 95 % des cas inférieur à 150 €, 1
% des actes coûtent plus de 1045 €. La médiane s’élève à 58 €,

1.2.5.7. Distribution du nombre d’unités consommées par assuré


Afin de mieux comprendre le comportement des bénéficiaires des contrats Gras Savoye sur
les six actes étudiés ci-dessus, nous avons représenté la distribution du nombre d’unités
consommées par assuré en 2010 pour ces mêmes postes :

Figure 26 : Distribution du nombre d’unités consommées par assuré pour les principaux actes

Consultations - Généralistes Consultations - Spécialistes

25% 25%

20% 20%

15% 15%

10% 10%

5% 5%

0% 0%
0 5 10 15 20 25 0 5 10 15 20

Optique - Montures Optique - Verres

100% 100%
90% 90%
80% 80%
70% 70%
60% 60%
50% 50%
40% 40%
30% 30%
20% 20%
10% 10%
0% 0%
0 1 2 3 0 1 2 3 4 5 6

Dentaire - Prothèses "SPR 50" Hospitalisation - Chambres particulières

100% 100%
90% 90%
80% 80%
70% 70%
60% 60%
50% 50%
40% 40%
30% 30%
20% 20%
10% 10%
0% 0%
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 0 1 2 3 4 5

77 % des bénéficiaires ont consulté au moins une fois un médecin généraliste en 2010
et pour 82 % d’entre eux cinq visites au maximum ont été comptabilisées,

- 54 -
Les spécialistes sont moins consultés que les généralistes puisque seuls 50 % des
bénéficiaires se sont rendus au moins une fois chez l’un d’entre eux au cours de
l’année observée,
82 % des bénéficiaires n’ont pas acheté de monture en 2010 et plus de 17 % des
assurés en ont acheté une seule. Ainsi, moins d’1 % des bénéficiaires ont acheté aux
moins deux montures sur la période observée,
Les verres se vendent généralement par deux, sauf en cas de casse ou de changement
de défaut visuel : la représentation de leur distribution laisse bien apparaitre ce fait
puisque 81 % des bénéficiaires n’ont pas acheté de verres, 0,02 % en ont acheté un
seul et 18 % ont acquis deux verres,
Comme pour les trois actes précédents, le nombre de consommateurs de prothèses
dentaires de type « SPR 50 » est faible. Sur l’ensemble de la population, 99 % des
adhérents n’ont pas recouru à la pose de plus de deux prothèses de type « SPR 50 ».
97 % des bénéficiaires n’ont pas effectué de dépenses au titre de la chambre
particulière en 2010,

1.2.6. Les provisions pour sinistres à payer (PSAP)


1.2.6.1. Méthodes de comptabilisation de la charge de sinistres
Deux méthodes de comptabilisation de la charge de sinistres sont couramment utilisées en
assurance. On distingue la comptabilisation en exercice de survenance de la comptabilisation
par exercice comptable. Comprendre leur principe nous permettra de justifier plus aisément
l’existence de provisions pour sinistres à payer.

Dans une comptabilisation par exercice de survenance, on affecte, pour chaque sinistre, les
montants payés par l’assureur à l’exercice au cours duquel le sinistre est survenu, quelle que
soit la date de règlement. Ainsi, lors d’une analyse de ce type, la charge de sinistres n’est pas
figée à la fin de l’exercice de survenance, à cause des délais de forclusion sur les garanties
d’assurance, notamment en santé (deux ans). Le graphique suivant illustre cette idée, en
représentant le délai de remboursement au cours du temps en fonction du mois de
survenance.

Figure 27 : Liquidation des règlements Gras Savoye par mois de survenance 2010 et délais de règlement

12
Règlements (millions d'Euros)

10

0
0 5 10 15 20
Délais de règlement (mois)
Janvier Février Mars Avril Mai Juin
Juillet Août Septembre Octobre Novembre Décembre

- 55 -
Dans une comptabilisation par exercice comptable, on affecte à chaque exercice les montants
payés par l’assureur au cours de celui-ci, quelle que soit la date de survenance du sinistre.
Aucun mouvement n’étant possible après la clôture, le résultat est figé à la fin de l’exercice.

En assurance santé, la vision par exercice de survenance est la plus courante. En effet, dans le
cadre de l’émission d’un compte de résultats, il s’agit de mettre en parallèle des cotisations
payées au cours de l’exercice la charge de sinistres totale afin de pouvoir obtenir le résultat
du régime. Les provisions pour sinistres à payer (PSAP) permettent de compléter les
prestations déjà réglées avec celles non encore connues afin de reconstituer une période de
survenance complète.

1.2.6.2. Aspect légal


Afin d’assurer le règlement intégral des engagements pris envers les assurés, le Code des
assurances, dans l’article R. 331-1, prévoit que les compagnies d’assurance doivent constituer
des « provisions techniques suffisantes pour le règlement intégral de leurs engagements vis-
à-vis des assurés ou bénéficiaires de contrats ». Celles-ci doivent être calculées par exercice
de survenance (art. R.331-15), « sans déduction des réassurances cédées à des entreprises
agréées ou non », c'est-à-dire que l’assureur doit constituer l’ensemble des provisions dont il
est responsable.

1.2.6.3. Détermination des PSAP


Trois types de méthodes sont utilisables pour calculer les PSAP : des méthodes dossier par
dossier, des méthodes déterministes et des méthodes stochastiques.

En assurance santé, la typologie de la charge de sinistres (règlements rapides de nombreux


sinistres aux coûts individuels peu élevés) permet d’utiliser des méthodes statistiques -
déterministes ou stochastiques - en remplacement de l'évaluation dossier à dossier, ce qui a
pour but d’alléger la tâche des services de gestion.

Les techniques les plus couramment utilisées agrègent les données par année de survenance
et délai de règlement. Elles reposent sur l’hypothèse que les remboursements de l’assureur
suivent un rythme constant et que celui-ci, exprimé en pourcentage de la charge finale de
sinistres, est stable d'un exercice de survenance à l'autre. Ainsi, les remboursements déjà
effectués permettent de faire une évaluation de la charge de sinistres restant à payer : on
reproduit pour l’exercice actuel le comportement observé en termes de règlements durant
les exercices passés. On évalue ainsi le montant des provisions nécessaires pour couvrir les
règlements futurs à partir de l’expérience.

Différentes techniques déterministes de calculs des PSAP existent, mais l’une d’entre elles est
de loin la plus utilisée en France du fait de sa simplicité d’utilisation : la méthode de Chain
Ladder, qui est présentée ci-dessous. La méthode d’évaluation utilisée par Gras Savoye, dite
« du cadencement », est également décrite dans la suite de ce paragraphe. Enfin, nous
évoquerons brièvement les méthodes stochastiques.

- 56 -
1.2.6.4. Méthode de Chain Ladder

1.2.6.4.1. Présentation
La méthode de Chain Ladder s’applique généralement sur le triangle de liquidation des
paiements cumulés. Dans cette présentation, nous noterons C i , j le montant des paiements
cumulés avec i un indice représentant l’exercice de survenance et j un indice représentant le
délai de règlement.

On représente un triangle de liquidation comme suit.

Figure 28 : Formalisation du triangle de liquidation

Délais de règlement (mois)


1 2 … n-1 n
Exercice de survenance
1 C 1,1 C 1,2 C 1,n-1 C 1,n
2 C 2,1 C 2,2 C 2,n-1

n-1 C n-1,1 C n-1,2
n C n,1

La méthode de Chain Ladder permet d’estimer la partie inférieure du triangle de liquidation


non encore connue et donc de déterminer les réserves à constituer.

L’objectif est de déterminer pour chaque mois de règlement un coefficient de passage fj


indépendant de i (hypothèse du modèle, l’année de survenance n’influence pas le délai de
paiement) tel que Ci, j +1= f jCi, j .

On estime pour 1 ≤ j ≤ n − 1 le coefficient de passage par :

n− j

^ ∑C i , j +1
fj = i =1
n− j

∑C
i =1
i, j

On obtient alors une estimation de la partie inférieure du triangle de liquidation :

^ j −1 ^
C i , j = C i ,n −i +1 * ∏
h = n −i +1
f h pour i+j > n+1

Une fois le triangle complété, on détermine le montant de la provision totale (R), comme la
différence entre les montants estimés par Chain Ladder et les montants connus :
n ^
R = ∑ C i , n − Ci , n +1−i
i =1

- 57 -
La méthode de Chain Ladder est basée sur l’hypothèse de constance des règlements. Il s’agit
donc de vérifier soigneusement cette hypothèse avant de commencer l’étude.
Par ailleurs, pour un degré plus important de fiabilité, la méthode de Chain Ladder doit
s’utiliser par poste : en effet, le rythme de règlement n’est pas le même pour des prestations
dont le traitement est automatisé donc rapide (tiers payant en pharmacie) que pour
l’hospitalisation, où le traitement est manuel du fait de coûts plus importants.
1.2.6.4.2. Application dans un cas standard
L’objectif de cet exemple est d’appliquer la méthode de Chain Ladder dans un cas standard.
Les règlements s’effectuant sur deux ans en assurance santé, nous avons choisi de présenter
un cas plus simple où les règlements se liquident sur sept mois.

Figure 29 : Exemple de triangle de liquidation

Exercice de survenance 1 2 3 4 5 6 7
2004 1 052 084 2 394 351 3 220 181 3 828 910 4 272 064 4 499 869 4 884 946
2005 1 437 861 3 055 305 4 354 152 5 154 620 5 567 760 5 924 324
2006 1 383 336 3 102 326 4 256 507 4 903 855 5 286 331
2007 1 623 697 3 417 621 4 717 319 5 429 646
2008 2 717 299 5 529 642 7 284 399
2009 2 455 179 5 018 357
2010 2 716 249
Coefficient de passage 2,11047 1,36192 1,16732 1,08920 1,05939 1,08558 -

Nous observons que la survenance 2004 est entièrement connue. Si nous représentions par
l’intermédiaire d’une courbe la charge de sinistres cumulée, nous observerions qu’elle
devient de plus en plus concave car les paiements augmentent de moins en moins.
On estime alors les montants inconnus grâce aux coefficients de passage et à la partie connue
du triangle de liquidation :

Figure 30 : Estimation des montants inconnus du triangle de liquidation

Exercice de survenance 1 2 3 4 5 6 7
2004 1 052 084 2 394 351 3 220 181 3 828 910 4 272 064 4 499 869 4 884 946
2005 1 437 861 3 055 305 4 354 152 5 154 620 5 567 760 5 924 324 6 431 299
2006 1 383 336 3 102 326 4 256 507 4 903 855 5 286 331 5 600 276 6 079 520
2007 1 623 697 3 417 621 4 717 319 5 429 646 5 913 977 6 265 197 6 801 342
2008 2 717 299 5 529 642 7 284 399 8 503 240 9 261 739 9 811 776 10 651 420
2009 2 455 179 5 018 357 6 834 597 7 978 176 8 689 838 9 205 911 9 993 709
2010 2 716 249 5 732 571 7 807 299 9 113 632 9 926 578 10 516 099 11 416 016

On détermine enfin le montant des réserves à constituer pour chaque exercice de


survenance :
Figure 31 : Montant des réserves par exercice de survenance

Exercice de survenance Réserve


2004 0€
2005 506 975 €
2006 793 190 €
2007 1 371 696 €
2008 3 367 021 €
2009 4 975 351 €
2010 8 699 767 €
Réserve totale 19 713 999 €

Le montant total des réserves à constituer est de 19 173 999 €.

- 58 -
1.2.6.4.3. Application au portefeuille Gras Savoye
Cet exemple étant entièrement factice, nous avons souhaité vérifier si l’hypothèse de
constance des cadences de règlement se vérifiait en pratique. Nous avons donc mis en place
le modèle de Chain Ladder sur le portefeuille Gras Savoye. Pour valider l’hypothèse
simplement, nous pouvons observer si un coefficient de proportionnalité unique existe pour
passer d’une colonne à une autre. Nous avons représenté sur un même graphique les douze
paiements cumulés M+0 et M+1 et ajouté avec l’aide d’Excel une courbe de tendance
linéaire. Le résultat est le suivant :

Figure 32 : Paiements cumulés M+0 et M+1 et droite des moindres carrés

18 000 000 € y = 1,524x + 5E+06


16 000 000 € R² = 0,754

14 000 000 €
12 000 000 €
10 000 000 €
M+1

8 000 000 €
6 000 000 €
4 000 000 €
2 000 000 €
0€
0€ 1 000 000 € 2 000 000 € 3 000 000 € 4 000 000 € 5 000 000 € 6 000 000 € 7 000 000 € 8 000 000 €
M+0

Excel permet de tracer la "Droite des Moindres Carrés", soit la meilleure droite passant au
travers du nuage de points observé.
Le logiciel calcule le coefficient de détermination R², permettant de juger de la qualité de
l’ajustement des données à la droite, qui représente le carré du coefficient de corrélation en
régression linéaire simple. Plus le R² est proche de 1, plus le modèle est pertinent. Dans notre
cas, l’ajustement est bon puisque le R² vaut 75 %.

Nous avons effectué le même travail pour des délais de règlements de M+1 et M+2.
L’ajustement est encore meilleur, le R² valant 95,9 %.

Figure 33 : Paiements cumulés M+1 et M+2 et droite des moindres carrés

25 000 000 €
y = 1,143x + 1E+06
R² = 0,959
20 000 000 €

15 000 000 €
M+2

10 000 000 €

5 000 000 €

0€
0€ 2 000 000 € 4 000 000 € 6 000 000 € 8 000 000 € 10 000 000 €12 000 000 €14 000 000 €16 000 000 €18 000 000 €
M+1

L’hypothèse de constance de la cadence de règlements est donc validée graphiquement.

- 59 -
Enfin, pour vérifier l’intérêt de calculer des PSAP par famille d’actes, nous avons souhaité
calculer les coefficients de passage pour deux familles d’actes dont le type de
remboursement est éloigné : l’hospitalisation et la pharmacie.
L’hospitalisation a pour caractéristique d’être le plus souvent en gestion manuelle puisque le
prix des actes est globalement élevé. En revanche, la pharmacie est très souvent synonyme
de tiers payant, c’est-à-dire de gestion automatisée.

Le tableau suivant présente le pourcentage cumulé des prestations totales réglées par mois
de règlement (exercice 2008 du Portefeuille Gras Savoye)

Figure 34 : Pourcentage des prestations totales réglées par mois de règlement

Délai de règlement M+0 M+1 M+2 M+3 M+4


Pharmacie 52,45% 96,92% 98,27% 98,82% 99,14%
Hospitalisation 7,12% 41,84% 73,81% 86,78% 92,29%

Délai de règlement M+5 M+6 M+7 M+8 M+9


Pharmacie 99,35% 99,49% 99,59% 99,67% 99,74%
Hospitalisation 94,68% 96,31% 97,23% 97,97% 98,45%

Ainsi, alors que 52 % des actes de pharmacie sont réglées en moins d’un mois, seuls 7 % des
actes d’hospitalisation le sont dans le même temps. Ces différentes analyses nous montrent
tout l‘intérêt d’appliquer la méthode de Chain Ladder par poste.

Nous allons maintenant exposer la méthode du cadencement, utilisée par Gras Savoye.

1.2.6.5. Méthode du cadencement


La méthode du cadencement est appliquée chaque année au portefeuille Gras Savoye. Nous
allons présenter son fonctionnement à l’aide d’un exemple.

En assurance santé, il est d’usage de réaliser, au cours d’un exercice, un compte de résultats
prévisionnel permettant de donner une tendance des dépenses pour l’année. Ainsi, Gras
Savoye détermine des taux de PSAP, permettant, chaque mois, d’extrapoler les dépenses
constatées à l’exercice dans son ensemble. Dans cet exemple, nous cherchons à déterminer
le taux de PSAP à fin septembre, c'est-à-dire le montant des prestations à ajouter aux
prestations déjà versées à cette date pour reconstituer toutes les dépenses afférentes à
l’exercice de survenance en cours.

Les taux de PSAP sont calculés en reproduisant les cadences de règlement du portefeuille
Gras Savoye.

- 60 -
La première étape consiste à croiser mois de survenance et mois de règlement pour une
année de survenance passée entièrement liquidée (par exemple, en 2011, nous utilisons
l’exercice de survenance 2008) :
Figure 35 : Règlements effectués par Gras Savoye au titre de l’exercice 2008 par mois de survenance et mois
de règlement
Mois de Mois de
Mois de règlement (2008) règlement règlement
(2009) (2010)
Janvier Février Mars Avril Mai Juin Juillet Août Septembre Octobre Novembre Décembre … …
Janvier 5 556 8 160 3 091 1 808 833 689 489 563 344 243 14 66 … …
Mois de survenance (2008)

Février 5 294 7 472 3 517 1 086 626 487 192 255 121 99 68 … …
Mars 4 701 8 580 2 874 1 424 757 279 262 152 109 94 … …
Avril 5 881 7 491 3 663 1 629 589 354 243 160 151 … …
Mai 4 468 8 192 3 634 1 119 574 337 207 201 … …
Juin 5 287 9 597 2 943 1 314 657 324 292 … …
Juillet 6 457 7 427 3 066 1 189 562 399 … …
Août 3 025 5 488 1 675 608 387 … …
Septembre 6 144 8 514 2 535 1 300 … …
Octobre 7 127 8 121 3 591 … …
Novembre 4 859 8 834 … …
Décembre 6 971 … …

Le taux de PSAP est obtenu en rapportant les prestations non encore réglées au total à la
date d’arrêt pour la période de survenance considérée.

Dans l’exemple ci-dessous la période à reconstituer est une année de survenance et la date
d’arrêt correspond au 30 septembre de cette même année (soit toutes les prestations payées
jusqu’à cette date).

On indique avec la couleur marron les règlements connus, et avec la couleur bleu ce qui est
inconnu à fin septembre.
Figure 36 : Règlements effectués par Gras Savoye au titre de l’exercice 2008 connus et inconnus à fin
septembre 2008 par mois de survenance et mois de règlement
Mois de Mois de
Mois de règlement (2008) règlement règlement
(2009) (2010)
Janvier Février Mars Avril Mai Juin Juillet Août Septembre Octobre Novembre Décembre … …
Janvier 5 556 8 160 3 091 1 808 833 689 489 563 344 243 14 66 … …
Mois de survenance (2008)

Février 5 294 7 472 3 517 1 086 626 487 192 255 121 99 68 … …
Mars 4 701 8 580 2 874 1 424 757 279 262 152 109 94 … …
Avril 5 881 7 491 3 663 1 629 589 354 243 160 151 … …
Mai 4 468 8 192 3 634 1 119 574 337 207 201 … …
Juin 5 287 9 597 2 943 1 314 657 324 292 … …
Juillet 6 457 7 427 3 066 1 189 562 399 … …
Août 3 025 5 488 1 675 608 387 … …
Septembre 6 144 8 514 2 535 1 300 … …
Octobre 7 127 8 121 3 591 … …
Novembre 4 859 8 834 … …
Décembre 6 971 … …

On calcule alors le taux de PSAP comme la somme des prestations non encore payées à fin
septembre 2008 au titre de l’exercice de survenance 2008 (en bleu) divisée par la somme des
prestations payées entre janvier et septembre 2008 au titre de l’exercice de survenance 2008
(en marron). Le résultat de ce calcul indique que les prestations de l’exercice 2008 non
encore réglées à fin septembre 2008 représentaient 61,4 % des prestations versées entre
janvier et septembre 2008 au titre de l’exercice de survenance 2008.

Le montant des prestations manquantes à fin septembre correspond d’une part aux mois non
encore connus (octobre, novembre, décembre), mais également aux prestations non encore
payées pour les mois de janvier à septembre.

Ainsi, pour reconstituer l’exercice de survenance 2010 avec des données arrêtées à fin
septembre 2010, il faut rajouter 61,4 % de PSAP.

- 61 -
Avec 100 000 € de prestations versées au 30 septembre 2010, le montant des PSAP serait de :
61,4 % × 100 000 € = 61 400 €.
L’estimation du montant total des prestations réglées pour l’exercice 2010 serait de :
100 000 € + 61 400 €, soit 161 400 €.

1.2.6.6. Recommandations
Dans certains cas, les taux de PSAP classiques ne sont pas adaptés :
Une date d’effet de contrat en cours d’année (exercice tronqué),
Une forte variation des effectifs (entrée ou sortie d’entités, par exemple),
Reconstituer une période de survenance autre qu’une année (un semestre, par
exemple),
Une population expatriée (les taux de PSAP sont généralement plus élevés).

1.2.6.7. Méthodes stochastiques


Les méthodes stochastiques d’évaluation des PSAP sont moins largement répandues. Leur
principal atout est de permettre l’évaluation de la sinistralité d’exercices futurs par
l’utilisation de méthodes de Monte Carlo. Elles permettent également l’évaluation de la
variabilité de la provision obtenue à l’aide du modèle et de construire des intervalles de
confiance. Dans ce document, nous avons choisi de ne pas développer le fonctionnement de
ces méthodes. En effet, étant donnée la très courte durée des engagements pris par
l’assureur pour couvrir le risque santé, la liquidation rapide des provisions mathématiques et
leur importance relative (à la fin d’un exercice de survenance, les provisions techniques
représentent environ 16 % de la charge de sinistres finale), l’utilisation de méthodes
stochastiques nous parait superflue. Les méthodes déterministes standards, comme Chain
Ladder, largement utilisées par les assureurs en France, nous semblent suffisantes pour une
évaluation efficace des provisions pour sinistres à payer.

Conclusion
Dans cette première partie, nous avons vu que la Sécurité sociale avait pour fondement la
protection des individus contre quatre risques majeurs : la maladie, les accidents du travail et
les maladies professionnelles, la vieillesse et le veuvage, et la famille. Son financement est
principalement assuré par des cotisations sociales assises sur le travail, contenant une part
salariale et une part patronale. Depuis sa création en 1945 et jusqu’à nos jours, de nombreux
plans visant à la réformer se sont succédés, laissant une part croissante de son financement
aux organismes complémentaires et aux ménages.
Les contrats complémentaires de type collectif bénéficient de nombreux avantages comme la
mutualisation des risques entre les différents bénéficiaires ce qui permet de lutter contre
l’antisélection, une situation d’asymétrie d’informations où l’assuré possède plus
d’informations sur son risque que l’assureur. Pour les entreprises comme pour les salariés,
les contrats complémentaires de type collectif offrent de nombreux avantages fiscaux et
sociaux.
Le cadre de l’étude étant posé, nous pouvons désormais nous intéresser plus longuement aux
déterminants des dépenses de santé.

- 62 -
Chapitre 2 :
Les déterminants
des dépenses de santé

- 63 -
Introduction
L’argument du vieillissement de la population est couramment utilisé pour expliquer la
progression continue des dépenses de santé. Après avoir présenté la structure des
remboursements complémentaires par âge, nous mènerons une étude plus précise de
l’influence de cette variable à l’aide d’une analyse en composantes principales. Nous verrons,
dans la suite de ce second chapitre, quel est le rôle de l’offre de soins dans l’augmentation
des dépenses par âge.

Nous nous intéresserons également à l’influence d’autres variables démographiques sur la


consommation de soins : le sexe, la localisation géographique, la composition familiale, le
collège, le secteur d’activité et l’état de santé.

Enfin, nous analyserons à l’aide d’exemples l’impact sur les dépenses de santé de variables
non démographiques telles que le niveau de gamme ou la situation économique et nous
verrons quelles sont les caractéristiques des paiements réalisés par tiers payant.

Dans ce chapitre, nous ne travaillerons que sur les individus résidant en France
métropolitaine. Concrètement, notre base de données intègre les remboursements effectués
pour les français de l’étranger. Le protocole de gestion de ceux-ci étant spécifique, nous
avons choisi d’ôter toutes les dépenses et la démographie afférentes à ce périmètre.

2.1. Les déterminants démographiques


2.1.1. L’âge
Si l’on présente régulièrement le vieillissement de la population comme une des principales
causes de l’augmentation des dépenses de santé, nous avons voulu savoir quel rôle ce
facteur jouait exactement dans l’évolution de la consommation médicale. Cette partie
cherche à mettre en évidence un lien éventuel entre âge et dépenses de santé, et à analyser
l’évolution des besoins médicaux au cours de la vie. Nous chercherons principalement à
illustrer deux effets : un effet d’âge et un effet vieillissement de la population.

Préalable : la méthode de Whittaker-Henderson


Les courbes brutes représentant le montant des dépenses de santé par âge font apparaître
des irrégularités liées à l’imperfection des données qui peuvent être gommées par
l’utilisation de méthodes de lissage. Plus particulièrement, la méthode qui sera utilisée ici est
celle de Whittaker-Henderson (initiée en 1923 par Whittaker et enrichie en 1924 par
Henderson), une méthode non-paramétrique utilisée par le Bureau commun des assurances
collectives (BCAC) pour le lissage des barèmes de provisions mathématiques en incapacité-
invalidité. Cette méthode qui associe à la fois un critère de fidélité aux données brutes et un
critère de régularité des données lissées permet de trouver les valeurs qui minimisent une
combinaison linéaire de ces deux critères grâce à deux paramètres h et z entiers positifs.
L’annexe 3 propose une description plus avancée de cette méthode de lissage.

- 64 -
2.1.1.1. Des remboursements complémentaires qui progressent avec l’âge
Pour présenter l’évolution des remboursements de la complémentaire avec l’âge des assurés,
on calcule le coût moyen du risque pour chaque âge en rapportant la somme des prestations
versées par l’organisme complémentaire à l’effectif sous risque. Le graphique suivant
représente son évolution, de la naissance à 79 ans. Après cet âge, les effectifs de notre
portefeuille deviennent trop faibles (moins de 500 assurés pour chaque classe) pour que la
représentation soit pertinente.
On lisse les courbes obtenues sur l’ensemble des bénéficiaires des contrats frais de santé
avec la méthode de Whittaker-Henderson (paramètre h=30).

Figure 37 : Remboursements complémentaires moyens par âge

1 000 €
900 €
800 €
700 €
600 €
500 €
400 €
300 €
200 €
100 €
0€
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75
Age

Série brute Série lissée (h=30)

Après de fortes dépenses à la naissance, cette courbe met en évidence une progression des
remboursements complémentaires avec l’âge : entre la naissance et 79 ans, les
remboursements de la complémentaire progressent en moyenne de 2 % par an. Cependant,
cette statistique cache des disparités :
Les remboursements complémentaires atteignent 429 € à la naissance et chutent
pendant 6 ans (148 € à cet âge),
Ils s’élèvent à 349 € à 15 ans, durant l’adolescence, avant de décroitre jusqu’à 21 ans
(197 €),
Entre 22 ans (317 €) et 33 ans (379 €), les remboursements complémentaires
augmentent à un rythme soutenu de 6 % par an,
Les prestations versées par l’organisme complémentaire se stabilisent alors jusqu’à
l’âge 42 ans (391 € en moyenne par an),
Entre 43 ans et 61 ans, les remboursements augmentent fortement (+3 % en
moyenne par an) pour atteindre 654 € à 61 ans,
Enfin, les remboursements de l’organisme complémentaire à destination des assurés
diminuent légèrement jusqu’à l’âge de 70 ans (679 €), puis suivent une tendance
haussière jusqu’à 79 ans (903 €). A partir de 65 ans, l’augmentation de la dispersion
visible sur la série brute s’explique par les faibles effectifs qui peuplent ces âges.

- 65 -
Ce graphique démontre bien l’existence d’une relation entre âge et dépenses de santé avec
la présence de plusieurs périodes charnières comme l’adolescence. Nous allons réaliser le
même type de représentations mais cette fois-ci par famille d’actes afin de déterminer si le
recours à certains types de soins est caractéristique de périodes particulières de la vie.

2.1.1.2. Des besoins qui changent avec l’âge


Nous avons représenté ci-dessous les remboursements complémentaires moyens par âge et
par famille d’actes entre 0 et 79 ans. Les courbes sont lissées avec la méthode de Whittaker-
Henderson avec le paramètre h=30.
Figure 38 : Remboursements complémentaires moyens par famille d’actes et par âge

Hospitalisation Consultations, Visites


300 € 120 €

250 € 100 €

200 € 80 €

150 € 60 €

100 € 40 €

50 € 20 €

0€ 0€
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75
Age Age
Série brute Série lissée (h=30) Série brute Série lissée (h=30)

Médecine courante Pharmacie


160 € 250 €
140 €
200 €
120 €
100 € 150 €
80 €
60 € 100 €

40 €
50 €
20 €
0€ 0€
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75
Age Age
Série brute Série lissée (h=30) Série brute Série lissée (h=30)

Dentaire Optique
250 € 180 €
160 €
200 € 140 €
120 €
150 € 100 €
80 €
100 €
60 €
40 €
50 €
20 €
0€ 0€
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75
Age Age
Série brute Série lissée (h=30) Série brute Série lissée (h=30)
Autres postes
50 €
45 €
40 €
35 €
30 €
25 €
20 €
15 €
10 €
5€
0€
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75
Age
Série brute Série lissée (h=30)

- 66 -
2.1.1.2.1. Hospitalisation
Même si les remboursements moyens d’hospitalisation du portefeuille Gras Savoye
progressent globalement avec l’âge, on distingue une baisse notable de ceux-ci entre 0 et 3
ans, ce qui s’explique par la fin progressive des soins néonatals. L’hospitalisation ne nécessite
qu’un faible financement par les régimes complémentaires entre 4 et 40 ans, mais connait
une progression soutenue à partir de cet âge et jusqu’à 79 ans (+7 % en moyenne par an).
Pire, entre 59 et 79 ans, les remboursements liés à l’hospitalisation sont multipliées par trois
pour atteindre en moyenne 277 € à 79 ans. L’hospitalisation est donc un risque qui sollicite
fortement le régime complémentaire pour les nouveaux nés et les personnes les plus âgées.
2.1.1.2.2. Consultations, Visites
Le cycle des remboursements liés aux consultations et visites peut être décomposé en trois
phases :
Des remboursements élevés durant les premières années de la vie, notamment pour
le poste « spécialistes » (pédiatres) mais en forte diminution jusqu’à l’âge de 10 ans,
Une progression importante des remboursements complémentaires entre 24 et 34
ans tant pour les généralistes que les spécialistes,
Enfin, une augmentation plus linéaire jusqu’à 79 ans (75 €).

Comme pour l’hospitalisation, le régime complémentaire est fortement sollicité durant les
premières années de la vie et à partir de 60 ans.
2.1.1.2.3. Médecine courante
La représentation des remboursements liés à la médecine courante est proche de celle
observée pour les consultations et visites. On constate notamment une baisse sensible des
remboursements entre la naissance (poids important des auxiliaires médicaux) et l’âge de 3
ans.
Entre 21 et 31 ans, l’augmentation des dépenses de 108 % en 10 ans est due à la fois aux
auxiliaires médicaux et aux actes de radiologie et d’analyses, tout comme le doublement des
remboursements entre 55 ans (64 €) et 79 ans (136 €).
2.1.1.2.4. Pharmacie
Les remboursements liés à la pharmacie sont importants à la naissance (131 €) puis chutent
jusqu’à 8 ans (22 €). Ils progressent par la suite à un rythme soutenu jusqu’à 80 ans,
l’évolution étant cependant plus marquée à partir de 50 ans (63 €) et jusqu’à 79 ans (206 €).
Là encore, le régime complémentaire intervient essentiellement pour les nouveaux nés et les
personnes âgées.
2.1.1.2.5. Dentaire
Ce graphique présente une allure différente des représentations précédentes. Les
remboursements liés au dentaire sont faibles jusqu’à l’âge de 7 ans (2 € par an) mais
progressent très fortement jusqu’à 15 ans, où ils sont les plus importants du cycle de la vie
(193 €). Cette hausse des remboursements à l’adolescence est à attribuer majoritairement à
l’orthodontie.
Enfin, la progression des remboursements entre 22 ans et 62 ans est essentiellement due au
recours à la prothèse dentaire, même si les soins dentaires participent à l’augmentation des
- 67 -
remboursements.
Le rôle de la complémentaire santé est donc majeur à l’adolescence et croissant entre 20 et
60 ans.
2.1.1.2.6. Optique
Les remboursements liés à l’optique sont à mettre en corrélation avec l’évolution des défauts
visuels au cours de la vie. Nous constatons une forte augmentation des remboursements à
l’adolescence, liée à l’apparition de la myopie, puis, entre 40 et 48 ans (croissance de 8 % par
an des remboursements), s’expliquant par l’achat de nouveaux équipements adaptés au
changement de défaut visuel (presbytie) : les verres progressifs, plus chers, remplacent les
verres simples.
Enfin, entre 60 et 70 ans, les remboursements de la complémentaire sont divisés par deux,
cette chute se poursuivant jusqu’à 79 ans.
Les besoins des assurés en optique sont forts à l’adolescence et entre 40 et 60 ans.
2.1.1.2.7. Autres postes
Entre 20 et 40 ans, la croissance des remboursements liés à cette famille d’actes est
fortement liée aux prestations versées sous forme de forfait au titre de la maternité. A partir
de 50 ans, ce sont les prothèses médicales, notamment auditives, qui donnent à la courbe
une tendance haussière mais très erratique à partir de 60 ans.
2.1.1.2.8. Synthèse
Afin de synthétiser ces différentes représentations, nous avons construit un graphique
représentant le poids de chaque famille d’actes dans les prestations totales versées.

Figure 39 : Poids des différentes familles d’actes dans les remboursements complémentaires totaux par âge

100%

90%

80%

70%

60% Divers
Optique
50% Dentaire
Pharmacie
40% Médecine courante
Consultations, Visites
30% Hospitalisation

20%

10%

0%
C0-4 C5-9 C9-14 C15-19 C20-24 C25-29 C30-34 C35-39 C40-44 C45-49 C50-54 C55-59 C60-64 C65-69 C70-74 C75-79

Classes d'âge

Comme le montre ce graphique, les besoins des individus évoluent avec l’âge. Ainsi, le
vieillissement de la population, dont un des facteurs est l’accroissement de la durée de vie,
devrait entrainer un changement de la structure des remboursements de la complémentaire,

- 68 -
notamment avec la part plus importante de l’hospitalisation, de la pharmacie et de la
médecine courante alors que les remboursements au titre du dentaire, de l’optique et des
consultations et visites devraient perdurer à un niveau stable voire diminuer.

2.1.1.3. Analyse en composantes principales (ACP)


Afin de vérifier et d’étayer les résultats obtenus dans la première partie visant à mettre en
évidence les liens existants entre âge et dépenses de santé, nous avons utilisé une technique
d’analyse des données, l’analyse en composantes principales, sur les remboursements
complémentaires.
2.1.1.3.1. Présentation
Dans le paragraphe précédent, nous avons étudié le lien entre âge et remboursements de
l’organisme complémentaire pour chacune des sept familles d’actes à l’aide de techniques de
statistiques descriptives. Nous avons souhaité utiliser dans cette seconde partie une autre
méthode, l’analyse en composantes principales, discipline de l’analyse des données,
permettant de dégager efficacement toute l’information à retenir d’un jeu de données. En
effet, s’il est facile de visualiser la proximité entre les individus dans un tableau qui ne
comporte qu’un très faible nombre de variables, ce travail se complique lorsque leur nombre
augmente.
L’ACP permet de synthétiser toute l’information contenue dans un tableau de données où
différentes variables sont mesurées pour un ensemble d’individus. Elle se base sur un tableau
de données de dimension (n x p) (où n représente le nombre d’individus et p le nombre de
variables exclusivement quantitatives). Son principe est de transformer les variables
corrélées en de nouvelles variables indépendantes les unes des autres (les composantes
principales, combinaisons linéaires des variables originales) et de synthétiser l’information
dans un sous espace de dimension inférieure à celui d’origine. A l’issue de cette étape, les
données pourront alors être projetées dans un espace de dimension 2 ou 3, permettant une
visualisation rapide de leur typologie.

