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GRAMMAIRE COMPARÉE
DES
LANGUES SLAVES
T O M E II
MORPHOLOGIE
Première Partie : FLEXION NOMINALE
PAR
ANDRÉ VAILLANT
Professeur au Collège de France
Directeur d'études à l'École des Hautes-Études
IAÇ
LYON, RUE VICTOR-LAGRANGE
P A R I S , 6 Ws, R U E D E L ' A B B A Y E (VI«)
© 1958 by Editions IAC, Lyon.
Tous droits de traduction, de reproduction
et d'adaptation réservés pour tous pays.
GRAMMAIRE COMPARÉE
DES
LANGUES SLAVES
Et pour la morphologie:
O. H U J E R , , Slovànskâdeklinace jmennâ, Prague, 1 9 1 0 .
Ghr. S. STANG, Das slavische und baltische Verbum, Oslo,
1942.
H. GRAPPIN, Les noms de nombre en polonais, Cracovîe,
1950.
H . G R A P P I N , Histoire de la flexion du nom en polonais,
Wroclaw, 1956.
M. VEY, Morphologie du tchèque parlé, Paris, 1946.
Fr. R A M O V S , Morfologija slovenskega jezika, Ljubljana,
1952.
M . André M A Z O N et M . Boris U N B E G A U N ont bien voulu lire
chacun un jeu complet d'épreuves de ce tome II ; je leur suis
reconnaissant de la peine qu'ils ont prise et de toutes les fau-
tes qu'ils m'ont évitées.
P R E M I È R E P A R T I E
FLEXION NOMINALE
A
CHAPITRE P R E M I E R
dure (-a, gén. -y) et molle (v. si. -ja, gén.--/g) des féminins,
avec des différences nettes entre les deux types de flexions
dans une partie des désinences, et qui ne sont pas uniquement
d'origine phonétique.
D'autre part, la catégorie du genre tend à dominer la flexion
(§124). C'est d'après le genre que se répartissent les types
flexionnels les plus importants du slave, et c'est aussi d'après
lui que se subdivisent les autres types. Le principe de classi-
fication des types de flexion reste double, surtout dans le
système encore complexe du vieux slave. On distingue en
vieux slave : 1) les masculins anciens thèmes en -o-, à flexion
dure e t à flexion molle, avec les anciens thèmes en -u- qui
se contaminent avec eux ; 2) les neutres anciens thèmes en
-o-, à flexion dure et à flexion molle ; 3) les féminins anciens
thèmes en -â-, à flexion dure et à flexion molle ; 4) les anciens
thèmes en -i-, féminins et masculins ; 5) les anciens thèmes
consonantiques, masculins, neutres et féminins. Ceci se sim-
plifie dans les langues slaves modernes, et en fonction du
genre. Mais l'étude historique et comparée des types de
flexion appelle une disposition qui garde sa priorité au thème
sur le genre, et qui restitue au type en -u- l'individualité qu'il
conservait encore en slave commun, comme il la conserve en
baltique.
CHAPITRE II
voc. Enose, loc. sing. Enosë ; dlûgu « long », suxu «sec», loc.
sing. dludzë, susë, etc., et même vlùxvu «magicien», voc.
vlusve, nom. plur. vlusvi •(§ 20). Elles l'étaient à date ancienne
dans toutes les langues slaves, mais avec des variantes dia-
lectales : devant -ë, -i, la forme alternante de x est s dans
le groupe septentrional (§ 13), qui se maintient jusqu'au
tchèque moderne, ainsi hoch « garçon », nom. plur. hosi. La
forme alternante de sk est se dans le groupe septentrional et
partiellement en vieux russe (§ 18), et l'on a encore en tchèque
nom. plur. zemsti (v. tch. -sci) de zemsky «terrestre», et en
polonais ancien la trace remaniée de *-szczy dans nom. plur.
polszcy (mod. polscy) de polski « polonais ».
Les thèmes terminés par gutturale sont rares, sauf dans les
formes neutres d'adjectifs, mais l'alternance des gutturales
est régulière devant -ë : • vëko « paupière », nom.-acc. duel
vëcë; uxo « oreille », loc."sing. usë (nouveau pour usese, § 193).
Nom.-acc. .sing. -o, en regard de v. pr. -an, i.-e. *-on ou
*-om, hitt. -an, gr. -ov, etc. L'opposition du neutre et du
masculin (et masculin-féminin) était à l'origine une opposition
d'inanimé et d'animé (§ 123), où l'inanimé ne présentait pas
de distinction du cas sujet et du cas objet, ni de marque de
ces cas dans la flexion nominale, tandis que l'animé avait
un nominatif pourvu d'une désinence *-s, et d'autre p a r t un
accusatif à désinence *-n ou *-m. On a ainsi, le plus clairement
dans la flexion des thèmes en -i- et en -u-, nom.-acc. neutre
*-i, *-u, en face de nom. masc. (et fém.) *-is, *-us, acc. *-in,
*-un. Dans la flexion nominale des thèmes en -o-,"le nominatif-
accusatif neutre apparaît muni d'une désinence *-n, *-m.
La flexion pronominale présentait les mêmes désinences de
nominatif et d'accusatif masculin, mais au nominatif-accu-
satif neutre une désinence *-d, donc *-od dans la flexion en
-o-, balto-slave -a, si. -o. C'est cette désinence -o du type
44 LES THÈMES EN -o- [131.1
lit. vyras, acc. vyrq, mais élnis «cerf», acc. élnj., d'ailleurs à
côté de élnias, élniq ; de même v. pr. -is. -in, et en outre
acc. plur. -ins, mais lit. élnius comme vyrus. C'est là un fait
récent, qui a son parallèle dans le développement des langues
slaves (§ 172), mais de façon indépendante. Aux autres cas,
les désinences sont les mêmes dans les thèmes en consonne
dure et les thèmes en consonne mouillée, si ce n'est que 'a
flotte dans la prononciation avec 'e (§ 48), et qu'on a ainsi
en lituanien nom. sing. élnias et élnes, nom. plur. élniai et
élnei, en face de vyras, vyrai. Le baltique n'oppose pas un
type masculin dur en -as et un type mouillé en -es aussi
nettement qu'il oppose un type féminin dur en *-â et un type
mouillé en *-ë (§ 151).
En slave, le traitement des voyelles et diphtongues précé-
dées de / (§§ 78-79) a donné à un bon nombre de désinences
des formes différentes de celles qu'elles présentent après
thème dur. L'adaptation de ces désinences à des thèmes en
^consonne mouillée n'apparaît plus dès le vieux slave comme
phonétique, mais comme morphologique, et c'est pourquoi
elle a persisté après la perte dialectale des mouillures, en
obéissant à des principes nouveaux mais très conservateurs
de l'état ancien, tandis que ce sont justement les langues où
les mouillures se conservent qui tendent à effacer les diffé-
rences entre la flexion dure ët la flexion mouillée (§ 115).
