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"Comment aborder le marché algérien ?

"
Interview de Nacéra Amari et Zoubir Rabia,
Conseillers Algérie à la Chambre de commerce et d'industrie de Paris (CCIP)
et de Nassila Sellal, Responsable du Bureau de la CCIP à Alger

Novembre 2009

MONTAGE DU PROJET

1. QUELLES SONT LES ETAPES PRELIMINAIRES QUAND ON CIBLE LE MARCHE ALGERIEN ?

Il existe deux profils de demandes de la part des entreprises ; celles-ci ne vont pas avoir la
même démarche vis-à-vis du marché algérien : le premier profil concerne les entreprises qui
exportent déjà en Algérie et qui ont besoin de consolider leurs positions ; le second profil
concerne des entreprises qui partent d’une information, d’un projet ou d’une demande
émanant d’un partenaire potentiel en Algérie.

Ces entreprises entreprennent différemment leurs démarches. Les premières sont bien
établies et passent par des contacts, des déplacements, etc. Les secondes connaissent le
marché algérien au travers d’informations macro-économiques, d’échanges avec d’autres
entreprises présentes dans des salons, etc.

Dès lors, l’information joue un rôle très important ; il convient de confirmer les éléments
obtenus, de les croiser et de les valider systématiquement voire de les "survalider" car il existe
une volatilité très importante des informations en Algérie.

On a beaucoup de difficultés à obtenir une information complète auprès d’une ou deux


source(s) sur l’Algérie. On est amené à multiplier ces dernières, à récolter des bribes
d’information et à les consolider pour essayer d’avoir une information la plus complète
possible. Il est donc essentiel, pour une entreprise qui s’intéresse à ce marché, de bien se
documenter avant de monter son projet de manière à bien le préparer en amont.

Les entreprises qui s’intéressent à l’Algérie connaissent mal les subtilités de ce marché, les
mentalités, le fonctionnement du pays, etc. ; par exemple, en tant que conseillers sur ce pays,
il est arrivé d'avoir une question se rapportant à la langue parlée, l'interlocuteur oubliant
presque l'histoire de ce pays. Bien souvent, les entreprises partent d'un a priori, d'un constat
ou d’une information qui laissent supposer que l’Algérie est un eldorado.

L’information économique et sectorielle est, dans ce contexte, primordiale pour se


développer. Valider ces informations l’est encore plus. Il y a des informations que l'on ne
peut pas ou difficilement obtenir, notamment les informations financières, même si l’Algérie
essaye de se doter d’outils favorisant la publication de bilans d’entreprises. "Le monde des
affaires en Algérie est un réseau ou tout le monde se connaît, une personne bien introduite
peut permettre d'avoir un premier niveau d'information".

Dans une première étape, les entreprises recherchent donc à collecter des informations, des
conseils pour mettre en place un projet de développement sur l’Algérie et consolider une
modeste étude de marché réalisée en croisant des informations ; les entreprises qui nous
sollicitent ne font pas, en effet, appel à des conseils extérieurs pour réaliser des études de
marché. Elles utilisent la "praticité", se rendent dans des salons, discutent dans des clubs
export, échangent leurs expériences avec d’autres entreprises et utilisent leur réseau. La
seconde étape consiste à traduire ces informations dans le projet d'entreprise, c'est-à-dire à
mettre en adéquation les moyens avec le projet export.