Bien sûr, la création de ces nouvelles variables s’accompagne d’une perte d’information qu’il
convient de limiter le plus possible pour éviter les interprétations erronées. Pour la mesurer,
on utilise la notion d’inertie, qui correspond à la dispersion totale du nuage : plus l’inertie est
forte, plus la perte d’information est minime.

L’analyse en composantes principales est particulièrement adaptée à notre besoin, puisque


notre tableau de données comporte un nombre important de variables et d’individus. Cette
technique a été développée sous l’impulsion d’Hotelling dans les années 1930, mais son
introduction est à attribuer à Karl Pearson suite à ses travaux sur la régression et les
corrélations entre différentes variables qui remontent au début du 20ème siècle.

- 69 -
2.1.1.3.2. Principe
Les observations de p variables mesurées sur n individus sont contenues dans un tableau à n
lignes et p colonnes.
Nous notons xi j la mesure de la variable X j pour l’individu i. De même, nous identifions les
mesures relatives à l’individu i au vecteur ei à p composantes e'i = ( xi1 ...xip )
p
X1 X j
X
 x11 ... x1j x1p 
 
X
n  ... ... ... ... 
(n,p)  xi1 ... xij xip  Individu e'i
 1 
 xn ... xnj xnp 

p
Dans cette configuration, chaque individu est un élément de R P et chaque variable un
élément de R n . On peut donc associer à chaque individu un point dans R P , l’espace des
individus. Cependant, une visualisation de cet espace est impossible pour p>3.

L’objectif de l’analyse en composantes principales est de définir k nouvelles variables


combinaisons linéaires des p variables originales, afin d’obtenir une représentation des n
individus dans un sous espace de R P , noté Fk , avec k le plus faible possible mais choisi de
telle façon à limiter la perte d’informations : la somme des carrés des distances des individus
à Fk doit être minimale - le nuage projeté doit donc avoir une inertie maximale sur le sous
espace Fk . On notera les k nouvelles variables les composantes principales, les axes qu’elles
déterminent seront appelés axes principaux et les formes linéaires associées facteurs
principaux.
2.1.1.3.3. Présentation des données
Les variables mesurées sont les remboursements complémentaires annuels moyens pour les
cinq principales familles d’actes (hospitalisation, honoraires, pharmacie, dentaire et optique)
ventilés par âge, de 0 à 79 ans, qui représentent les 80 individus. Les données sont alors
présentées sous la forme d’une matrice à n=80 lignes et p=5 variables. Si auparavant, nous
distinguions les « consultations / visites » de la « médecine courante », nous avons choisi,
dans un premier temps, de les regrouper au sein de la famille « honoraires » afin de faciliter
cette approche en utilisant un faible nombre de variables. Néanmoins, nous reviendrons au
cas standard à la fin de cette partie. Enfin, nous excluons du périmètre les familles d’actes
« autres postes » qui, après étude, apparait être très mal représentée sur les axes principaux.

Nous introduisons à présent la matrice des poids wi notée W permettant d’affecter à chaque
individu un poids différent. En effet, le regroupement des individus par âge laisse entrevoir
des différences notables d’effectifs entre les classes. Il est donc utile de pondérer les
données afin de corriger ces déséquilibres. Nous affecterons à l’individu i un poids wi tel que

- 70 -
80
∀i = 1,...,80 : wi > 0 et ∑w
i =1
i = 1 . La matrice W prend alors la forme d’une matrice

diagonale de taille n=80 :

 w1 0
 
W
n  
(n,n)  
wi
 
 0 wn 

n
On pose g le centre de gravité défini comme g=X’W1 avec 1 le vecteur unitaire de dimension
n.
2.1.1.3.4. Matrice de variance-covariance
80
On définit la matrice de variance-covariance V comme V=X’WX-gg’= ∑ wi ei e'i − gg ' . Voici la
i =1

matrice de variance-covariance calculée sur les données du portefeuille Gras Savoye :

Figure 40 : Matrice de variance-covariance

Famille Hospitalisation Honoraires Pharmacie Dentaire Optique


Hospitalisation 689,60 612,23 735,97 509,91 643,80
Honoraires 612,23 735,38 742,72 417,39 593,46
Pharmacie 735,97 742,72 952,63 501,74 573,27
Dentaire 509,91 417,39 501,74 2091,45 1091,21
Optique 643,80 593,46 573,27 1091,21 1771,10

Cette matrice symétrique présente les covariances des variables prises deux à deux et en
diagonale la variance constatée sur chaque famille d’actes, qui permet de mesurer la
dispersion des données. La covariance permet de mesurer la liaison linéaire existant entre
deux variables quantitatives : une covariance égale à 0 signifie que les deux variables sont
linéairement indépendantes, mais la réciproque est fausse. Ainsi, une covariance positive
signifie que deux variables évoluent dans le même sens et une covariance négative indique
une évolution dans le sens contraire.

Nous ne détectons aucune covariance négative, toutes les variables évoluent donc dans le
même sens. Néanmoins, les variances des différentes familles d’actes sont parfois très
éloignées, d’un facteur 1 à 3 entre l’hospitalisation et l’optique.

Nous avons dès lors choisi de travailler sur des données centrées réduites afin de limiter
l’impact des variables ayant une forte variance sur le nuage de point. La comparaison entre
les différentes variables et leur représentation sur les différents axes factoriels est facilitée
puisque la distance entre chaque individu ne dépend plus du niveau quantitatif de chaque
variable : cette opération consiste simplement en un changement d’unité.

- 71 -
Le tableau des données centrées réduites, noté Z est calculé à partir du tableau des données
centrées Y tel que Y=X-1g’ et de la matrice diagonale des inverses des écarts types E :

1 / s1 0 
 
E
p  
(p,p)  
1 / si
 
 0 1 / s p 

p
On a alors Z=YE.

En centrant et réduisant les données, on « standardise » la covariance, qui devient le


coefficient de corrélation linéaire. Après centrage et réduction, la matrice de variance-
covariance est équivalente à la matrice des corrélations linéaires et chaque variable a une
moyenne nulle et un écart-type égal à un.

2.1.1.3.5. Matrice des corrélations linéaires


On définit R comme R=Z’WZ, la matrice de corrélation linéaire entre les 5 variables prises
deux à deux. La matrice des corrélations linéaires est la suivante :

Figure 41 : Matrice des corrélations linéaires

Famille Hospitalisation Honoraires Pharmacie Dentaire Optique


Hospitalisation 1,00 0,86 0,91 0,42 0,58
Honoraires 0,86 1,00 0,89 0,34 0,52
Pharmacie 0,91 0,89 1,00 0,36 0,44
Dentaire 0,42 0,34 0,36 1,00 0,57
Optique 0,58 0,52 0,44 0,57 1,00

La matrice des corrélations linéaires contient les coefficients de corrélation linéaire pour
chaque couple de variables, tous âges confondus. La corrélation représente l’intensité de la
liaison qui peut exister entre ces variables et est comprise entre -1 et 1. Si deux variables sont
indépendantes, leur corrélation est égale à 0. Un coefficient proche des valeurs extrêmes (-1
et +1) indique une corrélation forte : le coefficient de corrélation vaut 1 dans le cas où l'une
des variables est fonction affine croissante de l'autre variable, et -1 dans le cas où la fonction
affine est décroissante.

La matrice des corrélations permet de distinguer des variables fortement corrélées :


honoraires et hospitalisation, pharmacie et hospitalisation, pharmacie et honoraires. En
revanche, la variable dentaire est peu corrélée avec l’hospitalisation, les honoraires et la
pharmacie.

- 72 -
2.1.1.3.6. Espace des individus

2.1.1.3.6.1. Mesure de la distance entre les individus

Pour mesurer la distance entre deux individus dans l’espace des individus, la forme
quadratique suivante sera utilisée : d ²(ei , e j ) = (ei − e j )' M (ei − e j ) , avec M une matrice
symétrique de taille p définie positive qui sera appelée métrique, dont le rôle est de définir
un produit scalaire et donc des distances entre les individus.

Travailler sur des données réduites revient à choisir comme métrique la matrice diagonale
des inverses des variances, c'est-à-dire la matrice M :

1 / s12 0 
 
M
(p,p) p  
 1 / si2 
 
 0 1 / s 2p 

p
Comme nous l’avons vu auparavant, l’avantage de cette métrique est de ne pas donner plus
d’importance aux variables les plus dispersées en ramenant toutes les variances à 1 : on ne
tiendra compte que des corrélations entre les différentes familles d’actes et pas du niveau
des dépenses constatées sur celles-ci.

2.1.1.3.6.2. Inertie et choix du nombre d’axes

L’inertie est une mesure de la dispersion du nuage de points, c'est-à-dire de l'éloignement


des points par rapport à leur centre de gravité.

On la calcule comme la moyenne pondérée des carrés des distances des points au centre de
n
gravité : I g = ∑ wi (ei − g )' M (ei − g ) soit, en utilisant l’écriture matricielle et dans le cas de
i =1

données centrées réduites, I g = Trace MV=Trace R=p

Dans le cas de données centrées réduites, la variance de chaque variable vaut 1 et l’inertie
totale est alors égale au nombre de variables p : elle ne dépend donc pas des valeurs prises
par les variables.

L’objectif de l’analyse en composantes principales est la recherche d’axes portant le


maximum d’inertie, c'est-à-dire de construire de nouvelles variables de variance maximale.
On réalise un changement de repère dans R P dans le but d’obtenir un système de
représentations où le premier axe apporte le plus possible d’inertie au nuage, le deuxième
axe le plus d’inertie possible non prise en compte par le premier axe et ainsi de suite.

- 73 -
2.1.1.3.6.3. Axes principaux

On appelle axes principaux d’inertie les p vecteurs propres de VM M-normés à 1.


Le sous-espace Fk de dimension k est engendré par les k vecteurs propres de VM associés
aux k plus grandes valeurs propres : le premier axe correspond à la plus grande valeur propre
λ1 , le deuxième axe est celui associé à la deuxième valeur propre λ2 .

2.1.1.3.6.4. Facteurs principaux

On associe à l’axe principal a le facteur principal u=Ma. Comme a est un vecteur propre de
VM, on peut montrer que u est déterminé à partir des vecteurs propres de MV.

2.1.1.3.6.5. Composantes principales

On associe à chaque axe une variable appelée composante principale. La composante c1


contient les coordonnées des projections des individus sur l’axe 1, la composante c 2 contient
les cordonnées des projections des individus sur l’axe 2. Pour obtenir ces coordonnées, on
définit les variables ci à l’aide des facteurs principaux : ci = X u i . Chaque composante
principale est une combinaison linéaire des variables initiales de variance maximale. La
variance d’une composante principale est alors égale à la valeur propre correspondante :
V( ci )= λi . Les composantes principales sont non corrélées deux à deux, les axes associés
étant orthogonaux.

2.1.1.3.6.6. Combien d’axes retenir ?

Les valeurs propres calculées sur le jeu de données sont les suivantes :

Figure 42 : Valeurs propres

F1 F2 F3 F4 F5
3,33 1,16 0,39 0,09 0,03

La variance du premier facteur s’élève donc à 3,33.

Pour mesurer la part d’inertie expliquée par l’axe i et déterminer combien de facteurs retenir,
on utilise le critère suivant, correspondant au degré de reconstitution des carrés des
distances :
λi
λ1 + λ2 + ... + λ p

On calcule cet indicateur pour chacun des p=5 facteurs :

Figure 43 : Variance totale expliquée et cumul

Inertie F1 F2 F3 F4 F5
Pourcentage de variance totale expliquée 0,67 0,23 0,08 0,02 0,01
Cumul 0,66 0,90 0,98 0,99 1,00

- 74 -
Plusieurs solutions existent pour déterminer le nombre d’axes à retenir :
Une représentation du nuage de points semble très satisfaisante en retentant les axes
permettant de conserver 80 % de l’inertie,
Le critère de Kaiser : En ACP centrée réduite, on retient toutes les composantes
principales dont la valeur propre est supérieure à 1,
La méthode du coude : on construit un histogramme de décroissance des valeurs
propres des axes (« Eboulis des valeurs propres » ou « Diagramme des valeurs
propres ») qui permet de mettre en évidence des « sauts ». On retient alors les n
premiers axes précédant le dernier saut. Cette méthode graphique est cependant,
dans certains cas, difficile d’accès, le coude n’étant que peu visible. Nous avons
représenté l’éboulis des valeurs propres dans le cas de notre jeu de données.

Figure 44 : Eboulis des valeurs propres


3.5
3.0
2.5
Valeurs propres

2.0
1.5
1.0
0.5
0.0

1 2 3 4 5

On observe ici un coude au niveau de la seconde valeur propre. De même, en appliquant


strictement le critère de Kaiser, nous devrions retenir deux facteurs. Enfin, nous observons
que deux composantes principales suffisent pour représenter 90 % de l’inertie initiale : le
plan factoriel correspondant révèle donc suffisamment d’informations et nous décidons de
conserver les deux premiers facteurs.

- 75 -
2.1.1.3.6.7. Représentation

La représentation de l’espace des individus permet d’analyser la proximité entre les


différents individus. L’origine des axes correspond à un individu fictif qui aurait pour
remboursements la moyenne des remboursements des 80 individus.

Figure 45 : Espace des individus

d=2

14
15
13

16
53 51504847
5249
54 12
57 4645
60 585655 44
6261
59 43 42
4139 2827
29
30 1726
2524 11
40 3536
38
33
34
37
32
31 1819 10
2321
63 22
20 9
8
64 65 7
6
71 68 66 5
4
67 3

69 2
70
75 72
74 73

77
76 1

78 0
79

Une proximité entre les âges voisins est mise en évidence par cette représentation, ce qui ne
semble pas illogique puisque les dépenses de santé évoluent progressivement avec l’âge.

2.1.1.3.6.8. Contribution absolues des individus aux facteurs

On observe à présent la contribution des différents individus aux axes ce qui aide à
interpréter leur signification : les individus ayant le plus participé à la construction des axes
ont les contributions les plus élevées. Ce tableau est présenté en annexes.
Nous remarquons que la somme des contributions pour chaque colonne vaut bien 100 %.

La contribution permet de mesurer la proximité des individus à l’axe : les individus ayant une
forte contribution sont les plus proches de l’axe et aident donc particulièrement à
l’interprétation. Le nombre d’individus étant important, il est légitime de constater des
contributions individuelles faibles. Pour l’axe 1, les plus fortes contributions absolues sont
observées pour les individus représentant les âges de 3 à 8 ans et de 56 à 65 ans. En
revanche, pour l’axe 2, les plus fortes contributions sont observées pour les âges de 0 à 7 ans
et de 13 à 17 ans.

- 76 -
2.1.1.3.6.9. Qualité de la représentation – Contributions relatives des
individus

Le tableau construit indique les contributions relatives des individus sur les différents axes,
c'est-à-dire la qualité de représentation des différents individus sur le plan principal,
obtenues à l'aide du cosinus de l'angle formé par le plan principal et le vecteur défini par
l'individu ei. Un individu situé sur le plan factoriel a donc un cosinus carré égal à 1, signe que
l'individu est parfaitement représenté par sa projection sur le plan. Ce tableau est présenté
en annexes.

En gardant l’ensemble des composantes, la somme pour chaque ligne vaut 1. Globalement,
tous les individus sont bien représentés sur le plan, sauf ceux âgés de 32 à 40 ans. Il
conviendra de laisser de coté ces individus lors de l’interprétation.
2.1.1.3.7. Espace des variables

2.1.1.3.7.1. Choix d’une métrique

Si dans l’espace des individus nous nous intéressons aux distances, dans l’espace des
variables ce sont les angles qui seront observés.

Pour mesurer la proximité entre les variables, nous devons munir cet espace d’une métrique.

Nous choisissons la matrice diagonale des poids W qui permet d’obtenir les propriétés
suivantes :
le produit scalaire de deux variables centrées est la covariance,
la longueur d'une variable est égale à son écart type,
le cosinus de l'angle entre deux variables est le coefficient de corrélation linéaire.

2.1.1.3.7.2. Représentation

La projection des variables sur un plan factoriel s’effectue à l’aide du cercle de corrélation,
qui permet de déterminer les liens existant entre les différentes variables en observant les
angles. Chaque axe représente une composante principale.

Dans le cas d’une ACP normée, les variables projetées sont représentées dans un cercle de
rayon unité : plus une variable est proche du cercle, meilleure est sa représentation.
Sélectionner les variables bien représentées est primordial : deux variables proches l’une de
l’autre mais éloignées du cercle peuvent être en réalité opposées !

Deux variables proches sont corrélées positivement, et des variables qui s’opposent sont
corrélées négativement. Une absence de corrélation linéaire est représentée par une
orthogonalité.

- 77 -
Figure 46 : Espace des variables

Dentaire

Optique

Hospitalisation

Honoraires
Pharmacie

Globalement, dans le cas de notre jeu de données, toutes les variables sont bien
représentées.
Une composante principale est une combinaison linéaire des variables initiales, elle peut
s’expliquer par les variables d'origine qui contribuent le plus à sa construction, c’est-à-dire les
plus corrélées. L’espace des variables permet de distinguer deux groupes : les honoraires,
l’hospitalisation et la pharmacie, corrélées avec la première composante principale d’une
part, l’optique et le dentaire d’autre part, corrélées avec la seconde composante principale.
Aucune orthogonalité n’est décelée.
Après avoir étudié la représentation des variables sur le premier plan, il est primordial de
s’intéresser aux contributions à la construction des axes.

2.1.1.3.7.3. Contributions absolues des variables aux axes

Le tableau suivant présente les contributions absolues des variables aux différents axes :

Figure 47 : Contributions absolues des variables aux axes

Variable F1 F2
Hospitalisation 26% 4%
Honoraires 24% 9%
Pharmacie 24% 12%
Dentaire 10% 51%
Optique 16% 24%

Les contributions absolues indiquent pour un axe donné, la proportion d’inertie à attribuer à
chaque variable. Les conclusions formulées lors de l’analyse de l’espace des variables sont
confirmées : l’axe 1 correspond aux variables honoraires, hospitalisation et pharmacie
caractéristiques du début et de la fin de vie, tandis que l’axe 2 est fortement influencé par
l’optique et le dentaire, postes fortement sollicités à l’adolescence et à partir de 40 ans.

- 78 -
2.1.1.3.7.4. Qualité de la représentation – Contributions relatives des
variables aux axes

Cette analyse serait biaisée sans l’analyse de la qualité de la représentation, primordiale


avant de tirer toute conclusion. En effet, en ne nous basant que sur le premier plan factoriel,
nous perdons de l’information de manière inhomogène : certaines variables sont plus
touchées que d’autres. Nous calculons pour chaque variable sa contribution relative aux axes,
appelée également cosinus carré. Si la représentation de la variable est parfaite, elle se
confond avec l’axe, rendant l’angle nul, le cosinus carré devenant égal à 1. La somme des
contributions relatives d'une variable sur tous les facteurs est égale à 1.

Figure 48 : Contributions relatives des variables aux axes

Variable F1 F2 Restant
Hospitalisation 89% 93% 7%
Honoraires 82% 91% 9%
Pharmacie 82% 94% 6%
Dentaire 35% 84% 16%
Optique 53% 76% 24%

Les variables ont toutes, globalement, une très bonne qualité de représentation. En ne
retenant que deux axes, on observe que la variable la plus déformée, l’optique a tout de
même 72 % de son information représentée, ce qui demeure être un niveau très élevé. En
revanche, l’hospitalisation est très bien représentée, avec un cosinus carré de 92,2 %.
2.1.1.3.8. Représentation simultanée
Bien que les métriques soient différentes, on cherche à représenter simultanément les
individus et les variables. Le graphique obtenu ne s’interprète donc pas en termes de
proximité entre individus et variables mais plutôt en analysant les directions.

- 79 -
Figure 49 : Représentation simultanée des individus et des variables

Dentaire d=2

Optique

14
15
13
16
50
51 48
47
575553
5249
54 4645
12
60 5856 44
61
6259 4342
41 29
302827
1726
25 11
63 39
403536
38
33
34
37
32
31 242310
18
192221
20 9
8
64 65 76
71 66 5
4
68
Hospitalisation
67 3
69 Honoraires 2
70
75 Pharmacie
72
74 73
77
76 1
78 0
79

Cette représentation nous permet de tirer les conclusions suivantes :


les familles d’actes « honoraires », « hospitalisation » et « pharmacie » semblent
fortement liées et consommées par les individus les plus âgés et dans une moindre
mesure par les individus les plus jeunes de notre population.
Les familles d’actes « dentaire » et « optique » sont fortement liées aux personnes
âgées de 40 à 50 ans et dans une moindre mesure par les adolescents.

On réalise à présent la même représentation en décomposant la variable « honoraires » en


« consultations / visites » et « médecine courante ».

- 80 -
Figure 50 : Représentation simultanée des individus et des variables

Dentaire d=2

Optique

14
15 13

16
4950
48 12
Medecine.courante 60 52
575553
5451 47 45
58
56 46 44 25
1724 11
6159
62 4342 28
29
2726 23 10
63 41 30
4035
38
36
1819219
22
20
39
31
34
32
37
33
8
64 65
71 7
6866
Hospitalisation
6
69 67
5
75 70 4
74 7377 72
76 Pharmacie 3
78
79

1
0
Consultations.Visites

Comme nous l’avions conclu à l’issue de la première partie de l’étude sur l’influence de l’âge,
la « médecine courante » et les « consultations / visites » ne sont pas liées aux mêmes
individus : à la naissance, la famille d’actes la plus sollicitée est celle des « consultations /
visites » alors que la « médecine courante » est caractéristique des personnes âgées
d’environ 60 ans.

2.1.1.4. Remboursements de la Sécurité sociale par âge


Les conclusions précédentes sont à rapprocher des remboursements effectués par la Sécurité
sociale qui joue un rôle majeur dans le financement des dépenses de santé. En effet, il existe
un lien fort entre les remboursements de l’Assurance Maladie et du secteur
complémentaire : les désengagements successifs de la Sécurité sociale ont modifié la
structure du financement de la santé, avec une part grandissante des complémentaires. Nous
avons réalisé le même travail que précédemment, mais cette fois avec les remboursements
moyens de la Sécurité sociale.

- 81 -
Figure 51 : Remboursements moyens de la Sécurité sociale par âge

1 000 €
900 €
800 €
700 €
600 €
500 €
400 €
300 €
200 €
100 €
0€
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75
Age

Série brute Série lissée (h=30)

Ce graphique démontre que les remboursements de la Sécurité sociale sont également une
fonction croissante de l’âge. S’ils n’augmentent que faiblement jusqu’à 70 ans, ils progressent
très fortement entre 70 et 80 ans. En pratique, la hausse des remboursements de la Sécurité
sociale à partir de 70 ans s’explique par le poids très important de l’hospitalisation : cette
famille d’actes correspond aux principales dépenses des personnes âgées, très bien prises en
charge par l’Assurance Maladie. L’incertitude majeure pour l’avenir est de savoir si et
comment la Sécurité sociale va se désengager sur la fin de vie. Chaque décision aura des
conséquences importantes sur l’équilibre des régimes complémentaires dont la participation
au financement des soins pourrait être amenée à progresser fortement.

Enfin, les personnes les plus âgées sont celles qui bénéficient des prestations versées par la
Sécurité sociale les plus importantes (cela peut s’expliquer par le fait que ces individus
doivent faire face à des dépenses plus élevées). En revanche, elles ne financent que très
faiblement le système de santé. La question qui se pose est de savoir si cette situation pourra
perdurer dans le contexte économique difficile, où les ménages actifs sont déjà fortement
sollicités.

2.1.1.1. Le vieillissement de la population


Au cours des paragraphes précédents, nous avons mis en évidence un effet d’âge et plus
particulièrement une augmentation des dépenses de santé des individus au cours de la vie.
Pour un assureur, cet effet n’est pas problématique si la moyenne d’âge des assurés reste
stable au fil du temps. Cependant, nous constatons au niveau national un vieillissement de la
population, c'est-à-dire une augmentation de l’âge moyen des français (et plus largement des
européens), qui est passé de 36,9 ans en 1990 à 40,1 ans en 2010 selon l’INSEE. Ce
phénomène, qui s’explique par une baisse du taux de fécondité, une baisse du taux de
mortalité et une espérance de vie en hausse, devrait donc entraîner une augmentation des
dépenses.

Dans le même temps, les économistes de la santé constatent et prévoient également une
augmentation des dépenses de santé à âge fixe avec le temps. Nous avons représenté sur le
graphique suivant, pour illustrer cet effet, les remboursements complémentaires moyens à
chaque âge, de la naissance à 79 ans, pour les années 2004 et 2010.
- 82 -
Figure 52 : Remboursements complémentaires annuels moyens en 2004 et 2010 par âge (lissage WH)

1 000 €
900 €
800 €
700 €
600 €
500 €
400 €
300 €
200 €
100 €
0€
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75
Age
2004 2010

Le graphique ci-dessus met en évidence une augmentation globale des remboursements


complémentaires par âge entre les exercices 2004 et 2010, sauf entre 20 et 23 ans. Le début
et la fin de vie sont les périodes où ce changement est le plus visible. En effet, les
remboursements de la complémentaire ont progressé de plus de 30 % entre la naissance et
l’âge de 3 ans et de plus de 20 % à partir de 78 ans. Enfin, il est à noter que l’augmentation
des dépenses de santé à âge fixe est modérée par l’amélioration, dans le même temps, de
l’état de santé des individus.

L’effet mis en évidence ci-dessus joue un rôle beaucoup plus important dans l’augmentation
générale des dépenses de santé que le vieillissement de la population, qui est plus progressif.

La suite de cette première partie est consacrée à l’explication des causes de cet effet.

2.1.1.2. Le rôle de l’offre de soins dans l’augmentation des dépenses avec l’âge
Une des spécificités du secteur de la santé est que l’offre de soins entraîne la demande de
soins. En d’autres termes, plus le nombre d’offreurs de soins augmente, plus la demande de
santé est importante. Un exemple typique pour illustrer le rôle de l’offre de soins dans la
détermination des dépenses de santé est celui de l’augmentation du nombre de lits d’un
hôpital, qui entraîne systématiquement une augmentation du nombre d’hospitalisations.
L’augmentation de l’offre de soins a alors une double conséquence : des dépenses de santé
en hausse à chaque âge par rapport au passé car l’offre de soins augmente, mais dont
l’ampleur est plus ou moins importante selon l’âge des assurés. Nous assistons à un
changement dans le temps du profil des dépenses par âge.
2.1.1.2.1. Le progrès technique
De nombreuses études démontrent que les dépenses individuelles de santé augmentent avec
le temps et que cet effet est visible à tout âge : soigner deux individus dans le même état
morbide n’engendre pas le même coût suivant les années. Si la mise en évidence de cet effet
peut s’expliquer par une exigence de qualité en hausse des patients, certains économistes
affirment que le progrès technique serait le facteur principal expliquant cette augmentation.
Le progrès technique représente la mise au point de nouveaux traitements ou de nouveaux
outils permettant de mieux soigner certaines maladies, ou d’en soigner de nouvelles, pour

- 83 -
lesquelles aucune solution n’existait par le passé. Le progrès technique contribue alors à
travers un effet d’offre et un effet de demande à l’augmentation des dépenses de santé :
Effet d’offre : Le progrès technique permettant de traiter des maladies qui ne l’étaient
pas auparavant, l’offre médicale est plus importante que par le passé. Dans le même
temps, la mise au point de nouvelles techniques et de produits plus coûteux, comme
l’imagerie médicale, a contribué à l’augmentation des dépenses de santé. Cependant,
cet effet est contrebalancé par les gains de productivité liés à la mise en place de
nouveaux traitements et cet effet ne participe que peu à la croissance des dépenses
de santé.
Effet de demande : voulant toujours mieux se soigner, les patients s’informent des
nouveaux traitements (qui permettent de gagner en fiabilité et en efficacité) et
émettent une demande de soins, ce qui contribue à la diffusion de ces innovations,
qui vont alors être accessibles à plus de malades. La diffusion de ces nouveaux
traitements participe quant à elle fortement à la croissance des dépenses de santé.

Un exemple simple pour mettre en évidence ces deux effets est l’opération de la cataracte.
La cataracte est l'opacification partielle ou totale du cristallin, lentille convergente située à
l'intérieur de l'œil. Cette opacification est responsable d'une baisse progressive de la vue. Les
malades doivent alors subir une opération consistant à leur enlever le cristallin pour le
remplacer par un cristallin artificiel. Cette opération concerne chaque année 600 000
personnes en France.

Depuis son invention par Franco au 16ème siècle, ce traitement a fait d’énormes progrès.
Pourtant, le coût du traitement n’a que peu évolué entre les années 1960 et les années 2000,
alors que l’opération a notablement progressé en termes d’efficacité. Si les dépenses totales
liées à ce traitement ont augmenté, c’est uniquement à cause de sa plus grande diffusion :
l’opération étant plus simple, elle a pu être réalisée sur des patients dont le défaut visuel est
plus faible qu’auparavant et par un nombre d’ophtalmologistes plus important que par le
passé.

Dans les prochaines années, les innovations médicales devraient continuer à être
nombreuses et si celles-ci concernent principalement les maladies dont la survenance est liée
à l’âge, la modification de la structure des dépenses de santé pourra leur être imputée. En
effet, selon plusieurs études, ce n’est pas le vieillissement de la population en lui-même qui
participera activement à la croissance des dépenses de santé dans les prochaines années,
mais le progrès technique et la diffusion des innovations.

Enfin, il semble opportun de souligner que bien que le progrès technique ait contribué à
l’augmentation des dépenses, il a permis l’amélioration de l’état de santé moyen et participe
donc à l’accroissement de la longévité.
2.1.1.2.2. L’effet de génération
Si les plus jeunes ont été habitués à bénéficier dès leur naissance d’une offre médicale
importante, ce n’est pas le cas des personnes âgées pour qui l’accès aux soins était plus
difficile. Plus que le progrès technique qui n’est pas chiffrable, l’exemple du nombre de
médecins généralistes est frappant : de 59 000 en 1957 il est passé à 174 000 en 1997. Les

- 84 -
nouvelles générations ont donc acquis des réflexes médicaux différents de ceux de leurs
ainés.
L’effet de génération permet d’établir un lien entre l’appartenance à une génération et les
dépenses de santé. Toutes choses égales par ailleurs, d’une génération à l’autre, les dépenses
de santé augmentent, notamment sous l’impulsion du progrès technique qui permet de
soigner d’avantage de maladies, mais dont les traitements sont souvent plus coûteux.

En observant comment chaque génération se comporte face aux dépenses de santé et en


mesurant ces différences, on observe notamment que les plus âgés actuels dépensent plus
que leurs prédécesseurs. Mieux informés sur les innovations médicales, ils recourent aux
soins plus abondamment et précocement que les anciennes générations et sont donc en
meilleure santé. Néanmoins, et malgré l’arrivée progressive de nouvelles générations à des
âges plus avancés, ce qui peut avoir un impact majeur sur la progression des dépenses,
l’impact de l’effet de génération sur la progression des dépenses pourrait être limité dans le
futur du fait de l’amélioration de la santé et de la plus grande diffusion du dépistage.

Certes, les dépenses de santé progressent et changent avec l’âge, mais le vieillissement
n’explique pas seul cette augmentation : les innovations permettent d’apporter de nouveaux
traitements afin de répondre aux exigences grandissantes des patients voulant toujours
mieux se soigner. La maîtrise de ces effets est primordiale pour les régimes
complémentaires et notamment collectifs : l’augmentation récente de l’âge de la retraite
provoquera une augmentation de l’âge moyen des adhérents et donc des dépenses de santé,
alors que dans le même temps, le montant des cotisations se stabilisera.

2.1.2. Le sexe
2.1.2.1. Une sollicitation de la complémentaire supérieure chez les femmes
Entre la naissance et l’âge de 79 ans, les remboursements complémentaires moyens d’une
femme s’élèvent en 2010 à 410 € contre 324 € pour un homme (-21 %). La variable sexe
semble donc jouer un rôle fondamental dans la détermination des dépenses de santé,
puisque nous constatons que les femmes sollicitent bien plus la complémentaire que les
hommes.

La première cause d’explication évidente à ce constat est l’âge, puisque, comme c’est le cas
dans la population française, les femmes de notre portefeuille sont en moyenne plus âgées
que les hommes. L’âge étant un facteur de détermination des dépenses de santé, il participe
à l’écart de dépenses entre les deux sexes.
La seconde explication à apporter concerne la plus grande sollicitation des professionnels de
santé par les femmes, et particulièrement à certains âges : on peut citer notamment un
recours plus fréquent aux spécialistes pour les femmes de 20 à 50 ans (gynéco-obstétrique),
des dépistages plus nombreux (cancer du sein), et une utilisation plus forte de l’imagerie
médicale (mammographie, échographie).
Enfin, cette différence s’explique en partie par une perception différente de l’état de santé,
des études ayant démontré que la morbidité déclarée à état de santé fixe par les femmes

- 85 -
était supérieure à celle des hommes. De même, les femmes déclarent, en moyenne, plus de
maladies que les hommes1.

2.1.2.2. Le test du Khi-deux d’indépendance sur la probabilité de recours aux


soins
On propose de déterminer si le sexe des adhérents joue un rôle quant à la probabilité de
recours aux soins pour les principaux actes : les consultations de généralistes, les
consultations de spécialistes, les prothèses dentaires, les verres, les montures et la chambre
particulière. Pour cela, on utilise un test statistique non-paramétrique, le test du Khi-deux
d’indépendance, qui permet de contrôler l’indépendance de deux caractères dans une
population.
2.1.2.2.1. Méthodologie
Le test du Khi-deux d’indépendance est utilisé lorsqu’on souhaite mesurer le lien existant
entre deux caractères qualitatifs que nous noterons X et Y, prenant respectivement x et y
modalités.

On pose les hypothèses suivantes :


H 0 : Indépendance entre les caractères X et Y
H 1 : Non indépendance entre les caractères X et Y

Le test est appliqué sur un tableau appelé tableau de « contingence », qui recense les
effectifs observés pour les deux caractères observés répartis par modalités.
On note n ij le nombre d’observations où X prend la modalité i et Y la modalité j.

On note également :

y x x y
ni . = ∑ nij ; n. j = ∑ nij ; n = ∑ ∑ nij
j =1 i =1 i =1 j =1

On note pour i=1,...,x et j=1,…,y :

p ij = P[ X = 1, Y = j ] ; pix = P[ X = i ] ; p yj = P[Y = j ] ,

Si l’indépendance entre X et Y est vérifiée, on a :

p ij = p ix . p yj

D’où, en notant t ij l’effectif attendu en cas d’indépendance :


ni . n. j t ij ni . n. j
p ij = x = avec t ij =
n n n n

1
Conseil économique, social et environnemental (2010) La santé des femmes en France

- 86 -
Sous l’hypothèse d’indépendance, la statistique de test est la suivante :
ni. n. j
x y (nij − t ij )² x y ( nij − )²
D² = ∑ ∑ = ∑∑ n
~ χ ² ( x −1)( y −1)
i =1 j =1 tij i =1 j =1
ni . n. j
n
On compare le D² ainsi calculé avec la valeur présente dans la table du Khi-deux. Si le D² est
supérieur à cette valeur, on conclue qu’il existe une liaison statistique significative entre les
deux caractères étudiés. On s’intéresse également à la p-value, qui représente la probabilité
de commettre une erreur en déclarant qu'il existe une différence significative entre les
modalités prises par les deux caractères. Si cette p-valeur est inférieure à un seuil fixe (5 %
est habituellement utilisé), on rejette l’hypothèse nulle et concluons qu’il y a indépendance
statistique entre les deux caractères étudiés dans la population.
2.1.2.2.2. En pratique
Les tests sont effectués sur l’ensemble de la population des adhérents ayant sollicité la
complémentaire au moins une fois au titre de la survenance 2010. Le périmètre sera restreint
aux assurés présents toute l’année pour ne pas fausser la probabilité de consommer pour les
adhérents ayant des périodes d’adhésion plus réduites.

