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Patrick SAUZET

Université Paul Valéry-Montpellier III

L'accent du grec ancien et les relations entre structure métrique et représentation


autosegmentale*. in P.Bélier éd. La géométrie du langage, état présent de la grammaire générative,
Langages, 95, 1989, p81-113.

La détermination de la place de l'accent1 (particulièrement de l'accent récessif, qui n'est


que phonologiquement conditionné) en grec ancien fait apparaître clairement la nécessité de
disposer de représentations phonologiques où une structure syllabique est définie. Il s'agit
donc d'un des nombreux faits qui plaident pour une théorie phonologique opérant sur des
constituants spécifiques (dont la syllabe est un premier niveau) et non sur de simples
concaténations de segments. La phonologie métrique est une théorie de ces constituants et elle
se pose donc par là-même en rupture avec le modèle génératif classique de Chomsky & Halle
68, dans lequel les segments concaténés n'ont d'autre organisation que celle que détermine la
morphologie ou la syntaxe (pour une présentation des théories métrique et autosegmentale cf.
Dell, Hirst & Vergnaud 84, van der Hulst & Smith 82, particulièrement les articles
introducteurs de chacun de ces recueils). Toutefois, les représentations organisées en
constituants que permet de construire la théorie métrique n'apparaissent pas capables de
caractériser directement la place de l'accent en grec ancien. Cette incapacité est d'autant plus
troublante que la propriété qui détermine la place de l'accent (poids des syllabes) est bien du
type que la théorie reconnaît pour assigner une structure métrique. On peut rendre compte
aisément dans un cadre métrique des facteurs dont dépend la place de l'accent récessif, mais
pas de cette place même.

Cette situation paradoxale s'éclaire si l'on prend en compte la nature tonale de la


réalisation de l'accent en grec ancien. Une forme accentuée est pourvue d'un certain profil
mélodique. Si ce profil est analysé comme une suite de tons, l'assignement de l'accent ne se
réduit pas à la détermination d'un élément proéminent (ce qui peut se dire en termes de
structure métrique seule) mais doit définir l'association des tons aux syllabes1 du mot. La
définition des principes d'une telle association sont l'objet de la théorie autosegmentale,
initialement développée pour rendre compte des phénomènes tonals2. En grec ancien, comme
dans d'autres langues (où la présence de tons est liée à l'expression d'une proéminence) cette
association doit tenir compte de la structure métrique. En combinant représentations métrique
et autosegmentale on parvient à assigner de façon satisfaisante le contour accentuel des mots
en grec ancien. Toutefois, l'articulation des deux approches ne peut être pensée comme une
simple complémentarité, où les mécanismes autosegmentaux ont pour fonction de dériver la
réalisation d'une proéminence métriquement définie. Il faut accorder aux unités de la mélodie
tonale une autonomie aux effets potentiellement indésirables. Cette situation conduit à
s'interroger sur le statut même des deux théories, à partir de leur contribution conjointe à la
définition du mot phonologique et de la proéminence à l'intérieur de celui-ci.

*
Suivant l'exemple de Vendryes 04, j'utilise le terme traditionnel d'accent et non celui, plus conforme à une
réalité phonétique probable sur laquelle je reviendrai, de ton. Le terme d'accent n'est de plus pas si inadéquat
étant donné la valeur indubitablement culminative des phénomènes tonals du grec ancien et la nécessité,
soulignée par Paul Garde, de ne pas donner une importance excessive à l'opposition entre accent "de hauteur" ou
"mélodique" et accent "d'intensité" ou "dynamique"(Garde 68, p.52-53).
1
Ou à toute autre unité définie comme porteuse du ton: more, voyelle, rime...
2
La désignation et le cadre de la théorie autosegmentale ont été introduits par Goldsmith (cf. Goldsmith 76a, 76b
pour une première synthèse, cf. aussi Dell, Hirst & Vergnaud 84, van der Hulst & Smith 82 déjà cités pour une
orientation bibliographique). Le recours à des représentations phonologiques à plusieurs niveaux, Goldsmith
insiste sur ce point, ne manque cependant pas de précédents explicites ou implicites.
1 Rappel des faits.3

Le principe fondamental qui gouverne l'accentuation du grec ancien est la "loi de


limitation". Celle-ci définit à la fois le champ intonable pour tous les mots de la langue (les
places que l'accent peut occuper) et la place effective de l'accent pour plusieurs classes de
mots. Ces derniers et l'accent qui les affecte sont dits récessifs. Je rappelle en (1) la règle
informelle de placement de l'accent dans les mots récessifs.

(1) Placement de l'accent récessif:

a Si la dernière syllabe est brève, l'accent affecte l'antépénultième syllabe du mot,

b si la dernière syllabe est longue, l'accent affecte la pénultième.

Par "syllabe longue" on entend traditionnellement syllabe contenant une voyelle


longue ou une diphtongue (sauf quelques cas pour ces dernières), par brève les autres
(ouvertes ou fermées). Ce point sera discuté ci-dessous (5.1).

Soit le mot stráteuma4 "armée-nom.sg.", récessif comme tous les neutres athématiques
et la plupart des neutres en général. L'accent est antépénultième au nominatif singulier dont la
finale est brève (ma), de même au nominatif-accusatif pluriel: strateúmata, dont la finale (ta)
est brève aussi. En revanche, le génitif pluriel a une finale longue et l'accent pénultième:
strateumátoon.

Etant donné la règle de placement (1), la loi de limitation qui définit le champ
intonable pour tous les mots peut s'exprimer comme suit.

(2) Loi de limitation:

L'accent ne peut affecter aucune syllabe précédent celle qui serait accentuée si le mot
était récessif.

A côté didáskalos "maître (qui enseigne)-nom.sg.", récessif, on trouve les formes non
récessives poikílos "bigarré-nom.sg.masc.", agathós "bon-nom.sg.masc.". Il n'existe pas de
formes du type *dídaskalos.

3
Pour une description exhaustive des faits d'accentuation en grec ancien, cf. Vendryes 04, Bally 45. Je désigne
ici comme accent du grec ancien celui qu'on peut inférer des descriptions des grammairiens alexandrins, soit,
fondamentalement, celui de l'attique et de la koiné. Toutefois il est délicat de faire le départ entre ce qui relève
effectivement de cet état de langue et les élaborations ultérieures d'époque byzantine (où le système de l'accent
était profondément modifié par la perte des oppositions de quantité vocalique) à travers lesquelles l'enseignement
des Alexandrins a été transmis (cf. Laum 28). Ce point sera évoqué à propos de la barytonèse des oxytons.
4
Les mots du grec ancien sont donnés ici, sauf indication contraire, dans une simple translittération, et non dans
une notation phonétique ou phonologique de ce que l'on peut établir comme ayant été leur réalisation. Les
voyelles longues sont rendues par des géminées. Je me conforme à l'orthographe traditionnelle dans cette
transposition, y compris pour la notation de l'accent. Celui-ci est écrit sur le deuxième élément d'une diphtongue
(même purement graphique). De même je le note sur la deuxième voyelle dans la translittération des longues.
Pour la question de la localisation effective de la proéminence dans la syllabe, cf. ci-dessous 4.

2
Tous les exemples donnés jusqu'ici comportent le même accent, qualifié d'aigu (oksús)
par une tradition qui remonte aux grammairiens alexandrins (Vendryes 1904, p33). Ces
mêmes grammairiens le définissent comme une montée mélodique. Il existe un autre accent5
dit circonflexe, perispooménee (prosooidía), oksubareîa... (Vendryes 1904, p44) et défini
comme la succession d'une montée et d'une descente sur la même syllabe. L'apparition de cet
accent est évidemment soumise à la loi de limitation (2), mais aussi à d'autres contraintes
spécifiques:

(3) Distribution des circonflexes:

a Le circonflexe n'apparaît que sur les voyelles longues et les diphtongues (avec
les mêmes restrictions pour ces dernières que celles évoquées après (1) ci-dessus),

b le circonflexe n'apparaît jamais sur l'antépénultième,

c sur la pénultième le circonflexe est impossible si la dernière syllabe est longue


(au sens de l'interprétation traditionnelle de ce mot donnée après (1) ci-dessus), obligatoire si
la dernière syllabe est brève,

d seule la dernière syllabe peut être affectée du circonflexe ou de l'aigu.

La diphtongue eu dans strateúmata porte un aigu et ne saurait porter un circonflexe.


sooteér "sauveur-nom.sg." fait au génitif singulier sooteêros et sooteéroon au génitif pluriel, la
variation étant selon le mot de Vendryes "absolument mécanique" (Vendryes 04, p57). Mais à
l'aigu de phugeén "fuite acc.sg." s'oppose le circonflexe de phugeês "id.-gén.sg.".

L'accent récessif a pu être décrit sans mention du circonflexe. Cela tient à ce que cet
accent ne peut affecter les mots récessifs6 que dans deux circonstances particulières:

- si la longueur du mot est inférieure à celle du champ intonable, cf. (2),

- en cas de contraction vocalique.

Si un mot récessif à finale brève ne comporte que deux syllabes, à défaut


d'antépénultième, c'est la première et pénultième qui porte l'accent. Si cette syllabe est longue,
elle porte un circonflexe (comme le prédit la généralisation (3)c). On accentue donc ainsi les
dissyllabes neutres (récessifs) suivants: ánthos "fleur-nom.sg.", doôma "maison-nom-sg". Les
monosyllabes récessifs à voyelle longue ont le circonflexe. Neutres monosyllabes: puûr "feu-
nom.sg.") ou formes verbales personnelles: eî "être-2sg.pres.ind.", eên "id.-3sg.imp.ind.".

Quand la voyelle qui porte l'accent récessif se contracte avec la voyelle suivante, la
voyelle (toujours longue) qui résulte de la contraction porte un circonflexe: timáoo → timoô
"honorer-1sg.pres.ind.", timáomen → timoômen "id.-1pl.pres. ind."7.

5
Il existe un troisième accent graphique, dit grave (barús) décrit comme une descente mélodique. Il affecte en
principe toute syllabe non affectée d'un des deux autres accents (on peut donc conclure avec Vendryes 1904 p.34
qu'il correspond à l'absence d'accent). La tradition orthographique le note quand il correspond à la réalisation
conditionnée, en liaison, d'un aigu final. Ce point sera discuté plus bas, section 5.2.
6
Du moins si l'on s'en tient à la définition traditionnelle des syllabes longues finales, cf. ci-dessous 5.1.
7
Si la syllabe portant l'accent récessif se contracte avec une voyelle précédente, la contraction est sans effet sur
l'accentuation. Dans de telles formes, l'accent récessif ne serait pas autrement assigné à partir de la forme
contractée qu'à partir de la forme non contractée: timaómetha → timoómetha "honorer-1pl.pres.ind.moy.".

3
2 Sensibilité à la structure syllabique.