La CCIP organise régulièrement, à destination des entreprises, des réunions d’information sur
le marché algérien (économiques, techniques ou sectorielles), des entretiens d’étude de projet
avec les conseillers internationaux, des rencontres avec des experts pays, des missions de
prospection (programme de rendez-vous BtoB), des missions découverte du marché à
l’occasion de salons et des expositions à des salons…
http://www.ccip.fr/international-entreprise/upload/pdf/CCIPInternational-Programme2010.pdf

2. COMMENT DETERMINER SON PROJET ? QUELLES SONT LES CONDITIONS REQUISES SUR CE
MARCHE ?

Cela dépend des réponses aux interrogations de l’entreprise sur l'accès au marché algérien,
de la manière dont elle souhaite mettre en œuvre son projet de développement et des moyens
quelle y consacrera. Bien que la règlementation actuelle s’y prête plus difficilement qu’avant,
l'entreprise pourra, dans une première étape, développer son courant d'affaires et son réseau
de distribution et, dans une seconde étape, envisager, à moyen terme, une implantation
commerciale ou autre. Ces étapes lui permettront de trouver son ou ses tiers de confiance…

C’est, d’ailleurs, tout l’objectif du diagnostic export que d’étudier en amont les forces et
les faiblesses de l’entreprise pour aborder un marché export ainsi que les opportunités et
les difficultés qu’elle pourrait rencontrer. Les conseillers internationaux des CCI donnent alors
des préconisations. C’est, ensuite, aux entreprises, de se mettre à niveau, de mettre en
adéquation leur produit avec le marché et d’y mettre les moyens financiers nécessaires.

Il faut, en effet, souligner combien le marché algérien n’est plus, comme ce fut le cas il y a
quelques années, un marché où les produits français s’écoulaient sans trop de difficultés.
Aujourd’hui, il y a une relation gagnant-gagnant qui s’est instaurée entre les partenaires
algériens et étrangers. Il y a aussi une concurrence étrangère accrue et très rude. Il importe
donc de bien verrouiller son projet en amont et d’aider les entreprises en ce sens.

Déterminer un projet dépend, s’agissant de l’entreprise, des moyens qu’elle a mis en œuvre,
car plusieurs déplacements représentent un investissement en temps mais aussi financier. Il
est donc essentiel de mettre en adéquation son projet et ses moyens. Cibler le marché
algérien – comme nombre de marchés d’ailleurs – suppose de définir une enveloppe
budgétaire sur deux ou trois ans.

Il y a, par conséquent, un léger sacrifice à consentir lors du lancement du projet – s’agissant


surtout d’implantation – pour pouvoir dégager, ensuite, un courant d'affaires important et un
chiffre d'affaires conséquent. A l’exportation, il faut s’employer à transformer une ou deux
exportations en un courant d’affaires régulier. Or, cette transformation coûte à l’entreprise aux
plans humain et financier quand elle est de petite taille. Il est donc nécessaire d'avoir un bon
partenaire sur place avec lequel l'entreprise doit s'inscrire dans une relation gagnant/gagnant.

3. FAUT-IL SE DEPLACER SOUVENT SUR CE MARCHE POUR RENCONTRER SES PROSPECTS ?

Oui, car, bien souvent, les entreprises ont tendance à se reposer sur un contact (prospect) ou
son partenaire. Or, la proximité est cruciale dans la relation d’affaires en Algérie. Mais cela ne
doit pas se faire au détriment du montage du projet. Bien sûr, en fonction du volume de
l’opération, vérifier la notoriété de son prospect, sa fiabilité, valider les informations recueillies,
revenir une fois encore en Algérie pour rencontrer son contact, visiter ses locaux, se
renseigner sur les entreprises qui travaillent avec lui s’imposent très souvent. Il est aussi
nécessaire d'appuyer le partenaire par une présence ou un accompagnement de la part de
l'entreprise, ceci permettant une mise en confiance des clients potentiels.
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Lorsque les entreprises se rendent compte que travailler avec l’Algérie est plus compliqué que
ne le laissait supposer la première prise de contact, certaines se découragent ; d’autres
persévèrent. Dans tous les cas, il ne faut surtout pas rester avec l’idée que le marché
algérien, c’est un business "one shot" et à court terme. C’est un marché où il faut revenir,
retravailler les contacts, valider les produits sur place et être visible.