On définit pour chaque poste observé une variable indicatrice CONSULT égale à 1 si au moins
une unité de cet acte a été consommée, 0 sinon. Il convient de préciser que nous aurions pu
réaliser un test similaire non pas sur une variable de type indicatrice mais sur une variable
discrète indiquant le nombre exact d’unités consommées durant l’année. Une telle approche
est techniquement correcte mais difficilement présentable, puisqu’elle devrait être réalisée
pour plusieurs dizaines de modalités, notamment dans le cas des consultations.

Figure 53 : Test du Khi-deux d’indépendance sur la probabilité de recours au soin

Poste Degrés de liberté D² p-valeur


Consultations de généralistes 1 804,57 <0,0001
Consultations de spécialistes 1 19451,08 <0,0001
Prothèses dentaires 1 14,13 0,0002
Verres 1 1030,34 <0,0001
Montures 1 1017,02 <0,0001
Chambres particulières 1 606,35 <0,0001

Les différentes p-valeurs observées étant très faibles, nous concluons qu’il y a bien une
différence significative entre les hommes et les femmes quant à la probabilité de recours aux
soins sur les six postes étudiés.

Comme nous l’avons vu, les dépenses de santé semblent liées à la fois à l’âge et au sexe : les
comportements sont différents au cours de la vie (grossesse,..). Nous avons souhaité illustrer
ces deux effets combinés dans la partie suivante.

- 87 -
2.1.2.3. Une influence du sexe plus ou moins marquée selon l’âge
Figure 54 : Remboursements complémentaires annuels moyens des hommes et des femmes (lissage WH)

1 000 €
900 €
800 €
700 €
600 €
500 €
400 €
300 €
200 €
100 €
0€
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75
Age
Hommes Femmes

Ces courbes, lissées avec la méthode Whittaker-Henderson (h=30), mettent en évidence une
consommation supérieure des femmes, mais cette différence est plus ou moins marquée
suivant l’âge :
Jusqu’à l’âge de 8 ans, les hommes sollicitent en moyenne le régime 30 % de plus que
les femmes,
Le pic de l’adolescence, lié à l’orthodontie, est plus marqué chez les individus de sexe
féminin,
L’écart entre hommes et femmes est plus prononcé de 22 à 42 ans, notamment sous
l’impulsion de la maternité,
De 42 à 63 ans, l’écart entre hommes et femmes se réduit peu à peu, avant de se
creuser jusqu’à 69 ans.
Entre 69 et 71 ans, l’écart hommes femmes est important (-20 %), avant de se
résorber pour atteindre 2 % à 79 ans

2.1.3. La localisation géographique


2.1.3.1. Carte de France des remboursements moyens par bénéficiaire
La zone de résidence est-elle facteur de la sollicitation du régime ? Pour commencer à
répondre à cette question, nous avons représenté, à l’aide d’une carte de France, les
remboursements complémentaires moyens par bénéficiaire et par département observés en
2010 sur le portefeuille Gras Savoye.

- 88 -
Figure 55 : Carte de France des remboursements complémentaires moyens par bénéficiaire

Plusieurs zones se démarquent :


l’Ile-de-France est une région sollicitant fortement les régimes complémentaires, avec
des remboursements moyens par bénéficiaires atteignant 540 € à Paris,
les départements côtiers situés sur la façade méditerranéenne présentent des
remboursements moyens élevés,
les départements hébergeant de grandes agglomérations comme le Rhône (Lyon),
l’Isère (Grenoble) ou le Nord (Lille) font partie des zones où les remboursements
complémentaires moyens sont élevés,
l’Alsace et la Moselle, qui bénéficient historiquement d’un régime différent du régime
Général prenant en charge une plus grande partie des dépenses, sollicitent moins les
régimes que les autres régions frontalières,
l’ouest du pays et le Centre, où les remboursements moyens sont plus faibles.

- 89 -
Ces observations sous-tendent une influence de la région de résidence sur les
remboursements du régime complémentaire. Ils laissent même entrevoir un lien plus fort :
les zones les plus denses (grandes agglomérations) semblent avoir pour point commun des
remboursements élevés. Pour vérifier cette hypothèse, nous avons réparti les bénéficiaires
de notre portefeuille en trois groupes en fonction de leur zone de résidence : l’Ile-de-France,
les grandes agglomérations et la province et calculé les remboursements moyens pour
chaque zone.

Figure 56 : Poids dans la population et remboursements complémentaires moyens des trois groupes

Remboursements
Localisation Poids complémentaires
moyens
Ile-de-France 31 % 466,0 €
Grandes agglomérations 22 % 368,2 €
Province 47 % 341,5 €

Ces statistiques laissent apparaître de profondes différences entre les zones étudiées et
renforcent notre première hypothèse d’influence de la densité démographique sur les
remboursements complémentaires.

En fait, ce sont principalement des facteurs liés à l’offre de soins qui expliquent les
différences de remboursements complémentaires constatées entre les différentes zones
géographiques de résidence : la densité médicale et le prix des soins.

2.1.3.2. Facteurs d’offre de soin

2.1.3.2.1. La densité médicale


Le rôle de la densité médicale dans la détermination des dépenses de santé a déjà été
introduit dans la partie sur l’âge. Néanmoins, ce paragraphe vise à définir plus précisément ce
concept.

L’augmentation du nombre de professionnels de santé et la couverture de plus en plus


importante du territoire par des infrastructures dédiées aux soins conduisent à une
augmentation des dépenses de santé, qui peut s’expliquer principalement par deux facteurs :
Les individus émettent un désir fort de bonne santé et dans certains cas, consultent
plusieurs médecins pour une même demande de soins, d’autant que la Sécurité
sociale et les organismes complémentaires limitent les conséquences financières de
tels comportements. En effet, dans le système de soins français, les malades ne sont
pas limités quant au nombre de consultations de médecins (spécialistes ou non), c'est-
à-dire qu’ils ont la possibilité de consulter plusieurs médecins exerçant dans la même
spécialité. Néanmoins, la mise en place du parcours de soins coordonnés a permis,
depuis août 2004, de limiter les consultations intempestives et le nomadisme médical,
et donc les dépenses supplémentaires engendrées.
Une forte densité médicale provoque une baisse du nombre de consultations par
médecin et dans le même temps, une augmentation du coût moyen des

- 90 -
consultations2. C’est ce phénomène qui est appelé demande induite. La demande
induite s’explique par l’asymétrie d’information entre professionnels de santé et
malades. Rice [1983] en propose une définition : elle représente la volonté du
médecin de choisir une quantité ou une qualité de soins différente de celle qui serait
choisie par le malade si celui-ci était parfaitement informé de son état de santé. En
effet, les médecins, par leur diagnostic qu’ils sont seuls capables de réaliser,
possèdent une information supplémentaire sur l’état de santé du patient : le
professionnel de santé peut alors proposer des soins non appropriés pour maximiser
son utilité. Ces phénomènes, constatés dans les systèmes où le principe adopté est
celui de la rémunération à l’acte, s’expliquent par une multiplication des actes et/ou
une substitution d’actes moins coûteux par des actes plus coûteux et sont amplifiés
par une forte densité médicale. Au final, bien que le chiffre d’affaire des médecins soit
plus faible dans les régions où la densité médicale est forte, la dépense moyenne par
assuré y est également plus forte.

On mesure la densité médicale en rapportant le nombre de médecins à la population d’une


zone géographique donnée. Le plus souvent, la densité médicale s’exprime en nombre de
médecins pour 100 000 habitants. En France, la répartition des médecins suivant la région est
très inégale : la région la moins bien dotée est la Picardie avec 239 médecins pour 100 000
habitants, à l’inverse de la région PACA qui dispose de 370 médecins pour 100 000 habitants.
Les fortes différences de densité médicale selon les régions ont été combattues par les
pouvoirs publics à travers des mesures d’aides incitatives à l’installation, mais non
coercitives. Elles visent à inciter les jeunes médecins à exercer dans les zones en difficulté,
rurales ou urbaines, pour limiter l’aggravation des inégalités territoriales d’accès aux soins.
Néanmoins, le principe de la liberté d’installation est toujours en vigueur pour l’exercice de la
médecine libérale et ces mesures récentes, comme l'augmentation de 20 % du tarif de la
consultation, n'ont produit que peu d’effets visibles.

La densité médicale est alors un outil de pilotage des dépenses du système de soins d’un
pays. Ainsi, le numerus clausus, instauré notamment en études de médecine a pour objectif
de maitriser l’offre de soins. Chaque année, le nombre d’étudiants pouvant poursuivre leurs
études en seconde année de médecine est fixé au niveau national d’une part, puis au niveau
local, les universités situées dans des régions où la densité médicale est plus faible
bénéficiant d’un numérus clausus plus élevé. Si cette limitation pose un problème pour le
développement des techniques médicales, elle permet d’améliorer le traitement des
médecins, qui, moins nombreux, bénéficient de salaires plus élevés. En effet, avec 216 145
médecins généralistes actifs en 2011 (+91,7 % en 30 ans), la France n'a jamais compté autant
de médecins en activité.
2.1.3.2.2. Le prix des soins
Le prix de certains soins, notamment les actes non conventionnés ou ceux pour lesquels les
dépassements sont importants, est fortement variable suivant la région d’exercice du
professionnel de santé. Nous avons réalisé une carte de France des coûts moyens pour deux
actes illustrant parfaitement ce constat : la chambre particulière et la prothèse dentaire.

2
Domenighetti G., Limoni C. (1994) Effet de la densité médicale sur les dépenses pour la médecine ambulatoire
en Suisse. Médecine et Hygiène

- 91 -
Figure 57 : Carte de France du prix moyen d’une chambre particulière

Le prix moyen constaté sur le portefeuille Gras Savoye d’une chambre particulière est de 67
€. Cette carte de France met en évidence des différences notables de prix entre les
départements français. On distingue particulièrement la région parisienne, où les prix sont de
loin les plus élevés, et la province. Alors qu’une chambre particulière coûte en moyenne 111
€ dans les Hauts-de-Seine, son prix s’élève à 38 € dans le Cantal.

- 92 -
Figure 58 : Carte de France du prix moyen d’une prothèse dentaire « SPR 50 »

Le prix moyen d’une prothèse dentaire de type SPR50 constaté sur le portefeuille Gras
Savoye en France s’élève à 510 € en 2010. Néanmoins, ce chiffre cache des disparités fortes
entre les différents départements français. Comme pour la chambre particulière, les
départements d’Ile-de-France pratiquent des prix élevés. En revanche, et ce qui n’était pas le
cas pour la chambre particulière, nous constatons également des prix élevés pour les
départements frontaliers de l’est du pays. L’explication de ces différences entre les
départements français réside dans le fait que les chirurgiens-dentistes ont l’autorisation de
fixer librement leurs tarifs pour ces actes, qui reflètent donc, au moins en partie, les
différences de charges (notamment immobilières) auxquelles ils doivent faire face et qui
varient d’une région à l’autre. Enfin, de nombreux patients frontaliers n’hésitent pas à choisir
la France pour se faire soigner, les dentistes des régions concernées par cet afflux de malades
augmentant leurs tarifs du fait de la forte demande.

Le prix des soins est un facteur qui joue à la fois sur l’offre et la demande : une augmentation
du prix des soins provoque une baisse de la demande (amplifiée si aucun organisme n’amortit

- 93 -
la dépense pour le malade) mais a un effet double sur l’offre : celle-ci peut augmenter ou
diminuer, les professionnels de santé n’ayant pas besoin de produire autant pour conserver
le même niveau de revenu. Plusieurs secteurs ont été concernés par la mise en place de
mesures particulières d'encadrement des prix, et particulièrement les soins ambulatoires et
les médicaments. Une augmentation des volumes a été constatée mais aucun effet visible sur
les prescriptions n’a été observé. Les professionnels de santé y sont réfractaires, considérant
que ces mesures sont le reflet d'une vision purement comptable de la santé.

Comme nous l’avons vu précédemment, un nombre élevé de professionnels de santé par


habitant pèse plus fortement sur les dépenses dans un pays où les prestataires sont payés à
l’acte et où aucun contrôle du volume de ces actes n’est effectué. L’organisation du système
de santé, par le type de rémunération des professionnels de santé choisi, joue donc un rôle
dans la détermination des dépenses de santé. Le paiement à l’acte, comme c'est le cas
actuellement en France, provoquerait une augmentation de 11 %3 des dépenses par rapport
à la capitation (un forfait est attribué aux médecins pour chaque personne l’ayant choisi
comme médecin traitant et peut être assorti de forfaits divers et de paiement à l'acte).
Néanmoins, ce dernier mode de rémunération a aussi ses faiblesses : il tend à désavantager
les patients dont les soins sont les plus lourds et qui nécessitent donc le plus de temps.

2.1.4. La composition familiale


Cette partie à pour but de déterminer si des différences significatives de remboursements
complémentaires sont observées entre les différents types de bénéficiaires des contrats frais
de santé. Pour cela, nous avons calculé la moyenne d’âge, les remboursements
complémentaires moyens, le poids dans la démographie et le poids dans les
remboursements totaux pour chacune des trois populations étudiées.

Figure 59 : Caractéristiques démographiques des différents types de bénéficiaires

Remboursements
Type de Poids dans la Poids dans les
Moyenne d'âge complémentaires
bénéficiaire démographie remboursements
moyens
Adhérents 40,9 ans 444,5 € 43,8 % 53,3 %
Conjoints 42,8 ans 428,4 € 21,4 % 25 %
Enfants 10,5 ans 227,8 € 34,8 % 21,7 %

Ce tableau permet d’observer que les remboursements moyens des adultes (adhérents et
conjoints) sont près de deux fois supérieurs à ceux des enfants. Une explication de cet écart
réside dans le fait que ces différents types de bénéficiaires sont très éloignés en termes d’âge
moyen. En effet, nous avons vu dans la première partie de ce chapitre, que les dépenses de
santé étaient faibles au début de la vie et augmentaient avec l’âge. Il est donc légitime de
constater des différences significatives de dépenses entre les adultes (adhérents et conjoints)
d’une part, et les enfants d’autre part.

Il reste cependant à expliquer les différences de remboursements constatées entre adhérents


et conjoints : bien que ces derniers soient en moyenne plus âgés, leurs remboursements
moyens sont inférieurs à ceux des adhérents. Cette différence provient notamment de la

3
Andersson F., Gerdtham U. G., Siögaard J. (1992) An Econometric Analysis of Health Care Expenditures : a
Cross-section Study of the OECD countries. Journal of Health Economics n°11

- 94 -
présence d’une première complémentaire santé pour les conjoints, par exemple à caractère
obligatoire et collectif, intervenant avant celle de leur époux(se) et prenant donc en charge la
majeure partie de leurs dépenses. Le régime complémentaire secondaire, géré par Gras
Savoye, est moins sollicité et n’intervient que sur la partie non prise en charge par la
première mutuelle.

Soulignons également le rôle du coefficient familial, notamment dans le cas d’un régime
complémentaire collectif. Comme nous l’avons vu dans le Chapitre 1, cet indicateur
représente le rapport entre le nombre de bénéficiaires et le nombre d’adhérents et permet
de mesurer le nombre moyen de personnes bénéficiant du régime frais de santé par
adhérent. Toutes choses égales par ailleurs, plus le coefficient familial est élevé, plus les
dépenses de santé rapportées à un adhérent seront importantes. Cet indicateur aura donc un
impact plus ou moins fort sur le montant de la prime à payer en fonction du type de
cotisation choisi :
Un coefficient familial élevé associé à un régime de type « Famille » revient à solliciter
fortement les salariés isolés – notamment les plus jeunes – en comparaison des
prestations qu’ils percevront, mais permet d’intégrer un mécanisme de solidarité,
Un coefficient familial élevé associé à un régime de type « Isolé / Famille » est
synonyme d’équité entre les salariés (chacun paye en fonction de sa consommation
théorique) mais est moins « solidaire » qu’un régime de type « Famille ».

Les entreprises clientes ont donc un rôle important à jouer quant à la détermination du type
de cotisation, qui sera, pour les salariés, un des reflets de sa politique sociale.

2.1.5. Le collège
L’objectif de cette partie est de déterminer si le collège joue un rôle quant à la détermination
des dépenses de santé. Comme indiqué dans la partie « Données », les adhérents de notre
portefeuille sont globalement répartis suivant trois collèges : les cadres, les non cadres et les
ETAM (employés, techniciens et agents de maîtrise). Dans la suite de cette étude, nous
serons contraints d’exclure les adhérents bénéficiant d’un contrat du type « Ensemble du
personnel » ou « Cadres / ETAM » puisque nous ne pouvons isoler précisément leur collège.
Enfin, il convient d’ajouter, à titre liminaire, que le collège renseigné est celui des adhérents
ce qui introduit un biais important si l’adhérent n’est pas le chef de famille.

2.1.5.1. Une sollicitation de la complémentaire supérieure chez les cadres


Le tableau suivant présente les caractéristiques démographiques des adhérents répartis
selon les trois collèges : le poids du secteur dans la population totale, l’âge moyen, le
pourcentage de femmes, et la part de la population habitant en Ile-de-France.

Figure 60 : Caractéristiques démographiques des adhérents répartis selon les trois collèges

Type de Pourcentage Pourcentage d'adhérents


Poids Age moyen
contrat de femmes en Ile de France
Cadres 35% 41,0 31% 32%
Non cadres 58% 40,4 28% 24%
ETAM 7% 38,1 19% 27%

- 95 -
Le collège des cadres a les caractéristiques de la population ayant la propension à
consommer la plus importante : un âge moyen élevé, un nombre important de femmes et
une forte proportion d’adhérents résidant en Ile-de-France.

Les caractéristiques démographiques de la population des ETAM laissent présager de faibles


remboursements complémentaires alors que ceux de la population des non cadres sous-
tendent des remboursements moyens.

Le tableau suivant contient les dépenses moyennes par familles d’actes pour chacun des trois
collèges.

Figure 61 : Dépenses moyennes par familles d’actes pour chacun des trois collèges

Poste Dépenses Cadres Non cadres ETAM


Frais réels 107,60 € 135,09 € 102,73 €
Hospitalisation Complémentaire 46,78 € 51,92 € 42,51 €
Taux de couverture 99% 99% 99%
Frais réels 130,17 € 109,36 € 90,01 €
Consultations /
Complémentaire 58,32 € 42,01 € 34,83 €
Visites
Taux de couverture 95% 96% 97%
Frais réels 146,06 € 123,41 € 104,40 €
Médecine
Complémentaire 60,90 € 48,08 € 40,36 €
Courante
Taux de couverture 97% 98% 97%
Frais réels 122,89 € 138,02 € 119,73 €
Pharmacie Complémentaire 51,05 € 56,92 € 49,78 €
Taux de couverture 100% 100% 100%
Frais réels 168,66 € 133,89 € 129,70 €
Dentaire Complémentaire 97,83 € 73,47 € 76,72 €
Taux de couverture 85% 86% 89%
Frais réels 163,90 € 120,07 € 107,57 €
Optique Complémentaire 137,73 € 96,67 € 84,93 €
Taux de couverture 86% 83% 82%
Frais réels 41,46 € 35,59 € 36,05 €
Divers Complémentaire 30,49 € 18,75 € 26,32 €
Taux de couverture 100% 90% 100%
Frais réels 880,74 € 795,43 € 690,18 €
Ensemble Complémentaire 483,10 € 387,81 € 355,44 €
Taux de couverture 93% 94% 94%

Nous observons une sollicitation de la complémentaire santé en moyenne 20 % supérieure


chez les cadres (en comparaison des non cadres), ce qui peut s’expliquer par les
caractéristiques démographiques de la population, mais également par les garanties frais de
santé, qui sont en général plus élevées pour ce collège.

On note également un recours à des familles d’actes différentes suivant le collège :


Les consultations et visites, le dentaire et l’optique sont les trois familles d’actes qui
représentent le mieux les dépenses des cadres. De forts remboursements sur ces
postes sont synonymes de garanties élevées,
Les non cadres sont caractérisés par des dépenses d’hospitalisation élevées et un
poids important de la pharmacie. Ce sont des facteurs liés aux risques professionnels
qui expliquent cette propension forte à la consommation d’hospitalisation,

- 96 -
Le comportement de consommation des ETAM est proche de celui des non cadres,
malgré des remboursements moyens plus faibles, et un poste hospitalisation moins
marqué.

2.1.5.2. Cas particulier : la pose de prothèses dentaires et l’utilisation d’odds


ratio
La pose d’une prothèse dentaire est un acte caractérisé par une fréquence peu importante,
des frais réels élevés et un reste à charge variable suivant la qualité du contrat et le type de
prothèse choisi. On propose d’observer le lien entre la probabilité de recours à la prothèse
dentaire et le collège des adhérents à l’aide du calcul d’un « odds ratio ».

Avant de présenter le fonctionnement de cet indicateur, qui n’est autre qu’un rapport de
cotes, il convient de définir ce qu’est une cote (« odds »).
On calcule la cote d’un événement comme le rapport entre sa probabilité de survenance,
notée p et sa probabilité de non-survenance, notée 1-p. On a :

p
Odds( p ) = .
(1 − p )

Ainsi, un événement ayant une chance sur deux de se réaliser aura une cote de 1:1.
Appliquée aux paris sportifs (victoire ou défaite à l’issue d’un match de tennismen de niveau
égal, par exemple), une cote de 1:1 permet d’affirmer qu’un événement sur deux possibles
(victoire ou défaite du tennisman choisi) nous permet de remporter la mise.

Un odds ratio, également appelé rapport des chances, est une mesure du degré
d’indépendance entre des variables aléatoires qualitatives. Couramment utilisé en
épidémiologie, il permet de mesurer le lien existant entre un possible facteur de risque et la
survenance de ce risque. L’odds ratio représente le rapport des chances qu’un événement (ici
la pose d’une prothèse dentaire) arrivant à un groupe (les cadres) se produise également
pour un second groupe (les non cadres). On note p la probabilité de survenance de cet
événement pour le groupe des cadres, et q la probabilité de survenance pour le groupe des
non cadres. L’odds ratio se calcule alors comme suit :

p /(1 − p) p(1 − q)
Oddsratio( p) = =
q /(1 − q) q(1 − p)

Dans notre exemple, un odds ratio proche de 1 signifie que la pose d’une prothèse dentaire
est indépendante du collège, alors qu’un odds ratio supérieur à 1 indique que le recours à la
prothèse dentaire est plus fréquent chez les cadres ; il serait d’autant plus élevé que la pose
de prothèse dentaire serait fréquente chez les cadres. En revanche, un odds ratio proche de 0
est synonyme d’un recours plus fréquent chez les non cadres.

Afin de procéder à la détermination de l’odds ratio, on calcule la probabilité de recours à la


prothèse dentaire pour chacun des deux groupes sur le portefeuille Gras Savoye.

- 97 -
Figure 62 : Probabilité de recours à la prothèse dentaire suivant le collège

Probabilité de
Collège recours à la
prothèse dentaire
Cadres 10,76%
Non cadres 9,98%

L’odds ratio observé se calcule à présent très facilement. Il s’élève à 1,09 et est donc très
proche de l’unité. On conclut que le recours à la prothèse dentaire ne dépend pas fortement
du collège, mais que les cadres ont un recours légèrement plus fréquent à la prothèse
dentaire que les non cadres.

Nous avons calculé le prix moyen d’une prothèse dentaire suivant le collège. Les chiffres
constatés sur le portefeuille Gras Savoye s’élèvent à 454 € pour un cadre contre 396 € pour
un non cadre. Un effet prix est donc mis en évidence : les cadres choisissent des prothèses
dentaires plus chères en moyenne, ce qui peut s’expliquer par une localisation
majoritairement parisienne (les prothèses dentaires y sont plus chères), de meilleures
garanties et un pouvoir d’achat supérieur permettant d’utiliser des matériaux plus couteux.

Les analyses précédentes mettent en évidence un effet important du collège sur la


consommation de soins au niveau complémentaire. Des études4 menées à l’échelle nationale
ont démontré que la catégorie socioprofessionnelle était un déterminant des dépenses de
santé notamment en termes de fréquences, les cadres ayant une probabilité de recours aux
soins dentaires et à l’optique plus forte que les non cadres. Cet effet est à étudier en parallèle
de la présence ou non d’une complémentaire santé, moins courante pour les familles les plus
modestes, qui ne peut être modélisée ici.

2.1.6. Le secteur d’activité


L’objectif de cette partie est de regrouper les secteurs d’activité au sein desquels le
comportement de consommation des assurés est similaire. Pour cela, il nous a semblé
intéressant d’utiliser une méthode offrant un rendu graphique. Notre choix s’est porté sur la
classification ascendante hiérarchique (CAH), une méthode de classification automatique
utilisée en analyse des données.

2.1.6.1. La classification ascendante hiérarchique


L'objectif de la classification ascendante hiérarchique est de regrouper les individus ayant un
comportement proche sur un ensemble de variables quantitatives.
Son fonctionnement est basé sur des agrégations successives d’individus, en commençant
par les deux individus les plus proches et en répétant ce processus sur l’ensemble de la
population, jusqu’à obtenir une seule et unique classe. Les résultats de ces regroupements
sont contenus dans un arbre de classification appelé « dendrogramme ».
Une fois toutes les agrégations effectuées, il nous faudra déterminer le nombre optimal de

4
Etudes et résultats n° 182, Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques, juillet
2002

- 98 -
classes : l’objectif est d’avoir des groupes homogènes, assez distincts les uns des autres et
facilement interprétables.
La classification ascendante hiérarchique étant basée sur la proximité entre les individus, il
conviendra de bien définir la méthode de calcul des distances.

2.1.6.2. Démarche
On dispose d’un tableau contenant les dépenses de santé par famille d’actes pour chacun des
seize secteurs d’activité cités dans la partie « Données ».
Comme pour l’analyse en composantes principales réalisée sur l’âge, nous commençons par
centrer et réduire les données. Une fois cette étape réalisée, nous engageons le calcul des
distances entre les individus.

2.1.6.3. Mesure de la distance entre les individus : l’indice de dissimilarité


La distance entre les individus illustre l’idée de similarité entre les classes : deux individus
ayant un comportement semblable sont proches.
Il existe de nombreux indices de dissimilarité. Ceux-ci doivent simplement répondre aux
conditions suivantes, pour deux individus I i et I j :

la non négativité : d ( I i , I j ) ≥ 0 ,

la symétrie : d ( I i , I j ) = d ( I j , I i ) ,

la normalisation : d ( I i , I i ) = 0 .

Dans le cadre de cette étude, nous choisissons d’utiliser la distance euclidienne sur les
données centrées réduites, qui satisfait pleinement les propriétés ci-dessus. Celle-ci est
calculée, pour deux individus Ii (xi1, xi2, …,xin) et Ij (yj1, yj2, …,yjn), comme :

n
d (I i , I j ) = ∑x
k =1
ik − y jk ²

Le « tableau des distances » contient l’ensemble des distances calculées entre les individus
pris deux à deux. Cette matrice a n lignes et n colonnes, des coefficients positifs, est
symétrique et nulle sur la diagonale. Il y a n(n − 1) distances à calculer.
( n − 2)
On calcule le « tableau des distances » sur les données sectorielles.

- 99 -
Figure 63 : Tableau des distances entre les différents secteurs d’activité

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16
1 0
2 4,87 0
3 2,57 6,57 0
4 5,63 1,38 7,14 0
5 0,94 4,07 3,05 4,91 0
6 5,22 8,52 3,74 8,67 5,6 0
7 3,34 2,82 4,62 3,19 2,62 5,87 0
8 4,59 0,83 6,39 1,4 3,84 8,11 2,4 0
9 3,53 3,37 4,55 4,1 2,72 6,1 1,58 3,21 0
10 5,65 1,89 6,98 1,59 4,86 8,19 2,61 1,76 3,27 0
11 2,98 3,03 4,46 3,47 2,3 5,75 0,58 2,56 1,81 3 0
12 3,44 1,55 5,26 2,64 2,63 7,42 2,01 1,46 2,39 2,67 2,08 0
13 2,28 4,76 2,23 5,22 2,18 4,12 2,58 4,5 2,83 4,88 2,5 3,57 0
14 4,04 2,06 5,35 2,49 3,25 6,8 1,11 1,79 1,88 1,72 1,5 1,66 3,26 0
15 4,72 3,14 5,69 2,73 4,14 6,3 1,73 2,68 3,06 2,17 2,07 3,1 3,57 1,78 0
16 3,7 2,6 5,19 3,54 2,8 7,04 1,89 2,5 1,2 2,97 2,08 1,73 3,59 1,9 3,32 0

Le minimum observé dans ce tableau est 0,58 et correspond à la distance entre les individus
7 et 11. Le premier groupe sera donc créé en agrégeant ces deux individus.

2.1.6.4. Méthode d’agrégation entre deux classes : l’indice d’agrégation


Les méthodes couramment utilisées pour l’agrégation de deux classes, ou d’un individu seul
et d’une classe sont les suivantes, pour deux groupes notés A et B :

La méthode de Ward : elle prévoit de regrouper les classes à partir des centres de
gravité des deux groupes. On note, respectivement pour les groupes A et B, GA et GB
leurs centres de gravité et n A et nB leurs effectifs, qui permettent de pondérer. Une
distance est alors calculée comme :

n A nB
d ( A, B ) = d ²(G A , GB )
n A + nB

La distance du saut minimum : on regroupe les deux classes qui possèdent les deux
points les plus proches. La distance entre deux groupes A et B est calculée comme :

d ( A, B) = min d ( I , J )
I ∈A, J ∈B

La distance du saut maximum : elle représente la distance existant entre les deux
individus les plus éloignés de chaque groupe et est calculée comme :

d ( A, B) = max d ( I , J )
I∈A, J ∈B

Le choix du critère d’agrégation est important, les classes obtenues pouvant être très
différentes selon le critère choisi.

- 100 -
2.1.6.5. Inertie
L’inertie mesure la dispersion du nuage de points, c'est-à-dire la moyenne des carrés des
distances de ses points au centre de gravité du nuage. Pour son calcul, on note :
n : le nombre d’individus e1,…, en composant le nuage de points,
k : le nombre de groupes G1,…, Gk d’effectifs n1,..., nk de centres de gravité g1,…, gk,
g : le centre d’inertie du nuage.

On calcule l’inertie du nuage comme :

1 n
I = ∑ d ²(ei , g )
n i =1

Les k groupes composant le nuage sont d’autant plus homogènes que leurs inerties, calculées
par rapport à leurs centres de gravité respectifs, sont faibles : on appelle inertie intraclasse la
somme de ces inerties.

k
I int ra = ∑ I (Gi )
i =1

L’inertie interclasse représente la dispersion des groupes par rapport au centre de gravité du
nuage. On a :
1 k
I int er = ∑ ∑ d ²(e, g i )
n i =1 e∈Gi

Au cours des différents regroupements, l’inertie intraclasse augmente et l’inertie interclasse


diminue, l’inertie totale du nuage restant stable - c’est le théorème de Huygens :

Inertie totale du nuage = Inertie interclasse + Inertie intraclasse.

Lors d’un regroupement, on peut montrer que la distance de Ward des deux individus
regroupés correspond à la perte d’inertie interclasse et donc à l’augmentation de l’inertie
intraclasse. De ce fait, la méthode de Ward permet d’effectuer des regroupements en
minimisant l’augmentation de l’inertie intraclasse.

2.1.6.6. Algorithme itératif


Nous disposons de n=16 individus qui forment seize classes, également appelées clusters.
L’objectif de l’algorithme est de faire diminuer ce nombre de classes pour n’en avoir plus
qu’une seule à la fin du traitement.

Initialisation : On commence par calculer la dissimilarité existant entre les n=16 individus à
l’aide de la distance euclidienne. On stocke les résultats dans une matrice des distances.

Répéter : A l’aide de la matrice des distances, on sélectionne les deux clusters Ci et Cj les plus

- 101 -
proches que l’on regroupe dans un nouveau cluster Cg. Une fois ce regroupement effectué, le
nombre de clusters diminue d’une unité.
On recalcule la matrice des dissimilarités en utilisant la méthode d’agrégation souhaitée.

Jusqu’à n’avoir plus qu’un seul cluster.

A l’issue de l’algorithme, on dispose d’un arbre, le dendrogramme, permettant de visualiser


les liens hiérarchiques entre les différentes classes, c'est-à-dire le regroupement progressif
des individus.

2.1.6.7. Le dendrogramme
Figure 64 : Dendrogramme obtenu avec la méthode de Ward
15
10
Height

5
0

6
1
5
3
13
10
4
2
8
15
14
7
11
12
9
16

dc
hclust (*, "ward")

Une classification ascendante hiérarchique produit un dendrogramme qui permet de


visualiser la composition des différentes classes et la valeur de l’indice d’agrégation au
moment des regroupements.
Un tel arbre contient une racine (le groupe contenant tous les individus), des feuilles (au bas
de l’arbre, ce sont les individus pris isolément) et des branches, dont la hauteur est fonction
de la distance existant entre les classes regroupées.

L’arbre nous permet de déterminer le nombre optimal de classes dans lesquelles scinder la
population initiale. En coupant l’arbre lors du premier saut important de l’indice, on peut
penser que la partition des individus obtenue est de bonne qualité, puisqu’au dessous de la
coupure les objets sont proches alors que les regroupements effectués au dessus concernent
des classes éloignées.

Le dendrogramme représenté ci-dessus, obtenu avec le logiciel R, met en évidence un saut


important de l’indice lors de la partition en 4 classes (le nombre de classes correspond au
nombre de lignes coupées). Nous allons étudier plus en détail ces quatre groupes.

- 102 -
2.1.6.8. Groupes obtenus
Les secteurs composant les quatre groupes sont les suivants, nous indiquons entre
parenthèses le numéro les représentant sur le dendrogramme :
Groupe 1 : Agroalimentaire (1), Finance (3), Chimie (5), Pharmacie (13)
Groupe 2 : Construction (4), Automobile (2), Tourisme (10), Energie (8)
Groupe 3 : Communication (6)
Groupe 4 : Distribution (7), Environnement (9), Electronique (11), Métallurgie (12),
Services (14), TIC (15), Transport (16)

Le tableau suivant contient les caractéristiques démographiques de chaque groupe.

Figure 65 : Caractéristiques démographiques des différents groupes obtenus après classification

Groupes % de femmes % IDF Age moyen Cadres


Groupe 1 32% 26% 45,0 37%
Groupe 2 28% 37% 39,6 28%
Groupe 3 48% 52% 42,9 47%
Groupe 4 44% 30% 40,5 36%

Suite aux différentes études menées sur les déterminants de la consommation médicale,
nous pouvons supposer à partir de ces statistiques que :
Le groupe 1, qui contient peu de femmes, peu d’adhérents situés en Ile de France, un
nombre moyen de cadres et les adhérents en moyenne les plus âgés a les
caractéristiques d’une population possédant un comportement de consommation
moyen.
Le groupe 2 possède les caractéristiques de la population qui a la propension la plus
faible à consommer puisqu’il contient le moins de femmes, les individus les plus
jeunes et le moins de cadres.
Le groupe 3 possède les caractéristiques de la population qui a la propension la plus
élevée à consommer puisqu’il contient le plus de femmes, des adhérents
majoritairement situés en Ile-de-France, un âge moyen élevé et une importante
proportion de cadres.
Le groupe 4 a, comme le groupe 1, les caractéristiques d’une population possédant un
comportement de consommation moyen. Par rapport au groupe 1, le groupe 4 est
composé de plus de femmes et de plus d’adhérents résidant en Ile-de-France, mais sa
moyenne d’âge est plus faible.

