L a G azette A venturienne

Numéro 2

La Gazette aventurienne, Travia 1038 CB

Tensions chez les corbeaux et chaos rampant

lzoll. Dans la Marche du corbeau,

A cela fait désormais presque une

lune qu’Alzoll a été libérée mais
la ville n’a toujours pas retrouvé la paix.
Durant les premiers jours, les combats se
sont multipliés en de nombreux endroits,
à l’occasion de la découverte de nouveaux
sous-sols remplis de morts-vivants ou
lorsque des amas d’os se sont mis à bou-
ger. Les Golgarites ont ensuite entrepris
de détruire les objets et lieux démoniaques,
tels que le lieu de culte de l’archidémone
Thargunitoth, l’adversaire du dieu des
morts, dont la présence impie a été ban-
nie. Enfin, dans le quartier de Faubourg-
aux-Os, la plupart des maisons construites
en os ont également été abattues. Les dé-
bris osseux ont été enterrés dans le champ
de Boron, récemment consacré, lors de fu-
nérailles bénies par le dieu des morts. Au
cours de cette période, de petites pustules
végétales ont commencé à se répandre
dans la ville. Des vrilles sont sorties de terre
pour s’enrouler autour des tas d’os et des
gens, des arbres ont poussé au travers des
maisons et certains prétendent même avoir
été attaqués par des créatures étranges.
Dans les champs de blé entourant la ville,
certains ont observé que certains épis
étaient presque mûrs alors que d’autres
pourrissaient avant même la récolte.
Des phénomènes similaires ont égale-
ment été observés dans certains villages
environnants. Ce sont surtout les prêtres de s’occuper davantage des personnes Fantholi, Thylos 1038 CB
de PÉRéaine et de TSA de l’ordre des et de leur âme qui, depuis plus d’une dé-
Trois Sœurs des champs qui s’inquiètent
de cette force destructrice de la terre.
cennie, n’ont plus bénéficié des bienfaits
des Douze. Il faudra sans doute des lunes
La comtesse de Bois-aux-Ours
Est-ce là un héritage de la profanation
de la contrée ? Un piège de l’architraître
pour baptiser tous les enfants nés durant
cette période, dont certains sont presque
adopte la fille d’un noble
Lucardus de Kémet, porté disparu ? La adolescents aujourd’hui, et ainsi recom- omté de Bois-aux-Ours, Comté de Bois-aux-Ours,
famine ne risque-t-elle pas de frapper la
population cet hiver si la récolte s’avère
impossible ?
mander leurs âmes aux Douze.
Et tandis que le margrave Gernot de
Mersinne tente de régler au mieux les li-
C Thylos 1038 CB
Nos chroniqueurs ont récem-
ment été surpris par l’entrée soudaine
10 Hésinde 1037 CB
Quatre mois à peine se sont écoulés
depuis la lâche tentative de meurtre sur
Alors qu’elle lutte contre cet environ- tiges et d’unir l’ordre des Golgarites, la dans la rédaction de la Gazette aventurienne la personne de Valderia Testelion, véné-
nement hostile, la Marche du corbeau grande maîtresse Borondria aurait quitté d’un chevalier des Pasturies porteur rable comtesse de Bois-aux-Ours, lors
semble aussi être menacée par un conflit Alzoll pour une destination inconnue. d’une dépêche provenant de la comtesse de la fête de l’Archerie à Olat. La com-
interne. Depuis la libération d’Alzoll, les Après avoir chassé ou battu leurs enne- de Bois-aux-Ours. Il semble que le corps tesse vient d’annoncer, lors d’une céré-
désaccords entre membres de l’ordre mis, les Golgarites sont-ils désormais d’un messager parti il y a plusieurs mois monie solennelle, qu’elle a adopté une
des Golgarites se multiplient. Tandis menacés par un conflit interne ? ait été trouvé près de Linière. Phex soit jeune chevalière du nom de Griseldis de
que certains insistent pour poursuivre loué, son assassin n’a pas trouvé le mes- Pallingen, pour en faire officiellement sa
le traître Lucardus et continuer à com- Mythram Korroc sage que la victime transportait. Nous le fille — un acte rare au sein de la noblesse.
battre sans relâche les morts-vivants et (Anni Dürr avec remerciements à présentons ici, dans son intégralité. La comtesse modifie ainsi l’ordre de suc-
les nécromanciens, d’autres préconisent Nicole Euler et David Lukassen) cession du comté de Bois-aux-Ours, avec
le consentement du duc.
Un tournoi de célébration s’est tenu
dans le paisible village de pêcheurs
La Gazette Aventurienne n° 2 – Mars 2021 d’Olat. Le brouillard et la neige de Firun
Rédaction avaient déjà recouvert les champs, les prés
Rédacteur en chef : Samuel Defaye et les forêts. Telle une ombre ténébreuse,
Auteurs textes VO : Anni Dürr, Mike Krzywik, Katja Reinwald, Axel Riegert, Alex Spohr les murs noirs de la forteresse de la
Auteur texte VF : Samuel Defaye comtesse s’élevaient aussi au-dessus des
Traducteurs : Samuel Defaye, Rodolphe Guillo, Matthieu Marquine, Thomas Dejonghe
Relecteurs : Christophe Dang Ngoc Chan, Samuel Defaye, Thomas Dejonghe, Florent eaux brumeuses et menaçantes du lac de
Haro, Bruno Lalonde, Arne Vangheluwe Neufœil. Le froid mordant a empêché de
Illustrations : Sabrina Klevenow et Diana Rahfoth www.black-book-editions.fr www.scriptarium.org nombreux invités de venir rendre hom-
Maquette : Laurent Royer mage à la future comtesse. Le duc s’est
Copyright © by Ulisses Spiel GmbH, Waldems fait représenter par le prince Valthard et la
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protégés par le droit d’auteur. Toute reproduction, même partielle, transformation, diffu- www.ulisses-spiele.de et petite-nièce de Valderia, ainsi que par
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50 rue Jean Zay, 69800 St Priest, France
Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé est purement fortuite. auparavant les Chevaliers du Bosquet.
