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TD Sociologie thématique L3 Sociologie Abir Krefa

Exposés TD Sociologie thématique


Institutions, intégration et régulation

Séance 1 · 20/09

Examen écrit le 6 décembre : commentaire de texte qui s’intègre dans la thématique


du cours en mobilisant les connaissances acquises en TD. Textes courts à lire mais il est
nécessaire de produire une réflexion à partir de ceux-ci. L’an dernier, c’était l’extrait de
Surveiller et punir de Foucault sur la prison.

Séance 2 · Commenter des textes classiques sur les institutions

Séance 3 · Le concept d’institutions totales (04/10)

Bibliographie
E. Goffman, Asiles, études sur la condition sociale des malades mentaux et autres reclus,
1961 ; traduction de Liliane et Claude Lainé, présentation, index et notes de Robert Castel,
Editions de Minuit, coll. « Le Sens Commun », 1979
C. Amourous ; A. Blanc, Erving Goffman et les institutions totales, Editions de l’Harmattan,
coll. « Logiques sociales », 2001
J. Sagliot, “Les bateaux de guerre français : totalitaires et/ou autoritaires ?”, p.109-136
C. Rostaing, “Pertinence et actualité du concept d’institution totale : à propos des prisons”,
p.137-153
J. Ayme, “La psychiatrie française, Asiles et Goffman”, p.261-271

INTRODUCTION
Notre approche porte sur la genèse du concept d’institutions totales en explicitant ses
différentes modes de construction à travers l’ouvrage Asiles de Goffman. On vous parlera
des points clés de ce concept ainsi que parfois ses limites et enfin sa mise en perspective
contemporaine à travers des articles plus récents portant sur des institutions qui
s’apparentent au concept d’institution totale.
Problématique : Que regroupe et quels sont les intérêts du concept d’institution totale ?

I. Apparition, construction et traduction du concept d’institution totale

A) La sociologie d’Erving Goffman

Erving Goffman (1922 – 1982)

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Goffman est un sociologue et linguiste américain, fils de Juifs ukrainiens ayant immigré
au Canada au début du XXe siècle. Il sera également professeur à l'université de Californie à
Berkeley. Avec Howard Becker, il est l'un des principaux représentants de la deuxième École
de Chicago qui prend place après les années 40.

Rattaché à la seconde École de Chicago, il s'écarte des méthodes quantitatives et


statistiques pour privilégier l'observation directe. Ainsi, pour Asiles, il à vivre parmi les
malades mentaux de l'hôpital Sainte Elizabeth de Washington afin de mener son étude sur
l’asile (1954 à 1956).

Il prend part au courant de l’ethnométhodologie. Le terme d'ethnométhodologie


désigne donc une discipline qui étudie la façon dont des participants à une activité lui
confèrent son intelligibilité propre. En termes plus simples l'ethnométhodologie cherche à
décrire les catégories qu'un groupe se donne à lui-même pour ranger ces activités dans le
monde social.

Pour certains auteurs Goffman s’inscrit également dans l'interactionnisme symbolique,


même s'il a toujours refusé sa filiation avec cette dernière. Ce concept marque de prime
abord une rupture avec la psychologie sociale et la psychanalyse qui sont prégnants dans les
études du comportement humain à cette époque. Allié aux méthodes d’observation directe
et des interactions, la caractéristique majoritaire de ce concept est le refus fondamental d’un
déterminisme biologique et social de l’individu. La difficulté d’associer formellement Goffman
à l’interactionnisme symbolique découle du fait que l’œuvre de ce dernier ne se réduit pas à
une analyse strictement interactionniste même si l’interaction reste au cœur de cette étude.

Œuvres de Goffman
Asiles, études sur la condition sociale des malades mentaux et autres reclus, 1961 ;
traduction de Liliane et Claude Lainé, présentation, index et notes de Robert Castel, Éditions
de Minuit, coll. « Le Sens Commun », 1979
Stigmate. Les usages sociaux des handicaps, 1963 ; traduit de l'anglais par Alain Kihm,
Éditions de Minuit, coll. « Le Sens Commun », 1975
La Mise en scène de la vie quotidienne, t. 1 La Présentation de soi, Éditions de Minuit, coll.
« Le Sens Commun », 1973
La Mise en scène de la vie quotidienne, t. 2 Les Relations en public, Éditions de Minuit, coll.
« Le Sens Commun », 1973
Les Rites d'interaction, 1974
L'Arrangement des sexes, 1979

B) L’ouvrage Asiles : méthodologie d’enquête et réception

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C’est une des premières recherche de Goffman qu’il mena à la suite de sa thèse.
Asiles est un ensemble de quatre essais sociologiques parus en 1961 sous le titre original
Asylums : Essays on the social situation of mental patients and other inmates. Goffman y
établit la possibilité pour les différents acteurs confinés dans des lieux reclus d'exploiter leurs
caractéristiques particulières pour satisfaire certains de leurs besoins personnels.
Enquête et méthodologie
Goffman met à profit une observation directe effectuée à l'hôpital Sainte Elizabeth de
Washington afin d’étayer une théorie interactionniste des institutions totales. Il qualifie sa
méthode de recueil des données d’« étude ethnographique ». Son étude a duré 2-3 ans
(1954 à 1957). Il y a observé aussi bien le personnel de l’établissement que les internés.
La particularité de son étude porte sur son caractère novateur. De par le contexte de
la société américaine de la fin des années 50/début 60, période de publication du livre que
par son contexte académique qui sort des standards d’enquête sociologique de cette
époque qui était basé sur une méthode plus quantitative mais également car il pointe un sujet
longtemps resté sous silence, les asiles ou vu comme une entité à part entière de la
psychanalyse en ce qui concerne les internés.
Note : La majorité de la littérature française sur Goffman et de ses traductions ont
commis une approximation en qualifiant sa méthode dans Asiles d’« observation
participante ». Pourtant, Goffman insiste dès l’introduction sur le fait que son observation était
neutre, que malgré son poste officiel dans la hiérarchie de l’établissement, il ne prenait jamais
partie, ne participait jamais aux activités et prenait garde à n’être jamais pris pour un membre
du personnel par les reclus, et vice-versa. Or, l’observation participante consiste à essayer,
tant que possible, de se mettre à la place des individus ou populations observées pour
recréer une expérience subjective proche. La méthode de Goffman est qualifiable
d’observation intensive, mais pas participante.
A l’époque de la sortie de la traduction de l’ouvrage en France : pas reçu un grand
accueil dans les années 70. Moment d’effervescence du milieu psychiatrique avec des
colloques/conférences/études réflexives sur le milieu psychiatrique. Texte qui arrive un peu
tard dans ce contexte.
Aujourd’hui : Livre qui sert encore en psychiatrie pour “guide pour “humaniser” leur
service” (p.270) ou moyen pour les soignants des “néo-asiles” de se forger des outils
conceptuels malgré le manque de moyens de leurs institutions.

C) Définition du concept d’institution totale

Histoire et traduction
Catégorie déjà apparue dans des travaux précédents (sous d’autres noms) : Rowland
sur la santé mentale, Etzioni sur les institutions éducatives fermées en Israël
Traductions : “total institution” -> institution totalitaire (certains voient là un problème
idéologique dans cette traduction) -> institution totale (traduction littérale). On utilisera les
deux dénominations sans distinction.
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Définition + caractère idéal-typique + typologie des institutions totales
Définitions :
Institution : “sont des lieux (pièces, appartements, immeubles, ateliers) où une activité
particulière se poursuit régulièrement. [...] Certaines institutions fournissent un cadre à des
activités qui définissent la position sociale de l’individu, indépendamment du zèle ou de
l’indifférence qu’il y manifeste. D’autres, au contraire, ne sont que le cadre d'activités libres et
gratuites, pratiquées en dehors du temps consacré à des tâches plus sérieuses.” (p.45)

Institution totale : “on peut définir une institution totalitaire comme un lieu de résidence
et de travail où un grand nombre d’individus, placés dans la même situation, coupés du
monde extérieur pour une période relativement longue, mènent ensemble une vie recluse
dont les modalités sont explicitement et minutieusement réglées” (p.41)
→ idéal-type, “concept opératoire” (p.139, Rostaing) et pas une catégorisation fixe et
immuable, figée dans une étude donnée.

Typologie des institutions totales : (paraphrase des pages 46-47)


- Les organismes qui prennent en charge « les personnes jugées incapables de subvenir à
leurs besoins et inoffensives » (foyers pour aveugles, orphelinats …)
- Les organismes qui prennent en charge « les personnes jugées à la fois incapables de
s’occuper d’elles-mêmes et dangereuses pour la communauté, même si cette nocivité est
involontaire » (sanatoriums, léproserie, asiles …)
- Les institutions destinées « à protéger la communauté contre des menaces qualifiées
d’intentionnelles, sans que l’intérêt des personnes séquestrées soit le premier but
visé » (prisons, camps de concentration)
- Les institutions qui cherchent à « créer les meilleures conditions possibles pour la
réalisation d’une tâche donnée » (casernes, navires…)

« Les établissements qui ont pour but d’assurer une retraite hors du monde » (principalement
destinés à former des religieux : abbayes, monastères…).
On trouve dans les institutions totales :
Des reclus (« inmates »), c'est-à-dire des individus isolés dans ce milieu, qu’ils y soient
introduits de force ou volontairement.
Un personnel, qui lui, accède au monde extérieur une fois son quota d’heures de travail
effectué.