L'accent ne peut être correctement assigné qu'à des formes dont la représentation
définit la syllabation. Dans un cadre qui ne fait pas référence aux syllabes, comme celui de
Chomsky & Halle 68, la règle de l'accent récessif peut recevoir la formulation suivante (je
reprends celle de Kiparsky 67, 73):

(4) Accent récessif.

v → [+accent] / __ C0 V0 C0 V10 C0 #

Cette formulation assume l'analyse traditionnelle selon laquelle seule la longueur


vocalique où la présence d'une diphtongue sont pertinentes pour la localisation de l'accent.
Elle repose aussi sur la représentation des voyelles longues comme des géminées et enfin sur
l'interprétation (qui sera discutée plus loin, 4.1) de l'aigu et du circonflexe, sur les voyelles
longues et les diphtongues, comme une mise en relief de la seconde et de la première more
respectivement (aá/aâ = aá / áa).

On peut montrer que la formulation segmentale en (4) n'est pas même factuellement
adéquate. Elle l'est assurément quand les séquences éventuellement nulles de consonnes
qu'elle contient ne sont pas nulles, ce qui suggère bien que leur mention n'est qu'un moyen
détourné de faire référence à la structure syllabique. (4) accentue correctement ónoma "nom-
nom.acc.sg", hamárteema "faute-nom.acc.sg."... Remarquons que pour accentuer correctement
cette dernière forme il faut, conformément aux conventions de développement de Chomsky &
Halle 68 (p397/270) considérer d'abord comme maximale la pénultième séquence vocalique,
faute de quoi l'accent serait *hamartéema (=*hamarteêma pour Kiparsky). L'accent de
poíeema "oeuvre-nom.acc.sg" ou de thumíaama "parfum-nom.acc.sg." implique par ailleurs
que la longueur de cette séquence vocalique pénultième soit limitée à deux segments:

(5) Accent récessif (révisé).

v → [+accent] / __ C0 V20 C0 V10 C0 #

Dans le développement de la règle (5) la pénultième séquence vocalique doit être lue
successivement comme vv puis v. Or si nous considérons un mot récessif dont la dernière
voyelle est longue et en hiatus, cette convention assignera systématiquement un accent
incorrect. La règle (5) accentuera par exemple *hiimátiou pour himatíou "manteau-gén.sg."
(iou8 lu vv v au lieu de v vv). De même en cas d'hiatus de deux brèves antépénultième et
pénultième, et de finale brève, (5) assignera un accent anté-antépénultième: *autoskhédiasma
pour autoskhedíasma "improvisation". L'accentuation des formes verbales contractes et
récesssives dépend aussi de la distribution syllabique des segments vocaliques avant
contraction: poieîs, "faire-2sg.prés.ind." repose sur poi-e-eis (où "ei" note e: )9.
8
Phonétiquement "ou" vaut [o:] (Lejeune 72, p230), mais l'argument n'est en rien modifié puisque (5) traite les
voyelles longues comme deux segments au même titre que les diphtongues.
9
Dans un certain nombre de cas, et en particulier ceux de contraction, la présence implicite de frontières de
morphèmes (cf. Chomsky & Halle 68, p364/218) permettrait d'assurer une bonne répartition des mores. Une
lecture __ +C0v20C0v10 du contexte de (5) précédant une lecture __ C0v20C0v10 assure l'accent de poié+ei,
mais prédit toujours incorrectement *póieei c'est-à-dire *poîei "id.-imp.2sg." pour poíei de poie+e.

4
3 Difficultés d'une approche métrique.

Une approche métrique permet d'opérer sur des constituants syllabiques10 et donc
d'éviter les difficultés précédentes. Elle implique aussi que la proéminence marquée par
l'accent résulte de la construction, au delà de la syllabe de constituants plus larges. L'accent
n'est que la proéminence dans un de ces niveaux, le mot phonologique.

3.1 Rappel des principes et du formalisme.

Dans le cadre de la version de la théorie métrique issue de l'étude systématique de


Hayes et élaborée par Halle et Vergnaud (Hayes 81, Halle & Vergnaud 87b), la typologie des
constituants métriques obéit à de strictes contraintes. Ceux-ci ne peuvent différer que par un
petit nombre de propriétés qui définissent autant de paramètres. Le système accentuel d'une
langue est déterminé par une fixation particulière de ces paramètres.

(6) Typologie des constituants métriques.

Des constituants sont, sur un même niveau:

a- bornés ou non-bornés,

b- dominant à droite ou à gauche,

c- construits de droite à gauche ou de gauche à droite.

Une fois posé qu'un constituant n'est que le résultat de l'établissement d'une relation11
entre un élément fort, ou une tête, et d'autres éléments, les propriétés différentielles énumérées
en (6) se déduisent de principes très généraux. Les constituants seront bornés ou non selon que
la relation de la tête aux autres éléments obéit ou non à une contrainte de localité stricte, la
tête sera à gauche ou à droite selon le sens donné à cette relation. (6)c enfin constitue un
principe de désambiguïsation.

Les constituants construits selon les paramètres de (6) peuvent se représenter par des
arborescences. Dans la mesure où le fait d'être tête dans un niveau de constituance définit une
proéminence phonétiquement interprétable comme un degré d'accent, il est commode
d'associer à ces arborescence une grille métrique, dont les lignes contiennent des positions
correspondants aux éléments-têtes des constituants métriques successivement construits12.
Selon la notation introduite par Halle et Vergnaud, les constituants métriques peuvent être
représentés directement sur les positions présentes dans la grille. Soit une ligne 0 où chaque

10
Pour la facilité de l'exposé je fais référence à la syllabe. Cela n'exclut pas que la seule unité pertinente tant pour
la construction de la structure métrique que pour l'assignation tonale puisse être la rime (la partie de la syllabe
comprenant le noyau syllabique et ce qui le suit).
11
Cette relation peut sans doute être identifiée au gouvernement dont la configuration canonique est la relation
d'une tête à son complément (cf. Chomsky 81, p165, Chomsky (Rouveret) 87, p20). C'est le parti que je prend
dans la section 6.
12
La notion de grille métrique a été introduite en phonologie par les travaux de Liberman et Prince (Liberman
75, Liberman & Prince 77).

5
position correspond à une syllabe, les types de constituants définis en (6) auront les
représentation suivantes:

(7) bornés non-bornés

a 1 x b 1 x
0 (x x) 0 (x x ... x) dominant à gauche

c 1 x d 1 x
0 (x x) 0 (x ... x x) dominant à droite

Sur une séquence de cinq syllabes, la construction de constituants bornés dominant à


gauche (de pieds, puiqu'on désigne de ce terme repris de la métrique poétique les constituants
formés immédiatement de syllabes) donnera (8)a ou (8)b selon le sens de la construction.

(8) a de gauche à droite b de droite à gauche


1 x x x 1 x x x
0 (x x)(x x)(x) 0 (x)(x x)(x x)

Les constituants ainsi définis suffisent à rendre compte de nombreux systèmes


accentuels (cf Hayes 81, Halle & Vergnaud 87b). Un accent final ou initial ne demande que la
construction d'un pied non-borné. Un accent pénultième (ou sur la seconde syllabe) la
construction d'un pied borné, dont la proéminence globale est assurée par la construction d'un
constituant non borné, dont le pied final ou initial est la tête (les proéminences dans les autres
pieds définissant, le cas échéant, des accents secondaires).

Aux paramètres correspondant à la typologie des constituants, la théorie métrique


ajoute les deux suivants: l'extramétricité, la sensibilité aux propriétés définies sur les niveaux
inférieurs (en particulier sensibilité du mécanisme de construction des pieds aux propriétés
des syllabes ou des segments qu'elles contiennent).

(9) Extramétricité.
Un constituant marginal peut être extramétrique, c'est-à-dire ne pas être pris en compte
par le processus d'assignement de la structure métrique (lui être invisible).

(10) Clause d'"accentuation".

Certains éléments (qui seront dit "accentués") ne peuvent figurer dans un constituant
que dans la position tête.

Le système de l'accent latin (pénultième longue, accent pénultième, pénultième brève


accent antépénultième) permet d'illuster les divers paramètres posés.

6
(11) Accent latin.

a constiuants de ligne 1: bornés, dominant à gauche, construits de droite à gauche,

b constituants de ligne 2: non borné, dominant à droite,

c syllabe finale extramétrique,

d les syllabes lourdes (fermées ou contenant une voyelle longue ou une diphtongue)
sont "accentuées".

On accentue ainsi:

(12)
2 x x
1 (x x) EM (x x x) EM
0 (x)(x x) x (x)(x x)(x) x
fa cili taas fa ci li taatem

(x note une syllabe "accentuée")

facílitas facilitátem

3.2 Sélection de paramètres pour le grec ancien.

De ce qui a été dit de l'accent du grec ancien on peut d'emblée fixer une partie des
paramètres définissant la structure métrique qui doit être construite. La limitation de la
distance de l'accent à la fin du mot suppose la présence de structures métriques bornées. Que
la place de l'accent se définisse exclusivement par rapport à la fin du mot implique à la fois
l'existence d'un niveau de constituance où la dominance est à droite et une construction de
droite à gauche. Que la fixation de l'accent dépende du poids des syllabes suggère que
certaines syllabes sont "accentuées" au sens de (10). Soit donc la fixation suivante des
paramètres:

(13) Accent grec (première fixation de paramètres).

a constituants de niveau 1: bornés, dominant à gauche, construits de droite à gauche,

(b constituants de niveau 2: bornés, dominant à gauche, construits de droite à gauche,)

c constituant de niveau (3)2: non borné dominant à droite.

d les syllabes lourdes (traditionnellement, celles qui contiennent une voyelle longue ou
une diphtongue) sont "accentuées".

La formulation ci-dessus embrasse deux hypothèses qui échouent l'une et l'autre à


assigner correctement l'accent. Soient les formes onómata "nom-nom.acc.pl." et onomátoon
"id.-gén.pl.". Selon que la clause (13)b est ou non appliquée on dérive:

7
(14) sans la clause (13)b:

a 2 x a' x
1 (x x) (x x x)
0 (x x) (x x) (x)(x x)(x)
ono mata o noma toon

*onomáta *onomatoón/-toôn

avec la clause (13)b

b 3 x b' x
2 (x) (x x)
1 (x x) (x)(x x)
0 (x x) (x x) (x)(x x)(x)
ono mata o noma toon

*ónomata *onómatoon

La place de l'accent ne coïncide ni avec la tête du dernier pied, ni avec celle de l'avant-
dernier. Il est exclu de supposer que la dominance dans les constituants n'est pas uniforme sur
un même niveau (d'avoir par exemple un pied pénultième dominant à droite devant un pied
final dominant à gauche), puisque la fixation de la direction de la dominance est une propriété
définitoire d'un niveau de constituance.13 Notons qu'en (14)b', la construction au niveau 1 de
constituants dominant à droite définirait les constituants et l'assignement accentuel suivants:

(15)
3 x
2 (x)
1 (x x)
0 (x x)(x x)
ono matoon

*onómatoon

Il semble impossible de faire coïncider l'accent du grec ancien avec la proéminence


telle que la théorie métrique permet de l'assigner. Une solution toutefois peut être proposée en
recourant à la notion d'extramétricité. C'est celle qu'adopte une étude récente de Steriade. Je
reproduis sa formulation:

13
Une première solution avancée par Steriade reposait sur cette possibilité, ouverte dans le cadre de la
formulation de la théorie métrique exposée dans Prince & Liberman 77 (Steriade 79).

8
(16) Accent récessif en grec ancien. (Steriade 88, p276)

Formation des pieds.


a Une consonne finale est extramétrique.
b Une syllabe finale légère est extramétrique.
c Construire de droite à gauche des pieds binaires, dominant à gauche.

