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Abord psychothérapique des psychoses


M. De Luca

Historiquement, la psychothérapie des psychoses a été liée à la psychanalyse dans les questions autour de
la possibilité de transfert chez les psychotiques puis dans les aménagements de la technique
psychanalytique et dans l’utilisation du contre-transfert. Elle s’est ensuite construite à partir des soins
institutionnels, que ce soit en pensant l’institution comme partie prenante du dispositif thérapeutique ou
que ce soit dans l’utilisation des médiations thérapeutiques groupales ou individuelles. L’essor des
médicaments et la formalisation d’autres techniques psychothérapiques (psychothérapies familiales,
cognitives et comportementales [TCC]) a mis en avant la nécessaire coordination des soins pour aller
d’une psychothérapie exclusive centrée sur un type de traitement vers une psychothérapie intégrative. Le
modèle dominant actuellement notamment aux États-Unis est un modèle psychosocial qui utilise le
traitement médicamenteux, une psychothérapie familiale et des techniques psychothérapiques de type
TCC. L’objectif de cette prise en charge est de limiter les rechutes et les conséquences des symptômes
négatifs qui entraînent isolement et désinsertion. Récemment, la psychothérapie des psychoses s’est
centrée sur la prise en charge des débuts de la maladie à l’adolescence, sur de nouvelles modalités de
traitement psychanalytique et sur l’évaluation des différentes psychothérapies ou de leurs associations
éventuelles. L’avenir des psychothérapies des psychoses articule la dimension évaluative afin de pouvoir
définir de véritables stratégies thérapeutiques intégratives et la dimension individuelle où la rencontre
avec un sujet est au cœur du dispositif thérapeutique et où la psychanalyse garde toute sa place.
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Mots clés : Psychothérapie des psychoses ; Psychanalyse ; Thérapies familiales ; Thérapies à médiation ;
Psychothérapie intégrative ; Évaluation des psychothérapies

Plan Freud a dans un premier temps été opposé à l’usage de la


psychanalyse pour les psychotiques pour ensuite nuancer son
¶ Introduction 1 propos, lien positif puisque les premiers thérapeutes de psycho-
tiques étaient des psychanalystes.
¶ Éléments historiques 2
Psychothérapie, psychanalyse des psychotiques : premières Actuellement, il est plus adapté de parler de psychothérapies
questions 2 au pluriel tant les offres de techniques sont multiples : psycho-
Psychanalyse entre clinique et théorie 2 thérapie analytique, cognitive, comportementale, familiale,
Psychanalyse entre théorie et technique 3 groupale... Il ne s’agit pas ici d’en faire un catalogue mais plutôt
¶ Évolution du concept de psychothérapie des psychoses 4 de s’interroger à partir des modèles de compréhension de la
Psychothérapie institutionnelle, l’institution comme outil psychose sur les modalités les plus adéquates pour le traitement
psychothérapique 4 des patients psychotiques.
Institution et cadre thérapeutique 5 Les soins aux patients psychotiques sont un maillage tissé par
Institution et médiations thérapeutiques 5 et entre plusieurs professionnels, intervenant dans plusieurs
¶ Au-delà de la psychanalyse 7 espaces. L’hôpital reste un des repères centraux dans l’organisa-
Travail avec les familles 7 tion des soins aux psychotiques, même si les modalités d’accueil
Psychothérapies intégratives 8 et de prise en charge ont évolué (accueil de jour, à temps
¶ Perspectives et prospectives 9 partiel, hospitalisations séquentielles, utilisation de médiations
Adolescence, psychose et psychothérapie 9 thérapeutiques, de groupes...).
Modalités psychanalytiques actuelles 11 La psychothérapie est elle aussi un des pivots des soins aux
Évaluation 12 psychotiques, même si ses indications ou ses modalités font
¶ Conclusion 14 l’objet de nombreuses discussions et de modalités diverses.
Nous limiterons notre propos aux psychoses de type schi-
zophrénique puisqu’elles sont les plus fréquentes à être prises en
■ Introduction charge, mais aussi parce que leur révélation en fin d’adolescence
ou au début de l’âge adulte en fait un véritable enjeu thérapeu-
La question de la psychothérapie des psychoses a été histori- tique. Le choix d’une approche psychodynamique englobe une
quement liée à la psychanalyse, de manière négative puisque compréhension de la psychose à partir du fonctionnement

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psychique même si dans les conceptions familiales ou cogniti- Si les objections à l’utilisation des psychothérapies sont
vocomportementales l’approche des troubles psychotiques se rapidement évacuées, la réflexion sur les difficultés de la
fait plus à partir d’une observation symptomatique. Ce double psychothérapie des psychoses est plus intéressante. Ces difficul-
point de vue illustre la complexité et la variété des outils tés sont essentiellement d’ordre théorique, et concernent la
thérapeutiques dans l’approche psychothérapique des psychoses. capacité des psychotiques à s’engager dans une relation transfé-
Nous suivrons l’évolution du concept de psychothérapie des rentielle, indispensable à toute psychothérapie. Pour que la
psychoses d’un point de vue historique, psychanalytique, psychothérapie s’engage le thérapeute doit tenir compte de la
institutionnel pour ensuite nous pencher sur l’évolution plus fragilité du Moi et de la spécificité des mécanismes de défense.
récente du concept dans l’utilisation de thérapies familiales ou Pour ce faire, il doit privilégier « le plan non verbal de la
psychosociales pour enfin évoquer les enjeux les plus actuels communication purement inconsciente, et cette part est
dans la prise en charge des adolescents, dans les nouvelles incontestablement la plus grande » [1, 2].
modalités de la psychanalyse ou dans l’évaluation des effets ou
de la place de la psychothérapie dans les soins aux patients
psychotiques.
Psychanalyse entre clinique et théorie
Dans les articles suivants, notamment dans celui de l’EMC
toujours rédigé par Racamier en 1984 [11], les questions centrales
■ Éléments historiques concernent l’articulation entre la théorie de la clinique des
psychoses et la théorie de la technique de manière générale et
Historiquement, la psychothérapie des psychoses est indisso- de manière plus spécifique dans la cure psychanalytique. Le
ciable de la psychanalyse, même si pour Racamier [1, 2], les corpus théorique principal à l’époque est la psychanalyse mais
premières interprétations, commencent dès l’Antiquité grecque. les approches biologique et pharmacologique d’un côté, et
Les premières conceptualisations vont apparaître, en France, familiale de l’autre, commencent à prendre de l’ampleur.
après la seconde guerre mondiale. Elles vont s’appuyer sur la Plusieurs approches théoriques vont s’opposer. Elles repren-
théorie psychanalytique et vont s’organiser dans deux directions nent en partie l’opposition entre la théorie kraepelinienne [12]
complémentaires. La première qui débouchera sur la notion de de la dégénérescence, concept central de la démence précoce et
psychothérapie institutionnelle se fixe comme objectif de la théorie bleulérienne [13] de la dissociation (spaltung), au cœur
transformer l’asile en un instrument de soins. Il s’agit à la fois de la notion de schizophrénie. D’un côté on trouve les tenants
de penser l’institution comme un organisme vivant et malade d’un Moi psychotique faible, non mature qui a régressé au stade
et le quotidien comme partie prenante du dispositif psychothé- oral et de l’autre, les tenants d’un fonctionnement spécifique
rapique. Les psychothérapeutes et les psychanalystes sortent du des psychotiques. Ce fonctionnement se construit autour de
cadre strict de la cure et commencent à « s’occuper des modalités défensives particulières comme le déni, le clivage et
23 autres heures de la vie des patients » selon la formule de la projection pour les freudiens, l’identification projective et la
Racamier [3] . La deuxième direction utilise la psychanalyse position schizoparanoïde pour les kleiniens, et la forclusion du
comme modèle de compréhension psychopathologique et Nom du Père pour les lacaniens [14].
propose une technique thérapeutique s’inspirant de la psycha-
nalyse dans ses modalités thérapeutiques. La faiblesse du Moi
Dans les pays anglo-saxons, la psychothérapie des psychoses
a débuté dès les années 1930 et selon la même dualité d’appro- Federn [15] a le premier mis en avant la faiblesse du Moi dans
che. D’un côté des auteurs qui à partir de leur pratique institu- la psychose. Contrairement à l’hypothèse freudienne première
tionnelle vont exposer leur travail psychothérapique. Ainsi, d’un surinvestissement libidinal du Moi psychotique, il va
Bullard [4], Fromm-Reichmann [5] vont décrire leur pratique postuler une insuffisance d’investissement libidinal du Moi.
psychothérapeutique à partir de leur expérience à la clinique de Cette carence narcissique limite la possibilité d’investissement
Chesnut-Lodge à Washington. Il en sera de même pour K. et C. objectal par le psychotique et détermine la faiblesse des limites
Menninger à la Menninger clinic [6]. De l’autre côté, des auteurs et du sentiment du Moi dans la psychose, ce qui débouche sur
vont s’appuyer sur leur conception psychanalytique de la les angoisses de dépersonnalisation. Un des objectifs de la
psychose pour mieux proposer de nouvelles modalités de psychothérapie est de renforcer les limites du Moi et de favori-
traitement. Ce sera notamment le cas de Mélanie Klein [7] et ser sa différenciation et son intégration.
d’auteurs post-kleiniens comme Bion [8], Segal [9] ou Rosen- Ce défaut d’intégration est repris par Racamier dans ses
feld [10] qui tous seront partisans d’une application stricte du notions de « personnation et de dépersonnation ». S’appuyant
cadre psychanalytique aux patients psychotiques. sur les travaux de Federn et de l’égopsychologie, il définit la
personnation comme le mécanisme par lequel le Moi va
pouvoir fonctionner de manière intégrée, en ayant un senti-
Psychothérapie, psychanalyse ment d’unité et de continuité. Ce travail est effectué par le Soi
des psychotiques : premières questions « le soi tout en manifestant un degré capital de l’évolution du
Moi, c’est-à-dire de l’intégration des fonctions adaptatives du
Les articles de Racamier dans l’EMC de 1958, sur « La tech- sujet, constitue (...) comme le garant de cette intégration et de
nique de psychothérapie dans les psychoses », débutent par la cohésion fonctionnelle » [16]. La personnation est un phéno-
deux parties consacrées aux objections et aux difficultés de la mène universel, spécifique du travail d’intégration de la psyché
psychothérapie des psychoses. Racamier balaye d’un trait la humaine.
première objection car pour lui il est indéniable que l’on peut L’attaque de la vie psychique dans ses fondements, son
utiliser la psychothérapie dans le traitement de psychoses. Il identité, ses capacités de liaison caractérise le fonctionnement
souhaite qu’elle soit proposée rapidement et non pas comme psychotique et se traduit par un sentiment de dépersonnation
dernier recours après l’échec « des traitements dit biologiques », durable. La psychothérapie a comme objectif de remettre en
et seulement une fois que « le milieu est assaini », c’est-à-dire marche les processus de liaison pour rendre à nouveau possible
une fois que les conditions de vie hospitalière ou familiale sont le travail de personnation.
suffisamment étayantes pour permettre le travail psychothéra- Les théories de Sechehaye s’inscrivent également dans ce
pique. Il réfute tout aussi rapidement la deuxième objection, courant d’un Moi psychotique faible. Pour elle, la faiblesse vient
mettant en avant la nécessité de promouvoir « une psychiatrie de l’accumulation de frustrations réelles qu’a du subir le
saine et efficace (...) psychothérapique » [1, 2] en raison de la psychotique dans sa petite enfance, ce qui a conduit à la
multiplicité des facteurs en jeu. Le débat qui fait rage à l’époque désagrégation de son Moi. Le travail du thérapeute s’appuie sur
concerne l’étiologie des psychoses, opposant les tenants d’une ce qu’elle nomme « la réalisation symbolique » [17]. Il s’agit de
organogenèse à ceux d’une psychogenèse, les premiers s’oppo- réparer les frustrations subies, réparation fantasmatique, réelle,
sant à ce titre à l’utilisation de la psychothérapie. voire corporelle à travers des échanges directs avec le patient.

