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La religion

Définition générale :
Une religion est une société particulière historiquement et géographiquement
déterminée qui se reconnaît par certaines pratiques. La religion est un système de
croyances et de pratiques relatives à des choses sacrées qui impliquent une
séparation des choses profanes. Le mot profane vient du latin « pro-fanum », qui
veut dire devant le temple, à l’extérieur du lieu sacré. Le mot sacré veut dire
séparé, réservé, inviolable. Donc sacré et profane sont deux termes corrélatifs,
c'est-à-dire qui n’ont de sens que l’un par rapport à l’autre. Le sacré est une qualité
que les choses ne possèdent pas par elles-mêmes, mais par une grâce mystérieuse
qui vient de l’extérieur. Le sacré peut être une chose comme la Bible, une personne
comme un roi ou un homme de religion, un lieu comme un temple ou une église…

I – un phénomène culturel diversifié et complexe.


Comment situer le phénomène religieux dans l’ensemble des faits culturels ?
Qu’est-ce qui caractérise ce phénomène ?
Les comportements religieux posent un problème d’ordre politique et social qui
concerne les rapports des gens appartenant à une religion avec les autres
composants de la société civile et le rapport entre les communautés religieuses et
l’Etat.
De point de vue subjectif, la religion pose d’autres problèmes comme le problème
philosophique de l’existence de Dieu et la relation entre le relatif qui est l’homme
et l’absolu qui est Dieu. Ainsi que la place qu’occupe le sacré dans la structure de
la conscience humaine et la question de la vérité absolue. Se pose également le
problème des commandements absolus provenant de Dieu. A ce titre, la religion
semble se placer au-dessus de tout autre pouvoir politique et social. Elle est hors
d’atteinte de toute critique, au-delà du champ de la rationalité. Cette prétention
peut la rendre suspecte ou insupportable à la rationalité scientifique qui peut
assimiler la religion à l’obscurantisme. De plus, la philosophie morale et politique
considère qu’il est irrationnel de prétendre fonder l’absolu et le divin sur le relatif
et sur un événement historique particulier, de prétendre fonder la morale sur une
religion révélée au lieu de fonder rationnellement la morale personnelle et sociale
sur l’universalité des percepts inscrits au cœur de toute homme en tout temps et en
tout lieu.

Religion et magie.
La religion ne se confond pas avec la magie qui est un ensemble de rites et de
savoir- faire, un art d’agir sur la nature par des procédés occultes afin de produire
des effets extraordinaires. Le magicien force la nature et entraîne les forces
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naturelles et le monde invisible des esprits. La religion de sa part, implore la faveur
des dieux sans jamais les contraindre. Elle obéit à Dieu et l’implore avec humilité.
L’étymologie du mot religion donne cette notion de respect «religare» qui veut dire
le lien entre l’homme et la divinité. Durkheim définit la religion comme « un
système solidaire de croyance et de pratique à des choses sacrées, c'est-à-dire
séparées et interdites. Croyances et pratiques qui unissent en la même communauté
morale tous ceux qui y adhèrent ».
La magie, par définition, est l’art de mage ou du magicien, art semble-t-il vieux
comme le monde, puisque, historiquement, nous trouvons déjà des castes de mages
chez les chaldéens et les perses. La magie est une espèce de superstition, c'est-à-
dire qu’elle s’oppose à la religion par excès : elle rend un culte divin à qui ce culte
n’est pas dû. Elle consiste à produire des effets extraordinaires et merveilleux avec
un secours différent de celui de Dieu. On dissocie habituellement la magie noire de
la magie blanche, la noire servant globalement à faire le mal, la blanche le bien.
Cependant, l’une comme l’autre ne pourront jamais être attribuées à une
intervention divine. Quant à envisager une simple force psychique, personnelle ou
collective, c’est fuir le problème plutôt que de le résoudre.

La magie, elle, n’est pas religieuse. En effet la religion considère le monde


comme une série d’événements dirigés ou permis par un Etre Souverain agissant
pour une fin qui est lui-même. La magie, elle, regarde le monde comme une série
d’événements se déroulant invariablement, fatalement, de telle sorte que des êtres
soi-disant supérieurs à l’homme puissent diriger les forces naturelles, et donc que
le magicien puisse faire pression sur ces êtres, sur ces forces.