Le type mouillé comprend des noms en *-yo- après consonne,
c'est-à-dire à consonne palatalisée (§ 24), type masc. mçzï
« homme », neutre çze « corde » ; des noms en *-yo- après
voyelle, et alors le nominatif singulier est v. si. -i (§ 63),
type krai « bord », qui passe à kraj et rejoint le type précédent;
des noms en *-iyo-, v. si. .-ii, neutre -ije, et le type masculin
en -ii a eu dans la suite des traitements spéciaux (§ 146) ;
et des noms en -ci, neutre -ce, et en -dzï, avec des semi-occlu-
sives sifflantes produites par la seconde palatalisation des
gutturales (§ 18). Cette répartition est étymologique, et des
[136] FLEXION DU TYPE MOUILLÉ I 4
7
acc. sing. neutre), -omï et -emï (instr. sing., var. -urnï et -ïrnï,
§ 161), -omu et -emù (dat. plur.), -orna et -ema (dat.-instr.
duel) ; -ë (de *-ai) et -i (loc. sing., nom.-acc. duel neutre),
-ëxu (de *-aisu) et -ixu (loc. plur.) ; -y et -i (instr. plur.).
Au génitif singulier (et génitif-accusatif), au nominatif-accu-
satif duel masculin et au nominatif-accusatif pluriel neutre,
des graphies du type mçzë, très rares en vieux slave après
chuintante ou c, dz, sont régulières dans la glagolite après
les autres consonnes, ainsi korablë de korabljï « bateau », kraë
du thème kraj-. L'orthographe cyrillique est normalement
~(j)a, et la plupart des langues slaves ont uniformisé en -a
la désinence des deux types dur et mouillé, de même que le
baltique en *-â, au génitif singulier lit. élnio comme vyro. Mais
non le tchèque, qui oppose à gén. sing. roba du type dur
v, tch. muzë, mod. muze du type mouillé (muza dialectalement
et en slovaque), à nom.-acc. plur. neutre mësta v. tch. srdcë,
mod. srdce, et de même au nominatif-accusatif duel masculin
en vieux tchèque.
S'il n'y a pas de différence au nominatif pluriel masculin
entre le type dur rabi et le type mouillé mçzi, c'est parce
que la forme -i du type mouillé a été généralisée (§ 132).
Deux désinçnces appellent des observations particulières.
A l'accusatif pluriel, le traitement de la désinence *-yons,
passée à *-jens, a été ~(j)ç en vieux slave et dans les langues
méridionales, mais -ë en russe et dans le groupe septentrional
(§ 88) : s.-cr. mûze (mûzeve}, slov. mo.zê, de -g, et, de v. si. konjï
« cheval », v. r. konë, ukr. kôni (devenu nom.-acc.), v. pol.
konie, sor. kônje, v. tch. konë, avec -ë. Les traitements diver-
gents des finales *-ans et *-jens ont créé une forte différence
entre la désinence -y du type dur et la désinence -ç, -ë du type
mouillé. Pour le double traitement -g et -ë de la désinence
mouillée, qui se retrouve dans la flexion des thèmes en -â-
(§ 151), il ne représentait à l'origine qu'une variante assez
légère, puisque -ë était la forme dénasalisée de -g (§ 65) :
[136] FLEXION DU TYPE MOUILLÉ 49
Ainsi vol « bœuf ». gén.-acc. vold, loc. volé, instr. volôm, nom. plur.
voly, dat. volâm, etc., et car' « empereur », gén.-acc. carjâ, loc.
caré, instr. carëm (= -r'ôm), nom. plur. cari, dat. carjâm, etc.,
mais gén.-acc. plur. volôv en face de caréj. On a d'ailleurs aussi
dans le type mouillé un génitif pluriel -ev, sous l'accent -ëv
= -ôv, type kraj «bord, contrée », gén. plur. kraëv : cette
désinence, limitée dans la bonne langue aux substantifs en
.-/, est d'emploi plus étendu en russe populaire et très large
dans les dialectes, et ainsi la différence du type dur et du type
mouillé disparaît même au génitif pluriel.
Au singulier, la flexion n'a pas subi de changement, et les
emprunts au type en -u- se réduisent à quelques formes de
génitif en -u et de locatif en -u, seulement comme variantes
de gén. -a et loc. -e dans des cas limités (§ 161). Mais au
pluriel la flexion a été complètement transformée. Le nomi-
natif et l'accusatif ont été confondus en un nominatif-accu-
satif -y (dur), -i (mouillé), puis l'extension au pluriel de la
distinction des sous-genres animé et inanimé a différencié
nom.-acc. -y, -i des inanimés et nom. -y, -i, gén.-acc. -ov, -ej
des animés. Au génitif, la forme sans désinence ne s'est
conservée qu'avec quelques mots, comme sapogî « bottes »,
gén. sapôg, et elle a été normalement remplacée par des
formes plus pleines : dans le type dur -ov pris aux thèmes en
-u- ; dans le type mouillé -ej pris aux thèmes en -i-, et égale-
ment aux thèmes en -iyo- très importants du fait des neutres
en -'e (§ 147), et -ev, c'est-à-dire -'ov après consonne mouillée.
Au locatif, au datif et à l'instrumental, -ax (~'ax)y -am
(~'am) et -ami (-'ami) ont été substitués aux désinences
antérieures -ëx (type mouillé -ix, puis -ex du type en -i- et
-ëx), -om (~em), -y (-i). Cette extension des désinences du type
féminin en -a ne se laisse pas dater avec précision, parce
qu'elle n'a pas eu lieu à là même époque dans tous les parlers :
plus précoce en russe septentrional et occidental, elle ne
remonte guère qu'au x v n e siècle en russe moscovite, et les
[138] RUSSE 53
i
désinences anciennes se sont longtemps conservées,'particu-
lièrement celle de l'instrumental pluriel -y (-i), qu'on penserait
être la plus vulnérable. En réalité, ce cas a offert une grande
résistance aux réfections, en russe et ailleurs, sans doute
parce qu'il est le plus souvent employé avec préposition, ou
que, sans préposition, il a un caractère semi-adverbial. Les
causes de l'extension sont sûrement, pour les animés du
sous-genre personnel, la catégorie importante des masculins
en -a, dont le pluriel à flexion féminine s'est fondu avec celui
des masculins (§ 208); pour les inanimés, l'influence des neu-
tres qui, sur la base de leur nominatif-accusatif pluriel en -a,
semblent avoir les premiers développé des formes de pluriel
en -a- des cas obliques.
Le russe a fait un autre emprunt à la flexion des neutres,
mais à date récente, vers le x v m e siècle : une désinence -d,
toujours accentuée, de nominatif-accusatif pluriel inanimé et
de nominatif animé, du type gôrod « ville », plur. gorodâ,
màster « maître », plur. masterâ, type très productif à l'époque
moderne. Le point de départ de l'innovation, propre au russe
et étrangère à l'ukrainien, est dans quelques anciens duels
comme rog « corne », plur. rogâ, rukâv « manche », plur. rukavâ,
comme ukr. rukâva; mais son développement, lié à l'origine
à un mouvement d'accent entre l'initiale et la finale, calque
le mouvement d'accent des neutres du type zérkalo « miroir »,
plur. zerkalâ.