Règle d'accent principal.


d Construire au niveau du mot un pied14 (non borné) dominant à droite.
e Eliminer les accents secondaires.15

La formulation de Steriade comporte deux clauses d'extramétricité. La première se


relie à la conception du poids syllabique en grec ancien défendue par Steriade sur laquelle je
reviens en 5.1. La seconde, (16)b, permet l'assignement de l'accent, pénultième ou
antépénultième selon le poids de la dernière syllabe, comme le montrent les exemples
suivants:

(17) a b
2 x x
1 (x x) EM (x x)
0 (x)(x x)x (x x) (x x)
o nomata ono matoon

onómata onomátoon

c
2 x
1 (x x) EM
0 (x) (x x) x
ha marteema

hamárteema

En (17)b j'ai marqué en gras la position syllabique qui, parce que correspondant à une
syllabe lourde, ne peut être extramétrique. Il est remarquable que le poids d'une syllabe
interdit de la considérer comme extramétrique, mais non de la faire apparaître dans la position
faible (non tête) d'un pied. Cela constitue à mon sens une première difficulté. La clause
d'extramétricité permet de négliger pour la construction des structures métriques un
constituant marginal. La notion de constituant se définit dans le processus même de
l'assignement d'une structure métrique. L'extramétricité est une notion dérivée par rapport à
l'assignement de la structure métrique. On s'attend donc qu'elle se définisse dans les termes
mêmes dont une langue fait usage pour définir ses constituants. Je propose la formulation
suivante de cette limitation au recours à l'extramétricité qui n'est que l'explicitation de
l'exigence: "seuls des constituants peuvent être déclarés extramétriques"16:

(18) Une séquence extramétrique pour un niveau doit être définie dans les mêmes termes que
les constituants de ce niveau.
14
Par pied, Steriade désigne tout constituant défini selon les paramètres de (6). Je réserve le terme au constituant
dominant directement des syllabes (niveau 1).
15
On ne sait rien d'éventuels accents secondaires en grec ancien (cf. Vendryes 04, p14).
16
De même les clauses du branchement uniforme ou de la dominance uniforme chez Halle et Vergnaud sont des
conséquences du fait que la fixation de ces paramètres pour un niveau définit les constituants.

9
Dans l'exemple latin, une syllabe finale est déclarée extramétrique et cela est possible
parce que la syllabe est un constituant reconnu par le processus d'assignement de l'accent latin.
L'extramétricité latine n'est pas sensible au caractère éventuellement "accentué" de la syllabe
finale (une syllabe lourde peut être extramétrique comme une légère cf.(12)). Ce n'est pas
problématique dans la mesure où ce caractère n'est pertinent que pour le processus de
construction des pieds dont sont précisément exclues les syllabes extramétriques. En grec, la
situation serait exactement inverse: l'extramétricité est sensible au poids syllabique (ce qui
revient à poser que les syllabes lourdes sont "accentuées" pour ce processus) mais non la
construction des pieds. L'extramétricité ne peut plus être pensée comme dérivée de
l'assignement de la structure métrique puisqu'elle fait appel à un paramètre de constituance
absent de cet assignement.

La difficulté est redoublée si l'on considère les formes non récessives. Soit par
exemple une forme à accent final (mot oxyton dans la terminologie traditionnelle) comme
bradús "lent-nom.masc.fém.sg". Steriade considère que la syllabe finale de telles formes est
"accentuée de manière inhérente". Cette accentuation l'exempte d'extramétricité, comme les
syllabes lourdes. Mais elle lui interdit aussi d'apparaître dans la position faible d'un pied. Les
structures métriques sont donc bien sensibles à un trait "accentué", morphologiquement et
lexicalement introduit, mais cette propriété ne peut être assimilée à celle des syllabes lourdes
finales. Il faut donc faire appel à deux notions distinctes d'"accentuation" dont l'une n'est
pertinente que pour l'extramétricité. L'approche de Steriade, laissant de côté pour l'instant
d'autres difficultés qu'elle soulève, ne peut être maintenue que moyennant un conception
permissive de l'extramétricité, qu'exclut une clause comme (18).

Il n'est pas sans intérêt de relever à ce point que les difficultés que rencontre la théorie
métrique à formuler le processus d'assignement de l'accent en grec ancien ont leur pendant
dans d'autres approches. Elles découlent d'une exigence, admise dans tout cadre théorique, qui
exclut le recours à des procédures de décompte. C'est pour cette raison que la théorie métrique
reconnaît des constituants binaires (c'est-à-dire bornés) et non bornés, et non des constituants
de n éléments. Kurilowicz, à propos de l'accent grec ancien, exprime cette exigence en posant
qu'on ne peut faire appel dans la définition de sa place qu'aux notions de "final/initial",
"précédent/suivant" (Kurilowicz 58). Ce sont précisément les notions définitoires de la théorie
métrique. Se pliant à une telle contrainte Jakobson pose que l'accent récessif frappe la syllabe
précédant la syllabe contenant la more17 préfinale (celle-ci est dans la dernière syllabe si elle
en comporte deux, dans la pénultième, longue ou brève, si la dernière n'a qu'une more)
(Jakobson 37). Kurilowicz, désigne du nom d'"ensemble final" la séquence formée de la
syllabe contenant la more pénultième et de ce qui éventuellement la suit. L'accent récessif
frappe la syllabe précédent cet "ensemble final". Pour qu'une telle définition ne soit pas une
définition numérique déguisée (qu'introduit un usage récurrent de la notion de "précéder") il
est crucial que soient considérés distincts le processus opérant sur les mores (qui définit
l'ensemble final) et celui, syllabique, qui détermine finalement la place de l'accent. L'ensemble
final équivaut strictement à un pied borné dominant à gauche, étant posé que les syllabes
lourdes ("à deux mores" traditionnellement) sont accentuées.

17
La more est une unité de mesure phonologique de la durée du noyau syllabique et éventuellement d'association
tonale. Une syllabe à voyelle longue ou à diphtongue compte deux mores, une syllabe à voyelle brève une more.
Comme le souligne Jakobson, l'accentuation du grec ancien ne peut être définie ni en termes de mores seules, ni
en termes de syllabes seules (Jakobson 37).

10
4 Approche autosegmentale et métrique.

4.1 Représentation autosegmentale de l'opposition aigu-circonflexe.

Partons du constat suivant: dans les mots récessifs longs (comptant au moins une
syllabe de plus que l'"ensemble final") l'accent, graphique, frappe la syllabe précédant ce qui
peut être défini métriquement comme un pied. Rappelons à ce point ce que l'on peut savoir de
la valeur phonétique des accents du grec ancien. Les grammairiens grecs définissent l'aigu
comme une montée tonale (répartie sur toute la voyelle, longue ou brève, ou la diphtongue18),
le grave comme une descente tonale, le circonflexe comme la combinaison d'une montée et
d'une descente. Rappelons que toute syllabe ne portant pas l'aigu est considérée comme
affectée d'un grave et que certaines notations des papyrus utilisent cette possibilité pour
exprimer le contour tonal d'un mot (cf. Vendryes 1904, p.38 et, pour une étude détaillée des
pratiques des papyrus, Laum 28.). L'aigu s'oppose au circonflexe comme le simple au
complexe et rien dans les descriptions données par les grammairiens alexandrins de la valeur
de ces signes ne justifie la définition reçue selon laquelle l'aigu est une proéminence sur la
deuxième more d'une syllabe longue, par opposition au circonflexe notant une proéminence
sur la première. C'est pourtant ce qu'admet Vendryes (Vendryes 04, p46), ou de même
Kiparsky et Steriade (Kiparsky 67, 73, Steriade 79, 88). Bally insiste au contraire sur le fait
que l'aigu "est une élévation uniforme de la voix sur toute la durée de l'élément vocalique, que
celui-ci soit une voyelle brève, une voyelle longue ou une diphtongue" (Bally 45, p13).
L'analyse de l'aigu comme une mise en relief de la deuxième more ne me semble se justifier
que par l'assimilation du ton à un trait segmental (qu'exprime la théorie des mores). C'est
parce que la complexité du circonflexe est pensée comme attribution du ton montant au
premier élément d'une diphtongue, ou à la première partie d'une voyelle longue (la première
more), que l'aigu sur les longues est symétriquement conçu comme une montée sur la
deuxième more.19

On est ici en présence d'un des phénomènes qui ont justifié l'élaboration de la théorie
autosegmentale: l'existence de contours (cf. Goldsmith 76). Dans les langues qui présentent
des intonations complexes (haut-bas par exemple) sur des voyelles brèves, il faudrait, si les
tons étaient assimilés à des traits segmentaux, donner à ces voyelles deux spécifications
contradictoires ([+ ton haut] et [- ton haut] par exemple). La difficulté tombe si l'on pose que
les unités tonales forment un niveau autonome et sont associées, de manière qui n'est pas
systématiquement biunivoque, aux segments. L'argument est moins contraignant en grec
puisque, comme dans d'autres langues, l'intonation complexe, le circonflexe, n'y apparaît que
sur les longues (cf. par exemple Pulleyblank 83, où cette contrainte est relevée en Bamileke
Dschang, en Yoruba, en Tonga). L'assignation segmentale du ton est possible. Mais elle est
totalement ad hoc dans le cas des longues aiguës. La notion de more, en grec du moins, est un
effet de l'assignation segmentale du ton complexe, qui, une fois posée, induit une assignation
symétrique (et arbitraire) de l'aigu sur les longues.

18
La notation de l'accent sur le deuxième élément d'une diphtongue est une convention purement graphique de
fixation tardive, elle ne aurait appuyer la thèse d'un accent sur la deuxième more. Le circonflexe s'est dans les
mêmes conditions fixé aussi sur la deuxième voyelle des diphtongues après avoir été noté sur l'ensemble de la
diphtongue (pour ces questions cf. Laum 28).
19
Le terme "ton montant" suggère la complexité, et de fait un ton montant doit souvent être analysé comme la
combinaison d'un ton bas et d'un ton haut. Mais à ce compte le grave est aussi complexe et le circonflexe est
formé de trois tons ponctuels. Il faut en fait poser en grec ancien que le ton montant est une réalisation d'un ton
haut simple, le descendant d'un ton bas simple et le circonflexe, qui est seul complexe, d'une combinaison haut-
bas.

11
Plus que la qualité "musicale" de l'accent grec ancien20, le caractère de l'opposition
aigu/circonflexe plaide pour une représentation autonome des tons dans cette langue. Dans la
mesure où la more ne représente qu'un effet de la segmentalisation du ton complexe, on peut
considérer que l'unité porteuse de ton est en grec ancien la syllabe (ou la rime). Les trois
accents du grec auront les représentations suivantes:

(19) a grave: σ (σ = "syllabe")


|
B

b aigu: σ
|
H

c circonflexe: σ
/|
HB

Cette représentation n'exclut pas la présence d'un circonflexe sur une brève. Il faut
donc poser la règle suivante:

(20) Simplification du circonflexe:

σ σ
/| |
HB → H si σ ne contient ni voyelle longue ni diphtongue.21

4.2 Assignement de l'accent récessif.

La représentation autosegmentale des tons en grec ancien ne dit rien a priori sur leur
distribution. En particulier la valeur indiscutablement culminative du contour tonal en grec
ancien (il n'y a, sauf enclise, qu'un ton haut par mot) implique que l'association des tons, au
moins pour l'accent récessif, se fasse en fonction de la structure métrique. Il s'agit donc que la
mélodie tonale d'un mot dépende de sa structure métrique et la reflète22. Il n'est pas nécessaire
que l'élément métriquement proéminent soit associé à tel ou tel ton. Je pose donc le
mécanisme métrique, (21), qui reprend une des deux fixations posées a priori en (13), et
autosegmental, (22), suivant pour rendre compte de l'accent récessif en grec ancien.