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Dans le « Journal d’une schizophrène » [18] elle donne à psychanalyse ne peut être pratiquée avec des psychotiques, il
manger une pomme à sa patiente, pomme qui a pour but s’appuie sur une définition stricte de la cure, dans laquelle se
symbolique de réparer les effets du mauvais sein qui l’a frustrée constitue une névrose de transfert dont la résolution permet la
dans sa petite enfance. Sa théorie s’appuie aussi sur les concep- fin de l’analyse. De manière plus générale, le transfert s’appuie
tions de M. Klein sur les bons et mauvais objets, M. Klein avec sur les relations qui vont se nouer entre analysé et analyste ;
qui elle correspondra. parler de transfert chez le psychotique implique de s’appuyer
sur une théorie des relations d’objet dans la psychose.
Des mécanismes de défense spécifiques Pour les tenants d’un Moi faible, les relations d’objet sont
menaçantes pour le psychotique car elles entraînent un surcroît
M. Klein représente un deuxième courant de pensée dans les
libidinal qui dépasse les capacités d’adaptation du Moi et qui
théorisations de la psychose, dans lequel le fonctionnement
majore la fragilité narcissique. Du côté d’une définition au plus
psychotique se caractérise par des modalités défensives spécifi-
proche de la définition freudienne du transfert, on trouve la
ques organisées autour de la position schizoparanoïde. Cette
position de Lébovici pour qui, dans la psychose, « le Moi est si
phase du développement concerne les 4 premiers mois de la vie
altéré dans son fonctionnement que le transfert ne se consti-
du bébé. Pour M. Klein, contrairement à S. Freud, les relations
tue » [19]. D’autres auteurs ont ensuite élargi la définition de
d’objet existent dès le début de la vie avant même que le Moi
transfert en s’appuyant sur plusieurs éléments : la mauvaise
ne soit constitué. Les relations d’objets précoces, comme elles
différenciation Moi/non-Moi, l’importance et la persistance des
s’organisent dans la position schizoparanoïde, se divisent en
processus primaires, la difficile séparation entre réalité interne et
relations à de bons objets et des relations à de mauvais objets
réalité externe. Ainsi pour Searles, il s’agit d’un transfert
vécus comme persécuteurs. L’enfant clive donc les relations à sa
symbiotique où derrière la façade première du mépris qui
mère en relation avec un bon sein, gratifiant qui doit être
protège de la désillusion, s’installe une relation d’adoration où
protégé et un mauvais sein persécutant qu’il faut attaquer.
le thérapeute est vécu comme une mère omnipotente. Il s’agit
La maturation et le passage à la position dépressive, après
alors de restituer au transfert sa réalité en le séparant des
4 mois, vont permettre à l’enfant de sortir de ce fonctionne-
processus délirants. Il reconnaît la difficulté à faire la part des
ment clivé pour avoir des relations avec un objet total, bon et
choses entre le transfert psychotique et le transfert délirant
mauvais à la fois. C’est parce que l’enfant va prendre conscience
décrit par Little : « dans le transfert délirant [...] l’analyste est de
qu’en s’attaquant au mauvais, il s’attaquait à sa mère, aussi
manière absolue [...] à la fois les parents idéalisés et leurs
porteuse du bon sein, qu’il va éprouver des sentiments de
opposés » [20] alors que dans le transfert psychotique l’analyste
culpabilité à l’origine du vécu dépressif et des angoisses de perte
est vécu comme l’un ou l’autre des parents dans une identifica-
d’objet.
tion massive et exclusive.
Le psychotique n’a pas accès à la position dépressive, régie
Searles se situe à la jonction avec les théories de M. Klein
par l’ambivalence face à l’objet, il continue à évoluer dans un
dans son utilisation de l’identification projective dans l’instal-
monde où les objets sont clivés en bon et mauvais. Une des
lation du transfert avec le psychotique. Il s’en différencie
modalités défensives préférentielles face aux mauvais objets
cependant fortement puisqu’il se refuse à interpréter le transfert
internes est l’identification projective par laquelle une partie de
tant que celui-ci n’a pas repris une place dans la réalité, c’est-à-
ces mauvais objets (une partie du soi en utilisant une autre
dire que le Moi ne s’est pas suffisamment consolidé pour
terminologie) est placée dans l’objet et peut alors faire l’objet
s’engager dans des relations objectales secondarisées.
d’attaques, dans le but de pouvoir contrôler l’objet.
Pour les kleiniens et les post-kleiniens, l’objet est d’emblée
Le travail du psychanalyste, pour M. Klein, est alors qu’il
présent même s’il se construit en dehors de toute ambivalence
prenne conscience de cette modalité de fonctionnement du
et que les transactions avec lui passent par l’identification
psychotique et qu’il puisse accueillir ces mauvais objets issus de
projective. À ce titre, le transfert doit être analysé d’emblée, tout
l’identification projective.
silence serait pour le patient psychotique source d’angoisse.
Le travail principal se centre sur le ressenti de l’analyste, c’est-
Rosenfeld définit le transfert psychotique comme : « relations
à-dire sur le contre-transfert plutôt que de vouloir d’emblée se
transférentielles intenses et primitives vécues par des patients en
centrer sur le transfert psychotique. Ces conceptions seront
séance dans des moments de régression intense » [21]. Pour lui,
reprises et développées par l’école kleinienne, notamment par
il va s’installer en miroir avec la névrose de transfert « une
Bion par analogie au travail de détoxification de la mère qui,
psychose de transfert ». Le rôle du thérapeute est de contenir ces
par sa capacité de rêverie, va pouvoir modifier les données
mouvements régressifs et ce d’autant plus que leur soubasse-
sensorielles brutes d’origine interne ou externe appelées élé-
ment reste l’identification projective, l’analyse du contre-
ments bêta en éléments alpha (éléments qui sont représentés à
transfert est faite dans un deuxième temps.
la conscience).
Cette fonction alpha, ou fonction de détoxification, fait
défaut chez le psychotique qui continue à être assailli par des Contre-transfert et psychose
données brutes qui ne sont pas transformées en processus de Le contre-transfert tient une place importante dans la
pensée et qui ne peuvent être que projetées à l’extérieur. réflexion théorique de la psychothérapie des psychoses. Comme
Le thérapeute doit dans un premier temps servir d’appareil à le souligne Racamier « La conscience du contre-transfert donne
penser pour le patient, en assurant la fonction de détoxification, les meilleures et parfois les seules indications de l’état du
pour ensuite établir une fonction alpha chez le psychotique. transfert » [22], puis dans l’EMC en 1958 « il est amplement
démontré que le contre-transfert du psychothérapeute joue dans
Psychanalyse entre théorie et technique la cure un rôle réellement essentiel » [1, 2]. Le consensus porte à
la fois sur l’importance et l’analyse du contre-transfert et,
L’ensemble de ces orientations théoriques va déboucher sur
comme le dit Fromm-Reichmann, sur la nécessité « que le
une vaste réflexion sur les questions techniques de la psycha-
thérapeute reste maître de son contre-transfert » [5]. Les modali-
nalyse. La première question porte sur la nécessité d’une
tés vont diverger sur la nature et l’utilisation de ce dernier.
modification de la technique même de la psychanalyse. Pour les
Le contre-transfert avec le psychotique est principalement de
kleiniens il ne faut rien modifier de la technique classique, pour
nature parentale : paternelle dans une excessive rigidité et
les autres, au contraire il faut des aménagements importants.
sévérité, ou à l’inverse maternel dans une bienveillance qui tient
Du transfert dans la psychose à la psychose plus à la surprotection qu’à la neutralité.
La massivité des affects éprouvés par le psychotique met à
de transfert
mal les fonctions de contenance du thérapeute et explique qu’il
Un des premiers débats ou une des premières controverses sur a fallu attendre Bettelheim pour que la question de l’amour que
la place de la psychanalyse dans la psychothérapie des psycho- le thérapeute doit porter ou non à son malade soit résolue par
ses a touché à la notion de transfert. Quand Freud dit que la une formule-titre d’un ouvrage : « L’amour ne suffit pas » [23].

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Tableau 1. dans plusieurs institutions. Les plus importantes sont Chestnut


Caractéristiques générales d’une analyse de schizophrène (d’après [25]).
Lodge dans les environs de Washington et la clinique Mennin-
Objectifs généraux Objectifs de l’aménagement ger dans le Kansas.
du cadre À Chestnut Lodge, Fromm-Reichmann va jouer un rôle
essentiel, d’abord en assurant des psychothérapies de patients
Prise de conscience de l’histoire Une structuration progressive
psychotiques (elle aura le titre de directrice de la psychothéra-
personnelle et de la structuration de la personnalité
pie) et en élaborant une réflexion théorique autour de sa
progressive d’une personnalité Un dégagement des identifications
morcelée
pratique.
aliénantes
Son ouvrage « Principes de psychothérapie intensive » a été
Une identification progressivement une référence importante. Elle y insiste sur la nécessité pour le
structurante thérapeute de s’appuyer sur son contre-transfert et sur la
Une liberté relationnelle La reconnaissance compréhension du discours du psychotique. Le Chestnut Lodge
authentique et une vie affective par le schizophrène du sens Hospital deviendra le premier centre d’orientation psychanaly-
de son aliénation tique spécialisé dans le traitement de la schizophrénie.
La possibilité de se déprendre des Dans les années 1920, C. Menninger fonde avec ses deux fils
contraintes massives de la psychose une clinique dans le Kansas à Topeka, clinique dont la spécifi-
Un accès à une identité sexuelle L’émergence d’un processus cité est de promouvoir la prévention, l’enseignement et la
et une vie affective de subjectivation recherche. Un de ses fils, K. Menninger crée au centre de la
Le devenir d’un sujet désirant clinique un institut pour la psychanalyse. Des programmes de
formations pour les psychiatres et les professionnels travaillant
La suppression de toute séance Au terme du processus
en psychiatrie furent développés, ainsi qu’un programme de
d’analyse de subjectivation
recherche sur la place de la psychothérapie et de la psychana-
lyse dans la prise en charge des patients psychotiques. La
clinique Menninger reste de nos jours un centre toujours actif
dans la formation des internes en psychiatrie et des personnels
Pour Searles, le patient va partager avec l’analyste dans le
soignants.
transfert et le contre-transfert, une période de symbiose qui
contraint l’analyste à accepter ses propres pulsions régressives,
il doit aussi avoir « plus d’estime de soi pour s’exposer à une
En France
admiration aussi intense de la part du patient que pour affron- Une première expérience est née dans les années 1940 à
ter son mépris » [20]. Le contre-transfert qui s’exprime notam- l’hôpital de Saint-Alban, menée par le psychiatre catalan
ment dans la réponse émotionnelle de l’analyste peut se F. Tosquelles réfugié en France où il poursuivit le travail qu’il
concevoir comme « un instrument de recherche à l’intérieur de avait mené en Catalogne à l’hôpital de Réus.
l’inconscient du patient » [24]. Il s’agit pour le thérapeute de En faisant participer des patients psychotiques chroniques à
trouver ce que Nacht appelle une « présence » construite à partir des activités, dont des activités culturelles en dehors de l’hôpi-
d’une juste distance et d’une relation suffisamment investie tal, il a démontré que ceux-ci étaient moins passifs et que cela
pour permettre au patient d’exister à travers le contre-transfert était bénéfique sur leur fonctionnement psychique. Le terme de
et d’éprouver la sécurité d’une relation stable et durable psychothérapie institutionnelle a été introduit pour la première
(Tableau 1) [25]. fois dans un article de 1952 par Daumezon et Koechlin [26]. La
psychothérapie institutionnelle pour Ayme consiste « à articuler,
dans une structure sociale concrète, les techniques d’ambiance
■ Évolution du concept et les techniques psychothérapiques en un système global de
soins psychiatriques » [27].
de psychothérapie des psychoses Le courant s’est développé dans plusieurs cliniques : à La
Borde, à La Chesnaie, à Saumery puis dans d’autres structures,
À partir des années 1970, la psychothérapie des psychoses va notamment avec l’association mentale dans le XIIIe arrondisse-
être liée à la notion de soins institutionnels et de soins en ment de Paris, ou dans le dispositif de soins de la Mutuelle
institution. En effet, l’évolution chronique de la schizophrénie, générale de l’Éducation nationale (MGEN) en Île-de-France. Ces
même si le développement des traitements neuroleptiques a projets étaient portés par une équipe animée par un psychiatre,
limité l’évolution déficitaire que l’on observait à la fin du J. Oury ou F. Tosquelles à la Borde, Sivadon à la Verrière,
e
XIX siècle, rend souvent indispensable les soins en milieu Daumezon à Fleury les Aubrais, Racamier à La Velotte à
hospitalier. Le courant de la psychothérapie institutionnelle Besançon.
initié en France à la fin de la seconde guerre mondiale, va Outre la transformation de l’asile en instrument de soins à
déboucher sur deux approches complémentaires. La première va taille humaine permettant et favorisant les relations avec les
avoir comme objectif de façonner l’institution pour en faire un autres et avec le monde, l’institution est pensée comme un
outil de soins au cœur du dispositif psychothérapique. organisme vivant. À l’intérieur de l’institution, les changements
Il s’agit comme le proposait Racamier de travailler avec « un s’opèrent : les relations entre les soignants et les soignés
milieu assaini » qu’il s’agisse du milieu familial ou du milieu changent, des relations hiérarchisées se transforment en
soignant. relations transversales, limitant le risque de passivation par
La deuxième va naître officiellement en 1960 en France avec l’hôpital et luttant aussi contre la tendance à la passivité induite
la circulaire sur la sectorisation. Il s’agit d’organiser les soins par la schizophrénie.
autour du patient, à proximité de son lieu de vie. Cette organi- La rencontre avec le patient psychotique n’a plus exclusive-
sation a été d’abord élaborée à partir de la prise en charge de ment lieu dans le bureau du psychiatre, mais se fait aussi à
patients psychotiques chroniques hospitalisés au long cours. travers des activités. Un des maillons essentiels de la transfor-
mation d’activités occupationnelles en activités thérapeutiques
va être la structuration des clubs thérapeutiques. Ils regroupent
Psychothérapie institutionnelle, l’institution soignés, soignants, familles dans une association cogérée
comme outil psychothérapique proposant des activités dans l’hôpital et dans la cité, ainsi que
des lieux d’hébergements de type appartements associatifs.
Aux États-Unis L’objectif des clubs thérapeutiques est double : offrir un
espace psychothérapique au sein même de l’hôpital en favori-
Aux Etats-Unis, dès les années 1930, la réflexion sur les soins sant une dynamique de changement luttant contre la chronicité
aux patients psychotiques s’est basée sur les expériences menées mais aussi rompre avec la césure entre hospitalisation et