Ces faits indiquent une grande confusion des genres au
pluriel : au nominatif-accusatif, la désinence -y (-i) est égale-
ment masculine et féminine, la désinence -a est devenue
également masculine et neutre, et au locatif, au datif et à
l'instrumental il n'y a plus qu'un jeu unique de désinences
pour les trois genres. Le génitif pluriel en ~ej des masculins
du type mouillé est également le génitif pluriel des neutres
du type mouillé môre «mer», pôle «champ», et celui des
féminins du type en -i-, avec une certaine pénétration dans
54 LES THÈMES EN -o- [131.1
le type mouillé en -a, si bien qu'il n'y a plus que le type dur
qui présente la désinence -ov comme marque nette du genre
masculin, s'opposant à la désinence zéro des neutres et
des féminins : dans le type mouillé masc. caréj, neutre
moréj, fém. kostéj (kost' « os ») et aussi svecéj à côté de svec
(,sveëâ «bougie»), dans le type dur volôv, mais neutre mest
(mésto « lieu »), fém. knig (kniga «livre»). E t cette dernière
distinction s'abolit dans les dialectes, où -ov (-eu) s'étend
largement aux neutres et aux féminins : gén. plur. mestôv,
knigov.
Le russe présente un certain nombre de pluriels en -ja,
anciens collectifs, type kôlos «épi», plur. kolôs'ja (§ 211).
Il a éliminé à peu près complètement les autres types de flexion
des masculins ; pour put', gén. putl, voir § 172; pour le type
grazdanin, plur. grâzdane, § 207. Pour les alternances, s'il
pratique l'alternance consonantique nouvelle de sourde et
de sonore (§ 85), comme la plupart des langues slaves, il a
perdu les alternances consonantiques anciennes (§ 111) :
jazyk « langue », loc. sing. jazyké, nom. plur. jazyki (nom.-acc.,
par unification en -ky, puis -ki, de nom. -ci et acc. -ky) ; de Bog
« Dieu», un vocatif Bôze est slavon. Il a développé l'alternance
nouvelle des voyelles « mobiles » (§ 119) : plalôk « mouchoir »,
gén. platkâ, orël « aigle », gén. orlâ; et il l'a même à l'occasion
étendue indûment : rov « fossé », lëd « glace », kâmen « pierre »,
et zâjac « lièvre » (se confondant avec zâeç), gén. rva, l'da,
kâmnja, zâjca, pour de plus anciens rova (dial. rôva, ukr. riv,
gén. rôvu), leda, kamenja, zajaca.
-ama dans les féminins en -a, -ijema ou -ima dans le! type
pronominal, perdant ainsi au pluriel comme au singulier
la distinction du locatif et du datif.
Ces innovations ont complètement transformé la flexion
du pluriel en serbo-croate : nom. zâkoni «lois», acc. zâkone,
gén. zâkônâ, loc.-dat.-instr. zâkonima. Mais elles sont parti-
culières au dialecte stokavien : le kajkavien a des désinences
semblables à celles du slovène, gén. plur. -ov, etc. ; le ôakavien
conserve le génitif pluriel à désinence zéro, à côté de -ïh pris
au type pronominal, et aussi de -ov, le locatif en -ïh, le datif
en -om, l'instrumental en -i, et aussi l'accusatif pluriel en -i
et le locatif singulier en -i distinct du datif en -u, et il a éli-
miné les nominatifs pluriels en -ove et ne connaît pas l'élar-
gissement de pluriel en -ov-. On voit que, si les différences de
flexion sont grandes entre les langues slaves, elles peuvent
l'être tout autant entre des dialectes d'une même langue.
Pour les alternances, celle de l'a « mobile » est régulière
aussi au génitif pluriel, qui a été recouvert secondairement
par la désinence -â: kàsac « faucheur », gén. kàsca, etc., et gén.
plur. kosâcâ, cak. kôsâc. On a l'alternance nouvelle de l et
o'(§ 15), ainsi pëpeo « cendre », gén. pepela, etc., et, par combi-
naison avec celle de l'a mobile, tùzilac « plaignant », gén.
tùzioca, etc., mais gén. plur. tùzilâcâ. Les alternances des
gutturales, des séries k: c (vocatif) et k: c (nominatif pluriel),
sont rigoureuses en serbo-croate stokavien dans les subs-
tantifs, mais ont disparu dans la flexion des adjectifs. Le
serbo-croate avait étendu à l'instrumental pluriel l'alternance
du type k : c du nominatif et du locatif pluriels : jèzik « langue »,
instr. plur. jezici en serbo-croate ancien, pour v. si. jçzyky;
aussi apparaît-elle dans la langue moderne devant la désinence
nouvelle -ima : jèzicima. Par contre, la désinence -e d'accu-
satif pluriel de l'ancien type mouillé a été étendue au type dur,
sans provoquer l'alternance de la gutturale : jèzike, avec
maintien du -k- de v. si. jçzyky. On a ainsi le jeu régulier
68 LES THÈMES EN -o- [131.1
lit. -ai, sur l'accent lal « à celle-là » lette -ài restauré, pour
-i, d'après la flexion pronominale ; v. pr. -ai. De i.-e. *-ài,
gr. -ai, -rii, sous l'accent -a:, -rj, skr. -ai, etc. L'intonation
douce indique une contraction du thème et de la caractéris-
tique *-ei du datif.
Instrumental : si. -ojç, désinence prise à la flexion prono-
minale (§ 228), et substituée à -Q qui est conservé dans la
flexion déterminée de l'adjectif (novç-jç, § 265), et dans la
désinence -ïjç des thèmes féminins en -i- (§ 165), peut-être
aussi en vieux slave dans la flexion des thèmes en -iyâ-
( § 153). En baltique, on a lit. -q, sous l'accent -q, gerq-jq « par
la bonne », distinct de l'accusatif par son intonation rude ;
lette -u, et v. pr. -an qui n'est plus discernable de l'accusatif.
La désinence indo-européenne était *-â: véd. -â et skr. -yâ
dans le type en -yâ-, gr. -â, -ri dans des adverbes (-ri sous
l'accent, ainsi Kpucprj « en cachette », mais par confusion avec
le datif en -rj) ; le sanskrit et l'iranien lui ont substitué -ayâ
de la flexion pronominale, comme le slave -ojç à -ç. La dési-
nence *-ân du balto-slave doit être réduite de *-âmi (§ 89),
avec superposition à *-â ou addition au thème en -â- de la
caractéristique -mi de l'instrumental singulier, comme en
italique de -d de l'ablatif singulier du type en -o- (v. lat. -âd,
ablatif-instrumental).
Vocatif : si. -o ; lit. -a, qui se distingue de nom. -a en ce
qu'il peut tomber : môtyna « mère », voc. môtyn, et qui tombe
en lette : siëva « femme », voc. siev ; gr. -a, s'opposant, dans
quelques cas seulement, à nom. -5c, -ri; ombrien -a, en regard
de nom. -u de *-â. La distinction, nette en slave, de nom.
*-â et de voc. *-a, est brouillée en grec, et perdue en latin ;
l'indo-iranien a, sauf une trace douteuse en sanskrit, éliminé
le vocatif féminin en *-a, qui se confondait avec le vocatif
masculin en -a de *-e, et il lui a substitué le vocatif en -e,
de *-ei, des thèmes en -i-. Le développement du vocatif est
nouveau dans le type en -â-, qui formait des abstraits et des
[150] LES DÉSINENCES 83
i
collectifs. On observe que l'abrègement de la voyelle au
vocatif a son parallèle dans la flexion athématique, gr. nriTrçp
« mère », voc. urj-rsp (mais si. mati, § 178), et qu'il se retrouve
en sanskrit dans les thèmes féminins en -yâ- à nominatif -ï,
voc. -i (mais non en slave, § 154), et dans les thèmes féminins
en *-u-, voc. -u (mais non en slave, § 200).