20
Garde cite d'après Pike & Kindberg 56 le cas du campa, langue amérindienne du Pérou, où l'intensité ne joue
pas un rôle culminatif (Garde 68, p.40). Si la répartition de l'intensité dans cette langue peut être décrite comme
celle des tons dans une langue à tons canonique (où l'assignement des tons ne dépend pas de la structure
métrique), il est pensable en retour que la mise en relation de l'intensité à la structure métrique soit décrite dans
les mêmes termes que celle de tons mélodiques. Cela suggère, autrement dit, que l'intensité n'exprime pas plus
intrinsèquement la proéminence que la hauteur musicale.
21
Il est probable que la formulation de cette règle a varié au cours de l'histoire du grec ancien, les syllabes
contenant une séquence voyelle-sonante ayant pu un temps porter l'intonation circonflexe (cf. Vendryes 04, p.85).
22
Pour une approche qui, dans un cadre différent, fait jouer un rôle essentiel à la réalisation par une mélodie
tonale (une contonation au sens de Firth) de l'accent en grec ancien, cf. Allen 66.

12
(21) Accent grec (paramètres métriques).

a constituants de niveau 1 (pieds): bornés, dominant à gauche, construits de


droite à gauche,

b constituant de niveau 2 (mot phonologique): non borné, dominant à droite.

c les syllabes lourdes (traditionnellement celles qui contiennent une voyelle


longue ou une diphtongue) sont accentuées.

(d effacer les accents secondaires?)

(22) Accent grec (réalisation tonale).

Associer à la syllabe métriquement proéminente la mélodie HB* (le ton marqué d'une
astérisque s'associe à la syllabe proéminente).

Défaut: toute syllabe non associée à un ton de la mélodie ci-dessus est associée à un
ton B.

J'admets les principes suivants pour l'association des tons aux unités porteuse (les
syllabes).

(23) Association initiale.

Le ton distingué (T*) s'associe à une syllabe accentuée (en grec ancien, la syllabe
métriquement proéminente).

(24) Association des tons libres.

Associer un à un les tons libres aux unités porteuses accessibles à partir de


l'association initiale.

Les langues à accent tonal (comme le tonga (Goldsmith 81), le japonais (Haragushi
77) se distinguent des langues tonales canoniques par le mécanisme d'association initiale.
L'association initiale, (23), est conditionnée par le statut de certaines unités porteuses dans les
premières. Dans les secondes, une forme typique d'association initiale consiste à associer le
premier ton à la première unité porteuse (Clements & Ford 79, p189). Dans le cas du grec
ancien, l'unité porteuse distinguée est phonologiquement définie (accent récessif) ou du moins
sa sélection est contrainte phonologiquement (autres formes accentuées, toutes soumises à la
loi de limitation). En tonga ou en japonais au contraire, les unités porteuses accentuées, qui
déterminent l'association initiale, ne sont pas phonologiquement prédictibles. Ces langues
peuvent être dites simplement à accent tonal libre. Il faut toutefois distinguer encore le
japonais (du moins certains dialectes, ou le serbo-croate, cf. ci-dessous) où l'existence d'une
seule syllabe distinguée suggère qu'une structure métrique, déterminant une proéminence
globale, médiatise l'attachement de la mélodie tonale, et le tonga où le nombre de syllabes
accentuées n'est pas limité. De fait Zubizarreta a pu proposer une analyse des schèmes tonals
du japonais reposant sur une structuration métrique (Zubizarreta 82, 84). Inversement
Pulleyblank propose d'interpréter le tonga directement par la préassociation d'un ton
(Pulleyblank 83). En japonais une syllabe porte un trait "accentué" qui détermine une structure

13
métrique en fonction de laquelle apparaît un schème tonal, alors qu'en tonga ce trait, dans
l'analyse de Goldsmith, produit directement l'association tonale.

La convention (24) est celle que pose Haragushi et que reprennent, c'est leur deuxième
convention, Clements et Ford (Haragushi 77, Clements & Ford 79). Remarquons que dans le
cas du grec ancien il faut poser que l'association fonctionne de droite à gauche depuis
l'association initiale. Suivant en cela Pulleyblank, je ne pose pas de convention automatique
d'association des tons et des unités porteuses restés libres après l'application de la convention
(24) (Pulleyblank 83, p31). C'est une procédure de défaut qui assigne un ton bas aux unités
porteuses restées libres. D'autres approches stipulent une version plus forte de la procédure
d'association incluant la diffusion automatique. C'est le cas en particulier de Williams 71,
Goldsmith 76, Clements & Ford 79 (à travers des conventions s'ajoutant à celle qui
correspond à (24). Le caractère élémentaire de l'association tonale en grec ancien ne permet
pas une discution approfondie de ces différentes versions de la théorie autosegmentale. Une
approche qui admet la diffusion automatique des tons aux unités porteuses libres doit poser en
grec ancien une mélodie BHB*.

Dans toutes les versions de la théorie autosegmentale il est admis que l'association
respecte une condition de bonne formation selon laquelle les lignes d'association ne peuvent
se croiser (Goldsmith 76).

Par la convention (24), le ton H de la mélodie H B* s'associe à la première syllabe


accessible. C'est le processus autosegmental qui est responsable du décalage de l'accent
(graphique, c'est-à-dire du ton haut) par rapport à la proéminence métriquement définie.
Autrement dit ce processus exprime l'accentuation de "la syllabe précédent l'ensemble final".
Il faut noter que la réalisation de la proéminence par une mélodie complexe ne permet pas de
réintroduire des mécanismes de décompte. Le grec ne possède que deux unités tonales: H et
B. Les seules mélodies bien formées ne contenant qu'une occurrence de H (qui détermine une
seule inflexion tonale) sont: H*, H* B, H B*, B* H, B H* (en négligeant les variantes
contenant un ton bas au delà du ton haut). Toute autre mélodie devrait contenir une séquence
B B, en violation du principe du contour obligatoire ("Obligatory Contour Principle", cf.
Leben 73) qui stipule que deux unités successives dans une concaténation ne peuvent être
identiques23. On ne peut donc décaler arbitrairement l'inflexion tonale de la proéminence
métrique si celle-ci est exprimée par une mélodie tonale. Ce principe assure une réalisation
raisonnablement locale et donc récupérable de la proéminence métrique.

Considérons sur un exemple le fonctionnement des mécanismes décrits en (21) et (22).

(25) 2 x x
1 (x x) (x x x)
0 (x x)(x x) (x x)(x x)(x)
hamarteema hamarteema toon
| | | | | | | | |
(B) H B* (B) (B B B) H B*

hamárteema hamateemátoon
(= hàmárteèmà) (= hàmàrteèmátoòn)

23
La pertinence de ce principe, d'abord formulé par Leben pour les séquences tonales, a été élargie à d'autres
niveaux de concaténation, en particulier dans la discussion du statut des géminées (cf. Mac Carthy 86a, Steriade
et Schein 86, Sauzet 87).

14
4.3 Circonflexe: mots courts et contractions.

Les mots récessifs dont la longueur n'excède pas un pied (monosyllabes et dissyllabes
à finale brève) présentent, après association de la mélodie à la syllabe métriquement
proéminente, un ton H non associé, flottant. J'admets donc qu'un tel ton, à défaut d'une unité
porteuse libre, est associé à une unité porteuse accessible par la règle suivante:

(26) Association du ton haut flottant (b) (cf. (34)).

σ σ
| /|
HT → HT

En l'occurrence, la seule unité accessible, sans croisement des lignes d'association, est
la syllabe métriquement proéminente, déjà associée au ton B de la mélodie tonale. Le résultat
est le suivant:

(27) a b
2 x x
1 (x) (x)
0 (x x) (x x)
doo ron er gon ergon
/| | / | |: | |
HB*(B) HB*(B) → H (B)

doôron érgon
"don-nom.acc.sg." "ouvrage-nom.acc.sg."

En (24)a la double association tonale produit un circonflexe. En (24)b le circonflexe


est simplifié sur une voyelle brève (par (20)).

Les formes contractes verbales24 s'expliquent comme un exemple de stabilité tonale


(Goldsmith 76). La modification du compte syllabique n'affecte pas l'association tonale. La
contraction a pour résultat une syllabe à voyelle longue doublement associée.

(28) a
2 x
1 (x x)
0 (x x)(x)
tima oo → ti moo
| | | /|
H B* (B)HB*

timoô "honorer-1sg.prés.ind."

24
L'accentuation de la plupart des formes nominales historiquement contractées ne peut s'expliquer par une
assignation métrico-tonale à la forme non contracte. Il faut supposer que les contractions donnent naissance à un
paradigme désinentiel synchroniquement inanalysable, ou du moins dont l'analyse ne permet pas de récupérer une
syllabation sous-jacente où la structure métrique est construite (voir les flexions de eúnous "favorable" et aploûs
"simple").

15
b
2 x
1 (x x)
0 (x x)(x x)
tima o men → ti moomen
| | | /| |
H B* (B)HB* (B)

timoômen "honorer-1pl.prés.ind."

c
2 x
1 (x x x)
0 (x)(x x)(x x)
ti ma o metha → ti moo me tha
| | | | | |
H B* (B) H B*(B)

timoómetha "honorer-1pl.prés.ind.moy."

Le circonflexe apparaît si les deux tons de la mélodie sont associés aux voyelles qui
subissent la contraction. Le ton par défaut n'apparaît qu'une fois les contractions effectuées et
ne peut occasionner l'apparition d'intonations complexes.

4.4 Mots préfixés et composés.

On a vu que l'hypothèse du décalage du ton haut par rapport à la proéminence métrique


(assuré par la mélodie HB*) permet une fixation très simple des paramètres métriques. En fait
cette fixation est prédictible étant donné le cadre théorique et une caractérisation élémentaire
de la place de l'accent en grec ancien: assignation à une distance limitée de la fin de mot et
sensibilité au poids de la dernière syllabe. Il existe une contrainte spécifique pesant sur
l'accent des composés et mots préfixés qui s'intègre naturellement à la présente approche, mais
non à une approche où le ton haut coïncide toujours avec la syllabe proéminente. Voici cette
contrainte:

(29) Accent dans les composés.

L'accent ne remonte pas au delà de la dernière syllabe d'un élément


préradical.(Wheeler 1885, Vendryes 04, p130, Bally 45, p27)

Cette contrainte est repérable tant dans les formes verbales (dans lesquelles l'augment
doit être considéré comme un préfixe) que nominales: ep-é-skhon "retenir-aor.1sg."", apó-
skhes "écarter-imp.aor.2.sg.", daí-phron "courageux-voc.sg.(NB: dai- dissyllabique)", aelló-
pos "aux pieds rapides comme la tempête-nom.sg.".