II. Un concept riche et complexe : détails d’une étude aux multiples facettes

A) Caractéristiques d’une institution totale

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Exemples des autres articles (prisons, bâteau militaire, entreprises). 3 critères
d’institutions : unité de lieu, limitation des espaces (promiscuité), prégnance de la hiérarchie
et de la bureaucratie
Conditions de vie
Citation : « placés sous une seule et même autorité, tous les aspects de l’existence
s’inscrivent dans le même cadre [...] chaque phase de l’activité quotidienne se déroule, pour
chaque participant, en relation de promiscuité totale avec un grand nombre d’autres
personnes, soumises aux mêmes traitements et aux mêmes obligations [...] toutes ces
périodes d’activité sont réfléchies selon un programme strict, [...] déterminé à l’avance,
conformément à un plan imposé d’en haut par un système explicite de règlements dont
l’application est assurée par une équipe administrative » (p.48)

→ unité de lieu qui suppose que toutes les activités fondamentales à la (sur)vie se fasse
dans le même cadre de vie : manger, dormir, se doucher, se divertir, travailler se fait dans
un espace physique unique, cohérent et organisé de telle manière que toutes les fonctions
vitales soient remplies sans avoir besoin d’avoir recours à des éléments ou emplacements
extérieurs à l’institution.
→ promiscuité des reclus (usagers de l’institution), perte de l’intimité : tout se fait en
public, au milieu des autres reclus et du personnel. Il n’y a pas ou très peu de moments de
solitude, ce qui transforme le corps en objet d’attention constante.
→ bureaucratisation de la vie : l’administration est extrêmement présente et veille au bon
déroulement de la vie dans l’institution, les écarts sont sanctionnés & les dérogations sont
rares et laborieuses à obtenir.
→ perte d’autonomie : tout est régit par des règlements parfois contradictoires ou flous, la
vie est découpée en créneaux horaires dédiés spécifiquement à certaines activités ou
obligations

Le personnel
Pour faire tourner les institutions, en particulier celles qui ne fonctionnent pas en auto-
gestion (à la manière des institutions de retraite du monde) il faut du personnel afin d’assurer
le ménage, les repas, les soins, la sécurité etc.
Forme un groupe clairement séparé des reclus : ils ne vivent pas dans l’institution et
gardent une vie en dehors d’elle. Lorsque leur travail est terminé, ils sortent du cadre de
l’institution. Ils sont en plus dans une situation de supériorité par rapport aux reclus.
Leur position et leurs fonctions font qu’ils considèrent les reclus comme des
“matériaux humains” qu’ils doivent manier : le reclus est donc réifié. Il y a l’instauration d’une
distance entre le personnel et les reclus : développer de l’empathie et de la sympathie pour
ces matériaux humains les humanise et rend le personnel vulnérable, cela peut aussi
impacter le bon fonctionnement de l’institution : l’administration régit de manière rigide les
relations entre les personnels et les reclus et peut appliquer des sanctions.

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B) L’univers du reclus (inmate)

Goffman établit l’ensemble des points communs que peuvent rencontrer les reclus
dans les différentes sortes d’institutions totalitaires.
Le reclus ignore les décisions qui le concerne (le militaire ignore la destination de son
déplacement, le tuberculeux ignore la durée envisagée de son séjour à l’hôpital…).
Le rapport au travail est différent, il n’y a plus de stimulation.

- L’isolement : l’individu est coupé du monde 24h sur 24.


- Cérémonie d’admission : distribution de l’uniforme, photographie, visite, coupe de
cheveux, déshabillage, lavage…
- Le reclus est dépouillé de son aspect habituel et de ses objets familiers, il voit sa personne
défigurée.
- Dégradation de l’image de soi (tâches ingrates et parfois inutiles, formules de politesse
imposées.).
- La contamination physique (absence d’intimité physique et psychologique) : le reclus n’est
jamais isolé.
- La contamination morale liée à la vie communautaire.
- Les moindres détails de son embrigadement sont soumis à la réglementation (levé,
couché, disposition des objets).
- Perte de l’autonomie qui s’accompagne à la perte du confort personnel.
- Punitions qui concernent le plus souvent le problème des sorties, ou moqueries, menaces,
isolement voire châtiments corporels.

Instauration d’un jargon d’institution : Parfois un sentiment de complicité à l’intérieur des


limites matérielles du secteur clos, les occupants partagent le sentiment d’un destin
commun.

C) Vie sociale au sein des institutions totales Rapports avec personnel

Personnel fait un « maniement du matériau humain » ; rapports réduits mais


inévitables, communication rendue difficile du fait de l’ignorance réciproque des deux
groupes & attitudes négatives qu’ils projettent réciproquement, institution que impose règles,
statuts, sanctions pour régir les relations reclus/personnel = relation forcée de travail et de
dépendance ; interactions publiques ; importance des signes de déférence institutionnelle («
et s’accompagne d’exigences spécifiques et de punitions spécifiques en cas d’infractions »
p.167) = maintenir un espace entre les deux groupes ; distance pour éviter de considérer les
reclus comme des êtres humains (p.129) ce qui rendrait le personnel vulnérable et poserait

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un problème pour le bon fonctionnement de l’institution et des soins ; rapports asymétriques
avec fossé entre les deux groupes

Adaptations primaires et secondaires


Les reclus développent des stratégies d’adaptation à l’institution, qui vont définir leur manière
d’agir, de réagir et d’interagir avec le monde qui les entoure :

Ces stratégies individuelles peuvent être regroupées en deux


• Adaptations primaires : homogénéisent les rôles et comportements des reclus aux attentes
de l’institution
Techniques de mortification : dépersonnalisation, perte d’autonomie, embrigadement
(soumission perpétuelle à une autorité), systèmes de privilèges.
Dégradation de l’image de soi par promiscuité avec « contamination physique » (p.66) =
impossibilité de préserver des domaines intimes + « contamination morale » = subir la
coexistence constante et les relations imposées

• Adaptations secondaires : concernent les écarts aux normes de l’institution par les reclus.
- Adaptations désintégrantes : les auteurs de ces actes ont l’intention d’abandonner
l’organisation ou de modifier radicalement sa structure, ce qui conduit à briser la bonne
marche de l’organisation.
- Adaptations intégrées : acceptent les structures institutionnelles sans faire pression pour
un changement radical. Il s’agit d’exploiter le système pour avoir plus d’attention de la part
du personnel ou du de médicaments, « planquer dans ses poches […] des objets
personnels interdits ».
Ces adaptations secondaires découlent sur des stratégies qui vont régir la manière
dont les reclus vont agir, réagir et interagir avec le monde de l’institution. Goffman fait une
typologie de ces stratégies et en dénombre cinq :
- Le repli sur soi : le reclus cesse de prêter attention à tout ce qui ne se passe pas en sa
présence immédiate.
- L’intransigeance : refus de collaborer avec le personnel, ce qui entraîne un enchaînement
de sanctions.
- L’installation : se construire une existence stable en cumulant les satisfactions que l’on
peut trouver dans l’institution.
- La conversion : se mettre entièrement à la disposition du personnel.
- Un mélange : dans la majorité des cas, le reclus veut à la fois profiter des circonstances et
ressortir indemne de l’institution. Il a donc une attitude docile face au personnel et
résistante en présence de ses compagnons.
Les adaptations secondaires ne peuvent néanmoins pas être quantitativement
équivalentes aux adaptations primaires car le poids de l’institution totale est écrasant : malgré

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les techniques de contournement ou d’adaptations, il y a une aliénation totale de la part de
l’institution.

III/ Limites et mise en perspective contemporaine d’institution totale

A) Institutions totales actuelles

Prisons
Avec l’ouverture relative des institutions comme la prison, certains semblent dire que
les prisons ne font plus partie des institutions totales.
Ne pas oublier que c’est un concept opératoire, un idéal-type que l’on peut et l’on doit
repréciser. Pour Rostaing, importance particulière de trois aspects de la notion : cadre
contraignant, détérioration de l’image de soi, relations avec personnels.
1) Cadre contraignant : dimension sécuritaire intense, aucune intimité, fouilles corporelles,
surveillance, limitation des déplacements, multiplication des règles à suivre. Néanmoins,
diminution de l’isolement avec le monde extérieur : ouverture de la prison à des
spécialistes et professionnel.le.s (psy, socio, journalistes) & accès facilité à des objets de
l’extérieur.
2) Dégradation image de soi : techniques de mortification, individu forcé de se défaire de
son moi antérieur (violent & vulnérabilité), processus de reclassement institutionnel, faible
temps pour soi, promiscuité et partage des objets et espaces (« contamination morale » et
« contamination physique »), réduction du champ d’autonomie, infantilisation, humiliations,
perte de crédibilité, signes de déférence, interdiction officielle de cadre hétérosexuel =
remise en question de l’identité sexuelle et sexuée. Adaptations secondaires qui sont
redéfinies par rapport au travail de Goffman : « identités incarcérées » (essayent de se faire
respecter au sein de la prison, souvent un usage de l’agressivité) & « identités décarcérées
» (essaient de continuer à vivre comme hors de la prison)
3) Relations avec le personnel : contacts minimaux mais indispensables pour la sécurité,
rendues difficiles par les situations hiérarchiques et attitudes négatives réciproques.
Relations forcées, non spontanées, publiques. Notion de distance très importante pour
étudier les prisons : permet de ne pas considérer les reclus comme du matériel humain,
distance difficile à maintenir au fil du temps = usage de la hiérarchie pour maintenir les
contacts professionnels. Pour Rostaing l’idée d’antagonisme entre deux groupes distincts
dans les institutions totales (reclus/personnels) n’est pas assez fine et doit être clarifiée :
point de vue interindividuel, grosses tensions internes aux deux groupes qui les
empêchent de former de réelles cohésions.