4. QUI PEUT AIDER L’ENTREPRISE EN CAS DE DEPLACEMENT DANS LE PAYS ?

La Mission économique près de l’Ambassade de France à Alger ou encore la Chambre de


commerce et d’industrie algéro-française sont des interlocuteurs privilégiés pour les
entreprises françaises qui s’intéressent à ce marché.

La CCIP dispose également à Alger d’un bureau, opérationnel depuis 2005, qui accompagne
les entreprises d’Île-de-France à travers diverses formes d’appui et de prestation.
http://www.ccip.fr/international-entreprise/ccip-monde-14.htm

5. FAUT-IL PASSER PAR UN DISTRIBUTEUR ?

Dans tous les cas, que l'on soit une entreprise débutante ou confirmée sur ce marché, il est
nécessaire d'avoir un distributeur. Celui-ci permettra de stimuler les ventes et de mettre en
place un système de garantie ou une "hot line" pour les SSII de premier niveau. Le partenaire
pourra "débroussailler" les difficultés en cas d’expédition problématique et il n'hésitera pas à
se déplacer dans les administrations, les douanes, les banques algériennes, etc. afin de les
régler. Il sera donc nécessaire de contractualiser cette relation d'affaires avec tout ce que cela
comporte d'aspects notamment juridiques.

SE FAIRE ACCOMPAGNER

6. A QUELS GUICHETS S’ADRESSER QUAND ON CIBLE LE MARCHE ALGERIEN ?

Les chambres de commerce et d’industrie (CCI) sont les premiers relais des entreprises en
matière d’information à l’export. Elles ont aussi un rôle de détection des nouveaux
exportateurs. Viennent ensuite Ubifrance, la Coface, les douanes voire certaines banques.
Les syndicats professionnels, les fédérations sont aussi particulièrement sollicités par les
entreprises, notamment dans l’agro-alimentaire, car ils sont des interlocuteurs assez proches
des entreprises. Enfin, ces dernières s’adressent également de façon croissante aux pôles de
compétitivité.

Il ne faut pas sous-estimer le fait que les entreprises qui s’adressent aux différents guichets
d’information – et notamment à la Chambre de commerce et d’industrie de Paris – sont des
TPE ou des PME dont certaines n'ont pas de service export. La plupart des entreprises
(75 % environ) s’adressant à la CCIP ont moins de 100 salariés. C'est le dirigeant qui
s'occupe de l'activité export ; malgré sa volonté, il n’a pas le temps de mettre en place
une stratégie internationale. C’est donc lui qui fera office de commercial export et se
déplacera dès lors qu’il sentira un véritable potentiel sur le marché algérien; mais à son
retour de déplacement, il gérera les affaires urgentes et laissera en suspend son action…
voire l’abandonnera.

C’est une des raisons pour lesquelles les CCI s’inscrivent dans le suivi d’entreprises à
l’international. Elles mettent à disposition des outils (prestations), méthodologies et assurent
un accompagnement des entreprises dans le temps, du début jusqu’à la fin de leur projet :
détection, réalisation d’un diagnostic export, validation d’un marché, accompagnement voire
coaching à l’export, etc.
CCIP : http://www.ccip.fr/international-entreprise/prospecter-60/rubrique-accompagne.htm
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Si une entreprise a des besoins de financement de son projet, il convient bien évidemment de
l’orienter vers des organismes tels que la Coface, Oseo, le Secrétariat d'État chargé du
commerce extérieur, etc. et de l’informer des aides à disposition dans ce domaine. Si les
problèmes rencontrés sont d’ordre juridique, il peut être fait appel à la Mission économique, à
des avocats, etc. ; la CCIP fera notamment appel à son bureau d’Alger. La réponse est donc
vraiment liée à la nature du projet. Il importe de répondre à la problématique de l’entreprise. Il
y a aussi des entreprises qui n’ont aucun problème pour trouver des contacts sur place mais
qui observent des problèmes d’ordre réglementaire ; d’autres ont plus de difficultés à trouver
un distributeur par exemple.