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réinsertion, l’hôpital devenant la première étape du processus de ou transitionnel qui va rendre possible cette émergence d’un
réinsertion. La structuration des clubs thérapeutiques en sujet qui se pense comme une personne et qui peut donc
association loi de 1901 fit dire à Rappard que « les clubs commencer à s’autonomiser sans risquer de disparaître ou d’être
thérapeutiques devenaient ainsi le complément indispensable annihilé par des angoisses effroyables.
des organisations d’hygiène mentale tout en faisant partie Toujours en 1956, le psychanalyste argentin J. Bleger va
intégrante de l’arsenal thérapeutique » [28]. s’engager dans une analyse des effets et du rôle du cadre
La psychanalyse a nourri la réflexion théorique du courant de thérapeutique. Cette réflexion est motivée par un souci de
la psychothérapie institutionnelle. L’institution comme orga- comprendre ce qui, dans certaines cures, vient faire obstacle au
nisme vivant et malade doit faire l’objet d’une analyse « insti- travail thérapeutique, et se pencher sur la spécificité du cadre
tutionnelle », les relations qui se construisent dans l’institution institutionnel. Bleger part de l’analyse du cadre psychanalytique
sont comprises à partir du concept de transfert et de contre- pour ensuite étendre sa réflexion à l’ensemble des processus
transfert, les modalités thérapeutiques sont pensées à partir des thérapeutiques.
concepts freudiens. Ainsi, les clubs thérapeutiques sont « pro- Il sépare, dans le développement de l’enfant, le Moi et le
ches des frayages du pare-excitation conceptualisé par Freud, ce non-Moi, le non-Moi étant issu de la phase de symbiose avec la
qui permet de mettre en jeu de plus faibles quantités d’énergie mère. Sa constitution muette et implicite va permettre au Moi
psychique (...) cette fonction facilite les processus d’inscription de l’enfant de se constituer en se séparant. Le non-Moi renvoie
psychique interne et protège contre les excitations exter- à la période d’indifférenciation dans laquelle le bébé ne se pense
nes » [29]. Le travail de psychothérapie s’engage donc directe- pas encore comme un sujet et ne peut donc concevoir sa mère
ment dans l’institution, en offrant au patient des espaces et par extension les autres comme des objets, d’où cette
différenciés et des modalités de rencontres variées. dénomination de non-Moi. « Les institutions et le cadre consti-
tuent toujours un “monde fantôme” celui de l’organisation la
Institution et cadre thérapeutique plus primitive et la moins différenciée ce qui est toujours là ne
se remarque que lorsqu’il vient à faire défaut » [34].
La psychothérapie institutionnelle a ouvert le champ d’exer- Cette vision du cadre vient compléter celles de Freud et de
cice de la psychanalyse en dehors du cadre strict du cabinet de Winnicott. D’un côté, Freud mettait en avant une fonction que
l’analyste et du divan pour l’élargir à la psychothérapie de l’on peut qualifier de paternelle, dans l’établissement de règles
patients psychotiques en institution, comme en atteste le titre à ne pas transgresser, oscillant entre un rappel à la loi et une
du livre coordonné par Racamier « Le psychanalyste sans vision surmoïque interdictrice du cadre, où le cadre est le
divan » [30] . Elle a aussi eu comme effet de proposer des vecteur du processus thérapeutique.
modifications de la technique même de la cure psychanalytique De l’autre, la vision maternelle de Winnicott pour qui les
dans une réflexion centrée principalement sur le cadre de soins fonctions du cadre se déclinent à partir des fonctions de la
qui est une notion élargie du cadre analytique. mère, maternante et contenante et sur la création d’un espace
Pour Freud le cadre analytique a une place centrale dans le transitionnel, premier aménagement de la séparation pour
dispositif de la cure, c’est-à-dire dans le processus thérapeutique. l’enfant, le cadre appartenant à l’ensemble du dispositif.
Il va construire progressivement le cadre analytique en étant Bleger sort de cette dialectique pour introduire une dialecti-
orienté par les patients qu’il reçoit. Ainsi, lors d’une consulta- que plus archaïque entre processus et non-processus. Le travail
tion de 1889 avec Emmy von N., elle lui demande « Ne bou- en institution et avec des psychotiques lui fait penser le cadre
gez pas ! Ne dites rien ! Ne me touchez pas ! » [31]. Cet énoncé avant les enjeux œdipiens, quand il s’agit de constituer une
conforte Freud dans la mise en place d’un cadre thérapeutique trame, un squelette sur lesquels des éléments vivants et plus
fixe. mobiles pourront alors s’accrocher : quitter la période de non-
Le cadre, dans sa conception de dispositif, se construit à la Moi pour aller vers celle d’un Moi qui se constitue.
fois sur des éléments matériels comme la fréquence ou la durée D’autres auteurs comme Anzieu [35] et Kaës ont poursuivi la
des séances, mais aussi sur des éléments plus techniques comme réflexion théorique sur le cadre de soins. Pour Kaës dans la suite
l’association libre ou les interdits du toucher et de l’agir pour des travaux d’Anzieu sur le Moi-peau, le cadre thérapeutique a
l’analyste. une double fonction de « conteneur qui débouche sur la
Winnicott va poursuivre et enrichir la réflexion freudienne transformation des processus psychiques et sur la métabolisation
sur le cadre psychanalytique. En 1956, il introduit la notion de des contenus destructeurs » et une « fonction transitionnelle qui
setting, qu’il définit comme « la somme de tous les détails de rétablit la capacité de symbolisation par l’intermédiaire du jeu
l’aménagement du dispositif de la cure psychanalytique » [32]. notamment » [36].
Pour Winnicott, on peut faire un parallèle entre les premières Racamier va s’appuyer sur tous les travaux précédents et sur
interactions mère-enfant et l’organisation des soins aux patients son travail à La Velotte pour mettre en avant la transposition
les plus fragiles, et notamment aux psychotiques. Le cadre nécessaire du cadre analytique vers le cadre de soins. L’objectif
thérapeutique a donc une triple fonction de holding, de conte- de cette transposition étant de « pouvoir y recevoir des psychés
nance, de handling, de maintenance et de nursing, de soins. essentiellement discontinues qui sont propres à la
L’établissement du cadre pour Winnicott « ne va pas de psychose » [37].
soi » [33] et pourtant il est au centre du soin aux patients les plus Une autre partie de son travail concerne la composition du
vulnérables, ceux qui doivent à un moment de leur existence cadre des soins. En cela, il rejoint Bleger qui distingue l’aspect
être hospitalisés. L’objectif sous-tendu derrière cette conception invariant quasi mécanique du cadre et l’aspect actif qu’il
du cadre est double. Le premier objectif concerne l’émergence nomme « le processus ». Le processus pour Racamier est agi par
du self. Le cadre va, en ayant les capacités attribuées à la mère les soignants mais doit être porté par une réflexion globale, celle
et liées au maternage, pouvoir jouer un rôle de contenance, de qui insuffle l’esprit des soins, esprit sans lequel le cadre n’est
pare-excitation devenant une sorte d’appareil à penser selon la qu’une coquille vide de sens beaucoup plus toxique que
terminologie de Bion. bénéfique car elle laisse le patient psychotique face à son
Les soins ne se limitent ni ne se substituent à un maternage monde fantôme, c’est-à-dire face à ses pulsions d’autoconserva-
défaillant mais permettent véritablement une restauration tion, de répétition et de fusion.
narcissique qui débouche sur un investissement moins anxio-
gène de la réalité.
Le deuxième objectif est de permettre au patient de sortir de Institution et médiations thérapeutiques
l’état de dépendance et de fusion induit par la psychose. La
séparation avec les parents est impossible en raison de l’absence La réflexion sur la psychothérapie des psychoses par la
de travail de personnification selon la terminologie de Winni- psychothérapie institutionnelle a mis en avant les médiations
cott. Le cadre, en raison de ses propriétés intrinsèques de thérapeutiques, en en faisant un outil essentiel du soin psycho-
fiabilité et de permanence, va délimiter un espace intermédiaire thérapique des patients psychotiques, notamment chroniques.