Posons que la structure métrique est assignée cycliquement. L'adjonction d'un préfixe
définit un nouveau cycle.25 Un domaine cyclique contient au moins un pied. La dérivation est
donc la suivante:
25
Les suffixes ne semblent pas définir des domaines cycliques en grec ancien. On verra ci-dessous qu'il faut
reconnaître cette propriété aux enclitiques. A la différence des préfixes, la cyclicité des enclitiques ne se reflète
pas dans la seule structure métrique mais aussi dans l'introduction d'une seconde mélodie tonale. Cette différence

16
(30) a C1 -----
C2 ----------
C3 ----------------
2 x
1 (x x x)
0 (x) (x) (x)
ep - e - skhon
| | |
(B) H B*
epéskhon

b C1 -------
C2 -------------
2 x
1 (x x)
0 (x x) (x)
apo - skhes
| | |
(B)H B*
apóskhes

Dans l'approche de Steriade on pourrait, en admettant aussi l'application cyclique,


considérer que la syllabe unique de la racine ne saurait être extramétrique, selon le principe
général qui interdit qu'une forme soit totalement extramétrique: ainsi en latin les monosyllabes
ne sont pas systématiquement atones (cf. Halle & Vergnaud 87b). Mais cette syllabe devrait
du coup former un pied et donc recevoir l'accent. Il faudrait donc renoncer à la cyclicité et
spécifier qu'une syllabe radicale est exempte d'extramétricité. Cela revient à poser qu'une
syllabe radicale se comporte toujours comme une longue. Mais cela ne peut être exprimé par
une accentuation exceptionnelle puisque, on l'a vu, les morphèmes accentués doivent, pour
Steriade, non seulement ne pas être sujets à l'extramétricité, mais encore être tête d'un pied.

4.5 Enclise

Les mots évoqués jusqu'ici forment à eux seuls un domaine accentuel. Ils constituent
la classe des mots orthotoniques. Une autre classe (formée d'un nombre limité d'items) est
celle des enclitiques. Ces mots ne peuvent apparaître qu'à droite d'un mot orthotonique26 avec
lequel ils forment un seul domaine accentuel. L'approche proposée rend compte façon directe
et satisfaisante d'une bonne partie des faits accentuels liés à l'enclise. Je les rappelle
rapidement.

suit de ce que le pied construit sur un enclitique est à droite et donc dominant dans le constituant métrique qui
réunit les pieds, tandis que les pieds construits sur des préfixes sont à gauche et donc ne sont pas tête.
L'introduction de la mélodie est subordonnée à la définition d'une tête au niveau du mot (niveau 2).
26
Parfois d'un proclitique, qui reçoit un accent d'enclise comme un mot orthotonique, cf. Vendryes 04, p90.

17
(31) Accent d'enclise.

a Un enclitique déclenche l'apparition d'un aigu sur la syllabe finale d'un mot portant
l'aigu antépénultième ou le circonflexe pénultième (ces accents sont par ailleurs conservés).

b Dans les autres cas l'enclitique ne modifie pas l'accentuation du mot orthotonique
précédent (sauf prévention de la conversion de l'aigu final en grave, cf. ci-dessous 5.2).

c Si un enclitique dissyllabique s'ajoute à un mot orthotonique portant un aigu


pénultième, l'enclitique reçoit un accent sur sa dernière syllabe (aigu si elle est brève,
circonflexe si elle est longue).

Je n'aborde pas la question de l'apparition d'un accent sur l'enclitique. Les données
mêmes ne sont pas sûres, cf. Laum 28, p140, Bally 45, p113. Je ne considère donc que les
faits consignés sous (28)a et b. Il suffit pour en rendre compte de poser que l'enclitique forme
systématiquement un pied27 (ce qui est obtenu moyennant une application cyclique des règles
d'assignement de la structure métrique, comme pour les préfixes) et que lui est associée la
même mélodie tonale qu'aux mots orthotoniques. La différence entre un enclitique et un mot
orthotonique récessif réside dans le fait que l'enclitique peut associer un ton de sa mélodie à
une syllabe d'un mot précédent28. Voici les diverses situations rencontrées:

(32) a
2 x
1 (x x) (x)
0 (x) (x x) (x)
anthroopos tis
| | | |
H B* H B*
ánthoopós tis "un homme(indéfini)-nom.sg."

b
2 x
1 (x) (x)
0 (x x) (x)
dooron ti
/| | |
HB* H B*
doôrón ti "un présent"

c
2 x
1 (x) (x)
0 (x x) (x)
ergon ti → ergon ti → ergon ti
| | | | | | | |
H H B* H B* H (B) B*
érgon ti "un ouvrage"

27
La seule forme enclitique qui excède la longueur d'un pied métrique, cf. (21), est tinoon, génitif pluriel du
pronom indéfini. Je n'ai pas d'autre explication à proposer de cette forme que l'assignation d'une structure
métrique exceptionnelle.
28
Remarquons que certains enclitiques peuvent apparaître, avec une valeur différente, comme des orthotoniques.
Ainsi esti "être-3sg.prés.ind." enclitique avec valeur de copule et orthotonique avec valeur existentielle, tis
enclitique comme pronom indéfini, orthotonique comme interrogatif. La variante orthotonique est récessive. Elle
ne diffère donc de la forme enclitique que parce qu'elle forme un domaine métrique et tonal indépendant.

18
d
2 x
1 (x)
0 (x)
agathos tis
| | | |
(BB) H H B*
agathós tis "quelqu'un de bon"

e
2 x
1 (x) (x)
0 (x) (x)
puur ti
/| |
HB* H B*
puûr ti "un feu"

f
2 x
1 (x)(x) (x)
0 (x)(x) (x)
ergoon ge
| | |
H B* H B*
érgoon ge "des oeuvres (gén.) assurément"

Seule l'association tonale relie le clitique au mot précédent. La structure métrique du


clitique pourrait tout aussi bien être garantie en le considérant comme un mot indépendant que
comme un domaine cyclique. Toutefois l'association tonale en grec ne pouvant se faire par
ailleurs que dans un sous-domaine du mot phonologique (à l'exclusion des proclitiques), il
semble légitime de considérer que le mot orthotonique et le clitique ne forment qu'un seul
domaine métrique (comme il apparaît dans les représentations en (32) ci-dessus).
L'introduction par le clitique d'une nouvelle mélodie HB* découle du fait que l'adjonction du
clitique détermine une nouvelle proéminence dans le mot phonologique, ce que ne peuvent
faire les préfixes. Une mélodie est introduite cycliquement chaque fois qu'une nouvelle
proéminence globale est définie (sans effacement de celles qui ont été précédemment
associées).

Dans l'approche avancée ici, les faits grecs sont donc compatibles avec l'hypothèse de
la préservation de la structure métrique défendue par Steriade (Steriade 88). Cette préservation
s'accompagne d'un assignement cyclique de la structure métrique. La conservation de la
structure métrique ne peut toutefois être directement imputée à la condition de cyclicité stricte,
puisque celle-ci permet dans un environnement dérivé la modification des structures
métriques (cf. Kiparsky 82). Cela signifie, dans les termes de Halle & Vergnaud 87a et b, que
la structure métrique assignée sur un cycle précédent doit être copiée lors de l'adjonction d'un
clitique ou d'un préfixe. Notons qu'il faut, en grec ancien, que cette copie ne concerne pas les
seules proéminences, mais aussi les constituants (un pied n'est pas formé avec la syllabe finale
d'ánthroopos et celle de tis en (32)a)29.

29
Pour la variabilité de la conservation de la structure métrique en cas de cliticisation, cf. Sauzet 86, où sont
opposés des parlers occitans supposant une conservation intégrale et d'autres admettant une restucturation limitée
aux éléments non têtes.

19
Les formes en (29)a et b n'appellent pas de remarques particulières. En (29)c on attend
deux syllabes successives affectées du ton haut. En fait seul le ton haut de la mélodie du mot
orthotonique semble réalisé30. Il faut donc poser une règle effaçant le second de deux tons
hauts adjacents:

(33) Effacement de ton haut.

σ σ → σσ
| | |
HH H

Cette règle s'applique après la réduction de l'intonation complexe des syllabes à noyau
bref, sans quoi le ton bas interposé la bloquerait (comme en (29)b). La règle générale de
défaut assigne finalement un ton bas à la syllabe d'où le ton haut a été désassocié. La même
règle (30) élimine le second ton haut en (29)d, interdisant son association à l'une ou l'autre des
syllabes accessibles. Pour cette forme, non récessive, la structure métrique n'a pas été
indiquée. Elle sera discutée plus bas. A ce point, il suffit de poser qu'à l'issue du premier
cycle, la syllabe finale est associée à un ton haut.

Pour rendre compte de (29)e et f, on est conduit à admettre que le ton haut de la
mélodie du clitique est associé à gauche, même si la syllabe accessible est déjà associée à des
tons. Il doit donc y avoir deux principes d'association du ton haut flottant (26) ne s'applique
que si (34) ne peut s'appliquer.

(34) Association du ton haut flottant (a).

σ σ
| |\
TH → TH

Il en résulte que cette syllabe est, soit associée à trois tons (HBH), soit pourvue d'une
mélodie montante (BH). La complexité tonale est strictement limitée en grec ancien. Elle ne
peut être que HB sur une syllabe longue. Une règle qui élimine BH sur une seule syllabe
ramène (32)e et f au format acceptable:

(35) Elimination du ton complexe BH.


σ σ
/| |
BH → B

Pour résumer, l'approche métrico-autosegmentale proposée rend compte de


l'accentuation des mots récessifs, qu'ils soient longs, courts ou contractes. Elle traite aussi les
30
Laum relève, même en dehors des formes du type phúllá te ("et les feuilles") qui prolongent un état de langue
homérique dans lequel une séquence voyelle suivie de sonante peut porter une intonation complexe, des cas
d'accentuation de paroxytons (comme storésaí te ("et étendre") (cf. aussi Bally 45, p113). Une scholie attribue à
Aristarque le refus d'accentuer ándrá moi pour éviter une cacophonie dans le premier vers de l'Odyssée (mais on
trouve ailleurs ándrá te (Odyssée 12.81) (Laum 28, p299). Cela suggère que ces formes n'étaient plus distinctes
des autres paroxytons. La cacophonie évoquée semble compatible avec l'idée que l'accent d'enclise est interdit
dans ce cas par une contrainte superficielle et qu'il était peut être possible dans des styles autres que la récitation
poétique. D'où sa notation malgré tout dans les cas où une désambiguïsation est nécessaire.

20
contraintes liées à la préfixation et une partie des faits accentuels liés à l'enclise. Les points
qui restent à élucider sont les suivants:

- la règle de la pénultième longue intonée (cf(3)c),

- l'accentuation des formes non-récessives,

- l'opposition aigu/circonflexe à la finale,

C'est à ces points que sera consacrée la fin de cette étude. Il ne peuvent semble-t-il être
traités qu'au prix d'un approfondissement et d'une reformulation de l'approche qui a été suivie
jusqu'ici.