Certaines mentions sont faites dans le texte à des ouvrages non disponibles en français au De nombreux héros des comtés de
jour de la publication du présent document, la traduction de leur titre est donnée seulement © Black Book Éditions
à titre indicatif. email : infos@black-book-editions.fr
Pasturies ont eu l’occasion de démontrer ▶

Christophe DEGOUILLES - cdegouilles@free.fr - 202110/354400/883398


leur habileté durant le tournoi, qui servit
par ailleurs de préparatifs pour la cam-
pagne contre Haffax. Les participants
furent particulièrement émus lorsque
maître Eisewyn et Yolanda de la Jachère
chantèrent en duo à la mémoire du comte
Valdemar, le regretté frère de Valderia.
L’absence de Geiserich de Roc-Lagune,
le bailli contesté du comté de Pallingen,
n’est pas passée inaperçue et a renforcé
les rumeurs de son ressentiment et de sa
jalousie envers la jeune héritière, qui des-
cend de la vieille noblesse de Bois-aux-
Ours. Aucune preuve de son implication
dans la tentative d’assassinat n’a cepen-
dant été découverte. Un office religieux
a été célébré en l’honneur de Firun et de
Rondra, comme l’exige la tradition bien
établie. Après quoi, Ìvrain ni Catholaìnn,
la prolégate de l’Église de Firun, a offert
la bénédiction de son dieu à la jeune et
charismatique héritière.
Gazette aventurienne, Thylos 1038 CB
Chronique : mort à Dar-Marustani
hunchom. Grâce à la confiance
K que m’accorde la rédaction de la
Gazette aventurienne, j’ai la joie de
vous présenter le premier article de la sé-
rie Au travers de la Maraskan sauvage. Juste
avant que je ne parte sur l’île pour un
voyage plein d’aventures et de dangers,
je me suis rendue à Dar-Marustani. Ce
quartier maudit de Khunchom1, grande
ville de ma patrie, devrait me donner un
premier aperçu de ce qui m’attend pour
les trois prochaines courses divines.
Jusqu’à présent, j’avais évité le quartier
au nord de l’embouchure du Mhanadi
et j’ai été tentée d’engager une escorte
en voyant à quel point les rues étaient
vides, pas simplement moins remplies
que d’habitude, mais complètement dé-
sertes. Incrédule, j’ai pénétré le quartier,
scrutant le silence jusqu’à ce que, au loin,
j’entende des éclats de voix. Prenant
mon courage à deux mains, j’ai recher-
ché l’origine de ces bruits dans le dédale
des ruelles. Lorsque j’ai enfin atteint le
temple en forme de disque de Rur et
Gror, je suis tombée sur une énorme
foule. Tout Dar-Marustani devait être
présent ! Comme ils hurlaient dans leur
langue incompréhensible, j’ai eu du mal à
comprendre un seul mot. Je n’ai pu com-
prendre ce qui s’était passé qu’après avoir
vu le corps exposé et couvert de fleurs
rouges. Le tétrarque oriental, Keïderan-
Dajin de Khunchom, était décédé à l’âge
de 86 ans. Mais personne ne se plaignait,
ni ne portait le noir de Boron et il n’y
avait aucune trace de la roue brisée de
Boron. En lieu et place, ces barbares
1. Le quartier de Dar-Marustani accueille de
nombreux réfugiés maraskanites, ayant fui
l’invasion démoniaque de l’île de Maraskan.
Gazette aventurienne, Travia 1038 CB
Chronique : un lys dans la boue
adis, Bastrabun ibn Rashtul lança
J son célèbre « Plus jamais ! » aux
Sauriens et l’engeance fut reje-
tée au-delà du golfe de Tuzak pour ne
plus jamais quitter la Terre interdite. Et
aujourd’hui, près de trois mille ans plus
tard, c’est moi qui traverse la mer pour
vous rapporter, chers lecteurs, des nou-
velles de Maraskan, même si celles sur la
dernière mode à la cour du grand prince
Kulibin vous manqueront cruellement.
Ce qui suit est mon premier reportage
au sujet de l’île elle-même. Je l’ai d’abord
aperçue de loin. Trônant à cent-cin-
quante pas au-dessus du niveau de la
mer, la Fleurdelisée1 se dresse sur un grès
jaune escarpé. Mais ce n’est ni la vue, ni la
peur de ce qui pouvait m’attendre là-bas
qui m’a coupé le souffle. Non, ce qui m’a
subjuguée, c’est la beauté de la ville elle-
même. Les murs étaient ornés de car-
reaux colorés qui brillaient à la lumière
1. Surnom de la ville de Tuzak.
2
Gazette Aventurienne, nº2
La comtesse a choisi d’annoncer cette
adoption ce 10e jour de Hésinde, afin
de coïncider avec le 27e jour de Tsa1 de
Griseldis. Durant son discours, elle a fait
référence à la scandaleuse tentative d’as-
sassinat ayant eu lieu quatre mois plus tôt :
« Tout comme on a voulu me prendre ma
vie et qu’elle m’a été rendue lors de mon
propre jour de Tsa, c’est aujourd’hui pour
toi aussi le début d’une nouvelle vie. Lève-
toi, Griseldis de Pallingen, je te considère
désormais à jamais comme ma fille ».
Toutes les personnes présentes furent
touchées en voyant leur dirigeante, d’ha-
bitude si stricte et réservée, se laisser ga-
gner par de telles émotions maternelles.
Thuronia Gravecuivre (Axel Riegert)
1. Jour de Tsa : expression aventurienne pour
désigner le jour d’anniversaire.
étaient penchés sur le corps du mort et
lui donnaient des conseils pour sa future
vie. Je me suis rapidement retirée de ce
rituel abject, mais dans les jours qui ont
suivi, je n’ai pas cessé de penser à cette
personnalité, aux funérailles à laquelle
tant de personnes avaient assisté et j’ai
commencé à enquêter.
Le défunt descendait directement du
roi Dajin II, qui avait réussi à régner sur
Maraskan pendant 219 jours. Il y a 18 ans,
Keïderan-Dajin renonçait à son droit au
trône en se proclamant tétrarque oriental.
