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Josiane Helayel

Isabelle Causse-Mergui

100 IDÉES
POUR AIDER LES ÉLÈVES
« DYSCALCULIQUES »
À Elsa, Johanna, Simon
et tous les autres…
INTRODUCTION

Chapitre I
POUR DÉMARRER

1 PEUT-ON DÉFINIR LA DYSCALCULIE AUJOURD’HUI ?

2 QUELS SONT LES DIFFÉRENTS TYPES DE DYSCALCULIE ?

3 QUI « SOUFFRE » DES MATHS ?

4 DIFFÉRENTS DÉMARCHES DE REMÉDIATION

Chapitre II
ATTITUDE GÉNÉRALE

5 LE PLAISIR DE RÉFLÉCHIR

6 AGIR POUR RÉFLÉCHIR

7 LAISSER L’ENFANT RAISONNER

8 NE PAS LE NOYER DANS LES EXPLICATIONS

9 NE PAS CROIRE QUE TOUT EST ÉVIDENT

10 RENDRE LA PENSÉE MOBILE ET RÉVERSIBLE

11 POSER DES QUESTIONS FÉCONDES


12 RESPECTER LE RYTHME DE CHACUN

13 L’ERREUR N’EST PAS UNE FAUTE !

14 QU’EST-CE QUE LA LOGIQUE ?

15 COMMENT ÉVOLUE LA LOGIQUE ?

16 LOGIQUE ET LANGAGE

17 LES NÉCESSAIRES IMAGES MENTALES

18 EXERCER LES IMAGES MENTALES

19 S’INTÉRESSER À LA DÉMARCHE

20 FAIRE DES LIENS

21 ENCOURAGER LE JEUNE QUI VEUT ÉVOLUER

22 POURQUOI JOUER

23 COMMENT JOUER

24 ET LA MÉMOIRE ?

25 ACTIVITÉS POUR EXERCER LA MÉMOIRE

26 JEUX POUR EXERCER LA MÉMOIRE

Chapitre III
STRUCTURES LOGIQUES

27 QU’EST-CE QUE LA CLASSIFICATION ?

28 QU’EST-CE QUE L’INCLUSION DE CLASSES ?

29 EXERCER LES CLASSIFICATIONS


À
30 QU’EST-CE QUE LA CORRESPONDANCE TERME À TERME ?

31 LES MOTS DE LA CORRESPONDANCE TERME À TERME

32 EXERCER LA CORRESPONDANCE TERME À TERME

33 QU’EST-CE QUE LA CONSERVATION DES QUANTITÉS


DISCONTINUES ?

34 AIDER À L’ACCÈS À LA CONSERVATION DES QUANTITÉS

35 QU’EST-CE QUE LA SÉRIATION ?

36 COMMENT STIMULER LA SÉRIATION ?

37 ÉQUIVALENCE NUMÉRIQUE

Chapitre IV
NOMBRES, NUMÉRATION, CALCULS

38 QU’EST-CE QUE LE COMPTAGE ?

39 COMMENT EXERCER LE COMPTAGE ?

40 QU’EST-CE QUE DÉNOMBRER ?

41 ERREURS CLASSIQUES DE DÉNOMBREMENT

42 QU’EST-CE QUE LA « PRODUCTION » ?

43 COMMENT EXERCER LA « PRODUCTION » D’OBJETS

44 LES CARACTÉRISTIQUES DE NOTRE SYSTÈME DE


NUMÉRATION

45 AIDER LES ÉLÈVES DANS L’APPRENTISSAGE DE LA


NUMÉRATION ORALE

É
46 UTILISER UNE BANDE NUMÉRIQUE HORIZONTALE

47 UTILISER UN TABLEAU DES NOMBRES

48 PRINCIPE DU GROUPEMENT PAR 10

49 TRAVAILLER LES GROUPEMENTS PAR 10 À L’AIDE DE


PAILLES

50 COMMENT TRAVAILLER LES ÉCHANGES

51 FRACTIONS

52 QU’EST-CE QUE CALCULER ?

53 QUELS SONT LES DIFFÉRENTS MOYENS DE CALCULER ?

54 MÉMOIRE ET CALCULS

55 CLASSER LES PROBLÈMES À DONNÉES NUMÉRIQUES

56 ORDRE DU LANGAGE ET ORDRE DES ACTIONS

57 LES PROBLÈMES ADDITIFS

58 LE JEU DE LA TABLE D’ADDITION

59 AIDER À APPRENDRE LES TABLES D’ADDITION

60 LES DÉCOMPOSITIONS DE 10

61 LES RÉGLETTES CUISENAIRE POUR ADDITIONNER ET


SOUSTRAIRE

62 LES PROBLÈMES MULTIPLICATIFS

63 LES PROBLÈMES DE DIVISION

64 ESPACE ET TEMPS DANS LES ÉNONCÉS DE PROBLÈMES


É È
65 LES FACTEURS DE DIFFICULTÉ DES PROBLÈMES
NUMÉRIQUES

66 RÉGLETTES CUISENAIRE POUR LA MULTIPLICATION ET LA


DIVISION

67 LE JEU DE YAM’S

68 DÉMARRER LE TRAVAIL SUR LES TABLES DE


MULTIPLICATION

69 S’ENTRAÎNER À MÉMORISER LES TABLES DE


MULTIPLICATION

70 COMMENT RETROUVER LA TABLE DE 9 AVEC LES


DOIGTS ?

71 RÈGLE DE TROIS OU PROPORTION ?

72 TRAVAILLER LES PROPORTIONS

73 DES JEUX POUR FAVORISER L’ATTENTION ET LA


MÉMORISATION

74 JEU FAISANT FONCTIONNER LES QUATRE OPÉRATIONS

75 TECHNIQUES OPÉRATOIRES DE L’ADDITION ET DE LA


SOUSTRACTION

76 TECHNIQUES OPÉRATOIRES DE LA MULTIPLICATION ET


LA DIVISION

Chapitre V
MESURE, TEMPS, ESPACE

77 QU’EST-CE QUE MESURER ?

É
78 DIFFÉRENTES FAÇONS DE MESURER

79 RENDRE LE TEMPS VISIBLE

80 DIFFÉRENCIER ÉVÉNEMENT ET DURÉE

81 FAIRE UN ARBRE GÉNÉALOGIQUE

82 VIVRE LES ÉVÉNEMENTS AVEC LE CORPS

83 OBSERVER LES HORLOGES À AIGUILLES ET LES HORLOGES


NUMÉRIQUES

84 VIVRE LES DURÉES AVEC LE CORPS

85 MESURER LES DURÉES

86 LES PIÈGES DE L’HORLOGE À AIGUILLES

87 LIRE L’HEURE « COMME LES GRANDS »

88 CALCULER UNE DURÉE : RETOUR À L’ORIGINE

89 LE CORPS ET LES MATHS : DROITE OU GAUCHE ?

90 COMPTER SUR LES DOIGTS ?

91 TRAVAILLER LES IMAGES MENTALES À L’AVEUGLE

92 APPRENDRE À SE METTRE À LA PLACE D’AUTRUI

93 ACTIVITÉS DE MESURE EN UNE DIMENSION

94 JEUX EN DEUX DIMENSIONS

95 VA-ET-VIENT ENTRE 2 ET 3 DIMENSIONS

96 CONSERVATION DANS LE CONTINU


Chapitre VI
QUELQUES CONSEILS POUR FINIR

97 QUE FAIRE AVEC UN ENFANT DE 7 ANS ?

98 QUE FAIRE AVEC UN ENFANT DU COURS MOYEN ?

99 QUE FAIRE AVEC UN JEUNE DU COLLÈGE ?

100 QUE FAIRE AVEC UN ADULTE JEUNE OU NON ?

ANNEXES

ANNEXE 1 : La Gestion mentale

ANNEXE 2 : Le GEPALM

et chez le même éditeur…

Copyright
L’objectif principal de ce livre est de donner des pistes de réflexion et des

conseils pratiques à toute personne qui s’intéresse aux difficultés

d’apprentissage en mathématiques : enseignants, éducateurs, rééducateurs,

psychologues, parents ; il s’adresse aussi à tous ceux qui ont « souffert des
maths » à un moment ou un autre de leur vie.

Les compétences en mathématiques se développent en lien avec la

maturation neurologique tout autant qu’avec le développement des fonctions

langagières, cognitives, psychomotrices et le développement affectif. Les


troubles de la dyscalculie ont donc des origines multifactorielles et complexes.

En conséquence, travailler sur les contenus ne suffit pas, il faut aussi restaurer

les fonctions cognitives déficientes, comme la mémoire, l’attention…

Sans attendre que les chercheurs établissent une définition plus précise de

ce que l’on peut décrire sous le nom de dyscalculie (leurs travaux ont plusieurs
décennies de retard sur ceux portant sur la dyslexie), didacticiens des maths,

psychologues et orthophonistes ont adapté leur pratique à ceux qu’ils

rencontrent quotidiennement et ont élaboré depuis longtemps des formations

efficaces dans ce domaine. Les orthophonistes ont intégré dans la


nomenclature de leurs actes les « troubles logico-mathématiques » depuis 1992,

car ils ne rencontrent pas de jeunes présentant des troubles du calcul sans

troubles du raisonnement.

Les difficultés à raisonner logiquement ont des conséquences invalidantes

dans les domaines scolaire et professionnel, mais elles en ont également dans

tous les domaines de la vie : on a sans cesse besoin d’être capable de dire ce

qu’on fait, ce qu’on voit, ce qu’on ressent, ce qu’on pense. Beaucoup

d’habiletés dont nous parlons dans cet ouvrage sont utiles en dehors des maths.
Notre monde évolue très vite : Georges Charpak, prix Nobel de physique

1992, disait que la masse des connaissances double tous les huit ans, et qu’en

l’an 2020 ce laps de temps sera d’un an seulement. Il y a tellement de choses à

savoir que le rôle des éducateurs est actuellement non plus seulement de

dispenser des connaissances mais de donner des outils : pour expérimenter,

faire des choix, observer, parler (de ses sensations, ses observations, ses actions),

déduire, parcourir tous les possibles, imaginer, spatialiser, coder, dessiner,

d l d f d b l
communiquer, éditer, généraliser à partir d’informations devenues bien plus

facilement accessibles.

Tous les thèmes retenus dans ce livre, loin d’être exhaustifs, sont des

thèmes fondamentaux pour les apprentissages en maths. Certains d’entre eux

ont des retombées importantes, y compris jusqu’à l’âge adulte.

Nous mêlons tour à tour conseils de prévention, idées théoriques,


propositions d’activités sous forme d’exercices ou de jeux et conseils

spécifiques. On trouvera donc entremêlés des points de vue différents, nés de

l’expérience d’une enseignante en maths et d’une rééducatrice, deux métiers

bien distincts. Les activités proposées relèvent aussi bien de l’école que de la

maison ; elles sont plutôt déclinées pour des enfants entre 3 et 12 ans, mais

elles sont généralisables à d’autres âges avec un autre habillage. Un adulte en

difficulté peut aussi les reprendre à son compte.

Il est difficile de proposer systématiquement des âges pour les exercices :

quelquefois nous donnerons des chiffres approximatifs. Nous conseillons


d’essayer, de tâtonner : si c’est trop dur ou si c’est trop facile on adaptera

l’exercice, le principal étant de proposer à l’enfant une activité où il peut

réussir.

Aux parents, nous aimerions donner le goût de chercher avec leur enfant,

d’argumenter, de réfléchir aux causes et aux conséquences dans toute situation.

Ces idées devraient les aider à guider leur enfant pour être acteur de ses

apprentissages. Nous aimerions les convaincre qu’ils ne perdent pas leur temps

en partageant des activités avec leurs enfants comme jouer aux cartes ou à
divers jeux de société traditionnels, faire la cuisine ensemble… L’expérience

montre que c’est encore plus constructif que de les conduire à des cours de

soutien extrascolaire.

Nous souhaitons transmettre ici ce que nous expérimentons depuis plus

de 25 ans sous l’impulsion de Francine Jaulin-Mannoni, Riad Al Hammal,

Bernadette Guéritte-Hess, Hélène Catroux d’une part, et de Michel Fayol,

Rémi Brissiaud et des travaux de l’équipe Ermel d’autre part. Qu’ils en soient

ici vivement remerciés.


IDÉE

PEUT-ON DÉFINIR LA DYSCALCULIE


AUJOURD’HUI ?

Pour des raisons diverses, de nombreux élèves connaissent dès

l’école élémentaire des difficultés dans le domaine du calcul. Cela

peut aller du simple ennui à une véritable terreur de cet apprentissage

et une phobie des nombres. Face à ces situations, on peut mettre en

cause le système scolaire lui-même à travers ses programmes ou ses

habitudes pédagogiques. Toutefois, dans bien des cas, l’instauration

d’un soutien personnalisé ou le suivi de séances de remédiation

permettront à l’élève de combler ses lacunes, et de sortir des difficultés

provisoires qui le gênaient dans ses apprentissages.

Cependant, pour d’autres élèves, qualifiés de « dyscalculiques »,

les difficultés se révèlent plus sévères. Malgré tous leurs efforts, ceux

de leur famille et ceux de leurs enseignants, les difficultés s’installent

dans la durée et ces élèves se trouvent dans l’incapacité de faire

fonctionner de manière autonome les techniques de base dans le

domaine numérique.

Les deux grands troubles d’apprentissage désignés par les termes

de dyslexie et de dyscalculie ont été découverts au même moment au

e
début du XX siècle, mais depuis, les troubles des aptitudes

numériques ont fait l’objet de beaucoup moins d’études que ceux

concernant les troubles du langage et de la lecture. Aujourd’hui

encore, le terme même de « dyscalculie », plus d’un siècle après son

apparition, ne fait toujours pas l’objet d’une définition unanimement

admise.

L’origine des « troubles du calcul » dont souffre l’élève

dyscalculique est sujette à des interprétations très diverses, ce qui

complique d’autant la mise en œuvre de véritables tests d’évaluation

et celle de protocoles-types de « rééducation ».


IDÉE

QUELS SONT LES DIFFÉRENTS TYPES DE


DYSCALCULIE ?

Dans cet ouvrage, nous ne traiterons pas des troubles qui trouvent

leur origine dans des traumatismes, des lésions organiques ou des

dégénérescences. Nous nous concentrons plus particulièrement sur les

élèves souffrant de « dyscalculie développementale », c’est-à-dire

d’« un trouble des compétences numériques et des habiletés

arithmétiques qui se manifestent chez des élèves d’intelligence


1
normale qui ne présentent pas de déficit neurologique acquis » .

Des études portant sur d’assez larges échantillons font apparaître

qu’entre 3,5 et 7 % d’enfants seraient « dyscalculiques » (INSERM,

p. 294).
2
Trois types de dyscalculie ont été distingués par Temple (1992) et
3
Geary (1993) :

une dyscalculie du traitement numérique, se traduisant par des

difficultés à lire et/ou à écrire les nombres ;

une dyscalculie « mémorielle », se traduisant par une incapacité à

acquérir les faits numériques, comme les tables d’addition et de

multiplication ;

une dyscalculie « procédurale », entraînant des difficultés dans la

mise en œuvre de procédures ou de raisonnements.