/
CHAPITRE IV
zelê, et dial. zet, gén. zeta; slov. zèt, gén. z'çta, s.-crJzët, gén.
zêta ; bulg. zet, déterm. zétjat, gén. zeië en moyen bulgare.
Cf. skr. jnatih « parent », avec un autre vocalisme radical. Les
formes baltiques sont lit. zéntas et lette znuôts, mais une
forme plus ancienne de masculin en -i- pourrait être attes-
tée par le lette dialectal znuôtis, passé à la flexion en -yo-. Le
mot est un dérivé de la racine verbale i.-e. *genh- « connaître »
et « naître » (§ 98), qui apparaît en balto-slave, seulement au
sens de « connaître », sous les formes *zën-, *zïn-, lit. zén-,
zin-, et *znô-, si. zna-. Il a été refait sur cette racine, et c'est
pourquoi il y a divergence même entre lituanien et Jette, la
forme znuo- du lette conservant le traitement régulier uo de
*ô qui a été éliminé dans le verbe zinât (§ 49).
tïstï «père de la femme» : r. test', gén. téstja; pol. tesc,
gén. teêeia, pour pol. ancien et dial. ciesc, gén. ccia; v. tch.
test, gén. cti, puis ctë, testé et testa; slov. iâst, gén. tâsta, s.-cr.
tâst, gén. tâsta; bulg. iâst, déterm. tâstât, mais gén. teste en
moyen bulgare. Le mot est parallèle au féminin svïsti « sœur
de la femme », qui a l'aspect d'une déformation hypoco-
ristique du nom de la « sœur », ancien *swesr- (§ 37) : ce peut
être une déformation analogue d'un nom de parenté, par
exemple le nom de l'oncle par alliance sur la base du nom
de la «tante», teta, r. tëtka (§ 203).
tatï «voleur» : r. lat', gén. tâtia; slov. tôt, gén. tâta, s.-cr.
tât, gén. tàta. ,
gospodï, voir § 170.
Ijudïje « peuple, gens » : pol. ludzie, r. Ijûdi, etc. Cf. lette
l'àudis, masc. plur. C'est sûrement un emprunt à un thème
masculin en -i- du germanique (§ 55). Un singulier r. Ijud
«peuple», pol. tud, tch. lid, est postérieur au vieux slave :
il remplace Ijudïje passé au sens d'« hommes » et à la fonction
de pluriel supplétif de clovëku, et doit être le postverbal d'un
verbe *ljuditi « peupler » plus ancien que pol. (za)tudnic.
De même lit. liâudis, fém. sing., est une création nouvelle
148 LES THÈMES EN -u- [,163]
LA FLEXION ATHÉMATIQUE
pas indiquée sûrement par lat. pôns, gén. pontis, niais elle
l'est par skr. pânthâk, acc. pânthâm (véd.), gén. pathâh, instr.
plur. pathîbhih, av. pantâ, acc. pantqm, gén. paQô, instr.
plur. paddbis. L'aspect anomal de cette flexion en indo-
iranien tient seulement à ce que la racine était *ponth-, *pnth-,
avec un groupe *tk de la dentale et de l'aspirée h (§ 98) : ce
qui renseigne sur une des origines au moins des sourdes
aspirées (§8) et sur la raison pour laquelle elles donnent des
sourdes simples en balto-slave (§ 97). On doit supposer acc.
*pontehip,, gén. *pnthes, d'après acc. * mater m, gén. *mâtres,
gr. !ir|TÉpa, jjLTjTpôç, et c'est sur acc. *-ehrn, donnant -dm en
indo-iranien qu'a été refait nom. -as. En balto-slave, tout
se ramenait à une flexion à vocalisme alternant *pant-: pinl-.
SI. kostï « os », fém., malgré son initiale k- inexpliquée, et
que n'explique pas le parallélisme de koza « chèvre » en regard
de skr. ajâ, ne peut pas être séparé du nom indo-européen de
l'« os » : skr. àsthi, neutre, gén. asihnâh, av. as-(ca), gén. astô,
plur. asti; lat. os (s gén.ossis, qui peut garder la trace d'une
prononciation *osst de *ost (§ 30), d'où oss étendu aux cas
obliques ; et cf. hitt. hastai, neutre. Sans confronter hitt. hast-
et skr. asth-, il paraît clair pour le slave qu'il faut poser un
athématique neutre *ost à pluriel *ostï (§ 179), et que le
singulier kostï est secondaire de kosti, ancien pluriel neutre
devenu féminin. Le baltique a un autre mot, v. pr. caulan, etc.,
et ne renseigne pas ; c'est dommage, car kostï s'est écarté en
slave de la racine *as- de oslru « aigu » qu'il rencontrait pour
rejoindre la racine *kas- « racler » de kosnçti « toucher », cesati
«peigner», et on entrevoit le jeu d'une étymologie populaire.
Pour les duels oci « yeux », usi « oreilles », voir § 193.
Ainsi les traces reconnaissables d'athématiques passés à
la flexion en -i- sont nombreuses en baltique et en slave.
La flexion athématique, qui n'apparaît plus que limitée à
certains thèmes et attachée à certains suffixes, était encore
aussi représentée en balto-slave qu'elle l'est vers la même
12
174 LA FLEXION ATHÉMATIQUE [174]
Flexion générale.
177. — On a vu que la flexion athématique n'était plus une,
mais était morcelée en plusieurs types ; et il faut distinguer
ces types selon les genres, car le genre appelle des différences
à certaines désinences, en slave et également en lituanien,
non seulement entre masculin-féminin et neutre, mais aussi
entre masculin et féminin. D'autre part, la flexion athéma-
tique se présente en vieux slave contaminée avec la flexion
en -i-, et ses formes propres ne sont pas toutes attestées dans
la flexion d'un même mot, ou ne sont pas les plus courantes.
On prendra comme paradigmes, pour les avoir complets ou
à peu près en vieux slave, deux représentants du type en
-men-, l'un masculin, si. kamy « pierre », lit. akmuô, l'autre
neutre, si. imq «nom», r. imja, en remplaçant au pluriel et
au duel les formes de kamy rares dans les textes (§ 211) par
celles de dïnï «jour», du type en -n-.
lituanien vieux slave vieux slave russe
Sing.