On m’a souvent cité l’une de ses paroles :
« Je suis heureux de renoncer à un pou-
voir enchaîné, car mes rêves ne grandiront
que sous le ciel d’une Maraskan libre. » Il
n’était pas seulement l’architecte de Dar-
Marustani, il était surtout l’un des chefs du
benisabayad, la communauté regroupant
la totalité des Maraskanites. C’est grâce à
lui que de nombreux plans de reconquête
de Maraskan furent dressés. Après en-
quête auprès des riverains, j’ai réalisé que
les Maraskanites adoraient et aimaient leur
défunt tétrarque, qu’il était extrêmement
charismatique et capable d’enflammer le
cœur des gens.
La question de la succession de
Keïderan-Dajin reste totalement floue,
aucun des quatre tétrarques2 n’étant
décédé depuis leur proclamation en
1020 CB. Vous en apprendrez plus en-
core dans le prochain numéro d’Au tra-
vers de la Maraskan sauvage.
Pour vous, votre Shenny saba Perhiman (Mike
Krzywik)
2. Tétrarque est un titre religieux maraskanite
qui, bien qu’il soit synonyme de pouvoir re-
ligieux, engage son porteur dans l’intérêt gé-
néral des Maraskanites.
du soleil couchant. Les tuiles vitrifiées et
les créneaux en forme de lys dégageaient
une magie à laquelle une habitante de
Khunchom comme moi, pourtant ha-
bituée au faste, ne pouvait pas rester in-
sensible. Ma ville natale est au-dessus de
toute comparaison, mais dans une ville
maraskanite, je ne m’attendais pas à un
si beau jeu de couleurs. D’innombrables
ponts suspendus s’étirent d’une tour
d’habitation à une autre et de vertigi-
neux escaliers gomment les grandes dif-
férences de hauteur de la ville. Même si
aucun maraskanite n’aime l’entendre :
Tuzak est unique. Mais notre cédrakke à
peine amarrée dans le port de Tuzak, la
beauté s’était envolée. La ville est telle une
ruche. Le patois des habitants, presque
incompréhensible, m’a autant agressée
que les odeurs piquantes des nombreuses
gargotes que l’on trouve à chaque coin
de rue. Au mieux, les hommes et les
femmes sur le quai pouvaient être qua-
lifiés de hardis, et nombre d’entre eux
Gazette aventurienne, Travia 1038 CB
C’est l’excitation en Andergast :
un lepus cornu repéré
Port-Chêne en émoi
Depuis quelques lunes, dans la paisible
ville de Port-Chêne située sur les rives de
l’Ingval, les rapports font état d’observa-
tions répétées dans les forêts voisines d’une
nouvelle créature, inconnue jusqu’ici.
L’être est décrit comme un lièvre, mais
selon les dires des témoins, la ressem-
blance s’arrête au-dessus de la tête. En
effet, entre les oreilles, il possèderait des
bois comme ceux d’un chevreuil.
Wolfhart Fortepoigne, patron de la ta-
verne locale du Bûcheron sans tête, a été le
premier à voir cet étrange habitant des
forêts et a assuré à notre correspondant à
l’étranger, Rufus Cul-sec, que la créature
appelée « jackalope » se montrait pen-
dant la journée. Et pas seulement quand
les clients rentraient chez eux après l’ex-
tinction des feux. Sans conteste excellent,
l’alcool de chêne de la région n’a rien à
voir avec l’apparition des bois.
L’office des relations exclut catégori-
quement toute menace pour la population
et les voyageurs respectables. Toute autre
rumeur sur le lièvre cornu et mangeur
d’hommes n’est, je cite, « qu’une sour-
noise propagande d’au-delà des frontières,
qui sent le poisson pourri ». Notre infa-
tigable correspondant s’est a ucontraire
vu expliquer que le jackalope d’Andergast
était un symbole de virilité comme il n’y
en avait qu’au pays des Chênes.
En raison d’une dégustation complète
et approfondie de l’eau-de-vie locale, les
autres éléments de cette discussion ne
sont pas vérifiables. Nous omettrons donc
tout nouvel embellissement des faits.
Bien sûr, notre correspondant ne s’est
pas contenté de cette déclaration qui,
nous le citons, est « plus vaseuse que la
tarte aux fruits de tante Gertrude ».
Notre courageux Cul-sec ne s’est donc
épargné ni aucune dépense ni aucun ef-
fort pour obtenir plus d’informations.
Ses factures de frais en attestent.
Joborn ne se laisse pas encorner
et fait quand même la fête
Notre infatigable Cul-sec a continué
son enquête à la foire de Joborn, un évé-
nement annuel qui rassemble toute la
région. Et, de fait, les rumeurs ont com-
mencé à se répandre là-bas aussi.
D’aucuns prétendent avoir observé le
jackalope dégustant les fameux bretzels de
Joborn, tandis que d’autres affirment qu’il
a été vu en compagnie d’une jackalope en
pleine activité raïesque. Il n’a pas été pos-
sible de déterminer si cela pouvait être dû
à l’influence du temple de Raïa de Joborn.
Jusqu’à présent, la maison royale a
refusé toute prise de position sur les
attendaient seulement le prochain départ
pour une razzia en haute mer. Et dans les
faits, les jours suivants, Tuzak m’a donné
l’impression d’être un repaire de canailles
et d’écorcheurs. Le haut lieu d’appren-
tissage de jadis n’existe plus, alors qu’il
y a dix-huit ans, la Fleurdelisée abritait
encore une académie qui faisait partie de
la Guilde grise. Aujourd’hui, cet endroit
n’est plus appelé que « le boulet », ce qui
en dit long sur le peuple maraskanite et
son abrutissement. Il n’y a que le wezy-
rad du port, un homme nommé Grinjian,
aux yeux et aux cheveux gris, qui m’ait
accueillie gentiment. Nos conversations
du soir autour d’une tasse de zh’arr et de
moules à la sauce konche m’ont beau-
coup aidée à trouver mes marques dans
la Fleurdelisée. Vous en apprendrez plus
encore dans le prochain numéro d’Au
travers de la Maraskan sauvage.
Pour vous, votre Shenny saba Perhiman (Mike
Krzywik)
événements, tout comme le temple de
Firun de Port-Chêne.