1- INSERM, Dyslexie, Dysorthographie, Dyscalculie. Bilan des données scientifiques,

dossier sur les troubles affectant les apprentissages scolaires, p. 1. Voir bibliographie en

fin de volume.

2- Temple, C.M. (1992), “Developmental and acquired disorders of childhood”, in I.

Rapin, F. Boller and J. Grafman (eds), Handbook of Neuropsychology, vol. 7, “Child

Neuropsychology”, p. 211-222. — Temple, C.M. (1992), “Pocedural dyscalculia and


number fact dyscaculia : Double dissociation in developmental dyscalculia”, Cognitive

Neuropsychology, 8, p. 155-176.

3- Geary, D.C. (1993). “Mathematical disabilities : Cognitive, neuropsychological, and

genetic components.” Psychological Bulletin, 114, p. 345-362.


IDÉE

QUI « SOUFFRE » DES MATHS ?

Les enfants et les jeunes « malades des maths » peuvent se trouver

dans des situations très variées. L’intrication d’un déficit cognitif et de

troubles émotionnels ou comportementaux rend la spécificité des

troubles en maths ardue à apprécier. Les maths peuvent donc être le

symptôme unique d’un échec scolaire, ou une partie d’un échec

scolaire global, associé ou non à d’autres symptômes : dyspraxie,

dyslexie, dysphasie, troubles de l’attention… Les prises en charge

doubles sont d’ailleurs très courantes : psychomotricité et

orthophonie, psychothérapie et orthophonie, orthophonie en langage

écrit et orthophonie en maths...

On doit souvent distinguer entre un mauvais apprentissage de la

lecture et une dyslexie. De même, il faut pouvoir différencier un échec

en maths lié au seul malmenage scolaire, d’une dyscalculie ou d’un

retard de développement.

Beaucoup de parents consultent, après des années de rééducation

du langage écrit, pour les difficultés en maths de leur enfant. Or,

souvent, il s’agit d’un simple retard chez des enfants dont on a

totalement laissé de côté le développement du raisonnement logique

en se focalisant sur le seul aspect du langage.

Aujourd’hui, le manque d’information d’un grand nombre de

personnes en charge d’enfants conduit à deux dérives : soit ils

s’inquiètent hâtivement et adressent trop tôt des enfants aux

thérapeutes, ou à l’inverse, ils ignorent l’existence d’un remède et

laissent le symptôme empirer. De leur côté, les parents attendent trop

souvent en vain une alerte des maîtres ou, au contraire, ne leur font

pas confiance. Des progrès dans le dépistage sont nécessaires pour

donner au problème sa juste mesure : il arrive qu’on rende les gens


malades au point de consulter pour des tables de multiplication non

sues !
IDÉE

DIFFÉRENTS DÉMARCHES DE REMÉDIATION

À l’heure actuelle, deux grandes tendances prédominent pour

organiser un suivi ou une remédiation chez un enfant en grande

difficulté en mathématiques : des approches généralistes, et des

approches plus spécifiques.

1-Les approches généralistes

Les démarches généralistes reposent sur une remédiation globale

et ont pour objet la construction des opérations mentales

indispensables aux apprentissages mathématiques. Elles s’éloignent

des contenus scolaires et reposent sur des activités qualifiées de


1
« logico-mathématiques » s’inspirant fortement des travaux de Piaget .

Elles sont privilégiées par les orthophonistes spécialisés en

rééducation mathématique.

2- Les approches spécifiques

D’autres démarches de remédiation, dites spécifiques, se

concentrent directement sur les procédures défaillantes,

essentiellement le transcodage, les capacités de calcul et la résolution

de problèmes. Elles s’appuient sur des études ayant mis en évidence

que des programmes de travail régulier (par exemple, une demi-heure

par jour, 4 jours par semaine) sur des durées assez courtes

(5 à 10 semaines) sont bénéfiques à condition d’être spécifiquement


2
dirigés sur une fonction défaillante .

Dans les pages suivantes, vous trouverez des Idées correspondant

à ces deux approches.

Dans tous les cas, elles s’appuient sur la valorisation du travail

effectué par l’élève, et donc sur le respect de la diversité des

procédures utilisées pour résoudre un problème. Elles accordent une


grande place à l’explicitation et à la verbalisation de ces procédures,

et s’appuient sur le repérage et l’analyse deserreurs.

1- « Jean Piaget (né le 9 août 1896 à Neuchâtel - mort le 16 septembre 1980 à Genève) :

psychologue, biologiste, logicien et épistémologue suisse connu pour ses travaux en

psychologie du développement et en épistémologie avec ce qu’il a appelé

l’épistémologie génétique. » [Wikipedia]

2- « Les études sur les entraînements mettent en évidence que des programmes de travail

intensif (une demi-heure par jour, quatre jours par semaine) sur des durées relativement

courtes (5 à 10 semaines), à condition qu’ils soient précisément et spécifiquement dirigés

vers une fonction cognitive déficitaire, apportent des bénéfices spécifiques à la fonction

entraînée. Ces résultats pourraient justifier de revoir les pratiques actuelles en matière de

soins, en proposant d’évaluer des programmes intensifs, spécifiques, sur des durées

courtes, destinés aux enfants résistants à la prise en charge pédagogique adaptée et

harmonisée à la pédagogie toujours indispensable. » (INSERM, Dyslexie,

Dysorthographie, Dyscalculie. Bilan des données scientifiques, p. 695. Voir bibliographie

en fin d’ouvrage.)
IDÉE

LE PLAISIR DE RÉFLÉCHIR

Un enfant va développer l’aptitude à réfléchir, non pas parce

qu’on va lui enseigner à le faire, mais parce qu’il va vivre avec des

personnes qui vont toujours s’appliquer à lui donner matière à

réflexion : ce n’est pas parce qu’on lui fait répéter des mots qu’un

enfant parle, ce n’est pas parce qu’on va lui enseigner des formules

qu’il va raisonner.

Réfléchir, c’est penser activement ; penser, c’est peser des

arguments, des expériences et des pensées elles-mêmes, c’est

s’étonner, se poser des questions, aller au-delà de la première

impression, regarder de biais ou creuser, relier, comparer. Penser, c’est

parfois se donner du mal pour obtenir une satisfaction intellectuelle,

pour le seul plaisir d’avoir abouti.

À l’école, les élèves tendent souvent à se précipiter sur leur crayon

avant de réfléchir. À l’oral, les maîtres favorisent trop souvent la

rapidité des réponses.

À la maison aussi, il faut prendre le temps de réfléchir avec

l’enfant. La simple création d’un bon plat peut pourtant donner lieu à

toute une suite de réflexions : on choisit un menu convenant aux

invités, on adapte les proportions des ingrédients, on compare les

quantités restant dans la réserve avec celles de la recette, on établit

une liste ; au magasin, on trouve les produits grâce à une classification

des rayons, on pointe sur sa liste le contenu de son panier, on prépare

une somme d’argent, on vérifie sa monnaie ; on range les courses dans

la cuisine ; on anticipe l’heure où on dînera et, sachant le temps de

préparation, on en déduit le moment de se mettre en cuisine ; on pèse,

on mesure…

Dès le plus jeune âge, la constatation qu’on est capable de

réfléchir et la profonde satisfaction personnelle qui en découle peut


avoir des conséquences très positives sur l’évolution affective du jeune

et sur sa confiance en soi.


IDÉE

AGIR POUR RÉFLÉCHIR

La plupart des personnes ayant des difficultés en maths ont besoin

d’agir sur les objets pour réfléchir. Les explications verbales ou les

petits schémas de l’école ne leur ont pas suffi.

D’abord, il est important de chercher à amorcer une réflexion

grâce au concret, de se bagarrer avec le réel pour peu à peu s’en

détacher, comme le fait l’enfant au cours de son développement

naturel. On pourra alors imaginer une action et son inverse sans le

matériel. Par contre, on ne pourra jamais l’imaginer si on n’a pas fait

d’actions semblables, de près ou de loin, dans sa vie. C’est seulement

ensuite qu’on pourra avoir une pensée adulte (formelle) raisonnant à

partir de symboles, d’hypothèses.

Tout le monde de nos jours a entendu parler de cette nécessité de

faire « manipuler » les enfants. Mais beaucoup oublient que cela n’a

qu’un but : pouvoir s’en passer. Dès que c’est possible, il faut faire

intérioriser les actions. On cherche au début à provoquer le processus

mental (pour certains élèves cela nécessite davantage de temps que

pour d’autres), mais ensuite la même chose doit être faite

mentalement.

Les objets proposés seront d’abord divers (clés, anneaux…), puis

identiques (pions), puis dessinés sur de petits papiers mobiles qui vont

devenir à leur tour des objets manipulables avant d’être remplacés par

des lettres et des symboles.

Nos actions, anticipées ou vécues, donnent lieu à des

représentations variées : on peut les mimer, les dessiner, les raconter

oralement, en langage courant ou en langage mathématique, les

symboliser par des nombres, puis des lettres. Le passage de l’un des

domaines à l’autre est très riche, mais on veillera à ne pas passer trop

vite de la phase de formation de la pensée à celle du passage à l’écrit.


IDÉE

LAISSER L’ENFANT RAISONNER

Les difficultés de l’enfant en maths proviennent souvent d’un

manque d’autonomie dans sa réflexion. Pour remédier à cette

situation, les adultes doivent donc bien observer les occasions dans

lesquelles ils empêchent parfois l’enfant de raisonner seul.

Par exemple, si l’enfant va acheter du pain à la boulangerie, il vaut

mieux éviter de lui donner l’appoint. Un porte-monnaie avec

quelques pièces de valeurs différentes l’incitera à réfléchir et à

compter ce qu’il doit donner, même s’il aura besoin d’aide au début.

Si l’on veut qu’il apprenne à lire l’heure, on le chargera par

exemple d’être le « gardien du temps » le dimanche. C’est lui qui

devra prévenir la famille quand il sera temps de partir, ou de faire ceci

ou cela (« Quand la petite aiguille sera sur le… et la grande sur

le… »), etc. Pendant la semaine, ce sont toujours les adultes, pressés,

qui le préviennent quand il faut partir, aussi il n’a jamais l’occasion de

regarder la pendule.

Laisser l’enfant raisonner suppose qu’on est capable de se retenir

de tout de suite le conseiller ou de faire à sa place. Quand l’enfant

verse trop d’eau dans son verre, on est aussitôt tenté de dire : « Tu en

as mis trop, enlèves-en ». Il est plus formateur de lui dire : « Qu’est-ce

qui se passe ? Que pourrais-tu faire pour obtenir ce que tu cherches à

faire ? » S’il met la table et demande : « Combien de couverts faut-il

mettre ? », au lieu de lui répondre « sept », il est plus intéressant de lui

énoncer le nom des personnes qui seront présentes : « Il y aura Paul,

toi, ta sœur, etc. », et de l’engager ainsi à compter lui-même le

nombre des convives.

On a constaté que l’enfant comprend mieux et mémorise mieux

une définition ou une règle qu’il a découverte lui-même : « Peux-tu

dessiner un point qui soit à égale distance des extrémités A et B du

segment ? Peux-tu en trouver un autre ? Et maintenant tous les points


équidistants de A et B ? Tu as construit la médiatrice. Tu es capable de

déduire ses propriétés. »


IDÉE

NE PAS LE NOYER DANS LES EXPLICATIONS

Il convient de laisser à l’enfant un véritable espace personnel

d’action et de réflexion. Trop souvent, on croit l’aider par un flot de

conseils, car en France les adultes parlent beaucoup. Moins un enfant

comprend, plus on le noie dans les explications verbales, les phrases

supplémentaires.

Or, grâce aux enfants sourds, on maintenant sait que le langage ne

fait pas nécessairement tout comprendre. Certains orthophonistes

savent former des publics d’élèves ou d’enseignants, pratiquement

sans parler : en utilisant les gestes et les déductions nées des actions

sur le matériel. C’est très spectaculaire, convainquant, et efficace sur

le plan pédagogique. Le silence permet presque d’entendre les élèves

penser.

À la maison, les parents, eux-mêmes anciens écoliers, reproduisent

ce qu’ils ont appris. Ils montrent, refont le cours, font des détours par

d’autres notions tout aussi compliquées, rendent les séances

interminables et pénibles, pour aboutir à la même incompréhension.

Devant une demande du genre : « Papa, je n’ai rien compris à cet

exercice, aide-moi », si on prend le temps de dire : « Que dit la leçon,

là-dessus ? Que sais-tu ? », bien souvent on sera étonné que l’enfant

ne sache pas répondre. Soit il a besoin de l’exemple pour comprendre

la règle, et alors on lui suggèrera de regarder les exemples du cours.

Soit il n’a pas conscience de son incompréhension du cours, et on

l’incitera à y donner du sens. Soit encore, il a lu trop rapidement la

consigne, et on le renverra prendre le temps d’évoquer ce qu’on lui

demande.

Si on lui laisse le temps de réfléchir, de se poser d’autres questions,

on a tout le loisir de l’observer et de s’adapter à lui pour le guider plus

subtilement et de manière plus efficace.


IDÉE

NE PAS CROIRE QUE TOUT EST ÉVIDENT

L’intelligence de l’enfant se développe en gros comme ceci : dans

un premier temps, il manifeste un point de vue erroné sur la situation.

Il va sans cesse se contredire, ses affirmations sont incompatibles les

unes avec les autres. Son jugement ne porte que sur l’aspect perceptif

des choses. Il croit que le nombre de pions a changé alors qu’ils ont

juste changé de place. L’école note alors : « non-acquis » sur le cahier.

Ensuite, quand l’enfant commence à ne plus se fier exclusivement

à l’apparence, il se corrige, doute de ses évaluations visuelles : c’est la

période de « déséquilibre », encore pleine d’hésitations, où il peut

donner une réponse exacte dans certaines situations, et revenir au

stade précédent pour d’autres. Il devient sensible à des arguments

négligés jusque-là. L’école dit : « en cours d‘acquisition ».

Enfin, l’enfant n’est plus dupe des transformations, la perception

trompeuse n’altère pas son raisonnement. Il a atteint un équilibre

opératoire. Il semble dire à l’adulte : « Mais pourquoi me poses-tu une

question pareille ! » et oublie qu’il ait jamais pu répondre autrement.

C’est « acquis ».

Il faut insister sur le sentiment de très forte évidence caractérisant

ce palier, et qui rend difficile de refaire le chemin parcouru. En

France, les maîtres reçoivent trop peu de cours de pédagogie. Certains

ont tendance à ne transmettre que le résultat auquel ils ont abouti,

sans la démarche qui les y a conduits, parce qu’ils n’en ont

généralement pas connaissance. Les cours de maths et les livres sont

pleins de phrases du genre : « Il est évident que.. », « Vous voyez

que... », « Vous noterez que... », « Il suffit de… ». Les jeunes en

difficulté sont fragilisés par ce système. Ils n’osent jamais signaler


qu’ils n’ont pas compris ce qui vient d’être qualifié d’« évident ». Et

puis, il leur est difficile d’expliquer ce qu’ils n’ont pas compris.