Institution totale =/= pouvoir total. Goffman définit un but commun aux institutions
totales = gardiennage et contrôle, ce qui est confirmé par les politiques contemporaines et la

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multiplication des prisons, rallongement des peines etc. Période de réadaptation au monde
quand on sort de prison est aussi une preuve que c’est toujours une institution totale

Institution militaire
Même si Goffman ne parle pas des institutions militaires ailleurs que lors de sa
définition, on peut voir qu’il les lie tout de même au fonctionnement des institutions totales.
Jean Sagliot propose une vision interne de ces institutions avec des études faites au sein des
bateaux de guerre français.

Caractéristiques principales de l’institution totalitaire avec des variations plus ou moins


grandes :
1) unité physique des locaux (même bateau/caserne pendant de longs moments) MAIS
lors des permissions/passages à quais sortent du cadre physique uniforme, même s’ils
sont toujours sous le même cadre hiérarchique et bureaucratiques
2) séparation en plusieurs groupes avec hiérarchie forte (ex : officiers supérieurs/soldats
de base) MAIS plus une gradation avec des perspectives d’avenir et de progression qui
brouille les frontières entre eux ET pas de distinction nette entre reclus et surveillants : tous
sont reclus et tous sont surveillants
3) bureaucratie et administration omniprésentes et qui dirigent toutes les instances de la
vie MAIS instances de négociations intégrées aux systèmes administratifs et sociaux qui
laissent des marges d’autonomie. Pas d’adaptation secondaire à l’institution puisque ce
ne sont pas des négociations clandestines.
4) restructuration identitaire autour de l’institution (système de grades et des systèmes
de valeurs) MAIS institution qui admet et reconnaît plusieurs modes de justification de
l’intégration de ladite institution (ex : comptable/joueur/jouisseur/tradi, p.130-131)
p.134 : différence autoritaire/totalitaire/tyrannique à institution militaire laisse des marges
d’autonomie et de liberté ce qui fait que l’on doit piocher dans le registre de l’autoritaire
pour pouvoir combler les lacunes du registre totalitaire (« autorité implique une obéissance
dans laquelle les hommes gardent leur liberté » / production d’une représentation du
monde unifiée et dotée d’une grande cohérence) → institution militaire qui se rapproche
donc plus du mode autoritaire que du mode totalitaire d’Arendt

B) Limites du concept et questionnement

Limites du concept
Reste avez vague à cause de son caractère idéal-typique : puisque les
caractéristiques sont partagées par d’autres institutions/groupes sans qu’elles ne soient des
institutions totales, il faut faire attention comment on utilise cette notion. Ce qui pourrait
sembler être des institutions totales peuvent en réalité plus se rapprocher d’une institution
“autoritaire” (ex : navires de guerre)

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Certaines définitions/observations peuvent manquer de finesse (ex : séparation nette &
antagonismes entre reclus et personnels qui sont en réalités moins deux groupes distincts à
la manière de classes, mais un pêle-mêle d’intérêts et de rivalités inter et intra groupes)
critique de Rostaing ; critique dans article de Jean Ayme (p.268) : 3 groupes dans les
hôpitaux psy plus que deux → patients/infirmiers/médecins

Questionnement
Comment se positionner par rapport à ce concept qui paraît assez total dans la
sociologie des organisations (// socialisation)
Travaux qui lui ressemblent : la thèse vue dans le cours de Ravon (sociologie
compréhensive, premiers travaux à découvrir leurs objets etc) ?
Positionnement méthodologique : est-on obligé.e de s’investir autant que Goffman et
de faire des observations aussi longues (ou comme la doctorante et son implication extrême)
pour pouvoir continuer à faire des découvertes ?

Séance 4 · Les conversions comme produits des institutions (11/10)

Les processus de conversion dans les institutions

1.Introduction : La conversion comme phénomène spontané saisissant les individus.


a.La sens commun de la conversion:
i.La conversion est une transformation radicale de l’individu et de ces choix. Dans un premier
temps conçue sous le modèle religieux, la conversion était perçue comme un évènement
subit, produit d’une crise de l’esprit de l’individu.
ii.La crise mystique : Qu’est qu’une crise mystique : premières études psychologiques du
phénomène de la conversion remontent à la fin du XIXe siècle et au début du XXe. La
conversion était interprétée, dans la perspective des théories d'alors, comme un
remaniement total du champ de conscience, provoqué par l'irruption de forces émanant de la
conscience subliminale (W. James)
b.Le rôle des institutions
i.La position des sociologues et l’idée de socialisation est paradoxale avec la possible
existence d’une crise mystique.
ii.La conversion est une transformation radicale de l’individu, et de ces choix. Thomas
Luckmann, Peter Berger « on peut définir la conversion -politique ou religieuse- comme un
réagencement globale des manières de voir, des manières de faire et des manières d’être. La
conversion est un devenir autre ».
iii.MAIS La conversion s’inscrit dans une temporalité longue, ce n’est pas ‘une soudane prise
de conscience « « une crise mystique », les transformations de la socialisation qu’exercent
les rapports sociaux, les institutions, les milieux sont un transistion lente d’une vision à une
autre du monde.

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iv.La conversion n’est possible qu’avec l’existence d’une structure sociale qui comme le dit
…. « facilite, accrédite et renforce cette conversion ».

Plan
i.Socialisation, processus, trajectoire : Un phénomène à plusieurs cadres théoriques
i.Les deux types de socialisation : P.214- 236 Berger et Luckmann :
ii.G.H. Mead : Autrui généralisé et autrui significatif « qui entoure concrètement, spatialement
et affectivement l’enfant ».

i.Primaire : D’où vient cette force formatrice caractéristique des socialisations primes ?
Luckmann et Berger
1.A cette étape se joue « l’intériorisation », la première étape du vivre en société (« dialectique
sociale » : extériorisation, objectivation et intériorisation).
a.Intériorisation = interprétation d’un évènement comme une manifestation d’autrui chargée
de sens.
b.Cette intériorisation est accompagnée par l’identification de soi. « L’individu s’identifie à
autrui et en même temps s’identifie à lui-même ».
2.Cet autrui qu’il va rencontrer dans cette première étape est celui qu’ils appellent « autrui
significatif ». Ce sont ceux qui encadrent l’individu dans sa prime socialisation, leurs
significations de la situation s’imposent à lui comme réalité objective. Ils médiatisent le monde
pour lui et le modifient tout au long de la médiation.
a.« En d’autres termes le soi est une entité réfléchie, réfléchissant les attitudes adoptées
d’abord par les autrui significatifs envers lui. »
i.Exemple du jeu : « c’est l’adulte qui établit les règles de jeu, l’enfant peut jouer le jeu avec
enthousiasme ou résister obstinément, mais il n’existe pas d’autre jeu… »
ii.Durkheim : Métaphore de l’hypnose, « 1 : sujet passif 2 : Puissance efficace de celui qui
commande »

i.Secondaire : La conséquence d’une division du travail et d’une certaine distribution sociale


de la connaissance (connaissance répartie dans différentes positions de l’espace social).
1.C’est l’intériorisation de « sous-mondes » basés sur des institutions. Tout processus
postérieur qui permet d’incorporer un individu déjà socialisé dans de nouveaux secteurs du
monde objectif de sa société
2.Ces sous mondes sont basés sur des institutions car les « porteurs » des connaissances
spéciales propres à ses « sous-mondes » sont institutionnellement désignés et légitimés.
3.Certaines socialisations secondaires pourraient « ressembler » à des socialisations primaires
par une dimension affective que les institutions essayeraient de développer.

i.Le problème de l’articulation :

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1.Comment est-il possible qu’il y ait quelque chose après la socialisation primaire si celle-ci
est si puissante ?
2.Question de la cohérence entre les deux. La socialisation secondaire ne peut être analysée
qu’à partir de la première

1.La pluralité de la socialisation primaire, vers un déterminisme nuancé.


ii.Parti pris méthodologique pour se situer à « l’infra-individuel » (dispositions, manières de
faire, voir, sentir…)
iii.Différentes instances de socialisation différentes, voire contradictoires. Leurs dispositions
vont s’exprimer ou pas en fonction de la situation présente
1.Être « sérieux » à l’école pourrait ou pas trouver les conditions de s’exprimer dans un terrain
de foot.