Il est bon d’exposer tous les aspects de la magie, ce sont :


- L’enchantement, destiné à attirer les génies par les chants ou des
instruments.
- La divination, où l’on apprend l’avenir et l’on connaît les choses cachées,
c’est là que l’astrologie se situe en tant que pratique magique.
- La nécromancie, ou l’invocation des morts ou de converser avec eux.
- Le maléfice, jeté à une personne pour lui envoyer un fléau quelconque,
maladie ou problème.
- La sorcellerie ou les sortilèges, qui consistent à diriger les sorts bons ou
mauvais. La conjuration est elle-même un acte magique destiné à neutraliser
un sort.
- Le magnétisme, ou agir sur un sujet par l’intermédiaire d’une force
universelle.
- L’occultisme, ou science des choses cachées et des choses à cacher.

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- L’hypnose, ou le fait d’endormir un sujet et de lui faire exécuter certaines
actions plus ou moins extraordinaires ou insolites.
- Le spiritisme, qui est le fait de provoquer des phénomènes extraordinaires
grâce à des esprits ou à des âmes séparées, ou à des forces surnaturelles
mystérieuses, ou à l’illusion comme le phénomène de psychologie de foule
par exemple…la pratique spirite implique une conversation avec l’esprit
d’un mort ou bien d’un vivant à distance par l’intermédiaire d’un médium.
Le médium serait un individu servant de « piste d’atterrissage » aux esprits
pour communiquer avec les hommes.

Les différentes conceptions de Dieu.


- Le théisme traditionnel : C’est la conception de Dieu la plus familière, celle des
grandes religions. Dieu est le créateur de l’univers, transcendant, principe des
lois naturelles, bon, infini…
- Le panthéisme : Ce n’est pas un polythéisme mais c’est l’affirmation d’une
unité fondamentale de l’univers. Tout est Dieu et Dieu est partout. Dieu ne se
distingue pas du monde, il n’est pas transcendant, il n’est pas créateur mais il
est infini. Et puisque on ne peut rien ajouter à l’infini, donc Dieu n’a pas créé
un monde extérieur à lui-même. Il est lui-même le monde. Ainsi Dieu n’aurait
pas été lui-même la totalité, ni l’infini, puisqu’on ne peut rien ajouter à l’ infini.
Parmi les panthéistes :
 Les stoïciens : Dieu est la raison de toute chose, et l’âme humaine est une parcelle
du souffle divin.
 Spinoza : l’âme humaine est un rayon de la pensée infinie de Dieu et le corps est
un prolongement de l’étendue qui est infini.
 Hegel : Dieu est l’esprit absolu qui se réalise progressivement dans l’histoire. Dieu
s’accomplit par étape à travers les œuvres de la culture humaine. Il est immanent à
l’histoire. Dieu n’est pas, mais Il sera. Il est l’histoire qui s’accomplit dans le
devenir.
- L’athéisme : c’est la négation complète de l’existence de Dieu. L’être
transcendant n’est pas, pas de principe, ni de commencement, ni de fin. Ce sont
les lois du développement de la matière qui expliquent l’univers. C’est le point
de vue des matérialistes et des marxistes.
- Le déisme : c’est le point de vue de ceux qui, sans accepter les dogmes et les
pratiques d’une religion croient en l’existence des dieux mais rejettent toute
autorité.
- La religion de l’esprit (XIX-XX) : Dieu est l’esprit humain en tant que source
de vérité et de valeurs. Dieu est la valeur même, c'est-à-dire ce qui doit être et

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non ce qui est. Il est une exigence et non une existence. Dieu est amour dans le
sens qu’il est ce qui aime en nous.

Les fonctions de la religion :