Wolfhart Fortepoigne a cependant fait
référence au célèbre sume Seimeingast,
un sage ermite des forêts.
Nous ne souhaitons que le meilleur à
ce dernier et espérons qu’il appréciera les
deux fûts d’eau-de-vie de chêne que notre
journaliste Cul-sec a apportés comme ca-
deau. Grâce à ce don, le suméen a fourni
à notre correspondant une information
importante sur l’origine potentielle de la
mystérieuse créature bondissante : « ce qui
se passe dans la forêt reste dans la forêt ».
Au retour de notre correspondant à Port-
Chêne, le temple de Firun local lui a remis
une déclaration. « Le seigneur Firun »,
a-t-on doucement mais fermement assuré
à monsieur Cul-sec, « n’a absolument rien
à voir avec l’apparition du jackalope. Peu
importe ce que disent les sages de la forêt ».
L’ordre des Anathèmes de la
lumière s’en mêle
Simultanément, des rumeurs ont fait
état de l’arrivée d’un groupe d’anathèmes
de la lumière dans les forêts venu s’assurer
qu’aucune entité démoniaque n’ait pris le
contrôle de la population locale de lièvres.
Le garde forestier du coin, Valdemar
Sapineraie, s’est réjoui que l’automne
ait été jusqu’à présent très pluvieux, car
les honorables combattants de Praïos se
sont lancés dans cette traque divine équi-
pés de nombreuses torches. Il était donc
exclu qu’un feu incontrôlé n’inflige des
dommages au patrimoine forestier, ainsi
qu’auxdits membres du clergé.
Au-delà de l’Ingval, dans le royaume de
Nostrie, on ne s’est guère ému de l’agita-
tion autour du rongeur cornu.
Luitpold Héron-des-Marais, un pêcheur
du lac Thuran, a littéralement déclaré : « Je
sais pas pourquoi les têtes de chêne en font tout un
foin. Des lapins cornus. On a toujours eu ça en
Nostrie. On dit qu’y a quelques années, après une
nuit des sorcières, le père Levthan a pris un bon coup
dans le nez. Et depuis, c’est comme ça. Mais deman-
dez pas aux sorcières. Pas de questions. Ce qui se
passe dans la forêt reste dans la forêt. Et parfois, faut
s’estimer heureux et chanceux que ça y reste. »
Nous remercions Rufus Cul-sec pour sa
quête inlassable de la vérité, même si nous
craignons qu’il ne puisse la trouver qu’au
fond d’une tasse d’eau-de-vie de chêne ou
du lac Thuran. Et bien sûr, lecteurs, nous
vous tiendrons au courant de l’évolution
de l’affaire du lièvre cornu d’Andergast.
Adriane Mehltau
La Gazette aventurienne,
Boron 1038 CB
Un avenir fuyant
lzoll. Les mauvaises nouvelles ve-
A nant des zones de la Marche du
corbeau récemment libérées ne
cessent d’arriver. Les dangereuses excrois-
sances et l’agressive prolifération végétale
ont à peine été réduites ou contrôlées que la
région fait face aux agissements de brigands.
Comme nous l’avons appris, dans les en-
virons d’Alzoll, différents groupes enlèvent
des jeunes filles à travers le pays. Il a été éta-
bli qu’il s’agissait de membres de la Garde
draconique, qui veulent les sacrifier lors de
sombres rituels, ainsi que de golgarites, qui,
insensibles, arrachent les demoiselles à leur
famille. Il est pour l’instant impossible de
savoir s’il s’agit de brigands sans pitié se fai-
sant passer pour des combattants de Boron
ou si l’ordre souhaite seulement mettre les
enfants à l’abri de la Garde draconique. Ni
le grand maître Borondria, ni le margrave
Gernot de Mersinne n’ont pu être interpel-
lés à ce sujet, car ils sont actuellement en
retraite au château Mersinne, avec d’autres
chefs religieux.
Mythram Korroc

Débats enflammés autour des plans de Stoerrebrandt
omme nos lecteurs pouvaient
C déjà le lire dans notre dernière
édition, Emmeran Stoerrebrandt
projette d’établir un nouvel établissement
du collège Stoerrebrandt. Lors d’un en-
tretien, l’homme d’affaires m’avait infor-
mée qu’il souhaitait que Haltecharroi soit
choisie pour ce projet. Au cours des der-
nières lunes, plusieurs magiciens formés
à Riva avaient été aperçus aux abords de
la bourgade garétienne à la recherche de
l’emplacement idéal. De toute évidence,
Stoerrebandt est déterminé à mener
son projet à terme. Bien entendu, cette
situation amène des débats passionnés
au sein de la corporation des magiciens
dont nous reproduisons un court extrait.
De plus, nous avons recueilli les avis de
plusieurs éminents magiciens, mais égale-
ment d’habitants de Haltecharroi, afin de
proposer à nos fidèles lecteurs un large
éventail d’opinions sur le sujet.
Itsadora Alrikshuber (MM)
Le projet de Stoerrebrandt va à
l’encontre du Codex
C’est avec un grand effarement que
nous avons entendu parler des projets
d’extension de l’école payante de ma-
gie Stoerrebrandt à Haltecharroi. Que
Hésinde en soit remerciée, un paragraphe
du Codex Albyricus s’oppose à cette en-
treprise à la moralité douteuse et exclut
explicitement le genre de situation qui se
présente ici. Il est écrit dans le volume III,
paragraphe XXXVI, je cite : « Chasque
escole pour enseignir devoit aveir lieu et
place propres et pas plusors. »
Construire une extension d’une aca-
démie de magiciens est donc en contra-
diction manifeste avec le Codex. Selon
celui-ci, un tel établissement serait auto-
nome et indépendant et ne devrait être lé-
gitimé par une guilde qu’après un examen
approprié. Ergo, le projet de Stoerrebrandt
est voué à l’échec de facto et de jure. En
outre, c’est un véritable impair du point
de vue de la morale. Haltecharroi est le
centre de l’hexagramme des élémentaires
et un haut lieu de tradition universitaire.