N. akmuô kamy ime imja
A. âkmeni kamenï ime imja
G. akmenfè )s kamene imene imeni
L. akmenyjè kamene imene imeni
D. âkmeniui hameni imeni imeni
I. akmenimi kamenïmï, -emï imenïmï, -emï imenem
Plui
N. âkmen( e )s dîne imena imenâ
A. âkmenis dïni imena imend
G. akmeny. dïnu imenû imèn
L. akmenysè dïnïxu, -exû imenïxû, -exû imenâx
D. akmenims dïnïmu, -emu imenïmû, -emû imenâm
I. akmenimis dïny, dïnïmi imeny imenâmi
[178] LES DÉSINENCES 183
tch. mod. jmeno, gén. jmena; slovaque -jmd dans najmà «nom-
mément » (sema « semence », gén. semena, remplacé par semeho,
gén. -na) ; slov. im|, gén. imçna, s.-cr. Ime, gén. ïmena, bulg.
ime, plur. imenâ. En baltique, le vieux prussien a emmens,
emnes, avec passage au masculin, acc. emnen, emnan ; le mot
a disparu en letto-lituanien : lit. vardas, lette vàrds, cf. v. pr.
wïrds « mot ». La flexion du vieux prussien atteste la conser-
vation d'une alternance emen-, emn-, en balto-slave *inmen-,
*inmn- (§41). Les formes des autres langues sont : hitt. laman,
gén. lamnas ; skr. nâma, gén. nâmnah, et lat. nômen, gén.
nôminis, mais irl. ainm n-, de *i}men- ; got. namô, plur. namna ;
gr. ôvoua et; dial. ôvunoc, cf. àvcovunos. Elles supposent un
très vieux mot indo-européen, inanalysable, dont la flexion
pourrait être *nSmn, cas obliques *nmn-, cf. hitt. lekan
«terre», gén. taknas et véd. jmâh (§ 94). Le mot est entré
dans le type neutre à suffixe -men-, et s'est normalisé sur
thème *nS- ou
V. si. sémg « semence », v. pr. semen, v. lit. et dial. sëmenes
(plur.), lat. sëmen, v. h. a. sâmo, de v. si. sëti (sëjati) « semer »,
lit. sëti, lat. se- (prêt, sëuï), v. h. a. sâen.
V. si. brëmç « fardeau » de *bër-men-, s.-cr. brème, r. pop.
berémja, cf. skr. bhârïman- «fait de porter » (§ 97) ; le mot
conserve le sens ancien « porter » de la racine si. ber-, i.-e.
*bher-, de v. si. bïrati, berç, passé au sens de « choisir, cueillir »
d'après les formes à préverbe, et r. brat' « prendre ».
V. si. vrëmç « temps », de *ver-men-, v. r. veremja (r. vrëmja,
slavonisme). On voit, par le blanc-russe vëreme et le serbo-
croate vrijëme, que la racine était d'intonation douce, et cette
racine paraît avoir été *ver- plutôt que *vert- ( § 39) : ce serait
celle de v. si. vu-vrëti « glisser dans », za-vrëti « fermer » (en
glissant le verrou, verëja), lit. veriù « j'enfde », avec le sens de
« file » dans r. verenica, lit. votà, pavarë. Le mot vrëmç indique
la durée du temps, par opposition à ëasu « moment », qui a
dû avoir aussi son dérivé en -men-, v. pr. kïsman (§184).
[186] NEUTRES EN -men- 213
i
mais il s'agit d'un mot ancien : lit. lena, gr. OÏOCK-, oîrjiov
« (timon de)' gouvernail »,; skr. ïsâ, hitt. hisas. On restitue un
thème à degré réduit i.-e. *ihs- d'après le sanskrit, en regard
de his- du hittite, et un thème à degré fort *oihs- pour le
grec. Le slave ojes- s'explique comme oces- en regard de skr.
aks-, comme lit. mënes- de *mëns- ( § 175), par passage secon-
daire au type en -es-. Le thème i.-e. *oihs- devenait ainsi
*oih-es-, et c'est sur ce thème nouveau *oih-, avec maintien
de l'intonation rude, balto-slave *âi-, que le lituanien a bâti
son dérivé iena, analogue au dérivé postérieur çjnica du
slovène.
V. si. celo «front», gén. cela, mais le mot est peu attesté
en vieux slave, et seulement au singulier ; polabe ziilî (de
celo), passé au sens de « joue », duel zùlisay (de *celesi),
mais slov. célo, gén. cela. La forme polabe, bien qu'isolée, doit
être prise en considération, car l'adjectif est celesXnu. « prin-
cipal », en slavon, et un dérivé celesïn-, ou plutôt celesn-
(cf. ci-dessous lozesnà) est attesté ailleurs avec garantie d'an-r
cienneté : r. dial. celesnlk « bouche du poêle, pecnôe celo »,
h. sor. celesno, v. tch. celesen, slov. ëelçshjak (celêsnik, cel'êsnik)
« rampe et banquette du poêle », et pol. czelusnik par substi-
tution à czolo de czelusc «bouche du poêle» (v. si. celjuslï
« mâchoire »). Il semble bien que celo soit un dérivé en -es-
de la racine *kel-, *sel-, de lit. kélti « élever », si. *selme
«poutre faîtière» (§ 186).
SI. pero « plume », dont le vieux slave ne présente que le
dérivé perinalu « garni de plumes », ce qui n'atteste pas du
tout un thème en -es- ; mais slov. perd, gén. perÇsa, polabe
perise, plur. (de *peresa) et perissây (de *peresi, ancien duel),
pourraient conserver la flexion primitive. Il n'est pas impos-
sible que le mot, dont la ressemblance avec gr. uTspôv « plume,
aile » paraît fortuite, et dont le rapport avec; lit. spafnas
« aile » est mal déterminable dans l'état de confusion des
racines *per- et *sper- en balto-slave, soit un dérivé assez.
[191] EXTENSION DU TYPE 235
j
ancien en -es- de la racine de v. si. pere- « il vole », r. parti'
« voler, planer ».
Y. si. isto a rein, rognon, testicule », plur. islësa, duel istesë,
et aussi istë en slavon ; un vieux-russe ijestesë n'est qu'une
faute de copiste. Le mot a disparu dans les langues slaves,
remplacé de bonne heure par bubrëgû, emprunt au turc, dans
les langues méridionales et en slavon, d'où r. bubrég, ailleurs
par d'autres termes. Il n'a laissé que son dérivé obistije
«région autour des rognons, reins» dans-slov. obîsl, fém., et
ce dérivé n'indique pas un thème en -es-. Le baltique a lit.
inkstas, lette îkstis (plur.), v. pr. inxcze, par contamination
avec un autre mot, lit. jscios « intestin » (fém. plur.), lette
ieksas, qui doit être un dérivé en *-iyo- de la préposition *in-
« dans ». Le vieil islandais eista «testicule» présente une
initiale *ai- différente de celle du slave, mais peut conserver
la flexion ancienne, celle d'un neutre en -o- et non en -es-.
V. si. dëlo « acte », gén. dëlese, mais ordinairement dëla, et
v. slov. *delese, gén. (écrit" telese). C'est un dérivé en -lo de
la racine de- de dëjati « agir », et ici il est net que les formes
en -es-, qui né se sont pas maintenues dans les langues slaves,
sont secondaires et dues à l'imitation de slovo, gén. slovese,
en raison de l'union des deux mots dans des locutions comme
v. si. dëlesy i slovesy « en actes et en paroles ».
V. si. tëlo « corps » et « image, statue », gén. telese, ordinai-
rement tëla. Ici, la flexion en -es- est attestée dans plusieurs
langues slaves : slov. telô, gén. ielçsa, etc., et par son dérivé
v. si-, tëlesïnu « corporel », r. ielésnyj. Mais le mot, à première
syllabe d'intonation douce (s.-cr. tïjelo), n'a pas l'aspect d'un
substantif ancien en -es-. S'il est d'origine slave, il ressemble
plutôt à un dérivé en -lo, comme dëlo, mais le rapport avec
la racine të- de r. zatéjat' « susciter » n'est pas évident, non
plus que l'ancienneté de cette racine verbale qui n'apparaît
que dans le groupe russe.