À l’école, face à un problème, on voit que les enfants ont souvent

des représentations différentes de la situation qui nous paraissait

évidente. Par exemple, on pense que tous les enfants coupent un

gâteau en 4 parts égales comme ceci :

Or, on en rencontre beaucoup, même grands, qui coupent d’une

manière étonnante :

Un travail préalable de comparaison des tailles (faire découvrir la

superposition) et de calcul du nombre de coups de couteaux devra se

faire avant que l’enfant coupe selon la façon qui nous semble

évidente.

Si un enseignant cherche à faire cheminer ses élèves, il a intérêt à

s’observer lui-même en train de résoudre un problème, à s’entraîner à

un léger décalage permettant de se voir réfléchir. Savoir comment on

fonctionne aide à comprendre comment l’autre fait.

À la maison, si un enfant pose une question qui paraît absurde,

c’est qu’il y a quelque chose qu’il n’a pas compris : inutile de lui dire
« Enfin, tu vois bien que… », « Je te l’ai déjà dit… », ou « Est-ce que tu

le fais exprès ? ». Ces phrases montrent notre impuissance à l’aider et

risquent de l’empêcher de poser d’autres questions. Mieux vaut lui

dire : « Je vais réfléchir pour t’expliquer autrement, là je ne sais pas. ».

L’enfant verra l’adulte tâtonner et réfléchir, c’est-à-dire adopter deux

attitudes fondamentalement scientifiques.

Au lieu de « Est-ce que tu as compris ? », on peut plutôt dire :

« Qu’est-ce que tu as compris ? », et on entend alors les erreurs faites

par l’enfant, et on repère mieux d’où il faut démarrer.


IDÉE

10

RENDRE LA PENSÉE MOBILE ET RÉVERSIBLE

On décrit deux sortes de réversibilités :

la réversibilité logique, qui permet d’inverser toute opération ou


suite d’opérations : un bébé peut poser un objet puis le retirer ; un

enfant de 7 ans peut transformer une boule de pâte en galette puis

encore en boule et constater que la quantité de pâte reste la

même.

la réversibilité psychologique, elle, fait parcourir un même


trajet mental dans les deux sens : en lecture, on passe de la

perception des lettres d’un mot à l’évocation d’une image

mentale lui donnant du sens, puis on revient au mot suivant, etc. ;

on part d’un nombre pour trouver son carré, ou on part d’un

nombre (qui est un carré) pour trouver sa racine.

Il faut savoir que la pensée réversible est immédiate, si mobile

qu’elle permet d’imaginer une action en même temps que son action

opposée. C’est pourquoi en classe il est difficile de faire taire l’élève

qui répond avant les autres !

Voyons la réversibilité logique en arithmétique : dans le cas d’une

somme ou d’une différence, si deux quantités sont réunies en un tout,

on peut passer

d’une partie au tout en ajoutant l’autre, ou

du tout à une partie en enlevant l’autre.

Une même situation peut donc être notée de 4 façons : a + b = c ;

b + a = c ; c - b = a ; c - a = b.

Tous les collégiens en difficulté en maths échouent à trouver

l’inconnue dans ce test d’algèbre :

345 + a = 518 ; 832 - a = 345 ; 65 x a = 260 ; 128 : a = 4.

Ils ignorent quel signe ou quel nombre écrire d’abord : à droite ?

en haut ? divisé ? multiplié ? Souvent qualifiées à tort d’« erreurs


d’étourderie », ces erreurs, fréquentes aussi dans les transformations

de formules de physique ou de chimie, cachent un réel défaut

d’acquisition des quatre opérations et de leur réversibilité.

Ainsi, enseigner addition et soustraction ensemble, et

multiplication et division également ensemble, favorisera l’acquisition

simultanée de chacune de ces opérations et de son inverse. On

proposera sans cesse des problèmes portant soit sur l’état final, soit sur

l’opération, soit sur l’état initial.

En général, on évitera de répéter un raisonnement ou une

formulation à l’identique, en posant les questions en tous sens : « Quel

jour est avant mardi ? » sera suivi de : « Lundi est avant quel jour ?

Mardi vient après quoi ? ». De même : « Combien de petits bols mets-

tu dans le grand ? Tu verses l’eau du grand bol en combien de petits ?

Tu sais compter à l’endroit ? Alors, compte à l’envers. »

« Combien font 3 x 4 ? », « 12, c’est le produit de 3 par quoi ? »,

« 12, c’est le produit de 4 par quoi ? ».

Avant un travail ou une expérience, on développera les facultés de

rétroaction et d’anticipation, primordiales : « Que va-t-il se passer si je

mets cette pierre dans le seau d’eau ? », puis : « Finalement, qu’est-ce

tu as réellement observé ? », « Que vas-tu écrire ? », puis : « Relis ce

que tu as écrit ». Ces allers-retours en pensée sont la marque du

passage à une pensée adulte, formelle.

C’est la réversibilité dans le temps qui est la plus longue à


acquérir. Arriver à l’heure à un rendez-vous, par exemple (ou cuisiner

les divers plats d’un dîner), demande d’être capable de retourner en

arrière mentalement pour fixer l’heure de partir (ou l’heure de se

mettre en cuisine) : « Je veux y être à 9 h, j’ai besoin de 20 minutes de

trajet, je pars donc avant…, donc à … », « Je veux que le poulet soit

prêt à 20 h, il faut 45 minutes de cuisson, 20 minutes de préparation

et une heure de courses, donc je dois commencer les courses à… »

Dans la réalité, la montre tourne toujours dans un sens, elle ne recule

pas. Le temps n’est réversible que grâce à nos outils de pensée.


IDÉE

11

POSER DES QUESTIONS FÉCONDES

Un adulte souhaitant faire réfléchir un enfant posera des questions

qui stimulent la recherche, et n’amènent pas de réponses toutes faites.

Les questions fécondes sont celles qui peuvent

focaliser l’attention : « As-tu remarqué ce qui est pareil ? » ;

pousser à compter/mesurer : « Quelle longueur de ficelle peux-tu

mettre autour de ce rectangle ? » ;

encourager à comparer : « Quelles ressemblances et quelles

différences trouves-tu entre 1,24 et 1,42 ? » ;

permettre d’anticiper : « Que se passera-t-il si on pose un poids

de ce côté de la balance ? » ;

poser des problèmes : « Peux-tu trouver un moyen pour égaliser

les deux quantités ? ».

Les deux dernières questions sollicitent une pensée

« anticipatrice », capable de dépasser par un raisonnement les

évidences de l’expérience perceptive immédiate. On crée une

certaine situation, et on demande à l’enfant ce qui va se passer, ou on

lui demande de créer lui-même une situation « afin qu’il s’y passe… »

De manière générale, on évitera de se précipiter pour répondre à

l’enfant. Souvent, s’il pose une question, c’est qu’il a déjà sa

réponse. On évitera aussi d’employer des phrases contenant déjà

la réponse, ou qui ne peuvent appeler comme réponses que

« Oui » ou « Non » (questions fermées).

On peut aussi répondre aux questions des enfants par d’autres

questions, pour qu’ils apprennent à penser par eux-mêmes, et

aussi pour qu’ils mémorisent mieux. « Maman, où sont mes

chaussures ? » peut recevoir comme réponse : « Tu sais bien


qu’elles sont dans l’entrée », mais il est préférable de répondre :

« Où rangeons-nous les chaussures d’habitude chez nous ? ». La

question « Pourquoi 200 g de farine n’arrivent pas à la même

hauteur que 200 g de sucre dans ce verre mesureur ? » pourra

appeler la réponse « Qu’en penses-tu ? », incitant l’enfant à

investiguer lui-même plus loin. Tout ceci suppose que le

formateur fasse une place à l’apprenant, en patientant, en

acceptant les longs moments de silence, les doutes, sans vouloir

intervenir tout de suite pour aider.


IDÉE

12

RESPECTER LE RYTHME DE CHACUN

La psychologie moderne a permis de montrer que la logique n’est

pas innée chez l’enfant. Elle se construit peu à peu, en passant d’abord

par le corps, puis par le maniement d’objets concrets, et enfin par la

généralisation à des objets mathématiques, qui sont des

représentations du réel.

À l’intérieur de ces périodes, les acquisitions suivent aussi une

évolution par stades : d’abord, l’enfant montre un point de vue erroné

sur la situation ; ensuite, il balance entre ce point de vue ancien et un

nouveau ; enfin, il témoigne d’une maîtrise supérieure de la réalité,

d’un nouvel équilibre. On ne verra jamais un enfant réagir

conformément au dernier stade d’acquisition avant d’être passé par les

précédents. Chez les enfants qui n’éprouvent pas de difficulté

d’apprentissage, cela se passe si vite que l’on n’a pas toujours le temps

d’observer cette décomposition.

Mais il est important de savoir que si l’on donne la « bonne »

réponse à un enfant qui se trouve encore au stade 1, il ne l’intégrera

pas, elle lui sera inutile et ne modifiera en rien son attitude. Corriger

un exercice en classe n’aide à comprendre que ceux des enfants qui

sont prêts à « basculer » du stade 2 au stade 3. Donc, il existe un ordre

et un rythme nécessaires des étapes d’acquisition.

Que faire à la maison ? Si nous attirons l’attention des parents sur

la nécessité d’exercer quotidiennement leur enfant à effectuer des

raisonnements, ce n’est pas pour augmenter la quantité

d’apprentissages des petits. C’est pour montrer qu’ils peuvent

naturellement accompagner (et de manière très efficace) le

développement de l’intelligence de leurs enfants et qu’ils n’ont pas à

se transformer en maîtres, à rajouter des exercices à ceux de l’école et

à gâcher leurs relations en ne parlant plus que de performances


scolaires. L’enfant doit se construire aussi sur les plans affectif et social

dans sa famille.

À l’école, où il est plus difficile de concilier les différents rythmes,

les enseignants remarquent que seuls ceux des enfants qui ont déjà

compris intègrent ce qui est dit, les autres non. Les solutions pour

gérer cette hétérogénéité dépendent de l’amélioration des techniques

pédagogiques :

On peut évaluer le chemin parcouru en demandant un dessin au

début puis à la fin d’un travail. Par exemple, après une séance

avec une balance Roberval, le dessin sera mieux articulé, avec

des lignes horizontales et verticales reliées.

On peut demander aux élèves de ne parler que pour dire une

chose nouvelle. Les gestes de l’un peuvent déclencher ceux des

autres qui n’ont plus besoin d’agir et cherchent mentalement.

Pour le calcul mental, un enfant différent racontera chaque matin

comment il a procédé. Voit-il ou se parle-t-il des objets, un

dessin, des symboles ? Par où finit-il ?

Quant à l’élève qui a une réponse immédiate, on peut lui

demander d’expliquer comment il a trouvé (s’il fonctionne par flashs,

il a besoin de dire le résultat avant de pouvoir remonter à la

procédure). On lui proposera aussi :

de dire sa réponse à voix basse ou dans la boîte à secrets ;

de mieux formuler sa réponse, d’une façon mathématique, ou

littéraire, avec « donc »… ;

d’aller de plus en plus vite, de chercher une autre façon ;

de prolonger l’entraînement par une fiche préparée ;

de servir de tuteur à un autre : expliquer à autrui est difficile et fait

travailler en profondeur.

de faire le même exercice dans un autre contexte, ou d’en

inventer un lui-même.

Dans le cas d’un élève fonctionnant plus lentement, ou

différemment de ce qu’attend le formateur, on essaiera d’aménager un

moment pour identifier la cause de l’erreur. Une fois qu’on a repéré la

cause, il n’y a pas toujours besoin de trouver des horaires

supplémentaires pour y remédier : les troubles dans l’espace pourront

être travaillés en activités physiques et sportives, par exemple.


IDÉE

13

L’ERREUR N’EST PAS UNE FAUTE !

L’erreur occupe une place importante pour un élève puisque, dans

la majorité des cas, elle entraîne pour lui des réprimandes, voire des

mauvaises notes et des sanctions. Souvent, c’est l’élève lui-même qui

doit la « corriger », la confronter à la « bonne solution ». Elle est

considérée comme une « faute » qu’il faudra « éliminer », au lieu de

servir d’indice révélateur d’un apprentissage incomplet, mettant en

évidence qu’il faut repartir de là pour construire ou reconstruire un

apprentissage correct. Il faut voir en l’erreur un obstacle à surmonter

pour apprendre.

Et pourtant, le travail mathématique laisse une large place aux

erreurs. Prendre le risque de se tromper, de faire une erreur, de

recommencer, fait partie intégrante de l’activité mathématique. C’est

ce qui permet de trouver la solution d’un problème ! Les erreurs sont

fertiles, elles obligent l’élève à réfléchir, à raisonner et à progresser.

Toute erreur peut être décrite en termes mathématiques mais elle

peut aussi être rattachée à l’individu, à son passé, à une foule de

facteurs conjoncturels comme la fatigue, la distraction, la peur,

l’anxiété, certains événements de la vie quotidienne. Dans ce cas, le

traitement mathématique de l’erreur ne suffit pas : il faut renouveler

l’exercice dans d’autres conditions pour éviter que l’erreur se

reproduise ; par exemple, certains enfants ne font des erreurs que

lorsqu’ils sont en situation de stress pendant un contrôle de

connaissances. D’autres ne font des erreurs que s’ils sont pressés par le

temps, car ils sont plus lents. Tous ces facteurs doivent être pris en

compte et tempérés pour que l’élève soit dans les meilleures

conditions possibles.

Pour les erreurs plus spécifiquement mathématiques, il faut

distinguer plusieurs niveaux :


les erreurs de savoir : l’élève ne dispose pas encore de la notion
en jeu.

Dans ce cas il faut reprendre l’apprentissage pour (re) donner du

sens au concept travaillé (par exemple, reprendre le concept de

multiplication ou de division) ;

les erreurs de savoir-faire : l’élève n’arrive pas à mettre en


œuvre de façon suffisamment efficace une technique. Ces erreurs

peuvent venir d’un manque d’entraînement, d’une négligence de

certains détails due à la mise en place trop précoce d’un

automatisme, d’un manque d’organisation spatiale… (mauvaise

disposition des opérations, mauvaise lecture des nombres…). En

ce cas, il faut reprendre l’explication de la technique, et

l’entraînement à l’aide de supports variés : exercices, jeux,

logiciels…

les erreurs de raisonnement : l’élève se trompe dans le

déroulement des déductions, dans le choix d’une procédure. Ces

erreurs peuvent venir d’une mauvaise compréhension de la

situation, d’une mauvaise gestion des données, d’une mauvaise

organisation. Dans ce cas, il convient de travailler le traitement

de l’information à l’aide de supports variés, amener l’élève à se

poser des questions, et l’exercer régulièrement à des jeux

logiques.

Surtout, ne pas dramatiser les erreurs : il faut plutôt aider l’enfant à

les comprendre et à les corriger lui-même. Éviter les jugements de

valeur et les termes comme : « archi faux ! », « erreur inadmissible,

c’est mal ! », « c’est mauvais, tu t’es trompé ! », etc.