7. CONVIENT-IL DE SOUSCRIRE UNE ASSURANCE-CREDIT EXPORT OU INVESTISSEMENT ?

L’assurance-investissement concerne plus souvent les grands contrats. Les risques politiques
ont substantiellement diminué en Algérie. Aujourd’hui, les risques de non-paiement sont très
faibles ; il s’agit plutôt de risques de retard de paiement. Un autre risque est celui d’appel
abusif de caution de soumission. Il faut aussi savoir qu’en Algérie, on ne peut payer d’avance.

Pour les échanges internationaux, la loi de finances complémentaire 2009 impose le paiement
des importations par le seul moyen du crédit documentaire irrévocable et confirmé. Ceci
oblige l’entreprise étrangère à s’acquitter d’une taxe de domiciliation et l’entreprise algérienne
à provisionner jusqu’à 120 % du montant de l’opération.

CONNAITRE LES REGLES DE CONSOMMATION ET DE MARKETING

8. FAUT-IL ADAPTER SON PRODUIT, SON SERVICE ?

Il est évidemment préférable d’adapter son produit au consommateur algérien et surtout à ses
moyens en fonction de la cible visée. C’est encore plus valable dans certains secteurs
d’activité, notamment dans l’industrie. Certaines sociétés ne comprennent pas, d’ailleurs, que
le prix de leur produit soit considéré comme trop élevé et ne soit pas adapté au marché
algérien qui est de plus en plus ouvert à la concurrence étrangère, plus particulièrement
chinoise. Il y a donc intérêt à travailler le prix tout en restant sur la valeur "qualité" du
produit, se démarquant ainsi d’une partie de la concurrence qui travaille plutôt sur le
volume de ventes.

S’agissant du packaging, il existe une réglementation liée à la langue (obligation d’affichage


en langue arabe sur l’emballage). En dehors de la langue, il n’existe pas d’exigence
particulière. Le consommateur algérien est tourné vers les produits français et de marque.

S’agissant du goût, certaines sociétés étrangères qui produisent en Algérie ont décidé
d’adapter leurs produits. Ainsi, Danone commercialise des yaourts plus sucrés que ceux
vendus en France. Parallèlement, il existe des exportateurs français ou des importateurs
algériens qui importent des produits français en Algérie qui se vendent tels quels. En résumé,
si la production se fait en Algérie, les entreprises étrangères adaptent automatiquement
leurs produits ; si le produit vient de France, il n’y a généralement pas d'adaptation.

9. QUEL EST LE PANIER MOYEN D’UN CONSOMMATEUR ALGERIEN (PART DES BIENS ALIMENTAIRES,
DES BIENS D’EQUIPEMENT, ETC.) ?

Il n’y a pas véritablement d'étude à disposition qui permette de quantifier les dépenses
moyennes du consommateur algérien, ni même la part de chacune de ces dépenses dans le
panier moyen de ce dernier. Un des éléments qui permettrait de répondre à cette question est
la part de la classe moyenne dans la population totale ; cela peut être un indicateur.

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Il est également intéressant de noter l’évolution à la hausse encore récemment des crédits à
la consommation. La majorité de ces crédits, qui ont été accordés durant ces cinq dernières
années, ont été destinés à l’achat d’automobiles et, depuis peu, à l’acquisition de matériel
informatique. Cependant, la loi de finances complémentaire 2009 a mis fin aux crédits à la
consommation, notamment automobile. L’objectif est de favoriser le crédit immobilier afin de
dynamiser le marché du logement qui est une préoccupation majeure en Algérie avec plus de
1,5 million de logements à créer.

10. QUELLES SONT LES PRINCIPALES REGLES DE MARKETING ?

En ce qui concerne le consommateur, des règles de marketing de base sont effectivement de


mise. Le consommateur est très orienté vers les produits occidentaux. L'arrivée massive des
chaînes de télévision par satellite a permis aux consommateurs d'être mieux informés sur les
produits occidentaux et d'aller vers la concurrence. En ce qui concerne les entreprises,
l'arrivée d'Internet leur a permis d'être mieux informées sur les produits et, de facto, sur la
concurrence.