1.L’approche interactionniste, une socialisation secondaire qui prend plus d’importance ?


iv.Un regard porté sur la socialisation en train de se faire au lieu que refaire le récit
biographique depuis le point de départ. Dans le chapitre de Boys in White Darmon parle que
les interactionnistes donnent une importance plus forte à la socialisation secondaire en la
dotant de caractéristiques de la première, mais font-ils vraiment la différenciation entre les
deux ?
v.Perspectives, des nouvelles apparaissent quand les antérieures ne suffisent plus à
comprendre la situation (Hughes). Typicalités (Schutz).
i.Rapport conversion et socialisation
c.Les interactions et le monde sociale définissent l’individu, ainsi la conversion n’est possible
qu’avec l’existence d’une structure sociale qui comme le dit …. « facilite, accrédite et
renforce cette conversion ». comme dit plus haut
i. Déjà Durkheim parlait d’une conversion lente, sous une pression graduelle exercée par
l’école.
ii. Pour Bourdieu et Passeron la conversion prend la forme d’une mutation, d’une
renaissance. Pour eux la conversion se fait grâce à des techniques de « déculturation » et de
« reculturation » ((Une altération des valeurs fondamentales et des normes vitales), donc
remplacer l’apparente « ineffaçable » socialisation primaire.
iii. La conversion est donc une resocialisation qui doit désintégrer les effets des
socialisations précédentes. Berger et Luckmann vont appréhender cette conversion sous
l’angle d’une « alternation » ou l’individu va, dans des cas extrêmes, « changer de monde ». Il
survit une socialisation qui le transforme de manière « totale ».
c.Les institutions, le beau rôle pour convertir
i.Definition : Institution: « Un système de relations, qu’il prenne la forme d’un dispositif ou d’un
groupement relève d’une analyse par la sociologie des institutions. D’abord, s’il est réglé et
non laissé au hasard des recompositions et arrangements circonstanciels entre individus, si
les conduites de ses membres sont au moins en partie déterminées durablement par leur

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appartenance à ce groupe, si la préservation des règles et des savoirs faire qui le
caractérisent est un enjeu important pour ceux qui ont à faire à lui, si les mécanismes
d’encadrement et de contrôle des pratiques sont organisés. » Offerlé et Lagroye.
ii.Nous sommes bien sur une définition qui vise à parler des collectifs : pas n’importe quel
type de groupe, un groupe où les relations sont réglées. Ce sont des collectifs où il y a un
poids des conduites sur ceux qui appartiennent au mouvement. Et enfin, un groupe où la
préservation des règles et des savoirs faire est un enjeu, et où les mécanismes
d’encadrement sont organisés. (P. Raséra)
iii. Le rôle centrale des institutions et leurs limites ; Mary Douglas : institutions = «
groupements sociaux légitimés », d’après Darmon elles sont «les instances de socialisation
les plus évidentes pour former et transformer les individus » « une socialisation continue ».
iv.Louis pinto montre qu’il y a ces conditions à la conversion d’un individu par les institutions.
Lahire aussi va montrer que le « matériau humain » va définir la manière dont l’institution va
pouvoir influencer l’individu. Il y a donc une relation directe entre comment l’individu influence
et est influencé par les institutions.
d.Les institutions totales
i.Conversion continue par la vie de couple, institution du mariage au sens très large. Cette
conversion se fait souvent sans conscience, l’individu a l’impression d’avoir découvert qui il
était vraiment (page 93).
ii.Darmon s’intéresse aux « institutions totales » étudiées par Goffman et qui ont un reel
pouvoir de transformation sur les individus (armée, séminaire, petit séminaire, couvent ) (Asile,
1968) : des institutions qui transforment complétement les individus. Mais qui se heurtent
parfois « à la culture importé » on peut parler aussi de l’idée du Robinson utilisé par Darmon,
même sur une Ile deserte, l’habitus, la socialisaton de robinson va guider ses actes.
iii.Michel foucault montre cette transformation radicale avec l’exemple du soldat, « le soldat
est devenu quelque chose qui se fabrique, un pate informe, un corps inapte, on a fait la
machine dont on a besoin » (Surveiller et punir)
Quelques exemples de conversion

i.Le processus de conversion politique des individus.

a.Travaux de sociologie politique sur le militantisme, Lucie Bargel va démontrer que toute
participation au sein d’une institution politique est génératrice de socialisation secondaire.
i.Olivier Fillieule va distinguer trois dimensions de cette socialisation :
1.Acquisition d’une vision du monde.
2.Acquisition d’un savoir-faire et savoir-être
3.La restructuration du réseau de sociabilité
ii.Exemple typique : Le Parti Communiste, « socialisation scolaire communiste » (dispositions
inculquées par acquisition d’une « culture communiste », imposition de modèles de
personnalités militantes, fréquentation assidue des « camarades ».

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iii.Darmon met aussi l’accent sur la susceptibilité des organisations de gauche comme celles
de droite à jouer le rôle d’instance de socialisation, même si les modes et les produits de
socialisation restent différents.

a.Le parti communiste français dans la trajectoire politique de Jacques Doriot :


i.La « vocation communiste » : Kestel nous présente le parti communiste comme un lieu
d’apprentissage (qui permet une certaine émancipation sociale), un endroit qui permet
d’échapper au travail d’usine. En contrepartie l’institution va demander un « engagement en
corps et âme »
1.(Exigence d’intégrer l’armée pour mener des actions subversives, même si c’était à
l’encontre des croyances des individus).
2.« Se comporter en Bolchevik, c’est s’inscrire en rupture avec la légalité de l’ordre politique
établi. » Doriot/Barber vont connaitre longtemps la clandestinité (activités subversives).
3.« La vocation communiste engage le militant dans tout son être : pulsions, affect, croyance
et corps » cependant elle n’empêche pas non plus des stratégies destinées à maximiser le
rendement de l’activité partisane, en contournant les règles de la vocation communiste.
ii.Le non-conformisme d’intellectuels surqualifiés (déshérités) qui donne naissance au PPF.
1.Ces membres vont se caractériser par une « certaine aisance matérielle » et des « difficultés
à trouver leur place dans l’espace social ».
2.Ces intellectuels ont reçu une socialisation primaire bourgeoise, frustration à cause d’une
« mauvaise fortune d’héritage » (décalage entre les attentes subjectives et la position
effectivement occupée dans l’espace social).
iii.La naissance d’un chef : P. 79-105
iv.Conversion sexuelle
b.trois grands types de parcours :
i. Les parcours exclusifs caractérisés par le fait que les lesbiennes n’ont jamais eu de
relations sexuelles avec des hommes. Ces parcours sont les moins répandus compte tenu
des effets de la contrainte sociale à l’hétérosexualité qui conduit les femmes, dans la plupart
des cas, à avoir des rapports sexuels avec des hommes à certains moments de leur vie.
ii. Les parcours simultanés sont plus fréquents que les précédents. Ils concernent des
femmes qui alternent ou ont alterné des relations avec des femmes et avec des hommes.
iii.Les parcours progressifs sont majoritaires et sont marqués par le fait que les femmes ont
eu des relations engagées affectivement avec des hommes
iv. considérer, dans un premier temps de leur vie sexuelle, que le lesbianisme est une « étape
» dans leur processus de maturation. Lorsque l’attirance pour les femmes persiste, les
lesbiennes font alors souvent appel à des conceptions naturalistes de l’homosexualité (« je
suis née comme cela »).
Montre bien des parcours, des étapes vers l’accepation, de la conversion sexuelle donc une
forme de socialisation. Un carriére

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es travaux de Becker concernant les comportements déviants permettent au contraire
d’aborder l’homosexualité de manière dynamique. Chez Becker, la déviance est non
seulement un produit de l’interaction, au sens où l’on n’est pas déviant mais on le devient
dans et par le regard des autres. Surtout, la déviance est un processus (Becker, 1985).
Devenir déviant signifie précisément que l’on ne passe pas d’une identité normale à une
identité anormale brutalement, mais qu’il existe un processus progressif d’apprentissage de
la déviance passant par des pratiques.
a.Entre l’identification du désir sexuel, le passage à l’acte transgressif, la définition de soi
comme homosexuel et la désignation par les autres de sa propre homosexualité, il existe des
variations et des processus de définition identitaires complexes qui prennent du temps. De ce
point de vue, des témoignages et des enquêtes statistiques permettent de mesurer
l’importance du cycle de vie dans les parcours homosexuels qui semblent marqués,
initialement, par une phase de rupture avec le milieu familial ou social d’origine, notamment
pour les homosexuels issus de milieux populaires, puis par la construction d’une sociabilité
fortement marquée par les relations avec d’autres homosexuels (Schiltz, 1997 ; Nardi,
Schneider, 1998 ; Adam, 1999).
b.Se dire Lesbienne, de Chetcuti, le livre montre ce que des femmes homosexuelles
socialisées -comme toutes les femmes- dans un cadre hétéronormé font de leur bagage
hétérosexuel. Natacha Chetcuti édifie ainsi la théorie des pratiques de ces femmes en portant
son attention sur les dimensions subjectives de la mise en question des catégories
dominantes du genre. Se dire lesbienne relève d’un «processus de deshétérosexualisation»
dont l’étape inaugurale est une relation avec une femme qui se dit elle-même « lesbienne » et
qui désigne sa partenaire comme telle. Ainsi, contrairement aux idées reçues, la
représentation de soi comme homosexuelle n’est pas le fruit d’une découverte personnelle et
intime mais le produit d’une relation particulière où une femme défait une autre femme d’une
identité élaborée selon les normes de l’hétérosexualité l’interaction
c.CONCLUSION ET LIMITE
i.Les institutions pourraient donc avoir un rôle très important dans ce processus de
conversion car ce sont des structures potentiellement solides et contraignantes pour
façonner un individu conforme à leur moule.
ii. ii. Cependant plusieurs courants, surtout l’interactionnisme, vont nuancer l’effet
transformateur d’une institution agissant individuellement sur une personne.

Séance 5 · Les résistances aux institutions (18/10)

INTRODUCTION
« On peut (...) appeler institutions, toutes les croyances et tous les modes de conduite
institués par la collectivité. La sociologie peut être alors définie comme la science des
institutions, de leur genèse et de leur fonctionnement » Durkheim

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« l'institution se rapproche de l'idée d'association, c'est un groupement dont les
règlements statutaires sont octroyés avec un succès relatif à l'intérieur d'une zone d'action
délimitante à tout ceux qui agissent d'une manière définissable selon les critères déterminés.
» Weber
Même si Goffman se détache de la psychologie sociale, voici une définition de la résistance :
« La résistance caractérise, en psychologie sociale, l'aptitude qu'ont les êtres humains
à affronter toute situation qui leur paraît illégitime. Elle désigne la possibilité que chacun a de
ne pas se soumettre. Il s'agit d'un phénomène universel que chacun, quels que soient sa
culture, ses groupes d'appartenance, son âge, son genre, sa position hiérarchique ou autre
est capable de mettre en place. »

La résistance serait-elle un moyen de limiter/anesthésier les effets de l’institution sur


nous-même ? Résistance ≠ opposition, qui serait comme plus frontale ? Que sont les
adaptations secondaires ?
Il y a une permanence des résistances, au sein des institutions comme au sein des
institutions totales. En sous texte, le paradoxe c’est la question entre libre arbitre/autonomie/
liberté et le passé incorporé des individus.