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Les activités thérapeutiques ont commencé en psychiatrie au processus créatif et délire dans les ateliers de pratique artistique,
e
XIX siècle. La notion de médiation thérapeutique s’est cons- sensations corporelles et hallucinations cénesthésiques dans les
truite en s’appuyant sur deux concepts complémentaires : la prises en charge corporelle.
notion d’intermédiaire chez Freud et celle de transitionnalité Le corps a une place particulière dans les médiations théra-
chez Winnicott. À partir de ses travaux sur l’objet transitionnel, peutiques. S’il peut être outil de médiation, il ne peut s’y
Winnicott va introduire la notion de transitionnalité et d’aire résumer puisqu’il est d’abord et avant tout le premier support
transitionnelle ou intermédiaire. Comme l’objet transitionnel et la première forme que revêt le Moi du sujet. Pour Freud, le
qui se situe entre la mère et l’enfant tout en n’étant ni la mère Moi est avant tout un Moi corporel. Le corps est aussi le
ni l’enfant, l’aire transitionnelle se situe entre le monde premier mode de communication. Dans la psychose, le corps est
intérieur et le monde extérieur tout en étant composé en partie malmené, dissocié, morcelé. Pour Pankow, la dissociation dans
par chacun des deux. Elle permet à l’enfant, qui va par le jeu son expression corporelle se définit comme « une destruction de
investir cette aire transitionnelle, de mettre sa créativité au l’image du corps telle que les parties perdent le lien avec le tout
service de l’investissement de la réalité extérieure, de supporter pour réapparaître dans le monde extérieur » [42]. Elle propose de
« la désillusion » de la perte de la fusion maternelle. travailler sur les « failles » de la construction de l’image du corps
Les médiations thérapeutiques pour Kaës ont plusieurs en utilisant des techniques comme le modelage pour entrer en
fonctions : permettre une représentation de l’origine et une communication et mettre en place « des greffes de transfert ».
oscillation entre créativité et destructivité, circonscrire une Il s’agit de proposer au patient de réaliser avec de la pâte à
problématique des limites, s’opposer à l’immédiat, susciter un modeler des personnages, des objets, qui vont servir de support
cadre spatiotemporel. à l’expression et qui pourront ensuite être identifiés et intégrés
Toutes ces fonctions vont venir éclairer la problématique dans un environnement spatial. « L’acte de modeler que le
psychotique et engager le patient dans un processus de change- médecin fait faire au malade [...] est là pour l’aider à formuler
ment en s’appuyant sur une dynamique qui ne repose pas des demandes et à reconnaître des désirs inconscients » [43].
seulement sur l’utilisation du langage. Comme le souligne Michaud, la technique permet « d’aller
jusqu’au bout du stade dit de la catastrophe et de la reconstruc-
Médiations d’objets tion végétale » [44] pour permettre au psychotique de sortir de
son univers de destruction et de chaos en donnant un sens à
Dans ce groupe, on peut retrouver l’ensemble des médiations des expériences sensorimotrices jusque-là non représentables.
qui vont utiliser un objet comme support. L’objet peut être le Tous ces éléments sont un support permettant la reprise des
corps du patient, dans les packs ou les massages, ou un objet processus de liaison, et à ce titre participent au processus
extérieur comme dans l’ergothérapie, la sociothérapie ou psychothérapeutique dans lequel les patients psychotiques
l’art-thérapie. peuvent s’inscrire. Plus les processus de symbolisation ont été
Les objectifs psychothérapiques des médiations avec des mis à mal par la psychose, plus la psychothérapie s’appuie
patients psychotiques sont multiples. Les médiations sont d’abord sur les médiations thérapeutiques avant d’utiliser le
d’abord un premier support de relation, notamment dans médium plus classique qu’est la parole et ainsi préparer la
l’investissement du quotidien qui devient le premier objet de rencontre avec l’autre ; « le travail sur le signifiant est souvent
médiation (on retrouve ici un des principes de la psychothéra- illusoire avec lui (le psychotique) » [45].
pie institutionnelle qui place le quotidien au cœur du dispositif
thérapeutique). Elles permettent des relations transférentielles Médiations groupales
moins menaçantes que celles établies dans la relation duelle,
relations que Oury nomme « les transferts dissociés » [38]. Elles La deuxième grande catégorie de médiations concerne les
limitent la tendance à la passivité et au repli en offrant des médiations groupales. Dès l’article princeps de Racamier en
activités régulières et programmées. Elles assurent un renforce- 1958 sur « les techniques de psychothérapie dans les psycho-
ment du narcissisme en offrant au sujet des activités reposant ses » l’utilisation de groupes thérapeutiques est mise en avant.
moins sur l’investissement intellectuel et plus sur le plaisir à L’utilisation des groupes psychothérapiques pour les patients
fonctionner. Ces activités en faisant appel à la créativité, à la psychotiques repose notamment sur les travaux de Bion sur les
dimension artistique et culturelle, limitent la place de la pulsion petits groupes et sur les travaux de Kaës sur l’appareil psychique
de mort dans la psyché du psychotique. En permettant une groupal et l’illusion groupale. Bion va étendre le travail com-
utilisation différente d’un objet concret qui peut être façonné, mencé par Freud dans « Psychologie des foules et analyse du
réparé, mis à distance ou investi, elles symbolisent les nouvelles Moi » [46] sur la place de l’inconscient dans les groupes, dans le
modalités de relations d’objets, sortant le psychotique de but de pouvoir utiliser l’analyse de groupe pour les pathologies
l’alternance entre attraction-fusion d’un côté et rejet- de type borderline ou psychotique. Le groupe se constitue
anéantissement de l’autre. Les travaux de Roussillon, dans la d’abord autour d’un « groupe de base » qui va mobiliser des
suite de ceux de Milner sur le médium malléable [39], mettent états émotionnels intenses rattachés aux processus primaires.
en lumière la dimension thérapeutique des médiations dans la Pour Bion [47] le travail dans le groupe se fait autour de trois
psychose. Le médium malléable se caractérise par son « indes- « présupposés de base » qui sont : « la dépendance » face au
tructibilité, extrême sensibilité, indéfinie transformation, leader du groupe, « l’attaque fuite » face au fantasme collectif
inconditionnelle disponibilité et animation propre » [40] , il d’une menace interne ou externe pesant sur le groupe et enfin
permet aux patients psychotiques de lutter contre les vécus « le couplage » qui va permettre au groupe d’avoir l’espoir que
infantiles d’agonie primitive et d’avoir accès à une destructibi- par l’union dans le groupe ou à son leader il sera sauvé.
lité tempérée qui ne menace pas de destruction l’objet puisque Anzieu va prolonger cette analyse du fonctionnement groupal
ce dernier peut être réparé et est représenté à chaque séance. en proposant la notion « d’illusion groupale » [48] qui va
Il s’agit aussi comme le souligne Brun « à travers le processus permettre qu’après un temps d’inquiétude les membres du
créateur [...] de prendre conscience de représentants psychiques groupe éprouvent un bien-être et un sentiment de sécurité à
inconscients, de l’ordre de la sensation, de l’affect ou de l’image l’intérieur de celui-ci, sécurité qui va permettre d’engager un
motrice, en lien donc avec une réalité somato-psychique » [41]. travail thérapeutique. Pour Kaës, il faut travailler sur « l’appareil
Cette première étape va ensuite déboucher sur la délimitation psychique groupal » [49], dispositif de liaison et de transforma-
et la prise de conscience d’un espace psychique suffisamment tion des processus psychiques de chaque membre participant au
consolidé pour entrer en relation, après l’avoir utilisé, avec groupe et d’interactions entre les appareils psychiques des
l’objet. membres du groupe.
Les médiations avec utilisation d’un objet sont aussi un Pour les patients psychotiques, le travail psychothérapique de
accrochage concret pour reprendre contact avec la réalité : en groupe vient lutter contre les effets de la psychose sur le
s’appuyant sur une série de consignes dans la réalisation d’un psychisme qui, en raison de la fragilité narcissique, vit les
objet comme dans les activités d’ergothérapie, en différenciant relations objectales comme une menace d’anéantissement. Pour

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Kaës, l’appareil psychique groupal rend possible le transfert Tableau 2.


d’investissement du groupe vers l’individu. Il permet également Éléments communs aux programmes d’interventions familiales
de consolider la différenciation des individus au sein du groupe (d’après [63]).
ainsi que leur investissement narcissique. Parmi les nombreuses Objectifs
fonctions du groupe décrites par Kaës, celles de transformation
et de liaison de l’énergie psychique interne, de contention et de 1 Éduquer la famille sur la maladie et la prise en charge
pare-excitation, de différenciation entre le dedans et le dehors, 2 Se montrer préoccupé et empathique envers la famille
le bon et le mauvais, le projetable et l’introjectable sont au qui doit faire face à la maladie mentale
cœur de la dynamique de changement à l’œuvre dans la 3 Éviter les reproches ou la stigmatisation des stratégies utilisées
psychothérapie de groupe pour les patients psychotiques. On par la famille pour faire face
retrouve également les fonctions propres à l’espace transitionnel 4 Encourager le développement de chaque membre de la famille
de Winnicott que le groupe thérapeutique symbolise. L’espace 5 Augmenter l’adhésion aux traitements médicamenteux et
groupal assure une fonction de contenance, et offre une surface diminuer l’utilisation de toxiques et l’exposition aux stress
de projection des contenus primaires et archaïques de la psyché 6 Améliorer les habiletés de la famille dans la communication
qui peuvent ainsi être mobilisés sans risque de désorganisation et la résolution de problèmes
complète du patient. La décompensation psychotique survient 7 Promouvoir un traitement souple et sur mesure adapté
le plus souvent à l’adolescence ou à l’entrée dans l’âge adulte, aux besoins spécifiques de la famille
limitant les possibilités d’insertion sociale. Le travail psychothé- 8 Encourager les membres de la famille à développer un support
rapique en groupe, tout comme le groupe de pairs à l’adoles- social en dehors du réseau familial
cence, va permettre un renforcement identitaire et la remise en 9 Instiller l’espoir dans le futur
route de processus de socialisation. Ces prises en charge 10 Mettre en place des perspectives à long terme
nécessitent une évaluation des objectifs et des indications afin
d’éliminer d’éventuelles contre-indications.

■ Au-delà de la psychanalyse À l’intérieur de la famille, la communication est particulière,


avec une utilisation régulière du double lien, ce qui rejoint les
Jusque dans les années 1970, l’influence de la psychanalyse théorisations de Racamier sur le lien symbiotique entre le
était forte dans la conceptualisation des mécanismes de la schizophrène et sa mère, la schizophrénie devenant « la variété
psychose et de son traitement. On a assisté progressivement à la plus radicale et la plus paradoxale de défense contre
un changement de paradigme mettant en avant l’organogenèse l’Œdipe » [3]. Les psychothérapies à cette époque sont basées
des troubles et donnant la priorité aux traitements médicamen- notamment sur les modifications de la communication et sur le
teux. Les espoirs dans la recherche pharmacologique étaient recours au paradoxe. Une des techniques alors utilisée est le
grands et le restent d’ailleurs, même si maintenant il apparaît contre-paradoxe, injonction paradoxale du thérapeute qui a
illusoire de pouvoir trouver « le médicament » pour guérir la pour but de mettre en échec les paradoxes parentaux [55].
schizophrénie. Le regard porté sur la famille a progressivement changé,
Dans la suite de ce mouvement de rejet de l’approche passant d’une famille, ou d’une mère à l’origine des troubles
psychodynamique, plusieurs études ont démontré que la seule dont le patient devait se séparer pour aller mieux cliniquement,
utilisation de traitements médicamenteux [50, 51] ne permettait pour aller vers une conception de la famille comme partenaire
pas d’éviter les rechutes et qu’il fallait promouvoir d’autres des soins et comme alliée indispensable. L’arrivée de la maladie
modalités de prise en charge. De nouveau, la question de la dans la famille entraîne des modifications profondes dans les
place de la psychothérapie ou plutôt des différents types de rôles, les fonctions, les attentes ou les projets des différents
psychothérapie s’est posée. membres de la famille. Les travaux sur le fonctionnement
familial se sont portés sur l’étude du fonctionnement émotion-
Travail avec les familles nel dans les familles ainsi que sur le niveau émotionnel de la
famille.
Très tôt, dès les premiers articles sur la psychothérapie, les Les émotions le plus souvent exprimées dans les familles de
liens avec les familles sont évoqués, dès les premiers articles de schizophrènes sont la colère, le désespoir, la honte, la culpabi-
Racamier dans l’EMC en 1958 [1, 2]. La place des familles a lité et l’hostilité. L’hostilité et les critiques concernent la
évolué au cours des années. Les premiers psychothérapeutes maladie et ses conséquences et sont aussi ciblées contre les
mettaient en avant la nécessité de compenser les carences traitements. En 1966, deux auteurs anglais [56] ont proposé le
affectives dont avaient été victimes les patients dans leur petite
concept d’expressed emotion classant les familles en high level et
enfance, en offrant dans la thérapie des gratifications compen-
low level en fonction de l’importance du niveau émotionnel de
satrices. Ainsi, Sechehaye affirmait que, dans sa technique « la
la famille. De nombreuses études ont montré que les patients
réalisation symbolique », « il est indispensable que le schizoph-
vivant dans des familles à haut niveau d’expression émotion-
rène perçoive d’emblée que son thérapeute vient à lui avec le
nelle ont un risque accru de rechutes [57, 58].
dévouement et l’amour inépuisable d’une mère pour son
Les modèles de psychothérapie familiale pour des patients
enfant » [52].
Dans les années 1960, Bateson [53] et Watzlawick [54] de l’école schizophrènes sont multiples et variés, ils vont de thérapies
américaine de Palo-Alto vont mettre en avant les troubles de la familiales de groupe [59] à des actions de guidance ou de
communication dans « le système familial », la notion de double psychoéducation familiale [60, 61] en passant par des interven-
bind anglo-saxonne devient double lien ou double entrave en tions de crise dans la famille [62].
France. La durée des séances, leur fréquence et la durée totale de la
Pour les systémiciens, le patient schizophrène n’est que le prise en charge familiale varie. Cependant, ces approches ont
symptôme des dysfonctionnements familiaux, la production de plusieurs points communs (Tableau 2) [63] :
ses symptômes ayant au niveau familial l’effet d’éviter l’expres- • la schizophrénie est considérée comme une maladie liée à
sion de conflits trop dangereux pour les capacités d’adaptation une vulnérabilité à des facteurs psychosociaux ;
de la famille. Les psychothérapies familiales sont nécessaires : • la famille est un partenaire indispensable pour les projets de
elles ont comme but de modifier les modalités de la communi- réinsertion et de réhabilitation du patient, l’alliance théra-
cation pour limiter la symptomatologie psychotique. Toujours peutique avec la famille est un objectif thérapeutique crucial ;
pour les systémiciens, la famille du schizophrène fonctionne • la famille n’est pas impliquée dans l’étiologie de la maladie,
comme un système aux limites floues à haut niveau émotion- mais des altérations du climat émotionnel de la famille
nel, avec une différenciation intergénérationnelle. peuvent modifier l’évolution des troubles ;

