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CHAPITRE : LA RELIGION

L’extrémisme religieux de tout bord a relancé au 21e siècle créature tourmentée, l'âme d'un monde sans cœur, de
le débat sur le phénomène religieux et la finalité de la même qu'elle est l'esprit de situations dépourvues d'esprit.
religion. En s’illustrant violemment à travers le monde, le Elle est l'opium du peuple.». Dès lors , « Nier la religion, ce
fondamentalisme religieux interpelle l’humanité à réfléchir bonheur illusoire du peuple, c’est exiger son bonheur réel »
sur la religion.
La religion est un phénomène universel en ce sens qu’il n’y B/ Nietzsche
a pas de société connue sans rite, d’ailleurs les premières
traces de religion apparaissent dès l’époque du Dans la même perspective, et plus vigoureusement,
paléolithique (il y a plus de 50.000ans). Qu’est-ce que la Nietzsche soutiendra que la religion est le produit du
religion en réalité? Comment la philosophie la conçoit- ressentiment. Les vaincus de la vie, les faibles, les
elle ? Quelle est la nature de la relation qui unit la science esclaves inventent un autre monde pour déprécier,
et la religion ? Qu’elle est sa place dans notre vie ? calomnier le monde terrestre. Autrement dit la croyance en
Dieu est le propre des hommes faibles car l’homme
I / ANALYSE CONCEPTUELLE puissant n’a pas besoin de Dieu. Dans Généalogie de la
morale, il affirme sans ambages que «Ce sont les
Étymologiquement, le concept ‘’religion’’ vient du latin esclaves, les vaincus de la vie qui ont inventé l’au-delà
‘’religare’’ qui signifie ‘’relier’’. Il viendrait aussi de avec son paradis et son enfer pour compenser leur misère
‘’relegere’’ qui signifie ‘’ cueillir’’, ‘’rassembler’’. Ainsi laet font de leurs impuissances des vertus religieuses».
religion est le lien qui unit l’homme aux divinités, à Dieu Le christianisme est une religion de décadence : le «
comme source de son existence. La religion consiste dans Royaume de Dieu » est une négation du monde, une
le sentiment absolu de la reconnaissance de Dieu et de objection contre l’existence ; c’est un crime contre la vie,
notre faiblesse. En effet le croyant se confie en la dissimulé sous la foi en une vie « autre », une vie «
providence divine et accepte tout ce qui lui arrive comme meilleure ».
étant un signe divin. Pour lui, tout le savoir et tout le pouvoir que nous
On voit ici la différence entre le religieux et le magicien, attribuons à Dieu sont l’expression de nos limites et de nos
sorcier, charlatan ou gourou. faiblesses. Il affirme d’ailleurs plus loin que par son
Ces derniers veulent braver ou séduire les forces intelligence, l’homme peut égaler Dieu.
surnaturelles afin de les manipuler pour leur gloire à
travers des rites incantatoires. Le religieux quant à lui C / Freud
reconnaît son absolue dépendance à l’égard des forces
divines. Enfin pour Freud, la religion n’est que la projection dans le
ciel de ces dieux très réels que furent pour les petits
II / PHILOSOPHIE ET RELIGION enfants leurs parents tout puissants. « La mort du père est
la naissance de Dieu ». ''L'impression terrifiante de la
Croire, c’est admettre sans preuve, sans chercher à détresse infantile avait éveillé le besoin d'être protégé -
comprendre l’existence d’un être supérieur qui préside à la protégé en étant aimé - besoin auquel le père a satisfait ;
destinée des hommes. Alors que pour la philosophie, rien la reconnaissance du fait que cette détresse dure toute la
ne va de soi, rien n’est évident. Il faut chercher à percer le vie a fait que l'homme s'est cramponné à un père, à un
mystère qui se cache derrière tout sentiment religieux. père cette fois plus puissant''.
Si d’une part, des philosophes ont à travers leurs écrits La religion serait non seulement une erreur mais une
justifier la religion (les Pères de l'Église : St Augustin et illusion.
Thomas d’Aquin), d’autre part, il s’en est trouvé d’autres
qui ont expliqué la croyance au surnaturel par des mobiles Le but de notre réflexion n’est pas de remettre en cause
naturels. les bien-fondés de la religion mais de montrer que la
Au XIXème siècle commence l’ère du soupçon, la religion en tant que phénomène universel a des aspects
philosophie du soupçon. Nietzsche, Marx et Freud sont les négatifs voire un visage monstrueux. Il s’agit entre autre de
maîtres du soupçon. Ils ne croient pas ‘’sur parole’’ et l’intolérance, de l'inquisition, de l'intégrisme, du fanatisme,
cherchent à dévoiler les mobiles cachés des croyances des attentats, des croisades, des guerres saintes que la
religieuses. religion justifia durant des siècles.
A présent voyons quelles relations entretiennent la science
A/ Le marxisme et la religion.