I. Résistances aux institutions

A) Pourquoi résiste-t-on ?

· L’acteur et le système, Crozier & Friedberg


L’institution pose des règles mais les acteurs trouvent toujours un moyen de l’adapter.
Il y a une différence entre la règlementation (les règles formelles) et la régulation (les
arrangements que nous faisons avec cette règle). Les individus ont toujours une certaine
autonomie, il n’y a pas de soumission totale au système. Le système d’action concret
correspond à l’ensemble des ajustements et des contournements que les acteurs font subir
à la règle. L’individu possède ses propres enjeux qui peuvent être divergents de ceux
valorisés par l’institution. Il y a une part d’autonomie incompressible

· La construction sociale de la réalité, Berger & Luckmann


Théorie générale de la société, dans les perspectives du constructivisme
phénoménologique (Albert Schütz 1967). La socialisation est à la fois une immersion dans un
monde vécu & une connaissance forgée sur ce monde. (≠ Bourdieu, ici on part des
interactions). La relation affective est clé : adaptation des règles est renforcée par l’absence
d’affection vis à vis de l’institution. ≠ relations entre ses parents & ses profs (autrui significatif)

· La culture du pauvre, Richard Hoggart

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Contradiction entre les socialisations (institution familiale et scolaire, internat et idée
qu’il faut sortir d’une des institutions - exemple d’Annie Ernaux). Schizophrénie heureuse de
Lahire

B) Déviance et résistance

· Scott / Newbay
Les dominés partagent des textes cachés invisibles aux dominants et reprennent en
public le discours imposé par le dominant. Le texte public trouve une justification idéologique
(les dominants assoient leur pouvoir en imposant cette justification). Le texte caché
correspond à l’ensemble de gestes et de pratiques (fraude, sabotage dans le travail d’usine),
s’élabore dans un nombre restreint avec des proches, loin des dominantes. Existe également
un texte déguisé, les dominés ont un discours à double sens : comptine, fable, ACAB,
sifflement anonyme etc. C’est également le cas au théâtre ou des les écrits, Demain le feu de
Baldwin (stimulant imaginaire, culture populaire du mythe de vengeance millénariste,
malédiction etc). Quand ce texte devient public on peut parler de révolte.

· Impossible burdens : White institutions, emotional labor and Micro-resistance Louwanda


Evans (2015 - Social problems)
“potential responses to these racialized practices are constrained by an
institutionalized ideological frame that minimizes and denies the relevance of race and racism,
and both tacitly and explicitly asserts institutional neutrality at least and racial equality at
most.”
→ Position contradictoire : participer à une institution qui les objectifis et les « racise » & en
même temps jouer le jeu de minimiser l’existence de ce racisme

Howard Becker parle de la déviance : lorsqu’on désobéit à la règle et que l’on est
perçu comme tel. Cela varie d’une société à une autre, en fonction d’où nous sommes et
avec qui. Ce n’est pas l’acte en lui-même qui est déviant mais la manière dont il est perçu. La
désobéissance, la déviance nécessite un apprentissage via la socialisation.
→ Peut-on dire que la déviance est une forme de résistance, ou que la résistance est une
forme de déviance ? Même idée d’apprentissage et dépend du contexte.

II. Résistances aux institutions totales

A) Des profils particuliers

· Institution basée sur le contrôle


Les individus sont étiquetés avant même de venir. Ce sont des malades, des
prisonniers... Les comportements, les interactions avec eux, prennent donc déjà en compte
cet étiquetage de la part des gardiens. Caractéristiques de l’institution totale sont donc
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basées sur cette volonté de contrôle des reclus : coupure du monde extérieur, surveillance
totale, prise en charge des besoins, vision stéréotypée des deux groupes. Dispositif limitant /
prévoyant les résistances. Les voies de dépersonnalisation : Le ricochet : laisser croire au
reclus une grande marge de manoeuvre pour le sanctionner
L’embrigadement : l’emploi du temps empêche d’avoir du temps pour soi au reclus.
Particulièrement pointilleux en institutions totales (Prison pour mineur : “Un” on enlève la
chemise de nuit, “Deux” on la plie, “Trois” on fait le lit)

· Contrôle paradoxal
Rapport stéréotypé et hostile entre les reclus et les gardiens : pas de relations
affectives → favorise la résistance aux institutions, car il y a une part de l’absence de relation
affective avec des gens représentant cette institution (les reclus étant distant avec les
gardiens), et plus généralement, il y a une hostilité de la part des reclus envers l’institution.
La multiplication des règles, nous dit Crozier, crée des situations d’ajustements, ce qui
renforce ce non-respect des règles en général. Le reclus profite de ces contradictions pour
pouvoir agir plus librement. De plus, le gardien, qui doit faire respecter les règles, a d’autres
enjeux que le simple respect des lois, il veut que son travail soit le plus agréable possible.
(Ex : gardien qui dort la journée et qui se laisse réveiller par des malades compatissants).

B) Adaptations secondaires

· Comment résister ?
Résister dans une institution totale, c’est résister aux processus de mortifications de
celle-ci, à la tentative de sa part de retirer l’identité du reclus. *Adaptation secondaire : toute
disposition habituelle de l’individu d’utiliser des moyens défendus ou d’atteindre des buts
proscrits
Deux types d’adaptations secondaires :
- Désintégrantes : briser la bonne marche de l’institution
- Intégrées : accepte sans faire pression
Utilisation des lieux :
- zones franches
- réservés
- isolés
Crée les conditions de l’adaptation secondaire par l’utilisation de matériaux Utilisation des
objets :
- Déformation de l’objet
- Utilisation de celui-ci à des fins non prévues

· Résistances paradoxale

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Exploitation du système hospitalier : - working the system, nécessite une
connaissance du système hospitalier (Exemple : prendre la nourriture dans sa chambre
quand elle est transportable, voir des gens de l’extérieur)
Exploitation des affectations, ceux qui sont à la cuisine ramènent de la nourriture, des
reclus font tout pour aller au service infirmier pour avoir un rapport personnalisés avec
certains gardes et infirmières. Exemple de Primo Levi sur les survivants d’Auschwitz
Deux autres types de résistance qui ne nécessitent pas de connaître l’endroit :
l’intransigeance et le repli sur soi, qui ne fonctionnent pas. Parce que pour l’intransigeance, il
faut un rapport de force qui est clairement en défaveur du reclus, et on peut rapidement venir
à bout du repli sur soi par la force. Donc, pour que l’adaptation secondaire réussisse, il faut
qu’il y ait un minimum d’intégration et de connaissances des lieux de la part des reclus.

CONCLUSION
Cependant, même si l’individu a une certaine autonomie face aux institutions, totales
notamment, c’est pour revenir à un antériorité. Ainsi, le reclus veut retrouver son identité
antérieure à celle du reclus, celle que l’institution lui a privée auparavant. Il y a donc une part
de liberté chez l’acteur, mais toujours en rapport à cette socialisation antérieure à l’institution,
qui crée une tension entre les deux institutions.
Mais, cette résistance requiert un minimum d’insertion dans l’institution, pour la connaître, et
profiter de ses failles.

Séance 6 · Enquêter dans des institutions difficiles d’accès (25/10)

Séance 7 · Unité et diversité des institutions scolaires (08/11)

L’école est un objet familier du sociologue : son évolution historique lui a accordé une
place de plus en plus grande dans le processus de socialisation. Ses effets sont
indissociables de la socialisation primaire familiale.

A la suite de Durkheim, nous pouvons affirmer qu’à l’école se joue l’intériorisation de


normes et valeurs sociales : c’est ce qu’il nomme l’effet “socialisateur” de l’école.. La
littérature sociologique nous a appris une chose : l’institution scolaire, en tant que lieu
incontournable de l’intériorisation de normes sociales, ne constitue pas un ensemble
homogène, il convient alors de parler d’institutions scolaires au pluriel. Nous entendons ici
institution scolaire comme une institution s’inscrivant dans le grand ensemble du système
éducatif : lycées privés, publics, collèges, université, etc. En effet, il semble que selon le type
d’établissement et le parcours scolaire suivi, l’étudiant ne fait pas face aux mêmes processus
de socialisation.