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• le travail avec les familles est complémentaire des autres Tableau 3.


Psychothérapies intégratives et éclectiques (d’après [67]).
modalités de traitement que sont les médicaments et la prise
en charge psychosociale. Niveau Caractéristiques
Les soignants doivent toujours prendre en considération les
difficultés vécues par les familles d’un enfant psychotique. Cela Niveau 1 Aides psychologiques :
vaut tout particulièrement pour les premiers stades de la - familiales
maladie où des changements importants dans l’attitude rela- - amicales
tionnelle du patient ne sont pas encore mis en rapport avec le - sociale et professionnelle
développement de la maladie. Ce n’est au plus tard, une fois Niveau 2 Soutien à effets psychothérapiques par des non « psy » :
celle-ci diagnostiquée que ces modifications des rapports du
- médecins traitants
sujet et de son entourage sont reconnues comme manifestations
- éducateurs
de la pathologie. La psychothérapie familiale doit débuter très
précocement dans les soins d’un patient schizophrène [64]. - travailleurs sociaux
Elle s’appuie soit sur des entretiens individuels avec la famille Niveau 3 Psychothérapies spécifiques :
et le patient, soit sur des psychothérapies de groupes, regrou- - thérapies cognitivocomportementales
pant plusieurs familles à la fois. Il s’agit de thérapies centrées - psychothérapie d’inspiration analytique
sur la parole afin que les membres de la famille puissent - psychothérapies systématisées diverses ayant comme
exprimer des émotions comme la culpabilité ou la honte et techniques possibles :
puissent les partager avec d’autres familles ayant vécu le même
• verbale/non verbale (corporelle par exemple)
cataclysme que représente l’entrée dans la maladie d’un enfant.
• individuelle/ groupale
Il s’agit aussi, avec ces programmes psychothérapiques, de lutter
contre l’isolement social que vivent ces familles en raison de • psychanalytique freudienne/kleinienne/lacanienne
leur crainte d’être stigmatisées ou rejetées. Les entretiens Niveau 4 Psychothérapies intégratives
peuvent également avoir une valeur psychoéducationnelle, afin Niveau 5 Psychothérapies institutionnelles
que les familles acquièrent un savoir dans la compréhension de
la maladie et des traitements. Les objectifs de ces sessions de
psychothérapie de groupe peuvent aussi s’appuyer sur les
modalités des psychothérapies cognitivocomportementales [65], le psychiatre choisit la thérapeutique en fonction de l’état
accompagnant les familles dans la gestion du stress, dans la clinique du patient et des effets escomptés. Il propose comme
mise en place de stratégies pour faire face à la maladie et la variable d’ajustement de la part respective entre traitement et
capacité à résoudre les problèmes afin d’en faire des partenaires psychothérapie l’évolutivité de la maladie : un patient en phase
à part entière dans la lutte contre les rechutes et pour l’obser- aiguë nécessite des doses de traitements plus importantes.
vance médicamenteuse [66]. Actuellement, la position « exclusive » a changé de camp et
se trouve plutôt du côté des tenants de la chimiothérapie. La
position la plus fréquemment adoptée par les psychiatres est la
Psychothérapies intégratives position « dynamique » dans un ajustement pour obtenir la
Si la psychothérapie des psychoses a débuté avec la psycha- réduction par les médicaments des symptômes les plus bruyants
nalyse comme nous l’avons vu précédemment, celle-ci a fait et les plus invalidants (envahissement par des symptômes
l’objet de nombreuses critiques. Parmi elles, la place de l’orga- productifs, dissociatifs ou anxieux) et permettre la mise en place
nogenèse dans la compréhension des troubles était la plus d’une psychothérapie. Si aux États-Unis de nombreux thérapeu-
prégnante, dans une opposition entre un trouble au substrat tes se sont longtemps opposés à l’utilisation des neuroleptiques,
biologique et un traitement s’appuyant sur une lecture psycho- en France des psychiatres de formation psychanalytique ont
dynamique des troubles. Pendant de nombreuses années, réfléchi aux relations entre chimiothérapie et psychothérapie.
l’opposition entre traitement médicamenteux et traitement Pour Widlöcher « il n’est pas exagéré de dire que dans le
psychothérapique au sens large a perduré. La mise en place domaine des psychoses, le médicament a contribué à l’essor
d’études randomisées sur l’efficacité des différents traitements a d’une psychanalyse appliquée » [68]. Les neuroleptiques ont été
montré que chacun d’entre eux présentait des limites et qu’il les plus étudiés dans leurs effets psychothérapiques, les autres
fallait maintenant envisager un traitement global de la schi- études ont été menées sur les sels de lithium et les
zophrénie intégrant les différentes conceptions théoriques sous- antidépresseurs [69].
jacentes, ce que l’on peut synthétiser sous la dénomination de Les neuroleptiques peuvent être considérés comme un des
psychothérapie intégrative (Tableau 3) [67]. éléments constitutifs du cadre thérapeutique, leur prescription
doit donc à ce titre rester stable et se prolonger pour permettre
Psychothérapie et traitement médicamenteux de travailler sur leur place dans le processus thérapeutique. La
dose d’entretien doit être recherchée est rester la plus basse
Dès 1974 dans l’article de l’EMC sur la psychothérapie des possible pour jouer un rôle de pare-excitation, de canalisation
psychoses, Racamier relève trois positions face à la place de la de l’afflux pulsionnel et de cohésion du Moi sans pour autant
chimiothérapie dans le traitement. Une position qu’il qualifie figer le patient et abolir tout désir, et toute possibilité d’insight
« d’exclusive et rare » [3], où les médicaments n’ont aucune et de soin.
place et où seule la psychothérapie psychanalytique permet Cette volonté d’intégrer les médicaments dans le cadre de la
d’obtenir une guérison du schizophrène. Cette position est psychothérapie existait déjà chez les premiers psychanalystes,
considérée comme « historique » puisqu’elle est le reflet du comme Rosenfeld [21] pour qui la cure doit pouvoir se mener
début de la psychothérapie des psychoses, qui s’inspire du sans angoisses trop vives qui empêcheraient la mise en place
modèle freudien de la cure analytique du névrosé. À cette d’un travail psychothérapique, mais en évitant leur abrasion
époque, dans les années 1950, les traitements proposés comme complète, ce qui limiterait les possibilités d’élaboration. D’autre
les cures d’insuline ou les premiers neuroleptiques sont peu part, on peut considérer le médicament comme partie prenante
efficaces mais surtout sont très pourvoyeurs d’effets secondaires. de la relation transférentielle entre psychotique et psychiatre.
Une deuxième position qu’il nomme « éclectique » consiste Comme le souligne Kapsambelis, l’impact des mouvements
en une accumulation de différentes techniques médicamenteu- transférentiels et contre-transférentiels est important, « le
ses et psychothérapiques sans qu’on puisse relier les techniques médicament devient le vecteur des conflits les plus significatifs
utilisées à la clinique ou à des attentes précises de la part du du malade et éventuellement des difficultés propres du théra-
thérapeute, hormis le souhait que le patient aille mieux. peute » [70]. Ainsi, pour Green [71] on peut parler de « relation
La troisième position, celle qui apparaît comme la plus chimiothérapique », ce qui justifie, pour lui, contrairement aux
cohérente et la plus adaptée, est qualifiée de « dynamique » car tenants des thérapies bifocales, que le médecin prescripteur soit

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le psychothérapeute pour qu’il puisse analyser les effets de cette entraînements aux habilités sociales se font par étapes se fixant
relation. Les médicaments favorisent les processus de liaison [72], des tâches successives. Roder et al. [78] proposent quatre niveaux
ils permettent également de travailler sur le lien entre psyché et d’intervention : le premier niveau se fixe comme objectif la
soma. Ils vont servir de catalyseur du travail d’élaboration sensibilisation des patients à leurs besoins, leurs possibilités et
psychique et de séparation entre perception interne et percep- leurs capacités. Puis, il s’agit d’aider le patient à prendre des
tion externe. Les médicaments provoquent des sensations décisions, pour ensuite lui faire expérimenter les étapes qui
corporelles, le patient doit les éprouver, puis se les représenter accompagnent la prise de décision. Enfin, le patient va appren-
et enfin les interpréter, « le travail de la substance psychotrope dre à anticiper les difficultés et à résoudre de manière concrète
pouvait être envisagé comme principalement destiné à déplacer les problèmes.
ou plus souvent à rétablir les liaisons entre l’affect et la Tout l’enjeu de ces psychothérapies est que le patient puisse
représentation » [73]. poursuivre dans sa vie quotidienne ce qu’il a appris dans les
Ce travail de figuration corporelle permet un renforcement programmes d’entraînement aux habiletés sociales. Les psycho-
du Moi, qui doit d’abord exister comme Moi corporel avant de thérapies psychosociales sont le plus souvent menées conjoin-
devenir un Moi psychique. L’effet du renforcement ne doit pas tement avec des programmes psychoéducationnels pour les
aller jusqu’à ce que Kapsambelis [70] nomme « une effusion du familles. Ces programmes se situent dans le prolongement des
Moi » avec transformation en une « pathologie hypocondria- psychothérapies familiales précédemment citées avec comme
que » dans laquelle le patient se détourne des investissements objectif d’augmenter les connaissances de la famille concernant
du monde extérieur pour se centrer exclusivement sur ses la maladie et de favoriser l’inscription sociale des patients
préoccupations corporelles dans un investissement de type (Tableau 4) [79].
narcissique.