V. si. drëvo « arbre, bois », gén. drëvese, ordinairement drëva.
236 LA FLEXION ATHÉMATIQUE- [183]
type en -yo-, comme jdje « œuf », gén. jâjeta (mais plur. jâja),
ogledâlce « petit miroir », gén. -ca et -cela. De psëto « chien »
le génitif est psëta et psëteta : ce mot, qui s'est en partie subs-
titué à pàs, mais avec maintien du pluriel psï, était le nom du
«petit chien», slov. psè, gén. psÇta; pour drvo, gén. drveta,
voir § 192. Antérieurement, les hypocoristiques en -e, conti-
nuant le type masculin en *-ën ( § 183), comme Mile et Milen,
Milëni, de Mllorad ou Mïloslav, étaient entrés dans cette
flexion : vieux-serbe André, gén. Andrela, instr. Andretem,
-tom, de Àndrëj «André ». Ils la gardent en slovène, tandis que
le serbo-croate en a tiré d'une part Mile (Mllo, Mila, § 208),
gén. Mila, avec l'accent long des hypocoristiques (§ 42), de
l'autre Mïleta, acc. Mllelu, etc. Le type en *-çta adapté de
*-ën est ancien dans les langues slaves : ainsi v. r. Vasjala
de Vasilij « Basile », v. pol. (dès le x n e siècle) Borzçta de
Borzyslaw. Il est à côté d'autres formations d'hypocoristes,
en -ota, -juta, et l'origine de ces formations très flottantes
n'est pas claire, mais celle de *-çta l'est.
Le bulgare a le type telé, plur. teléta (deté, plur. deçà), qu'il
a étendu, et plus largement que le serbo-croate, à d'autres
noms en -e : à des neutres en -ne, ainsi imâne « trésor », plur.
imâneia; à des «pluriels seconds» (§ 214) de noms en -e,
ainsi moré « mer », dvè moréla « deux mers », et de là à plur.
moréta pour un plus ancien morjd; aux mots d'emprunt en
-e : kafé « café », du turc kahve, plur. kaféta. De là une carac-
téristique -ta de pluriel qui s'est étendue à des mots étrangers
divers, non seulement en -e, comme gisé « guichet », plur.
giséta, mais en -i, -u, -ju: taksi «taxi», bizû « bijou », par-
desjû « pardessus », plur. taksita, bizûta, pardesjûta. Dans un
dialecte macédonien qui conserve l'élément nasal de g, le
parler de Suho (§ 66), on a parallèlement des pluriels en
-nia: pismô «lettre», emprunt du bulgaro-macédonien au
russe pour le populaire kniga, plur. pismônta. Mais le macé-
donien, parallèlement au serbo-croate et d'autre façon que
[L'96] ORIGINE DU TYPE 253
• i
lui, a généralement remplacé le pluriel en v. si. -çta par d'au-
tres formations : pile «oiseau», plur. pilista, avec le suffixe
v. si. -istï qui se contamine avec le neutre -iste, et pilina,
pilinja, avec la finale du type bulg. ime, plur. imenâ, macéd.
imin(j)a, en regard de bulg. pileta.
• • • _.
[198] LIMITATION DU TYPE 259
I
cérkvi
A. r ^
G. crùkûvu cerkvéj
L. crûkïïvaxù cerkvàx, -vjâx
D. c rukûvamû cerkvâm, -vjâm
I. crukuvami cerkvâmi, -vjâmi
[197] TYPE EN -er- 263
-ûve reste plus usuel que -uvi, mais le locatif en -ûve n'est
plus fréquent que dans la locution vu. crukuve « dans l'église ».
Au nominatif singulier, on voit apparaître à la fin du vieux
slave des formes comme crukvi pour cruky : il s'agit d'une
réfection sur le thème crûkuv'- devenu crûkv'-, avec -y reporté
sur thème mouillé sous la forme -i, comme -g du nominatif
singulier du participe présent a été reporté sur thème dur
dans grçdç pour grçdy (§ 66). Ces formes se retrouvent en
slavon russe et serbe, mais elles ' ne représentent qu'une
innovation éphémère du vieux bulgare, sans rapport avec la
désinence de nominatif singulier du type féminin en ~(j)î, qui
passait à -ja (§ 156) : le moyen bulgare a nom. crûkovï, et
-wia du polonais et du sorabe dialectaux est récent et
s'explique autrement.
Le vieux slave présente d'autre part des génitif-accusatifs
en -ûve, comme dans le type féminin dûsti, gén.-aqp. dûstere
(.§ 197) : ils se sont sûrement développés par analogie dans les
noms de parenté, comme svekry « belle-mère », acc. svekruvï,
puis gén.-acc. svekruve, mais il est curieux qu'ils se soient
étendus en vieux slave tardif à des inanimés, comme gén.-acc.
crukuve, smokûve de smoky « figuier ». Il y a un lien avec la
substitution de nom. smokvi à smoky, et un même souci de
généraliser au singulier un thème smokv'-. Cette tentative
d'éliminer la forme alternante acc. smokûvï, smokovï, n'a pas
eu de succès, et, si elle a triomphé plus tard, c'est sous la
forme nom. smokva, acc. smokvç.
Les substantifs à radical monosyllabique sont à part. Le
nom du «sang», kry, conserve en vieux slave son génitif
singulier kruve à côté de kruvi, avec des traces d'un génitif
pluriel kruvu ; mais son nominatif singulier kry, qui se main-
tient en vieux polonais, en kachoube, en polabe et en slovène,
a disparu et est remplacé par un nominatif-accusatif krûvl,
avec passage à la flexion en -i-, gén. plur. kruvii, etc., comme
ordinairement dans les langues slaves : r. krov', gén. krôvi, etc.
268 LA FLEXION A T H É M A T I Q U E - [183]
brwi, etc. : cf. lit. bruvis, ancien et dialectal, skr. brûh, fém.,
acc. bhrûvam, gr. cxppûç, -Os, fém., gén. ôçpûos, v. angl. bru,
mod. brow. Le mot est passé en slave à la flexion en -i- plus
complètement que krûv-, et la flexion ancienne n'est nulle
part conservée, ce qui n'est pas étonnant dans un substantif
dont les formes usuelles sont le duel et le pluriel bruvi. Un
singulier comme s.-cr. ôbrva est refait sur le duel (§ 214),
pour v. s.-cr. obrïvï. Un adjectif r.. belobrysyj « aux sourcils
blancs » ne saurait conserver un thème *bry de nominatif
singulier : ce doit être un croisement de belobrôvyj et de rùsyj
«blond» (belorùsyj, svetlorûsyj), qui attesterait l'existence en
russe de la variante *rysu des langues voisines, sor. rysy, pol.
rysawy. Comme *rysu « roux » et « tacheté » est de quelque
façon en rapport avec le nom du «lynx», r. rys', un adjectif
*bëlorysyj a pu désigner l'homme que ses sourcils blancs
font ressembler au lynx à poils blancs ail. Silberluchs.
On trouve une variante à initiale o- dans plusieurs langues
slave§ : slovaque obrva et obrv, slov. obrv et obrva, s.-cr. ôbrva.