11. COMMENT SE COMPORTENT LES CONCURRENTS ETRANGERS SUR CE MARCHE ?

Les entreprises étrangères se donnent les moyens de pénétrer le marché algérien ; elles ont
une approche un peu plus ouverte et n’hésitent pas investir dans une relation gagnant-
gagnant avec une vision à long terme à l'opposé des entreprises françaises qui restent
frileuses sur leurs investissements.

En revanche, les autorités algériennes sont vigilantes quant aux investissements étrangers
liés aux infrastructures ; cela a été le cas pour la vente de la branche ciment d’Orascom par le
groupe Lafarge, pour la concession de gestion du port d’Alger accordée au Dubaï World
Port…

Souvent, les entreprises algériennes disent quelles préfèrent travailler avec les entreprises
françaises qu’avec des entreprises d’autres pays, en raison notamment du partage de la
langue et des relations diverses et variées…

CONNAITRE LES CARACTERISTIQUES DE CE MARCHE

12. QUELLES SONT LES CARACTERISTIQUES DU MARCHE ALGERIEN ?

Le marché algérien est un marché qui peut être qualifié de "proche" du fait de sa proximité
géographique, culturelle, linguistique et historique. C’est également un marché porteur pour
quasiment tous les secteurs d’activité en passant, en priorité, par les secteurs du BTP, du
tourisme, de l'énergie, du transport, de l'eau et de l'environnement. D’autre part, certains
secteurs sont difficiles d’accès. C’est le cas du secteur pharmaceutique qui est très
réglementé. C’est, entre autres, pour cette raison et pour celles évoquées plus haut que le
marché algérien reste tout de même complexe et nécessite une bonne analyse préalable.

13. QUELLE EST LA MENTALITE D’AFFAIRES ? QUELLE EST LA PERCEPTION DES HOMMES
D’AFFAIRES FRANÇAIS PAR LES ENTREPRENEURS ALGERIENS ?

La relation d’affaires entre partenaires algériens et français est une question d’adaptation
réciproque. Si les entreprises françaises ont à se plaindre de certains partenaires algériens, il
ne faut pas non plus sous-estimer les difficultés des entrepreneurs algériens avec les hommes
d’affaires français. Un partenaire algérien d’une entreprise italienne de BTP réalisant de
grands chantiers en Algérie témoignait, lors de la dernière foire internationale d’Alger (FIA), en
juin 2009, de la difficulté à travailler avec des entrepreneurs français en raison d’une trop
grande frilosité, voire rigidité dans leur approche ; plusieurs Algériens soulignent, en effet, le
caractère "plus flexible en affaires" des entreprises italiennes, par exemple.
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Il y a, en effet, une certaine évolution de la culture des affaires en Algérie depuis quelques
années. Un commentaire qui revient assez souvent est que les entreprises françaises
viennent en Algérie en terre conquise, ce qui ramène à leur manque d’adaptation, à une
certaine arrogance dans les affaires, etc. Elles sont aussi très frileuses, ne prennent pas
de risque, se posent parfois trop de questions sur un marché qui a du potentiel (par
opposition à d’autres qui ne s’en posent, en revanche, pas assez pour préparer le marché ; il
faut donc un juste milieu). Il y a donc un important travail à faire pour modifier ce
comportement. Aujourd’hui, les entreprises algériennes peuvent faire des comparaisons. Il
faut avoir, désormais, en Algérie, une approche anglo-saxonne du business, une gestion
assez ouverte du risque. La relation commerciale doit reposer sur une approche
gagnant-gagnant, en donnant à chacun sa marge.

