Référence : Bruno, P. (2010). Lacan, passeur de Marx: L’invention du symptôme.
Toulouse: Érès. Page citation Comentario p.10 il faut questionner le progrès pour autant que, même dans ses ambitions éthiques les moins contestables, il fait l’impasse sur la satisfac-tion et reste serf d’une évaluation sur l’échelle de la jouissance.
p.11 Qu’est-ce qui autorise à dire que la
psychanalyse, elle qui pèse si peu dans le monde et spécialement dans la politique, est ce dont on ne saurait se passer pour, non pas sortir du fantasme du progrès, mais le démonter pour agir sur les touches de la jouissance ? La jouissance n’est ni le plaisir, ni la douleur.
p.11 la jouissance atteint son nirvana dans la
mort.
P.30 Lacan homologue le concept psychanalytique de
fétiche et son concept chez Marx, car le fétiche est une valeur d’usage « extraite, dit-il, figée – un trou quelque part ». Le fétiche est chez Freud le substitut du pénis qui manque à la femme et comble un « trou ». Or, c’est ce trou dans la jouissance qui fonde la jouissance. De façon comparable, le fétiche chez Marx consisterait, pour expliquer les rapports entre marchandises, à présenter ceux-ci comme des rapports entre choses et non entre personnes. C’est une intuition très fine et très subtile qui consiste à définir le féti-chisme de la marchandise comme la mise en place d’un sub stitut, la marchandise comme ayant une valeur intrinsèque de chose, qui sert à dénier le fait que cette valeur de chose n’existe pas, et qu’elle n’est que le résultat d’un rapport social entre personnes qui produisent dans une durée de travail déterminé. Le trou qui est masqué en ce cas, c’est l’écart entre le temps de travail nécessaire à la reproduction de la force de travail et le surtravail
p.30 Le livre XVII du Séminaire, L’envers de la
psychanalyse, est sans doute le plus dense quant au rapport de Lacan avec Marx.
p.38 Lacan a rendu visible en créditant
Marx de l’invention du symptôme. Il n’y a guère que Maximilien Rubel, dans sa précieuse introduction aux œuvres politiques de Marx 42 , pour avoir su le débusquer dans un discours en anglais aux chartistes réunis à Londres en 1856 : « D’une part ils ont fait exister des forces industrielles et scientifiques qu’aucune époque antérieure de l’histoire humaine n’avait soupçonnées. D’autre part, il existe des symptômes de déclin (symptoms of decay)surpassant de loin les horreurs de la fin de l’empire romain 43 . » On voit ainsi se dessiner le problème qui définit l’espace politique. Quel est le sens du déclin qui, au sein du progrès, fait symptôme ? Il est remarquable que le symptôme soit corrélé au déclin
p.39 En tout état de cause, le « déclin » en tant que
symptôme n’est-il pas toujours, à l’encontre d’une pente idéalisante qui militerait pour son abolition, ce qui indique une limite à la présomption du progrès, comme asymptôte du millénarisme qui annoncerait et précéderait le paradis sur Terre ? C’est à ce niveau que l’examen de ce qu’est un symptôme pour la psychanalyse nous permettra de proposer une réponse intelli-gible et élucidatrice.
p.59 Ces derniers (discours de l’universi-
taire, du maître, de l’hystérique, de l’analyste) sont explicitement construits sur le principe d’une « barrière de la jouissance », barrière à prendre au sens que la production d’un discours, à cause de cette barrière, ne peut prétendre à atteindre LA vérité. e qui caractérise au contraire le discours capitaliste, c’est la levée, ou plutôt l’annulation de cette barrière. Ce qui en résume le mieux l’esprit, c’est le slogan Tous capitalistes , ou l’ Enrichis- sez-vous du sinistre Guizot, qui instrumentalisent l’égalité de droit entre individus pour accréditer l’idée d’une égalité poten- tielle au niveau de l’avoir qu’offrirait le capitalisme. Avançons dès maintenant que le secret de cette menterie tient dans le fait qu’en annulant la barrière de la jouissance et en laissant entrevoir le mirage d’une consommation qui saturerait le désir (définition possible de la jouissance), le discours du capitaliste 1 asserte une équation entre a , cet objet en plus, fondamentalement anidéique, et l’argent qui, lui, est par excellence le comptabilisable.
P.61 Il produit, au sens marxiste, de la plus-
value. Avec le capitalisme, la force de travail devient une marchandise. C’est donc avec le capitalisme que le plus-de-jouir peut prendre sa forme de plus-value. Qu’est-ce que la plus-value (Mehrwert) ? C’est le surcroît de valeur produit par l’ouvrier salarié pendant son temps de travail global, une fois qu’il a repro- duit la valeur de sa force de travail : « S’il ne faut au travailleur qu’une demi-journée de travail pour vivre une journée entière, il n’a besoin, pour prolonger son existence de travailleur, que de travailler une demi-journée. La deuxième moitié de la journée de travail est du travail forcé, du surtravail (Mehrarbeit) . Ce qui apparaît du côté du capital comme Mehrwert apparaît exacte- ment du côté du travailleur comme Mehrarbeit au-delà de son besoin de travailleur 5 .»
Landman, P., Lippi, S. (2013). Marx, Lacan : l’acte révolutionnaire et l’acte analytique. Toulouse: Érès.
P.10 Par « psychiatrie humaniste », j’entends un
certain mouvement institutionnel qui intervient – directement – sur les aspects pathologiques, relationnels et sociaux du patient, qu’il soit psychotique ou névrosé. L’institution 5 intervient au sens propre du terme : hospitalisations, travail, activités du temps libre, vacances, relations amicales et amoureuses. Au nom du bon sens et d’une éthique « du bien » (du patient), l’institution vient au secours du sujet en souffrance, au point qu’il ne reste, pour ce dernier, aucune place pour l’interroga- tion sur son désir. Éthique du bon sens versus éthique du désir : c’est l’institution qui décide, à partir d’une déontologie humaniste, ou d’un savoir « scientifique » médical – les deux attitudes se rejoignent –, à la place du sujet
P.13 Surtout deux sciences
révolutionnaires : le marxisme rompt avec la philosophie et l’économie, comme le fait la psychanalyse avec la psychiatrie et la psychologie. Deux sciences qui luttent contre l’idéalisme : idéalisme hégélien, la première, idéalisme médical, la seconde. Démasquage, pour la psychanalyse comme pour le marxisme, d’un sujet qui serait maître de lui- même : le sujet est aliéné dans la structure productive (Marx) et dans la struc- ture signifiante (Lacan) Xelka Montalvo Master 2 Psychanalyse Número étudiant : 0
Références à travailler pour mémoire:
Bruno, P. (2010). Lacan, passeur de Marx: L’invention du symptôme. Toulouse: Érès.
Landman, P., Lippi, S. (2013). Marx, Lacan : l’acte révolutionnaire et l’acte analytique. Toulouse: Érès. Lacan, J. (2003). De la plus-value au plus-de-jouir. Cités, 16, 129-142. https://doi.org/10.3917/cite.016.0129 Moati, R. (2010). Autour de Slavoj Žižek: Psychanalyse, marxisme, idéalisme allemand. Paris cedex 14: Presses Universitaires de France. Baas, B. (2013). Du « matérialisme » de la pulsion : Zizek, lecteur de Lacan. Savoirs et clinique, 16, 27-35. https://doi.org/10.3917/sc.016.0027
Genel, K. (2016). École de Francfort et freudo-marxisme : sur la pluralité des
articulations entre psychanalyse et théorie de la société. Actuel Marx, 59, 10-25. https://doi.org/10.3917/amx.059.0010