- La fonction sociale : pour Durkheim, les représentations religieuses naissent au
sein du groupe.
Bergson parle de deux formes : la religion statique qui a une fonction sociale et
permet la cohésion sociale en imposant des interdits. La religion dynamique ou
mystique qui est le sentiment religieux personnel qui transforme l’âme. Dieu
apparaît à l’âme mystique comme illumination réservée pour des hommes qui ont
une mission.
- La fonction biologique : pour Bergson la religion statique permet de se prévenir
contre l’angoisse de la mort. La peur de la mort engendre chez l’être conscient
une angoisse qui sera compensée par des croyances en une vie future.
- La fonction psychologique : la religion est le substitut d’une explication
rigoureuse et rationaliste de l’univers. Pour Feuerbach, l’homme Projette dans
le ciel le rêve de justice, d’amour et de sagesse qu’il ne peut réaliser sur la terre.
Dieu est l’essence de l’homme. Il est « les vœux de l’homme réalisés ». pour
Nietzsche, les vaincus de la vie ont inventé un au-delà pour compenser leur
misère. Ils ont inventé et imaginé de fausses valeurs pour se consoler de ne pas
pouvoir participer aux vraies valeurs, celles des forts et des maîtres. Nietzsche
critique la religion chrétienne la considérant comme une décadence de la vraie
vie, puisqu’elle prêche le refoulement des instincts. Marx essaye de rattacher le
phénomène religieux à la réalité historique concrète, «la religion est l’opium du
peuple». les exploiteurs promettent dans le ciel des biens dont ils privent sur
terre les exploités. La fonction de la religion est de rendre supportable le
malheur des hommes dans les sociétés injustes. Ce qui est à détruire selon Marx
ce n’est pas la religion mais ce qui la rend inévitable c'est-à-dire les conditions
sociales qui entraînent un besoin d’illusion. Pour Freud, la religion est une
névrose obsessionnelle universelle de l’humanité, c’est une illusion qui trouve
ses racines dans la détresse infantile qui éveille le besoin d’être protégé. La
croyance en Dieu est une idée de protection par un père juste, bon et tout
puissant. L’homme angoissé s’attache à l’idée d’un père tout puissant à cause
de sa faiblesse psychologique.la religion est un retour nostalgique à l’enfance,
un transfert du sentiment filial.

II- religion et philosophie.


Certains philosophes essayent de prouver rationnellement l’existence de Dieu :

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- La causalité : Dieu est posé comme ultime des phénomènes, chaque
phénomènes a une cause, et chaque cause a sa propre cause, pour arriver à la
cause première qui est Dieu.
- Dieu est la source de l’ordre du monde : Le monde est organisé selon un plan
parfait, selon un ordre juste et bon. Le monde est nécessairement l’œuvre d’une
souveraine intelligence. L’univers dans son harmonie (astres, corps humain,
nature…) est réglé comme une horloge qui a pour source un horloger qui est
Dieu. Comment alors expliquer le désordre et l’existence du mal ? Dieu serait-il
le créateur du mal lui qui est bon et juste ?
Selon Pascal, c’est le péché originel d’Adam qui a troublé l’harmonie primitive de
la création, et l’homme d’aujourd’hui subit les conséquences. Saint Thomas
considère que le mal n’existe pas, il est une négation du bien, l’absence du bien. Le
péché n’est pas dans ce qu’on fait mais dans ce qu’on néglige. Par exemple la
surdité qui est un mal, n’est que l’absence d’audition, qui est un bien.
- L’ontologie : On déduit l’existence de Dieu à partir de la seule idée de Dieu.
L’homme, être imparfait ne peut avoir que des idées imparfaites. Mais malgré
cela il peut avoir l’idée de la perfection. Cette idée ne vient pas de lui
naturellement mais du fait que le parfait existe, et ce parfait est Dieu.
- L’argument moral : Certains voient dans l’affirmation de l’existence de Dieu
une exigence morale plus qu’une exigence logique. L’homme a besoin d’un
Dieu justicier qui punit les méchants et récompense les bons.

Opposition entre foi et raison :