Le tableau suivant recense les remboursements complémentaires moyens par adhérent pour
chacun des groupes obtenus après classification.

- 103 -
Figure 66 : Remboursements complémentaires moyens par famille des différents groupes obtenus après
classification

Consultations Médecine
Groupes Hospitalisation Pharmacie Dentaire Optique Total
Visites courante
Groupe 1 76,69 € 59,51 € 69,64 € 77,04 € 100,16 € 55,93 € 438,97 €
Groupe 2 44,60 € 38,35 € 43,32 € 42,95 € 71,57 € 35,42 € 276,21 €
Groupe 3 72,93 € 111,28 € 94,55 € 68,33 € 135,22 € 90,73 € 573,03 €
Groupe 4 50,64 € 48,72 € 52,98 € 54,41 € 83,48 € 61,34 € 351,56 €

Ce tableau confirme nos précédentes hypothèses quant au volume des remboursements


moyens pour chaque groupe. Nous obtenons la typologie suivante :
Le groupe 1 se positionne en seconde position en termes de remboursements les plus
élevés. L’hospitalisation et la pharmacie occupent les poids les plus importants ce qui
est en accord avec les caractéristiques démographiques de la population, la plus âgée
des quatre groupes.
Le groupe 2 présente les remboursements les plus faibles, en accord avec les
hypothèses émises précédemment.
Le groupe 3 est caractérisé par les remboursements les plus importants, et
notamment en dentaire, en optique et en consultations et visites. L’hospitalisation et
la pharmacie représentent les poids les plus faibles dans les remboursements totaux,
tous secteurs confondus.
Le comportement de consommation des salariés du groupe 4 peut être qualifié de
comportement moyen toutes populations confondues. Néanmoins, l’optique occupe
une part importante dans les remboursements totaux.

2.1.6.9. Représentation des groupes sur le premier plan


A titre de synthèse, on représente les quatre clusters obtenus sur le premier plan avec R. La
représentation est de très bonne qualité puisque plus de 90 % de la variance est expliquée.
Figure 67 : Représentation des quatre groupes obtenus sur le premier plan

3
4
2

2
1
Component 2

1
0
-1

-2 0 2 4

Component 1
These two components explain 90.36 % of the point variability.

- 104 -
L’axe 1 est le reflet du montant total des dépenses de santé de chaque groupe. Il oppose les
plus gros consommateurs (le groupe 3) aux plus faibles (le groupe 2). L’axe 2 oppose les
secteurs en fonction du poids de chaque famille d’actes dans les dépenses totales : le groupe
1 où les dépenses d’hospitalisation et de pharmacie occupent une place importante, au
groupe 3, où les consultations et visites, le dentaire et l’optique sont les postes dominants.

Le secteur d’activité apparait ainsi comme un déterminant des dépenses de santé dont les
composantes sont doubles. D’une part, un secteur d’activité agrège - et cela est d’autant plus
vrai qu’il est découpé finement - des populations ayant des caractéristiques tant
démographiques (âge, sexe, collège, localisation) qu’assurantielles (les garanties sont souvent
d’un niveau de gamme similaire suivant le secteur) proches. D’autre part, chaque secteur est
caractérisé par des risques socioprofessionnels qui lui sont propres. Par exemple, le secteur
des technologies de l’information, caractérisé par une forte proportion de jeunes cadres
ayant une utilisation intensive de l’ordinateur, a des besoins particuliers en termes
d’équipements optiques.

2.1.7. L’état de santé


Si l’argument du vieillissement de la population est couramment évoqué pour expliquer
l’augmentation des dépenses de santé, plusieurs économistes ne lui concèdent qu’un faible
rôle. Deux effets seraient à distinguer :
L’effet de génération, conséquence de l’augmentation du prix des soins et du recours
plus important aux professionnels de santé, traité durant la partie sur l’âge.
L’augmentation des dépenses de santé avec l’âge qui s’expliquerait en grande partie
par l’état de santé : selon plusieurs économistes, dont Getzen [1992], l’âge n’a pas
d’influence significative sur la croissance des dépenses de santé au niveau
macroéconomique. Une fois éliminés certains effets comme la couverture
complémentaire ou l’état de santé, l’impact de l’âge serait même négatif : on
consommerait moins avec l’âge !

2.1.7.1. Les travaux de Zweifel


Peter Zweifel [1999], chercheur suisse, a démontré que la proximité de la mort était le
facteur prépondérant dans la détermination des dépenses de santé. Ses travaux mettent en
évidence une consommation maximale dans les deux années qui précèdent la mort, quel que
soit l’âge du malade. Les dépenses de santé seraient même comparables pour des défunts
d’âges différents. Ainsi, selon cette étude, la relation entre âge et dépenses est liée au simple
fait que la probabilité de mourir augmente avec l’âge (tout comme le nombre, la fréquence
et la gravité des maladies) et c’est la morbidité, et non l’âge, qui explique la consommation
médicale : il faudrait ainsi retenir la proximité du décès au lieu de l’âge comme facteur
prépondérant dans la détermination des dépenses de santé. Si l’âge est couramment utilisé
comme principal déterminant des dépenses, c’est parce que ce dernier est un indicateur
indirect, mais facilement quantifiable, de l’état de santé.

2.1.7.2. Quelle mesure de la morbidité ?


Mesurer la morbidité signifie mesurer la fréquence des maladies. Or, les maladies ne donnent
pas lieu à des déclarations systématiques comme c’est le cas pour les décès. Ainsi, mettre au
point une méthode statistique permettant de calculer un indice de morbidité semble difficile

- 105 -
avec les seules informations quantitatives présentes dans notre base de données. Les
différentes études que nous avons pu consulter, réalisées par des démographes et des
épidémiologistes, intègrent des critères dont nous n’avons pas connaissance, comme le
pronostic vital des malades, les chances de guérison ou le degré d’invalidité, tous évalués par
un médecin pour chaque individu. De plus, au niveau international, aucun consensus n’a été
trouvé pour la définition d’un indice de morbidité et à l’heure actuelle, aucun indice universel
n’a vu le jour. Bien que l’objectif initial de ce paragraphe fût de mettre au point un modèle
permettant de prévoir les futures dépenses de santé des individus à partir de la connaissance
de leur indice de morbidité, nous avons préféré mener une étude proche de celle réalisée par
Zweifel sur notre portefeuille.

2.1.7.3. Etude menée sur le portefeuille Gras Savoye


Nous mesurons les remboursements complémentaires mensuels de 34 adhérents décédés en
2010, durant les douze mois précédant leur mort. Le faible nombre d’individus s’explique
par le fait que nous tenons compte :
des seuls adhérents, pour éviter de biaiser les remboursements complémentaires par
la présence d’une première mutuelle intervenant avant Gras Savoye,
des dossiers pour lesquels nous connaissons à la fois la date de décès et les dépenses
de santé, ce qui implique que Gras Savoye gère à la fois le versement des prestations
relatives aux frais de santé et instruise les dossiers décès.

Les résultats sont représentés sur le graphique suivant :

Figure 68 : Remboursements complémentaires mensuels moyens en fonction de la distance du décès

1 200 €
1 000 €
800 €
600 €
400 €
200 €
0€
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Distance du décès (mois)

Adhérents décédés Moyenne adhérents portefeuille Gras Savoye

Les remboursements mensuels moyens d’un adhérent durant les douze derniers mois
précédant son décès s’élèvent à 351 €, soit en moyenne près de dix fois le montant versé
mensuellement à un adhérent du portefeuille Gras Savoye (37 €).
Globalement, nous constatons une influence marquée de la proximité de la mort dans la
détermination des dépenses de santé puisque celles-ci sont fonction inverse de la durée
restante de vie.

- 106 -
2.1.7.4. L’arrêt de travail

2.1.7.4.1. Définition
Si, comme nous l’avons vu, la mesure de la morbidité est difficile, un paramètre immédiat
indiquant un état de santé dégradé est l’arrêt de travail. L’arrêt de travail peut prendre deux
formes, l'incapacité et l'invalidité, qu’il convient de distinguer pour appréhender son impact
sur les dépenses de santé :
L’incapacité de travail représente l’impossibilité temporaire pour le salarié d’exercer
son activité professionnelle pour des motifs physiques ou psychiques. En cas d’arrêt
de travail, la Sécurité sociale verse au salarié en compensation de la perte de revenu,
des indemnités journalières (IJ). Elles sont calculées en fonction du salaire brut des
trois ou douze mois précédant l’arrêt et représentent 50 % du salaire journalier de
base dans la limite du plafond de la Sécurité sociale (2 946 € mensuels en 2011). Ces IJ
sont versées après un délai de carence de trois jours. En complément des IJ, et pour
autant que le salarié soit assuré dans son entreprise, sont perçues des IJ
complémentaires versées par un organisme assureur : institution de prévoyance,
mutuelle, compagnie d’assurance. Selon le contrat, l’IJ complémentaire peut atteindre
100 % du salaire mais en aucun cas le dépasser.
L’invalidité de travail à un caractère définitif : elle intervient jusqu’à une durée de
trois ans en incapacité si l’état de santé de l’assuré s’est consolidé (réduction de sa
capacité de travail ou de ses revenus d’au moins deux tiers). En cas d’invalidité
partielle ou totale d’un salarié, la Sécurité sociale verse une pension d’invalidité ou
une rente si l’origine de la dégradation de l’état de santé de l’assuré résulte d’un
accident du travail. Elle est fonction des revenus et du taux de l’incapacité (l’invalidité
ne concerne que les personnes dont la capacité est réduite d’au moins deux tiers). Le
revenu pris en compte pour le calcul est le salaire annuel moyen des dix meilleures
années d’activité. Il y a trois catégories d’invalidité. Le niveau 1 est celui où une
activité est possible, le niveau de remboursement de la Sécurité sociale est de 30 %.
Le niveau 2 est celui où il n’est pas possible de travailler et le niveau de
remboursement de la Sécurité sociale est alors de 50 %. Enfin, le niveau 3 est le cas où
tout travail est impossible et où la personne a besoin d’une aide extérieure pour la vie
quotidienne. Le niveau de remboursement de la Sécurité sociale est dans ce cas de 50
% avec une majoration pour tierce personne. Une pension complémentaire peut être
versée par l’organisme assureur : institution de prévoyance, mutuelle, compagnie
d’assurance. Selon le contrat, il s’agit d’un forfait ou d’un pourcentage du dernier
salaire.
2.1.7.4.2. Une mesure précise impossible
Comme nous l’avons vu, en incapacité de travail, la compensation de la perte de salaire des
assurés s’effectue sur deux niveaux : dans un premier temps, par la Sécurité sociale qui verse
des indemnités journalières, et éventuellement, dans un second temps, par un organisme
complémentaire qui peut prendre la forme d’une compagnie d’assurance, d’une mutuelle ou
d’une institution de prévoyance. Le courtier, grâce à sa fonction d’intermédiaire entre client
et porteur de risques, peut, si l’assureur l’accepte, gérer l’indemnisation des salariés en
incapacité (cas le plus courant) et/ou en invalidité. Cette situation, de plus en plus fréquente,

- 107 -
offre de nombreux avantages au client (il n’a plus qu’un seul interlocuteur, le courtier), mais
nécessite un échange d’informations constant entre le courtier-gestionnaire et l’assureur.

La norme ADS (Analyse Détaillée Sinistres) a pour objectif de régir et d’uniformiser ces
échanges de données primordiaux pour le courtier (qui doit se faire rembourser les
prestations versées) et pour l’assureur (qui doit avoir une bonne vision des contrats dont il
supporte le risque).

La normalisation a pour objet de fournir des documents de référence comportant des


solutions à des problèmes techniques qui se posent de façon répétée dans les relations entre
partenaires économiques (assureurs et courtiers). Elle résulte d'un consensus entre ces
différents partenaires et est approuvée par un organisme (c’est le GIE Sintia qui joue ce rôle
de coordinateur dans le cadre de la norme ADS).
La norme est donc structurante pour les échanges entre les différents acteurs.
Plus concrètement, il s’agit :
de fiabiliser l'affectation des sinistres (plus d'erreur de saisie ou de mauvaise
interprétation par le porteur de risques des informations données par le délégataire),
d'augmenter la rapidité de l'affectation des sinistres (fiabilisation des comptes de
résultats...) et du processus de facturation,
d’automatiser les envois effectués (papier généralement utilisé aujourd'hui).

Le schéma suivant résume la situation.

Figure 69 : Fonctionnement de la norme ADS

Concrètement, Gras Savoye transmet tous les mois aux organismes assureurs partenaires les
informations de gestion relatives aux arrêts de travail par l’intermédiaire d’un flux distribué
sous la forme d’un fichier texte de plusieurs milliers de lignes et de plusieurs centaines de

- 108 -
colonnes et qui n’est pas exploitable comme tel. Afin de le matérialiser, voici un court extrait
de flux ADS :
Figure 70 : Extrait d’un flux ADS

Sur chaque « segment », une position correspond à une information.

Exemple de segment STM :


STMTHADSI02T0064200001101

A l’aide de la norme ADS, nous pouvons interpréter cet extrait : le segment « STM » (STM est
un « segment technique placé en tête de chaque message transmis dans le flux »), de
longueur 39 caractères, contient :
De la position 1 et sur 3 caractères le code du segment (ici « STM »),
De la position 4 et sur 6 caractères le code message (ici « THADSI »),
De la position 10 et sur 2 caractères la version de messages – en fait la version de la
norme (ici « 02 », ce qui correspond à 2.7),

Afin de tester l’influence de l’arrêt de travail sur les dépenses de santé à partir des flux ADS,
nous avons conçu un programme Excel permettant d’effectuer une conversion de ce flux en
une version exploitable. L’objectif principal de ce programme est de créer un fichier Excel
regroupant toutes les informations contenues dans les différents flux émis par Gras Savoye
vers un assureur.

L’objectif était alors simple : à partir des informations extraites, nous souhaitions associer aux
différents arrêts de travail les dépenses de santé ayant eu lieu avant, pendant et après l’arrêt
(dans le cas où Gras Savoye gère à la fois la santé et la prévoyance). Malheureusement, et
après une longue réflexion, nous avons dû nous résoudre à abandonner cette idée. En effet,
une mesure précise de l’arrêt de travail est impossible avec la norme ADS, puisque celle-ci
n’intègre que les arrêts dépassant la franchise, ce qui semble logique puisque seuls ces
derniers font intervenir les organismes complémentaires. Du fait des différents types de
franchises en vigueur dans les contrats de prévoyance (continue ou discontinue, courte ou
longue), une mesure précise des conséquences de l’arrêt de travail sur les dépenses de santé
est impossible avec ces seules données.

L’étude de l’impact de l’arrêt de travail sur les dépenses de santé, peut, à elle seule faire
l’objet d’un mémoire d’actuariat, d’autant que, malgré nos recherches, nous n’avons pas
trouvé de travaux menés à l’échelle nationale sur ce sujet.

- 109 -
Néanmoins, et pour conclure, nous émettons trois hypothèses que nous souhaitions vérifier
initialement :
L’arrêt de travail, comme conséquence de la dégradation de l’état de santé, conduit à
un recours aux soins plus important et donc à des dépenses médicales en hausse, et
plus particulièrement sur certains postes comme l’hospitalisation.
Les AT/MP (accidents du travail et maladies professionnelles), pour lesquels les
dépenses de santé sur certains actes sont couvertes à 100 % sur la base des tarifs de
la Sécurité sociale, sous-tendent une sollicitation moins forte de la complémentaire
que les autres types d’arrêts.
Les dépenses de santé sont fonction de la proximité de l’arrêt de travail et plus
précisément, plus l’arrêt de travail est proche, plus les dépenses de santé sont
élevées.

En conclusion, nous retenons que la mesure de la morbidité est très difficile. Néanmoins,
nous obtenons des résultats à mettre en parallèle de ceux de Zweifel en utilisant la distance à
la mort comme indicateur de l’état de santé. Une étude approfondie de l’influence de l’arrêt
de travail sur les dépenses, irréalisable dans ce cadre, pourrait être menée si le
développement des normes d’échanges NOEMIE (Norme Ouverte Entre la Maladie et les
Intervenants Extérieurs : système d'échange d'informations entre les organismes d'assurance
obligatoire et les organismes complémentaires) se poursuit. Elle permettrait ainsi de
confirmer ou d’infirmer nos hypothèses car elle porte à la connaissance des différents acteurs
du secteur complémentaire les arrêts ne dépassant pas la franchise.

2.2. Les déterminants non démographiques


2.2.1. Le niveau de gamme du régime
Cette partie cherche à mettre en évidence le rôle du niveau de gamme de la complémentaire
dans la détermination du volume des dépenses de santé des assurés.

2.2.1.1. Les facteurs qui permettent d’apprécier le niveau de gamme du régime


Dans un premier temps, il convient de distinguer le niveau de gamme de la qualité d’un
régime. Alors que nous qualifierons dans la suite de cette étude de haut de gamme un régime
proposant des garanties d’un niveau élevé, nous considérerons qu’un régime de qualité est
construit dans le but de répondre précisément aux besoins des assurés. Ces deux définitions
sont très différentes : alors que le régime haut de gamme prévoit les prestations les plus
élevées, le régime de qualité veille à ne pas proposer un niveau de garanties trop important
aux assurés qui n’en ont pas besoin, ce qui conduirait à une augmentation des dépenses de
confort et donc de la prime.
Les analyses menées dans le premier chapitre ont permis de mettre en évidence une
politique tarifaire différente de la part des professionnels de santé suivant le poste étudié. En
effet, alors que le prix de 81 % des consultations de généralistes s’élève à la base de
remboursement fixée par l’Assurance Maladie, le prix constaté des prothèses dentaires et
des équipements optiques en sont très éloignés. Cet exemple permet d’illustrer la différence
entre un régime de qualité et un régime haut de gamme : disposer d’une garantie très élevée
dans une région où les dépassements d’honoraires ne sont pas très fréquents pour un poste

- 110 -
comme les consultations de généralistes n’est pas nécessaire puisqu’il existe de nombreuses
alternatives de soins au tarif égal à la base de remboursement.

Une fois ces définitions posées, il parait aisé de qualifier le niveau de gamme d’un régime.
Pour ce faire, il conviendrait de sélectionner un nombre significatif d’actes différents et de
fixer pour chacun d’entre eux un prix unitaire élevé. Le régime le plus haut de gamme serait
alors celui qui proposerait les remboursements totaux les plus importants pour ce panier
d’actes et donc le reste à charge le plus faible pour les assurés. En pratique, cette méthode
est difficilement réalisable et notamment en assurance collective. Alors qu’en assurance
individuelle les assureurs proposent généralement un faible nombre de produits, chacun
s’adressant à des niveaux de gammes différents pour toucher l’ensemble des
consommateurs, l’assurance collective est caractérisée par un nombre important de contrats
pour lesquels les garanties sont différentes.

Pour qualifier le niveau de gamme d’un régime frais de santé, nous avons donc dû choisir les
actes les plus discriminants. La Sécurité sociale n’intervenant pas au même niveau sur le
financement de tous les actes, il nous a semblé logique de considérer ceux pour lesquels la
complémentaire est la plus sollicitée, c'est-à-dire les prothèses dentaires et les équipements
optiques. Cette idée est confirmée par l’analyse en composantes principales réalisée dans la
partie sur l’âge, qui laissait apparaître un axe regroupant les dépenses liées au dentaire et à
l’optique, que nous interprétions comme représentatif de l’intervention de la
complémentaire.

Après analyse d’un nombre important de garanties, nous pouvons, à partir des
remboursements proposés pour les prothèses dentaires, définir trois niveaux de gamme :
Régime Bas de gamme : les prothèses dentaires sont remboursées à hauteur du ticket
modérateur,
Régime Moyen de gamme : les prothèses dentaires sont remboursées aux alentours
de 200 % de la base de remboursement,
Régime haut de gamme : les prothèses dentaires sont remboursées à partir de 400 %
de la base de remboursement.

2.2.1.2. Analyse sur un cas type

2.2.1.2.1. Présentation
En première partie de ce chapitre, nous avons montré que le secteur d’activité était un
déterminant des dépenses de santé notamment parce qu’il regroupe, s’il est choisi de
manière affinée, des entreprises ayant des caractéristiques démographiques proches. Pour
tester si la qualité d’un régime entre en ligne de compte dans la détermination des dépenses
de santé, il convient de fixer a priori toutes les variables qui jouent un rôle dans la
détermination de la consommation médicale : l’âge comme indicateur biaisé de la morbidité,
la proportion de femmes dans la population, la localisation et la catégorie socio-
professionnelle des assurés.

Gras Savoye possède un portefeuille de clients très fourni dans le secteur des technologies de
l’information. Nous avons choisi de travailler sur celui-ci, après avoir vérifié que les

- 111 -
caractéristiques démographiques soient bien similaires entre les différentes entreprises de ce
secteur.
Le problème rencontré par l’utilisation de ce critère de segmentation est le point commun
entre toutes ces entreprises en termes de niveau de gamme des garanties, qui peut être
qualifié de moyen ou de haut de gamme. Pour classer les entreprises dans les différents
groupes de niveau de garanties, nous ne pouvons donc pas utiliser une règle qualitative et
fixe comme celle définie auparavant pour la prothèse dentaire, puisque tous les contrats
prévoient des garanties proches.

Forts de ce constat, nous avons dès lors calculé, à partir des notices de garanties, la somme
des remboursements complémentaires qui seraient versés pour la mise en place d’une
prothèse dentaire de type SPR 50 facturée 800 € et d’un équipement optique comprenant
deux verres simples de faible correction d’un montant de 300 € pièce (verres les plus
fréquemment rencontrés dans les décomptes du portefeuille Gras Savoye) et d’une monture
s’élevant à 300 € pour les huit entreprises du secteur des technologies de l’information
sélectionnées, totalisant 23 327 adhérents. Nous avons volontairement choisi des prix très
supérieurs à ceux habituellement constatés afin de pouvoir apprécier dans son ensemble le
niveau des garanties. En effet, en choisissant des prix moyens, les actes auraient été
remboursés entièrement dans la plupart des cas et le maximum de la garantie n’aurait pas
été atteint.
2.2.1.2.2. Constitution de groupes d’entreprises suivant le niveau de
gamme de leur contrat frais de santé
Une fois ces calculs effectués, nous séparons la population en trois groupes en fonction des
remboursements complémentaires théoriques obtenus sur ce panier d’actes, de manière à
affecter des effectifs similaires dans chacune des classes. Les résultats sont les suivants :

Figure 71 : Caractéristiques démographiques des trois groupes d’entreprises constitués

Nombre Nombre de Coefficient Age moyen des


Identifiant
d'adhérents bénéficiaires familial adhérents
Groupe 1 8 735 18 913 2,17 35,8 ans
Groupe 2 8 519 18 891 2,22 35,5 ans
Groupe 3 6 074 13 549 2,23 35,0 ans

Remboursement
Age moyen Age moyen des
Identifiant % de femmes Max. Panier
des conjoints enfants
d'actes
Groupe 1 38,1 ans 8,7 ans 21 % 956 €
Groupe 2 38,7 ans 9,0 ans 26 % 1 028 €
Groupe 3 37,6 ans 8,3 ans 30 % 1 276 €

Les trois groupes constitués sont très proches en termes d’effectifs, de coefficient familial et
d’âge moyen. En revanche, le pourcentage de femmes est plus élevé dans le troisième
groupe, ce qui aura probablement tendance à accentuer les dépenses de santé de ces
derniers. Néanmoins, cet effet reste marginal et il ne parait pas aberrant de considérer que
les trois groupes sont équivalents démographiquement.

- 112 -
2.2.1.2.3. Dépenses 2010 par groupe
Nous avons calculé à partir d’une extraction de données les remboursements
complémentaires moyens par adhérent effectués en 2010 pour chacun des trois groupes, afin
d’observer d’éventuelles différences.
Figure 72 : Remboursements complémentaires moyens par adhérent en 2010

1 000 € 931 €
900 € 848 €
800 € 756 €
700 €
600 €
500 €
400 €
300 €
200 €
100 €
0€
Groupe 1 Groupe 2 Groupe 3

Comme nous le montre le graphique ci-dessus, les remboursements complémentaires sont


croissants avec le niveau de garantie : de 756 € par adhérent pour le groupe 1, c'est-à-dire les
entreprises ayant les garanties les plus faibles, ils s’élèvent à 931 € pour le groupe 3. Le
niveau de garantie semble donc, à ce niveau, jouer un rôle sur la détermination des dépenses
de santé.

Nous avons souhaité déterminer si ces différences étaient plutôt liées à des écarts de
fréquences de consommation et/ou de coûts sur les cinq postes traditionnels : les
consultations de généralistes et de spécialistes, les verres et montures et les prothèses
dentaires.

2.2.1.2.3.1. Effet coût

Nous avons calculé pour chacun de ces cinq postes les frais réels, les remboursements de la
Sécurité sociale, les remboursements complémentaires et le reste à charge moyens. Les
résultats sont contenus dans les tableaux suivants :

Figure 73 : Décomposition des frais réels moyens par groupe pour les principaux postes

Remboursements Remboursements
Frais réels Reste à charge
Généralistes Sécurité sociale complémentaires
moyens moyen
moyens moyens
Groupe 1 23,98 € 14,85 € 8,34 € 0,75 €
Groupe 2 24,70 € 14,72 € 9,21 € 0,71 €
Groupe 3 25,90 € 14,56 € 10,12 € 1,15 €

- 113 -
Remboursements Remboursements
Frais réels Reste à charge
Spécialistes Sécurité sociale complémentaires
moyens moyen
moyens moyens
Groupe 1 37,93 € 17,71 € 18,79 € 1,10 €
Groupe 2 40,26 € 17,77 € 21,18 € 0,88 €
Groupe 3 44,77 € 17,74 € 25,99 € 0,68 €

Remboursements Remboursements
Frais réels Reste à charge
Montures Sécurité sociale complémentaires
moyens moyen
moyens moyens
Groupe 1 158,10 € 5,08 € 119,09 € 30,17 €
Groupe 2 171,31 € 5,10 € 141,91 € 20,81 €
Groupe 3 202,83 € 4,34 € 183,10 € 11,16 €

Remboursements Remboursements
Frais réels Reste à charge
Verres Sécurité sociale complémentaires
moyens moyen
moyens moyens
Groupe 1 143,90 € 4,31 € 123,57 € 12,30 €
Groupe 2 151,20 € 4,26 € 135,56 € 7,93 €
Groupe 3 164,52 € 3,77 € 153,56 € 4,15 €

Prothèse Remboursements Remboursements


Frais réels Reste à charge
dentaire (par Sécurité sociale complémentaires
moyens moyen
unité) moyens moyens
Groupe 1 8,81 € 1,52 € 5,82 € 1,17 €
Groupe 2 8,89 € 1,51 € 5,87 € 1,23 €
Groupe 3 9,66 € 1,51 € 6,40 € 1,49 €

Sur chacun des postes observés, les frais réels engagés et les remboursements
complémentaires sont croissants avec le niveau de garantie. Le reste à charge a, quant à lui,
une relation inverse puisqu’il décroît avec le niveau de garantie (sauf pour les prothèses
dentaires et les consultations de généralistes). Les différences de remboursements moyens
constatées précédemment sont donc au moins en partie expliquées par un effet coût
matérialisé par des frais réels croissants avec le niveau de garantie.

2.2.1.2.3.2. Effet fréquence

Nous avons calculé, sur ces mêmes postes le pourcentage de consommateurs, la fréquence
par consommateur et la fréquence par famille. Les résultats sont contenus dans le tableau
suivant :
Figure 74 : Fréquences de consommation par groupe pour les principaux postes

Pourcentage de Fréquence par Fréquence par


Généralistes
consommateurs consommateur famille

Groupe 1 74,00 % 3,48 5,57


Groupe 2 63,60 % 3,88 5,47
Groupe 3 66,52 % 3,42 5,08

Pourcentage de Fréquence par Fréquence par


Spécialistes
consommateurs consommateur famille
Groupe 1 46,32 % 2,63 2,64
Groupe 2 45,32 % 3,16 3,18
Groupe 3 49,74 % 3,27 3,62

- 114 -
Pourcentage de Fréquence par Fréquence par
Montures
consommateurs consommateur famille
Groupe 1 18,26 % 1,02 0,40
Groupe 2 19,51 % 1,03 0,45
Groupe 3 18,51 % 1,04 0,43

Pourcentage de Fréquence par Fréquence par


Verres
consommateurs consommateur famille
Groupe 1 19,47 % 2,04 0,86
Groupe 2 20,37 % 2,05 0,93
Groupe 3 19,20 % 2,07 0,89

Prothèse
Pourcentage de Fréquence par Fréquence par
dentaire (par
consommateurs consommateur famille
unité)
Groupe 1 5,51 % 137,50 16,40
Groupe 2 5,12 % 130,32 14,79
Groupe 3 5,46 % 131,77 16,05

Nous ne détectons sur ces tableaux aucune relation entre niveau de garantie et fréquence
sur les différents postes étudiés. Une explication qui peut être avancée quant à l’absence
d’effet fréquence réside dans le fait que cette étude est réalisée sur un secteur où les niveaux
de couverture sont globalement élevés, ceux-ci ne pénalisant pas certains individus quant à
l’accès aux soins. En revanche, les frais réels constatés étant croissants avec le groupe sur
chacun des cinq postes, une relation entre niveaux de garantie et prix apparaît. Dans les faits,
en menant cette étude sur des populations dont les niveaux de garanties sont plus éloignés,
nous constaterions un effet fréquence, particulièrement marqué en dentaire et en optique.
2.2.1.2.4. Apport de ce type d’études
La réduction ou l’amélioration des garanties complémentaires a un impact sur les résultats du
régime frais de santé. Pour le quantifier précisément, il convient de corriger les gains ou les
pertes théoriques par l’expérience. Réaliser des études par secteur et non pas sur l’ensemble
du portefeuille a pour objectif de chiffrer de manière plus précise l’impact de la modification
de certaines garanties, qui dépend fortement des caractéristiques démographiques de la
population. A l’aide de cet exemple, nous pouvons prévoir quels seront les nouveaux coûts et
fréquences moyens observés à l’issue d’une modification de garanties pour une entreprise du
secteur des technologies de l’information et de la communication. En effet, il nous suffit de
nous reporter aux statistiques moyennes constatées pour le groupe d’entreprises ayant des
garanties moyennes équivalentes. L’avantage de la segmentation par secteur provient du fait
que les résultats qui seraient observés en scindant la population de l’ensemble de notre
portefeuille en fonction de trois niveaux de garanties ne seraient pas adaptés spécifiquement
à ce secteur d’activité, qui possède des caractéristiques démographiques très particulières.

2.2.1.3. Le niveau de gamme des complémentaires : un facteur de


détermination des dépenses de santé
Bien que le développement de l’Assurance Maladie ait permis de limiter la sensibilité de
l’accès aux soins au revenu, un autre paramètre est à prendre en compte pour l’évaluation de
cette relation : le niveau de la couverture assurantielle. L’objectif de cette partie est de
montrer qu’une meilleure prise en charge augmente la consommation médicale des assurés.

- 115 -
Si l’Assurance Maladie propose à tous les Français les mêmes garanties (une seule base et un
seul taux de remboursement sont définis pour chaque acte), les organismes
complémentaires se démarquent en concevant des offres adaptées aux attentes de leurs
assurés. Ainsi, la qualité du régime complémentaire peut être mesurée à partir des garanties
du contrat, notamment en analysant le niveau du ticket modérateur et des éventuels
dépassements pris en charge par celui-ci.

L’amélioration des garanties complémentaires a des effets visibles sur trois niveaux :
Un transfert de revenu permettant un accès plus facile aux soins : le reste à charge est
important sur certains postes mal remboursés par la Sécurité sociale et une forte
prise en charge par la complémentaire permettra à certains ménages modestes
d’accéder à des soins indispensables.
Une modification des préférences du consommateur (aléa moral ex post) : ce
phénomène, décrit dans la partie éponyme, est amplifié par la présence de fortes
garanties qui réduit le prix apparent des actes. Le choix de montures chères peut être
cité à titre d’illustration.
Une modification du comportement de l’offreur de soins : le niveau de garantie peut,
sur certains postes, influencer fortement le prix des soins, comme en dentaire ou en
optique.

Pour les actes comme les prothèses dentaires où les dépassements sont importants, le
financement par la Sécurité sociale faible et où la complémentaire joue un rôle majeur, le
niveau de garantie aura un impact fort sur le comportement de consommation des assurés et
sur les prix pratiqués par les professionnels de santé. Le montant de la prime dépendant des
dépenses des assurés, le niveau des garanties d’un régime collectif doit donc être défini
d’une part en tenant compte du besoin des assurés, d’autre part en fonction des contraintes
liées à son financement, sous peine de rentrer dans une spirale haussière où l’augmentation
des dépenses provoque une augmentation des garanties et donc des primes.

2.2.2. La situation économique et le taux de turnover


Cette partie vise à présenter l’incidence du contexte économique et financier dans lequel
évoluent les entreprises clientes sur le pilotage de leurs régimes frais de santé. Après avoir
présenté les conséquences d’une crise économique sur les contrats d’assurance, nous nous
intéresserons plus particulièrement à un client de Gras Savoye, dont le fort taux de turnover
est en partie d’origine structurelle, mais largement amplifié par la crise.

2.2.2.1. Les crises


La crise est un mot parfois galvaudé et il convient dans un premier temps de bien isoler ses
différents aspects :
On parle de crise financière (ou krach boursier) lorsque les marchés financiers, les
banques ou les Etats (par leur dette publique) sont touchés. De nombreuses crises
financières ont eu lieu au cours du temps, mais leur ampleur est très inégale, puisque
certaines ont pu se répandre à l’ensemble de l’économie par des mécanismes de
contagion, notamment d’ordre systémique, et provoquer une crise économique

- 116 -
mondiale (« krach de 1929 »). On retiendra, dernièrement, à titre d’illustration, la
crise des subprimes.
On parle de crise économique quand l’ensemble des acteurs économiques (ménages,
entreprises, administrations publiques…) d’une zone géographique ou d’un secteur
d’activité sont touchés par une dégradation de leur situation économique. Ses
conséquences sont brutales : baisse du pouvoir d’achat, montée du chômage, faillites
d’entreprises et détérioration du climat social. Bien que le nombre de crises
économiques soit plus réduit que celui des crises financières, leurs conséquences sont
bien plus importantes, puisqu’elles peuvent entraîner une récession.

2.2.2.2. La crise économique et les régimes frais de santé


Une crise financière a un impact sur le marché de l’assurance puisqu’elle peut affecter un
assureur par une dégradation de son résultat et une baisse de solvabilité, le capital se
raréfiant. Néanmoins, nous nous intéresserons plus particulièrement dans la suite de ce
paragraphe aux crises économiques qui peuvent toucher directement tous les clients de Gras
Savoye et observerons quelles sont leurs conséquences sur les résultats d’un régime frais de
santé.

Première conséquence, une entreprise touchée par une dégradation du contexte


économique procède généralement à une baisse des effectifs, parfois par licenciement, mais
plus généralement par le non renouvellement des contrats les plus précaires comme les CDD,
afin d’adapter la production à la baisse de la demande. La conséquence est alors directe pour
les contrats collectifs frais de santé qui enregistrent une baisse des cotisations du fait de la
diminution de l’effectif assurable.

Deuxième conséquence, qui touche aussi bien la prévoyance que la santé, une situation
économique dégradée s’accompagne d’une augmentation notable de la charge de sinistres,
dont les origines sont doubles. Nous verrons en effet dans la suite de cette étude que les
salariés « sortants » ont une consommation médicale bien supérieure à la moyenne, comme
les salariés restants, qui, marqués par une baisse de leur moral et généralement par une
détérioration de leurs conditions de travail, recourent plus souvent aux soins : une crise
économique s’accompagne toujours d’un nombre de sinistres en hausse.