Psychothérapie et traitement psychosocial ■ Perspectives et prospectives


Les psychoses, si elles restent des maladies chroniques, ont
maintenant une évolution moins déficitaire que dans les Adolescence, psychose et psychothérapie
premières descriptions de démence précoce faites par Kraepelin.
Une fois l’action des neuroleptiques puis des antipsychotiques La question de la psychothérapie pour les adolescents psy-
validée et effective sur les symptômes positifs, il a été nécessaire chotiques pose de nombreuses questions et suscite de nombreux
de prendre en charge la phase suivante de la maladie, celle où espoirs. Les principales questions portent sur le diagnostic
les symptômes négatifs, telle la tendance au repli, à l’isolement même de schizophrénie ; pour la majorité des psychiatres
et à l’apragmatisme, sont prédominants. C’est dans ce contexte d’adolescents, la mouvance des symptômes à cet âge doit inciter
que le traitement psychosocial de la schizophrénie a vu le jour. à la prudence avant de poser un diagnostic qui pourrait figer les
Le traitement psychosocial a pour objectif de favoriser identifications et stigmatiser l’adolescent.
l’insertion et la resocialisation des patients psychotiques. Pour E. Kestemberg souligne la spécificité du concept de psychose
Glynn, les interventions psychosociales ont pour but la réhabi- à l’adolescence, proposant avec le concept de « psychose
litation de ces patients c’est-à-dire : « l’obtention du plus haut froide » une organisation psychotique construite autour de la
niveau d’autonomie dans leur fonctionnement, le plus fort relation fétichique à l’objet. Il s’agit d’une modalité spécifique
niveau de contrôle des symptômes et le meilleur niveau de de mise en tension narcissique et objectale qui permet « d’éviter
satisfaction subjective concernant leur vie » [63]. de court-circuiter le conflit œdipien [...], une transaction utile,
La psychothérapie psychosociale débute la plupart du temps voire contraignante pour réduire l’intensité de l’angoisse (voire
à la sortie de l’hôpital, même si pour les tenants des soins l’éteindre) nécessaire à la survie de l’objet » [80].
institutionnels elle doit commencer dès le début de l’hospitali- Jeammet propose d’utiliser la notion « de fonctionnement
sation. Les principales méthodes utilisées sont issues des psychotique » en restant dans une perspective freudienne, de
psychothérapies cognitives et comportementales et mettent symptômes comme modalités défensives à un temps donné, et
l’accent sur des techniques comme la résolution de problèmes, d’une continuité dans le fonctionnement psychique sortant
les jeux de rôle, ou le modeling pour entraîner une dynamique d’un avant et d’un après décompensation psychotique. Il
de changement chez les patients. oppose trois registres différents : les potentialités psychotiques
Les psychothérapies psychosociales se focalisent sur un ou qui « témoignent d’une défaillance des ressources internes
plusieurs objectifs afin de favoriser la réinsertion des patients favorisant la possible émergence d’un antagonisme entre
psychotiques. Ceux les plus fréquemment retrouvés dans la relation d’objet et sauvegarde narcissique » [81], le fonctionne-
littérature sont le travail sur les habiletés sociales, ou sur ment psychotigène qui « fragilise le Moi et ses limites et favorise
l’investissement des rôles du quotidien [74-76]. l’indistinction Moi/objet », et le fonctionnement psychotique à
Pour Bellack et Mueser on peut définir les habiletés sociales proprement parler.
comme « la capacité de réponses spécifiques nécessaires pour L’adolescence porte en elle-même une potentialité traumati-
réaliser des performances sociales » [77]. À partir du constat que (Tableau 5) [82], en raison des bouleversements corporels,
clinique selon lequel les traitements médicamenteux ne per- relationnels, pulsionnels, dynamiques et topiques. La probléma-
mettent pas de lutter efficacement contre les symptômes tique psychotique va entraîner un arrêt du développement
résiduels de la série négative qui entraînent des conséquences « une cassure ou break-down » selon M. et E. Laufer [83] qui va
sociales négatives pour les patients, ils proposent une série augmenter les difficultés à s’engager dans des relations objecta-
d’interventions pour augmenter les possibilités d’insertion les en raison du risque de fragilisation du Moi. Le fonctionne-
sociale ou professionnelle des patients. ment psychotique conduit l’adolescent à osciller entre une trop
Ils s’appuient sur les programmes réalisés pour des patients grande proximité avec l’objet « par incapacité à le perdre » et
souffrant de déficiences physiques pour proposer une psycho- une trop grande distance « pour parer à la menace d’absorp-
thérapie dont l’objectif principal est l’autonomie du patient tion » comme le souligne Ladame [84].
dans différents domaines de sa vie comme le quotidien, les La psychothérapie des adolescents ayant un fonctionnement
relations avec les autres, le travail et les activités de loisirs. Pour psychotique est donc porteuse de beaucoup d’espoirs. D’abord,
cela ils vont utiliser plusieurs techniques comme la résolution ceux de pouvoir remettre en mouvement le développement
de problèmes, ou la remédiation cognitive. psychique en renforçant le Moi et en permettant un commerce
Le psychothérapeute va traduire les différentes interactions plus facile avec l’objet ; ensuite, pour ceux dont le fonctionne-
sociales en étapes et pensées, pour ensuite, avec des techniques ment psychotique est avéré, limiter le risque de désorganisation
de modeling ou de renforcement positif, permettre au patient de psychique et ses conséquences sociales comme la désinsertion.
modifier certaines cognitions, pour acquérir de nouveaux Les modalités de prise en charge à l’adolescence des fonction-
apprentissages qu’il pourra ensuite mettre en pratique. Les nements psychotiques tiennent compte de la double spécificité

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Tableau 4.
Structure générale de la TCC avec des patients psychotiques (d’après [79]).

Objectifs thérapeutiques Modalités utilisées


Détailler et hiérarchiser les difficultés Symptômes (idées délirantes, hallucinations, retrait, manque de motivation)
Projets (relations amicales, projet professionnel, logement, formation)
Normaliser et éduquer à propos des symptômes Rôle du stress dans la production des symptômes
Aspects bio-psycho-sociaux de la maladie
Réduire la stigmatisation par l’information
Développer la conceptualisation cognitive Identifier les liens entre pensées, émotions et comportement
Identifier les thèmes communs aux problèmes
Partager une formulation et une compréhension commune avec le patient
Techniques cognitives et comportementales pour traiter Utilisation du questionnement socratique
les symptômes positifs et négatifs Test des croyances
Évaluation des preuves
Explication des alternatives
Essais comportementaux
Verbalisation des croyances à propos de soi
Hiérarchisation de peurs et des soupçons
Utilisation d’images et d’analogies
Utilisation du jeu de rôle
Techniques cognitives et comportementales pour traiter Adaptation à des stratégies thérapeutiques cognitives standards pour la dépression et l’anxiété
dépression et anxiété Test de recadrage des croyances liées à l’anxiété (par exemple : danger et vulnérabilité)
pour la dépression (par exemple : inutilité et désespoir)
Ciblage des interprétations erronées
Utilisation d’exercices de relaxation
Utilisation d’exercices d’exposition et de programme de reprise d’activités
Prévenir la rechute Identification des situations à haut risque
Poursuivre le développement des compétences par rapport aux symptômes
Établir un « plan d’action » en cas de réapparition
des symptômes

Tableau 5. faisant écho au travail de E. Kestemberg sur le « personnage


Potentialité traumatique à l’adolescence (d’après [82]). tiers » [85]. C’est pourquoi il propose, avant même de formaliser
un travail psychothérapique, de mettre en place « des attitudes
1 Sexualisation massive des relations avec son corps, ses pensées,
thérapeutiques » pour l’ensemble des intervenants : patients,
ses apprentissages, ses parents
familles et soignants. Ces attitudes permettent l’accès à une
2 Mise en échec de l’effet structurant de l’Œdipe avec conflictualité et une temporalité différentes dans la constitution
resexualisation du surmoi et débordement des affects
d’un « espace transitionnel » au sens de Winnicott, ce qui
3 Conflictualisation des identifications, réactivation de l’angoisse favorise la reprise des processus de pensée et de liaison et limite
de castration
le recours à l’agir et à l’autodestruction.
4 Situation de passivation face aux transformations corporelles La fragilité du Moi face à l’objet, à l’adolescence et dans le
avec risque de renversement en activité (passages à l’acte, emprise
processus psychotique rend nécessaire l’utilisation de techniques
et fétichisation de l’objet...)
psychothérapiques utilisant les médiations. Le psychodrame
5 Réactivation de l’homosexualité primaire, des fantasmes
revêt de nombreux avantages dans le traitement psychothérapi-
d’incorporation
que des adolescents [82]. Ainsi, il a pour but, pour Jeammet et
6 Confusion entre dedans et dehors avec dédifférenciation
E. Kestemberg [86] de « créer les conditions d’un processus de
des imagos internes
figuration externe des conflits », de rendre possible l’investisse-
7 Réactivation des pulsions partielles, notamment du couple ment thérapeutique par « la fragmentation des transferts » sur
exhibitionnisme/voyeurisme
les différents intervenants, de renforcer les défenses habituelles
8 Organisation d’une série de clivage entre le corps et le Moi de l’adolescent comme l’agir et l’accrochage à la réalité externe
psychique, le Moi perceptif et conscient et le monde interne
dans les règles qu’il propose, ce qui « ouvre ces modalités
fantasmatique
défensives à la dimension du fantasme et au mouvement de
9 Intolérance à la temporalité et à l’attente et substitution par une liaison/déliaison, condition d’une reprise du processus
utilisation particulière de l’espace avec mise à distance
associatif » [86].
10 Intolérance au fantasme avec fuite de la représentation et
L’approche groupale est centrale dans l’abord psychothérapi-
recherche de figurabilité
que d’adolescents car elle reproduit leur fonctionnement
habituel. Le groupe de pairs est la réponse naturelle de l’adoles-
cent aux questions d’identité et de fragilité narcissique. En effet,
du fonctionnement adolescent et des conséquences de la le groupe est le garant d’une distance et d’une sécurité narcis-
désorganisation psychotique sur le Moi et sur les relations sique qui vient lutter contre le sentiment de dépendance aux
d’objets. Les techniques psychothérapiques pour l’adolescent parents. Il permet également d’obtenir un statut social en
sont dans le prolongement de celles utilisées chez l’adulte et il offrant une inscription autre que celle familiale. Ainsi, pour
ne s’agit pas de reprendre ce qui a été dit précédemment mais Chapelier « le groupe d’âge (relations horizontales et indifféren-
plutôt de mettre l’accent sur ce qui les spécifie à l’adolescence. ciation transgénérationnelle) se substitue momentanément au
Comme le souligne Jeammet, la plus grande difficulté avec un groupe familial (relations verticales et mélange des généra-
adolescent psychotique réside dans la création d’un lien, en tions) ». Il propose de « penser le groupe d’adolescents comme

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Tableau 6. Interprétation entre relation et langage


Conditions pour l’interprétation (d’après [88]).