5 Résistances.

5.1 Loi de la pénultième longue intonée.

L'intonation de la pénultième dans les mots récessifs est entièrement prédite par
l'approche adoptée, qu'il s'agisse de mots courts, (24)a, ou de mots contractes, (25)b et c. Pour
ces mots il n'est donc nécessaire de poser aucun mécanisme spécifique réglant l'intonation de
la pénultième et la question devrait dans ces conditions être abordée uniquement en relation
avec l'analyse des mots dont l'accentuation n'est pas récessive. Cela n'est toutefois vrai que si
l'on accepte la définition traditionnelle de la syllabe lourde finale. Je rappelle que selon cette
définition est lourde toute syllabe contenant une voyelle longue ou une diphtongue. Or
Steriade a montré que cette définition devait être revue (Steriade 79, 88). La raison en est que
l'accent ne remonte pas au delà de la pénultième dans les mots terminés par ks ou ps (les seuls
groupes de consonnes autorisés par le grec ancien à la finale) ou par un groupe nt31 sous-
jacent, réduit phonétiquement à n par la règle, générale en grec ancien, d'effacement des
occlusives finales32. C'est le cas, même si le mot appartient à une classe globalement récessive.
Ainsi oikophúlaks "gardien de la maison-nom.sg." appartient à la classe récessive des
composés de dépendance33 (Vendryes 04, p191). Il faut donc remplacer la clause (21)c par les
clauses suivantes:

(36) Extramétricité et syllabes lourdes (remplace (21)c)

a une consonne finale est extramétrique,

b une syllabe à rime complexe est accentuée.

31
Il s'agit bien, et Steriade le relève, des groupes nt synchroniquement attestés par une alternance (du type
ethélon / ethélontos "vouloir-part.prés.nom.-acc./gén.neut.") et non de tous les groupes nt historiques (cf.
ethéleesan "id.-aor.3pl." issu historiquement de etheleesant).
32
On ne peut comme le suggère Steriade inclure dans cette catégorie les mots terminés par un groupe ds sous-
jacent (particulièrement les mots en ids). Il existe en effet des proparoxytons de ce type, artópoolis "boulangère"
et tous les mots en -poolis, áleksis, nom propre, dont les autres formes casuelles (artopoólida "id.-acc.sg.")
montrent bien que le radical est en -id-. Il faut donc supposer que la réduction du groupe ds précède l'assignement
de la structure métrique. La précocité de cette réduction d'un groupe d'obstruantes coronales peut se justifier si
elle est dérivable du principe du contour obligatoire.
33
On peut plus généralement poser avec Bally que tous les composés sont récessifs, à condition d'interpréter des
formes comme psuukhopompós "qui escorte les âmes-nom. masc.sg." comme des suffixaux à radical complexe
(Bally 45, p46-48).

21
Par rime complexe il faut entendre: dont la rime se compose d'une voyelle longue,
d'une diphtongue, d'une voyelle et d'une consonne (la rime simple ne comptant qu'une voyelle
brève).

Toutefois les syllabes fermées à voyelle brève (suivies d'une consonne extramétrique),
si elles interdisent bien l'accentuation de l'antépénultième, sont traitées comme des syllabes
brèves au regard de la "loi de la pénultième longue intonée". C'est-à-dire que si la syllabe qui
les précède est longue et accentuée, elle porte un circonflexe. Ainsi on accentue: polupiîdaks
"aux nombreuses sources-nom.masc.fém.sg.", paideûon(t) "éduquer-part.prés.neut.nom.acc.".
Rappelons d'abord la structure métrique et l'assignement tonal que reçoivent ces formes.

(37)
2 x
1 (x x x)
0 (x x)(x)(x)
polu piidak(s)
| | | |
(BB)H B*
*polupiídaks

L'ambiguïté de ces formes dont la finale est lourde pour l'assignement de l'accent, mais
légère pour la loi de la pénultième intonée, suggère qu'elles sont l'objet d'un réajustement
métrique et tonal que je formule de la manière suivante (d'autres formulations seraient
possibles que je n'entreprends pas de discuter):

(38) Réajustement métrico-tonal.

a Désaccentuer une syllabe fermée a voyelle brève,

b réassigner la structure métrique,

c réassocier le ton de la mélodie spécifié pour s'associer à l'élément proéminent (B*).

Le caractère de réajustement tient à ce que le ton haut conserve son association


initiale. Par (34), la forme représentée en (33) devient donc:

(39)
2 x
1 (x x)
0 (x x) (x x)
polu piidak(s)
| | /|
(BB) HB*

polupiîdaks

Les formes en ks, manifestent une autre particularité: celle de ne pas recevoir d'accent
d'enclise sur leur finale (Vendryes 04, p85). Steriade y voit l'indice que ces finales ne sont pas

22
extramétriques34 et donc ne peuvent devenir tête d'un pied quand l'adjonction du clitique
détermine un nouvel assignement de structure métrique (Steriade 88). L'extramétricité devant
être marginale, l'adjonction du clitique fait perdre à une syllabe finale légère de mot
orthotonique ce statut. Elle devient tête du nouveau pied final construit. L'hypoythèse de la
conservation de la structure interdit que soient traitées de même les autres syllabes finales.
Toutefois on s'explique mal pourquoi les formes en nt ne manifestent pas la même singularité
que celles en ks. Bally attribue l'absence d'accent d'enclise sur ces dernières au caractère
ultrabref supposé de leur voyelle (Bally 45, p26, p111). Je me rallie à cette analyse, qui peut
se reformuler en termes de dévoisement vocalique, interdisant la réalisation du ton haut. Ainsi
en japonais, dans le dialecte de Tokyo, le dévoisement des voyelles hautes dans un contexte
semblable interdit la réalisation d'un ton (Haragushi 77).

5.2 Formes non récessives.

Etant donné le mécanisme d'assignement de l'accent qui a été mis en place et le fait
que l'accent récessif détermine le champ où peut apparaître l'accent dans les formes non
récessives (loi de limitation, (2)), deux types d'écarts sont a priori pensables: écart tonal, écart
métrique (les deux écarts se combinant éventuellement).

La construction des pieds métriques est sensible au caractère "accentué" de certaines


syllabes. Ce trait leur est, dans les mots récessifs, attribué sur la base de propriétés
phonologiques. On peut supposer que l'écart métrique de certains mots par rapport à
l'accentuation récessive consiste en ce qu'ils comportent une syllabe morphologiquement ou
lexicalement "accentuée", bien que légère. Cette propriété ne peut avoir de pertinence qu'à la
finale et ne peut produire que des formes à accent pénultième. Si cette pénultième est longue,
les effets du réajustement métrico-tonal (34) s'y feront sentir. On peut dériver dans ces
conditions, en posant une accentuation abstraite de la finale, des formes comme poikílos35 ou
poliîtai36 "citoyen-nom.pl."

Il est au contraire impossible faire dériver d'une particularité métrique les formes à
accent final. La situation du grec ancien contraste de ce point de vue avec celle du serbo-
croate dont l'accentuation peut par ailleurs se décrire en termes similaires.

34
Ces syllabes doivent toutefois être déclarées extramétriques secondairement pour rendre compte du circonflexe
de la syllabe précédente. Pour Steriade, en effet, le circonflexe correspond à l'accentuation non marquée d'une
syllabe tonique. Elle est altérée au profit de l'aigu, soit morphologiquement, soit devant une syllabe non
extramétrique. Steriade justifie le caractère premier du circonflexe dans le cadre d'une analyse attribuant la
proéminence aux mores (cf.4.1). Elle pose que la proéminence de la première more est peut-être universellement
non marquée. De fait la proéminence syllabique coïncide très généralement avec le segment initial de la rime.
Mais cette proéminence intrasyllabique a pour corrélat normal la syllabicité. C'est à ce titre qu'elle a des chances
d'être universelle. Le passage supposé du circonflexe à l'aigu ne s'accompagne évidemment pas en grec ancien de
modifications de syllabicité, de déplacement du sommet de syllabe dans les diphtongues par exemple.
35
Cette forme, comme la plupart des formes à finale brève et accent pénultième, est issue de la loi de Wheeeler
(Wheeler 1885, Vendryes 04, p148). La loi de Wheeler est une loi historique qui mue en accent pénultième
l'accent final des mots terminés par une séquence: syllabe longue suivie de deux brèves ("dactylique"). Cette loi
n'est pas transposable en règle synchronique de l'état de langue dont les grammairiens alexandrins nous donnent
la description. Toutefois sa genèse pourrait être éclairée par l'hypothèse avancée ici d'une proéminence exprimée
par une mélodie HB*.
36
Le nominatif singulier, poliítees, et la plupart des formes casuelles peuvent s'interpréter comme récessives. Le
vocatif poliîta ou le nominatif pluriel (où la diphtongue ai est légère) invitent à poser une accentuation
morphologique du suffixe. Il en est de même pour les nombreux féminins, "mésotoniques" dans la terminologie
de Bally, en ee qui ont l'accent pénultième, y compris aux cas où leur finale est brève (Vendryes 04, p206, Bally
45, p50ssq).

23
Le serbo-croate oppose deux accents: montant et descendant (pouvant l'un et l'autre se
réaliser sur des syllabes brèves ou longues). La caractéristique fondamentale de la distribution
de ces accents est que l'accent montant ne peut apparaître sur une syllabe finale et se trouve
toujours suivi d'un accent descendant. (La notation traditionnelle est: à, á: ton montant, ä, â:
ton descendant, sur brève et longue respectivement. Seul le ton montant est noté quand les
deux sont réalisés.) Browne et McCawley proposent une description de ce système où il suffit
de déterminer une syllabe proéminente dans le mot (Browne & McCawley 65). Cette syllabe
est réalisée descendante et la syllabe précédente montante. La proéminence métrique peut
apparaître partout dans le mot en serbo-croate. Elle est conditionnée par l'attribution
morphologique et lexicale d'un trait + accentué à certaines syllabes et la construction de pieds
non bornés dominant à gauche. En l'absence d'élément "accentué", l'accent frappe l'initiale du
mot phonologique (qui forme alors un seul pied: le mécanisme de formation de pied produit
automatiquement l'effet de la règle d'accentuation des mots atones de Browne & McCawley).
La règle de réalisation de l'accent de Browne et McCawley peut se reformuler comme
l'association une mélodie MD* à l'élément métriquement proéminent37. Ce qui définit les
représentations suivantes:

(40) a b
2 x x
1 (x) (x)
0 (x x) (x x x)
meda od meda
| |
MD* MD*
mëda "miel-gén.sg." öd meda "du miel"

c d
2 x x
1 (x) (x x)
0 (x x) (x) (x x)
brata od brata
| |
MD* M D*
bräta "frère-gén.sg."òd brata "du frère"

(la racine brat- est marquée [+accentué])

e f g
2 x x x
1 (x x) (x) (x)
0 (x) (x) (x x) (x x x)
ruuka ruuku za ruuku
| | |
M D* MD* MD*

rúka "bras-nom.sg." rûku "acc.sg." zä ruku "pour le bras"

(la désinence -a est marquée +accentué )

Notons que le Serbo-croate n'admet en aucun cas l'association de deux éléments de la


mélodie à une seule syllabe (que le grec admet pour les syllabes à noyau long). La mise en
37
Je ne reformule pas cette mélodie en tons simples puisque les auteurs discutent sa nature exacte. Il suffit à ce
point que la mélodie correspond à une réalisation complexe étalée sur la syllabe proéminente et celle qui la
précède.