Mais il faut aussi souligner que cette difficulté d’accès des entreprises françaises sur le
marché algérien résulte, parfois, d’un manque d’informations sur le pays qui fait qu’elles
arrivent souvent avec un projet un peu trop verrouillé, une approche insuffisamment ouverte.

Il n’y a pas un opérateur français qui n’ait de relation directe ou indirecte avec l’Algérie de par
sa famille, ses proches ou ses connaissances, etc. Par conséquent, il y a une perception
biaisée, ambiguë du marché algérien. Toute la difficulté est de distinguer cette composante
amicale, fraternelle dans la relation d’affaires.

Enfin, il convient de souligner que toutes les personnes qui réussissent et qui ont un bon
courant d’affaires avec l’Algérie – via leur distributeur, leur fournisseur ou leur partenaire sur
place – sont ceux qui sont à l’aise avec leurs interlocuteurs algériens, ont une capacité
d’écoute à leur égard, renvoient la même attitude et se gardent surtout une certaine marge
de manœuvre pour que les choses se fassent naturellement.

14. QU’EST CE QUI EST PLUS FACILE OU PLUS DIFFICILE QU’AUPARAVANT QUAND ON TRAVAILLE
AVEC L’ALGERIE ?

L’ouverture de l’Algérie à l’économie de marché dans les années 1990 a marqué le début de
profondes mutations structurelles, ce qui a bien évidement joué en faveur du développement
du commerce extérieur et des investissements directs étrangers (IDE). Il n’y a qu’à voir le
nombre d’implantations françaises en Algérie qui est passé de 100 à 384 en moins de dix ans.

Des organismes privés et publics ont vu le jour depuis pour favoriser les relations d’affaires et
l’implantation. C’est le cas, par exemple, de l’Agence nationale de développement de
l’investissement qui a pour mission de promouvoir l’investissement et d'octroyer des
avantages ou encore du Conseil national de l'investissement (CNI) qui peut agréer les
investissements utiles au développement économique de l’Algérie.

Cependant, il ne faut pas oublier que l'Algérie reste dans une économie de transition avec tout
ce que cela implique : un système bancaire très lourd et restrictif, des circuits de distribution
immatures, etc. Ces divers aspects connaissent malgré tout des changements importants, ce
qui laisse présager, à l'avenir, plus de flexibilité dans les relations d’affaires.

La veille juridique doit être importante pour une entreprise qui travaille avec l’Algérie car la
réglementation est changeante. En début d’année 2009, la loi de finances (LF) a provoqué
nombre d’incompréhensions et de questionnements. Jusque-là, les entreprises étrangères
n’avaient pas besoin de s’associer à un partenaire algérien lors de l’ouverture d’une filiale en
Algérie. Mais depuis la promulgation de la LF 2009, celles-ci n’ont guère d'autre choix que de
trouver un (ou plusieurs) partenaire algérien résident qui détiendrait au moins 51 % des parts
de la société à créer.

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Cette loi permet de sécuriser les relations commerciales avec le client algérien du fait de
l'obligation de paiement par lettre de crédit documentaire. Elle va aussi permettre d'assainir le
marché et le nombre d'opérateurs à l'importation. En revanche, il sera intéressant de voir, à
terme, les effets de cette loi sur l'inflation, le risque étant de voir disparaître le nombre
d’opérateurs à l’importation entraînant un effet sur la concurrence et sur le niveau des prix…

Dans tous les cas, les entreprises étrangères doivent s’adapter à ces nouvelles règles.

15. COMMENT TRAVAILLER SUR PLACE AVEC LES BANQUES ?

Les banques publiques algériennes sont des banques sûres du fait de leur proximité avec les
organes du gouvernement. Leur exposition aux investissements risqués est faible. Elles sont
généralement issues de la nationalisation des banques françaises après l’indépendance.

Le marché algérien suscite la convoitise de nombreuses banques étrangères. Parmi les


banques françaises, Société Générale, BNP Paribas ou encore Natixis sont présentes en
Algérie ; certaines possèdent plusieurs agences à travers le pays comme BNP Paribas et
Société Générale.