Cette initiale ne peut pas s'expliquer par comparaison avec
les langues à prothèse vocalique, gr. ôtppùs, persan abru,
(e)bru, mais av. brvai- à lire bruvat- : le slave ignore les voyelles
prothétiques (§ 109). On doit penser soit à un déverbatif
d'une forme à préverbe o(b)~, soit à un composé *ok-brû-,
cf. ail. Augenbraue, d'un type sans voyelle de liaison qui est
resté productif en baltique, lit. juodbruvas «aux sourcils
noirs», et qui a laissé des traces en slave, laskrudï (§ 12),
pladïne (§ 114), etc. Ce composé aurait servi à distinguer le
nom du « sourcil » de celui de la « passerelle », slov. et s.-cr.
brv, mot slave commun qui, malgré les formes diverses qu'il
a prises dans les langues slaves, *brïv- (§ 61) et *bïrv-, r. brevnô
«poutre» et v. r. bervïno, etc., paraît se ramener à bruv- et
être bruv- « sourcil » en emploi métaphorique. De même en
germanique et en celtique : v. isl. bru « pont », et gaulois
-brïva en face de v. h. a. brama « sourcil » ; et cf. lat. superci-
lium au sens de « linteau de porte ».
274 LA FLEXION A T H É M A T I Q U E - [183]
telé, plur. teléta ; s.-cr. ïme, gén. ïmena, etc., plur. imèna, etc.,
tèle, gén. tèleta, etc. ; slov. tmg, gén. imèna, etc., téle, gén.
teinta, etc., avec conservation du type telô, gén. lelesa (§ 192),
et en outre avec un type féminin cérkev, gén. cÇrkve (§ 201).
Seul le tchèque, non le slovaque, paraît attester une conser-
vation du type athématique, avec sa désinence caractéris-
tique -e de génitif singulier : masc. kâmen, gén. kamene, loket,
gén. lokte, gén. plur. loket, neutre ramé, gén. ramene, kure,
gén. kurete, fém. cirkev, gén. cirkve. Mais le tchèque littéraire
est archaïsant, et les formes réelles du tchèque parlé sont
gén. kamena, gén. loktu, gén. plur. loktù, et nom. rameno, gén.
ramena, comme jméno qui s'est imposé dans la langue écrite.
Pour les génitifs en -e qui subsistent, il faut les interpré-
ter dans le système actuel : la flexion cirkev, gén. cirkve,
est celle du type féminin mixte posiel, gén. postele (§ 201), et
la flexion kure, gén. kurete (dial. kufaie, kuratë, slovaque
kurat'a) a de même gardé sa désinence -e parce qu'elle a été
identifiée à -e, de v. tch. -ë, du type en -yo- de more « mer »,
gén. more.
Il n'y a plus de type athématique dans les langues slaves :
divers vestiges seulement, et surtout des formes anomales de
nominatif-accusatif singulier, comme dans les formes fixées
des participes actifs présent (§ 281) et passé (§ 284) et du
comparatif (§ 291). Mais une langue comme le tchèque atteste
que la disparition du type n'est pas très ancienne. Le slave
n'est qu'un peu plus évolué que le lituanien, qui, avec même
extension limitée de certaines désinences, gén. sing. et nom.
plur. ~(e)s, gén. plur. garde le type flexionnel, mais de
façon si restreinte et si précaire qu'il a pratiquement disparu
dans une partie des dialectes, comme en lette.
CHAPITRE YII
20
302 FAITS DIVERS DE LA'FLEXION DES SUBSTANTIFS ,[214]
L'ACCENTUATION
I II III IV
Sing.
N. . vârna rankà galvà mergà
A. vdrnq ranka gdlvq mergq
G. vârnos rahkos galvôs mergôs
L. vârnoje rankoje galvojè mergojè
D. vârnai rankai gâlvai mergai
I. vârnq rankg. gâlvq mergq.
[216] THÈMES EN -â- ET | 327
I II III IV
Plur.
N.. vârnos rankos gâlvos mergos
A. vârnas rankàs gâlvas mergàs
G. vàrnvi • rankïj. galvîj. mergîl
L. vârnose rankose galvosè mergosè
D. vârnoms rankoms galvôms mergôms
I. vârnomis rankomis galvomis mergomis (-ôms)
Duel
N.-A. vârni ranki gâlvi mergi
D. i galvôm mergôm
vârnom rankom s
I- i ( galvôm mergôm
nence loc. -e, qui est remaniée, est traitée de la même façon
(§ 178). Au pluriel et au duel, on retrouve les quatre types
d'accent, deux paroxytons et deux oxytons, avec ou sans le
jeu de la loi de Saussure :
I II III IV
N. vyrai pônai kelmai dieval
A. vyrus ponùs kélmus di'evùs
G. ponq kelmîj. diev%
L. vîjTuose pônuose kelmuosè dievuosè
D. vyrams pônams kelmâms dievâms
I. vyrais portais kelmals dievaïs
N.-A. vtfru ponù kélmu dievù
D. j {i kelmdm dievâm
vyram pônam
I- < ( kelmam dievam
Les désinences d'intonation rude, ou traitées comme telles,
sont l'accusatif pluriel et le nominatif-accusatif duel, comme
dans les autres types flexionnels. L'accentuation du type
oxyton ne diverge autrement de celle des athématiques que
par son nominatif pluriel accentué en -al, qui est pris à la
flexion pronominale (§ 132). L'opposition d'un singulier
paroxyton et d'un pluriel oxyton, dans un type qui est d'accent
fixe en sanskrit et en grec, est naturellement nouvelle : elle
résulte de l'élimination des oxytons au singulier. La désinence
nom. sing. -as tendait fortement à se réduire à -s (§ 86), et
elle ne porte jamais l'accent, sauf dans l'adjectif déterminé
où au contraire -às-is est normal, sûrement pour une autre
cause (§ 299). Dans un type qui, le pluriel et le duel l'attestent,
a reçu comme tous les autres types la mobilité d'accent des
athématiques, un nominatif *deivâs, skr. devâh, et un accu-
satif *deïvan, pour skr. devâm, unissaient leur accent en
dièv(a)s, dièvq, et l'imposaient à tout le singulier. Les mascu-
lins en -ys, de *-ijas (§ 146), qui gardent un nominatif singulier
330 L'ACCENTUA TION [215]
aki, ausi. L'accent bulg. oci, usi, d'où sing. okô, uhô pour
r. oko, uxo, etc., ne peut pas être ancien : il résulte d'une
normalisation sur l'accent des cas obliques, r. dial. ocima et
ukr. ocyma à l'instrumental, s.-cr. ocima, loc.-dat.-instr.,
r. océj (gén.) et dial. ocjû, s.-cr. ocï et ocijû. De même la brève
de s,-cr. usi, pour cak. ûsi (gén.-loc. ûsih, § 214), est prise aux
cas obliques avec abrègement dans des trisyllabes (§ 107),
loc.-dat.-instr, ùsima, gén. ùsijû. E n slovène, l'accent du
nominatif-accusatif duel kosti du type kost, identique à celui
du nominatif-accusatif pluriel, est remanié.