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L’intitulé du sujet porte sur “les” institutions scolaires, là où on a l’habitude d’entendre


parler de l’institution, au singulier. Nous sommes donc amenés à réfléchir, comme susdit, à
ce qui fait qu’on parle d’institutions scolaires au pluriel. Autrement dit, à ce qui fonde
l’hétérogénéité de la notion d’institution scolaire. Il s’agit de s’intéresser aux institutions en
tant que telles, donc à leur fonctionnement, aux logiques sous-jacentes. Comme rappelé
dans l’intitulé du sujet, la socialisation scolaire apparaît comme le résultat premier de
l’institution, et souvent même elle constitue son but. En effet, les élèves apprennent au sein
de leur parcours dans le système éducatif un ensemble de normes, valeurs, etc. Considérant
l’importance de cette socialisation scolaire, nous la prendrons comme “fil rouge” de notre
réflexion. Ainsi, il s’agira d’étudier la diversité - et au delà la spécificité - de l’institution scolaire
sous le prisme de la socialisation. Dès lors, nous entendons “diversité” comme l’existence de
processus de socialisation scolaire différents selon le type d’établissement fréquenté.
Pourtant, si on considère que chaque institution scolaire a un moyen totalement différent de
socialiser ses élèves, la notion d’institution scolaire au singulier est vidée de sa substance,
elle n’a plus d’intérêt. C’est là que réside l’enjeu principal de l’exposé : dans quelles mesures
existe-t-il des fonctionnements socialisateurs communs à toutes les institutions scolaires
(prépas, lycées pro, écoles maternelles, lycées privés, etc.), où réside leur spécificité ? En
somme, quelles sont les spécificités de chaque institution scolaire en termes de socialisation
(en quoi elles diffèrent) et quelles logiques permettent de les réunir sous une seule notion ? Il
ne s’agit donc pas ici de traiter des inégalités scolaires comme enjeu principal, mais plutôt
d’étudier la forme que revêt le rôle socialisateur de l’institution scolaire, ainsi que son contenu
(quelles normes sociales y sont véhiculées ?).

Bien entendu, il faudra revenir sur la construction historique de la notion même


d’institution scolaire, laquelle nous le verrons n’a pas toujours existée. En effet, l’institution
scolaire en France a subi des mutations, surtout depuis le XIXème, en termes de rôle
socialisateur de l’école. D’où le “passées et présentes”. La question de la diversité et de
l’unité de l’institution scolaire revêt un enjeu historique puisque l’importance de la socialisation
scolaire n’a cessé d’évoluer. Malgré ces mutations, il convient de réfléchir une fois encore à
ce qui fait la spécificité de l’institution scolaire, d’en souligner s’il en existe des “invariants
structurels”.

Dans quelles mesures peut-on pertinemment parler de l’institution scolaire au


singulier pour englober des institutions aux principes socialisateurs différents et ayant
évolués ?

I. L’évolution des institutions scolaires : de la dichotomie du système scolaire à


l’unification des socialisations scolaires ?

A) L’Evolution pédagogique
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Durkheim écrit sur l’éducation dans un contexte où l’adoption des lois républicaines,
sous l’impulsion de Ferry, rendent l’enseignement primaire laïc et obligatoire : déjà, volonté de
créer un “sentiment d’appartenance” à l’idéal républicain contre les particularismes culturels
dans une France divisée (voir travaux d’historiens). Sous l’angle de la “sociologie morale”
dans L'Éducation morale, il s’intéresse aux effets produits par la socialisation - selon lui
contrainte sociale. Dans L'Évolution pédagogique en France, il livre une histoire du système
d’enseignement, de l’époque carolingienne du VIIIe à la fin du XIXe; son ouvrage est donc
essentiel pour appréhender les mutations de l’école pré-XIXe. Selon lui, l’école est liée à l’état
général de la société : il convient donc de relier les mutations de l’école à celles de la société.
La socialisation scolaire selon lui véhicule les normes et valeurs en vigueur dans la société.
Passage de l’école catholique à la culture humaniste, laquelle laisse place à l’âge
classique. Au-delà de cette contingence des savoirs certifiés par l’école, Dk insiste sur le rôle
accru de socialisation exercé.
Expansion de la scolarisation dans l’enseignement primaire déjà assurée au début du
XXe. Dans les collèges et lycées, n’a cessé de progresser depuis, surtout dans les 1960s.

P. Merle, La démocratisation de l’enseignement. La loi Guizot de 1833 met en oeuvre


la première mesure de “démocratisation”. Puis de plus en plus la gratuité s’étend et s’impose
dans les institutions scolaires, annonçant la future unification de la socialisation scolaire à
l’école primaire. Le clivage demeure entre le primaire (“l’école du peuple”) et le secondaire
néanmoins. P. Merle confirme les différences persistantes de socialisation scolaire entre les
établissements des deux “réseaux” en affirmant : “le mythe de l’école républicaine de Jules
Ferry tire son aura et son prestige de l’ignorance de cette organisation de la société en
classes”. Le système en deux réseaux s’achève en 1963 avec la réforme Fouchet-Capelle
qui crée les collèges d’enseignement secondaire, ouvrant la voie à une future unification des
institutions scolaires du secondaire.

B) Du cloisonnement à l’unification des institutions scolaires : vers une


socialisation commune ?

A la fin du XIXe, débat sur la comparaison des systèmes français et allemand. Les
industriels dénonçaient la formation insuffisante de la main d’oeuvre là où les intellectuels
déploraient le manque de recherche universitaire. Histoire du système français au XXe
marquée par un triple mouvement :
Augmentation de la scolarisation qui répond à la demande sociale d’éducation qui
augmente aussi
Diversification des voies de formation : enseignement technique [loi Astier en 1919] se
développe puis “enseignement moderne” à côté d’un “enseignement classique”

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Unification post-2GM conduisant à la disparition des “petites classes de lycées” puis création
du collège unique en 1975 (loi Haby). Cela conduit à la massification du secondaire puis à
terme du supérieur.

On peut en déduire quelques aspects de l’évolution de l’institution scolaire en France.


D’abord, à la fin du XXe siècle, la tendance semble être à l’unification des différents parcours
scolaires, donc au rapprochement des socialisations scolaires des élèves, qui suivent un
parcours sensiblement proche au moins jusqu’à la fin du collège, en acquérant un “socle
commun”. Par exemple, le collège unique a pour objectif de fixer un tronc commun
d’enseignement et ainsi de mettre fin à la frontière entre le primaire et le secondaire (M.
Cacouault, F. Oeuvrard). D’autre part, entre l’école de la fin et celle du début du XXe, on
observe la persistance (et le renforcement) de la socialisation scolaire ayant pour objectif
premier l’intériorisation d’un “socle commun” de normes, de l’idéal républicain par exemple.
La socialisation scolaire est censée homogénéiser et pallier aux trop grandes différences de
socialisation familiales. L’allongement des scolarités va dans ce sens : en généralisant l’accès
à l’enseignement secondaire, il y a une volonté d’unifier les différents établissements et les
institutions, tout en diversifiant en leur sein les filières. L’école véhicule ainsi une culture
élémentaire : avec l’apparition des manuels depuis 1890, des auteurs largement reconnus
comme des constructeurs de l’identité culturelle française comme A. Fouillée (G. Bruno).
Objectif : maîtriser l’écriture, l’orthographe, le calcul, les rudiments en sciences naturelles,
géographie et histoire. Loi Debré (1959) instaure des contrats d’associations entre Etat et
écoles privés : 95% de ces dernières sont sous contrat ce qui implique le même programme
que dans le public. La loi va dans le sens d’une uniformisation d’un “socle” de la socialisation
scolaire, tout en ne niant pas les différences propres à la socialisation religieuse.

Dichotomie traditionnelle du système scolaire français


Les lois Ferry consacrent une double séparation : entre les filles et garçons puis entre
les milieux sociaux. Enseignement spécifique des filles jusqu’en 1924 : souhait de réduire
l’influence de l’Eglise. Accès au lycée très restreint (enseignement du latin fait figure de
barrière → socialisations très différentes), le bac reste un “certificat de bourgeoisie” (E.
Goblot). Années 1960 : création des collèges en 1963 puis homogénéisation des parcours
scolaires avec la loi Haby (1975) qui instaure le collège unique. Volonté de réduire les écarts
en amenant un max de jeunes dans l’enseignement général (non technique) → réduction des
écarts inter classes dans les socialisation scolaires. Puis volonté de porter 80% d’une classe
d’âge au baccalauréat. Mais le système scolaire reste marqué par des clivages importants
qui se traduisent par des clivages en termes de socialisation scolaire : filières générales /
filières pros ; Université / grandes écoles.

C) L’évolution du rôle socialisateur de l’institution scolaire

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V. Isambert-Jamati a beaucoup analysé les rapports de force sous-jacents à cette
unification des premières années de l’enseignement secondaire. En effet, il y a eu de
nombreuses résistances, mettant en exergue la rigidité de l’institution mais aussi le rôle
important joué par les acteurs dans ses mutations. Dans Les Savoirs scolaires elle prend
pour exemple la réforme de 1902 à laquelle a précédée une vaste consultation pour
connaître les volontés des acteurs. Elle a établit une typologie des prises de positions
intellectuelles, en lien avec les positions sociales de chacun. Certains étaient partisans de
l’exclusivisme greco-latin, d’autres d’une filière moderne progressif, d’autres voulaient la
disparition totale du grec et du latin, etc. Le rôle (donc aussi socialisateur) de l’école dépend
des attentes des acteurs et des rapports de forces.

Passage de l’inculcation de l’appartenance à la Nation dans une France rurale divisée,


adhésion à l’idéal républicain via des manuels (voir travaux d’historiens). Point commun à
l’ensemble des élèves (?) : Felouzis parle de consumérisme scolaire intériorisé (rapport
utilitaire au savoir). Cela tranche avec le dilettantisme détaché des héritiers des années 1960
mais même si certains semblent le regretter, il s’est étendu à l’ensemble des élèves. Cette
attitude renvoie à une intériorisation des valeurs sociales répandues : efficacité, rentabilité,
stratégies. Les lycéens manifestent ainsi leur socialisation scolaire en rapport avec les
transformations de l’institution : l’école est une institution de masse pensée comme
fonctionnelle et efficace pour aborder l’entrée dans la vie adulte. Nouvelle norme inculquée :
le rapport utilitaire, avec le discours méritocratique sur la réussite, etc.