Toutes les banques proposent des prestations d’accompagnement aux professionnels pour
des opérations de commerce international et développent de plus en plus des crédits
spécifiques tant pour le fonctionnement que pour l’investissement.

Le secteur bancaire algérien est engagé dans une profonde mutation qui devrait se traduire
par une bancarisation plus importante et des opérations plus rapides. En effet, le marché
bancaire a entamé, depuis plusieurs années déjà, une série de réformes visant à se mettre en
phase avec le reste du monde, l’objectif étant d’arriver à une spécialisation géographique et
sectorielle et surtout à l’amélioration du service et de la relation clients.

RECHERCHER DES PARTENAIRES

16. COMMENT PROCEDER POUR LA RECHERCHE DE PARTENAIRES ?

Il existe des bases de données gratuites et payantes, validées ou pas, mais l’une des
premières sources de mise en relation se fait lors des salons. En effet, on constate que
beaucoup de sociétés développent des contacts intéressants dans les foires et salons en
Algérie mais aussi dans ceux qui se tiennent en France.

Les missions de prospection sont aussi un outil qui permet de rencontrer des entreprises.
Elles consistent en l’organisation d’un programme de rendez-vous BtoB menés au regard d’un
cahier des charges complété avec les entreprises.

La CCIP s’emploie également à établir des listes de contacts de potentiels, de prospects pour
les entreprises dans le cadre notamment du coaching export. Le bureau de la CCIP à Alger
peut aussi établir un programme de rendez-vous avec ces prospects en respectant le cahier
des charges de l’entreprise et par des contacts réguliers avec cette dernière. L’entreprise
viendra ensuite à la rencontre de ces futurs partenaires et gérera elle-même son partenariat.
Elle peut donc s’appuyer sur les conseillers internationaux et le Bureau de la CCIP à Alger.

17. EXISTE-T-IL DES MOYENS DE S’INFORMER SUR LA SOLVABILITE ET LA FIABILITE DE SES


CLIENTS ? QUEL EST L’ETAT DE L’INFORMATION FINANCIERE DES ENTREPRISES EN ALGERIE ?

L’établissement de listes de contacts représente un travail de fourmi ; il se fait en croisant


plusieurs bases de données algériennes. Kompass, qui dispose d’une structure en Algérie,
figure parmi ces bases. Les entreprises payent pour figurer dans le Kompass, ce qui permet

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de disposer d’informations valides comme le KBis par exemple ; s’agissant des autres
données, il n’est pas toujours facile de savoir si les chiffres disponibles sont effectivement
repris de la liasse fiscale de l’entreprise telle que publiée. Au demeurant, les choses évoluent.
Une loi vise à obliger les entreprises à publier leur bilan ; 20 % d’entre elles auraient ainsi à ce
jour procédé à cette publication. Récemment, les autorités algériennes ont mis plus de
contraintes dans leur projet de loi et expérimente ce dernier dans une région pilote qui est
celle de Bejaia. On peut aussi obtenir les bilans des entreprises auprès du Centre national du
registre du commerce. Ces prestations sont payantes et supposent 1) d’avoir identifié
préalablement les partenaires potentiels et 2) que ces derniers aient publié leur bilan. Les
banques ou la banque nationale ne diffusent pas de cotation bancaire disponible de
l’entreprise ce qui rend encore plus difficile l’évaluation du risque de défaillance du client.

Tout ceci illustre la difficulté, déjà souligné plus haut, d’obtenir des informations en Algérie à
tous les niveaux. L’entreprise ne doit pas se sentir limitée par le fait qu’elle n’ait pas
éventuellement les informations financières traditionnelles d’autant que le bilan n’est pas
forcément un bon indicateur avec la part importante de l’informel dans l’économie algérienne.
D’où l’importance de bien connaître les techniques du commerce international pour éviter tous
risque d’insolvabilité, de complication suite au dédouanement des marchandises ou de litiges
nés de l’opération avec le client.