Positiver, et dire plutôt « Pourquoi dis-tu cela ? montre-moi… tu es

sûr ? » Il faut s’intéresser à la démarche de l’enfant, et pas seulement

au résultat. Si l’enfant explicite sa démarche, il sera confronté à ses

contradictions et trouvera de lui-même qu’il s’est trompé. S’il ne s’en

aperçoit pas, ne prend pas conscience de son erreur, c’est que

l’exercice est trop difficile et qu’il y a lieu de l’abandonner pour un

exercice plus facile

Accepter de se tromper, de faire des erreurs est indispensable à

l’activité mathématique ; l’élève qui a peur de se tromper s’engage


rarement dans un problème qui ne lui est pas complètement familier.

Éviter les notations qui pénalisent les erreurs sans prendre en

compte le travail réalisé ou même la démarche mise en œuvre par

l’élève. Prévoir des « points » ou une appréciation positive pour ce qui

a été fait.

« Les études sur les performances scolaires réalisées par

l’OCDE (Organisation de coopération et de développement

économiques) montrent que les élèves français sont parmi les

plus anxieux et les plus timorés à répondre aux questions

ouvertes des tests, de peur probablement de se tromper. » (Le

Monde daté du 19/7/2010).


IDÉE

14

QU’EST-CE QUE LA LOGIQUE ?

Zoé et Max rangent les aliments : ils mettent les bocaux sur une

étagère, puis les paquets de sucre brun et de sucre blanc sur une autre.

Quand Zoé s’apprête à ranger le paquet de farine avec les bocaux,

son frère lui demande de les mettre avec les paquets. Il trouve ça plus

logique. Max poursuit un classement cohérent avec celui qu’il a

débuté. Dans le langage courant le mot « logique » désigne l’existence

d’une loi dont « on aurait pu déduire que… ».

Dans le langage mathématique, il s’agit d’une suite de

raisonnements qui vérifient le principe du tiers exclu (un objet existe

ou non, sans autre possibilité) et le principe de non contradiction (on

ne peut affirmer vraie et fausse la même chose).

La logique demande une expérimentation individuelle sur le

monde. La maison est un endroit idéal pour dire comment on pense

qu’on pense. Les enfants clarifient et renforcent leurs raisonnements

en parlant de leurs stratégies. À l’école, l’enseignant n’a pas le temps

d’écouter chacun donner ses arguments.

Cette verbalisation est importante, car souvent un enfant sait

résoudre un problème facile, mais il échoue à résoudre un problème

semblable posé avec des nombres plus alambiqués. En parlant de sa

procédure, l’enfant en prend conscience et peut la transférer, la

généraliser. Si on ne passe pas par les mots, le concept ne se

conservera pas : le mot représente la classe des objets. Et l’enfant

apprend que devant une difficulté intellectuelle, il peut agir.

Si un enfant n’a pas l’esprit logique ? Un mythe très destructeur

consiste à dire qu’il n’est pas équipé pour cela. Bien sûr, on ne peut

pas tous découvrir les formules physiques permettant de décrire le

mouvement des planètes, mais on est tous capables d’avoir du plaisir

à faire les maths du collège. Veillons à ne pas exclure nos enfants de

raisonnements sous prétexte que ceux-ci seraient trop durs.


IDÉE

15

COMMENT ÉVOLUE LA LOGIQUE ?

La recherche du petit enfant est hasardeuse, il lance des réponses,

sans vérifier. Si on lui demande quel est l’objet, qu’il n’a pas vu et

qu’on cache dans la main, il répond : une balle, un stylo… Même

confronté à son erreur, il recommencera la prochaine fois qu’on lui

posera la même question à propos d’un autre objet. Il ne sait pas qu’il

ne sait pas.

Les enfants perturbés qu’on voit en rééducation ont vécu des

expériences telles qu’ils ont l’idée, comme les tout-petits, qu’il faut

répondre tout de suite. De plus, ils sont sûrs que leurs réponses sont

bonnes.

En grandissant, l’enfant se met à étudier plusieurs possibilités, à

tâtonner ; il commence à avoir le besoin de vérifier. « Qu’est-ce que tu

as dans la main ? Une bille ? Peut-être une bague ? Non, je pense que

ce n’est pas possible. Ah ! C’était un petit lapin ! Je me suis trompé. »

Plus tard, on assiste à une systématisation, une accélération grâce

à une recherche hypothético-déductive (si… alors…). L’enfant passe

tous les possibles en revue, par comparaisons, classifications (une

solution va, une ne va pas, y en aurait-il d’autres ?). « Je ne peux pas

savoir ce que tu as dans la main parce que je ne l’ai pas vu. » « La

situation a changé, j’ai vu ce que tu as mis dans le sac, donc tu as

dans la main soit le… soit le… ». « Puisque tu as déjà sorti le… et le…

je déduis que ce que tu as dans la main est forcément le… »

Il élimine ensuite très rapidement les hypothèses qui ne

conviennent pas, sans avoir besoin de les énumérer les unes après les

autres. Il peut savoir ce qui va se passer parce qu’il l’a déjà fait.
L’anticipation et la rétroaction sont possibles, c’est-à-dire une mobilité

de la pensée et sa réversibilité.
IDÉE

16

LOGIQUE ET LANGAGE

La fréquence avec laquelle les orthophonistes rencontrent chez les

enfants des troubles du langage associés à un retard intellectuel incite

à maintenir un regard sur ce va-et-vient subtil et serré entre langage et

pensée. Les retards les plus graves sont généralement accompagnés

des troubles du langage les plus graves. Nombre d’exemples cliniques

attestent la présence de la composante cognitive (voire, leur

dominance) dans le processus d’acquisition du langage ; ainsi est née

une spécialité de l’orthophonie : la rééducation du langage logico-

mathématique.

Une analyse des structures de la connaissance est nécessaire si

l’on veut procéder à une analyse des structures du langage, même si

cela ne suffit pas à comprendre, entre autres, les problèmes posés par

le vocabulaire ou les formes de style.

Il ne s’agit pas d’enseigner les maths pour enseigner le français !

Mais il faut savoir que le langage ne dépend pas que d’un simple

exercice linguistique. Devant une erreur de compréhension d’un

enfant, on se demandera s’il a pu être gêné uniquement par l’énoncé.

Dans ce cas, on reformulera jusqu’à ce qu’il n’y ait aucune ambiguïté.

Alors, on saura si la difficulté concerne plutôt le vocabulaire ou si ce

qui est en jeu est le raisonnement sous-jacent.

Si un enfant n’utilise pas dans son langage la conjonction « et »,

par exemple, on peut en déduire ce qui lui manque sur le plan

logique (intersection, coordination des points de vue…).

Pour que l’aide qu’on veut lui apporter soit fructueuse, on

commencera par un travail en profondeur sur les structures de pensée

(classifications, relations, transformations). On observera alors, le plus

souvent, une amélioration spontanée du langage.


IDÉE

17

LES NÉCESSAIRES IMAGES MENTALES

L’image mentale est la représentation mémorisée ou imaginée d’un

objet physique, d’une idée, ou d’une situation. Sur la route, je sais que

je ne dois pas dépasser le 110 km/h bien que le panneau d’interdiction

ne soit plus sous mes yeux. Je l’ai perçu (avec ma vision) très

rapidement, et j’en conserve ensuite longuement l’image mentale,

jusqu’à ce qu’apparaisse un nouveau panneau de signalisation.

L’intelligence semble être fortement liée à cette capacité à stocker,

traiter et faire évoluer un capital de représentations mentales.

Nos images reproduisent une chose déjà perçue (en sa présence

ou en son absence), ou anticipent une chose inconnue (plus difficile).

La chose perçue peut garder sa forme et être immobile ou non.

L’image peut aussi être le résultat d’une transformation (par exemple,

dans le dépliement d’un cube).

Beaucoup d’enfants en échec ou d’adultes illettrés n’ont pas pris

l’habitude de se donner des images mentales quand ils lisent une

histoire ou un énoncé de problème. On dit d’eux qu’ils savent lire,

mais sans comprendre.

Après la compréhension, arrivera la mémorisation dont l’absence

d’image mentale barre le chemin. Pour retenir, il faut « évoquer » : on

ne retient que ce qu’on évoque. Inutile de répéter dix fois sa leçon, de

regarder cent fois une carte de géographie, si on ne se fixe pas le

projet de la faire exister « dans sa tête ».

Toutes nos actions demandent à être intériorisées dans tous les

domaines qui nous concernent : langage, logique, espace, temps,

nombre. Se souvenir combien il y a de fenêtres dans sa maison oblige

à inspecter méthodiquement (logiquement) chaque pièce en pensée.

Respecter la priorité dans un carrefour demande de se mettre

spatialement à la place des autres conducteurs (Voir l’Idée 92).


IDÉE

18

EXERCER LES IMAGES MENTALES

Au quotidien, on imite constamment les gestes d’autrui pour faire

ses lacets, dessiner, cuisiner… Chaque fois, l’adulte peut décomposer

ses gestes en courtes séries faites devant l’enfant, ou hors de sa vue.

Pour aider la compréhension en lecture d’un jeune, on l’interroge

sur ce qu’il voit ou entend « dans sa tête » au fur et à mesure qu’il lit

un texte. Cette introspection n’est ressentie comme pénible que dans

les débuts où l’enfant affirme généralement qu’il ne voit « rien ». Mais

si on lui demande alors : « Ton père porte-t-il des lunettes ? », il sait

aussitôt répondre. On lui prouve ainsi qu’il a bien une image de son

père dans sa tête puisqu’il sait répondre. Peu à peu, par de petites

questions précises, on exerce la prise de conscience du sujet qui doit

traduire mentalement (évoquer) toute information vue ou entendue

(perçue) pour qu’elle prenne son sens. Il faut distinguer les détails

obligatoires de ceux qui sont libres. Dans la phrase « L’enfant porte un

gros sac », par exemple, l’image mentale qu’on se fait de l’enfant est

celle que l’on veut, mais l’image du sac est forcément celle d’un gros

sac.

En famille ou en groupe, si plusieurs personnes disent ce qu’ils se

rappellent d’un même film, il est instructif de noter les différences de

leurs récits. Mais les évocations des uns peuvent réveiller celles des

autres : « Tu arrives à revoir la scène finale ? Peut-être pourrais-je y

arriver aussi. »

Les spécialistes aident à repérer le mode privilégié de traduction

mentale d’une personne (son profil pédagogique) : par exemple,

comment elle a retenu le trajet allant de la sortie du métro jusqu’au

bureau. A-t-elle gardé en tête la photo du plan (évocation visuelle), ou

re e
a-t-elle répété : « 1 à droite, 2 à gauche » (évocation auditive). A-t-
elle imaginé, écrites en lettres blanches sur fond bleu, les plaques des

noms de rues (symboles visuels) ?…


IDÉE

19

S’INTÉRESSER À LA DÉMARCHE

Si l’on veut comprendre l’apprenant que l’on a devant soi, savoir à

quel niveau il en est de ses acquis et mieux l’accompagner, on ne peut

se contenter dans un exercice de simplement tenir compte du résultat

auquel il est parvenu. Que ce résultat soit juste ou faux, on ira plus

loin en s’intéressant à la manière d’en arriver là. Nous demandons très

souvent : « Comment as-tu trouvé ? ». En effet, la démarche qui a

conduit au résultat peut faire toute la différence entre les enfants. On

sera plus sûr de reprendre là où il est réellement et non là où on croit

qu’il est.

Par exemple, en primaire, dans un pot donné à un enfant, on

dépose 12 bâtons comptés devant lui, et 7 bâtons dans un autre pot

donné à l’adulte. On demande combien il faut ajouter de bâtonnets

dans le second pot de l’adulte pour en avoir autant que dans celui de

l’enfant.

S’il sait retourner en arrière pour dire comment il a fait, on pourra

voir s’il a complété au hasard avec des allumettes (tâtonnement

hasardeux), ou s’il est monté méthodiquement de 7 à 12 (addition à

trou), ou s’il a été capable de réversibilité pour redescendre

de 12 à 7 (soustraction). Cette observation, ajoutée à d’autres, nous

indique s’il utilise des procédures de son âge, et permet de déceler les

causes d’erreur ou de lenteur.

Un professionnel de l’éducation, un professeur de maths, aide

souvent mieux quelqu’un s’il est formé à des techniques


d’explicitation de sa démarche, pour l’élève et pour lui-même : s’il

s’observe lui-même en train de réfléchir, il constate qu’il utilise

différentes procédures selon les situations, et accepte mieux celles de

quelqu’un raisonnant autrement que lui. Un parent, sans formation,

aura plus de mal.


IDÉE

20

FAIRE DES LIENS

Les maths sont une manière d’établir des relations entre les objets

du réel ou entre les idées : ces relations peuvent être de ressemblance

(« Cet homme a la même fortune que celui-là »), de différence (« Cet

homme est plus âgé que l’autre »), ou d’association (« Cette famille a

pour nom Morel »).

Dans la vie quotidienne, on établit sans cesse des relations. Pour

conduire une auto, on fait des mouvements dans un certain ordre : on

associe des groupes de gestes à chaque situation familière, qui

ressemble à une situation déjà vécue ; on anticipe des situations

imprévues, différentes des précédentes, on relie le présent à l’avenir.

En établissant des relations entre les choses, les personnes ou les

idées, en en vérifiant la cohérence et la bonne coordination par le

biais de la logique, on pense de façon mathématique. On établit des

relations de ce type (équivalence, ordre ou association) depuis sa

naissance.

Aider à être intelligent, c’est créer des liens :

liens entre les enseignants : les profs de maths (ou d’histoire)

peuvent travailler avec les profs de français (ou d’histoire) ; on

peut étudier le Moyen Âge dans plusieurs matières, avec des

points de vue différents.

liens entre les concepts : enseigner addition et soustraction

ensemble ; le système de la numération ensemble (et non par

tronçons de 1 à 100, puis de 100 à 1 000).

liens entre les actions grâce à du matériel manipulable : on se

déplace dans la pièce ou on rapproche sur la table des allumettes,

des jetons, des étiquettes ou papiers mobiles.

liens entre le réel et sa symbolisation : on agit sur des objets, puis

on symbolise ces actions par le dessin, le récit, l’écriture de


chiffres ; à l’inverse, on a un dessin ou un texte sous les yeux, et

on mime l’histoire avec des objets.


IDÉE

21

ENCOURAGER LE JEUNE QUI VEUT ÉVOLUER

Il faut du temps pour évoluer. C’est par ses encouragements que

son entourage aidera l’enfant à tenir sur la durée. L’indifférence à ses

progrès ou trop de pression aggravent son mal-être.

En changeant de regard, en portant son attention sur ses talents

plutôt que sur ses manques, on lui permet de changer. Les parents

connaissent bien leur enfant et ne doivent pas oublier ce qu’il réussit

en famille. Même si l’école est importante, elle ne doit pas gâcher

l’ambiance de la maison. Supprimer les activités extra-scolaires pour

consacrer davantage de temps aux devoirs à la maison est contre-

productif : le jeune a besoin d’être valorisé dans ses aptitudes (par

exemple, de judoka, de musicien...).