L’interprétation est au cœur du dispositif analytique et de la


Conditions pour établir Modalités à mettre en œuvre
doctrine freudienne. Pour Laplanche et Pontalis [90] « l’interpré-
une interprétation
tation met à jour les modalités du conflit défensif [...]. Dans la
Établir une relation Réparer les failles narcissiques cure, communication faite au sujet et visant à le faire accéder à
transférentielle en rendant et renouer des relations libidinales et ce sens latent selon les règles commandées par la direction de
possible l’introjection agressives avec ses imagos
la cure ».
du bon objet Faire retour à la réalité de manière L’interprétation ne peut exister qu’au sein du dispositif de la
active cure, et s’appuie sur la possibilité pour le sujet de pénétrer dans
Renforcement des processus Limiter la confusion entre fantasme et son monde inconscient au cœur des conflits qui l’animent.
de symbolisation action directe Cette dynamique présuppose qu’il y ait une demande de la part
Redonner une place symbolique de l’analysé d’obtenir ces informations et de la part de l’analyste
à ce qui se joue dans le transfert la possibilité d’avoir accès au monde interne et à l’inconscient
Sortir d’un « à-plat » temporel de l’analysé. Pour les psychotiques, comme nous l’avons
sans référence au passé souligné précédemment, une des difficultés consiste à trouver
Ressourcer le langage verbal Objets réels perçus dans les séances une modalité d’accès au monde du psychotique et comme le
à ses origines en utilisant qui serviront de support matériel aux précise Resnik « le fait que je m’occupe en ce moment plus du
des intermédiaires représentations langage non verbal, ne signifie pas qu’à mon avis la parole soit
présymboliques Agirs dont il faut comprendre secondaire et sans importance » [91]. L’interprétation est une
le sens métaphorique communication qui ne peut se construire dans la psychanalyse
Images donnant accès au vécu
des patients psychotiques uniquement sur la parole.
archaïque qui serviront d’étayage Pour que l’interprétation puisse advenir, le processus analyti-
à la représentation et la symbolisation que doit se mettre en œuvre à partir d’une demande. La
demande est un concept proposé par Lacan qu’il articule avec
le besoin et le désir. Elle est, pour lui, parole implicite, adressée
non pas à la mère mais au grand Autre, elle permet la satisfac-
tion du désir et du besoin d’amour [92].
espace d’étayage du processus d’adolescence et au-delà comme Le psychotique formule rarement une demande en tant que
constitutif de la sociabilité » [87]. Les groupes psychothérapiques telle, elle est plutôt ébauche ou appel (appel impersonnel pour
proposés doivent aussi renforcer les connaissances sur la Gougoulis), qui s’expriment plus par le comportement, les
maladie, les symptômes et l’intérêt des médicaments car, symptômes que les paroles. Cet appel se construit à partir de
comme pour l’adulte, le pronostic fonctionnel dépend de la l’« interprétation des actes bizarres, du délire ». Le psychanalyste
prise régulière de traitements. Le travail en groupe doit aussi doit faire de la demande implicite « une demande d’acceptation
s’étendre aux parents qui doivent être, tout autant que chez les de la communication offerte à un niveau régressif [...] dans un
adultes psychotiques, des partenaires à part entière, à la fois deuxième temps une demande de compréhension et finalement
dans un souci psychoéducationnel mais aussi pour favoriser une demande de preuve par l’acte thérapeutique » [93].
l’autonomisation et l’individuation qui sont des enjeux essen- L’analyste va rendre possible l’installation d’une relation,
tiels de l’adolescence mis à mal par le processus psychotique. intersubjective et thérapeutique qui va ensuite s’appuyer sur les
Le travail avec les adolescents et notamment avec les adoles- interprétations pour permettre une ouverture sur l’inconscient
cents psychotiques s’organise selon le principe de thérapies du patient.
bifocales : un thérapeute prenant en charge la réalité externe, le Benedetti a également proposé des aménagements dans la
traitement, les projets scolaires ou professionnels et le deuxième mise en œuvre des interprétations dans la psychothérapie des
thérapeute s’occupant de la réalité interne, la gestion pulsion- patients psychotiques, aménagements centrés sur les différentes
nelle, la distinction entre monde fantasmatique et perception modalités relationnelles. Il propose quatre phases successives : la
interne. Les thérapies bifocales ont été également utilisées pour première ne comprend pas d’interprétation mais une « proposi-
les patients psychotiques adultes dans le cadre du Centre de tion prudente de rapprochement d’être ensemble », la deuxième
psychothérapie et de psychanalyse du 13e créé par J. Kestemberg se fonde sur « une symbiose thérapeutique avec un partenaire
capable de transformer positivement les choses », la troisième
et R. Angelergues en 1974 et qui continue à proposer pour des
débouche sur « une interprétation des pulsions destructrices du
patients psychotiques des doubles prises en charge psychiatrique
patient » [94], et la quatrième dans laquelle le thérapeute utilise
et psychanalytique, comme E. Kestemberg le décrit dans le
les interprétations de manière classique. C’est bien parce que
début de son article sur le personnage tiers [85].
l’analyste a pu effectuer un rapprochement qui a su franchir
Ces modalités psychothérapiques offrent un cadre particuliè- l’écueil de la symbiose et de la destruction, modalités relation-
rement opérant pour les adolescents psychotiques chez qui la nelles habituelles du psychotique, qu’il peut ensuite prendre
confusion entre monde interne et monde externe est impor- une position plus distante, propice à la technique interprétative
tante, mais aussi permet une diffraction de l’investissement analytique (Tableau 6) [88].
transférentiel qui rend l’objet moins menaçant, donc véritable-
ment étayant et contenant. Le travail bifocal permet aussi de Interprétation entre action et langage
maintenir des liens avec les parents qui participent au monde
externe de l’adolescent tout en garantissant une préservation de Rosen a été le précurseur de l’aménagement de la technique
son monde interne. d’interprétation, dans la psychothérapie des schizophrènes, en
s’appuyant sur la définition freudienne de l’interprétation qui
est d’abord interprétation des rêves [95]. Il a été le promoteur de
Modalités psychanalytiques actuelles « l’analyse directe » qu’il présente comme « une technique
psychologique ayant comme objet le traitement et la guérison
Les premiers psychanalystes se sont intéressés principalement, des malades psychotiques » [96]. Le postulat théorique sur lequel
comme nous l’avons vu précédemment, aux modalités du il construit l’analyse directe est double : le psychotique vit en
transfert et du contre-transfert et aux aménagements du cadre permanence « un cauchemar éveillé » et il faut lui permettre de
thérapeutique. Les questions qui ont ensuite animé les psycha- l’en extraire, en interprétant directement les contenus incons-
nalystes ont porté sur la place, les modalités et l’utilisation du cients de ses désirs qui s’expriment à travers les symptômes. Il
langage de l’interprétation (Tableau 6) [88] et sur les aménage- vit également « directement à l’ombre du sein ». Son économie
ments du cadre thérapeutique [89]. psychique est de type oral, et rend nécessaire que le thérapeute

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se situe dans le même registre et « se conduise comme un comme « la mise en forme d’un perçu [...], d’une activité
protecteur aimant et omnipotent qui nourrit le malade » [96]. inaugurale de la psyché pour laquelle toute activité est toujours
L’analyse directe se fait sur l’ensemble du contenu manifeste autoréférente et reste à jamais indicible » [104].
et va au-delà des productions verbales, « le matériel à interpréter À travers cette définition Aulagnier prolonge les réflexions de
est constitué par les productions verbales du malade, ses gestes, Freud sur le narcissisme primaire et celles de Lacan sur le stade
ses attitudes particulières, sa posture, sa conduite quoti- du miroir, et construit l’originaire comme un « schéma relation-
dienne » [96]. Pour permettre au malade de réinvestir la réalité il nel dans lequel le représentant se reflète comme totalité
faut le réinscrire dans ce que Rosen nomme « la grande loi », identique au monde ». Les relations mère/enfants sont régies par
celle qui permet à la mère de se montrer bienveillante quelles « la violence primaire » [102].
que soient les circonstances. Le pouvoir aliénant de la violence primaire se situe dans la
De la même manière, le thérapeute doit accompagner le différence de registre entre la mère et l’enfant. La mère ne
patient dans toutes les étapes qui vont le conduire vers l’auto- satisfait pas le besoin de l’enfant, mais son désir à elle. Le
nomie. Ces étapes pour Rosen sont au nombre de quatre, il faut processus structurant de la psyché qui va du besoin vers le désir,
successivement démontrer l’absurdité du délire, permettre au comme le décrit Freud, est ici inversé. Le registre du primaire
patient de passer à l’acte pour limiter sa toute-puissance (le s’organise autour du fantasme qui permet, par la production
thérapeute doit accompagner la mise en acte du délire), gérer d’une représentation idéique inconsciente d’une scène, de
supporter le manque et l’absence. Dans le registre du secon-
l’agressivité qui accompagne le retour à la réalité et lui faire
daire, la maîtrise du langage permet à travers les processus de
revivre certains aspects de sa psychose pour mieux les mettre à
pensée d’associer une représentation de chose à une image ou
distance. L’attitude du thérapeute est ici essentielle, il est tout
à une chose.
entier tourné vers la prise en charge de son patient, optimiste
Avec les psychotiques, le travail d’interprétation est particu-
face aux résultats qu’il va obtenir. Rosen se situe dans un
lièrement difficile en raison de l’attraction de celui-ci pour le
prolongement de l’analyse par la « technique active » [97]
registre de l’originaire. La violence de l’interprétation surgit car
proposée par Ferenczi.
l’enfant ne peut se représenter son origine comme liée au désir
D’autres modalités peuvent être proposées dans les cures de ou au plaisir de ses parents, « l’événement naissance sera
psychotiques pour permettre que les interprétations puissent ouvertement désigné comme la source d’une situation conflic-
faire sens pour le patient. Chaperot s’appuie sur le travail de tuelle, comme l’échec du désir de la mère [...] un accident
Freud sur l’humour et le mot d’esprit. Il reprend la définition biologique que l’on supporte et, de toute façon un événement
que Freud donnait de l’humour « énoncé paradoxal et dédra- dans lequel le désir du père n’a pu jouer un rôle favori-
matisant tel que les parents peuvent adresser à un enfant sant » [102]. De nouveau, on retrouve la confusion entre les
angoissé » [98] pour expliciter comment « la décharge émotion- registres du désir et du besoin, confusion caractéristique, pour
nelle » qui accompagne le rire va permettre au psychotique de Aulagnier, du registre de la violence primaire. Le maniement de
sortir d’une logique relationnelle instable passant d’un registre l’interprétation est complexe chez les psychotiques, chez qui
à l’autre et qu’il nomme « un transfert alternovalent » [99] pour « l’interdit de vérité » s’est constitué dès l’origine. L’interpréta-
aller vers un « transfert positif » qui permet à l’interprétation de tion va obliger à une réorganisation, un remaniement de la
renforcer la cohésion du Moi à travers un renforcement narcis- compréhension de ses origines.
sique. Le partage du rire se caractérise aussi, comme le souligne
Lavallée, non pas par « une décharge qui vide le Moi mais par
une apaisante satisfaction qui l’enrichit » [100].
Évaluation
Le mot d’esprit et l’humour permettent une distanciation qui L’évolution actuelle de la psychiatrie, si on se réfère aux lois
rend à nouveau opérant le travail de l’interprétation qui de 2004 sur la formation médicale, met en avant la nécessité
repousse les effets de la déliaison, et qui crée une intimité d’une évaluation des pratiques médicales, incluant donc des
renforçant les processus de liaison. Cette juste distance, avec les psychothérapies.
psychotiques, instaurée par l’humour établit comme le retrace L’évaluation des psychothérapies a été une préoccupation
Kohon à propos d’une cure, « vraiment cette intimité qui précoce du milieu psychiatrique dans un double objectif :
amenait [...] à avoir confiance dans le fait qu’il ne lui fallait pas pouvoir poursuivre la réflexion théorique sur les aménagements
tout m’expliquer de même que je n’avais pas besoin de lui dire du travail thérapeutique avec les patients psychotiques mais
chacune de mes interprétations » [101]. aussi dans un objectif économique de « management des soins »
à l’américaine.
Interprétation entre représentation et langage Les recherches menées sur l’évaluation des méthodes psycho-
thérapiques utilisent des méthodologies différentes ; d’un côté il
Aulagnier en 1975 va explorer ce qu’elle appelle « la violence s’agit de vérifier les effets de telle ou telle technique et de l’autre
de l’interprétation » dans un ouvrage éponyme [102] sous-titré : de comparer les résultats des différentes techniques sur des
« Du pictogramme à l’énoncé ». Psychiatre et psychanalyste, elle groupes de patients.
va poursuivre sa formation de psychanalyste avec Lacan puis
s’en éloigner en fondant, avec d’autres psychanalystes, le Études d’efficacité thérapeutique
quatrième groupe. Deux démarches coexistent dans la littérature, celle qui
Sa pensée se nourrit de son expérience clinique notamment s’appuie sur les études de cas et celle qui consiste à déterminer
avec des psychotiques pour lesquels elle va proposer une théorie des critères d’efficacité. Ces deux méthodes s’appuient sur des
centrée sur la représentation et ses avatars, qui situe la relation logiques différentes opposant d’un côté les effets d’un traite-
au psychotique au-delà du langage et du discours. ment dans l’étude de cas et de l’autre une standardisation des
La représentation, pour Aulagnier, évolue dans trois registres : résultats autour de critères d’efficacité.
l’originaire, le primaire et le secondaire. Chacun des trois se Les études de cas ont été chronologiquement les premières à
réfère à un fonctionnement psychique spécifique. Le registre de partir des années 1940 et continuent à être utilisées principale-
l’originaire se réactualise dans la psychose, il reste attiré et ment pour les psychothérapies d’inspiration psychanalytique.
attaché aux représentations archaïques de ce registre. L’origi- Elles ont été les premières modalités de présentation des
naire trouve sa source dans la négation du manque, par l’hallu- résultats de la psychothérapie. Plusieurs auteurs ont utilisé ces
cinatoire primitif freudien. Il va comme l’explicite De Mijolla résultats pour faire une méta-analyse et ainsi proposer une
Mellor être « le point de départ de toute pensée » [103]. L’origi- évaluation rétrospective, au sens actuel du terme. McGlas-
naire se structure autour de ce que Aulagnier nomme le picto- han [105] a ainsi réalisé une étude à Chesnut Lodge à partir des
gramme et qui se construit à partir de la rencontre originaire : comptes-rendus et notes de psychothérapies de patients
« la rencontre bouche et sein ». Le pictogramme se définit psychotiques.