24
parallèle des deux systèmes suggère que l'impossibilté d'associer le ton montant à la syllabe
finale en serbo-croate devrait avoir pour pendant l'absence de formes à aigu final en grec
ancien.

Une hypothèse séduisante consisterait à considérer que les mots à accent aigu final
sont en fait atones. Elle pourrait s'appuyer sur le fait que, traditionnellement, on admet qu'un
aigu final se transforme en grave (donc que le ton haut n'y apparaît pas) ailleurs qu'à la pause.
Mais d'une part cette règle de "barytonèse des oxytons" est sujette à caution (cf. Laum 28,
passim et en particulier pVII et p163 où est défendue de manière convaincante la thèse que
seuls les monosyllabes, aigus ou circonflexes, étaient désaccentués en liaison: la règle plus
tardive de barytonèse relèverait d'une confusion de ce principe et d'habitudes graphiques, et
serait elle-même purement graphique; cf. aussi Bally 45, p85). D'autre part, si la syllabe
portant l'aigu cesse d'être finale, du fait de l'adjonction d'un morphème flexionnel, elle reçoit
toujours un accent.

Ne pouvant être dérivées d'une association de la mélodie HB* les formes à aigu final
doivent relever de l'association lexicale d'un ton haut. Cette préassociation prévient
l'introduction de la mélodie HB*, ce qui peut être expliqué en posant que la préassociation de
H implique l'"accentuation" métrique et que le ton distingué de la mélodie ne s'attache qu'à
une syllabe libre. La préassociation d'un ton est la solution que propose Pulleyblank, au lieu de
l'association d'une mélodie accentuée, en tonga (Pulleyblank 83). En grec cette préassociation
devrait coexister avec le mécanisme d'association d'une mélodie. Outre cette difficulté, qui va
être discutée, la préassociation ne rend pas compte directement de ce que la syllabe
préassociée, si elle est longue et devient pénultième, porte un circonflexe (qui suppose une
mélodie): sooteér, sooteêra. Cette difficulté pourrait être traitée par une règle spécifique
d'insertion tonale, que l'existence d'une variation dialectale sur ce point ne rend pas
implausible. Ce point sera abordé ci-dessous, mais dans le cadre d'une reformulation de
l'analyse de l'accent du grec ancien à laquelle conduit la coexistence d'une mélodie tonale et
d'un ton préassocié.

6 Proéminence.

L'existence de formes où H est directement associé à une syllabe a pour conséquence


essentielle de contraindre à analyser la mélodie HB*. Ses deux unités peuvent se caractériser
respectivement comme [+ton haut] et [-ton haut]. Si [+ton haut] peut apparaître isolément,
rien n'interdit qu'il en soit de même pour la valeur opposée. Ce trait binaire peut engendrer un
contraste ternaire entre syllabes non préassociées et préassociées à H et B respectivement.
L'existence de syllabes préassociées à H rend donc particulièrement sensible la potentialité
d'un usage spécieux de la sous-spécification, implicite dès lors qu'est posée une mélodie HB*
(sur cette question, cf. Chomsky & Halle 68 et, dans un cadre autosegmental, Pulleyblank 83,
p160, dont je reprends cette critique du recours à une mélodie tonale).

Pour n'avoir pas à spécifier un ton bas, identique au ton par défaut, dans la mélodie
tonale (et éviter aussi l'introduction par règle d'un objet complexe, cf. Pulleyblank 83, p181),
il faut introduire le seul ton haut. Ainsi, tant le processus d'association tonale que la
préassociation lexicale n'opèrent qu'avec la valeur marquée du trait tonal. Cela peut se
formuler, pour les mots récessifs longs, par une règle assignant un ton haut à la syllabe
précédant le pied final:

25
(41) Association du ton haut.

x
x
x
σ → σ / ___ σ
|
H

Cette règle doit être bloquée, si l'élément proéminent est déjà associé à H. Elle ne peut
s'appliquer si le mot ne compte qu'un pied, et doit être complétée d'une règle qui associe H,
dans ce cas, à l'élément proéminent. En posant de telles règles d'insertion tonale, le lien
intrinsèque de H à la proéminence n'est plus exprimé (le rôle de H résulte d'une conspiration
de règles tendant à associer H à l'élément proéminent où dans son voisinage).

On peut résumer la situation comme suit:

(42) Lieu de réalisation du ton haut en grec ancien.

Le ton haut porte:


a) soit sur la syllabe précédent le pied final (accent récessif des mots longs),
b) soit de manière conditionnée sur la partie initiale de la syllabe proéminente du pied
final (contractions, mots courts, pénultième préassociée, mots sujets à la restucturation
métrico-tonale),
c) soit sur une syllabe finale (ton haut préassocié)38.

La question est de déterminer comment cette distribution peut s'articuler à la fonction


culminative du ton haut.

La structure métrique est une structure de constituants hiérarchisés. Dans chaque


constituant un élément est distingué comme tête, ce qui correspond à la fois à une
proéminence locale et à une mise en relation avec le niveau supérieur. Un constituant peut être
équivalemment considéré comme formé de la réunion de constituants de niveau inférieur ou
des têtes de ces constituants. Si un constituant est tête dans un constituant supérieur, il en
résulte une proéminence de sa propre tête. Dans la présente analyse, la tête du mot
phonologique est le pied le plus à droite. Il en résulte la proéminence métrique de la syllabe
tête de ce pied. La définition du mot phonologique comme domaine accentuel implique que
l'on peut, dans le mot, définir un élément absolument prépondérant (ce qui est assuré par le
caractère non borné de la structure métrique définie au niveau le plus élevé (ici 2). Définir le
mot phonologique comme domaine accentuel c'est donc, en termes métriques, définir,
directement ou indirectement, un élément (disons une syllabe pour ne pas remonter en deçà)
comme sa tête.

La coextensivité des notions de tête et de constituant est familière en syntaxe où elle


s'exprime dans les termes de la théorie X', introduite dans Chomsky 70. Les constituants sont
38
C'est à peu de chose près la généralisation exprimée par Jakobson. Il distingue deux types d'accent (il considère
les mots à accent final comme atones) en grec ancien: "type un: l'accent frappe la première ou unique more de la
syllabe qui contient la more préfinale du mot, (...) type deux: l'accent frappe la seconde ou unique more de la
syllabe précédente" (Jakobson 37, p265). Je considère que le ton haut affecte la syllabe précédente (et non sa
seconde more).

26
considérés comme des projections de catégories élémentaires qui en sont la tête39. On peut de
même considérer que les structures métriques forment des niveaux de projection du même
type. Dans une langue où l'accentuation reflète directement la proéminence métrique (comme
le latin), il est facile d'admettre que le pied et le mot phonologique sont des projections
successives d'une syllabe ou d'une rime (et si celle-ci est conçue comme projection d'une
voyelle le mot phonologique est ultimement projection d'une voyelle). Assigner une structure
métrique à un mot phonologique c'est définir quel est l'élément appartenant au matériau
phonique lexical des morphèmes qui le composent dont ce mot est la projection. Je
n'entreprendrai pas ici de reformuler la théorie métrique pour y intégrer directement ce
rapprochement avec la théorie X' de la constituance. Simplement cette mise en perspective
permet, en s'accommodant du formalisme métrique en vigueur, de poser la question suivante à
propos du système métrico-tonal de l'accentuation du grec ancien: de quoi le mot
phonologique est-il la projection en grec ancien?

Une structure métrique a été définie pour le grec ancien qui détermine la proéminence
d'une syllabe et se traduit par l'apparition d'un ton haut, conditionnée (mais non de façon
triviale) par cette proéminence. En un sens, un mot phonologique se définit par cette
association (au sens large) d'un ton haut et d'une syllabe proéminente. Admettons qu'elle
puisse s'exprimer directement en termes métriques. Spécifiquement, posons que la relation de
H et de la syllabe proéminente soit celle de deux têtes, la dernière d'un constituant
complément de la première. Autrement dit H est la tête du mot phonologique et gouverne un
pied métrique.

Conservant la définition (21) du pied métrique en grec ancien, je propose les


stipulations suivantes.

(43) Statut du mot phonologique en grec ancien.

a Le mot phonologique en grec ancien est une projection de H, soit: mot phonologique =
H'' (ou Hmax).

b H peut gouverner un pied métrique (que je note de l'abréviation σ), soit: H'=Hσ.

Supposons qu'il existe deux modes fondamentaux selon lesquels H gouverne un pied
final: H est contigu (à gauche ou à droite, selon la direction du gouvernement) et extérieur à ce
pied, H est réalisé sur la séquence proéminente du pied final. Si une langue sélectionne
systématiquement la deuxième option, la localisation de H (ou de tout autre élément réalisant
la proéminence) est directement déterminée par la structure métrique. Pour le grec ancien, je
pose que la première option est l'option non marquée, et que la seconde en dérive sous
certaines conditions.

L'approche autosegmentale d'un système tonal repose sur l'idée fondamentale qu'un ton
ne se confond pas avec la position qu'il occupe, ou la séquence segmentale où il se réalise.
Dans l'approche esquissée ici, le fait que la présence d'un ton haut détermine un mot
phonologique est représenté directement dans un format projectif. Toutefois le rapport du ton
haut à la structure métrique segmentale ne règle pas la question de sa localisation. La chaîne
segmentale est exhaustivement organisée en constituants (pieds) et un ton ne peut se réaliser
39
Une catégorie élémentaire (nom ou verbe par exemple en syntaxe) définit deux projections successives: X',
c'est-à-dire X suivi de son/ses complément(s), X'' (ou Xmax), c'est-à-dire X' précédé d'un spécificateur. Le format
général d'une catégorie syntaxique est donc: (X''spécificateur(X'X complément)). X'' peut recevoir des
adjonctions. Ici je ne ferai intervenir qu'un niveau de projection que l'on peut considérer comme X', puisqu'il
contient une tête et un élément qu'elle gouverne, mais aussi comme X'' (Xmax) puisqu'il reçoit des adjonctions.

27
que sur une position segmentale. Revenant à la classification (42), elle peut s'interpréter
comme la mise en oeuvre des deux modes de réalisation de H proposés ci-dessus. Soit H se
réalise dans la position proéminente du pied final, (42)b. Soit H est associé
autosegmentalement à une syllabe précédant ce pied, (42)a: cette situation s'interprète comme
une configuration où H est extérieur au pied final et le gouverne. Soit H est absolument final,
(42)c: cette situation s'interprète comme un cas où H est tête du mot phonologique sans
gouverner.

Laissant de côté pour l'instant les cas où H s'identifie à la proéminence interne du pied
final, un mot phonologique en grec présente deux formats fondamentaux:

(44) Mots phonologiques en grec ancien.

a (H''σ*(H''(H'Hσ)))40

b (H''σ*(H''(H'H)))

En (44)a le dernier pied est gouverné par H, les précédents sont adjoints à sa projection
maximale. En (44)b tous les pieds sont adjoints à H''. (44)a correspond aux mots récessifs et
résulte de l'insertion automatique de H dans une séquence identifiée comme un mot
phonologique à laquelle une structure métrique a été assignée. (44)b correspond aux mots où
H est préassocié à la syllabe finale. La préassociation détermine la réalisation de H sur cette
syllabe et s'interprète comme une configuration où H ne gouverne pas (ce que la position
absolument finale rend possible). Soit:

(45) a (H''(σono)(H''/H'H(σmata))) (= (ono)(mata)


|
H

b (H''(σa)(σgathos)(H''/H'H)) (= (a)(gathos)
|
H

En (45)b la préassociation de H détermine le format métrique du mot. En (45)a


l'association de H résulte de l'assignement de la structure métrique.