Fantholi, Boron 1038 CB
L’héritière de Bois-aux-Ours
s’oppose au bailli de Pallingen
ois-aux-Ours. La découverte
B du messager assassiné (comme
rapporté dans un précédent ar-
ticle) n’a rien fait pour atténuer le sen-
timent de malaise qui règne dans la for-
teresse d’Olat. On dit que Griseldis de
Pallingen, l’héritière du titre de comtesse
de Bois-aux-Ours, a été vue en train de
tempêter à plusieurs reprises. Sans amba-
ges, elle a accusé son redoutable adver-
saire, Geiserich de Roc-Lagune, d’être
l’auteur du meurtre. Combien de temps
encore la comtesse le gardera-t-elle
comme bailli de Pallingen, avec tant d’in-
dices dévoilant sa véritable nature malé-
fique ? Valderia Testelion a une fois de
plus tenté d’agir en médiatrice en rap-
pelant que le bailli avait géré ses intérêts
avec prudence durant des années. Tant
qu’il n’y aura pas de preuves concrètes à
son encontre, il gardera sa confiance.
Recherche braves compagnons pour une expédition scientifique
Expérience en milieu sauvage, bonne condition physique
et capacité à se défendre contre les perfidies de la nature exigées.
Connaissances en dérologie et en pétrographie recommandées
mais pas indispensables.
Salaire en fonction du profil,
avec un minimum de 5 thalers d’argent par jour.
Retrouvez-moi mi-Raïa à Arivor,
au caveau de dégustation Vendange sanguine.
Dottora F. Meissini
Gazette Aventurienne, nº2
C’est en ce lieu même que Rohal le Sage
en personne est autrefois sorti d’un orme
de sang et que se trouvait son académie,
le cercle de l’Hexagramme. Les magiciens
ont étudié et mené des recherches com-
munes à Haltecharroi sans s’éloigner des
limites imposées par les guildes de magie.
Stoerrebrandt veut de toute évidence faire
un lien avec cet âge d’or en voulant ouvrir
son absurde établissement de magie dans
ce lieu. Quelle abominable suffisance !
Comme si la tradition pouvait être imitée !
Elle s’acquiert par un sens aigu du labeur
et les magiciens à gages de Riva en sont
de toute façon cruellement dépourvus. Ils
louent leur potentiel astral au plus offrant
au lieu de le consacrer à des choses vrai-
ment importantes. De toute évidence, ils
placent l’argent au-dessus de la science et
de la recherche. Que Hésinde leur fasse
don de la raison !
Hesindiello Contumaci, magister à l’institut de
l’Analyse arcanique et magister extraordinarius
puniniensis
Erreur de raisonnement
de Contumaci
Sans surprise, les projets de création
d’une extension du collège Stoerrebrandt
suscitent d’innombrables débats dans
les cercles de magiciens. Bien sûr, je ne
voudrais pas contester à mes collègues,
quelle que soit leur guilde, le droit à une
opinion, mais un gaspillage de papier
comme celui de Hesindiello Contumaci
ne peut que nous obliger à répondre.
Ce collega se réfère de toute évidence
à une version obsolète du Codex Albyricus
probablement aussi vieille et flétrie que sa
raison. L’addendum VIII du volume I de
l’édition Hal indique clairement les pas-
sages retirés à l’occasion de la dernière
révision, et notamment ceux du volume
III, paragraphe XXX à XXXVIII. Tous
ceux qui savent compter en concluent
que cela inclut le paragraphe XXXVI.
L’attitude défensive de nombreux colle-
gae découle probablement d’une peur
qui circule actuellement à Punin et ail-
leurs. C’est la peur d’une compétence
pratique. La peur que les élèves d’une
Nous avons depuis appris que le corps
du messager a été trouvé dans une grange
abandonnée près du village de Linière.
Des marques d’étranglement et diverses
blessures occasionnées par une lame
indiquent clairement qu’il s’agit d’un
meurtre. L’assassin serait un homme
barbu et musclé, portant un manteau
sombre et une arme visible, qui a presque
renversé des paysans l’hiver dernier en
quittant les lieux. Ceux-ci se rappellent
bien de lui, continuant sa route à toute
allure, sans même se retourner pour voir
s’il avait blessé quelqu’un.
Des sources bien informées à la cour
de la comtesse indiquent que Griseldis
de Pallingen a envoyé plusieurs héros de
confiance à la recherche de preuves dé-
montrant la culpabilité du bailli.
Thuronia Gravecuivre (Axel Riegert)
académie de magiciens maîtrisent davan-
tage que la seule recherche fondamentale
et théorique en magie, avec la capacité de
savoir parler de leur travail de telle sorte
que le citoyen lambda puisse les com-
prendre. La peur que d’autres académies
puissent suivre l’exemple et créent éga-
lement des extensions. En bref, la peur
du changement… Ils ignorent le fait que
de tels changements sont ô combien
nécessaires.
Avec le choix du lieu, Stoerrebrandt
a fait preuve d’une grande habileté tout
en se montrant provocant. Haltecharroi
se trouve dans le voisinage de Gareth,
soit plus proche du siège de la mai-
son de commerce que ne l’est Riva. De
plus, c’est un lieu imprégné de tradition
qui suscite un étonnement approbateur
ou respectueux chez ceux qui appré-
cient l’Histoire. Enfin, avec le cercle de
l’Hexagramme, on y trouvait jusqu’aux
guerres des Magiciens une académie de
magiciens de disciples de Rohal le Sage.
Aujourd’hui, il y a des conflits, de la
concurrence et des querelles juridiques
pour savoir qui est le plus digne d’être
désigné héritier de Rohal. Selon l’avis de
certaines têtes très instruites, un individu
comme Stoerrebrandt, qui ne possède
aucun don pour la magie, ne peut en au-
cun cas se voir reconnaître cette préten-
tion ; pas plus que celle de revendiquer
l’héritage des vestiges supposés – bien
que jamais découverts jusqu’à ce jour –
de l’académie détruite.
En revanche, je ne souscrirai pas à ces
assertions insultantes jugeant immoral le
fait de gagner son pain en tant que ma-
gicien. Seul quelqu’un qui n’a encore ja-
mais quitté sa tour d’ivoire des théorèmes
de magie peut s’abaisser à un tel niveau.