Dans ce domaine, la CCIP propose des formations adaptées aux besoins de l’entreprise,
moyens de paiements internationaux, incoterms, douanes, contrats internationaux…
http://www.ccip.fr/international-entreprise/techniques-commerce-international-36/rubrique-
formations.htm

S'IMPLANTER

18. EN CAS DE PROJET D’IMPLANTATION, QUELLE FORME PRIVILEGIER ?

Après avoir validé l’intérêt du marché, de nombreuses sociétés optent pour la mise en place
d'un bureau de liaison en Algérie. Ce dernier n’a pas la possibilité de réaliser des opérations
commerciales mais reste tout de même apprécié car rassurant pour les clients algériens qui
peuvent avoir un interlocuteur localement et répondre ainsi au premier niveau de garantie…
Cette forme d’implantation est soumise à une autorisation préalable du Ministère du
commerce algérien. Les autres formes de structures sociétaires sont, à peu de choses près,
équivalentes à celles qui existent en France. Les plus utilisées sont les SPA et les SARL.

Pour constituer une société en Algérie, et depuis la promulgation de la LF 2009, la première


étape consiste à trouver un ou plusieurs partenaires sûrs qui détiendraient au moins 51 % du
capital social.

Les autres étapes sont la constitution de la société, la déclaration de l’investissement et la


demande d’avantages auprès de l’ANDI, l’obtention de la déclaration d’existence, l’obtention
de la carte de commerçant étranger (validité : deux ans) et, enfin, l’obtention d’un registre de
commerce. Attention ! Les avantages sont consentis aux entreprises qui s’implantent en vue
de produire voire d’assembler des produits.

19. COMMENT SE PASSENT LES INVESTISSEMENTS SOUS FORME DE JOINT VENTURES EN ALGERIE ?

Selon un cabinet d’avocats français important, installé en Algérie, le concept même de joint
ventures (JV) aurait vu le jour en Algérie dans les secteurs pétrolier et minier. Depuis le début
de l’année 2009, la JV doit obligatoirement aboutir à une répartition du capital entre étranger
et algérien résident avec une part qui ne peut excéder 49 % pour les étrangers. Malgré cela,
cette forme de mariage entre entreprise est un concept gagnant car il permet une synergie

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des atouts et des forces dans un environnement complexe. Les JV peuvent exister sous
différentes formes sociétaires : SARL, SPA, SNC.

Dans les faits, les entreprises partenaires peuvent, soit partager les activités en fonction des
qualifications de chacune (production, distribution, gestion...) ou bien répartir les droits : 50/50,
40/60, 60/40. Quelque soit la forme choisie, il est important de bien définir les objectifs et
d’éviter tout déséquilibre entre les partenaires. Dans ce cadre, il est important d'avoir un bon
partenaire, de bien contractualiser la relation, de définir les attributions et l'investissement de
chacun.
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Pour conclure, les entreprises françaises doivent s'impliquer davantage dans leur projet de
développement en Algérie, investir avec une vision à long terme dans une relation gagnant-
gagnant, apporter la valeur ajoutée nécessaire à la consolidation des partenariats, mieux
valoriser les produits qu'elles commercialisent… Cela leur permettra de se démarquer de la
concurrence de plus en plus importante venant d'Italie, de Chine, d'Espagne, d'Allemagne et
des États-Unis.

Tous les critères économiques de l’Algérie sont très positifs ; le pays présente de réelles
perspectives de développement avec un programme d’investissement conséquent et, de plus,
il est à deux heures d’avion de Paris. Il convient d’autant plus d’encourager et d’aider les
entreprises à se positionner sur ce marché.

Pour en savoir plus :

Pour contacter les conseillers L’Algérie, un marché dynamique aux


Algérie de la CCIP de Paris portes de l’Europe

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