Selon le marxisme, c’est parce que les conditions III / SCIENCE ET RELIGION
matérielles de l’homme sont misérables qu’il s’imagine un
dieu capable de lui donner après la mort une existence Les relations entre la science et la religion ont pris bien
pleine de douceur et de repos dans un lieu appelé paradis. souvent des tournures conflictuelles voire dramatiques.
Pour cette philosophie, Dieu n’existe que dans Alors que la religion fait remonter notre origine à une
l’imagination du pauvre et le pauvre a toujours un Dieu très création divine, la science quant à elle, adopte la théorie
riche. La religion y est vue comme l’expression de la de l’évolution avec Darwin qui soutient que l’homme est
domination du prolétariat par la bourgeoisie qui l'utilise une étape dans l’évolution d’une espèce dont le dernier
pour endormir la vigilance, l’esprit de révolte et de ancêtre est le singe.
combativité des prolétaires. Des passages de l'Évangile Chacune de ses explications comporte des faiblesses. En
sont convoqués à cet effet : « Heureux les pauvres car le effet, si l’homme est le résultat d’une évolution, cette
Royaume des Cieux est à eux », « Les premiers seront les évolution suppose un début, un déclenchement du
derniers et les derniers seront les premiers ». ''Il est plus processus évolutif. A cette question, l’esprit scientifique se
facile à un chameau de passer par le trou d'une aiguille débat pour en venir à affirmer que l’évolution eut lieu parce
qu'à un riche de rentrer dans le Royaume des Cieux'' En que les conditions étaient favorables. De toute évidence,
définitive, pour Karl Marx, «La religion est le soupir de la on voit là que la question reste toujours posée.
L’explication religieuse n’est pas non plus à l’abri de toute Mourir pour sa foi pourrait pour certains être insensé mais
critique. En effet, l’idée biblique de la création de l’homme il faut retenir que la foi n'est pas opposée à la raison.
et du monde en 6 jours apparaît bien souvent à l’esprit
Le théologien, St Augustin par exemple, développa une
rationnel comme une absurdité magique, un rêve lointain.
De même la conception religieuse de la destinée de doctrine qui cherche à concilier la foi avec la raison. C’est
l’homme, de la vie après la mort se fonde sur des repères par la raison qu’on adhère à la foi. De plus, nombreux
géométriques non localisables que sont le paradis et scientifiques sont croyants.
l’enfer. Ce qu’il faut retenir, c’est que la vérité scientifique n’est
Lorsqu’on conçoit l’homme comme un être fini selon qu’une vision partielle de Dieu qui est la vérité même.
Spinoza, mourir se « conçoit bien sans l’au-delà et son
paradis et son enfer ». En effet, le phénomène de la mort Sujets de réflexion :
est un simple accomplissement d’une loi de la nature.
Le conflit entre science et religion n’est pas prêt d’être clos.
 L’homme a-t-il nécessairement besoin de
Et pour montrer ce rapport, Malebranche (1638-1715)
religion ?
affirmait : « Pour être savant, il faut croire évidemment.
 Peut-on accorder une valeur à une croyance que
Pour être fidèle, il faut croire aveuglément. ».
Quelle est alors la valeur de la religion ? l’on ne partage pas ?
 Faut-il opposer la croyance et la raison ?
IV / QUESTIONS ACTUELLES DE LA RELIGION  La philosophie s’accorde-t-elle avec la religion ?
 Les religions empêchent-elles les hommes de
A / l'intégrisme religieux s’entendre ?

L’intégrisme ne se confond pas avec la religion et n’a rien
à voir avec la spiritualité. L’intégrisme est dans la religion
la tentation, de la part d’une frange de fidèles, d’une
radicalisation du moralisme, d’un retour au mode de vie
premier du Fondateur, d’un retour à une version de la
religion épurée des apports de l’histoire et de la modernité.
Cela s'appelle fondamentalisme. L’intégrisme n’est pas le
monopole d’une religion en particulier, bien qu’il soit
favorisé dans les religions reposant sur un credo. Il peut se
manifester en chacune. Il ne concerne qu’une partie des
fidèles, ceux qui sont particulièrement enclin au fanatisme
et non la communauté entière des croyants.
L’intégriste dit faire partie des « purs », des « fidèles » et il
dénonce les « impurs » et les « infidèles ». Ceux qui ne
vivent pas en accord avec les préceptes. Pour lui, les
compromissions avec la modernité politique sont autant de
formes de corruption de l’esprit de la religion. Il ne peut y
avoir deux autorités, celle de l’État et celle de la religion, il
ne peut y avoir qu’une autorité, Dieu et sa parole dans
l’Écriture. L’intégriste dénonce la corruption morale de la
communauté à laquelle il appartient dans son éloignement
avec les préceptes des Écritures saintes.
B/ Valeur de la religion

La question se pose de savoir si le sentiment religieux


n’est pas indispensable à la vie sociale. A ce propos,
Voltaire (1694-1779) disait ceci : « Si Dieu n'existait pas, il
faudrait l'inventer ». Ceci pour dire que la religion contribue
à une cohésion sociale en répandant dans l’humanité les
valeurs de pardon, d’amour, de charité, de justice, etc.
La religion influence positivement la vie des hommes. La
religion constitue un pouvoir moral, une autorité morale qui
par principe prend partie pour les laissés-pour-compte, les
pauvres.
Pour clore le débat nous dirons avec Pascal (1623-1662) :
« Le cœur a ses raisons que la raison ignore ». La religion
reste un phénomène inexplicable pour la raison humaine.
En effet « il est grand le mystère de la foi ».

CONCLUSION

La religion occupe une grande place dans la vie des


hommes. Elle se confond avec la vie de milliards
d'individus qui, à travers elle, donnent un sens à leur
existence. De nombreux martyrs de ces religions
témoignent de cela.

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