Les conséquences des deux points évoqués ci-dessus pour un régime frais de santé sont
importantes, puisqu’une baisse des primes accompagnées d’une augmentation de la
sinistralité provoquent, pour des régimes précédemment équilibrés, une forte dérive des
résultats. En tout état de cause, et pour y faire face, les cotisations devraient être majorées.
Mais le climat social dégradé rend impossible ces ajustements : les salariés, atteints par une
baisse de leur pouvoir d’achat voient d’un très mauvais œil une augmentation des cotisations
et les entreprises, qui pourraient prendre en charge une plus grande partie de la cotisation
pour réduire les conséquences économiques sur leurs salariés ne souhaitent pas, dans une
pareille situation, augmenter leurs dépenses. Pour un assureur ou un courtier, cette situation
est très délicate, puisque, du fait d’une politique d’achat se durcissant, des baisses des taux
de chargement sont réclamées par les entreprises, celles-ci pouvant aller jusqu’à changer
d’assureur en exigeant des taux de cotisation inférieurs et garantis sur plusieurs années, le
temps que le contexte économique s’améliore. Si un tel processus se conclue parfois par un
succès pour l’entreprise assurée, il convient néanmoins de préciser qu’un ratio de sinistralité
- 117 -
peut demeurer dégradé sur une période plus ou moins longue selon la politique de sélection
des risques de l’assureur, mais tôt ou tard, un correctif devra obligatoirement être appliqué
et celui-ci pourra être très brutal si des mesures de retour à l’équilibre n’ont pas été prises en
même temps que les résultats se dégradaient.

2.2.2.3. Taux de turnover et régimes frais de santé


Comme nous l’avons vu, lors d’une crise économique, des phénomènes connexes comme une
augmentation du taux de turnover liée aux différents plans sociaux sont observés. Nous
avons souhaité mesurer les conséquences d’un taux de turnover élevé à l’aide d’un cas type,
un grand groupe français du type SSII, secteur particulièrement touché par une forte rotation
de l’emploi, notamment chez les cadres. Nous suivrons deux populations au fil du temps : les
« entrants », c'est-à-dire les nouveaux salariés, et les « sortants », personnes quittant
l’entreprise pour de multiples raisons (non reconduction d’un CDD, démission, retraite ou
licenciement).

On définit le taux de turnover comme la demi somme du nombre de salariés quittant (quelle
que soit la cause) et arrivant dans l’entreprise au cours d’une période divisée par le nombre
de personnes présentes au début de la période : le taux de turnover permet de mesurer
l’ampleur des mouvements de personnels dans l’entreprise. L’entreprise sélectionnée
comptait 7289 adhérents au 1er janvier 2010. Au cours de cette même année, 1998 départs
ont eu lieu, contre 2558 arrivées. Le taux de turnover est donc de plus de 31 %, soit six fois la
moyenne constatée en France pour les cadres, selon l’APEC. Ce volume important s’explique
par des spécificités propres au secteur des services informatiques comme le type de
population (jeunes cadres) ou le nombre important d’offres d’emplois sur le marché, ce qui
facilite le changement d’employeur.

Nous avons souhaité observer si les dépenses médicales des salariés changeaient en fonction
de l’approche de leur sortie ou de l’éloignement de leur entrée dans les effectifs. Pour cela,
nous avons représenté ci-dessous la consommation moyenne mensuelle (par période de
trente jours) des entrants et des sortants en fonction de la distance de l’événement
(l’embauche pour les entrants, le départ de l’entreprise pour les sortants). Afin d’observer
ces comportements sur une période plus longue, nous considérons toutes les sorties
effectuées en 2010 et toutes les entrées ayant eu lieu en 2009.

- 118 -
Figure 75 : Remboursements complémentaires mensuels moyens en fonction de la distance de l’événement
(entrée ou sortie)

160 €

140 €

120 €

100 €

80 €

60 €

40 €

20 €

0€
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23
Distance de l'événement (mois)

Sortants Entrants Moyenne adhérents portef euille Gras Savoye

La sollicitation de la complémentaire par les entrants est faible à leur entrée dans les effectifs
et atteint le niveau moyen dès le quatrième mois. Le cas des sortants est quant à lui très
atypique : dès quinze mois avant la sortie, leurs dépenses sont supérieures à la moyenne, et
atteignent près de quatre fois ce chiffre le mois précédant leur départ ! Tous les postes sont
concernés par des consommations élevées.

Plus globalement, ce type d’effets est observé sur l’ensemble du portefeuille Gras Savoye.
Ainsi, plus le nombre de recrutements est important, plus le régime en sera affecté
positivement, les nouveaux adhérents consommant moins en moyenne que les adhérents
dont l’ancienneté est plus élevée, tout en payant la même cotisation. En revanche, les
départs sont problématiques pour les régimes puisqu’ils peuvent à eux seuls faire dériver
fortement les résultats s’ils ne sont pas compensés par des arrivées.

Nous avons vu dans cette partie que la situation économique difficile d’une entreprise
pouvait affecter fortement son régime frais de santé. Au niveau d’un Etat, une crise
économique a également des conséquences puisqu’elle s’accompagne d’une baisse des
recettes et d’une augmentation des coûts sous l’impulsion d’une sinistralité plus marquée. Le
déficit de l’Assurance Maladie se creusant, la tentation du déremboursement de certains
actes médicaux ou d’une participation plus faible sur d’autres, mesures ayant pour objectif
un retour à l’équilibre des comptes, est forte. Si de telles mesures sont mises en œuvre, les
conséquences pour les complémentaires santé sont immédiates avec le risque de rentrer
dans une spirale infernale, matérialisée par une double augmentation des coûts.

- 119 -
2.2.3. Le tiers payant
2.2.3.1. Définition du tiers payant
Le tiers payant consiste au paiement direct des professionnels de santé par la Sécurité sociale
et les organismes complémentaires, permettant aux assurés de ne pas avancer l’ensemble
des frais de soins. De ce fait, si la couverture consiste en une prise en charge à 100 % des
dépenses de santé, le malade n’aura aucun frais direct à régler. Tous les actes ne sont pas
éligibles pour une prise en charge par tiers payant : celui-ci est interdit pour les consultations
de médecins et de dentiste, les plombages, les traitements préventifs et les radiographies
dentaires, sauf dans quelques cas particuliers. Enfin, il est très souvent effectué dans le cas
d’hospitalisation et d’achats de médicaments en pharmacie. Le tiers payant est apparu en
1982 dans les pharmacies françaises et s’est fortement développé à partir des années 1990.

A première vue, le tiers payant est une bonne chose pour les assurés puisqu’il permet de
limiter le renoncement aux soins. Appliqué sur des actes de premier recours comme les
consultations de médecins généralistes, il favoriserait la détection précoce de certaines
maladies et éviterait ainsi qu’elles ne s’aggravent et ne coûtent plus cher au régime. En
revanche, les régimes de base et complémentaires peuvent craindre une augmentation du
montant des prestations versées avec un effet double sur les coûts et les fréquences : la
perception du prix des soins par les assurés change puisque ceux-ci n’ont plus d’avance de
frais à réaliser et ils peuvent, de ce fait, être plus enclin à consommer, voire à
surconsommer - on retrouve ici les problèmes de risque moral et de demande induite déjà
évoqués précédemment. Ainsi, si le tiers payant a pour conséquence une augmentation des
dépenses de santé pour tous les assurés (même ceux disposant d’un revenu élevé), il pourrait
être considéré comme l’illustration de la déresponsabilisation des assurés et serait alors
purement inflationniste. En revanche, s’il permet aux assurés les plus modestes d’augmenter
le volume de soins et d’atteindre celui des plus riches à état de santé identique, il réduirait les
inégalités d’accès aux soins.

2.2.3.2. Etude du tiers payant sur les décomptes de pharmacie


Nous avons cherché à estimer l’impact du tiers payant sur les dépenses de pharmacie du
portefeuille Gras Savoye. En 2010, la pharmacie représente 6 514 913 lignes de décomptes,
dont 94 % ont été payées par l’intermédiaire du tiers payant. Le succès de ce mécanisme est
démontré par la proportion de remboursements qu’il permet d’instruire, même si, et il
convient de le rappeler, notre base de données ne contient que les décomptes faisant
intervenir la complémentaire. Ainsi, cette statistique signifie plus particulièrement que,
lorsque Gras Savoye est sollicité pour un remboursement lié à la pharmacie, c’est dans 94 %
des cas par tiers payant.

Cette étude ne peut cependant être menée sur l’ensemble des actes remboursés au titre de
la pharmacie. Par exemple, les patchs anti-tabac (428 lignes de décomptes) ou les vaccins
non remboursables (3 804 lignes de décomptes) sont, de par leur type, portés à notre
connaissance 99 fois sur 100 hors tiers payant et seront de ce fait exclus du périmètre pour
ne pas fausser les résultats.

- 120 -
Figure 76 : Caractéristiques des dépenses de pharmacie payées avec et sans tiers payant

Premier Troisième
Pharmacie Moyenne Médiane
Quartile Quartile
Frais réels 16,10 € 3,99 € 7,83 € 17,04 €
Sécurité sociale 8,87 € 1,47 € 3,46 € 8,78 €
Absence de Tiers
Première mutuelle 0,18 € 0,00 € 0,00 € 0,00 €
Payant
Complémentaire 6,68 € 1,74 € 3,54 € 7,50 €
Reste à charge 0,37 € 0,00 € 0,00 € 0,00 €
Frais réels 17,96 € 4,19 € 8,84 € 19,60 €
Sécurité sociale 10,55 € 1,89 € 4,28 € 10,93 €
Tiers Payant Première mutuelle 0,00 € 0,00 € 0,00 € 0,00 €
Complémentaire 7,39 € 1,94 € 4,12 € 8,52 €
Reste à charge 0,03 € 0,00 € 0,00 € 0,00 €

Ce tableau contient des statistiques descriptives pour les actes instruits par tiers payant ou
non :
Les frais réels moyens, qui représentent le montant total dépensé par les malades, ce
qui permet d’apprécier l’impact du débours dans son ensemble.
La part des dépenses prises en charge par la Sécurité sociale, une éventuelle première
mutuelle et la complémentaire Gras Savoye.
Le reste à charge, c'est-à-dire la somme restant à payer par l’assuré.

Nous observons que le tiers payant est utilisé dans des cas où les frais réels sont plus élevés
(ce qui ne signifie pas que le tiers payant pousse les individus à consommer des actes plus
chers) et également quand la participation des différents organismes est plus forte. Le reste à
charge moyen est cependant bien plus élevé dans le cas d’actes instruits sans tiers payant : ce
phénomène est à attribuer aux valeurs extrêmes puisque le troisième quartile correspond à
la valeur nulle.

2.2.3.3. Explications
Paul Dourgnon et Michel Grignon5 ont étudié l’influence du recours au tiers payant sur la
dépense de santé à partir des données issues de L’Échantillon Permanent d’Assurés Sociaux.
Les conclusions tirées de leur étude sont les suivantes :
L’utilisation du tiers payant diminue avec le revenu : les ménages les plus aisés
recourent moins régulièrement au tiers payant que les plus modestes. Cette
conclusion peut s’expliquer par le fait que le financement des soins est de plus en plus
facile à mesure que le revenu augmente.
Le tiers payant est davantage utilisé pour les dépenses onéreuses. Il facilite donc le
financement des soins au coût élevé qui pèse parfois lourdement dans le budget des
ménages.
L’absence de tiers payant conduit à des dépenses inférieures pour les individus dont
les revenus sont plus faibles, à état de santé identique et permet lorsqu’il est mis en
place, de rapprocher les dépenses de santé des plus pauvres vers celles des plus

5
Dourgnon P., Grignon M. (2000) Le tiers-payant est-il inflationniste ? Centre de Recherche d’Etude et de
Documentation en Economie de la Santé

- 121 -
riches. Le tiers payant permet donc de réduire les inégalités au sein de la population,
et ne provoquerait donc pas de surconsommation.

Enfin, le tiers payant peut être vu comme une source de risque opérationnel, défini comme
« le risque de perte résultant de procédures internes inadéquates ou défaillantes, ou de
membres du personnel et de systèmes, ou d’événements extérieurs » dans l’article 13 de la
Proposition de Directive du parlement européen et du conseil sur l’accès aux activités de
l’assurance directe et de la réassurance et leur exercice de juillet 2007. En effet, les
professionnels de santé étant payés directement et automatiquement, le risque de fraude
(surfacturation ou prestations fictives dans le but de réaliser un gain financier) ou d’erreur de
saisie (dépenses de soins) s’intensifie. Il doit donc s’accompagner d’un plan strict de contrôle
interne.

Conclusion
Comme nous l’avons vu dans ce second chapitre, plusieurs éléments tendent vers des
dépenses de soins croissantes.

Premier facteur, le vieillissement de la population, qui participe à l’augmentation et au


changement de la structure des dépenses, avec une progression des soins de fin de vie.

Second facteur, une demande en hausse, sous l’impulsion du changement de l’offre de soins,
caractérisée par le progrès technique, la densité médicale et le prix des soins : soigner deux
individus dans le même état morbide n’engendre pas le même coût suivant les années et
dépend des régions.

L’étude menée sur l’influence du sexe met en évidence des différences de consommation
entre les hommes et les femmes, ces dernières ayant en moyenne des dépenses plus élevées.
Le collège est également un déterminant principal des dépenses, les cadres sollicitant en
moyenne 20 % de plus l’organisme complémentaire que les non cadres, mais surtout des
postes différents (l’optique, le dentaire et les consultations de spécialistes, alors que des
dépenses élevées d’hospitalisation sont caractéristiques des non cadres).

L’appartenance à un secteur d’activité influence doublement les dépenses de santé : d’une


part un secteur agrège des individus ayant des caractéristiques démographiques proches,
d’autre part les garanties des entreprises du même secteur sont souvent similaires, afin de
s’adapter aux risques socioprofessionnels inhérents à ces métiers.

Malgré une mesure difficile de la morbidité, cette variable apparaît comme le déterminant
principal des dépenses.

L’influence du niveau de gamme du régime est marquée, mais son étude doit être réalisée
secteur par secteur afin de fixer préalablement les variables de contrôle démographiques.
Les dépenses de santé sont également liées au contexte économique et au taux de turnover,
la sollicitation de la complémentaire étant plus élevée pour les salariés sortants, ce qui pose
des problèmes de pilotage.

Enfin, le recours au tiers payant a lieu pour des actes plus chers ce qui permettrait de réduire
les inégalités au sein de la population sans provoquer de surconsommation, selon les experts.

- 122 -
Chapitre 3 :
Quels leviers face à une dérive
de la charge de sinistres ?

- 123 -
Introduction
Ce troisième et dernier chapitre vise à apporter des solutions autres qu’une augmentation
des cotisations pour des régimes de type collectif dont la charge de sinistres dérive. Après
avoir présenté les mécanismes mis en place au niveau national par la Sécurité sociale pour
lutter contre la progression des dépenses de santé, nous verrons que le reste à charge est
l’instrument principal utilisé pour permettre à des régimes de retrouver l’équilibre. Après
avoir défini le phénomène d’aléa moral et les moyens permettant de le combattre, nous
verrons qu’il existe des alternatives simples pour rendre les régimes complémentaires plus
performants. Celles-ci passent notamment par une meilleure connaissance des risques - d’où
le rôle important de l’actuaire - et visent à limiter les comportements abusifs des assurés
mais également de certains professionnels de santé peu scrupuleux.

3.1. Le rôle du reste à charge


3.1.1. Définition du reste à charge
3.1.1.1. Préalable
Le reste à charge peut correspondre à deux définitions :
Le montant des dépenses de santé restant à financer après le seul remboursement du
régime général : il comprend donc le montant éventuellement remboursé par une
complémentaire et le montant financé directement par les assurés,
Le montant des dépenses de santé restant à financer après remboursement de la
Sécurité sociale et des différents organismes complémentaires : cette définition
considère le reste à charge comme le montant des dépenses de santé finalement
payé par les assurés et est un bon indicateur de la qualité du régime complémentaire
sur certains postes où l’intervention de l’Assurance Maladie est faible.

Dans la suite de ce chapitre, c’est cette deuxième définition que nous considèrerons.

Le reste à charge est constitué de différents dispositifs qui ont évolué avec les différentes
réformes de l’Assurance Maladie dans le but d’assurer sa pérennité financière.

3.1.1.2. Le ticket modérateur


Le ticket modérateur représente la part la plus importante du reste à charge. Créé dès
l’instauration de la Sécurité sociale en 1945 afin de lutter contre la surconsommation, le
ticket modérateur correspond au montant des dépenses restant à la charge de l’assuré après
le seul remboursement de l’Assurance Maladie, hors dépassements d’honoraires. Il
fonctionne comme un système de coassurance : l’assuré et la Sécurité sociale financent
chacun un pourcentage donné du prix du soin, fixé préalablement et spécifique à l’acte.

Le montant du ticket modérateur varie en fonction du type de soin effectué, de la situation


médicale de l’assuré (son état de santé) et du respect ou non du parcours de soins.

- 124 -
Figure 77 : Décomposition du coût d’une consultation d’un médecin généraliste traitant conventionné
exerçant en secteur 1

25 €

20 € 6,90 €

1€
15 €

10 €

15,10 €

5€

0€

Ticket Modérateur
Participation forfaitaire
Assurance Maladie

Les caractéristiques d’une consultation d’un médecin traitant conventionné exerçant en


secteur 1 sont les suivantes :
Frais réels : 23 €
Base de remboursement de la Sécurité sociale : 23 €
Taux de remboursement de la Sécurité sociale : 70 %
Remboursement théorique de la Sécurité sociale : 16,10 €
Participation forfaitaire : 1 €
Ticket modérateur : Base de remboursement-Remboursement théorique de la
Sécurité sociale = 23 €-16,10 € = 6,90 €

Note : La participation forfaitaire de 1 € ne fait pas partie du ticket modérateur et n’est


presque jamais remboursée par les organismes complémentaires. Elle est retranchée
directement du remboursement de la Sécurité sociale.

Dans certaines situations comme des consultations hors parcours de soins, le ticket
modérateur est majoré, provoquant une baisse du remboursement de l’Assurance Maladie
qui n’est généralement pas compensée par les complémentaires (« contrats responsables »).

Le ticket modérateur, fonction du taux de remboursement fixé par l’Assurance Maladie, est
un mécanisme pouvant aboutir à un reste à charge important pour les malades ayant une
fréquence de consommation importante et ainsi conduire à un renoncement aux soins. Pour
lutter contre ce phénomène, des exonérations du ticket modérateur ont été mises en place,
par exemple pour les bénéficiaires de la CMUC ou les malades traitant une affection de
longue durée.
- 125 -
3.1.1.3. Les dépassements d’honoraires
Lorsque les prix pratiqués par les professionnels de santé sont supérieurs à la base de
remboursement fixée par la Sécurité sociale, on parle de dépassements d’honoraires. Ce
dispositif peut représenter un poids important de dépenses pour les patients : en effet, si le
ticket modérateur est souvent remboursé par les complémentaires, il en va tout autrement
pour les dépassements d’honoraires. Les dépassements d’honoraires sont un sujet sensible
pour les complémentaires, puisque la concurrence entre les différents acteurs les pousse à en
couvrir tout ou partie, provoquant des coûts indirects pour les assurés (augmentation de la
cotisation). L’Assurance Maladie ne prenant pas en charge les dépassements d’honoraires, ils
ont peu d’impacts sur ses résultats, mais provoquent des inégalités quant au recours aux
soins. Le cas des prothèses dentaires est exemplaire.
Figure 78 : Décomposition du coût d’une prothèse dentaire de type « SPR 50 » s’élevant à 550 €

600 €

500 €

400 €

437,50 €
300 €

200 €

100 € 32,25 €

75,25 €
0€

Dépassements d'honoraires
Ticket Modérateur
Assurance Maladie
Les caractéristiques d’une prothèse dentaire dont le coût s’élève à 550 € sont les suivantes :
Frais réels : 550 €
Base de remboursement de la Sécurité sociale (par unité) : 2,15 €
Nombre d’unités : 50
Taux de remboursement de la Sécurité sociale : 70 %
Remboursement théorique de la Sécurité sociale (par prothèse) : 75,25 €
Ticket modérateur : Base de remboursement-Remboursement théorique de la
Sécurité sociale = 107,5 €-75,25 € = 32,25 €
Dépassements d’honoraires : Frais réels-Base de remboursement de la Sécurité
sociale = 437,50 €

- 126 -
La participation forfaitaire de 1 euro ne s'applique pas aux consultations et actes réalisés par
un chirurgien-dentiste.

3.1.1.4. La participation forfaitaire de 1 euro


La participation forfaitaire de 1 euro peut être vue comme une application du copaiement : il
s’agit de faire payer à l’assuré une somme forfaitaire pour toutes les consultations ou actes
réalisés par un médecin, y compris les examens radiologiques ou les analyses biologiques.
Appliquée à tous les assurés âgés de plus de 18 ans, les cas d’exonérations sont
rares (bénéficiaires de la CMUC ou de l’AME et femmes enceintes à partir du sixième mois de
grossesse).
Un plafond annuel de 50 € a été fixé sur cette contribution apparue en 2005 afin de ne pas
trop pénaliser les personnes nécessitant des consultations régulières.

Les principales critiques portées aux mécanismes de copaiement concernent leurs


exonérations et leur montant : si les exonérations sont trop nombreuses ou si le montant du
copaiement est trop faible, l’efficacité du mécanisme vis-à-vis de l’aléa moral est limitée. De
plus, ce mécanisme peut aboutir à un accès inégal aux soins puisque le montant du
copaiement ne tient pas compte des ressources des individus.

3.1.1.5. Le forfait hospitalier


Le forfait hospitalier a pour but de faire contribuer les individus aux frais d’hébergement et
d’entretien engendrés par une hospitalisation d’une durée supérieure à 24 heures. Instauré
en 1983, il s’élève, depuis le 1er janvier 2010 à 18 € par jour d’hospitalisation, sauf dans les
services psychiatriques où son montant est de 13,50 €. Des groupes d’exonération
existent (bénéficiaires de la CMUC, femmes enceintes hospitalisées durant les quatre
derniers mois de sa grossesse…).

Ce montant n’est pas remboursé par l’Assurance Maladie, mais l’est par la plupart des
complémentaires santé.

3.1.1.6. Les franchises médicales


Mise en place en 2008 dans le but de financer la lutte contre le cancer la maladie d'Alzheimer
et les soins palliatifs, la franchise médicale représente un montant prélevé sur les
remboursements de l’Assurance Maladie de 50 centimes sur les boîtes de médicaments, de
50 centimes sur chaque acte paramédical et de 2 euros sur les transports sanitaires. Deux
plafonds ont été mis en place : 50 € par assuré et par an mais également 2 euros par jour sur
les actes paramédicaux et 4 euros par jour pour les transports sanitaires.
Seuls les enfants de moins de 18 ans, les bénéficiaires de la CMUC et les femmes enceintes à
partir du 6ème mois de grossesse jusqu’au 12ème jour après l’accouchement en sont exonérés.
Cette franchise n'est pas prise en charge par les assurances complémentaires santé.

3.1.2. La santé, un bien supérieur


Alors que la macroéconomie analyse le fonctionnement d’ensemble de l’économie, le rayon
d’action de la microéconomie se limite à un agent économique. Les travaux réalisés dans
cette discipline s’adaptent tout à fait au cas de la santé.

- 127 -
3.1.2.1. Typologie des biens
En micro économie, on définit un consommateur comme une personne physique ou morale
qui acquiert ou utilise des biens ou services mis sur le marché. Son objectif est de maximiser
sa satisfaction sous une contrainte budgétaire (son revenu, qui lui permet d’acquérir des
biens à un prix unitaire donné).

Le consommateur ne pouvant dépenser plus que ses revenus, il doit donc faire des choix qui
lui permettront de maximiser sa satisfaction.

La théorie du consommateur vise notamment à analyser le comportement du consommateur


en expliquant ses choix à travers des analyses mathématiques et permet de modéliser l’effet
d’une variation de prix ou du revenu sur son comportement de consommation et sa
satisfaction. Pour cela, on utilise l’élasticité, qui désigne la variation relative d’une grandeur
(effet) par rapport à la variation relative d’une autre grandeur (cause). Nous définirons en
partie 3.2.2.3 l’élasticité-prix, nous nous intéressons à présent à l’élasticité-revenu.

On définit l’élasticité-revenu comme l’effet d’une augmentation des revenus sur la demande :
∆Q
Q ∆Q R
e= = ×
∆R ∆R Q
R
Pour la plupart des biens, l’élasticité-revenu est positive : la demande augmente avec les
revenus.

Ernst Engel a défini trois catégories de biens :


Les biens inférieurs, caractérisés par une élasticité négative : la consommation de ces
biens diminue avec l’augmentation des revenus. Il s’agit de biens de mauvaise qualité
que les individus préfèrent substituer par des biens de meilleure qualité quand leur
revenu le permet (pain, pommes de terre…).
Les biens normaux ou biens nécessaires, caractérisés par une élasticité-revenu
comprise entre 0 et 1 : la demande d’un consommateur pour ce bien augmente
quand son revenu augmente dans une proportion comprise entre 0 et 1. Il s’agit des
biens de première nécessité et de la nourriture.
Les biens supérieurs, caractérisés par une élasticité-revenu strictement supérieure à
1 : la demande d’un consommateur pour ce bien augmente plus vite que son revenu.
Il s’agit par exemple des loisirs, du transport ou de la culture.

3.1.2.2. Dépenses de santé françaises et PIB


Dans le modèle néoclassique standard, la demande en un bien décroit lorsque le prix
augmente (la capacité d’achat du consommateur diminue lorsque le prix augmente, il achète
une quantité plus faible du bien). La santé n’est pas un bien comme les autres puisque la
demande en ce bien est peu élastique au prix : l’utilité des soins augmente quand l’état de
santé de l’individu se dégrade. Le consommateur n’ayant à sa charge qu’une fraction du prix
des soins (puisque le régime général et les éventuelles complémentaires interviennent sur les

- 128 -
montants à la charge des malades) la relation prix-demande diffère de celle des biens
classiques.
Au niveau macroéconomique, on constate également que sur une période longue, les
dépenses de santé tendent à augmenter plus vite que le PIB (représentant la richesse d’un
pays) avec une hausse d’un point par décennie de la part des dépenses de santé dans le PIB :

Figure 79 : PIB et évolution de la part des dépenses courantes de santé dans le PIB en France depuis 1995

2 000
1 800
11,70% 12%
1 600
(Milliards d'euros)

1 400 11,10%
11,01% 11,05% 11,00% 11,01%
1 200 10,90%
10,67% 11%
1 000
10,41% 10,37% 10,35%
800 10,22% 10,15% 10,22% 10,19%

600 10%
400
200
0 9%
1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009
PIB Part des dépenses courantes de santé dans le PIB

3.1.2.3. Les travaux de Newhouse


Joseph Newhouse, économiste américain, est un des premiers chercheurs à s’être intéressé
au lien existant entre le revenu et les dépenses de santé. Ses travaux ont consisté en une
régression des dépenses médicales par tête sur le PIB par tête en 1970. Dans un article
majeur, publié en 1977, il met en évidence une forte corrélation entre ces deux indicateurs. Il
estime qu’un effet revenu est visible sur les dépenses de santé et plus particulièrement que
le niveau de revenus explique 92 % des écarts de santé entre pays. Sur ce constat, il tire la
conclusion que les soins de santé sont un bien de luxe, c'est-à-dire que la demande d’un
consommateur pour ce bien augmente de façon plus rapide que son revenu. Il observe
également une élasticité revenu significativement supérieure à l’unité (entre 1,15 et 1,31),
caractéristique des biens supérieurs. Ainsi, selon Newhouse, lorsque les revenus augmentent,
les consommateurs émettent une demande de plus en plus forte de soins et, dans les pays où
le niveau de soins est déjà élevé, l’achat d’une unité supplémentaire de soins améliore plus
sensiblement l’état de santé ressenti que l’état de santé réel.

Une caractéristique des biens supérieurs est que l’augmentation des revenus entraine une
déformation de la structure du budget, avec une part plus importante de ce bien.

Plusieurs travaux ont depuis nuancé les conclusions de Newhouse. Selon certains chercheurs,
le progrès technique jouerait un rôle plus important que le revenu dans cette relation,
puisqu’il offrirait sans cesse de nouvelles alternatives à la maladie et engendrerait des
dépenses supérieures. Un autre argument utilisé pour expliquer cette relation est
sociologique : l’augmentation des dépenses de santé plus rapide que le revenu pourrait
s’expliquer par une volonté publique de consacrer plus de budget à sa santé (l’offre de soins
augmenterait dans le même temps).

Au niveau individuel, un paramètre primordial dans l’analyse de cette relation est la


couverture des assurés. Dans le cas d’une assurance maladie de faible qualité, il parait clair
que le revenu joue un rôle fondamental dans la détermination des dépenses de santé alors
que dans le cas inverse la relation entre revenu et dépenses de soins est atténuée.

- 129 -
Malgré tout, les spécificités du « bien santé » sont à l’origine d’une relation particulière entre
revenu et demande. Ainsi, sans oublier le rôle primordial du système d’assurance (qui permet
de réduire pour les assurés les conséquences financières des soins) nous avons souhaité
déterminer si l’effet modérateur du reste à charge dépendait bien du revenu et dans ce cas,
si cet effet était plus ou moins marqué suivant le poste.

3.1.3. L’effet modérateur du reste à charge dépend-il du niveau de


vie ?
L’égalité entre les français dans l’accès aux soins est un des trois piliers fondateurs de
l’Assurance Maladie. Pourtant, en faisant du reste à charge l’instrument principal utilisé pour
limiter la progression des dépenses de santé, la crainte que certains individus renoncent à
des soins indispensables faute de moyens financiers suffisants apparait. Pour confirmer ou
infirmer cette idée, il convient de vérifier si l’effet modérateur du reste à charge dépend du
niveau de vie et plus largement de mettre en évidence l’influence de cette variable sur les
dépenses de santé.

3.1.3.1. Présentation des données


Le niveau de vie représente la qualité et la quantité de biens et de services qu’un individu
peut s’offrir. Pour un acteur du secteur complémentaire, la quantification de cet indicateur
n’est pas chose aisée puisqu’il englobe plusieurs éléments qui ne sont généralement pas
portés à sa connaissance, comme le patrimoine ou le salaire de l’assuré.

Chaque année, les employeurs ont l’obligation de déclarer la rémunération et le statut de


chacun de leurs salariés par le biais de la Déclaration annuelle de données sociales (DADS),
une formalité obligatoire prévue dans le Code général des impôts pour toute entreprise
employant des salariés. Elle permet notamment aux différents organismes sociaux de
déterminer les droits de chaque salarié (retraite, assurance maladie…) et de vérifier le
montant de leur salaire (pré remplissage de la déclaration de revenus). Pour des besoins de
gestion des contrats prévoyance, Gras Savoye a accès aux Déclarations annuelles de données
sociales de certains de ses clients.

Dans la suite de cette étude, nous approximerons le niveau de vie d’un individu par son
salaire. Cette définition, bien que restrictive, est traditionnellement utilisée par les
organismes internationaux pour l’évaluation du niveau de vie. Le principal biais qui pourrait
cependant apparaitre est du au fait que nous utilisions le salaire de l’adhérent et non pas
celui du ménage, ce qui peut être problématique dans le cas des femmes.

Nous disposons des DADS de plusieurs entreprises clientes de taille significative. Cependant,
pour éliminer le biais relatif au niveau de gamme du contrat, nous avons choisi de mener
cette étude sur un seul client proposant les mêmes garanties pour tous ses salariés, c'est-à-
dire un régime du type « Ensemble du personnel ».

Le Groupe sélectionné compte plusieurs milliers de salariés issus uniquement des collèges
cadres et ETAM. Les DADS font mention de leur rémunération annuelle brute pour l’année
2010 et de leur collège.

- 130 -
A l'aide de la base de données de Gras Savoye, nous associons à chaque adhérent ses
dépenses de santé relatives à l'exercice 2010 ainsi que ses caractéristiques démographiques.
Nous choisissons de limiter cette étude aux seuls adhérents (en excluant de fait les conjoints
et les enfants) présents dans les effectifs durant toute l'année afin d'éliminer de potentiels
biais quant à la probabilité de consommer mis en évidence au cours du second chapitre.

A l'issue de cette étape, nous disposons d'une base de données contenant pour 6335
individus les caractéristiques démographiques suivantes :
l’âge,
le sexe,
la localisation géographique (Ile-de-France, grandes agglomérations ou province),
le collège,
la présence ou non d’un conjoint,
le nombre d'enfants.

A chaque assuré est associé ses dépenses de santé par poste (frais réels, remboursements de
la Sécurité sociale, d’une éventuelle première mutuelle, de la complémentaire et le nombre
d'unités consommées) ainsi que sa rémunération annuelle.

3.1.3.2. Caractéristiques démographiques de la population


La population étudiée est essentiellement masculine : 72,5 % des assurés sont des hommes.
La moyenne d’âge des individus est de 38,6 ans. 46 % des assurés habitent en Ile-de-France,
17 % dans une grande ville de province et 35 % dans le reste de la France.

Pour faciliter l’analyse, nous choisissons de découper la population en fonction du revenu des
assurés. Nous construisons 10 groupes de taille équivalente et significative (plus de 600
individus dans chacun d’entre eux) dont les bornes correspondent aux déciles de la variable
salaire. Ainsi, le premier groupe agrège les salariés dont la rémunération est inférieure
à 26 248 €. La médiane de la variable salaire se situe à hauteur de 41 498 €. Enfin, le dixième
et dernier groupe correspond aux assurés dont la rémunération est supérieure à 85 932 €.

Le tableau suivant présente pour chaque groupe le pourcentage de femmes, l’âge moyen, le
pourcentage d’adhérents habitant en Ile-de-France et le salaire moyen. Comme nous l’avons
vu au cours du second chapitre, toutes ces variables jouent un rôle sur la détermination des
dépenses de santé.

- 131 -
Figure 80 : Caractéristiques démographiques des 10 groupes

Décile % femmes Age moyen % IDF Salaire moyen


1 61% 32,8 36% 18 883 €
2 52% 34,6 44% 28 977 €
3 35% 34,4 43% 33 177 €
4 30% 34,5 47% 36 341 €
5 24% 35,7 48% 39 576 €
6 23% 36,8 48% 43 768 €
7 20% 38,7 48% 49 553 €
8 14% 41,5 51% 57 991 €
9 11% 45,9 53% 72 811 €
10 4% 50,6 59% 134 462 €

Ce tableau met en évidence une liaison entre les différentes variables : la rémunération croît
avec l’âge, la proportion d’hommes est plus marquée sur les tranches de rémunération
élevée et le pourcentage d’assurés résidant en Ile-de-France progresse avec le salaire.

3.1.3.3. Lien entre niveau de vie et remboursements complémentaires


Le graphique suivant présente les remboursements annuels moyens de la complémentaire
par décile de revenus. Pour plus de détails, le même type de représentations a été réalisé
pour chaque famille d’actes. Ces derniers graphiques sont visibles en annexe 6.

Figure 81 : Remboursements complémentaires annuels moyens par décile de revenu

700 €

600 €

500 €

400 €

300 €

200 €

100 €

0€
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Déciles de revenu

Bien que ce graphique ne laisse apparaitre aucune relation linéaire directe entre le revenu et
les remboursements complémentaires, nous observons que les individus appartenant aux
premier et dixième déciles sont associés aux remboursements complémentaires les plus
élevés. Plus généralement, la sollicitation de la complémentaire est :
fonction décroissante du salaire entre le premier et le quatrième décile,
fonction croissante du salaire entre le quatrième et le dixième décile.