Dans les mots récessifs courts, il n'y a pas de position extérieure au pied métrique final
où réaliser H. Dans ce cas, H se confond avec la tête du pied qu'il gouverne et, si cette tête est
une syllabe lourde, avec la tête de la rime (première voyelle d'une diphtongue ou élément
initial d'une voyelle longue). En d'autres termes les relations de gouvernement interne et
externe au pied se confondent si H ne peut être réalisé sur un site segmental distinct. Cette
confusion peut être décrite sous le format général du mouvement de tête à tête de la théorie
syntaxique41 (Chomsky 86): la tête du pied métrique gouvernée est "déplacée" vers la position

40
La proéminence du pied final résulte de son gouvernement par H et donc de la direction du gouvernement par
H, sans qu'il soit nécessaire de poser de constituants au dessus du pied.
41
Dans les langues où la proéminence tonale coïncide toujours avec la proéminence métrique segmentalement
définie, ce mouvement peut être considéré comme obligatoire en toute circonstance. La définition mot
phonologique = H'' (ou aussi bien projection maximale de tout autre élément culminatif) peut du coup recevoir
une portée beaucoup plus générale.

28
de H, tête immédiatement supérieure, si celle ci n'est pas associée à un site segmental42. Je
représente par une coïndexation l'association de la tête du pied métrique final et de H qui
s'opère dans ce cas:

(46) H (σdoo.ron) → Hi (σdoioron) (doôron)

Les deux modes de réalisation de H gouvernant un pied métrique correspondent donc à


l'application et à la non application du mouvement de la tête de ce pied vers la tête du mot
phonologique (qui contient H). C'est le caractère conditionné de ce mouvement qui caractérise
l'accentuation du grec ancien. La contraction produit aussi des accentuations circonflexes,
c'est à dire où le ton haut coïncide avec le segment proéminent du pied final. Les formes
verbales personnelles contractes reposent sur une accentuation récessive au stade non
contracte. La contraction (dans le cas qui nous intéresse) induit la confusion de la syllabe où H
est associé et de la tête du pied final. Il faut donc admettre la stabilité de l'association de H. H
doit gouverner un pied à la tête duquel il est associé. Le détail de la formulation dépend de la
manière dont s'exprime la règle de contraction, mais on peut admettre que H ne gouverne un
pied à la tête duquel il est associé que s'il est déplacé avec cette tête dans une position où il
gouverne le pied final. D'où la même configuration coïndicée qu'en (46):

(47) (σti.ma)H(σo.men) → (σti)Hi(σmoiomen) timoômen

Considérons maintenant le cas où H est associé à une syllabe non finale. H doit
gouverner. Notons d'abord que si H est placé sur une syllabe plus à gauche que celle qui
précède le pied final, une autre occurrence de H devra être introduite pour gouverner ce pied.
H préassocié ne sera pas réalisé (si l'on pose que H n'est réalisé que comme tête de mot
phonologique). D'où la loi de limitation. Si H préassocié précède le pied final, il le gouverne
et le mot est indistinguable d'un mot récessif. Si H est associé lexicalement à la pénultième
(devant une syllabe légère), deux stratégies sont imaginables: soit la présence de H induit
l'interprétation de la syllabe finale comme un pied, soit le pied est régulièrement construit et H
est associé à la tête de ce pied. On obtient donc:

(48) a soo tee.ra → (σsoo)(σtee)H(σra) sooteéra


|
H

42
Très généralement on peut attribuer à la concaténation qui définit lexicalement des relations de localité le
caractère très contraint des phénomènes de mouvement en phonologie. Ici le caractère non intrinsèquement local
de H rend ce mouvement possible (et, dans les langues où H coïncide toujours avec la proéminence, obligatoire).

29
b soo tee.ra → (σsoo)Hi(Σteie ra) sooteêra
|
H

La forme (48)b est celle de l'attique et du grec commun. C'est donc la deuxième
stratégie qui est choisie dans ces dialectes. Il semble que la première s'appliquait en dorien (cf.
Vendryes 04, p260, Bally 45, p13).

L'enclise peut se concevoir comme l'adjonction de H'' à H''. Le ton haut gouvernant
l'enclitique se réalise sur la syllabe finale du mot orthotonique. Il suffit de poser que sa
réalisation est prévenue au cas où il succède immédiatement à un autre ton haut (ou si un ton
haut est déjà réalisé dans la syllabe finale).

Je n'ai pas traité jusqu'ici les alternances aigu/circonflexe à la finale. La difficulté tient
à ce que le circonflexe ne peut y être systématiquement dérivé d'une contraction. Dans la
présente analyse, le circonflexe résulte de la réalisation de H dans le pied qu'il gouverne43. Il
peut être, entre autres, le résultat de la contraction mais se définit indépendamment d'elle. Le
cas le plus remarquable et sans doute le plus problématique d'alternances aigu/circonflexe à la
finale est le contraste des cas directs (aigus) et obliques (circonflexes) des mots accentués sur
la finales des première et seconde déclinaisons. Ainsi: agathón, agathoû44 "bon-acc./gén.sg.",
phugeén, phugeês "fuite-acc./gén.sg.". A défaut d'expliquer le contraste, le cadre proposé
permet de l'exprimer. L'effet des suffixes obliques est de faire gouverner le pied final par le
ton préassocié. La projection directe de H'' par H lexical n'est en effet a priori qu'une option.
Les cas obliques conditionnent morphologiquement le même effet que l'adjonction d'un
suffixe syllabique45. La correspondance notée par Kurilowicz entre formes à finale circonflexe
et formes accentuées "columnalement" sur la pénultième (Kurilowicz 32, p208) repose sur le
gouvernement du pied final, dans un cas comme dans l'autre. Les formes de (49) d'une part et
de (50) de l'autre sont de structures parallèles:

(49) a (el.pis)H elpís "espoir-nom.sg."

b (soo)(teer)H sooteér "sauveur-nom.sg."

c (phu.gee)H phugeé "fuite-nom.sg."


d (a)(ga.thos)H agathós "bon-nom.sg."

43
En ce sens il correspond à la proéminence naturelle dans la rime (et le pied), comme le relève Steriade (cf. note
36). Mais il n'en résulte pas que l'aigu représente un renversement de cette proéminence.
44
L'accent récessif de anthroópoon "homme-gén.pl." interdit d'analyser agathoôn "bon-id." comme issu d'une
contraction de agatho+oon (à la différence des formes féminines substantives au même cas).
45
En fait il est sans doute possible de considérer que tous les morphèmes obliques contiennent un élément
syllabique (au contraire de morphèmes des cas directs portant l'aigu). Le pied final qui les contient peut être
considéré comme dérivé (même s'il ne peut s'analyser comme contracte au même titre que les formes verbales
personnelles). Le gouvernement obligatoire découle de ce caractère dérivé. Dans cette perspective, une voie que
je ne peux explorer ici, consisterait à considérer l'aigu final comme le résultat, non d'une préassociation, mais
d'un processus cyclique affectant une classe de radicaux dont le pied final n'est pas gouverné par H. Le
gouvernement ou le non gouvernement par H du pied final dériverait directement d'une propriété lexicale des
racines.

30
(50) a (el)Hi(pii.dos) elpídos "espoir-gén.sg."

b (soo)Hi(teie.ros) sooteêros "sauveur-gén.sg."

c (phu)Hi(geies) phugeês "fuite-gén.sg."

d (a.ga)Hi(thoiu) agathoû "bon-gén.sg."

Il ne s'agit là que de l'ébauche d'un traitement. Je n'ai d'ailleurs traité qu'une partie des
faits complexes de l'accentuation du grec ancien (j'ai ainsi laissé de côté par exemple les
alternances accentuelles des monosyllabes athématiques, les faits liés à la métathèse de
quantité...). Une analyse complète excède les limites d'un article. Elle devra être abordée, ainsi
que l'analyse d'autres systèmes accentuels, dans le cadre d'un exposé plus systématique du
modèle proposé.

7 Conclusion.

Il est apparu qu'une solution faisant appel conjointement aux théories métrique et
autosegmentale permettait d'éclairer une large part du mécanisme de l'accentuation du grec
ancien. L'esprit de cette solution est de distinguer la proéminence proprement dite
(métriquement définie), de sa réalisation (décrite par l'association d'une mélodie tonale
indépendante de la suite syllabique). L'existence d'une classe de mots à accentuation finale,
qui ne peut découler de l'association mélodique posée pour les mots récessifs, conduit à
s'interroger sur le rôle crucial joué par le ton haut dans l'expression de la proéminence. Au lieu
de considérer que le ton haut précédant le constituant final résulte d'une association
autosegmentale contrainte, mais fondamentalement arbitraire, on pose qu'il est réalisé dans
une position compatible avec son rôle dans la structuration du mot phonologique. L'analyse
proposée est avant tout une tentative pour intégrer les deux approches précédemment
complémentaires. Le rapport du ton à la structure métrique est pensé dans les mêmes termes
que la structure métrique elle-même: en termes de tête, de gouvernement et de constituants.
L'effet autosegmental, conséquence du caractère non intrinsèquement local de l'élément tonal,
n'est pas éliminé, mais contraint par la mise en relation de cet élément avec les structures
métriques segmentalement définies (et par l'éventuelle association lexicale du ton H). Cette
réflexion sur l'accent grec n'est qu'une contribution très ponctuelle au débat occasionné par
l'hétérogénéïté et parfois la concurrence des modèles autosegmentaux et métriques. Trois
voies se dégagent pour la réduire:
- délimiter strictement le domaine de pertinence de chaque théorie (essentielle dans
cette perspective, en tant que support de toute proposition spécifique, est la définition, posée
d'abord par McCarthy dans son analyse de la morphologie des langues sémitiques (McCarthy
82), d'une ossature, généralement définie comme une suite de spécifications pour les traits de
classe majeure, notées C(onsonne) V(oyelle), qui est le lieu d'intersection des plans
autosegmentaux et le support de la structure métrique; c'est l'architecture de ce que l'on peut
qualifier de modèle standard de la phonologie plurilinéaire, cf: par exemple Halle et Vergnaud
80, Clements 85, Hayes 86),

- réduire la structure métrique à un composant autosegmental (c'est la tentative des


modèles "à grille seule" qui définissent un mécanisme d'accentuation faisant l'économie de
toute structure de constituants au delà de la syllabe, cf. Prince 83, Laks 88),

- exprimer l'ensemble des phénomènes phoniques à travers la structuration des


séquences en constituants et la définition d'opérations sur ces constituants.

31
Cette dernière voie, malgré les difficultés évidentes qu'elle recèle, présente le mérite de
permettre d'esquisser une phonologie plus substantiellement proche de la syntaxe, dans ses
représentations et ses procédures. J'ai voulu, sur un point spécifique, y faire un pas.

***

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