Très personnellement, je trouve qu’un
« magicien à gages » (pour reprendre
l’expression se voulant méprisante de
Contumaci) orienté vers la pratique est
mille fois plus appréciable qu’un théori-
cien de Punin, qui s’égare dans sa propre
bibliothèque.
Jeldan de Perricum, magister extraordinarius
(MM)
Autres opinions
« Une extension d’une académie de magiciens
existante ? L’idée est intéressante. »
— Salpikon Savertin, convocatus primus de la
confrérie des Initiés
Chronique : troubles sanglants à Sinoda
inoda. Malheureusement, j’ai dû
S quitter la Fleurdelysée, et avec
elle mon galant hôte, Grinjian,
après seulement quelques jours. La raison
en était heureuse, car j’ai reçu une invita-
tion de la part de la rédaction de Tradj,
la gazette de Sinoda, qui voulait me ren-
contrer moi, la chroniqueuse mondaine.
J’étais curieuse de voir comment les au-
tochtones pensaient qu’il fallait tenir un
journal et j’ai donc pris la route du sud.
Pendant une semaine, une caravane
m’a conduite dans la jungle hostile. Je
pourrais parler de coléoptères, de ser-
pents et de torrents de boue, mais qui
souhaite lire ça ? Quand j’ai atteint
Sinoda quelques jours plus tard, j’ai été
frappée de plein fouet par la véritable
cruauté de l’île. La ville portuaire était en
ébullition ! L’eau de la baie était rouge
et j’ai vu des corps sans vie flotter entre
les bancs de sable. Des choses horribles
se déroulaient à Sinoda et ma caravane
a décidé de s’éloigner au plus vite. Mais
quel genre de journaliste serais-je si je
tournais les talons aux premiers signes de
guerre civile ?
Alors je me suis mêlée au tumulte et
j’ai été la témoin d’un véritable mas-
sacre. Tels des animaux sauvages, les
Maraskanites fondaient sur des étrangers
venus d’Aranie, les molestaient ou bien
les pendaient sur le champ. J’ai vu la foule
déchaînée pénétrer dans les maisons et
« Si les magiciens installent ici une école, cela
signifie certainement plus de circulation et plus
de commerce… et plus de chiffre d’affaires. Peur
des magiciens ? Non, il en passe déjà par ici ve-
nant de Gareth. Et le Stoerrebrandt ne formera
certainement pas des magiciens noirs. »
— Jartrude Tilleul, aubergiste à Haltecharroi
« Les projets de Stoerrebrandt nous ont
été présentés. Il y a encore un ou deux détails
professionnels et juridiques à éclaircir et dont
se chargent les experts en matière de guilde de
magiciens. Néanmoins, les élèves sortis du col-
lège Stoerrebrandt à Riva se sont jusqu’à présent
toujours révélés être des membres compétents et
moralement irréprochables de notre communauté
de magiciens, de sorte, selon mon opinion person-
nelle, que rien ne s’oppose à un tel élargissement
de cet établissement d’enseignement. »
— Elcarna Erillion de Hauteroche, convoca-
tus primus de la Grande Guilde grise de l’esprit
« Stoerrrebrandt pense qu’il peut faire ce qu’il
veut. Tant que tout ça n’aura pas été scrupuleu-
sement examiné, il n’ouvrira rien ici ! Surtout
pas si près de Gareth ! »
— Sirdon Kosmaar, spectabilité de l’académie
de la Haute Magie de Punin
« Quoi ? Stoerrebrandt ? Une académie de
magiciens ? Oui, je suis au courant. Mais je
n’ai pas de temps à perdre avec de telles idioties !
Nous partons en guerre ! »
— Saldor Foslarin, convocatus primus de la
fédération du Pentagramme blanc
« Aujourd’hui, établir l’extension d’une acadé-
mie de magiciens n’a franchement rien de fâcheux.
Je ne vois rien qui s’y oppose… Encore un pain
aux raisins, ou bien un petit pain à la cannelle ? »
— Harko Haraldson, magicien et pâtissier à
Bélhanka
« Je ne m’exprimerai pas sur les détails au su-
jet desquels Emmeran Stoerrebrandt a sollicité
nos conseils. Mais il était bien préparé. »
— Magister Falke, responsable de la maison
de l’ordre du Bâton gris à Gareth
« Le Stoerrebrandt, lui qu’a tel’ment
d’argent, y peut ben faire c’qui veut, nan ? »
— Jerodan Renfel, charretier
« Une vive discussion entre gens érudits est
pour notre type de magie une source continuelle
d’inspiration. »
— Thomeg Atherion, spectabilité de l’académie
du Pouvoir de l’esprit de Fasar
jeter des familles entières dans la rue. J’ai
vu des citoyens aisés de Sinoda qui se
vidaient de leur sang dans la boue. Des
cris furieux résonnaient dans les rues et
j’ai eu peur. Je n’ai jamais vu des gens
capables de faire ça. Ils me rappelaient
les tribus de Ferkinas enragés, dont les
croyants de Rur et Gror descendent, mais
les membres de ces dernières ne seraient
quand même pas capables de commettre
de telles atrocités. Ils n’ont pas hésité
une seconde à incendier le sanctuaire de
Phex, avant de faire subir le même sort à
l’établissement des Mada Basari, l’ordre
marchand originaire d’Aranie.
J’ai trouvé refuge dans les locaux du
canard local, où les employés m’ont ac-
cueillie. Ils étaient très inquiets, car ils
partageaient la responsabilité de ce qui se
passait dans les rues de Sinoda. En effet,
le Tradj a également alimenté les rumeurs
selon lesquelles le comptoir commercial
des Mada Basari aurait soudoyé certains
membres du Conseil d’albâtre. C’était la
mèche qui avait allumé le feu d’Hylaïlos
et semé le chaos dans les rues. Après ma
visite de Tuzak, je pensais qu’il fallait juste
faire un peu confiance aux Maraskanites
pour découvrir leur côté civilisé. Mais
Sinoda m’a ouvert les yeux.