Pour mieux comprendre cette relation, il convient de caractériser les dépenses des individus
en fonction de leur niveau de vie. Pour ce faire, nous avons utilisé l’analyse en composantes
- 132 -
principales, une méthode d’analyse des données dont le fonctionnement a été détaillé au
cours du second chapitre.

La représentation suivante permet de visualiser sur le premier plan les dix groupes et les
remboursements complémentaires pour chaque famille d’actes.

Figure 82 : Représentation sur le premier plan des dix groupes et des remboursements complémentaires pour
chaque famille d’actes

Eigenvalues d=1

1 Hospitalisation

Consultations.Visites

Medecine.courante

2
3
6
5

8 7

Pharmacie 9

10
Optique

Dentaire

Cette ACP centrée-réduite réalisée avec les dix déciles pour individus met en évidence un
recours à des postes différents selon la rémunération :
Les assurés ayant les salaires les plus faibles sont caractérisés par de fortes dépenses
d’hospitalisation et de consultations et visites,
Les assurés ayant les salaires les plus élevés sont associés aux familles d’actes optique,
dentaire et pharmacie.

Ces résultats confirment les conclusions formulées à l’issue de l’étude visant à caractériser les
dépenses de santé des différents collèges, présentées dans le second chapitre. Nous
observions, en effet, que les dépenses des non cadres étaient marquées par un poids
important de l’hospitalisation alors que celles des cadres correspondaient principalement au
dentaire et à l’optique.

- 133 -
Plus largement, l’opposition entre les individus selon leur niveau de vie s’effectue sur l’aspect
maitrisable ou non du risque. De fait, les individus ayant les salaires les plus faibles n’ont pas
d’autre choix que de recourir aux soins pour un risque lourd comme l’hospitalisation. En
revanche, la fréquence de changement des lunettes et leur prix peuvent être déterminés et
anticipés par chaque salarié. C’est l’hypothèse d’un effet du niveau de vie sur ce type de
dépenses que nous souhaitons à présent vérifier.

3.1.3.4. Lien entre niveau de vie et reste à charge


Le graphique suivant représente le reste à charge et le taux de couverture moyens par décile
de revenus.
Figure 83 : Taux de couverture et reste à charge moyens par décile de revenu

180 € 96%
160 €
94%
140 €
92%

Taux de couverture
120 €
Reste à charge

100 € 90%

80 € 88%
60 €
86%
40 €
84%
20 €
0€ 82%
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Déciles de revenu
Reste à charge Taux de couverture
Ce graphique met en évidence une augmentation du reste à charge et une diminution du
taux de couverture avec le niveau de vie. Ainsi, les assurés ayant le niveau de vie le plus élevé
financent plus largement leur santé avec leurs propres deniers.

Plusieurs hypothèses peuvent être avancées pour expliquer ces différences :


Comme nous l’avons montré précédemment, les assurés ont recours à des postes
différents selon leur niveau de vie. De fortes dépenses visant à couvrir un risque
maitrisable et mal indemnisé sont caractéristiques des individus les plus aisés.
Pour ces mêmes assurés, un recours à des professionnels de santé pratiquant des prix
plus élevés (dépassements d’honoraires) peut être envisagé.
Enfin, la différence de niveau de reste à charge entre les assurés peut s’expliquer par
une sollicitation plus fréquente du système de santé par les plus riches.

L’analyse du taux de couverture suivant le niveau de vie met en évidence des dépenses de
santé plus proches des garanties du régime pour les salariés les plus modestes.

- 134 -
3.1.3.5. Taux d’effort
Le taux d’effort représente la part du reste à charge dans le revenu annuel de l’assuré une
fois déduits les remboursements de la Sécurité sociale et de la complémentaire. Il permet
d’observer l’effort consenti par l’individu pour financer sa santé. Le graphique ci-dessous
représente le taux d’effort moyen pour chacun des dix déciles.

Figure 84 : Taux d’effort moyen par décile de revenu

0,45%

0,40%

0,35%

0,30%

0,25%

0,20%

0,15%

0,10%

0,05%

0,00%
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Déciles de revenu

Le taux d’effort est d’autant plus faible que le revenu est élevé : il représente 0,39 % du
salaire annuel pour les assurés les plus modestes contre 0,12 % pour les individus les plus
aisés. Ainsi, même si les assurés les plus riches sont associés à un reste à charge supérieur,
une part plus faible de leur revenu est consacrée à leurs dépenses de santé.

Le graphique suivant le représente le taux d’effort dans une situation de non-assurance. On


remplace ainsi le reste à charge par les frais réels dans le calcul du taux d’effort.

Figure 85 : Taux d’effort moyen dans une situation de non-assurance par décile de revenu

8%

7%

6%

5%

4%

3%

2%

1%

0%
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Déciles de revenu

- 135 -
Ce graphique permet de confirmer l’importance de l’assurance santé dans la lutte contre les
inégalités d’accès aux soins. En effet, dans une situation de non-assurance, les assurés les
plus modestes devraient consacrer près de 7 % de leur salaire à leur santé, contre moins de 1
% pour les individus les plus fortunés. En réduisant la part des dépenses de santé dans le
revenu, l’assurance permet aux assurés, quel que soit leur niveau de vie, d’accéder plus
facilement au système de santé.

En assurance individuelle, les assurés dont le niveau de vie est le plus élevé souscrivent
majoritairement aux régimes les plus chers, c’est-à-dire ceux qui offrent la meilleure
couverture, du fait d’une sensibilité plus faible au prix. L’assurance collective, en proposant à
tous les assurés les mêmes garanties et le même tarif à situation familiale équivalente, a pour
effet de limiter les disparités de couverture entre les assurés, notamment par l’intermédiaire
d’un transfert de ressources vers les salariés les plus modestes, touchés par une plus forte
exposition à l’hospitalisation. L’assurance collective apparait dès lors comme un véritable
vecteur de la politique sociale de l’entreprise.

Dans la suite de cette partie, nous nous intéresserons plus spécifiquement aux risques
maitrisables puisque c’est sur ceux-ci que le reste à charge a une influence forte. Notre choix
s’est porté sur la famille d’actes « Optique » pour laquelle nous étudierons les déterminants
des dépenses à l’aide des modèles linéaires généralisés.

3.1.3.6. Les modèles linéaires généralisés

3.1.3.6.1. Le modèle linéaire gaussien


Le modèle linéaire gaussien a pour objectif de mettre en relation une variable endogène Y et
n variables exogènes X 1 ,..., X n . Ce modèle s’écrit sous la forme :

n
Y = β 0 + ∑ β i X i + ε avec :
i =1

n
Y ~ N(β 0 + ∑ β i ,σ ²) ,
i =1

n
β 0 + ∑ β i X i : le prédicteur linéaire,
i =1

ε : le terme d’erreur, une variable centrée de variance σ ² constante et telle que


ε ~ N(0,σ ²) ,
β 0 ,..., β n : les paramètres inconnus du modèle qu’il convient d’estimer.

Un des principaux inconvénients du modèle linéaire gaussien est d’imposer la normalité de la


variable à expliquer et des erreurs. Pour supprimer cette contrainte, John Nelder et Robert
Wedderburn, deux statisticiens anglais, ont introduit en 1972 les modèles linéaires
généralisés (MLG). Dans ce type de modèles, la loi de probabilité de la variable à expliquer ne
suit plus obligatoirement la loi normale mais doit simplement appartenir à la famille
exponentielle.

- 136 -
3.1.3.6.2. La famille exponentielle
La loi de probabilité de la variable à expliquer appartient à la famille exponentielle si et
seulement si elle peut se mettre sous la forme suivante :

θy − b(θ ) 
f ( y,θ , ϕ ) = exp + c( y, ϕ ) avec :
 a(ϕ ) 

θ : paramètre réel appelé paramètre canonique,


ϕ : paramètre réel appelé paramètre de dispersion ou « nuisance parameter »,
a : une fonction fixée définie sur R et non nulle,
b : une fonction fixée définie sur R et non nulle et deux fois dérivable,
c : une fonction fixée définie sur R².

On montre que la moyenne et la variance d’une variable aléatoire Y appartenant à la famille


exponentielle sont obtenues par dérivation de b :
E (Y ) = µ = b' (θ ) ,
V (Y ) = b' ' (θ )a(ϕ )

On remarque que la variance de Y augmente avec la moyenne. On parle alors d’inflation de la


variance.

Les lois de probabilité normale, de Poisson, gamma, exponentielle, inverse gaussienne et


binomiale appartiennent à la famille exponentielle.
3.1.3.6.3. Caractéristiques des modèles linéaires généralisés
Un modèle linéaire généralisé est défini par trois éléments :
Une variable réponse Y à laquelle est associée une loi de probabilité de la famille
exponentielle,
Un ensemble de n variables explicatives X 1 ,..., X n formant la composante
déterministe du modèle,
Une fonction de lien g(.) permettant de relier les n variables explicatives à l’espérance
mathématique de la variable à expliquer, c'est-à-dire la composante aléatoire à la
composante déterministe. Monotone et dérivable, elle est définie sur R comme :
n
g ( E (Y )) = β 0 + ∑ β i X i
i =1
En utilisant par exemple la fonction de lien g(E(Y))=log(E(Y)), on modélise le
logarithme de l’espérance. On parle alors de modèles log-linéaires.
3.1.3.6.4. Choix de la fonction de lien
On associe à chacune des lois de probabilité de la famille exponentielle une fonction de lien
spécifique de l’espérance, appelée fonction de lien canonique reliant l’espérance à θ . Le lien

- 137 -
canonique est alors défini comme gη ( µ ) = θ . Etant donné que µ = b' (θ ) , la fonction de lien
canonique est celle qui vérifie gη−1 ( µ ) = b' :

Si Y est issue de la distribution normale, la fonction lien canonique est l’espérance.


Si Y est issue de la distribution de Poisson, la fonction lien canonique est le logarithme
de l’espérance.
Si Y est issue de la distribution binomiale, la fonction lien canonique est le logit de la
probabilité de succès.

Après avoir identifié la loi de probabilité la variable réponse, on peut choisir, par exemple, la
fonction de lien canonique comme fonction de lien, même si cela n’est pas obligatoire. En
pratique, nous retiendrons celle qui minimise la déviance, dont une définition sera donnée
dans le paragraphe suivant. Les paramètres du modèle linéaire généralisé sont alors estimés
à l’aide du maximum de vraisemblance.
3.1.3.6.5. Mesure de la qualité de l’ajustement : la déviance
Pour mesurer l’adéquation du modèle aux données, on utilise un modèle intermédiaire, basé
sur la même loi de probabilité et la même fonction de lien mais contenant autant de variables
explicatives indépendantes que d’observations, permettant ainsi une description parfaite des
données. On parle de « modèle saturé ».

On pose alors :
LSAT : la vraisemblance du modèle saturé,
L : la vraisemblance du modèle dont on souhaite mesurer la qualité.

On considère le modèle comme de bonne qualité si L ≈ LSAT .

On définit plus largement D*, la « déviance réduite » ou « déviance normalisée » comme :

D* = 2(ln LSAT − ln L)

On introduit alors la « déviance non réduite » comme :

D =ϕ × D*

La déviance est une mesure de la qualité d’ajustement d’un modèle linéaire généralisé : plus
la déviance est faible, meilleur est le modèle. Afin de déterminer quelles sont les variables qui
participent à l’explication de la variable réponse, on sélectionnera celles qui font diminuer au
maximum la déviance.
3.1.3.6.6. Analyse des résidus
L’analyse des résidus a pour but de valider les hypothèses du modèle et de tester sa qualité.
Elle permet de mettre en évidence d’éventuelles observations aux caractéristiques atypiques,
appelées « outliers », qui peuvent biaiser l’évaluation des paramètres. Il conviendra de
supprimer ces valeurs et de reestimer le modèle pour obtenir de meilleurs résultats.

- 138 -
Les résidus de Pearson et les résidus déviance sont les deux formes de résidus les plus
couramment utilisées, et notamment dans les logiciels de statistiques.

On définit le résidu théorique de Pearson comme :

Yi − µ i
r p ,i =
V (µ i )

On définit le résidu déviance comme :

rD,i = d i signe( y i − µ i )

Avec d i la contribution de l’observation i à la déviance du modèle.

On dira que le modèle est de bonne qualité si, en représentant à l’aide d’un graphique
contenant en ordonnées les résidus et en abscisses les classes des différentes variables, on
observe qu’ils sont proches de 0 et répartis uniformément sur l’axe des abscisses.

3.1.3.7. Application des modèles linéaires généralisés sur le prix des montures
On propose de tester l’effet des différentes variables démographiques sur le prix des
montures. Ce poste a été choisi du fait d’une garantie uniforme pour tous les salariés ; la
garantie relative aux verres étant quant à elle libellée sous la forme d’une grille optique.
Au cours de l’exercice 2010, 1453 assurés sur 6335 ont acheté au moins une monture. Dans
un premier temps, on souhaite tester l’hypothèse que le prix d’une monture dépend de la
zone géographique dans laquelle exerce l’opticien, du revenu et de l’âge de l’assuré (découpé
en classes de 10 ans pour faciliter l’analyse).

On représente ci-dessous le coût moyen d’une monture par décile de revenus.

Figure 86 : Prix moyen d’une monture par décile de revenu

200 €

180 €

160 €

140 €

120 €

100 €

80 €

60 €

40 €

20 €

0€
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Déciles de revenu

- 139 -
Les différents tests d’ajustement réalisés nous permettent d’associer le prix des montures à
une loi Gamma. Nous choisissons d’utiliser le lien log pour faciliter les interprétations.

Pour estimer ce modèle, nous utilisons la procédure GENMOD du logiciel SAS. La première
étape consiste à qualifier l’ajustement du modèle. Pour cela, nous utilisons le critère de la
déviance. SAS fait état d’une déviance réduite, divisée par les 1437 degrés de liberté, proche
de l’unité (1,04). Le modèle semble donc de bonne qualité.

Nous cherchons à présent à déterminer les variables ayant un effet sur le prix des montures.
Pour cela, nous nous reportons à l’analyse de type 3, c'est-à-dire la somme des carrés des
erreurs partielles de chaque variable explicative, qui permet de tester chaque effet pris
séparément par rapport au modèle général, à l’aide du test du Khi-deux. On considère que
chaque variable significative au seuil de 5 % fait partie du modèle. Les résultats sont les
suivants :
Figure 87 : Sortie SAS - Test de type III

A l’issue de cette première étape, seul l’effet de la variable décile, c'est-à-dire le revenu,
apparaît significatif au seuil de 5 %. On adopte alors une méthode de type backward dont le
principe consiste à éliminer une à une les variables les moins significatives afin de ne garder
que les variables significatives dans le modèle définitif.

On ne modélise plus que le coût moyen de la monture qu’à l’aide de la variable décile
représentant le salaire.

- 140 -
Figure 88 : Sortie SAS – Modèle contenant une seule variable explicative : le salaire

Le modèle présenté ci-dessus utilise une modalité de référence, le dixième décile, pour
laquelle le coefficient associé est nul. L’intercept nous permet alors de déterminer le prix
moyen d’une monture pour ce groupe.

Plus la p-valeur est petite, plus le pouvoir explicatif de la modalité étudiée est important.
Toutes les classes sont significatives au seuil de 6 %. Dès lors, nous concluons à une relation
croissante entre le revenu et le prix des montures.

Le modèle choisi permet d’exprimer le prix moyen d’une monture pour une catégorie
d’assuré en fonction d’un individu de référence. Le choix de la fonction de lien logarithme
permet d’écrire :
p
ln(µ i ) = β 0 + ∑ β j xij
j =1

Et :
p
µ i = exp(β 0 + ∑ β j xij )
j =1

On peut quantifier facilement l’influence d’un changement de décile sur le prix de la


monture. Pour le dixième décile, classe de référence, le prix moyen d’une monture s’élève à
e5,22 € c'est-à-dire à 185 €. Pour le premier décile, une monture coûte en moyenne 148 €
(e5,22 e-0,22 €).

Le fait que l’âge n’ait pas d’effet sur le prix de la monture s’explique par le fait que seuls les
adhérents, c'est-à-dire des adultes, sont concernés par cette étude.
- 141 -
3.1.3.1. Application des modèles linéaires généralisés sur le reste à
charge du poste optique
La spécificité du reste à charge réside dans le fait que cette variable puisse prendre des
valeurs nulles. Cette situation se produit dans le cas d’une absence de consommation par
l’assuré ou d’un remboursement de la Sécurité sociale et des différents organismes
complémentaires à hauteur des frais réels. Dès lors, la modélisation du reste à charge par une
loi continue se complique sensiblement.
Pour résoudre ce problème, nous étudierons le reste à charge du poste optique en deux
temps : d’abord en modélisant à l’aide d’une loi Gamma le reste à charge pour les individus
pour lesquels celui-ci est strictement positif ; ensuite en utilisant une loi de Bernoulli pour
distinguer les individus ayant un reste à charge positif de ceux ayant un reste à charge nul.
3.1.3.1.1. Modélisation du reste à charge non nul
On cherche à modéliser le reste à charge non nul relatif au poste optique à l’aide d’une loi
Gamma et du lien log. Pour cela, on utilise un modèle linéaire généralisé associant au reste à
charge les différentes variables démographiques préalablement citées. Le meilleur modèle au
sens de la déviance et après analyse des résidus, démontre la significativité du salaire, de
l’âge et de la localisation géographique. Les résultats sont présents sur la figure suivante.

Figure 89 : Sortie SAS – Modèle contenant trois variables explicatives : le salaire, l’âge et la localisation
géographique

Pour obtenir ce résultat, nous avons préalablement regroupé différentes modalités non
significatives : les individus de plus de 50 ans ne forment qu’une classe (contre deux

- 142 -
auparavant) et les salariés résidant en Ile-de-France appartiennent au même groupe que les
salariés des grandes villes.
L’analyse de type trois confirme la significativité des différentes variables étudiées.
L’individu de référence habite dans une grande ville, a plus de 50 ans et fait partie des
salariés dont la rémunération est parmi les 10 % les plus élevées. Pour interpréter ces
résultats, on utilise la même méthode que pour le coût moyen d’une monture. Les principaux
résultats sont les suivants :
Le reste à charge moyen lié à l’optique, s’élève, pour un individu de référence, à e5,74
€ soit 311,60 €,
Pour un assuré ayant les mêmes caractéristiques démographiques que l’individu de
référence mais dont les revenus font partie des 10 % les plus faibles, ce reste à charge
s’élève à e5,74 e-0,49 € soit 190,57 €,
Pour un assuré ayant les mêmes caractéristiques démographiques que l’individu de
référence mais ne résidant pas dans une grande ville, ce reste à charge s’élève à e5,74
e-0,19 € soit 257,24 €,
Pour un assuré ayant les mêmes caractéristiques démographiques que l’individu de
référence mais étant âgé de moins de 30 ans, ce reste à charge s’élève à e5,74 e-0,44 €
soit 200,34 €.

Le reste à charge observé sur le poste optique apparait dès lors étroitement lié à la région de
résidence, à l’âge de l’individu et à ses revenus. On conclue à l’aide de cette analyse que le
reste à charge du poste optique est croissant avec l’âge et le niveau de vie, mais également
plus élevé dans une grande ville qu’ailleurs.
3.1.3.1.2. Modélisation de la probabilité d’avoir un reste à charge non nul
Dans un deuxième temps, on cherche à modéliser la probabilité d’avoir un reste à charge non
nul pour la famille d’actes « optique » à l’aide d’une loi de Bernoulli. Comme précédemment,
les traitements sont réalisés sur SAS, avec les mêmes variables explicatives que pour la
modélisation du reste à charge non nul, effectué à l’aide d’une loi Gamma. Le meilleur
modèle est présenté sur la figure suivante.

- 143 -
Figure 90 : Sortie SAS – Modèle contenant une seule variable explicative : l’âge

Seule la variable « âge » a un effet significatif sur la probabilité d’avoir un reste à charge non
nul. Ainsi, plus les individus vieillissent, plus la probabilité qu’ils doivent participer
directement au financement de leur correction visuelle augmente. Pour un individu de
référence (plus de 50 ans), cette probabilité s’élève à 36 %, contre 27 % pour un individu âgé
de 40 à 50 ans. Une explication de ce phénomène peut résider dans le fait que le recours aux
verres progressifs, c’est-à-dire des équipements moins bien remboursés, devient plus
fréquent en vieillissant.

Ainsi, si seul l’âge a un effet sur la probabilité d’avoir un reste à charge non nul en optique
c’est à la fois l’âge, le salaire et la localisation géographique de l’assuré qui permettent d’en
déterminer son niveau.

Conclusion
Cette étude a permis de mettre en évidence une sollicitation de l’organisme complémentaire
très variable selon la rémunération des assurés. Les salariés faisant partie des 10 % les plus
modestes, bien que les plus jeunes de notre population et habitant majoritairement en
province, sont associés aux remboursements complémentaires les plus élevés. La structure
de leurs dépenses est atypique, avec un recours très marqué à l’hospitalisation mais peu
prononcé sur des postes visant à couvrir des risques maitrisables et entrainant un reste à
charge plus élevé, comme l’optique. Néanmoins, le fait que cette population soit très jeune
explique au moins en partie ce dernier phénomène.

Les assurés faisant partie des 10 % les plus riches sont caractérisés par de fortes dépenses sur
des postes moins bien pris en charge par l’Assurance Maladie, comme le dentaire et

- 144 -
l’optique. Nous avons mis en évidence, pour ce groupe d’individus, le choix de montures en
moyenne plus chères que pour le reste de la population.

Nous constatons dans le même temps une adaptation des dépenses de santé aux garanties
complémentaires plus marquée pour les individus les plus modestes, ce qui se traduit plus
largement par une dégradation du taux de couverture à mesure que les revenus progressent.

L’étude réalisée sur le poste optique à l’aide des modèles linéaires généralisés, dont une des
principales conclusions est que le revenu participe à la détermination du niveau de reste à
charge en optique, a permis de démontrer que l’effet modérateur du reste à charge dépend
du niveau de vie de l’assuré.

Enfin, cette étude confirme que les régimes complémentaires collectifs sont synonymes de
solidarité entre les salariés, principalement à destination des moins riches, c’est-à-dire les
assurés les plus exposés aux risques lourds. Néanmoins, un effet non souhaité apparait, avec
un transfert de ressources des individus pour lesquels le salaire peut être qualifié de moyen
vers les individus les plus riches, permettant à ces derniers de supporter moins directement
les conséquences financières de leur préférence pour des actes plus chers, qui peuvent être
assimilés à des actes de confort.

3.2. Focus sur les contrats collectifs


3.2.1. Rappels de tarification
La tarification d’un contrat d’assurance vise à déterminer le montant de la prime permettant
de couvrir les sinistres survenus au cours de la période et les frais de fonctionnement de
l’assureur. En assurance santé, elle est souvent réalisée à partir de méthodes déterministes
ou de modèles linéaires et repose sur des techniques statistiques, où la prime pure est
obtenue en multipliant la fréquence de survenance du sinistre par son coût moyen. Cette
technique, introduite par le Bureau commun des assurances collectives (BCAC) en 1968 dans
le « Guide de l’assurance Groupe » est toujours très répandue dans les services de tarification
des organismes complémentaires.

Une tarification se déroule en deux étapes : dans un premier temps, le calcul d’une prime
pure qui représente le montant attendu des sinistres pour la période d'assurance. Puis, le
calcul de la prime commerciale, qui représente la prime pure majorée de chargements.

La prime pure est définie théoriquement comme :


n
∏ = E (∑ X i ) avec :
i =1

∏ : la prime pure
X i : le coût moyen du sinistre i
n : le nombre de sinistres observés sur la période

- 145 -
La prime commerciale est alors définie comme :

∏ ' = ∏ *(1 + α )

Avec α le taux de chargements, prélevés sur le principe d’une contribution et non d’une
taxe.
En pratique, cette méthode est souvent réalisée de manière empirique en se basant sur un
nombre important d’observations.

On définit le coût moyen d’un acte i pour l’assureur comme la somme des remboursements
effectués pour cet acte au cours de la période divisée par le nombre d’actes réalisés sur la
période étudiée. Ainsi, pour un acte i :

remboursements assureuri
coût moyeni =
nombre d ' actesi

On définit la fréquence d’un acte comme le nombre d’actes réalisés au cours de la période
divisé par le nombre d’individus soumis au risque :

nombre d ' actesi


frequencei =
nombre d ' individus sous risque

On calcule alors la prime pure moyenne nécessaire pour couvrir un acte comme :

primei = coût moyeni * fréquencei

Pour obtenir la prime pure moyenne, il suffit d’additionner les primes pures individuelles :

n
prime pure moyenne = ∑ primei , avec n le nombre d’actes couverts
i =1

Cette approche est basée sur l’hypothèse que le coût des sinistres ne dépend pas de leur
nombre. Cette hypothèse n’est pas vérifiée en pratique en assurance santé. Pour palier à
cette contrainte, on pourra utiliser une approche alternative basée sur le même modèle
théorique : le calcul de la consommation moyenne par assuré pour chaque âge.

Nous avons vu que les deux déterminants des dépenses de santé sont la fréquence et le coût
moyen des actes. Limiter les dépenses passera donc principalement par une intervention sur
ces deux facteurs. Dans la suite de cette étude, nous verrons quels mécanismes mettre en
œuvre pour y parvenir.

3.2.2. Le rôle de l’aléa moral


L’aléa moral représente le changement de comportement d’un individu suite à la mise en
place d’une assurance. Deux formes d’alea moral sont à distinguer : l’aléa moral ex ante, et
l’aléa moral ex post.

- 146 -
3.2.2.1. L’aléa moral ex ante
L’adhésion à une assurance peut amener un individu à changer son comportement vis-à-vis
de la prévention puisqu’il n’assumera plus seul les conséquences des risques contre lesquels
il s’est prémuni, si ceux-ci se réalisent. Un exemple d’aléa moral ex ante est l’absence de
visites régulières chez un chirurgien-dentiste qui permettraient d’intervenir rapidement suite
à l’apparition de caries, ce comportement peut alors conduire à la mise en place de prothèses
dentaires bien plus coûteuses pour le régime complémentaire.

3.2.2.2. L’aléa moral ex post


On l’observe quand un assuré adopte un comportement de surconsommation suite à la mise
en place d’une assurance. Souhaitant maximiser son utilité, il utilise au mieux les garanties
proposées par son assurance complémentaire. Un exemple d’aléa moral ex post concerne
l’optique, où un changement fréquent de lunettes non nécessité par une modification du
défaut visuel est réalisé dans le but d’atteindre le plafond de garanties proposé dans le
contrat complémentaire.

La lutte contre l’aléa moral est primordiale pour les assurances complémentaires qui
cherchent à maîtriser l’évolution des dépenses de santé. L’objectif est de responsabiliser les
assurés pour leur permettre de mesurer l’impact financier sur le montant des cotisations de
leur consommation de soins. Des mécanismes incitatifs doivent permettre de lutter contre
cette situation de défaut de coordination : tout le monde souhaite que les dépenses
collectives du régime diminuent, mais au niveau individuel, personne n’y a intérêt.

3.2.2.3. Elasticité-prix
Comme nous l’avons vu précédemment, plus l’assuré est impliqué financièrement dans ses
dépenses de santé, moins l’effet de l’aléa moral sera marqué. Il y a donc une relation directe
entre prix des soins pour l’assuré et demande.

On définit l’élasticité-prix comme l’effet d’une augmentation des prix sur la demande :

∆Q
Q ∆Q P
e= = ×
∆P ∆P Q
P

Dans cette définition, le prix représente le reste à charge pour l’assuré et non le prix réel du
soin puisque les remboursements de l’Assurance Maladie et des organismes
complémentaires sont transparents pour l’assuré.

L’élasticité est pour la plupart des biens négative : une hausse des prix entraine une baisse de
la demande. On parle alors de biens typiques.

Une élasticité positive représente une hausse de la demande quand les prix augmentent. Ces
biens sont qualifiés d’atypiques et on en rencontre deux types :
Les biens de Giffen : c’est le cas d’un bien A, qui, quand son prix augmente, ne peut
être remplacé par un bien B du fait du revenu très faible du consommateur. Ce

- 147 -
dernier est, dans une telle situation, obligé de modifier son comportement de
consommation et d’augmenter sa demande en bien A qui reste, malgré un prix en
hausse, le moins cher.
Les biens de Veblen font partie des biens de luxe. Un exemple de bien de Veblen est
le parfum : psychologiquement, acheter un parfum cher est un symbole de distinction
sociale.

Une élasticité nulle représente le fait que quand le prix évolue, la demande n’évolue pas.
C’est le cas des produits de première nécessité.

En conclusion, plus l’élasticité de la demande sera fortement négative, plus la présence de


l’aléa moral sera réduite. Ainsi, plus on se rapprochera d’une situation de non assurance où
les consommateurs payent le prix réel des soins qu’ils utilisent, plus la présence d’aléa moral
sera réduite. Lutter contre l’aléa moral signifie donc mettre en place un système incitatif qui
pousse les assurés à adopter un comportement responsable en favorisant la prévention
(bonus ou punitions) et en agissant sur leur participation financière (le reste à charge).

3.2.2.4. Les mécanismes de lutte contre l’aléa moral

La coassurance : ce mécanisme force l’assuré à payer un pourcentage fixe du montant


des soins qu’il reçoit. Ainsi, plus le montant des soins est important, plus l’assuré
devra participer à son financement. Dans un système de coassurance à 20 %, si les
frais réels engagés par l’assuré sont de 100 €, il devra payer 20 €.
Le copaiement : son fonctionnement est proche de celui de la coassurance. Il consiste
à faire payer à l’assuré un montant fixe des dépenses qu’il engage. Dans un système
de copaiement à 20€, si les frais réels engagés par l’assuré sont de 100 €, il devra
payer 20 €. Comme pour la coassurance, il s’agit d’un arbitrage entre partage des
risques et responsabilisation.
La franchise : à la différence du copaiement et de la coassurance, la franchise
représente un montant dont l’assuré devra s’affranchir quelque soit le coût des soins
qu’il reçoit au cours de la période. Au delà de cette franchise, c’est l’assurance qui
remboursera les soins. Ainsi, si une franchise de 20 € est mise en place, l’assuré devra
payer 20 € que ses dépenses s’élevent à 20 ou 100 €. La franchise peut être utilisée
pour éviter les dépenses de confort et vise à moins défavoriser les grands
consommateurs de soins. Elle peut avoir également pour objectif une réallocation des
remboursements vers les risques les plus lourds.
Le « managed care » : c’est un système américain de gestion de l’offre instaurant des
listes d’attente pour avoir accès aux soins. Le degré d’acceptation de ce mécanisme
dépend du type de soins concernés (mortels, non-mortels) et de la longueur de la file
d’attente.
La désassurance : elle consiste en une suppression des remboursements d’actes (en
commençant par les actes de confort) ou de personnes (par exemple les revenus
élevés). Les individus doivent alors payer entièrement le montant des soins reçus.

- 148 -
3.2.3. La prévention
L’apport de la prévention dans un objectif de réduction des dépenses de santé est
fondamental. Les pouvoirs publics l’ont bien compris, puisqu’un contrat complémentaire doit
prévoir dans ses garanties le remboursement d’au moins deux actes de prévention pour
bénéficier du label « responsable ».

3.2.3.1. Définition
Une définition de la prévention est présente dans l’Article L1417-1 du Code de la Santé
publique :
« La politique de prévention a pour but d'améliorer l'état de santé de la population en évitant
l'apparition, le développement ou l'aggravation des maladies ou accidents et en favorisant les
comportements individuels ou collectifs pouvant contribuer à réduire le risque de maladie et
d'accident. A travers la promotion de la santé, cette politique donne à chacun les moyens de
protéger et d'améliorer sa propre santé. »

Cette définition est donc très vaste et regroupe un grand nombre de mécanismes
(campagnes publicitaires, dépistages, examens réguliers…) visant à réduire les risques de
survenance d’une maladie. Ainsi, il est d’usage de classer les actions de prévention en
plusieurs groupes. Nous retiendrons le classement le plus couramment utilisé, introduit par
l’OMS, qui établit trois niveaux de prévention : primaire, secondaire, et tertiaire.
La prévention primaire agit directement sur les facteurs de risque afin d’empêcher
l’apparition de la maladie chez les bien portants. On peut citer la vaccination, ou les
campagnes de sensibilisation et de promotion de l’hygiène de vie comme
s’apparentant à la prévention primaire.
La prévention secondaire, notamment par l’intermédiaire du dépistage, cherche à
détecter les signes avant-coureurs d’une maladie afin d’intervenir à un stade où la
maladie est peu avancée.
La prévention tertiaire qui tend à limiter les récidives et à favoriser la réinsertion
sociale après l’apparition de la maladie, avant ou après les soins. Elle fait référence,
par exemple, à la prévention des récidives d’infarctus du myocarde (combat du
tabagisme, de l’alcool et de la drogue).

En France, en 2002, la moitié des dépenses de prévention était consacrée à la prévention


primaire, un quart à la prévention secondaire et un autre quart à la prévention tertiaire.

3.2.3.2. Le rôle de la prévention dans la réduction des dépenses de santé


Pour bien comprendre l’importance de la prévention dans la réduction des dépenses de
santé, nous pouvons prendre un exemple très parlant : la carie dentaire.

La carie dentaire est une maladie infectieuse de la dent provoquée par la présence de
certaines bactéries et de substrats dans la bouche. Son développement peut être favorisé
chez certains individus par le mode de vie ou le profil génétique.

- 149 -
Soigner une carie passe obligatoirement par un traitement réalisé par un chirurgien-dentiste.
Cependant, la nature de ce traitement (et son coût) dépendra du stade d’avancement de la
carie. Nous pouvons distinguer trois cas :
Si la carie n’est pas très développée le dentiste peut l’éliminer facilement par
l’éviction des tissus ramollis par la carie. Il pose ensuite un amalgame visant à
reconstituer la forme de la dent et à boucher le trou provoqué par l’élimination de la
carie. Ce soin conservateur très courant coûte entre 15 et 36 €.
Si la dent est trop abimée et qu’un amalgame n’est pas suffisant, le traitement est
plus long. Il s’agit dans un premier temps de dévitaliser la dent afin de limiter la
douleur. Cependant, une dent « morte » est fragile et peut casser. Pour l’en protéger,
les chirurgiens dentistes installent une couronne dentaire, dont le but est de recouvrir
la dent fragile afin d’en assurer la solidité. Coût moyen de cette alternative, environ
500 €.
Enfin, lorsque la carie est plus avancée, la dent ne peut plus servir de support pour la
pose de la couronne. Le chirurgien dentiste installe alors en plus de la couronne un
inlay core (extension métallique qui s’ancre directement dans la racine). Coût moyen
de cette alternative, près de 800 €.

Ainsi, plus la carie est soignée rapidement, plus le coût du traitement est faible. Le rôle de la
prévention est donc important : la prévention primaire dans le traitement de la carie
concerne l’hygiène bucco-dentaire (brossage régulier des dents) et la limitation du grignotage
entre les repas, qui augmente les attaques contre les dents. La prévention de type secondaire
passe par des visites régulières (une fois par an pour un adulte) chez un chirurgien-dentiste
afin de traiter les caries à leur niveau initial.

Il est donc important de communiquer, tant pour l’Assurance Maladie que pour les
complémentaires. L’Assurance Maladie a déjà fait un pas en ce sens, par la mise en place
d’une consultation de prévention gratuite chez le dentiste pour les 15-18 ans et la prise en
charge à 100 % des soins qui lui font suite.