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Tableau 7.
Niveau de preuve scientifique et grades de recommandation d’après l’Anaes 2000 [113].

Grade des recommandations Niveau de preuve scientifique (fourni par la littérature) Type de psychothérapie
A : preuve scientifique établie Niveau 1 TCC pour la réhabilitation psychosociale
Essais comparatifs randomisés de forte puissance des schizophrènes chroniques
(en association avec un traitement neuroleptique)
Méta-analyse d’essais comparatifs randomisés
Analyse de décision fondée sur des études bien menées
B : présomption scientifique Niveau 2 TCC pour schizophrénie en période aiguë
Essais comparatifs randomisés de faible puissance (en association avec un traitement neuroleptique)
Études non randomisées bien menées
Études de cohortes
C : faible niveau de preuve Niveau 3 Psychothérapie analytique
Éudes de cas-témoins Psychodrame psychanalytique
Thérapie familiale
TCC : thérapie cognitivocomportementale.

Kernberg [106] a codirigé une étude à la Menninger clinic en De nouveau Andréoli [108] va émettre un certains nombre de
1972 et Grinspoon [107] une étude dans un grand asile améri- remarques méthodologiques : les patients auxquels on propose
cain. Toutes ces études ont démontré qu’il fallait relativiser les une psychothérapie psychanalytique sont souvent très sévère-
effets de la psychothérapie individuelle. ment atteints, d’autre part ils ne présentent pas de capacité
Cependant, comme le montrent Andréoli [108] et son équipe, d’insight suffisante pour bénéficier de ce type de thérapie. Ces
ces méta-analyses soulèvent plusieurs problèmes méthodologi- auteurs proposent pour aller plus loin que « les travaux de
ques : les critères diagnostiques sont peu transposables et les Kraepelin et continuer à se battre », de se centrer sur des
notions de schizophrénie au sens DSM IV [109] ou au sens de thérapies « prenant en compte les problèmes de la vie quoti-
Bleuler, de troubles psychotiques ou de personnalité psychoti- dienne de ces patients, et les stratégies qu’ils peuvent employer
que rendent compte de réalités cliniques bien différentes. Les pour faire face au stress quotidien ».
critères sociodémographiques des populations étudiées sont Les thérapies cognitives et comportementales (TCC) se situent
également très peu homogènes, de même que les caractéristi- dans le prolongement de ce point de vue. Les critères d’évalua-
ques des troubles étudiés : leur début ou leur sévérité sont très tion sont liés directement aux objectifs thérapeutiques. Chaque
variés (psychose aiguë, psychose chronique, troubles psychoti- objectif est associé à un type de méthode comme nous l’avons
ques évoluant depuis peu ou depuis plusieurs années, patient évoqué précédemment.
pris en charge en institution ou patient ambulatoire). Une partie des critères d’évaluation porte sur la diminution
L’association avec des traitements médicamenteux, de même de certains symptômes comme les hallucinations, le délire et sur
que leur nature et leur proportion, peut aussi représenter un l’observance médicamenteuse. Les effets à court terme sont
biais dans l’analyse des résultats. Pour ces auteurs, le groupe des statistiquement significatifs [111] mais il faut rester plus prudent
schizophrénie est très hétérogène et nécessite des stratégies sur le caractère pérenne de cette amélioration à moyen et long
thérapeutiques diversifiées au sein desquelles des formes terme [112] . Comme le propose la classification de l’Anaes
structurées de traitement analytique ont leur place. Ils (Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé ) en
concluent leur analyse en mettant en avant la nécessaire 2000, les TCC sont particulièrement indiquées dans les pro-
intrication avec des politiques de soins : « en accord avec grammes de réhabilitation psychosociale [113] (Tableau 7).
McGlashan et Keats nous faisons l’hypothèse que la stérilité du Les comparaisons se font entre différentes techniques :
débat sur l’utilité respective du traitement d’inspiration psycha-
psychothérapies analytiques versus thérapies cognitives et
nalytique et du traitement psychiatrique-médical correspond en
comportementales par exemple ou dans l’association de plu-
réalité à la difficulté de développer un modèle de politique de
sieurs thérapies : médicaments et approche personnelle, médi-
soins qui prenne en compte la complexité de la clinique et du
caments et approche psychosociale, etc.
devenir psychosocial des troubles schizophréniques » [108].
L’étude de Hogarty [114] est une étude de comparaison de
différentes modalités psychothérapeutiques menée sur 3 ans.
Études de comparaison
Cette étude concernait 151 patients sélectionnés parmi
L’autre catégorie d’études propose des critères d’efficacité et 186 patients hospitalisés. Ces patients recevaient un traitement
les regroupe en plusieurs catégories. Certains critères sont médicamenteux (dans la majorité des cas un traitement par
généraux comme : halopéridol retard R). D’autres modalités thérapeutiques
• la persistance ou non de symptômes et leur importance ; étaient proposées : une psychothérapie individuelle, une
• le taux de réhospitalisation ; thérapie familiale ou une psychothérapie de soutien. La compa-
• le taux de rechutes ; raison porte sur les effets de chaque psychothérapie et sur les
• l’adaptation sociale et les relations interpersonnelles ; effets d’une thérapie face à une autre. Le critère d’efficacité
• l’autonomie face au quotidien. retenu est le taux de rechutes après 1, 2 et 3 ans. Les résultats
D’autres critères sont plus spécifiques comme : démontrent des différences en fonction des données sociodé-
• le recours à des traitements médicamenteux ; mographiques des patients : pour les patients qui vivent en
• le fonctionnement du Moi ; famille, la psychothérapie individuelle est plus efficiente que la
• le fonctionnement cognitif ; psychothérapie familiale dans la prévention des rechutes. En
• la mise en place d’une alliance thérapeutique ; revanche, en ce qui concerne les patients vivant seuls, la
• l’adhésion au traitement médicamenteux ou au programme psychothérapie individuelle échoue face à la prévention des
de soins ; rechutes.
• la qualité de vie. L’association psychothérapie individuelle et familiale est aussi
Les études réalisées sur les effets des psychothérapies psycha- efficace dans la prévention des rechutes que l’association
nalytiques ne remplissent pas les critères d’efficacité choisis : il psychothérapie centrée sur les entraînements aux habiletés
n’y pas d’amélioration à long terme, les symptômes persistent sociales et psychothérapie familiale.
de manière importante, les réhospitalisations sont nombreuses, L’étude de Gunderson [115] a permis une comparaison sur une
etc. [110]. période de 2 ans, entre des psychothérapies de type analytique

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■ Références
.

et des psychothérapies de soutien, psychosociales. Les critères


d’efficacité étaient nombreux, allant des caractéristiques de
fonctionnement personnel comme le fonctionnement du Moi, [1] Racamier PC. Techniques de psychothérapie des psychoses. EMC
les cognitions à des critères plus sociaux comme les relations (Elsevier Masson SAS, Paris), Psychiatrie, 37-819-A-10, 1958.
interpersonnelles, en passant par des critères médicaux comme [2] Racamier PC. Techniques de psychothérapie des psychoses. EMC
la persistance de symptômes ou l’adhésion au traitement. Les (Elsevier Masson SAS, Paris), Psychiatrie, 37-819-A-30, 1958.
résultats montrent une meilleure efficacité des thérapies [3] Racamier PC. Techniques de psychothérapie des psychoses. EMC
psychosociales dans la capacité à s’investir dans différents rôles (Elsevier Masson SAS, Paris), Psychiatrie, 37-819-A-10, 1974.
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de type psychoéducationnel) et des thérapies psychosociales
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(entraînement aux habiletés sociales, TCC). Ainsi, dans la méta-
[10] Rosenfeld H. Considérations sur l’approche psychanalytique de la schi-
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analyse de 2001 réalisée par Malmberg [117] prolonge les [12] Kraepelin E. Leçons cliniques sur la démence précoce et la psychose
résultats déjà obtenus ne retrouvant pas de preuve de l’efficacité maniaco-dépressives (1899). Toulouse: Privat; 1970.
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concerne l’efficacité de l’approche psychodynamique. Paris: EPEL; 1993.
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sont principalement d’ordre méthodologique : quels sont les psychose (1956). In: Lacan J, editor. Écrits II. Paris: Seuil; 1971.
critères de sélection des patients ? Quels sont les critères [15] Federn P. La psychologie du Moi et les psychoses (1952). Paris: PUF;
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dans les thérapies ? Et, comme le soulignait Andréoli [108], les [16] Racamier PC. le Moi, le Soi, la personne et la psychose, (Essai sur la
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induisent un biais dans les résultats. Ainsi, la méta-analyse de [17] Sechehaye M. Introduction à une psychothérapie des schizophrènes
Malmberg [117] inclut dans la population étudiée des patients (1951-1952). Paris: PUF; 1988.
schizophrènes et des patients souffrant de maladie mentale [18] Sechehaye M. Le journal d’une schizophrène. Paris: PUF; 1950.
grave, ce qui majore l’hétérogénéité de la population et limite [19] Lebovivi S. Indications et contre-indications de la psychanalyse
l’intérêt des résultas obtenus puisque le fonctionnement Freudienne. EMC (Editions Techniques), Psychiatrie, 37-811-A-10,
intrapsychique d’un patient schizophrène, celui d’un état 1969.
maniaque ou d’un paranoïaque sont différents et relèvent d’une [20] Searles H. L’effort pour rendre l’autre fou (1979). Paris: Gallimard;
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Les psychothérapies des psychoses sont un champ fécond à [23] Bettelheim B. L’amour ne suffıt pas (1950). Paris: Fleurus; 1970.
la fois dans l’approche théorique et la compréhension des [24] Heimann P. Le contre-transfert (1950). Paris: Navarin; 1987.
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Les différentes études évaluatives convergent toutes dans la
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nécessité d’une approche éclectique mettant en perspective les
163:290-7.
traitements médicamenteux, l’approche familiale et psychoso-
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ciale. Il faut cependant rester nuancé sur les résultats des
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différentes évaluations en raison des biais méthodologiques d’entraide Mutuelle. Prat Sante Ment 2007;4:13-20.
importants. L’avenir doit permettre de mener à bien des études [30] Racamier PC. Le psychanalyste sans divan. Paris: Payot; 1970.
plus standardisées sans perdre de vue que les psychoses ou les [31] Freud S. Le début du traitement (1913). In: Freud S, editor. La techni-
schizophrénies sont multiples et variées. que psychanalytique. Paris: PUF; 1972. p. 80-104.
Il faut passer de psychothérapies éclectiques où les thérapeu- [32] Winnicott DW. Les aspects métapsychologiques de la régression au
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et avec ses proches. En cela, la psychanalyse qui est une [36] Kaës R. Cadre et processus. In: Anzieu D, editor. Le travail
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M. De Luca, Psychiatre, praticien hospitalier, médecin chef du service de psychiatrie et de psychopathologie du jeune adulte (mdeluca@mgen.fr).
Institut Marcel Rivière, La Verrière, 78321 Le Mesnil Saint-Denis cedex, France.
Laboratoire de psychopathologie clinique, centre H. Pieron, Université Paris V, 71, avenue Edouard-Vaillant, 92774 Boulogne-Billancourt, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : De Luca M. Abord psychothérapique des psychoses. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Psychiatrie,
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