PASQUALI ET LIGNIER : définition des normes d’excellence. Etudie 2 types


d’excellence décalée par rapport à l’excellence dominante. Il étudie donc la formation d’une
excellence méritocratique, lié à une relative « ouverture sociale » grâce à la formation de
classe sup-expe (des classes dans les IEP qui recrutent les meilleurs élèves de ZEP). Et une
excellence psychologique, créé dans les collèges, le recrutement des élèves se fait grâce un
test de QI, pour former des classes d’élèves les plus doués : les classes IP.
Le développement de ces nouvelles formes d’excellence est permis par plusieurs
facteurs propres à l’organisation de l’institution.
Les dynamiques de décentralisation et d’autonomisation des établissements, avec un
renforcement des compétences des proviseurs donnent à ces acteurs des libertés dans la
réforme de l’institution. On y voit d’abord un évolution du rapport au métier des enseignants.
Avec ces nouveaux modes et formes d’éducation, ils peuvent sortir de leur « routine ». Ils
perçoivent les projets comme un engagement social utile et peuvent même mobiliser leur
investissement comme une ressource, un faire valoir pour leur carrières.
L’analyse de Pasquali et Lignier montre bien l’évolution encore récente de l’institution, jusque
dans la forme que peuvent prendre les enseignements.

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Mais cette évolution possible tient dans le fait que l’institution scolaire est, «
morphologiquement » très diverse et segmentée (différents échelons, etc.) , ce qui laisse une
grande liberté aux acteurs et aux institutions au sein de l’Ecole, avec un grand E, pour «
subvertir » les normes dominantes que défend l’institution, au singulier.
C’est ce qui fera l’objet de notre seconde partie.

II. Les persistances de socialisations différentes selon les institutions scolaires


fréquentées

Malgré la tendance à l’unification des socialisations scolaires primaires susdite,


persiste des différences majeures en termes de socialisations scolaires d’un établissement un
autre : l’élève ne se voit pas inculquer les mêmes normes et valeurs, le même rapport au
savoir, etc., selon l’établissement qu’il fréquente. Parfois, cela dépend des caractéristiques
intrinsèques à l’établissement, parfois de la population qui le fréquente, parfois du rapport de
l’élève à son institution envers laquelle il peut exercer des résistances, amenuisant son effet
socialisateur, ce qui questionne la réalité de l’unification des socialisations scolaires
mentionnée précédemment.

A) Les résistances à l’institution scolaire : des différences entre les curriculums


formel et réel

Dans La socialisation de Darmon : On trouve dans l’institution scolaire à la fois la


famille (présente sous forme incorporée dans l’enfant), des professionnels de l’enfance et un
réservoir de groupe de pairs. Ainsi l’institution scolaire peut être considérée comme la plaque
tournante de la socialisation primaire, à la fois institution de socialisation spécifique et espace
d’articulation des autres formes de socialisation, voire même institution évaluatrice des
produits des autres instances de socialisation.

Évoquer le rapport avec la socialisation familiale. Les résistances à l’institution scolaire


peuvent prendre deux formes antagonistes, lesquelles se retrouvent toutes deux sous le
“rejet” de l’institution scolaire classique : dans tous les cas, le rôle de la famille est primordial
dans ces résistances. Là où cela nous intéresse, c’est que ces résistances nous permettent
d’étudier la socialisation scolaire sous l’angle de la “réception” : si a priori chaque élève est
socialisé selon les mêmes critères, avec les mêmes objectifs alloués aux enseignants, la
réception et le rôle de la famille prennent parfois le dessus et les socialisations scolaires
apparaissent très différentes d’un individu à l’autre, voire d’un établissement à l’autre.

Exemple de résistance avec P. Willis, L’école des ouvriers : L’inculcation des normes
dominantes par la socialisation scolaire n’est pas passivement absorbée. Dans une étude
menée sur les garçons de la classe ouvrière dans la région industrielle des Midlands, Willis

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montre qu’ils opposent une résistance culturel (chauvinisme masculin, écarts de conduite,
goût des blagues, argot). Cette résistance fait obstacle au fonctionnement normal de la
socialisation scolaire (en Angleterre : devenu une crainte nationale, sujet médiatique). Face à
leur échec programmé à l’école, ils ne jouent pas le jeu de l'institution, des “fayots” en optant
pour la contre- culture des “gars” : anti-école, culture d’atelier, etc. Ainsi à l’école se
développe une autre socialisation que la socialisation scolaire voulue par l’institution.

B) Les institutions scolaires sont pour la plupart encore marquées socialement


(conséquence des inégalités…)

L’école est une institution au coeur des intérêts sociaux des familles et de leur
stratégie de reproduction. Existence d’un “marché scolaire” dû à la concurrence des
différents établissements, avec la disparition de la carte scolaire apparue en 1985 au profit de
la désectorisation. La carte scolaire fut en réalité “assoupie” par Sarkozy (promesse de
campagne) avec des possibilités de dérogations. Cela peut être la conséquence des
“stratégies”, mises en exergue par exemple par A. Van Zanten, créant des “écoles de la
périphérie”, socialement très homogènes, où les enseignants doivent s’adapter à la
population non mixtes d’élèves qui les fréquentent. Elle met ainsi en exergue que dans un
lycée défavorisé, les attitudes et méthodes d’apprentissage ne seront pas les mêmes que
dans un lycée favorisé. En outre, le contenu de ce qu’on leur enseigne, a priori identique, est
en fait très différent, que ce soit dans le rapport au savoir, etc. : il s’agit bien de socialisations
différentes entre deux établissements a priori identiques. Les divergences sont multiples : à
l’intérieur même des lycées entre les filières, entre public et privé, entre enseignement général
ou professionnel, etc.

Dans les institutions dominantes, concentration d’enfants de la classe dominante car


concordance avec la socialisation scolaire. Bourdieu parle d’homologie entre structures
objectives et structures subjectives. Pour la Noblesse d’Etat, il y a beaucoup de normes ou
de valeurs “allant de soi” véhiculées par la socialisation scolaire. Les “attendus du jugement”
sont liés à l’origine sociale ainsi que le langage scolaire proche du langage de la classe
dominante. Les individus perçus comme étant “à l”aise” avec les attendus scolaire n’ont ce
rapport familier avec les enseignements qu’en raison d’une congruence entre la socialisation
familiale (à la culture) et ce qui est appris à l’école. Les “attendus du jugement” (donc la
classification par les profs) semblent plus fortement lié à l’origine sociale que la note dans
laquelle ils s’expriment. Jugements des profs procèdent d’une connaissance directe et
prolongée de la personne : hexis corporelle, ensemble d’indices diffus, apparence physique,
vêtement, maintien, manières…. A l’école s’opère une naturalisation d’un classement social
en un classement scolaire, applicable légitimement par les enseignants, sans que ce
processus soit rendu visible et soit appliqué consciemment. Les agents ont incorporés cette
croyance de réaliser une classification scolaire (sauf que c’est faux) ce qui permet au système

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de se maintenir et de continuer à faire ce détournement de sens de la classification. Autant
de raisons qui expliquent qu’on retrouve par exemple plus de jeunes de classes dominantes
au sein des institutions qui valorisent le plus cette culture dominante comme les classes
préparatoires ou les grandes écoles. Par exemple, M. Darmon explique l’abandon en classe
prépa en partie par l’origine sociale et l’absence des dispositions requises chez les élèves de
milieu populaire.

C) Ce qui met en exergue dans les établissements des socialisations différentes

Élise Tenret a montré que les élèves des sections de techniciens supérieurs sont
moins enclins à adopter des discours méritocratiques et y opposent un discours de
reconnaissance des mérites professionnels. D’un autre côté, les élèves de prépa affirment
que l’école récompense leurs efforts mais aussi reconnaissent le poids dans le parcours du
milieu familial. Ce que valorise ces élèves semble dépendre de ce que valorisent leurs
professeurs, à savoir des choses très différentes dans ces deux institutions scolaires aux
antipodes. D’un côté, on valorise le savoir-faire manuel, le mérite professionnel, le fait de
trouver un emploi stable et bien rémunéré. De l’autre, on adopte plus facilement un discours
méritocratique portant sur le travail intellectuel, bien que conscient de la reproduction des
inégalités.

A ce titre, C. Baudelot montre à propos des élèves de LEP que leurs conceptions de
la réussite dépendent de leur position et de leur passé scolaire. Il distingue ceux qui veulent
“avoir” parce qu’ils n’ont rien et ceux qui veulent “être”. Dans les lycées technologiques, les
élèves sont moins enclins à parler d’épanouissement personnel, ont une conception plus
utilitaire, emprunte d’une conscience des nécessités de la vie (salaire). Pour tous les lycéens,
le métier est la première chose qui entre en ligne de compte, mais il est qualifié différemment
(rarement “plaisant” pour les filières technos alors qu’il peut être “enrichissant” ou
“épanouissant” pour les filières générales). Entre fille et garçon également, la réussite n’est
pas abordée de la même façon également. On peut alors noter des différences dans les
socialisations scolaires au lycée mais aussi avant car l’auteur rappelle que ces discours sont
le fait des parcours scolaires des élèves,, par le biais du discours des enseignants, à de
nombreux niveaux.

M. Darmon étudie les processus de socialisation formelle et informelle à l’oeuvre dans


les classes préparatoires d’un lycée de province en comparant scientifiques et économiques.
La socialisation, par l’action des enseignants, est intense sur les aspirations des étudiants
préparationnaires. Elle instaure une rationalisation du temps, un rapport au temps très
particulier qui n’est pas à l’oeuvre chez les étudiants d’université. Thèse de l’enfermement
symbolique et temporel des préparationnaires de Bourdieu dans La Noblesse d’Etat.
L’institution préparationnaire est un apprentissage du temps, dans une logique d’urgence.