Une intervention publique en matière de prévention est fondamentale. En effet, les individus
n’ont pas toujours les connaissances suffisantes pour mettre en œuvre les mécanismes visant
à les protéger et c’est le rôle de l’Etat d’apporter des solutions pour résorber ce déficit
informationnel. Ainsi, de nombreuses campagnes de sensibilisation ont été lancées ces
dernières années. Elles passent par l’information et l’incitation en faveur du grand public
(lutte contre l’obésité par l’activité physique et l’alimentation) ou sur un groupe d’individus
plus ciblé (dépistage du cancer du sein chez les femmes de 50 à 74 ans, qui sont invitées à se
faire dépister tous les deux ans sans avance de frais).

Les complémentaires ont également un rôle à jouer dans le développement de la prévention,


d’une part dans l’optique de limiter l’augmentation des dépenses de santé et, d’autre part,
pour préserver la santé de leurs assurés.
Depuis 2007, pour bénéficier d’avantages fiscaux et sociaux, elles doivent prendre en charge
l’intégralité du ticket modérateur dans le cadre du parcours de soins coordonnés pour au
moins deux actes dits de prévention parmi une liste de sept (ostéodensitométrie, dépistage
des troubles de l’audition, dépistage de l’hépatite B, détartrage, vaccinations, scellement

- 150 -
prophylactique des puits, sillons et fissures et bilan du langage oral et/ou bilan d'aptitudes à
l'acquisition du langage écrit), certains actes concernant des catégories définies de
personnes, comme les jeunes. Il est, enfin, à noter que certains organismes complémentaires
ont fait le choix de prévoir dans leurs garanties le remboursement systématique de ces sept
actes.

3.2.4. Le rôle de l’actuaire : proposer des garanties en accord avec les


besoins
Le choix de la structure des cotisations et du niveau de garanties est primordial pour une
gestion efficace d’un régime frais de santé. L’équilibre entre prix et prestations est difficile à
trouver : les assurés ont des attentes fortes en matière de reste à charge mais souhaitent
limiter au maximum leur participation dans le régime. Ainsi, le rôle d’un conseil n’est pas de
proposer aux clients les garanties les plus élevées (et donc les plus chères) mais des
prestations en accord avec leurs besoins.

Si le choix du type de cotisations dépend directement de la structure de la population et


relève de l’expérience du conseil et du degré de solidarité entre les assurés voulu par le
client, il en est autre pour le choix des garanties. Cette partie a pour but de présenter deux
outils d’aide à la décision qui peuvent être construits facilement par un actuaire afin de
mieux connaitre le profil de dépenses des assurés et de simuler rapidement l’impact d’un
changement de garanties.

3.2.4.1. Connaissance du profil des dépenses


Pour bien comprendre la structure de dépenses d’un régime de frais de santé, un actuaire
peut réaliser dans un premier temps une répartition des dépenses par tranches de coûts.
L’idée de cette représentation est de visualiser la dispersion des dépenses et les fréquences
associées.

Pour réaliser cette représentation, on affecte les actes correspondant à chaque tranche de
frais réels préalablement définie et on calcule, pour chaque tranche :
la somme des frais réels engagés,
la somme des remboursements de la Sécurité sociale,
la somme des remboursements d’une éventuelle première mutuelle,
la somme des remboursements de notre complémentaire,
la somme du reste à charge,
le nombre d’actes appartenant à la tranche,
la fréquence (nombre d’actes appartenant à la tranche sur nombre d’actes total),
la fréquence cumulée.

Cette représentation permet de calculer facilement, pour chaque tranche :


les frais réels moyens,
les remboursements moyens de la Sécurité sociale,

- 151 -
les remboursements moyens des éventuelles premières mutuelles,
les remboursements moyens de notre complémentaire,
le reste à charge moyen,
le taux de couverture par tranche,
la fréquence moyenne.

Cette représentation s’utilise généralement sur les postes les plus discriminants pour le
régime. Par exemple :
En hospitalisation : les chambres particulières (tranches calculées en pourcentage du
PMSS) et les honoraires / chirurgie (tranches calculées en pourcentage de la base de
remboursement),
En consultations / visites : les consultations de généralistes et de spécialistes
(tranches calculées en pourcentage de la base de remboursement),
En dentaire : les prothèses dentaires de type SPR 50 (tranches calculées en
pourcentage de la base de remboursement),
En optique : les montures et les verres (tranches calculées en pourcentage de la base
de remboursement).

En permettant un pilotage plus fin du régime, cet outil évalue le niveau de couverture par
tranche de coûts. De plus, il permet de simuler rapidement l’impact d’un ajustement des
garanties à la baisse.

Une utilisation plus concrète de cet outil est présentée dans la partie « Modification des
garanties ».

3.2.4.2. Simulation de l’impact d’un changement de garanties


Après avoir étudié la structure des dépenses, un actuaire peut construire un outil simple
permettant de simuler l’impact d’un changement de garanties. Bâti sur un système de
simulation « What-if », il permet de mesurer les conséquences d’un changement de
garanties, toutes choses égales par ailleurs. Idéalement dynamique, il doit permettre de
calculer instantanément les conséquences de la modification d’une garantie afin de faciliter
la décision.

Les indicateurs que nous pouvons intégrer dans la simulation sont, pour chaque poste :
Les remboursements actuels de la complémentaire,
Les remboursements après simulation de la nouvelle garantie,
L’économie générée,
L’ancien taux de couverture,
Le nouveau taux de couverture,
Le pourcentage d’actes impactés,
Le pourcentage de consommateurs impactés,
L’impact sur le ratio de sinistralité du régime.
- 152 -
A titre d’exemple, on trouve ci-dessous une simulation d’un changement de garantie à 100 %
de la base de remboursement de la Sécurité sociale sur le poste « Consultations de
Généralistes ».

Figure 91 : Simulation d’un changement de garantie à 100 % de la base de remboursement de la Sécurité


sociale sur le poste « Consultations de Généralistes »

Pourcentage de
Nouvelle Remboursements Nouveaux Ancien taux de Nouveau taux de Pourcentage d'actes
Economie consommateurs
garantie actuels remboursements couverture couverture impactés
impactés
100% 160 154,64 € 133 449,46 € 26 705,17 € 95% 88% 13% 13%

La limite de ce type d’outils est de ne pas prendre en compte l'effet fréquence lié à toute
modification de garanties. Il est ainsi courant d’utiliser ce type d’outils lors d’un ajustement
des garanties à la baisse car les économies générées seront normalement plus importantes
que celles simulées (une baisse des garanties s’accompagne normalement d’une baisse de la
fréquence de consommation). De plus, le contrat doit bénéficier d’un effectif conséquent
pour limiter le rôle de la fréquence dans la simulation.

La mise au point d’une telle simulation nécessite de posséder les décomptes ligne à ligne. A
partir de ceux-ci, on simule facilement, pour chaque ligne de décompte, les nouveaux
remboursements complémentaires. L’économie générée se calcule alors comme la différence
entre les remboursements constatés et les remboursements simulés.

Le pourcentage d’actes impactés représente le nombre de « lignes » où les remboursements


simulés sont inférieurs aux remboursements réellement effectués.

Le pourcentage de consommateurs impactés représente le nombre de consommateurs qui


auraient eu au moins un remboursement complémentaire inférieur au remboursement
effectué.

En cas de mise en place d’un plafond, il convient de regrouper les lignes de décomptes par
assuré. L’impact représente alors la somme des remboursements constatés à laquelle le
plafond est soustrait.

Un outil de ce type permet également d’obtenir facilement la garantie qu’il faudrait appliquer
pour réduire les remboursements du poste à un niveau souhaité.

3.2.5. Modifications des garanties


Lorsque le résultat d’un régime frais de santé est dégradé, une des premières actions
souhaitées par l’organisme assureur consiste à diminuer le niveau des garanties. Si l’efficacité
de cette méthode n’est pas à démontrer, réduire les garanties d’un régime frais de santé
pose un véritable problème moral : parallèlement au désengagement de la Sécurité sociale, il
aboutit à un transfert des dépenses initialement prises en charge par la complémentaire vers
les ménages, et donc contribue à limiter l’accès aux soins pour les familles les plus modestes,
d’autant que les ajustements de garanties se déroulent le plus souvent sur les postes où la
marge de manœuvre est la plus importante (les prothèses dentaires et l’optique), qui sont
globalement mal remboursés par l’Assurance Maladie.

- 153 -
Nous allons présenter dans cette partie quelques mesures simples permettant de limiter le
recours aux réductions drastiques de garanties ou à l’augmentation brutale des cotisations.
Elles ont pour principale motivation de faire adopter à l’ensemble des assurés un
comportement de consommation responsable afin de limiter les abus individuels qui
pénalisent le régime dans son ensemble.

3.2.5.1. L’hospitalisation
L’hospitalisation est globalement très bien remboursée par l’Assurance Maladie, même si
celle-ci ne prend pas en charge quelques frais parallèles, comme le forfait hospitalier, la
chambre particulière ou le lit accompagnant. Ainsi, une simple complémentaire santé bas de
gamme permet de très bien rembourser les frais engagés lors d'une hospitalisation (sous
réserve que celle-ci se soit déroulée en établissement public ou privé conventionné).
Cependant, pour éviter les éventuels abus, il convient de plafonner les garanties de ce poste,
même si historiquement de nombreux contrats prévoient des remboursements aux frais
réels. En effet, et même si le choix de l’établissement est souvent réalisé sur des critères
géographiques ou de délais de prise en charge, est-ce bien le rôle d’une complémentaire
santé de rembourser à 100 % une chambre particulière dont le prix atteint 800 € dans un
célèbre hôpital parisien, alors que le prix constaté en moyenne en France s’élève à 69 € et
que la qualité des soins y est globalement très bonne ? Pour une hospitalisation longue, un
tel choix individuel peut pénaliser très durablement le régime complémentaire et mettre à
contribution l’ensemble des salariés.

Ainsi, aux garanties où le nombre de jours d’hospitalisation est limité, il convient de préférer
un plafond de remboursement journalier, ce qui permet de ne pas pénaliser les
consommateurs ayant besoin d’une hospitalisation longue. D’autre part, la mise en place de
telles garanties plafonnées semble primordiale pour l’avenir puisque la Sécurité sociale aura
probablement tendance à diminuer sa couverture sur ce poste, charge qui se reportera sur le
secteur complémentaire.

Pour générer des économies sur l’hospitalisation, des mesures peuvent donc être prises dans
la volonté de limiter les coûts, plutôt que les fréquences.

3.2.5.2. Les consultations / visites


Comme pour l’hospitalisation, ce poste nécessite un encadrement des garanties en termes de
coût. En effet, un travail important sur l’aspect « fréquences » a déjà été mené par
l’Assurance Maladie avec la mise en place du parcours de soins, qui vise à limiter le
nomadisme médical et représente une incitation importante à la modération dans les
consultations de médecins différents. Limiter le coût des consultations se justifie simplement
en observant la distribution des dépenses pour les consultations de généralistes : 83 % des
consultations ont pour prix la base de remboursement fixée par la Sécurité sociale. Il convient
ainsi de fixer en accord avec chaque client un seuil au delà duquel le régime complémentaire
n’intervient plus, celui-ci n’ayant pas pour fondement le remboursement des consultations
au tarif trop élevé alors que des alternatives plus économiques et de très bonne qualité
existent. Les conséquences de certains choix individuels ne doivent pas pénaliser tous les
salariés. Il conviendra également de prévoir une limite de remboursement plus élevée pour
les spécialistes, qui pratiquent plus régulièrement les dépassements d’honoraires que les
généralistes : 60 % des spécialistes sont conventionnés en secteur 1 contre 85 % des
généralistes.
- 154 -
3.2.5.3. La pharmacie
La pharmacie est globalement très bien remboursée. Peu de marge de manœuvre existe sur
ce poste, même si la Sécurité sociale se désengage très rapidement aux dépends des
complémentaires. La mise en place de quelques modestes franchises, notamment sur les
actes où le tiers payant est généralisé comme la pharmacie, permettraient de faire prendre
conscience à certains assurés que la santé a un coût. Dans ce cas, il faudra veiller à ce que le
contrat respecte toujours les normes d’éligibilité au caractère responsable et ne pas fixer des
franchises trop importantes, qui pénaliseraient lourdement les ménages modestes ayant
besoin de traitements.

3.2.5.4. L’optique
L’optique, où la participation de la Sécurité sociale est faible, est la famille d’actes où la
marge de manœuvre pour réaliser des économies est la plus importante. Cependant, toucher
à ces garanties est sensible : les assurés identifient en grande partie grâce à ce poste la
qualité de la complémentaire puisque leur reste à charge y est important. Dans le même
temps, il convient de proposer des garanties qui pénaliseront le moins possible les assurés
ayant un défaut visuel élevé où le coût des verres est important.

Des économies peuvent être réalisées en jouant d’une part sur l’effet fréquence et d’autre
part sur l’effet coût.
3.2.5.4.1. Limiter la fréquence de consommation
Une solution pour limiter la fréquence de consommation en optique consiste à ne prendre en
charge qu’une paire de lunettes tous les deux ans (alors que la Sécurité sociale n’en limite pas
le nombre), à l’exception des enfants (une paire de lunettes par an) et des adultes dont le
défaut visuel a évolué, ou en cas de casse. En effet, un changement d’équipement optique
annuel sans que la correction ne le motive s’assimile à une dépense de confort, qui n’a pas
pour vocation d’être couverte par les autres salariés. En la justifiant et en calculant les
économies qu’elle pourrait générer, cette mesure est globalement bien perçue par les
partenaires sociaux. En effet, sur le portefeuille Gras Savoye, on estime que 20 % des
porteurs de lunettes en changent tous les deux ans. Une telle mesure permettrait donc de
réduire de 4 % le ratio de sinistralité du contrat, ce qui est loin d’être négligeable.
3.2.5.4.2. Mieux allouer le budget grâce à une grille optique
Le remboursement des verres est fixé dans la Liste des produits et prestations (LPP), qui a
remplacé le TIPS (Tarif interministériel des prestations sanitaires) en 2000. Nous avons
représenté ci-dessous le montant de la base de remboursement de la Sécurité sociale en
fonction de la correction du verre (auquel il faudra retrancher 35 % pour obtenir le montant
remboursé par le régime général) :

- 155 -
Figure 92 : Evolution de la base de remboursement de la Sécurité sociale en fonction de la correction
70 €
67 €

60 €

50 €
47 €
45 €
43 € 44 €

40 € 39 €
36 €

30 €
28 €
27 €
25 €

20 €

15 €
12 €
10 € 11 €
10 € 9€
7€ 8€
6€ 7€

4€ 4€
2€

0€

- 156 -
Nous remarquons d’une part que les verres enfants sont mieux remboursés que les verres
adultes mais également que les prestations de la Sécurité sociale sont croissantes avec le
niveau de correction : la codification LPP a pour logique de rapprocher les remboursements
de la Sécurité sociale au besoin médical de l’assuré.

En pratique, l’expérience montre que le prix de vente est souvent adapté au niveau de la
garantie, bien que le prix des verres augmente avec l’intensité du défaut visuel. Ainsi, les
garanties linéaires (forfaits) sont presque toujours utilisées au plafond pour les petits défauts
visuels alors que pour les défauts les plus élevés le reste à charge est souvent élevé :

Figure 93 : Comparatif d’une garantie linéaire et d’une garantie variable (remboursement par verre)

350
300
250
Prix (€)

200 Adaptation à la garantie


150
100
50
0
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Intensité du défaut

Garantie linéaire "classique" Garantie variable selon le défaut visuel

A titre d’illustration, nous avons représenté sur la page suivante la répartition par tranches
de coûts, présentée dans la partie 3.2.4.1, d’un client bénéficiant d’une garantie forfait
optique s’élevant à 18 % du PMSS. Nous observons que la tranche de coûts la plus
fréquemment utilisée par les opticiens pour les équipements optiques est 15 à 20 % du
PMSS. En pratique, ce genre de constat est très souvent réalisé pour des garanties linéaires.

De plus, il est à noter qu’une garantie proposant un remboursement très élevé sur les verres
et une limitation plus stricte sur le prix de la monture (qui aurait pour but de faire bénéficier
à l’assuré de verres de meilleure qualité tout en ayant pour objectif de limiter le « confort »
sur la monture) aboutit à un transfert du coût de la monture sur les verres chez certains
opticiens peu scrupuleux, qui permet aux bénéficiaires d’être entièrement remboursés pour
des équipements aux prix très élevés. Il convient donc d’encadrer strictement le prix des
verres.

L’objectif d’une grille optique est de financer de manière adaptée les défauts visuels : en
réalisant des économies sur les verres des assurés ayant besoin d’une faible correction, des
garanties supérieures pourront être proposées aux assurés à fort défaut visuel pour un
budget équivalent, voire réduit. Ainsi, plus une grille optique sera fine, plus son effet en
termes de réduction des coûts sera notable. On distinguera donc dans un premier temps les
enfants, les adultes ayant besoin d’une correction unifocale et les adultes à correction
multifocale, puis chaque degré de correction, comme c’est le cas dans la grille de
remboursement utilisée par l’Assurance Maladie.

- 157 -
Figure 94 : Répartition des dépenses par tranches de coûts pour le forfait optique d’un client de Gras Savoye

Garantie

140 000 € 33% 35%

120 000 € 30%

100 000 € 23% 25%

Nbre d'unités en %
Montants en €

80 000 € 20%

60 000 € 15%
12% 12%

40 000 € 10%
7%

5%
20 000 € 3% 5%
2%
1% 0%
0%
0€ 0%

]0; ]5%; ]10%; ]15%; ]20%; ]25%; ]30%; ]35%; ]40%; ]45%;
>50%PMSS TOTAL Par unité
5% PMSS] 10% PMSS] 15% PMSS] 20% PMSS] 25% PMSS] 30% PMSS] 35% PMSS] 40% PMSS] 45% PMSS] 50% PMSS]

Frais réels 4 956 € 19 809 € 62 723 € 121 112 € 56 562 € 29 754 € 21 313 € 18 069 € 10 758 € 2 756 € 4 864 € 352 676 € 480 €
Reste à charge 0€ 0€ 0€ 3 361 € 11 134 € 10 992 € 8 759 € 8 892 € 5 481 € 1 744 € 1 535 € 51 898 € 71 €
En % des frais réels 0% 0% 0% 3% 20% 37% 41% 49% 51% 63% 32% 15%
Complémentaire 4 883 € 18 240 € 58 822 € 113 825 € 42 078 € 18 147 € 11 191 € 8 044 € 4 383 € 981 € 1 471 € 282 065 € 384 €
1ère Mutuelle 0€ 0€ 1 374 € 1 588 € 2 324 € 0€ 1 036 € 891 € 731 € 0€ 1 780 € 9 724 € 13 €
Sécurité Soc. 73 € 1 570 € 2 527 € 2 338 € 1 026 € 614 € 327 € 242 € 163 € 31 € 77 € 8 988 € 12 €
Consommateurs 54 89 171 242 88 37 23 17 9 2 3 735
En % 7% 12% 23% 33% 12% 5% 3% 2% 1% 0% 0%
Cumul 7% 19% 43% 76% 88% 93% 96% 98% 99% 100% 100%

- 158 -
3.2.5.5. Le dentaire
Alors que les soins dentaires sont globalement bien remboursés, les prothèses dentaires
demandent une participation importante des assurés. Ainsi, les prothèses dentaires
représentent un poids important pour un régime complémentaire : la Sécurité sociale les
rembourse mal et les dentistes sont autorisés à pratiquer des dépassements sur ces actes.
Une étude menée sur ce poste démontre que le prix des prothèses dentaires dépend
principalement du matériau utilisé (céramique, métal, métal-céramique…) mais également
de la commune où exerce le praticien. En conséquence, les garanties linéaires laissent
souvent un reste à charge important aux assurés et couvrent le risque différemment selon la
commune et le matériau utilisé.

L’objectif d’une grille dentaire est d’adapter les garanties proposées à la place de la dent
dans la bouche : l’économie réalisée par la mise en place de prothèses dentaires céramo-
métalliques sur les dents du fond permet de financer les couronnes en céramique, plus
esthétiques, sur les dents de devant.

Figure 95 : Numérotation des dents

De manière générale, un plafond en termes de nombre de prothèses dentaires annuelles ou


de remboursement par assuré peut être mis en place pour limiter les très fortes dépenses la
même année et pérenniser le régime sans toucher aux garanties. Enfin, il convient de mettre
en avant le rôle de la prévention, même si son effet ne sera visible qu’à long terme. Le
recours à la prévention dentaire étant à l’heure actuelle très faible en France, il convient de
communiquer au maximum, tout en offrant une très bonne couverture pour ces actes.

3.2.5.6. Autres alternatives

3.2.5.6.1. Comment se comporter face aux dépassements d’honoraires ?


Les dépassements d’honoraires s’étant généralisés dans certaines disciplines et certaines
régions, ils posent un véritable problème d’accès aux soins et vont ainsi à l’encontre des
principes fondateurs de la Sécurité sociale. Une des premières réponses de l’Assurance
Maladie a été la mise en place en 2009 de l’obligation pour un professionnel de santé de
remettre une information écrite préalable dès lors que le montant des honoraires facturé est
supérieur ou égal à 70 €, dépassements d'honoraires inclus.

- 159 -
Pour répondre aux attentes des assurés, les complémentaires santé proposent des garanties
de plus en plus élevées, ce qui a pour conséquence une augmentation des cotisations qui
pèse sur les ménages.

Ce problème doit prioritairement être réglé au niveau de l’Assurance Maladie, en


encourageant les organismes complémentaires à arrêter la progression continue des
garanties (par exemple en définissant un plafond pour bénéficier du label « contrat
responsable »), tout en proposant aux médecins des compensations en échange d’une
diminution des dépassements.
3.2.5.6.2. Les régimes à options
Le niveau de gamme des garanties d’un régime frais de santé a un impact direct sur le
montant des prestations versées aux assurés. Comme nous l’avons vu au cours du chapitre
2, les assurés bénéficiant d’un régime de très bonne qualité reçoivent en moyenne des
prestations supérieures à ce qui est habituellement constaté.

L’idée d’un régime à options est de permettre aux assurés souhaitant bénéficier de garanties
plus élevées que la moyenne sur certains postes d’en bénéficier moyennant une cotisation
plus importante. Le rôle de l’antisélection est donc majeur, mais l’entreprise a la possibilité
d’attribuer l’ensemble du coût de l’option, ou seulement une partie, aux salariés concernés.

Un tel régime serait donc construit sur plusieurs « étages » :


Le premier étant à adhésion obligatoire et offrant des garanties génériques, le plus
souvent proches de la base de remboursement de la Sécurité sociale. Malgré tout, les
frais d’hospitalisation comme la chambre particulière seraient bien remboursés (dans
des établissements conventionnés) afin que les salariés puissent bénéficier de tous
les soins nécessaires s’ils sont victimes de ce risque lourd. Un tel régime permet à
tous les salariés de bénéficier de prestations de bonne qualité à un tarif avantageux.
Les étages supérieurs étant à adhésion facultative et proposant en plus des garanties
de base des améliorations pour certains postes, au choix (remboursements
généralement plus élevés en optique, en dentaire ou en consultations/visites).

Une des principales objections à la mise en place d’un tel régime est la création d’une santé
à « deux vitesses » mais la portée de cet argument est limitée puisque le risque le plus lourd,
l’hospitalisation, est bien couvert dans le régime de base.
Bien entendu, le suivi des résultats de ce contrat doit être réalisé par niveau de garanties. En
pratique, on constate malgré tout que le socle de base finance les options déficitaires.
3.2.5.6.3. Conjoints non à charge
De plus en plus d’entreprises proposent à leurs salariés des régimes collectifs à caractère
obligatoire pour leur famille et il arrive donc fréquemment que salarié et conjoint cotisent
chacun pour une complémentaire santé différente. Dans un cas normal, le salarié et le
conjoint devraient avoir pour premier organisme complémentaire le régime frais de santé de
leur propre entreprise, et pour les actes entraînant un reste à charge après les
remboursements de la Sécurité sociale et de leur première complémentaire, une seconde
mutuelle complémentaire, celle de leur conjoint.

- 160 -
L’Assurance Maladie a mis en place une norme d’échanges entre assurance obligatoire et
organismes d’assurance complémentaires appelée NOEMIE (Norme Ouverte d'Echanges
Maladie avec les Intervenants Extérieurs), permettant une télétransmission des informations
concernant les frais médicaux des assurés. Elle consiste à intégrer dans une seule base les
décomptes de la Sécurité sociale et ceux de la complémentaire, ce qui permet de gagner un
temps considérable (elle évite aux assurés l’envoi des décomptes vers la mutuelle et
accélère les délais de remboursement).

Or, par défaut, l’Assurance Maladie affecte l’ensemble des membres d’une famille à la
mutuelle du chef de famille. Ainsi, la couverture complémentaire du chef de famille sert à
tort de première mutuelle pour le conjoint, ce qui a pour conséquence une prise en charge
de ses principales dépenses par le mauvais intervenant. Afin de limiter ce phénomène, il
convient de « dénoémiser » les conjoints, afin que la complémentaire santé du chef de
famille ne soit plus le premier intervenant dans le mécanisme de couverture des conjoints.
Des économies de l’ordre de 15 % peuvent alors être constatées.
3.2.5.6.4. Conjoints à charge
Il est de plus en plus courant de voir réservé l’usage d’une complémentaire santé aux seuls
salariés de l’entreprise et à leurs enfants. Dans ce cas, on fait payer une cotisation séparée
aux salariés et aux conjoints à charge, ces derniers étant alors couverts à titre facultatif.
Cette idée peut être motivée par le fait que les conjoints à charge sont très souvent à charge
d’un salarié dont le salaire est important. Les prestations reçues par ce conjoint sont alors
financées par l’ensemble des salariés, dont certains ont un revenu modeste. Cette adhésion
étant facultative, elle est source d’antisélection. Seuls les « mauvais risques » y souscriront,
leur prime devant donc être plus élevée que celle de l’ensemble des salariés, même si en
pratique cela est rarement le cas.
3.2.5.6.5. Demande préalable de devis
Une autre alternative de plus en plus fréquemment utilisée par les organismes assureurs
consiste à analyser les devis des professionnels de santé dont le prix dépasse un certain
seuil. Ainsi, l’assuré peut bénéficier à la fois de l’expertise de l’organisme assureur sur la
qualité du traitement proposé, d’informations sur les soins, et d’une évaluation du coût de la
prestation effectuée à l’aide d’un référentiel. Pour étayer son analyse, l’assureur peut
transmettre une liste de professionnels de santé recommandés, même s’il n’obligera pas
l’assuré à choisir l’une de ces alternatives.

Comme nous l’avons vu, la plupart des modifications de garanties proposées dans cette
partie visent à limiter les garanties aux frais réels afin d’atténuer l’effet sur les résultats des
dérives de quelques professionnels peu scrupuleux (dentaire, optique) et des
comportements individualistes (choix d’alternatives médicales très coûteuses alors que des
alternatives de qualité et plus économiques existent). La mise en place de nouvelles
garanties de ce type doit être accompagnée de pédagogie. En effet, le client doit réussir à
comprendre que plafonner le niveau des garanties ne veut pas dire que le régime sera moins
efficace, d’autant que les économies générées pourront permettre de les répartir vers des
postes où la couverture n’est pas assez élevée pour proposer un bon taux de couverture, ou
plus simplement, de faire baisser le montant des cotisations.

- 161 -
3.2.6. Les réseaux de professionnels de santé
3.2.6.1. Présentation
Le dentaire et l’optique sont deux postes primordiaux dans le pilotage d’un régime frais de
santé : ils représentent en moyenne 44 % des remboursements totaux de la
complémentaire. Ces postes ont pour point commun d’être mal remboursés par la Sécurité
sociale puisque les prix y sont généralement libres et les dépassements importants,
provoquant un recours tardif voire un renoncement aux soins des assurés n’étant pas
couverts par une complémentaire santé de qualité. Forts de ce constat, les réseaux de
professionnels de santé, également appelés plates-formes médicales, ont pour objectif de
réduire le reste à charge des assurés en les informant et en les orientant vers des
professionnels de santé proposant des soins de qualité aux tarifs modérés. Du nom de
Santéclair ou Kalivia, ils reposent, plus généralement, sur l’idée de responsabilisation des
assurés : il serait possible, selon eux, de proposer des remboursements à hauteur des frais
réels engagés à condition que les garanties dont bénéficient les assurés soient basées sur
des équipements négociés et que les actes médicaux soient réalisés chez un professionnel
partenaire du réseau. Tous les intervenants en seraient alors satisfaits : les complémentaires
diminueraient leurs remboursements et donc le montant des primes, le reste à charge des
assurés serait faible, les prestations reçues de qualité et enfin les professionnels de santé
profiteraient d’une nouvelle et abondante clientèle apportée par le réseau. Les principaux
réseaux de soins ont été créés par des organismes d’assurance afin de peser face aux
prestataires de santé : Allianz, Maaf-MMA, Ipeca et MGP sont actionnaires de Santéclair,
Malakoff Médéric et Harmonie Mutuelles de Kalivia, Swiss Life de Carteblanche et AXA
propose les services d’Itelis. A noter : le coût de fonctionnement de ces réseaux est
directement financé par les assurés puisque celui-ci est intégré dans le montant de leurs
cotisations.

Différents niveaux de garanties sont proposés (ce qui est très intéressant notamment en
assurances collectives), afin de s’adapter à chaque contrat. Dans certains cas, des actes hors
nomenclature sont même pris en charge comme l’implantologie, l’opération de la myopie et
certains actes de prévention en dentaire.

Les postes sur lesquels agissent principalement les réseaux de soins sont ceux où les prix ne
sont pas encadrés par la Sécurité sociale et les restes à charge importants : le dentaire
l’optique, l’audioprothèse, les dépassements d’honoraires en chirurgie, la pharmacie non
remboursable ou la médecine de secteur 2. Comme nous l’avons vu précédemment, deux
facteurs déterminent le montant des dépenses de santé : le coût moyen et la fréquence de
consommation des actes. Pour faire baisser les remboursements des organismes
complémentaires, les réseaux de professionnels de santé jouent en même temps sur ces
deux paramètres :
Pour diminuer le montant des frais réels, les membres du réseau s’engagent à
appliquer des tarifs inférieurs à ceux constatés sur le marché sur des équipements
prédéfinis et de qualité. Santéclair constate, par exemple, des prix 40% inférieurs à la
moyenne en optique alors que des verres des plus grandes marques comme Essilor
ou BBGR sont proposés. De plus, les garanties proposées par les réseaux tiennent
compte du défaut visuel en optique (les classes de garanties sont plus fines que celles
de la Sécurité sociale) et de la place de la dent dans la bouche (principe des grilles en
- 162 -
optique et en dentaire) afin d’offrir à chaque assuré des prestations fonctions de son
besoin.
Pour avoir un effet sur la fréquence de consommation, un encadrement sur le
nombre d’équipements a été mis en place (un équipement tous les deux ans pour les
adultes et un équipement par an pour les enfants, cette limitation étant levée en cas
de changement du défaut visuel ou de casse). Pour les prothèses dentaires, les
contrats prévoient pour chaque assuré des plafonds de remboursements annuels.

Deux mécanismes ont pour objectif de pousser les assurés à choisir un professionnel
membre du réseau :
Le tiers payant : lorsqu’un assuré se rend chez un partenaire du réseau et seulement
dans ce cas, il bénéficie du tiers payant, ce qui signifie qu’il ne fera pas l’avance des
frais couverts par sa complémentaire santé. Le tiers payant permet également au
réseau de vérifier que le partenaire de santé applique vraiment les tarifs qui ont été
négociés, en dessous des prix moyens du marché.
Une majoration des garanties dans le réseau : alors qu’un remboursement aux frais
réels sur des équipements optiques prédéfinis peut être proposé si l’assuré se rend
chez un professionnel de santé du réseau, celui-ci ne bénéficiera que d’un montant
fixe en Euro hors réseau, avec décote des garanties.

Si le choix du prestataire n’est pas imposé, ces organismes ont également un rôle de conseil,
en proposant l’analyse des devis fournis par les assurés, en les informant du niveau des tarifs
pratiqués par le professionnel de santé et en leur indiquant les sommes restant à leur
charge.

Pour faire partie du réseau, les professionnels de santé doivent répondre à des critères
tarifaires (signature des grilles tarifaires nationales par marque) et qualitatifs (calcul d’un
score qualité permettant de départager les opticiens en surnombre à partir de critères
comme le nombre d’opticiens diplômés, l’équipement technique du magasin, son
accessibilité…). Enfin, ils s’engagent à présenter toutes les marques de verres et à proposer
des équipements de dernière génération.

Des procédures strictes de contrôle ont été mises en place afin de vérifier que les
prestations promises par les partenaires sont bien réalisées : vérification de l’adéquation
entre l’équipement fourni à l’assuré et sa prescription, visite de clients « mystères »,
vérification des coûts à l’aide des décomptes fournis par l’intermédiaire du tiers payant.

3.2.6.2. Les limites de ce système


Même si ces plateformes s’en défendent et disent disposer d’un parfait maillage territorial,
l’accès à un professionnel de santé membre est parfois difficile, notamment en province, où
le premier opticien ou dentiste peut être éloigné du domicile de l’assuré. En effet, 7 % des
assurés sont orientés à plus de quinze kilomètres de leur domicile : l’équilibre pour ces
plateformes est difficile à trouver puisqu’elles doivent faire en sorte que les prestataires
partenaires soient nombreux afin que chacun ait au moins un professionnel conventionné
proche de son domicile, mais elles doivent en même temps en limiter le nombre afin que
tous les partenaires puissent bénéficier d’un apport important de nouveaux clients.

- 163 -
En fait, le succès de ces réseaux dépend énormément de la communication qui est réalisée
auprès des assurés, tant sur le niveau et le fonctionnement des garanties que sur les
coordonnées des partenaires les plus proches, ou le fonctionnement du réseau : les assurés
sont souvent très attachés à leur opticien ou à leur dentiste et il est difficile pour eux d’en
changer.

3.2.6.3. Test sur un cas-type


Nous avons souhaité observer si les résultats avancés par ces organismes se vérifiaient en
pratique. Le premier contrat géré par Gras Savoye intégrant les services d’une plateforme
datant du 1er janvier 2010, nous n’avons qu’un faible recul sur ses résultats, notamment en
ce qui concerne l’effet fréquence, normalement visible sur deux ans.

Les caractéristiques de l’entreprise test sont les suivantes :


Secteur : Industrie Pétrolière
Localisation : Région Parisienne (très bon maillage du réseau optique)
Nombre d’adhérents 2010 : 2789
Nombre de bénéficiaires : 2010 : 5814
Evolution des effectifs entre 2009 et 2010 : + 2,1 %
% de femmes parmi les adhérents : 26 %
Age moyen des adhérents : 41,3 ans
Dépenses sur le poste optique 2009 : 323 279 €
Dépenses sur le poste optique 2010 : 398 692 € (soit une hausse de 23,2 % entre
2009 et 2010)

Le tableau suivant compare les garanties proposées aux salariés de cette entreprise test
entre 2009 et 2010.