Dans les polysyllabes, l'accent mobile est très étendu en
lituanien : atmintis «souvenir», acc. âtminti avec intonation
douce de l'initiale, gyvastis « vie », acc. gyvasti avec intonation
radicale rude. E n russe, l'accent est le plus souvent fixe, mais
on trouve aussi un type nôvost' « nouvelle », plur. nôvosti,
gén. novostéj, loc. novostjâx, etc. Cette mobilité de l'accent est
confirmée par le serbo-croate, bien qu'elle y apparaisse dans
des conditions différentes, au locatif singulier et limitée au
pluriel au génitif : bôlëst « maladie », gén. bôlesti, loc. bolèsti,
gén. plur. bolèstï, mais loc.-dat.-instr. bôlestima ; et aussi,
avec un mot plus long, zàpovijest « commandement », loc.
zapovijèsti, gén. plur. zapovijèstî.
Les masculins en -i-, avec les anciens athématiques qu'ils
ont incorporés, bien que passant au type en -yo- ou en -o-
• (•§ 169), ont gardé en partie la mobilité d'accent de leur
flexion originelle, différente de celle des masculins ordinaires :
r. gost' «hôte, invité», gén. gôstja, nom. plur. gôsli, gén.-acc.
gostéj, loc. gostjâx, etc., et s.-cr. gôst, gén. gôsia, nom. plur.
gôsti, acc. gôsle, gén. gàstl et gàstijû (§ 214), loc.-dat.-instr.
goslima ; r. gôlub' « pigeon », gén. gôlubja, plur. gôlubi, gén.-
acc. golubéj, loc. golubjâx, etc., et s.-cr. gôlùi, gén. gUûba,
plur. gôlûbi, gén. golûbâ, loc.-dat.-instr. golûbima (usuellement
plur. g'ôlubovi, gén. golubôvâ, avec les désinences tirées du
type en -u-).
[218] THÈMES EN -i- 335
!
Le masculin pçlï «chemin» est oxyton : r. put', gén.-loc.-
dat. puti, instr. putëm, et nom.-acc. plur. puti, etc. ; de même,
avec passage au type en -o-, s.-cr. pût, gén. pûta, cak. pût,
gén. pïïtâ, et slov. pçt, gén. pqia (et fém., § 169, gén. pçti
et potî), du type de kçl « coin », gén. kgta, qui répond au type
oxyton de r. kul, gén. kuiâ. Le tchèque poul « voyage », comme
koul, indique également un oxyton, avec longue de métatonie
(§ 102). Il faut admettre que cet ancien athématique, dont la
flexion a pu rester longtemps anomale, a gardé son génitif
singulier oxyton, avec l'appui du locatif et de locutions usuelles
comme r. s puti, naputl. Mais son cas n'est pas isolé : en regard
de lit. ugnis « feu », acc. ùgni, c'est aussi un oxyton qu'on
trouve dans r. ogôn, gén. ognjâ, s.-cr. àganj, gén. dgnja, slov.
ôgenj, gén. ôgnja. Les nombres de « cinq » à « neuf », anciens
féminins, présentent le même accent que le masculin poiï :
r. pjat', gén.-loc.-dat. pjati, instr. pjat'jû. Ils font groupe avec
l'ancien masculin athématique r. désjat', gén.-loc.-dat. desjatî,
qui a conservé plus complètement son accent du type balto-
slave (§ 217). Ce sont là quelques vestiges d'un état où dans
les thèmes en -i- l'accent était mobile au singulier comme il
l'est resté au pluriel. Par contre, le petit type russe à oxyto-
naison du singulier et mouvement d'accent au pluriel, gvozd'
«clou», gén. gvozdjâ, etc., et nom.-acc. plur. gvôzdi, gén.
gvozdéj, etc., ne représente qu'un croisement secondaire du
type de gosl' et du type oxyton des masculins ordinaires,
qui tend à s'étendre : l'accent cerv' « ver », gén. cervjâ, est
d'un mot qui n'est populaire qu'au pluriel cérvi, et il est
contredit par s.-cr. crv, gén. cfva, mais gén. plur. c m comme
r. cervêj. L'accent gén. ugljâ, de ûgoV « charbon », est nouveau
pour ûglja, et en effet le mot était du type immobile à into-
nation rude, lit. dial. dnglis, s.-cr. ugalj, gén. uglja.
L'accentuation anomale du mot religieux r. Gospôd'
« Seigneur », ukr. Hospôd' avec dat. Hospodévi, en regard
de gén. Gôspoda, etc., pris au slavon, est curieuse et pourrait
336 L'ACCENTUA TION [215]
oxyton : bulg. volôve, s.-cr. vàlovi, acc. voll (cak.), slov. vôli.
Pour l'emprunt v. si. Zidove « J u i f s » (§ 78), il a l'accent
bulg. Z idove, s.-cr. Z ïdovi. Sur le pluriel a été refait un singulier
bulg. Zid, s.-cr. TAd (usuellement lAdov), slov. Zid, paroxyton,
mais le russe a remplacé Z idove (-va) par TLidy comme synove
par syny, avec un singulier oxyton Z id, gén. Zidâ, pour
l'ancien Zidovîn (§ 212).
(acc. slugu), plur. slûge, noga, acc. nôgu, planina, acc. plâninu:
glâvu, zà slûge, nâ noge, nïz planinu « en descendant de la
montagne » ; — avec les féminins des types mâsl « graisse »,
loc. mâsti, kôst, gén. kôsti, pâmët « mémoire, raison », loc.
paméti, râdôst « joie », gén. ràdosti : nà mâst, ôd kosti, bëz
pamêti, ôd radosti ; —- avec les masculins des types grâd, loc.
grâdu, Bôg, gén. Bôga, mjësêc, loc. .mjesécu, kàmën, loc.
kamènu : îz_ grâda, prëd Boga, nâ mjesêc, ôd kamena ; — avec
les neutres des types mëso, plur. mësa, brdo, pluriel brda: bëz
mësa, uz brdo « en amont ». On observe une extension à des
neutres du type à accent fixe, comme Ijëto, plur. Ijëta : nâ
Ijeto. Le recul a lieu également sur l'initiale des prépositions
qui sont ou deviennent dissyllabiques : mïmo grâd « en longeant
la ville », ïspod leda « de sous la glace », prëko Ijeta « dans le
cours de l'été », krôza zemlju « à travers la terre », avec la
forme kroza de kroz pour la commodité de la prononciation
devant z- (§ 59). On peut même le trouver avec des préposi-
tions trissyllabiques : ôkolo grâda « autour de la ville »,
ïzmeâu pûka « d'entre le peuple ».
E t le serbo-croate présente un autre recul d'accent Sur la
préposition, celui qui a déplacé tout accent descendant en
le transformant en accent m o n t a n t sur la syllabe précédente
(§ 93) : crkva « église » et Iz crkvë « de l'église », kuca « maison »
et ôd kucê « de la maison », brât « frère », et isprëd brata « de
devant le frère ». Ce recul est également usuel et, en principe,
ne se confond pas avec l'autre : c'est qu'il représente une
nécessité phonétique, et iz crkvë n'est que la façon de pro-
noncer iz crkvë dans une langue qui n'a plus d'accent descen-
d a n t à l'intérieur des mots. C'est un fait notable que la
coexistence de ces deux types de recul de l'accent sur là
préposition, l'un morphologique et l'autre phonétique, qui
jouent de façon régulière ét avec très peu de flottements dans
les régions de bon accent. Il n'en est pas partout de même, on
s'en doute, mais la norme reste claire.
356 L'ACCENTUAT ION [224]