On se facilite la tâche en fixant des objectifs modestes, en tolérant

des solutions provisoires pour attendre les progrès : l’enfant ne sait

toujours pas ses tables de multiplication ? On lui laissera encore

consulter une table de Pythagore pour ne pas bloquer les acquisitions

suivantes (division, fractions…).

L’école peut adapter ses attentes et procéder à de tels

aménagements. Si un enfant ne lit pas bien, sa lenteur de lecture

nécessite de lui allouer un temps additionnel. S’il a simplement du

mal en calcul, lui donner davantage de temps est inutile, on peut lui

donner une calculette. Mais pour les évaluations, le tiers temps en

plus est difficile à gérer en classe (sur quel temps déborder ?) ; en ce

cas, mieux vaut réduire le nombre de questions. L’enseignant peut dire

à l’enfant les exercices à faire (ceux qui sont une application directe

du cours), et ceux qu’il n’a pas besoin de faire (ceux qui permettent de

classer les bons élèves). En géométrie, on donnera à l’enfant maladroit

ou trop lent la figure déjà faite. Il existe des compas, rapporteurs,


1
règles… spéciaux facilitateurs … utiles même aux autres élèves ! Tout

allègement de la tâche favorise les progrès.


1- http://aleph-maths.fr/
IDÉE

22

POURQUOI JOUER

En imposant le respect des règles et par les relations qu’ils

induisent entre les joueurs, les jeux de « société » favorisent la

communication et permettent une entrée efficace dans la socialisation.

Certains jeux sont instructifs : ils couvrent de nombreux sujets

comme la nature ou les enfants du monde, et peuvent faire appel à

des connaissances scolaires très variées : langage, lecture, nombres et

calcul, topologie et géométrie, histoire.

Certains sont éducatifs et font essentiellement appel à la

compréhension, la rapidité ou la mémoire.

Dans le cadre scolaire, le jeu est un moyen pédagogique bien

connu. Toute situation de jeu permet d’« apprendre à vivre ensemble »

et favorise l’apprentissage du langage car elle est source

d’argumentation, d’explicitation et d’évocation.

De nombreux jeux sont une aide pour « découvrir le monde » : les

jeux de logique, de stratégie, de mesure, de calcul…

Les enseignants qui disposent d’une « banque » de jeux et de

matériels variés peuvent s’appuyer sur elle pour les apprentissages

relevant de tous les domaines d’activités.

Dans toute situation de jeu, il y a réussite ou échec, mais les effets

du jeu cessent à la fin de la partie, et dès qu’une nouvelle partie

commence tout peut changer, car la part du hasard peut compenser

les « erreurs » de stratégie ou les failles d’un raisonnement.

Et n’oublions pas que le jeu fait partie intégrante de la vie de nos

enfants. Pour Pauline Kergomard, grande pédagogue française du

e
début du XX siècle et spécialiste de la petite enfance, le jeu est même

« le travail de l’enfance, c’est son métier, c’est sa vie ».


IDÉE

23

COMMENT JOUER

Une aide est plus efficace si elle respecte les stades nécessaires

d’un enfant qui grandit. Or la principale activité du petit enfant est le

jeu. Le jeu est un besoin vital chez l’enfant. Si on l’en prive, il est

prouvé qu’il ne se développe pas normalement. Le jeu est un outil

pédagogique et thérapeutique reconnu et particulièrement adapté, à

condition que l’adulte observe bien et analyse ce qui s’y déroule. Mais

il faut également veiller à ne pas s’introduire systématiquement dans

les jeux de l’enfant, afin de lui laisser un espace personnel de liberté

d’action et de pensée.

Dans un jeu de logique, de stratégie, de mesure, de calcul… on

peut répéter et améliorer les stratégies à chaque partie. Discuter sur le

jeu est important, mais trop de débat le rend lassant. C’est seulement

après que l’enfant aura eu le loisir de beaucoup tâtonner qu’on pourra

le questionner : « Qu’est-ce qui arriverait si je faisais ce coup-là ? Qui

va gagner depuis cette place ? Qu’est-ce que je pourrais faire après ? »

Si l’on veut intéresser un enfant aux jeux, cessons de lui dire

toujours comment jouer. Évitons les « Tu vois bien qu’il faut… » et

autres évidences qui n’en sont pas pour lui. Au mieux, on peut l’aider

en disant : « Comment penses-tu faire la prochaine fois pour

gagner ? ». On peut aussi dire à voix haute pourquoi on a choisi de

jouer tel coup : l’enfant imitera peu à peu cette façon de penser

autrement.

Un bon moyen de le faire progresser consiste à lui permettre de

reprendre son coup s’il s’aperçoit tout de suite qu’il aurait mieux valu

jouer autrement. Socialement, cela ne se fait pas, mais cela permet de

s’améliorer : on a souvent besoin de déplacer le pion pour

s’apercevoir des effets de cette action. Plus tard, il apprendra à

anticiper mentalement.
IDÉE

24

ET LA MÉMOIRE ?

Les psychologues cognitivistes décrivent deux types de mémoire :

d’une part la mémoire de travail (MT) ou mémoire à court terme, et la

mémoire à long terme d’autre part.

1-La mémoire de travail

C’est la mémoire qui conserve les informations nécessaires au

traitement immédiat des données (par exemple, lorsqu’on lit un

numéro de téléphone ou lorsqu’il faut recopier une phrase écrite au

tableau) ; elle est donc utilisée pour stocker les informations et

effectuer les tâches non « automatisées ». Ce stockage est très limité

dans le temps, et il s’efface rapidement. Les informations stockées

dans la mémoire de travail peuvent ne subsister que pendant quelques

dizaines de secondes, et donc se renouvellent sans cesse.

L’étendue de ce stockage est réduite, même si sa capacité

augmente avec l’âge (elle double entre 3-4 ans et 12-15 ans).

La « mémoire de travail » permet à la fois de sélectionner, de

maintenir et de traiter l’information pendant que le sujet effectue

différentes tâches cognitives lors d’une activité, par exemple la lecture,

la compréhension, le raisonnement ou la résolution d’un problème.

2- La mémoire à long terme

Au contraire de la mémoire à court terme, la mémoire à long

terme (MLT), ou mémoire permanente, a une très grande capacité, elle

est durable, mais l’information stockée est plus difficile à récupérer.

C’est pourquoi il est très important d’aider les élèves en difficulté

avec les mathématiques à se construire des automatismes et des

repères pour mieux organiser la « récupération » des informations, afin

de limiter au maximum la charge de travail. Il est utile de leur faire


noter les éléments importants, de les relire à haute voix, les surligner,

schématiser, représenter….
IDÉE

25

ACTIVITÉS POUR EXERCER LA MÉMOIRE

1- Jeu de Kim visuel

Sur une table, on dispose une série d’objets variés (de 5 à 7 pour

commencer) et connus de l’enfant. On demande à l’enfant de bien

examiner ces objets et de les nommer. Puis, pendant qu’il se retourne,

on déplace ou on cache un de ces objets. L’enfant doit retrouver le

nom de l’objet déplacé ou caché.

Pour l’aider, faire dire à haute voix plusieurs fois le nom des

objets pour essayer de les mémoriser.

Diminuer ou augmenter le nombre d’objets en fonction des

résultats.

Régulièrement, remplacer les objets par des nombres écrits en

chiffres sur des étiquettes placées dans le désordre.

2- Jeu de Kim sonore

Réciter à haute voix une suite de mots (de 5 à 7) plusieurs fois. La

réciter à nouveau en omettant un mot.

Demander à l’enfant de trouver le mot manquant.

En cas de besoin, faire répéter plusieurs fois la séquence à l’enfant

pour essayer de lui permettre de mémoriser les mots entendus ;

puis recommencer l’étape ci-dessus.

Diminuer ou augmenter le nombre de mots en fonction des

résultats.

3- Jeu des bouchons

Utiliser des gros bouchons de différentes couleurs (bouchons de

bouteilles de lait, par exemple). Sous chaque bouchon, cacher un

nombre (connu de l’enfant) écrit en lettres ou en chiffres. Désigner un


bouchon par sa couleur et demander à l’enfant de retrouver le nom du

nombre dont l’écriture est cachée sous le bouchon.

En cas de besoin, pour bien faire mémoriser les mots entendus,

faire répéter plusieurs fois le nom des nombres avant de les

cacher ; puis recommencer.

Diminuer ou augmenter le nombre de bouchons en fonction des

résultats.

4- Les occasions de la vie courante

Questionner l’enfant sur des situations qui se reproduisent

régulièrement dans sa vie quotidienne. Se rappelle t-il

le prix de sa revue favorite ? d’une baguette de pain ? d’un paquet

de ses bonbons préférés ?

des prénoms de ses amis ? des élèves de sa classe ou de son

club ? les titres de ses émissions de télévision préférées ?


IDÉE

26

JEUX POUR EXERCER LA MÉMOIRE

Voici quelques jeux du commerce qui permettent de faire travailler

la mémoire dans un cadre motivant.

1- Mémory

On trouve des variantes de ce jeu avec des éléments très divers :

quantités, personnages, voitures, animaux, couleurs, formes… mais le

principe en reste toujours le même : des cartes sont posées sur la

table, face illustrée cachée. Alternativement, chaque joueur retourne

deux cartes ; par exemple, s’il retourne deux cartes représentant la

même quantité (même si les motifs sont différents), il remporte les

deux cartes ; sinon, il les remet à leur place en les reposant face

illustrée cachée.

Lorsqu’il n’y a plus de cartes à retourner, le joueur ayant ramassé

le plus grand nombre de cartes a gagné.

2- Calypso (jeu édité par Ferti)

Joli jeu de mémoire coopératif sur le thème de la mer. Le but est de

délivrer le maximum de poissons prisonniers dans un filet au milieu de

l’Océan. Il faut aider les poissons de chaque couleur à retrouver leur

famille en les ramenant sains et saufs, tout en évitant requins et filets. Il

faut rester concentré car il y a un poisson différent sur chaque face des

cartes, et on retourne chaque carte en la en reposant.

3- Ding Dong (jeu édité par Chelona)

Jeu de mémoire très original : derrière chaque porte de

l’immeuble, on cache 4 cartes. Les 11 portes sont numérotées

de 2 à 12 et placées au hasard sur 11 des 12 entrées. Chaque joueur à


son tour jette le dé et dit s’il sait ce qu’il y a derrière la porte

correspondante. S’il ne sait pas, on enlève la porte en question et on la

place sur l’entrée libre. S’il donne la bonne réponse, il gagne la carte

cachée. Pour faciliter le jeu, on peut cacher les cartes tous ensemble,

en les mémorisant. On peut facilement personnaliser le jeu en créant

ses propres images à cacher.

4- Catherinette Caquète (jeu édité par Haba)

Jeu de mémoire dans la basse-cour. On étale sur la table

les 16 cartes poules (4 couleurs différentes), faces cachées. Chaque

joueur à son tour dépose le fermier sur la poêle de son choix (1,

2 ou 3 œufs). Ensuite il jette le dé : s’il tombe sur la face « œuf », il

gagne la poêle ; s’il tombe sur une face « couleur », celle-ci indique la

couleur des cartes poules qu’il faut retourner. Il faut trouver autant de

poules de cette couleur qu’il y a d’œufs dans la poêle. Si on y

parvient, on gagne la poêle. Quand le dé tombe sur la face « poule »,

c’est le joueur qui décide de la couleur des cartes « poules » qu’il va

devoir retourner. On joue jusqu’à ce que toutes les poêles aient été

gagnées.

Un jeu de mémoire très drôle !

6- Sardines (jeu édité par Djeco)

Jeu de mémoire joli et original : chacun reçoit 5 cartes « sardine »

et les pose sur la table sans les regarder. On découvre ensuite une

carte « boîte à sardines ». Les joueurs doivent observer et mémoriser

les dessins des 8 sardines figurées sur cette carte. Puis on retourne la

carte et les joueurs regardent alors leurs 5 cartes et posent devant eux

les sardines qu’ils pensent avoir vues dans la boîte. Après vérification,

les bonnes cartes sont gagnées. On complète les jeux des joueurs avec

la pioche puis on retourne une nouvelle carte « boîtes à sardines ».

Les costumes des sardines sont géniaux et contribuent au succès

de ce jeu ! Avec les plus jeunes, on peut commencer par un jeu de

discrimination visuelle, en regardant toutes les cartes en même temps.

On trouve tous ces jeux en vente sur divers sites Internet.


IDÉE

27

QU’EST-CE QUE LA CLASSIFICATION ?

La classification est l’action par laquelle on regroupe des objets ou

des idées selon une propriété commune : tous les rouges, tous les non

rouges (classes complémentaires)… ; tous les objets en plastique, tous

ceux en bois (classes juxtaposées)… On fait une classification chaque

fois que l’on regroupe ensemble ce qui va ensemble : ranger son linge

dans l’armoire, des dossiers dans des classeurs, des classeurs dans les

tiroirs d’un bureau. Le dictionnaire classe des mots selon l’ordre

alphabétique des lettres permettant de les écrire. En grammaire, on

classe sans cesse par « nature », par « fonction ». Pour faire un exposé,

on classe ses idées par paragraphes.

Les objets groupés dans une classe sont liés par une relation

d’équivalence qui a trois propriétés : réflexivité , symétrie et

transitivité. Par exemple :

réflexivité : A a la même forme que A (lui-même).

symétrie : si A a la même forme que B, alors B a la même forme

que A.

transitivité : si A a la même forme que B, et B a la même forme

que C, alors A a la même forme que C.

C’est l’homme qui classe par nécessité, pas la nature, mais cette

activité a des limites (la classification taxinomique de nombreuses

espèces animales a longtemps hésité).

Les objets peuvent avoir plusieurs propriétés à la fois : les grands

ronds rouges, les grands ronds bleus, les grands carrés rouges, … Les

« grands ronds rouges » sont à l’intersection de la classe de « tous les

ronds », de celle de « tous les grands » et de celle de « tous les

rouges ». On coordonne ainsi quotidiennement des quantités d’objets.

En géométrie, un point peut posséder simultanément plusieurs

propriétés : dans le triangle isocèle ABC, on sait que le sommet A


appartient à la fois à l’ensemble des points de la médiatrice du

segment BC, aux points du cercle de centre B de rayon BA et à ceux

du cercle de centre C et de rayon CA. A est l’intersection de plusieurs

ensembles de points.

L’acquisition du nombre nécessite la capacité à classifier : le

nombre 3 est le nom de toutes les classes dont le nombre de

composants est 3. On travaille donc beaucoup les classifications à

l’école maternelle.

Les échecs sont souvent repérés au primaire ou plus tard en centre

d’apprentissage, parce qu’un jeune a des difficultés avec la négation

ou avec les tableaux à double entrée, formalisation habituelle des

situations alliant 2 propriétés.