- 164 -
Figure 96 : Garanties optiques 2009 et 2010 de la société test

2010
Garanties Valeur de la sphère 2009 Garantie verre dans le Garantie verre hors
réseau réseau
Classe Verre unifocal
101 de 0 à 4 et cylindre ≤ 2 de 45,78 € à 67,79 € 100 % des Frais réels 70 €
102 de 0 à 4 et cylindre > 2 & de 4,25 à 6 cylindre ≤ 2 de 86,90 € à 304,90 € 100 % des Frais réels 100 €
103 de 4,25 à 6 et cylindre > 2 & de 6,25 à 8 et cylindre ≤ 2 de 144,83 € à 304,90 € 100 % des Frais réels 130 €
104 de 6,25 à 8 et cylindre > 2 & ≥ à 8,25, Q.q.s. le cylindre de 169,22 € à 304,90 € 100 % des Frais réels 220 €
Adulte

Classe Verre multifocal ou mi-distance


111 de 0 à 4 et cylindre ≤ 2 de 144,39 € à 167,28 € 100 % des Frais réels 170 €
112 de 0 à 4 et cylindre > 2 & de 4,25 à 6 cylindre ≤ 2 de 199,71 € à 304,90 € 100 % des Frais réels 220 €
113 de 4,25 à 6 et cylindre > 2 & de 6,25 à 8 et cylindre ≤ 2 de 259,16 € à 304,90 € 100 % des Frais réels 260 €
114 de 6,25 à 8 et cylindre > 2 & ≥ à 8,25, Q.q.s. le cylindre de 269,83 € à 304,90 € 100 % des Frais réels 320 €
Monture 120 € 200 € 200 €
Classe Verre unifocal, avec précalibrage pour les verres complexes
201 de 0 à 4 Det cylindre ≤ 2 de 38,11 € à 53,36 € 100 % des Frais réels 60 €
202 de 0 à 4 Det cylindre > 2 & de 4,25 à 6 cylindre ≤ 2 de 65,55 € à 304,90 € 100 % des Frais réels 90 €
Enfant

203 de 4,25 à 6 D et cylindre > 2 & de 6,25 à 8 et cylindre ≤ 2 de 91,47 € à 304,90 € 100 % des Frais réels 110 €
204 de 6,25 à 8 D et cylindre > 2 & ≥ à 8,25, Q.q.s. le cylindre de 106,77 € à 304,90 € 100 % des Frais réels 200 €
Classe Verre multifocal, avec précalibrage pour les verres complexes
204 Classe de 1 à 4 304,90 € 100 % des Frais réels 200 €
Monture 120 € 100 € 100 €
Limite de consommation (sauf changement du
défaut visuel d'au moins 0,25 dioptries) : 1
Limites Aucune
équipement tous les 2 ans pour les adultes et
1 équipement par an pour les enfants

Globalement, nous constatons une amélioration des garanties entre 2009 et 2010, avec
notamment des remboursements aux frais réels sur les verres dans le réseau. Dans un
premier temps, nous avons souhaité observer quel était l’impact de la mise en place de ces
garanties sur les verres, par niveau de correction, puis analyser plus finement l’exercice 2010
en séparant les ventes effectuées dans le réseau, et celles effectuées hors réseau. Le tableau
suivant présente les résultats obtenus :

- 165 -
Figure 97 : Verres - Dépenses moyennes et unités consommées en 2009 et 2010

Comparatif 2010/2009 Focus 2010


Dépenses et unités
Classe Hors
consommées moyennes 2009 2010 Evolution Réseau Evolution
réseau
Frais réels 91,92 84,74 -7,81% 62,61 98,18 56,82%
Sécurité sociale 2,27 1,99 -12,17% 1,99 2,00 0,25%
Première mutuelle 0,85 1,70 99,77% 0,00 2,73 -
101
Complémentaire 49,65 62,94 26,77% 60,62 64,35 6,16%
Taux de couverture 57% 79% + 100% 70% -
Nombre d'unités 869 720 -17,15% 272 448 64,71%
Frais réels 124,52 108,60 -12,78% 83,17 130,85 57,32%
Sécurité sociale 2,28 2,29 0,79% 2,24 2,34 4,45%
Première mutuelle 0,63 0,00 -100,00% 0,00 0,00 -
102
Complémentaire 95,91 83,67 -12,77% 80,93 86,06 6,34%
Taux de couverture 79% 79% - 100% 68% -
Nombre d'unités 132 180 36,36% 84 96 14,29%
Frais réels 180,00 128,27 -28,74% 119,33 139,90 17,24%
Sécurité sociale 4,49 3,57 -20,44% 3,35 3,86 15,04%
Première mutuelle 10,53 0,00 -100,00% 0,00 0,00 -
103
Complémentaire 140,57 117,75 -16,24% 115,98 120,05 3,51%
Taux de couverture 86% 95% + 100% 89% -
Nombre d'unités 50 46 -8,00% 26 20 -23,08%
Frais réels 189,29 176,23 -6,90% 162,46 200,59 23,47%
Sécurité sociale 4,70 4,30 -8,64% 4,36 4,19 -3,74%
Première mutuelle 0,00 0,00 - 0,00 0,00 -
104
Complémentaire 166,34 169,95 2,17% 158,10 190,92 20,76%
Taux de couverture 90% 99% + 100% 97% -
Nombre d'unités 11 36 227,27% 23 13 -43,48%
Frais réels 236,83 228,89 -3,35% 185,04 253,70 37,10%
Sécurité sociale 5,88 6,19 5,21% 6,16 6,20 0,66%
Première mutuelle 4,52 6,64 47,15% 0,00 10,40 -
111
Complémentaire 143,50 166,15 15,78% 178,88 158,94 -11,15%
Taux de couverture 65% 78% + 100% 69% -
Nombre d'unités 424 404 -4,72% 146 258 76,71%
Frais réels 286,51 265,51 -7,33% 236,97 312,21 31,75%
Sécurité sociale 6,61 6,65 0,58% 6,69 6,59 -1,48%
Première mutuelle 0,00 0,00 - 0,00 0,00 -
112
Complémentaire 202,77 218,64 7,82% 230,28 199,58 -13,33%
Taux de couverture 73% 85% + 100% 66% -
Nombre d'unités 43 58 34,88% 36 22 -38,89%
Frais réels 385,05 314,14 -18,41% 264,02 341,48 29,34%
Sécurité sociale 8,45 6,76 -20,00% 6,74 6,77 0,39%
Première mutuelle 18,30 0,00 -100,00% 0,00 0,00 -
113
Complémentaire 248,34 258,94 4,27% 257,28 259,84 0,99%
Taux de couverture 71% 85% + 100% 78% -
Nombre d'unités 31 17 -45,16% 6 11 83,33%
Frais réels 277,39 341,14 22,98% 308,68 368,97 19,53%
Sécurité sociale 8,58 11,72 36,58% 12,88 10,73 -16,70%
Première mutuelle 0,00 0,00 - 0,00 0,00 -
114
Complémentaire 255,17 305,55 19,74% 295,80 313,90 6,12%
Taux de couverture 95% 93% - 100% 88% -
Nombre d'unités 5 13 160,00% 6 7 16,67%
Frais réels 63,09 64,79 2,70% 50,45 69,80 38,37%
Sécurité sociale 8,82 8,92 1,14% 9,10 8,85 -2,73%
Première mutuelle 0,94 0,02 -98,36% 0,00 0,02 -
201
Complémentaire 38,05 48,24 26,77% 41,35 50,65 22,51%
Taux de couverture 76% 88% + 100% 85% -
Nombre d'unités 295 274 -7,12% 71 203 185,92%
Frais réels 90,93 81,66 -10,19% 71,56 84,36 17,89%
Sécurité sociale 9,52 9,46 -0,60% 9,24 9,52 3,05%
Première mutuelle 0,71 0,11 -84,30% 0,00 0,14 -
202
Complémentaire 63,26 66,92 5,78% 62,32 68,15 9,36%
Taux de couverture 81% 94% + 100% 92% -
Nombre d'unités 54 38 -29,63% 8 30 275,00%
Frais réels 131,07 92,53 -29,40% - 92,53 -
Sécurité sociale 20,75 10,35 -50,12% - 10,35 -
Première mutuelle 3,18 0,00 -100,00% - 0,00 -
203
Complémentaire 88,43 73,57 -16,81% - 73,57 -
Taux de couverture 86% 91% + - 91% -
Nombre d'unités 12 7 -41,67% - 7 -
Frais réels - 57,00 - - 57,00 -
Sécurité sociale - 9,71 - - 9,71 -
Première mutuelle - 0,00 - - 0,00 -
204
Complémentaire - 47,29 - - 47,29 -
Taux de couverture - 100% - - 100% -
Nombre d'unités - 1 - - 1 -
Frais réels 134,24 129,33 -3,66% 109,13 141,60 29,74%
Sécurité sociale 4,67 4,57 -2,08% 4,27 4,76 11,42%
Ensemble

Première mutuelle 2,17 2,18 0,45% 0,00 3,51 -


Complémentaire 82,51 98,34 19,19% 104,86 94,37 -10,01%
Taux de couverture 67% 81% + 100% 72% -
Nombre d'unités 1926 1794 -6,85% 678 1116 64,60%

- 166 -
Ces résultats mettent en évidence :
Une légère baisse des frais réels moyens entre 2009 et 2010 (-3,66 %),
Une sollicitation plus forte du régime complémentaire entre 2009 et 2010, les
remboursements moyens de celui-ci augmentant de près de 19 %,
En conséquence, une couverture en forte amélioration (87 % en 2010 contre 67 % en
2009).

Pour l’exercice 2010 :


Seulement un peu plus d’un verre sur deux est vendu dans le réseau,
Les frais réels moyens constatés dans le réseau sont près de 30 % inférieurs à ceux
obtenus hors réseau,
Les dépenses de l’organisme complémentaire sont 10 % supérieures dans le réseau,
Le taux de couverture atteint bien 100 % dans le réseau, contre seulement 72 % hors
réseau.

Le même exercice a été effectué pour les montures :


Figure 98 : Montures - Dépenses moyennes et unités consommées en 2009 et 2010

Dépenses et unités Comparatif 2010/2009 Focus 2010


consommées
2009 2010 Evolution Réseau Hors réseau Comparaison
moyennes
Frais réels 137,03 166,02 21,16% 164,68 166,79 1,28%
Sécurité sociale 5,16 4,75 -7,90% 3,88 5,25 35,28%
Première mutuelle 1,67 2,11 26,07% 0,00 3,31 -
Complémentaire 99,28 145,35 46,40% 151,09 142,06 -5,98%
Taux de couverture 77% 92% + 94% 90% -
Nombre d'unités 1045 923 -11,67% 336 587 74,70%

Ces résultats mettent en évidence :


Une augmentation du prix moyen des montures entre 2009 et 2010, des
remboursements complémentaires moyens et du taux de couverture, à mettre en
parallèle de l’augmentation du niveau de garantie entre ces deux années,
Pour 2010, des frais réels moyens comparables dans le réseau et en dehors du
réseau, mais une bien meilleure couverture dans le réseau.
En conclusion, les réseaux de professionnels de santé permettent bien aux assurés de
bénéficier de tarifs avantageux pour leur équipement optique, et dans le cas de cette
formule aux frais réels, d’un reste à charge nul. Néanmoins, dans ce cas de figure, le coût
pour le régime n’est pas neutre la première année puisque ses remboursements sont en
forte hausse. En revanche, du fait de la limitation en termes de fréquence (une paire tous les
deux ans pour les adultes), il est fort probable que sur une période plus longue cette solution
permette de réaliser des économies. Malgré tout, avec plus de recul, il conviendrait de
vérifier si l’absence de reste à charge dans le réseau provoque une fréquence de
consommation plus importante de lunettes sur une période plus longue (qui pourrait
s’expliquer par un changement plus fréquent qu’auparavant, malgré la limitation à une paire
tous les deux ans ou, plus simplement, d’une proportion plus importante de
consommateurs).

- 167 -
Conclusion
Dans ce dernier chapitre, nous avons vu que le reste à charge était lié à la présence de
nombreux mécanismes mis en place par l’Assurance Maladie dans le but d’assurer sa
pérennité financière. Le renforcement de la promotion de la prévention, bien que son effet
ne soit visible que sur le long terme, doit être opéré tant par les pouvoirs publics que par les
acteurs du volet complémentaire. L’actuaire a un rôle important à jouer, notamment dans la
détermination du profil de risques des assurés, dans le but de proposer des garanties en
accord avec les besoins de la population. Les différents mécanismes avancés pour limiter
une dérive des coûts au niveau complémentaire sont construits sur un principe de
plafonnement des fréquences ou des remboursements individuels, mais veillent à ne pas
pénaliser les assurés ayant un comportement de consommation raisonné ou les personnes
dont l’état de santé est le plus dégradé. Enfin, l’effet des réseaux de soins est mitigé, et
l’estimation de son impact propre doit être réalisée toutes choses égales par ailleurs, c'est-à-
dire sur des contrats proposant précédemment la même grille optique et la même limitation
en termes de fréquences, ce qui est dans la plus grande majorité des cas impossible.

- 168 -
Conclusion générale
L’histoire de la Sécurité sociale est marquée par des plans de désengagements successifs
entrainant une participation croissante des ménages et des organismes complémentaires
dans le financement des dépenses de santé. L’avenir du secteur complémentaire apparait
dès lors fortement lié aux mesures futures visant à pérenniser le régime de base.

Bien que le vieillissement de la population et l’accroissement de la durée de vie participent à


l’augmentation et à la modification de la structure des dépenses de santé, le déterminant
principal de la consommation de soins au niveau individuel est l’état de santé. L’utilisation
courante de l’âge comme déterminant principal des dépenses est justifiée par le fait qu’il
soit un indicateur indirect de l’état de santé facilement quantifiable.

Les effets du sexe, de la localisation géographique, du collège et du secteur d’activité sur les
dépenses complémentaires de santé ont été également mis en évidence dans cette étude. Ils
impliquent donc pour l’actuaire la bonne connaissance de la population lors de la tarification
d’un contrat d’assurances. D’autres facteurs comme le niveau de gamme du régime ou la
situation économique sont à prendre en compte pour un pilotage efficace d’un régime frais
de santé. Le tiers payant apparait quant à lui comme un moyen de limiter les inégalités entre
les assurés dans l’accès aux soins.

Le progrès technique permet l’amélioration de l’état de santé des individus et participe à


l’allongement de la durée de vie. Une des spécificités du secteur de la santé étant qu’une
augmentation de l’offre de soins entraine une augmentation de la demande, ce facteur joue
un rôle majeur dans la progression des dépenses.

Les contrats collectifs permettent de lutter contre l’antisélection et offrent aux entreprises
et aux salariés des avantages fiscaux et sociaux. Leurs caractéristiques, comme le type de
cotisation, la participation de l’employeur ou le niveau de gamme sont le reflet de la
politique sociale de l’entreprise. Ces régimes sont caractérisés par un nombre important de
transferts de ressources entre les assurés, notamment selon le sexe (des hommes vers les
femmes) et selon l’âge (des salariés les plus jeunes vers les plus âgés), puisque la structure
de cotisation d’un contrat collectif n’est fonction ni du sexe ni de l’âge de l’assuré.

Autre signe de solidarité entre les assurés mis en évidence dans cette étude, un financement
des soins liés à un risque lourd et non maitrisable, l’hospitalisation, caractéristique des
salariés dont les revenus sont les plus faibles, par les salariés bénéficiant d’un salaire de
niveau moyen et moins exposés. Dès lors, l’assurance collective assure son rôle premier, la
solidarité entre bien portants et malades, fondement de la Sécurité sociale.

Néanmoins, un effet non désiré apparait, consistant en un transfert de ressources à


destination des salariés bénéficiant de la rémunération la plus élevée. En effet, les choix de
ces consommateurs sont caractérisés par leur préférence pour des actes qualifiés de confort,
illustrée dans cette étude par l’achat des montures les plus chères. Ce dernier point soulève
la question du bien fondé d’une cotisation unique pour l’ensemble des salariés puisque les
assurés ayant le niveau de vie le plus élevé sollicitent plus largement la complémentaire
pour des actes non médicalisés qui n’ont pas pour vocation à être remboursés par des
régimes collectifs, financés par l’ensemble des assurés.

- 169 -
La lutte contre l’aléa moral - le changement de comportement d’un individu suite à la mise
en place d’une assurance - vise à rendre l’élasticité de la demande fortement négative, c’est-
à-dire à se rapprocher d’une situation de non assurance où les consommateurs payent le
prix réel des soins qu’ils utilisent.

En introduisant différents dispositifs basés sur l’augmentation du reste à charge pour limiter
la progression des dépenses de santé, l’Assurance Maladie considère que l’élasticité-prix du
bien santé est négative, c'est-à-dire qu’une augmentation du prix des soins entraine une
diminution de la demande. L’efficacité de ces mécanismes n’est pas à démontrer, mais leur
effet modérateur sur les dépenses de santé individuelles est lié à trois paramètres. Ceux-ci
peuvent être qualifiés de déterminants innovants des dépenses de santé car l’absence de
données les concernant rend difficile la quantification de leur influence. Il s’agit :
De l’état de santé de l’assuré, car l’utilité des soins augmente à mesure que l’état de
santé se dégrade. En d’autres termes, plus l’état de santé d’un assuré se détériore,
plus il consent à dépenser de l’argent pour se soigner et donc, plus l’effet
modérateur du reste à charge est faible.
De la présence ou non d’un organisme complémentaire, qui permet de limiter
l’impact financier pour l’assuré de ces mesures, en remboursant certains dispositifs
mis en place par l’Assurance Maladie pour freiner la dérive des coûts, comme le
forfait journalier.
Du niveau de vie, puisqu’à dépense de santé équivalente, l’effort consenti par les
assurés pour se soigner n’a pas le même impact sur le budget des plus pauvres que
sur celui des plus riches. Cette notion de taux d’effort pose la question d’un système
de santé à plusieurs vitesses, selon le niveau de vie des Français.

L’apport de la prévention dans un objectif de réduction des dépenses de santé est


fondamental et doit être amélioré par une plus forte implication des pouvoirs publics et des
acteurs du secteur complémentaire.
Au niveau complémentaire, l’équilibre entre cotisations et prestations est difficile à
trouver puisque les assurés ont des attentes fortes en matière de reste à charge mais
souhaitent limiter au maximum leur participation dans le régime. Le rôle d’un conseil est
donc de proposer des garanties en accord avec les besoins de la population.
Les mesures présentées pour faire face à la dérive d’un régime, comme la mise en place de
plafonds ou de grilles de remboursements en optique, ont pour objectif une meilleure
allocation des ressources afin d’éviter le recours aux réductions drastiques de garanties, qui
posent un véritable problème moral quant à l’accès aux soins des familles les plus modestes.
Bien que leurs résultats soient probants, ces mesures doivent s’accompagner de pédagogie
afin de faire comprendre aux assurés que plafonner le niveau des garanties ne signifie pas
forcément un système moins efficace, mais au contraire plus juste.
Pour les actuaires, l’étude réalisée à partir de la rémunération des assurés démontre l’apport
de cette variable dans la détermination des dépenses individuelles de santé. En effet, si la
rémunération est une variable rarement utilisée lors d’une tarification frais de santé – on lui
préfère traditionnellement le collège – elle permet une meilleure estimation du risque, en
contribuant à l'accroissement du pouvoir prédictif des modèles. Sa prise en compte dans les
outils classiques de cotation, qui passe entre autres par l'établissement de coefficients
d'ajustements adéquats, constitue un véritable axe d'investigation actuarielle.
- 170 -
Bibliographie
AOUIZERATE JM. (2009) Alternative neuronale en tarification santé. Mémoire
d’Actuariat. CNAM
BAC C., BALSAN D. (2001) Modélisation des dépenses d’assurance maladie. DREES
BESSON JL., PARTRAT C. (2005) Assurance non-vie : modélisation, simulation.
Economica
DEBRAND T., SORASITH C. (2010) Déremboursement des dépenses de santé et
évolution des restes à charge : Une analyse à partir du modèle de microsimulation
Arammis. IRDES
DORMONT B. (2009) Les dépenses de santé, une augmentation salutaire ? Editions
Rue d’Ulm
GUILLAUME S., ROCHEREAU T. (2010) La protection sociale complémentaire
collective, des situations diverses selon les entreprises. IRDES
JALMA (2010) Livre blanc : Quel avenir pour l’assurance maladie ?
LAGADEC F. (2009) Tarification d’un contrat de complémentaire santé par un Modèle
Linéaire Généralisé. Mémoire d’Actuariat. EURIA
MOULIN PJ. (2003) Construction de bases de tarification en frais de santé. Mémoire
d’Actuariat. ISFA

Les cartes de France présentes dans ce mémoire, réalisées à partir des données extraites de
l’infocentre de Gras Savoye, ont été mises en forme à l’aide de l’application disponible sur le
site-web http://www.drawmeagraph.com

- 171 -
Annexes
Annexe 1 : L’infocentre de Gras Savoye
Annexe 1.1. Les tables des décomptes
Ces tables, nommées DECOAAAA regroupent l’ensemble des prestations payées au cours de
l’exercice AAAA, quelle que soit la date de soin. Chaque ligne correspond à un décompte
maladie remboursé par Gras Savoye, en complément de la Sécurité sociale ou du
remboursement d'une autre mutuelle. Une ligne contient :
le numéro de décompte maladie,
le numéro de personne, identifiant interne à Gras Savoye, permettant d’identifier la
personne qui a bénéficié de la prestation,
le numéro de Sécurité sociale du malade,
le type de bénéficiaire (Adhérent, Conjoint ou Enfant)
le numéro d'adhésion permettant de rapprocher chaque malade de l’adhérent de
référence,
le type d’acte concerné par le décompte,
le niveau de garantie, c'est-à-dire si le décompte est relatif à une garantie de base ou
d’une option,
le numéro de contrat,
la société, compagnie ou l’établissement souscripteur du contrat,
le Groupe dont il fait partie,
l’alternative d’adhésion,
le montant des frais réels engagés,
le montant du remboursement de la Sécurité sociale,
le montant du remboursement d’une éventuelle première mutuelle,
le montant du remboursement complémentaire,
le nombre d'actes ou d’unités d’actes consommés,
le pourcentage de remboursement de la Sécurité sociale,
la base de remboursement de la sécurité sociale,
le montant du ticket modérateur,
la date de règlement,
le type de soins (conventionné ou non),
l’utilisation ou non du tiers payant,
la date de soins,
la date de règlement.

- 172 -
A titre d’exemple, la table DECO2010 contient 19 214 541 lignes.
Annexe 1.2. La table des adhésions
La table des adhésions contient uniquement les adhésions aux contrats Santé. Sa
composition est la suivante :
le numéro d’adhésion,
le numéro de personne,
la date de début d’adhésion,
la date de fin d’adhésion,
le numéro de contrat,
le code postal de l’adhérent.

La table des adhésions contient 1 432 549 lignes.


Annexe 1.3. La table des personnes
La table des personnes contient des informations permettant d’identifier chaque
bénéficiaire.
le numéro de personne,
le numéro d'adhésion permettant de rapprocher chaque malade de l’adhérent de
référence,
le nom,
le prénom,
le sexe,
la date de naissance,
le numéro de Sécurité sociale.

La table des personnes contient 2 284 334 lignes.


Annexe 1.4. La table des entreprises souscriptrices
La table des entreprises souscriptrices fournit des informations sur l’ensemble des
entreprises clientes.
le numéro de l’entreprise,
le nom de l’entreprise,
le code postal de l’entreprise,
le code NAF3 permettant le classement des entreprises par secteur d’activité.

La table des entreprises souscriptrices contient 2 803 lignes.

- 173 -
Annexe 1.5. La table des périodes d’assurance
Une période d’assurance est la durée totale pendant laquelle une personne (adhérent et
ayant-droit) a bénéficié d’une couverture d’assurance fournie par Gras Savoye, quels que
soient le produit, l’alternative ou l’établissement afférent. Elle regroupe :
le numéro d’adhésion,
le numéro de personne,
la date de début d’assurance,
la date de fin d’assurance.

La table des périodes d’assurance contient 3 562 622 lignes.


Annexe 1.6. La table des périodes d’adhésion
Tant qu’un assuré est adhérent sa situation peut évoluer (statut non cadre/cadre,
établissement auquel il est rattaché, option choisie...), on distingue donc différentes
"périodes d'adhésion" (représentées par une date de début et une date de fin de période
d’adhésion). Dans cette table, plusieurs lignes peuvent être consacrées au même adhérent
afin de garder en mémoire la liste des produits, des établissements et des alternatives dont il
a fait partie.
le numéro d’adhésion,
la date de début de période d’adhésion,
la date de fin de période d’adhésion,
le numéro de l’alternative d’adhésion,
le numéro de produit,
le numéro d’établissement.

La table des périodes d’adhésion contient 1 689 542 lignes.


Annexe 1.7. La table des produits
La table des produits contient :
le numéro de produit,
le nom du groupe client,
le libellé produit,
le code de la compagnie qui assure le produit,
le libellé de la compagnie qui assure le produit

La table des produits contient 8 144 lignes.


Annexe 1.8. La table des contrats
Seuls les contrats Frais de santé sont intégrés dans cette table, qui contient :
le numéro interne du contrat,

- 174 -
la référence Gras Savoye permettant d’identifier ce contrat en interne,
le numéro de police,
le numéro de l’établissement souscripteur,
le numéro de produit,
la date d’effet du contrat,
la date de résiliation du contrat,
le libellé du contrat.

La table des contrats contient 14 568 lignes.


Annexe 1.9. La table des alternatives
Une alternative permet de différencier plusieurs catégories d’assurés ayant souscrit au
même produit (cadre/ non cadre, isolé/famille…). Il est également courant que des options
permettent d’améliorer les garanties sur certains postes. Elle regroupe :
le numéro de produit,
le numéro de l’alternative,
le libellé de l’alternative

La table des alternatives contient 19 059 lignes.

- 175 -
Annexe 2 : Participation des différents intervenants par poste de
dépenses

Frais Sécurité Première Gras


Assurés
réels Sociale mutuelle Savoye
Frais séjour 100% 80% 0% 20% 0%
Honoraires/Chirurgie 100% 39% 1% 58% 2%
Forfait journalier 100% 0% 0% 100% 0%
Chambre particulière 100% 0% 1% 95% 4%
Transport 100% 64% 0% 35% 1%
Hospitalisation 100% 60% 0% 39% 1%
Généralistes 100% 61% 0% 35% 4%
Spécialistes 100% 44% 1% 51% 4%
Indemnités majorations 100% 70% 0% 29% 0%
Autres Practiciens 100% 0% 1% 70% 29%
Consultations, Visites 100% 55% 0% 41% 4%
Radiologie/Laboratoire 100% 62% 0% 37% 1%
Actes techniques/Chirurgie 100% 56% 0% 41% 3%
Auxiliaires médicaux 100% 50% 0% 45% 5%
Médecine courante 100% 57% 0% 40% 3%
Pharmacie 100% 58% 0% 41% 0%
Soins dentaires 100% 60% 0% 35% 5%
Prothèses dentaires 100% 17% 3% 63% 17%
Orthodontie 100% 28% 2% 64% 6%
Implants 100% 0% 2% 57% 40%
Dentaire 100% 28% 2% 57% 13%
Verres 100% 3% 2% 81% 14%
Montures 100% 3% 2% 82% 13%
Forfait Optique 100% 3% 2% 77% 18%
Lentilles 100% 1% 1% 93% 5%
Kératotomie 100% 0% 3% 46% 51%
Optique 100% 3% 2% 81% 14%
Prothèses médicales 100% 44% 2% 39% 16%
Maternité 100% 11% 0% 89% 0%
Divers 100% 6% 0% 88% 6%
Autres Postes 100% 26% 1% 66% 7%

Total 100% 43% 1% 51% 6%

- 176 -
Annexe 3 : Méthode de Whittaker-Henderson
Dans la suite de ce paragraphe, nous nous rapprocherons de la méthode décrite par London
en 19856.

On note :

U : une matrice colonne de dimension n contenant les valeurs à lisser


U = (u1 ,..., u n ) ;
V : une matrice colonne de dimension n contenant les valeurs lissées V = (v1 ,..., v n )

Les critères utilisés par la méthode de Whittaker-Henderson sont les suivants :

Critère de fidélité (« fit ») :


n
F = ∑ wi (vi −ui )² avec des poids ( wi > 0,..., wn > 0 ) contenus dans la matrice W des
i =1
poids permettant de donner une importance variable aux différentes observations.

Critère de régularité (« smoothness ») :


n− z
S = ∑ ( ∆ z (vi ))² avec ∆ l’opérateur de différenciation et z un entier positif paramètre du
i =1
modèle.

On définit ∆ z la différence avant d’ordre z entre les valeurs de v tel que :

∆1 ( x) = v( x + 1) − v( x)
∆ 2 ( x) = ∆(∆1 ( x)) = ∆(v( x + 1) − v( x)) = v( x + 2) − 2v( x + 1) + v( x)
z
z
∆ z (vi ) = ∑  .(−1) z −k .vi + k
k =0  k 

On introduit la matrice K z à (n-z) lignes et (n-z) colonnes définie par


∆ z (v1 ) 
K z .V =   contenant les coefficients d’ordre de z précédemment définis affectés de

∆ z (vn− z )
leur signe.

On cherche à minimiser une combinaison linéaire de la fidélité et de la régularité :


M = F + h S, avec h permettant de contrôler l’influence de chacun des deux termes :
plus h est grand, plus le lissage portera sur le paramètre de régularité.

On cherche à minimiser M, c'est-à-dire :

6
London D. (1985) Graduation: The revision of estimates. Actex

- 177 -
M = t (V − U ).W .(V − U ) + h.t V .( t K z .K z ).V = t (V − X ).(W + h.( t K z .K z ).(V − X ) + E avec E une
expression indépendante de V et X tel que (W + h.(t K z K z )). X = W .U

M est minimal si V-X=0 soit en notant V* la solution au problème,


V * = X = (W + h.( t K z K z )) −1.W .U

London indique que W=Id, la matrice identité, est suffisant pour lisser les courbes. On a
donc :

V * = X = ( Id + h.( t K z K z )) −1.U

Il nous reste à présent à déterminer les valeurs optimales des paramètres z et h.

London précise qu’un paramètre z égal à 1 ou 2 est trop faible pour lisser suffisamment les
irrégularités, alors qu’un degré 4 conduit à la représentation d’une droite. On utilisera donc
le degré 3 c’est-à-dire une matrice K 3 à (n-3) lignes et n colonnes.

Comme nous l’avons vu, plus h est grand, plus le lissage portera sur le paramètre de
régularité. Globalement, les différences de lissage entre h=1 et h=100 sont minimes.
Néanmoins, nous privilégierons une valeur de h comprise entre 20 et 100, 30 étant un bon
compromis.

- 178 -
Annexe 4 : Contributions absolues des individus aux facteurs
Individus F1 F2 Restant
1 22% 93% 7%
2 21% 92% 8%
3 0% 91% 9%
4 66% 98% 2%
5 75% 99% 1%
6 79% 100% 0%
7 85% 100% 0%
8 88% 99% 1%
9 93% 99% 1%
10 97% 99% 1%
11 98% 98% 2%
12 95% 96% 4%
13 74% 86% 15%
14 30% 67% 33%
15 11% 57% 43%
16 10% 53% 47%
17 30% 59% 41%
18 65% 67% 33%
19 81% 82% 18%
20 76% 77% 23%
21 66% 68% 32%
22 76% 77% 23%
23 70% 71% 29%
24 73% 73% 27%
25 68% 68% 32%
26 62% 63% 37%
27 65% 65% 35%
28 48% 52% 48%
29 39% 41% 59%
30 34% 36% 64%
31 39% 40% 60%
32 16% 17% 83%
33 15% 16% 84%
34 3% 3% 97%
35 15% 15% 85%
36 2% 5% 95%
37 17% 17% 83%
38 17% 18% 82%
39 9% 9% 91%
40 10% 10% 90%
41 14% 15% 85%
42 2% 8% 92%
43 14% 27% 73%
44 61% 74% 26%
45 58% 83% 17%
46 60% 95% 5%
47 70% 89% 11%
48 64% 89% 11%
49 66% 90% 10%
50 78% 91% 9%
51 68% 86% 14%
52 74% 88% 12%
53 83% 94% 6%
54 87% 96% 4%
55 83% 92% 8%
56 93% 96% 4%
57 94% 97% 3%
58 94% 98% 2%
59 96% 98% 2%
60 98% 98% 2%
61 98% 99% 1%
62 99% 99% 1%
63 97% 98% 2%
64 97% 97% 3%
65 94% 96% 4%
66 95% 98% 2%
67 92% 99% 2%
68 88% 97% 3%
69 89% 96% 4%
70 74% 82% 18%
71 80% 97% 3%
72 86% 91% 9%
73 75% 96% 4%
74 78% 93% 7%
75 78% 90% 10%
76 78% 92% 8%
77 73% 92% 8%
78 70% 88% 12%
79 73% 89% 11%
80 68% 85% 15%

- 179 -
Annexe 5 : Qualité de la représentation, contributions relatives des
individus
Individus F1 F2 Restant
1 22% 93% 7%
2 21% 92% 8%
3 0% 91% 9%
4 66% 98% 2%
5 75% 99% 1%
6 79% 100% 0%
7 85% 100% 0%
8 88% 99% 1%
9 93% 99% 1%
10 97% 99% 1%
11 98% 98% 2%
12 95% 96% 4%
13 74% 86% 15%
14 30% 67% 33%
15 11% 57% 43%
16 10% 53% 47%
17 30% 59% 41%
18 65% 67% 33%
19 81% 82% 18%
20 76% 77% 23%
21 66% 68% 32%
22 76% 77% 23%
23 70% 71% 29%
24 73% 73% 27%
25 68% 68% 32%
26 62% 63% 37%
27 65% 65% 35%
28 48% 52% 48%
29 39% 41% 59%
30 34% 36% 64%
31 39% 40% 60%
32 16% 17% 83%
33 15% 16% 84%
34 3% 3% 97%
35 15% 15% 85%
36 2% 5% 95%
37 17% 17% 83%
38 17% 18% 82%
39 9% 9% 91%
40 10% 10% 90%
41 14% 15% 85%
42 2% 8% 92%
43 14% 27% 73%
44 61% 74% 26%
45 58% 83% 17%
46 60% 95% 5%
47 70% 89% 11%
48 64% 89% 11%
49 66% 90% 10%
50 78% 91% 9%
51 68% 86% 14%
52 74% 88% 12%
53 83% 94% 6%
54 87% 96% 4%
55 83% 92% 8%
56 93% 96% 4%
57 94% 97% 3%
58 94% 98% 2%
59 96% 98% 2%
60 98% 98% 2%
61 98% 99% 1%
62 99% 99% 1%
63 97% 98% 2%
64 97% 97% 3%
65 94% 96% 4%
66 95% 98% 2%
67 92% 99% 2%
68 88% 97% 3%
69 89% 96% 4%
70 74% 82% 18%
71 80% 97% 3%
72 86% 91% 9%
73 75% 96% 4%
74 78% 93% 7%
75 78% 90% 10%
76 78% 92% 8%
77 73% 92% 8%
78 70% 88% 12%
79 73% 89% 11%
80 68% 85% 15%

- 180 -
Annexe 6 : Remboursements complémentaires moyens de chaque
famille d’actes par décile de revenus
Annexe 6.1. Hospitalisation
180 €

160 €

140 €

120 €

100 €

80 €

60 €

40 €

20 €

0€
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Déciles de revenu

Annexe 6.2. Consultations / Visites


80 €

70 €

60 €

50 €

40 €

30 €

20 €

10 €

0€
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Déciles de revenu

- 181 -
Annexe 6.3. Médecine courante
90 €

80 €

70 €

60 €

50 €

40 €

30 €

20 €

10 €

0€
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Déciles de revenu

Annexe 6.4. Pharmacie


90 €

80 €

70 €

60 €

50 €

40 €

30 €

20 €

10 €

0€
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Déciles de revenu

Annexe 6.5. Dentaire


180 €

160 €

140 €

120 €

100 €

80 €

60 €

40 €

20 €

0€
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Déciles de revenu

- 182 -
Annexe 6.6. Optique
140 €

120 €

100 €

80 €

60 €

40 €

20 €

0€
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Déciles de revenu

Annexe 6.7. Autres postes


140 €

120 €

100 €

80 €

60 €

40 €

20 €

0€
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Déciles de revenu

- 183 -

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