Bouleversée dans la Maraskan sauvage,
votre Shenny saba Perhiman (Mike
Krzywik-Grand)
3
Christophe DEGOUILLES - cdegouilles@free.fr - 202110/354400/883398

La Gazette aventurienne, Boron/Hésinde 1038 CB
arunk. Bien que l’Empire soit
V fatigué de la guerre, Jaakon de
Turjeleff1 voulait continuer le
combat contre la Commandature du
prince. L’impatience du maître de la fédé-
ration n’était plus un secret. Il souhaitait
profiter de la faveur du moment et pas-
ser à l’attaque. L’incertitude qui règne en
Tobimorie, d’une part, et la récente cap-
ture surprise du traître à l’Empire Léomar
de la Montagne, d’autre part, semblaient
inspirer cet homme pragmatique.
Et ce, surtout depuis l’entrée en
ville de Mythram Coup-de-lion2 de
Perricum à la tête de deux douzaines
de jeunes prêtres de Rondra. Après
la surprenante profession de foi de
l’Épée des épées3 en faveur de la fin
de l’état de guerre rondrian, le maître
d’armée avait mené jusqu’à Varunk
les épées de Rondra qui avaient tout
de même décidé de le suivre. Le mé-
tropolite a considéré toutes ces cir-
constances comme autant de signes
du bien-fondé de son projet.
Cet automne, en collaboration
avec le maître d’armée de l’Église de
Rondra, maître Jaakon avait prévu
de pénétrer loin dans les terres de la
Commandature du prince. Même si
cela n’a jamais été confirmé, des ru-
meurs disent que l’objectif de l’opé-
ration était la ville de Shamaham,
peut-être pour établir une tête de
pont en vue de la reconquête de la
vallée du Vildrom. Mais le margrave
Sumudan de Bordebregel ne parta-
geait ni la soif de guerre, ni l’optimisme
de son allié belliqueux. Au contraire : il
lui a rappelé les mots de leur matriarche.
On dit que le margrave, agacé, a repro-
ché son plan à Jaakon, estimant qu’il allait
priver les jeunes prêtres de Rondra de la
suite du maître d’armée de pouvoir choi-
sir leur destin, contrecarrant ainsi la pro-
fession de foi d’Ayla de Fondombres3.
Mais ces paroles éclairées n’ont pas
empêché le maître de la fédération de
1. Jaakon Zirkisnjak de Turjeleff est le maître de
la fédération de la senne des Terres centrales.
Le titre donné au maître de la fédération de
senne est « métropolite ».
2. Mythram Coup-de-lion de Perricum est l’un
des six maîtres d’armée, responsables de la
coordination militaire de l’Église de Rondra.
3. Ayla de Fondombres est l’Épée des épées,
la supérieure de l’Église de Rondra. Le titre
donné à l’Épée des épées est « matriarche ».
La Gazette aventurienne, Hésinde 1038 CB
Un nouveau grand maître
chez les Golgarites
unin. Ces dernières semaines,
P les querelles pour la direction
des Golgarites1 ont pris le pas
sur le travail de l’ordre. En de nombreux
endroits, les diverses factions ont ouvert
les hostilités, de manière plus ou moins
franche. Après le ralliement du justiziar
Baranoir et de ses disciples au mystique
Saltarez Bahram de Jurios, son courant
a considérablement gagné en impor-
tance et les altercations avec le margrave
Gernot de Mersinne se sont envenimées.
Lors d’une audience du Corbeau de
Punin2, Saltarez Bahram de Jurios a été
confirmé comme étant le nouveau grand
maître de l’ordre. De nombreux golga-
rites ont estimé que Boron ne souhaitait
pas que l’ordre poursuive un objectif po-
litique. Ainsi, le nouveau grand maître a
déclaré qu’il souhaitait restituer le fief de
la Marche du corbeau à la couronne im-
périale. Très vite, le calme est revenu dans
1. Ordre du dieu Boron, composé de guerriers
aux armures de plates noires luttant contre
la nécromancie. Cf. Livre des règles, page 318.
2. Le plus haut rang au sein de l’Église de Boron
— cf. Livre des règles page 318.
44
Gazette Aventurienne, nº2
L’humiliation de Valdahon
poursuivre sur le chemin dans lequel il
s’était engagé. Jaakon de Turjeleff n’était
plus le fidèle acolyte d’Ayla, il poursui-
vait ses propres projets, s’entourait de
ses propres conseillers et ne redoutait
certainement pas une confrontation avec
Perricum.
Mais le maître de la fédération n’a pas
réussi à rallier les hommes d’armes de
Varunk sous sa bannière. Les mercenaires,
en grande partie responsables de la pro-
tection de Varunk, étaient de toute façon
à la solde du margrave. Ils sont donc res-
tés à l’arrière, ce que l’éminence Turjeleff
aurait salué, car il « n’aurait pu s’accom-
moder de stipendiés sans honneur ». Mais
le cortège armé avait aussi ses partisans.
Dans la baronnie de Pré-vert, sur le ter-
ritoire de la marche du Soleil de Beilunk,
plus de quatre douzaines de combat-
tants armés commandés par Mirshan de
Viverixe (branche cadette) se sont joints
aux Varunquiens. Ensemble et pleins de
confiance, les hommes de Varunk et de
Beilunk ont envahi la Commandature du
prince et ont, sans grandes difficultés, sur-
vécu aux premières échauffourées dans la
préfecture de Shamaham.
Cependant, ils se sont retrouvés ensuite
dans les franges des marais de Valdahon.
Elgor, à la fois baron de Wickrath et ca-
pitaine de Valdahon, a alors été envoyé
l’ordre, avant qu’un nouveau coup de
tonnerre inattendu ne l’ébranle : Gernot
de Mersinne l’a quitté avec quelques-uns
de ses fidèles !
C’est une première dans l’histoire
de l’ordre, car tout golgarite s’engage à
servir l’ordre de Boron jusqu’à sa mort.