Ces enfants échouent aux tests de ce genre :

On montre un stylo feutre rouge et on dit à l’enfant « Tu dois

répondre Vrai ou Faux aux affirmations suivantes » :

« C’est un feutre rouge » (réponse attendue : Vrai)

« Ce n’est pas un feutre rouge » (réponse attendue : Faux)

« C’est un éléphant rose » (réponse attendue : Faux)

« Ce n’est pas un éléphant rose » (réponse attendue : Vrai).

Cette double négation est très difficile, même pour un adulte, qui

en rencontre des exemples dans sa déclaration de revenus ou dans

l’épreuve de code au permis de conduire.


IDÉE

28

QU'EST-CE QUE L'INCLUSION DE CLASSES ?

Deux classes peuvent être incluses l’une dans l’autre : l’ensemble

des chats est inclus dans celui des animaux (inclusion simple). On a à

répondre à ce genre de questions : un chat est-il toujours un animal ?

Un animal est-il toujours un chat ? Un chat a toutes les propriétés d’un

animal mais la réciproque n’est pas vraie.

Ce procédé est très utile et influence toute notre culture : dans la

classe des aliments riches en protéines, on regroupe la viande, le

poisson, le soja ; dans les viandes, on distingue les viandes blanches et

les viandes rouges ; dans les viandes blanches, on met la volaille et le

veau ; dans la volaille, on met la dinde, la poule, etc. (inclusion

hiérarchique).

Avoir la structure d’inclusion de classes, c’est avoir la certitude que

la partie ne saurait contenir plus d’éléments que le tout, ce qui est très

difficile, mais essentiel à une pensée adulte. On dessine 5 Clios

et 3 Twingos, et si on demande : « De quoi y a-t-il a le plus ? Des Clios

ou des voitures ? », ceux qui échouent répondent toujours : « Les

Clios, parce qu’il y en a 5 ».

Les 4 opérations reposent sur la notion d’inclusion : le tout dont on

retire l’une ou plusieurs de ses parties (soustraction) ou les parties qui

se réunissent entre elles (addition, multiplication). Souvent, les enfants

n’en sont pas encore à ce stade quand ils abordent ces problèmes.

Au niveau du collège aussi bien qu’à celui de l’adulte, il faut être

capable d’inclusion pour faire les raisonnements suivants : tous les

multiples de 9 sont multiples de 3 ; mais tous les multiples de 3 ne

sont pas forcément des multiples de 9. Tous les carrés sont des

rectangles, mais est-ce que tous les rectangles sont des carrés ?...

Un travail long et progressif est à faire : les rééducateurs sont

formés à cela si des difficultés subsistent.


IDÉE

29

EXERCER LES CLASSIFICATIONS

Dans la vie courante, il est intéressant de faire observer les

ressemblances, les différences et trouver le bon critère de classement :

« Qu’est-ce qui est pareil ? Pas pareil ? Pourrait-on classer

autrement ? »

Au jeu des 7 familles, on peut dire : « Dans la famille des clowns,

as-tu le père, la mère, …? ». Mais à la partie suivante, on change :

« Dans la famille des pères, as-tu le pompier, le clown, …? » Cela aide

au changement de catégorie et à la mobilité de pensée. Si l’enfant dit :

« J’ai gagné, j’ai 6 cartes (au lieu de 7) », vous ne direz rien, pour qu’il

trouve lui-même l’erreur (il est difficile de passer de 7 familles de 6 à 6

familles de 7). Vous attendrez que par la suite la carte oubliée arrive :

l’enfant rectifiera seul. « Que fait-on de celle-là ? » Et il verra qu’elle

manque à une famille.

En jouant au portrait, si l’enfant demande d’abord : « Est-ce que

c’est un homme ? » puis « Est-ce que c’est un être humain ? », ne dites

pas : « Tu es bête, tu sais déjà que c’est un homme, donc c’est

forcément… » Laissez-le construire peu à peu l’inclusion et découvrir

les questions inutiles. Un bon moyen est de déclarer gagnant celui qui

a posé le moins de questions.

La bataille navale (damier avec lettres et chiffres), révèle les

difficultés à se repérer sur un tableau à double entrée : la pensée doit

être capable de combiner deux perceptions simultanées, avoir l’idée

de poser le crayon sur la ligne H, passer à l’idée de le poser sur la

ligne 3, repartir vers l’idée de H, tâtonner pour s’approcher de H3,

idée de départ à laquelle on repense. On fait des allers-retours

entre 2 ou 3 idées. Deux règles fines sur la ligne et la colonne aident à

voir le croisement.

Bien des jeux différents permettent d’exercer les classifications :

dominos, Mémory, Pouilleux, Pippo ™, Jungle Speed ™, Qui est-ce ?


™, Oudordodo ™…
IDÉE

30

QU'EST-CE QUE LA CORRESPONDANCE TERME À


TERME ?

Mettre la table c’est « mettre en correspondance » une personne–

une assiette ; distribuer des bonbons, c’est « mettre en

correspondance » un enfant–un bonbon.

Cette technique de correspondance « terme à terme », c’est-à-dire

« un à un », permet de comparer des collections ; cette comparaison

peut s’effectuer directement par perception visuelle, par manipulation

des objets ou en utilisant une représentation.

20 000 ans avant notre ère, les hommes utilisaient déjà ce principe

pour représenter les quantités : ils faisaient des entailles sur des os,
1
entassaient un à un des cailloux , nouaient des cordelettes.

Chaque matin, le berger faisait sortir les animaux de son troupeau

un à un de la grotte. À chaque passage, il faisait une entaille, un nœud

ou entassait un caillou

Les entailles, les nœuds ou les cailloux servaient de collections-

témoins de la quantité à mémoriser. Le soir, il suffisait au berger de

passer le doigt sur une entaille au passage de chaque animal ou de

retirer un caillou du tas réalisé le matin pour savoir si le troupeau était

bien au complet.
Les doigts peuvent servir de collections-témoins particulièrement

efficaces pour représenter les quantités à l’école maternelle.

1- C’est l’origine de notre mot calcul : en latin classique, calculus veut dire caillou.
IDÉE

31

LES MOTS DE LA CORRESPONDANCE TERME À


TERME

Certains élèves peuvent rencontrer des difficultés dans les activités

de comparaison, avec la compréhension d’expressions comme

« autant que » « plus que », « moins que »…

On peut dans ce cas s’appuyer sur la correspondance terme à

terme.

Pour utiliser le vocabulaire en situation et donner du sens à ces

mots difficiles, il est important de commencer par faire apparier des

objets complémentaires par leur nature même (réels ou représentés) et

de verbaliser autour de la situation.

Les activités proposées reposent sur une perception visuelle directe

des objets à apparier (possible jusqu’à 4 à 5 objets).

Placer devant l’enfant 4 feutres et 4 bouchons, réels ou représentés

par un dessin.

Demander à l’enfant s’il y a autant de feutres que de bouchons ;

pour expliciter le terme « autant », reformuler la question : « Est-ce

chaque feutre a son bouchon ? » « Est-ce qu’on pourra refermer tous

les feutres ? Est-ce qu’il y a autant de bouchons que de feutres ? »


Faire vérifier les réponses par la manipulation.

Puis faire fermer les yeux ; ajouter un feutre (ou un bouchon). Faire

ouvrir les yeux ; demander à l’enfant si maintenant il y a toujours

autant de feutres que de bouchons.

Renouveler l’activité avec d’autres objets « complémentaires »,

réels ou représentés (œufs et coquetiers ; têtes et chapeaux ; maisons

et nounours…).

Comme pour les feutres, verbaliser les situations : « Est-ce qu’on

pourra mettre un œuf dans chaque coquetier ? Est-ce que tous les

œufs ont un coquetier ? Est-ce qu’il y a autant d’œufs que de

coquetiers ? Est-ce qu’il y en a pareil ? »….

Faire vérifier les réponses par la manipulation puis ajouter ou

retirer un objet et recommencer.

Renouveler l’activité avec des objets moins « réalistes », comme

des jetons jaunes et des jetons rouges, des carrés bleus et des triangles

verts.
IDÉE

32

EXERCER LA CORRESPONDANCE TERME À TERME

Cette fois, les élèves sont actifs.

Placer des assiettes sur une table (entre 6 et 12).

Demander à l’élève de mettre un verre devant chaque assiette,

puis de mettre une cuillère à côté de chaque assiette.

Puis, lui demander s’il y a autant de verres que d’assiettes, autant

de cuillères que de verres.

Lui faire fermer les yeux. Ajouter une assiette (ou un verre), ou ne

rien changer pour éviter les automatismes.

Faire ouvrir les yeux. Demander à l’enfant si maintenant il y a

toujours autant de verres que d’assiettes

Renouveler l’activité avec d’autres objets « complémentaires »

réels ou représentés :

Par exemple, des tasses et des soucoupes, les tasses sont étalées

sur la table alors que les soucoupes sont posées les unes sur les

autres ; demander à l’enfant de poser une soucoupe sous chaque

tasse, reprendre les questions précédentes.

De même, placer des verres les uns dans les autres et des pailles

étalées sur la table.

Demander à l’enfant de placer une paille dans chaque verre puis

reprendre les questions précédentes.

Renouveler les activités précédentes avec des objets représentés.

Placer des jetons jaunes (entre 6 et 12) en vrac, non alignés.

Prévoir également un tas de jetons bleus.

Demander à l’élève de placer autant de jetons bleus que de jetons

jaunes.
Puis lui demander de placer plus (ou moins) de jetons bleus que

de jetons jaunes.

Lever des doigts (entre 6 et 10). Prévoir un tas de jetons.

Demander à l’enfant de poser autant de jetons qu’il y a de doigts

levés.

Aligner des jetons (de 4 à 10) devant l’enfant.

Demander lui de lever autant de doigts qu’il y a de jetons alignés.

Montrer un quadrillage d’une dizaine de cases dont certaines sont

coloriées. Prévoir un stock de jetons. Demander à l’enfant de

poser autant de jetons qu’il y a de cases colorées sur le

quadrillage.
IDÉE

33

QU’EST-CE QUE LA CONSERVATION DES


QUANTITÉS DISCONTINUES ?

1
Rappelons rapidement l’épreuve conçue par Piaget et Szeminska :

l’expérimentateur présente à l’enfant deux rangées de jetons (des

quantités discontinues) en nombre égal se correspondant par paires ;

l’enfant conclut qu’elles sont « égales ». Puis, devant lui,

l’expérimentateur écarte les jetons de la deuxième série en étirant la

longueur de celle-ci. Jusqu’à l’âge de cinq-six ans en moyenne, un

enfant répond que les deux collections sont différentes : pour lui « Il y

en a le plus là où c’est le plus long ».

Cette réponse se fonde sur les apparences, c’est une confusion

perceptive. À ce stade, l’enfant ne conçoit pas encore le nombre

indépendamment de la qualité des objets et de la place qu’ils

occupent dans l’espace. Il lui est encore difficile de concevoir qu’au

travers des multiples aspects que peut prendre une collection d’objets,

la quantité reste constante.

Les fondements des notions de nombre et des opérations reposent

sur un concept essentiel : celui de conservation des quantités

discontinues, indépendamment de la nature des objets et de leur

disposition dans l’espace.

Lorsque l’enfant accède à l’idée de conservation des quantités


2
discontinues , il devient capable de répondre directement : « On n’a

rien ajouté, rien enlevé, c’est donc pareil ».

Pour Piaget, avant la mise en place de certaines structures

logiques, avant l’accès à la conservation des quantités discontinues, il

ne peut pas y avoir de réelle conception du nombre.


Qu’est-ce qu’un nombre ?

Le concept de base est celui de nombre entier naturel : 0 ; 1 ;

2 ; 3… Les collections d’objets qu’on peut mettre en

« correspondance terme à terme » ont quelque chose en

commun : elles possèdent toutes le même nombre d’objets. C’est

l’aspect cardinal du nombre : il permet d’indiquer une quantité. Il

est indépendant de la nature des objets et de leur disposition

spatiale, et repose sur le principe de conservation.

Aujourd’hui, les pédagogues s’accordent néanmoins pour dire

qu’il ne faut pas attendre que ce principe soit assuré pour faire utiliser

les nombres par les élèves, qu’il existe un décalage entre savoir

répondre à la question « Combien y a-t-il de…? » (quotité), et savoir

répondre à la question « Où y en a-t-il plus ? » (quantité),

l’acquisition du comptage précédant celui de la conservation.


Pour certains didacticiens, il s’avère même que pratiquer le

comptage, le dénombrement, favoriserait la construction par l’élève

du principe de conservation.

Une réelle notion logique et mathématique du nombre échappe à

l’enfant de 6-7 ans comme à l’enfant plus grand et à beaucoup

d’adultes non mathématiciens. Nombreux sont ceux qui savent

que 1 + 1 = 2 et l’utilisent sans jamais se pencher sur le fondement

théorique de cette égalité. Alors, n’attendons pas que l’enfant sache

« ce qu’est un nombre », aidons le à découvrir tout ce « qu’il peut

faire » avec les nombres.

1- Jean Piaget, Alina Szeminska, La genèse du nombre chez l’enfant. Delachaux et

Niestlé, 1941 (7e éd., 1997).

2- Collections d’objets dénombrables, comme des jetons, des marrons, des moutons…
IDÉE

34

AIDER À L’ACCÈS À LA CONSERVATION DES


QUANTITÉS

Pour aider l’enfant à parcourir le chemin vers le nombre, il faut lui

offrir l’occasion d’utiliser ce paramètre dans des situations très diverses

où les objets sont affectivement, visuellement, spatialement très

différents ; ainsi il se libèrera petit à petit du simple aspect perceptif

des quantités.

Le principe de conservation s’acquiert plus rapidement sur les

petites quantités ; aussi conviendra-t-il de commencer par l’exercer

dans ce contexte. Des jeux variés peuvent le permettre ; en voici

quelques-uns, accessibles dès l’école maternelle.

1- Le jeu des paires

Confectionner un jeu de cartes des petites quantités (un jeu avec

des collections de 1 à 3 constellations ; un autre ensuite de 1 à 5).

2- Le jeu de Mémory

Avec le même matériel.

Poser huit cartes (quatre paires) face constellations cachée.


Chaque joueur à son tour retourne deux cartes. Si elles ont le

même nombre de points c’est gagné, sinon on les retourne et on passe

au suivant. Celui qui a récupéré le plus grand nombre de cartes a

gagné.

3- Le jeu de loto individuel

Matériel : une grille 3 sur 3. Dans les 9 cases, sont inscrites trois

façons différentes de représenter des quantités de 1 à 3 points de façon

désordonnée.

Une grille de 3 x 3. Dans les 9 cases sont dessinées des

constellations différentes de 1 à 3 points, dont une de 2 points et une

de 3 points identiques à celles qu’on trouve sur les dés. + Des cartes

de même format que les cases sur lesquelles sont représentées les

constellations de 1 à 3 points (donc 9 cartes différentes).

Il s’agit de placer les 9 cartes sur la grille.

Le meneur de jeu montre une carte. Une carte peut se placer sur

toute case comportant le même nombre de points.

4- Le jeu de la carte indice

Utiliser des cartes sur lesquelles on a dessiné 1 à 5 points disposés

de trois façons différentes, et des jetons.