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Bourdieu : “usage intensif du temps”. Impression d’écoulement rapide du temps. L’urgence,
routinière, est apprise comme régime de vie, laquelle est minutée, rythmée de la même
manière chaque jour. Les dominants sociaux dominent temporellement. Correspondance
triple entre origine sociale, rapport au temps et niveau scolaire. Le cadre d’apprentissage se
caractérise également par un enfermement temporel, créé par l’intense accumulation des
travaux et devoirs. La prépa enseigne des dispositions sociales réflexives et “méta”,
spécifiques à ceux chargés d’exercer le pouvoir. Cela crée des inégalités entre ceux qui y
sont préparés de longue date et les autres qui résistent ou empruntent la voie de l’exit (voir
pour mettre dans la partie “résistance”). L’Ecole forme donc un habitus dans dans lequel sont
transposés les structures fondamentales du système scolaire. Analyse de l’institution
préparatoire comme lieu de sociogenèse des habitus, en tant qu’institution de “fabrication
d’une jeunesse dominante”. Volonté d’”éviter la fac” ou se “former dans des bonnes
conditions” avant de rejoindre l’université. C’est l’épreuve et la façon d’apprendre qui
différencie et pas forcément le contenu des enseignements. La formation d’une noblesse
avec un fonctionnement propre et une consécration des élèves qui en ressortent.

P. Bourdieu, S. Beaud (“Sur certaines contradictions de l’université d’aujourd’hui”). Ils


s’intéressent aux différences (y compris en termes de socialisation) que revêtent les
institutions scolaires. Illustration avec les classes prépas (bien que plurielles elles ont des
fonctionnements équivalents) et l’université. Les classes prépas, institutions très intégratrices
(encadrement extra-scolaire), apprentissage d’une autre gestion du temps : l’urgence. Le
savoir est enseigné pour l’esprit critique et l’érudition. Cela a donc tendance à en faire “des
écoles de cadres”. L’étude comparée permet de faire émerger les visions différentes du
monde, les dispositions différentes transposées et ce qui fait la distinction et la valeur
symbolique des écoles élitistes. La figure du prof diffère grandement selon la prépa ou la fac.
Se développe une relation d’allure patrimoniale en prépa (beaucoup d’heures avec le prof qui
enseigne parfois plusieurs matières), alors que la fonction professorale est atomisée à la fac.

Prépas Université

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-Tâches pédago par 2 ou 3 Atomisation de la fonction prof


profs -Discours : étudiants doivent trouver ce qu’il leur convient
- imposition des savoir - repoussoir des pratiques de l’enseignement secondaire
(quantité contre qualité) -peu de temps avec leur travail de recherche.
- encadrement continue, « laxisme » pédagogique en réponse à la situation objective
incitation au travail des facultés
- beaucoup d’étudiant donc baisse de la demande de
Correspond le public le plus travail
favorisés à l a f o i s - apprentissage comme entreprise individuelle
socialement et scolairement
Organisation la moins capable d’obtenir un fort rendement
scolaire : public très dispersé.

Transition : Si les socialisations sont différentes entre ces institutions, il n’en demeure pas
moins que des auteurs comme Lorenzo Barrault dans Les rapports à l’institution scolaire de
familles populaires dans les mondes ruraux contemporains ont montré que la socialisation
scolaire était puissante dans tous les cas. Ce dernier a par exemple mis en lumière la
redéfinition des rapports des familles populaires rurales à l’école : ce qui ne change pas, c’est
qu’il y a socialisation scolaire, et celle-ci prime de plus en plus sur les socialisations familiales.
Cela s’explique notamment par le fait que “l’école est une institution au coeur de leurs
intérêts sociaux”. C’est ainsi que les “enfant de la démocratisation” ont subi la
désouvriérisation sous l’influence de la socialisation scolaire (Beaud, Pialloux, Retour sur la
condition ouvrière, 1999). Ce rapport quasi “inébranlable” de l’Ecole avec chaque enfant
nous incite à aller plus loin et à voir que malgré des persistances et résistances face à la
“machine scolaire”, cette dernière regroupe des “éléments” invariants d’une institution
scolaire à l’autre.

III. Dès lors, peut-on trouver un dénominateur commun à ces institutions scolaires
en termes de socialisation ?

A) Le rapport scriptural-scolaire

Bernard Lahire est un spécialiste de la pratique écrite à l’école et de ses implications


sur l’apprentissage scolaire. La réflexion dans La raison scolaire est approfondie. Il retrace
dans “Forme scolaire, culture écrite et dispositions réflexives” l’histoire de la “forme scolaire”
des écoles élémentaires de l’Ancien Régime jusqu’à Ferry. La “forme scolaire” n’est pas un
invariant structurel, universel et applicable partout : il est situé en France moderne et
contemporaine. Son analyse du rapport “scriptural-scolaire” est restreint au rapport de la
langue française avec l’institution scolaire française. Il rappelle que l’école s’est
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progressivement constituée comme activité particulière : un lieu et un temps séparé
d’acquisition d’un savoir, à la différence des autres espaces sociaux : elle dispose de ses
normes et valeurs. Cette différenciation passe aussi par la valorisation de la culture écrite et
de formes sociales particulières. L’histoire peut ainsi permettre d’expliquer l’échec de milliers
d’enfants aujourd’hui qui ne parviennent pas à surmonter les exigences scolaires. Étudiant les
élèves en difficultés de CP aux lectures de jeunes étudiants, en passant par la production
écrite des écoliers, subsiste un point commun : le regard sociologique est porté sur la
situation d’étudiants de milieux défavorisés. Cela permet d’expliquer l’échec scolaire comme
l’effet de la difficulté partagée par tous les élèves à établir le rapport scriptural-scolaire au
langage qui corresponde à l’habitus associé à la classe sociale dominante. Une des
premières caractéristiques de l’école peut en être déduite : ce rapport scriptural-scolaire
correspondant à l’habitus de la classe dominante, distant du rapport pratique au langage des
classes dominées. De même, la forme du pouvoir est propre à l’institution scolaire dans son
ensemble, reposant sur l’autorité légale-rationnelle assise sur des règles explicites et une
compétence reconnue du professeur. Parfois cette compétence et donc cette autorité peut
être remise en cause par des élèves, mais elle est reconnue en tant que norme de l’institution
scolaire. Ce sont les résistances à la forme scolaire, qui ne la remettent pas en cause.

B) L’éducation prisonnière de la forme scolaire ? Lahire, Thin et Vincent

Volonté de répondre à la question “qu’est ce que l’école ?” donc quelle en est la


forme. Il y a eu des variations, des oscillations de la forme scolaire. Il y a eu d’autres écoles
que les écoles chrétiennes, puis celles-ci se sont modifiées au XIXe : pourquoi ne pas parler
des formes ? Rupture avec l’école romaine, grecque, et religieuses du MA.

L’objet du livre est d’observer l’extension et la généralisation de la forme scolaire dans


les processus éducatifs. Ils reviennent sur la définition de la “forme scolaire” dans la première
partie “Sur l’histoire et la théorie de la forme scolaire”. Organisation de l’éducation qui se
caractérise pars :
-autonomisation de la relation d’éducation entre un professeur et l’enfant
-instauration d’un lieu spécifique où toute parole non scolaire est exclue : règne le silence,
l’ordre
-instauration d’un temps spécifique de l’éducation avec organisation rationnelle du temps,
répétition d’exercice, emploi du temps
-une culture de l’écrit très prononcée

La forme scolaire est une “configuration historique particulière” et instaure de fait un


mode de socialisation particulière. La forme scolaire apparaît en homologie structurale avec
les formes scripturales-scolaires selon Lahire. Le livre se demande, c’est là qu’il nous
intéresse, si la forme scolaire envahit tous les processus éducatifs, dans toutes les institutions

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scolaires. Le mode scolaire de socialisation s’est imposé à comme mode dominant. Ainsi,
même les dispositifs d’accompagnement scolaire, le système éducatif en Grèce, les
résistances à l’école, les attitudes familiales face à l’école, sont influencés par la forme
scolaire en consacrant un temps spécifique à l’éducation, en valorisant la culture écrite, etc.
On retrouve alors ces caractéristiques de la forme scolaire dans à peu près l’ensemble des
processus éducatifs en France. D. Thin va jusqu’à parler d’une “scolarisation de la périphérie
de l’école”. Sans être un invariant structurel, ces carac de la forme scolaire sont des
invariants dans l’institution scolaire française depuis au moins l’Ancien régime et l’école
élémentaire. La forme scolaire survit aux institutions scolaires et c’est pourquoi elle constitue
un caractère récurrent de ces institutions dans la durée.

La forme scolaire est-elle discutable ou définitive ? Plusieurs sociologues comme M.


Hardy analysent les difficultés scolaires des élèves canadiens comme résistance à la forme
scolaire et la socialisation liée. M. Eliou montre que dans l’enseignement grec, on observe un
érosion de la forme scolaire d’un côté, une prolifération de l’autre. B. Lahire lie également la
question de la forme scolaire et les rapports scripturaux-scolaires avec les échecs de miliers
d’élèves (voir ci-dessus). En bref, la forme scolaire peut évoluer, même si difficilement, c’est
pourquoi subsistent certaines caractéristiques propres aux institutions scolaires dans leurs
mutations et leurs différences.

Séance 9 · Institutions et construction des sexes (21/11)

Séance 10 · Institutions et socialisation corporelle (29/11)

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