Le margrave a pris avantage du dis-
cours d’inauguration de son adversaire
Saltarez, dans lequel ce dernier décrit
l’ordre comme étant « mort pour naître
de nouveau », afin de se retirer à l’occa-
sion de cette fin rhétorique. Ce faisant, il
s’est attiré le mécontentement de nom-
breux traditionalistes. L’avenir nous dira
comment sa relation avec les Golgarites
et en particulier avec leur nouveau grand
maître évoluera.
L’impératrice a néanmoins confirmé
Gernot de Mersinne comme margrave
de la Marche du corbeau (désormais un
fief purement séculier), probablement
en raison de ses récentes et importantes
victoires stratégiques.
Mythram Korroc (Anni Dürr ; remerciements :
Nicole Euler et David Lukaßen)
pour arrêter leur progression. Il s’est en-
suivi « une leçon de guerre moderne »,
comme l’a exprimé non sans railleries
le baron de Wickrath lorsqu’il a finale-
ment lancé l’assaut contre les forces ar-
mées unifiées pour la bataille décisive.
Celle-ci a été précédée de plusieurs jours
de manœuvres de désorientation, durant
lesquels les Varunquiens poursuivaient
leurs ennemis, se divisant et combattant
parfois plus la terre elle-même que les
hommes de Wickrath, ce qui les a épuisés
et leur a infligé des pertes considérables,
avant même la bataille.
Le choix du champ de bataille à la péri-
phérie des marais de Valdahon et à proxi-
mité d’un site où des conjurateurs de
fantômes ont exercé leur art, il y a de cela
plusieurs années, a scellé la fin des grands
projets de Jaakon. À mi-chemin entre la
route reliant Varunk à Shamaham et le
château de Valdahon, la troupe du mé-
tropolite, alors presque anéantie, a croisé
le chemin d’une troupe fraîche et bien
équipée, sous les ordres du baron de
Wickrath.
Pourtant, même en surnombre, le
vil baron n’a pas hésité à tirer pleine-
ment parti du fait qu’il avait servi sous
les ordres de l’archi-hérétique Xeraan.
Après quelques passes d’armes, une
bonne douzaine de démonides, ainsi que
L’Observateur Bélhankien, Hésinde 1038 CB
Soirée de gala
au palazzo ya Duridanya
La semaine dernière a eu lieu la grande
soirée de charité au profit des arts de
Bélhanka qui a réuni tout le gratin de la
Sérinissima. La réception a eu lieu dans
le magnifique palazzo du grand mécène
Malrizio ya Duridanya. Pour l’occasion,
une foule s’était amassée devant le pa-
lais, que ce soit simplement pour tenter
d’entrapercevoir les grands de la ville
arrivés dans leur superbes carrosses ou
pour essayer de participer à la fête, même
sans avoir réussi à acquérir l’une des pré-
cieuses invitations permettant d’accéder
au palazzo.
Les invités étaient nombreux et de
marque. On peut citer le dirigeant du
Conseil de l’Aventurie du Sud, Ascanio
Objet Masse
(pierre)
Robe/costume 1,5
de haute couture
Règle : le porteur bénéficie d’un bonus de +1 aux épreuves de séduction si la cible apprécie la vision. Si
la cible n’apprécie pas le style (pour des raisons culturelles, par exemple), l’épreuve subit un malus de –1.
trois créatures informes de deux pas de
haut, qui semblaient avoir été façonnées
à partir de la boue du marais, sont appa-
rues. Comme si cela ne suffisait pas, un
nombre toujours croissant de fantômes
se sont extirpés de la tourbière voisine,
désireux de s’abreuver de la force vitale
des combattants, ce qui a achevé de se-
mer le chaos dans les rangs.
Mythram a lancé un ultime assaut dé-
sespéré contre le baron traître, mais a été
désarçonné à mi-chemin par le tir d’un
carreau d’arbalète avant que les fan-
tômes ne l’ensevelissent sous leurs
non-corps translucides. En revanche,
Mirshan de Viverixe a réussi à ras-
sembler les guerriers de Beilunk pour
réaliser une contre-attaque, mais, sans
succès, elle a dû être interrompue.
Pendant ce temps, les jeunes
prêtres de Rondra s’étaient affranchis
de tout ordre et se battaient seuls,
parfois même à deux, contre les
démonides et leurs adversaires hu-
mains. La défaite était inévitable, et
lorsque le maître d’armée est tombé,
les hommes de Beilunk ont sonné la
retraite. À contrecoeur, une douzaine
de Rondrians, parfois grièvement
blessés, et quelques chevaliers de
Varunk se sont joints à eux, tandis
que le maître de la fédération se trou-
vait dans une situation désespérée,
où il se battait contre une force écra-
sante de légionnaires rouges. Mais il
était dit que même dans la défaite, la
déesse tempêteuse allait l’accompa-
gner car son serviteur a réussi à littérale-
ment tailler en pièces ses opposants avec
une série de coups dévastateurs. Couvert
de sang de la tête aux pieds, le seigneur
Jaakon aurait attendu quelques instants
avant de battre en retraite.
Ce qui devait être un triomphe s’est
soldé en une défaite abominable. Les
autres combattants ont fui en toute hâte
— environ un tiers de survivants —
pour retourner au Pré-vert. De son côté,
Jaakon de Turjeleff remonta aussitôt à
Varunk, accompagné de la demi-dou-
zaine de prêtres qui avaient survécu à
l’ignominie de Valdahon.
Mythram Korroc (Katja Reinwald ;
remerciements à Daniel Simon Richter et
Michael Masberg)
Numataupo, la belle courtisane, Elyria
de Bélhanka, mais aussi Lessandro ya
Taranelli, spectabilité de l’académie de
magiciens de la ville. Mais celle qui s’est,
encore une fois, la plus distinguée est
la jeune Amaziella Bosvani. Habillée
par la styliste Ninara de Saltes, la jeune
prêtresse de Raïa portait une superbe
robe en dentelle rouge qui, par la grâce
de la déesse, mettait les courbes de son
corps particulièrement en valeur.
Le spectacle a été assuré par la magi-
cienne Palmyra Tartuffo de Belhanka
qui a redoublé d’ingéniosité pour divertir
tous les invités de cette soirée qui restera
dans les annales.
Pt. de Prix Complexité
structure (thalers
d’argent)
5 500 Complexe
(3 PAV)