Montrer rapidement une carte « indice », et faire choisir à l’enfant

une autre carte ayant autant de points. Utiliser le mot « pareil » si le

terme « autant » n’est pas compris (puis : plus ou moins).


Montrer rapidement une carte « indice », et faire constituer par

l’enfant une collection de jetons ayant autant (ou : pareil) de jetons

qu’il y a de points sur la carte (puis : plus ou moins).

Montrer rapidement une carte « indice », et demander à l’enfant

de montrer autant (ou : pareil) de doigts qu’il y a de points sur la carte

(puis plus ou moins).

Remarque : faire varier les positions des doigts à chaque fois ;

demander d’utiliser des doigts sur chaque main.

5- Le jeu des gourmands

Chaque enfant prend dans ses mains le plus possible de bonbons,

puis on essaie de deviner qui en a le plus. Ensuite, chacun aligne ses

bonbons ; le gagnant est-celui qui a aligné le plus de bonbons. Pour

faciliter la comparaison, les élèves peuvent être disposés face à face.

Il peut y avoir des ex-aequo.

6- Renverse les bouchons !

Une vingtaine de bouchons maximum. 3 à 4 joueurs et un maître

du jeu.

On compte les bouchons à haute voix (une dizaine pour

commencer), puis on les place dans une boîte sans couvercle ; le

maître du jeu annonce plusieurs fois le nombre de bouchons et l’écrit ;

puis la boîte passe de main en main jusqu’au signal du maître du jeu

(coup de tambourin par exemple). À ce moment-là, le joueur doit

renverser le contenu de la boîte dans une autre boîte qui était vide ; le

joueur suivant doit annoncer le nombre de bouchons dans cette

nouvelle boîte, puis vérifier en comptant tout haut.

Recommencer plusieurs fois : cela permet de montrer que le

nombre de bouchons est toujours le même, quelle que soit

l’apparence ou la disposition des bouchons.

Diminuer ou augmenter le nombre de bouchons en fonction des

résultats.
IDÉE

35

QU’EST-CE QUE LA SÉRIATION ?

La sériation est l’opération qui consiste à ranger des objets selon

un critère continu : un ordre croissant ou décroissant, « de plus en

plus grand », « de plus en plus noir ». On effectue une sériation en

emboîtant des casseroles (dans, autour), en rangeant des mèches de

perceuse (grand, petit), en établissant une liste chronologique

d’événements (avant, après), en plaçant sur un axe des nombres

décimaux ou relatifs (inférieur, supérieur).

Le dictionnaire combine plusieurs sériations successives : une fois

trouvée la place dans l’alphabet de la première lettre du mot, on doit

e e
être attentif à la place de la 2 lettre, puis celle de la 3 . Un exposé

bien construit est un exposé avec des idées sériées, et non pas

exprimées dans n’importe quel ordre.

Tout élément d’une série n’existe que par sa place par rapport à

l’élément qui le précède et celui qui le suit. La sériation est donc une

opération mentale qui oblige à porter un double regard sur chaque

élément de la série. Il faut savoir comparer :

couple par couple : « Max a plus d’eau que Rémi, et Rémi a

moins d’eau que Max ».

un élément à tous : « Max a plus d’eau que Rémi, que Paul, et

moins que Léo. »

tous les éléments à l’un : « Léo a plus que Max ; Paul, Léo et

Rémi ont moins que Max. »

C’est par une relation d’ordre qu’on peut réaliser une sériation,

ayant les propriétés

d’antisymétrie : « Si A est plus lourd que B, alors B ne peut pas

être plus lourd que A. »


et de transitivité : « Si Paul est plus âgé que Marc, et Marc plus

âgé que Léo, alors Paul est plus âgé que Léo. »

Le nombre a deux aspects principaux : le cardinal et l’ordinal.

La sériation est une activité indispensable à la construction de

l’aspect ordinal du nombre : il faut savoir que la case repérée par le

e
« 7 » est aussi la 7 d’une série.
IDÉE

36

COMMENT STIMULER LA SÉRIATION ?

Beaucoup d’activités sont possibles pour suggérer l’idée d’ordre.

Comparer des longueurs, des tailles, des contenances. Par

exemple, dans une série de bottes de taille croissante, trouver

celle qui est à sa pointure, trouver la plus petite de toutes...

Ranger par grosseur, à l’aveugle, des billes placées dans un sac.

Comparer des masses : soupeser avec les mains ou peser sur une

balance à deux plateaux. La comparaison se fonde d’abord sur la

perception (on voit quelle masse est la plus lourde, quel plateau

est plus bas) ; ensuite, grâce à des leurres (un gros ours en

peluche légère, un petit cheval de plomb…), l’enfant dissocie de

mieux en mieux ce qu’il croit de ce qu’il constate (l’objet le plus

petit est pourtant le plus lourd).

Partant de deux quantités inégales ou égales, ajouter ou retirer

d’un côté ou de l’autre des quantités égales ou inégales (tous les

cas de figure sont intéressants). Faire chercher comment égaliser

des quantités inégales.

Faire une double série : avec le calendrier de l’Avent ou tout autre

échéancier permettant d’attendre un événement. Chaque jour on

ouvre une porte du calendrier, ou on retire un papier du tas (si

possible à la même heure, pour faire sentir la durée d’un jour).

On fera deviner le nombre de jours passés, de jours restants (en les

comptant, ou d’après le nombre qui précède, ou par soustraction du

total) et le nombre total de jours. On notera en colonnes. On guidera

l’enfant pour qu’il remarque la double série obtenue face à face : dans

une colonne l’incrémentation (les nombres croissent), dans l’autre la

décrémentation (ils diminuent). La dernière colonne montrera la

conservation du total (24 + 0 = 24 ; 23 + 1 = 24 ;...).


IDÉE

37

ÉQUIVALENCE NUMÉRIQUE

C’est la capacité de nommer une même quantité de plusieurs

façons différentes : une main, c’est aussi 5 doigts ; une boîte,

c’est 6 œufs ; une centaine, c’est dix dizaines ou cent unités ; 1 an,

c’est 365 jours, 12 mois, 52 semaines, 4 saisons ou…

Soit : un nombre - une entité = un autre nombre - une autre entité.

L’objet est considéré selon plusieurs points de vue à relier. Cette

capacité intervient, entre autres, dans la numération, les conversions

de toutes sortes, et repose sur des raisonnements complexes qui

s’acquièrent peu à peu.

Si on prend une centaine d’allumettes en main, on écrit avec

l’enfant :

100 unités 10 dizaines 1 centaine

Si on lui demande ensuite : « Qu’est-ce qui est le plus ? », il dit

toujours : « C’est 100 », au lieu de « C’est pareil ». L’aspect prégnant

du nombre écrit va le leurrer et sa conservation du nombre sera

troublée. De plus, l’entité et l’étalon sont inversement proportionnels :

si on parle d’une chose grosse (la centaine), alors il y en a une ; mais

si je parle d’une chose petite, alors il y en a beaucoup.

Pour exercer ce regard multiple et mobile, on pose diverses

énigmes, à propos des nombres ou des étalons : « Combien y a-t-il de

centaines ? J’en vois 100, il s’agit de quoi ? Tu as 9 euros. C’est

combien de pièces ? Combien d’euros pour une pièce ? Combien

d’euros en tout ? »

Ici, le langage oral et écrit est difficile : il y a le singulier collectif

(la foule, la famille, un tas…), ou bien deux mots liés par un nombre

(5 doigts ou 1 main ; 5 pièces de 1 € ou 1 billet de 5 €). Aussi les

noms-nombres en rapport avec le nombre : une douzaine, un triangle.

On a enfin les mots opérations : déc-i-mètre veut dire « mètre coupé

en 10 ».
IDÉE

38

QU’EST-CE QUE LE COMPTAGE ?

Les nombres ont deux écritures : une écriture « numérale » avec

des mots (« deux »), et une écriture « numérique » avec des chiffres

(« 2 »). Le terme de « comptine numérique », ou plus simplement

« comptine », renvoie à la suite de mots énoncés oralement pour

compter : « un, deux, trois, quatre… » Le comptage, c’est l’utilisation

de la comptine. Cette activité traverse plusieurs étapes.

Au début, les jeunes enfants (pour certains dès deux ans) récitent

la comptine comme une enfilade de sons (« undeuxtrois ») : c’est le

stade de la comptine « chapelet ».

Puis (à partir de trois ans), ils prennent conscience que cette suite

de sons est composée de plusieurs mots différents, mais ils ne peuvent

commencer un comptage que s’ils partent et repartent toujours de

« un » : « un », « deux », « trois », « quatre », « cinq », « six »… : c’est

le stade de la « chaîne insécable ».

Ce n’est que plus tard (vers cinq-six ans) qu’ils pourront traiter la

suite numérique, quel que soit le mot de départ (« cinq », « huit »…),

et pourront alors nommer le successeur d’un nombre donné. De plus,

ils sont capables d’énoncer la comptine dans les deux directions

« cinq-six-sept… » ; « sept-six –cinq… » ; ils peuvent alors à ce stade

engager un compte à rebours. C’est le stade de la « chaîne sécable ».

Le programme de l’école maternelle comporte la connaissance de

la comptine au moins jusqu’à trente. Il est important de proposer des

activités de courte durée mais régulières, mettant en œuvre le

comptage oral. En effet, la maîtrise de la comptine numérique est

indispensable à la mise en œuvre des procédures de dénombrement

(voir l’Idée 40).


IDÉE

39

COMMENT EXERCER LE COMPTAGE ?

1- Apprendre « mécaniquement » une suite ordonnée de


mots, tous différents

répéter la partie « mécanique » de la comptine de « un » jusqu’à

« dix » puis jusqu’à « seize » (tous les mots sont différents) ; taper

dans les mains en même temps permet de rythmer le comptage et

de concrétiser la séparation des mots ;

faire correspondre les mots énoncés et les écritures numériques :

on suit sur la bande numérique : « 1 - 2 - 3 - 4 - 5… », et on

énonce la comptine : « un - deux - trois - quatre - cinq… » ;

colorier sur la bande numérique le dernier mot/nombre énoncé

sans erreur : le rang de la case coloriée permettra à l’enfant de

visualiser ses progrès ;

réciter des comptines, telle : « Un petit cochon… combien en

voulez-vous ? » ;

lire des livres à compter : un livre à compter est un livre qui

amène les enfants à compter, à dénombrer des personnages, des

objets, des animaux… comme Dix petits amis déménagent ou La

chevrette qui savait compter jusqu’à 10, et beaucoup d’autres…

trouver l’erreur : une marionnette compte, et parfois elle se

trompe, soit dans l’ordre, soit dans les mots, en récitant la

comptine ; l’enfant doit signaler les erreurs de la marionnette.

enregistrer le comptage oral de l’enfant ; en écoutant

l’enregistrement, il pourra relever ses erreurs et les corriger ; puis

recommencer l’enregistrement.

2- Jouer à « Qu’est-ce qui vient après…? »

S’assurer que l’enfant sait la suite jusqu’à un certain point sans

difficulté :
le questionner : « Qu’est-ce qui vient après six ? après trois ?... » ;

le jeu de dominos avec le nombre qui suit : au lieu de placer les

dominos en faisant coïncider les mêmes nombres, il s’agit ici de

faire coïncider un nombre et son successeur. Par exemple, faire

coïncider la constellation 4 avec la constellation 5.

3- Jouer à « Qu’est-ce qui vient avant…? »

S’assurer que l’enfant sait la suite jusqu’à un certain point sans

difficulté :

le questionner : « Qu’est-ce qui vient avant six ? avant trois ?... » ;

le jeu de dominos avec le nombre qui précède : au lieu de placer

les dominos en faisant coïncider les mêmes nombres, il s’agit ici

de faire coïncider un nombre et son prédécesseur. Par exemple,

faire coïncider la constellation 4 avec la constellation 3.

4- Le jeu de la fusée

« Attention la fusée va décoller : … huit, sept… un, partez ! »

La meilleure façon de travailler le comptage et la mémorisation

des mots/nombres va être de donner du sens ces opérations à travers

des activités où elles vont servir, tant il est vrai que la mémoire se

mobilise plus efficacement dans ce cas ; cela est essentiellement

favorisé et entraîné par les activités de dénombrement.


IDÉE

40
QU’EST-CE QUE DÉNOMBRER ?

Avant d’accéder au concept de nombre, l’enfant va acquérir des

habiletés de comptage oral puis de dénombrement. L’acquisition du

dénombrement est à la base de tout le développement mathématique

ultérieur, d’où l’importance de savoir où en est l’enfant dans cet

apprentissage afin de pouvoir détecter d’éventuelles difficultés qui

peuvent apparaître et d’y remédier au mieux.

La connaissance des mots-nombres récités lors de l’activité de

comptage ne suffit pas à savoir répondre à la question :

« Combien…? » ; en effet, les noms des nombres, par eux-mêmes,

n’évoquent pas leur cardinalité : ils ne renvoient pas d’emblée à une

quantité. Il n’est pas évident, lorsqu’on égrène la comptine « un, deux,

trois, quatre » tout en pointant des jetons un à un que le dernier terme

énoncé « quatre » désigne le dernier jeton pointé et renvoie à la

quantité totale de jetons. Cette compréhension relève de l’acquisition

du principe de cardinalité : le cardinal d’une collection d’objets est

le nombre d’éléments que contient cette collection.

Le dénombrement nécessite des compétences multiples dont

l’apprentissage n’est ni linéaire, ni automatique. Il met en œuvre cinq


1
principes décrits par Gelman et Gallistel en 1978 .

Les cinq principes du dénombrement

principe d’ordre stable : les mots/nombres sont toujours récités


dans le même ordre ;

principe de correspondance terme à terme : à chaque objet


pointé correspond un mot/nombre et un seul ;

principe de cardinalité (déjà défini ci-dessus) ;


principe d’abstraction : le cardinal de la collection est

indépendant de la nature des objets dénombrés.


principe de non-pertinence de l’ordre : l’ordre dans lequel on
dénombre les objets ne change pas leur cardinal.

Ces cinq principes ne s’acquièrent pas simultanément, et leur

coordination est affectée par différents facteurs (voir Idée 41).

Certains jeunes enfants savent réciter la comptine mais, devant

une collection de jetons (6 par exemple), à la question : « Combien y

a-t-il de jetons ? », ils répondent : « un, deux, trois, quatre, cinq, six »

et ne concluent pas : « Il y en a six ». Pour eux, le dernier mot énoncé,

le mot « six », ne correspond pas au nombre total de jetons : ils ne

disposent pas encore du principe de cardinalité.

Pour travailler ce principe on peut faire déposer les six jetons (par

exemple) dans une boîte avec un couvercle disposant d’une fente ;

lorsque l’enfant arrivera à « six », il pourra retirer le couvercle et il

aura alors une vue globale des six jetons ; faire verbaliser : « Il y a six

jetons dans la boîte ».

1- R. Gelman & C.R. Gallistel, The Child’s Understanding of Number. Cambridge, MA :

Harvard University Press, 1978.