Beaucoup de croyants reconnaissent que la foi en Dieu ne repose pas sur la
raison mais sur une autre dimension qui est la foi, la croyance. Pour Pascal, le
domaine de la certitude c’est la raison et le domaine de l’incertitude c’est la foi.
Puisque notre raison est finie, elle ne peut pas prouver l’existence de Dieu. Le seul
moyen rationnel est de faire un pari. Les non croyants dans cette vie sont perdants
si dans l’au- delà Dieu existe, et les croyants dans cette vie sont toujours gagnants
ici et dans l’au-delà. Donc il est dans l’intérêt de l’homme de croire en l’existence
de Dieu. Kierkegaard de son côté soutient la thèse extrême : la foi refuse la raison
et oppose à l’objectivité rationnelle la décision personnelle de la foi. Vouloir
expliquer rationnellement la religion est irrationnel et témoigne d’un esprit
d’orgueil.
Opposition entre science et religion.
L’histoire de la religion et celle de la science se sont longtemps opposées. La
vision religieuse et l’explication scientifique du monde sont-elles compatibles ? le
progrès scientifique a-t-il fait disparaître la croyance religieuse ? Il semble que la
réponse est négative puisqu’on constate qu’il y a un retour du religieux dans le
monde actuel. La religion de sa part a longtemps expliqué le monde en
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condamnant toute explication purement scientifique. La science de sa part, a
condamné la religion en raison de son irrationalité. D’un autre point de vue science
et religion sont complètement indépendants. La science reconnaît que l’âme
appartient à un autre domaine que le corps, mais cela n’empêche pas qu’un
scientifique soit un croyant fervent.
En fait la vraie opposition n’est pas entre science et foi, mais c’est un choix entre
deux croyance : la croyance a la suffisance de la raison humaine qui a fondé à
travers l’histoire un humanisme plutôt athée. Et la croyance a l’insuffisance de
cette raison. Donc la relation entre la raison et la foi n’est pas nécessairement
conflictuelle. Imaginer que le conflit est nécessaire c’est prétendre que la raison
scientifique rend caduque toute croyance religieuse. Dans la réalité science et
religion voient chacune leur domaine s’étendre. D’un côté le développement
incessant de la science surtout en matière de technologie, et d’un autre
l’accroissement du nombre de sectes montrant l’insatisfaction existentielle
humaine.

Religion et laïcité.
Dans les sociétés traditionnelles les religions imprègnent tous les domaines de la
vie sociale : la famille, la culture, les valeurs…il semble alors naturel à la société
d’être gouvernée en fonction du critère religieux, c’est la théocratie. Dans la laïcité,
la religion devient une affaire privée qui relève de la liberté individuelle. L’Etat,
dans le cas de la république française respecte au nom de la laïcité toutes les
religions existantes sur son territoire, et n’intervient pas en faveur de l’une ou
l’autre. La séparation entre le pouvoir civil et le pouvoir religieux a été adoptée par
la laïcité suite aux guerres de religion qui ont duré des siècles en Europe.

Dans les sociétés traditionnelles, la religion imprègne toutes les dimensions de la


vie sociale : la famille, la culture, le mode de vie, les valeurs morales. Elle est
perçue comme la condition essentielle du lien social. Il semble alors naturel à la
société que l'Etat la gouverne en fonction de critères religieux. Aujourd'hui ce
modèle reste en rigueur dans les régimes appelés pour cela théocraties.
Mais dès que l'individu s'affirme et revendique son autonomie face aux
contraintes extérieures, la religion tend à devenir une affaire privée qui relève de la
liberté individuelle, comme le choix d'un conjoint ou d'un métier. L'intervention de
l'Etat en faveur d'une religion contre une autre a mené aux persécutions religieuses
et aux guerres de religion. La philosophie a développé à partir du 17ème siècle deux
idées essentielles : d'une part que la liberté de conscience soit respectée car en
matière de croyance il est impossible de distinguer le vrai du faux. L'essentiel est
donc la sincérité avec laquelle on croit. D'autre part, John Locke propose la

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séparation des Eglises et de l'Etat, c’est à dire ce qu'on appelle aujourd'hui la
laïcité. En effet, ces deux types d'institutions remplissent deux fonctions
différentes : le salut de l'âme des individus pour les premières, le bonheur sur terre
de la société tout entière pour le second. Ayant des buts différents vis-à-vis de leurs
membres : si un citoyen viole les lois civiles, l'Etat doit le punir avec la rigueur des
lois pénales, si un fidèle enfreint les lois de son Eglise, celle-ci ne doit pas le punir
autrement qu'en l'excluant de la communauté des croyants. Ainsi, en protégeant la
liberté religieuse et plus généralement la liberté de pensée, l'Etat contribue à
favoriser l'autonomie des individus selon l'idéal de la philosophie des lumières. En
effet, l'Etat qui a pour fin la sécurité de la société, doit détenir le monopole de la
violence légale pour instituer et maintenir cette sécurité. En outre, l'Etat doit aussi
maintenir sa propre sécurité et pour cela use aussi de violence. Afin de justifier
cette violence on invoque la raison d'Etat c’est à dire cet impératif au nom duquel
le pouvoir politique transgresse le droit ou la morale dans l'intérêt de l'Etat. La
sécurité de l'Etat justifierait un acte immoral ou illicite qui est le recours aux
«secrets d'Etat». Donc, dans certaines conditions, l'Etat se donne le droit de
bousculer le droit et la morale c’est à dire le légal et le légitime.

Textes :
- Averroès

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