IDÉE

41

ERREURS CLASSIQUES DE DÉNOMBREMENT

Beaucoup de difficultés, beaucoup de « blocages » vont apparaître

suite à une mauvaise installation du comptage et du dénombrement. Il

est donc très important d’aider l’enfant à surmonter ces difficultés.


1
À ce sujet, notons d’ailleurs que dans le bilan établi par l’INSERM

on peut lire : « Bien avant le début des apprentissages systématiques,

les enfants dyscaculiques développent une mauvaise compréhension

des principes qui régissent les activités de dénombrement, lesquelles

constituent le socle sur lequel se construiront toutes les habiletés

arithmétiques ultérieures. »

Avant de systématiser les activités de dénombrement, il importe

d’exercer à la comparaison des petites quantités (de 1 à 3)

directement, à l’œil, en utilisant la correspondance terme à terme et

en favorisant l’utilisation de collections témoins comme les doigts de


2
la main.

On repère classiquement trois types d’erreurs dans l’opération de

dénombrement par l’enfant :

les erreurs de « suite » : l’enfant ne connaît pas assez bien les


mots/nombres et se trompe en récitant la comptine ; dans ce cas,

aidez-le à la maîtriser (voir l’Idée 39), mais ne le privez pas

d’activités de dénombrement.

les erreurs de coordination : l’enfant n’articule pas

correctement la récitation de la comptine avec le pointage des

objets. Il arrive en effet qu’en pointant un objet, un enfant énonce

deux mots différents, ou à l’inverse, montre un objet en lui

attribuant plusieurs étiquettes. Les erreurs sont nombreuses au

démarrage ou à l’arrêt du comptage.


En prenant une collection de cubes, vous pouvez faire déplacer les

cubes par l’enfant et énoncer vous-mêmes les mots/nombres, puis lui

poser la question « Combien ? » Ensuite, vous inverserez les rôles :

l’enfant devra dire les mots/nombres pendant que vous déplacerez les

cubes, puis il devra répondre à la question « Combien ? ».

Encouragez-le à compter lentement et avec attention ; dans un

premier temps, limitez le nombre d’objets.

les erreurs de repérage : l’enfant ne sait plus différencier les


objets déjà comptés de ceux qui restent.

Dans un premier temps, faites dénombrer des collections d’objets

manipulables : alignez les objets et aidez l’enfant à éloigner les objets

qui restent à compter suffisamment loin des autres, ou faites placer les

objets dans une boîte au fur et à mesure du comptage.

Si vous lui faites dénombrer des collections fixes, faites-lui

surligner ou cocher au fur et à mesure les objets déjà comptés.

1- INSERM, Dyslexie, Dysorthographie, Dyscalculie. Bilan des données scientifiques,

page 660. Voir bibliographie en fin de volume.

2- Voir à ce sujet Rémi Brissiaud, Premiers pas vers les maths, Retz, 2007.
IDÉE

42

QU'EST-CE QUE LA « PRODUCTION » ?

Il s’agit ici de travailler la cardinalité et la mémoire de la quantité.

Dénombrer, c’est répondre à la question « Combien ? » :

« Combien y a-t-il de jetons posés sur cette table ? Combien y a-t-il

d’oiseaux dans cet arbre ?... »

Produire une collection dont le nombre d’objets est fixé à

l’avance, c’est prélever le nombre d’objets attendu dans une

collection : par exemple, prélever 12 jetons dans un ensemble d’une

cinquantaine de jetons. Cette tâche demande d’établir une stricte

correspondance entre les objets et les mots/ nombres, ainsi que la

capacité à distinguer précisément les objets « déjà comptés » de ceux

« non comptés ». Mais, de plus, elle met en jeu la mémorisation du

nombre fixé. Cette activité de production est donc plus difficile à

mettre en œuvre que celle du dénombrement.

Elle permet d’autre part une véritable évaluation de la construction

du principe cardinal.

En effet, certains enfants, à force de répétition et d’imitation,

finissent par répondre correctement (mais automatiquement) à la

question « Combien..? », mais ils n’arrivent pas à construire une

collection dont le nombre d’éléments est donné. Fréquemment,

l’enfant fait des erreurs de « persévération », c’est-à-dire qu’il continue

à compter alors qu’il a dépassé le nombre requis. De nombreuses

difficultés peuvent apparaître en cours d’activité. Il est donc important

de lui proposer des aides pour surmonter ces difficultés (Voir

l’Idée 43).
IDÉE

43

COMMENT EXERCER LA « PRODUCTION »


D’OBJETS

Si l’enfant a bien compris la tâche mais a des difficultés pour se

souvenir du nombre fixé, demandez-lui de répéter ce nombre

plusieurs fois avant de commencer le comptage, et diminuez la

taille de la collection : ainsi, le comptage durera moins

longtemps.

Si l’enfant se souvient du nombre fixé mais se trompe dans son

comptage, revenez aux aides proposées pour le dénombrement

(Voir Idée précédente). Demandez-lui de mettre les objets à

compter dans une boîte, pour les séparer des objets non comptés.

Aidez-le à se concentrer sur le nombre fixé en effectuant à sa

place une partie de la tâche. Par exemple, énumérez vous-même

les mots/nombres pendant qu’il met les objets un à un dans la

boîte ; ou mettez vous-même les objets dans la boîte pendant

qu’il récite la comptine.

Si l’enfant ne maîtrise pas le principe cardinal, travaillez sur des

petites collections.

Demandez-lui de produire des collections de doigts : lever

de 1 à 3 doigts dans un premier temps puis de 1 à 10 doigts ensuite.

Verbalisez les actions :

– « Je t’ai demandé de lever trois doigts ; vérifions : un,

deux, trois ; trois doigts » ;

– « Je t’ai demandé de lever cinq doigts ; vérifions : un,

deux, trois, quatre, cinq ; cinq doigts, c’est une

main ! » ;
– « Je t’ai demandé de lever dix doigts ; vérifions : un,

deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, dix ; dix

doigts c’est deux mains ! ».

Utilisez des cartes sur lesquelles sont représentées des petites

quantités de points ou d’objets variés. Montrez une carte, et

demandez à l’enfant de lever autant de doigts qu’il y a de points

ou d’objets sur la carte. Pour les petites collections, de 1 à 3, cela

se fait directement sans comptage, « à l’œil ».

Proposez régulièrement des jeux. Faites colorier les taches d’une

coccinelle, d’une girafe, d’une vache… en utilisant des lancers

d’un dé (à constellation de 1 à 3 ou de 1 à 6), ou en faisant tirer

au hasard des cartes sur lesquelles sont dessinées des collections

(de 1 à 3 ou de 1 à 6). Faites ensuite verbaliser : « Il y a cinq

points sur mon dé (ou cinq choses dessinées sur ma carte). Je

peux donc peindre cinq taches sur ma girafe : “un, deux , trois,

quatre, cinq”. En voilà cinq. » Le premier joueur qui a colorié

toutes les taches de son animal a gagné. Tous les jeux qui utilisent

le lancer de dés pour déterminer le nombre d’éléments à piocher

favorisent l’apprentissage du principe de cardinalité et exercent

aux différentes compétences énumérées ci-dessus.

Proposez régulièrement des problèmes de « juste ce qu’il faut » ;

par exemple, placez entre 5 et 10 bouteilles sur une table, et une

corbeille avec une vingtaine de bouchons sur une table éloignée ;

demandez à l’enfant de ramener en une seule fois « juste ce qu’il

faut » de bouchons pour que chaque bouteille en ait un, pas un

de plus, pas un de moins. Variez les quantités et le matériel

(poupées et robes, têtes et chapeaux, capuchons et stylos…) Ces

situations nécessitent une anticipation : le nombre apparaît alors

comme un outil permettant de résoudre un problème, il prend

alors tout son sens comme mémoire de la quantité.

À ce sujet voir : Apprentissages numériques et résolution de

problèmes GS ERMEL, Édition Hatier, 2005


IDÉE

44

LES CARACTÉRISTIQUES DE NOTRE SYSTÈME DE


NUMÉRATION

Le nombre « ne s’apprend pas », il se construit peu à peu. Chaque

être élabore ce concept sans s’appuyer sur sa représentation écrite. Par

contre, la numération – système qui permet la transcription des

nombres – s’apprend : c’est une convention que l’élève ne peut pas

inventer. On distingue la numération écrite et la numération orale.

NUMÉRATION ÉCRITE

L’écriture d’un nombre est un assemblage de chiffres.

Notre système de numération utilise dix symboles, de 0 à 9, pour

représenter tous les nombres ; de plus, il se base sur un système


décimal de position dont on peut dégager trois aspects essentiels :
l’aspect groupement : on regroupe par dix ;
l’aspect échanges : 10 unités, c’est une dizaine ; 10 dizaines,
c’est une centaine… ;

l’aspect algorithmique (règle logique) : la règle d’écriture se


répète à l’infini. Par exemple, pour 546 :

l’aspect groupement : 546 objets, c’est cinq paquets de 100,

plus 4 paquets de 10, plus 6 objets tout seuls.

l’aspect échange : chaque paquet de 100 s’échange contre une

centaine, chaque paquet de 10 s’échange contre une dizaine.

546 c’est donc aussi 5 centaines, 4 dizaines et 6 unités.

l’aspect algorithmique : 546 est juste après 545 et juste avant 547.

C’est 10 de plus que 536, c’est 100 de moins que 646…

Enfin, notre système est positionnel : c’est la place (la position) du

chiffre dans l’écriture du nombre qui lui donne sa valeur. Ce système

nécessite l’utilisation du zéro, qui indique l’absence de groupements à

un certain rang.
NUMÉRATION ORALE

Le système de transcription des nombres à l’aide de mots n’est pas

une simple lecture de la numération écrite, sinon huit cent quatorze

s’écrirait 8 100 14 !

Pour compter jusqu’à cent, on a besoin de 23 mots ; puis il faut

ajouter mille, millions, milliards, et même le petit mot « et », ce qui

nous amène en tout à 27 mots à mémoriser et à mettre en relation.

Mais il y existe dans notre système de nombreuses irrégularités et

incohérences qui viennent se surajouter aux difficultés

d’apprentissage. En voici quelques exemples ; on dit en effet :

- vingt et un, mais quatre-vingt-un.

- (en France) soixante-dix, et non : septante.

- quatre-vingt, et non : octante.

- quatre-vingt-dix, et non : nonante.

- cent, et non : un cent, alors qu’on dit : deux cents.

- mille et pas un mille, alors qu’on dit : deux mille.

- dix mille, alors qu’on ne dit pas : dix cents.

- un million, alors qu’on dit cent ou mille.

Sans compter qu’on dit aussi : onze cents pour 1 100, et dix-neuf

cent quatre-vingt dix-neuf pour 1 999.

Savoir écrire et nommer les nombres, c’est maîtriser les deux

systèmes séparément mais aussi savoir les mettre en relation l’un avec

l’autre (transcodage). C’est un apprentissage sur le long terme,

fondamental en particulier pour la compréhension des calculs et des

techniques opératoires.

On peut distinguer plusieurs phases dans l’apprentissage de la

numération :

dès l’école maternelle, à travers les activités de comptage, de


dénombrement, les élèves accèdent progressivement à la notion

de nombre : ils savent les désigner oralement, et souvent,

globalement, jusqu’à trente (voire au-delà), et ils commencent à

prendre conscience de certaines « règles ». En effet, lorsque

l’enfant, dans la récitation de sa comptine, marque un temps

d’arrêt à « dix-neuf », si l’on annonce « vingt », l’enfant est

capable de reprendre la suite « vingt et un », etc. jusqu’à « vingt-


neuf », montrant ainsi qu’il a pris conscience des régularités de la

numération orale.

dès le début de l’école élémentaire, les élèves vont découvrir


la logique de l’écriture chiffrée et, grâce à elle, ils vont progresser

plus vite dans l’écriture des nombres avec des chiffres que dans

l’utilisation des mots à cause des irrégularités signalées ci-dessus.

Petit à petit, ils vont apprendre à désigner n’importe quel nombre

avec des chiffres ou/et avec des mots, et ils vont devoir comprendre

que la valeur des chiffres figurant dans l’écriture des nombres dépend

de leur position.

Par exemple, dans 333 aucun 3 n’a la même valeur : l’un vaut

« 300 », l’autre vaut « 30 », et le dernier vaut « 3 » !

LES CINQ PHASES DE L’APPRENTISSAGE DE LA


NUMÉRATION

Approche globale et orale des mots/nombres (maternelle).

Prise de conscience des régularités de la numération

écrite/chiffrée (GS-CP).

Compréhension des règles de la numération décimale de

position (CP-CE1).

Lien entre la numération orale et la numération écrite avec

des chiffres (CP-CE1).


IDÉE

45

AIDER LES ÉLÈVES DANS L’APPRENTISSAGE DE LA


NUMÉRATION ORALE

Le dictionnaire des nombres

C’est un outil à construire avec les élèves, au fur et à mesure des

apprentissages. Il peut avoir une ou deux pages au début puis, petit à

petit arriver jusqu’à dix pages. Les élèves peuvent écrire eux-mêmes

dans le cahier, ou coller des étiquettes réalisées par l’adulte.

Sur la première page, on inscrit tous les nombres ayant un seul

chiffre, les uns en dessous des autres, et, à côté, leur écriture à l’aide

de mots :

Sur la deuxième page, on inscrit les nombres de 10 à 19, et ainsi

de suite jusqu’à la dixième page avec les nombres de 90 à 99.

L’élève aura recours à ce dictionnaire chaque fois qu’il en aura

besoin, lors d’activités de transcodage comme celles qui sont


proposées ci-dessous (passer de l’écriture chiffrée à l’écriture avec des

mots, et réciproquement).

Quelques jeux autour du transcodage

1- Le loto des nombres (ou dominos, ou Mémory)

Même règle que pour les jeux traditionnels mais il faut ici

rassembler les écritures chiffrées et les mots désignant les mêmes

nombres.

2- Le Mémory collectif

Des nombres sont écrits en chiffres (une dizaine ou davantage) au

tableau, choisis en fonction des connaissances des élèves. Ces chiffres

disposés en vrac sont affichés quelques secondes à la vue des élèves.

Puis les élèves doivent dire quels nombres ils ont vu.

3- Les cartes recto verso

Sur l’une des faces des cartes, des nombres sont écrits en chiffres,

tandis que sur l’autre face ils sont écrits en lettres (les contenus sont à

adapter en fonction des élèves). Les cartes sont distribuées, par

exemple du côté chiffres. Chacun à son tour doit désigner une carte,

énoncer le nombre écrit et vérifier au dos de la carte ; si c’est le bon

mot, il gagne la carte.

4- Le jeu des étiquettes

Sur des étiquettes, on écrit les 26 mots suivants (ou seulement une

partie d’entre eux) : un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf,

dix, onze, douze, treize, quatorze, quinze, seize, vingt, trente,

quarante, cinquante, soixante, cent, mille, million, milliard, et.

Les étiquettes sont disposées en vrac, du côté où rien n’est écrit.

L’élève doit retourner entre 3 et 6 étiquettes et chercher le plus grand

nombre possible de nombres différents qu’il est possible d’écrire, et les

écrire en chiffres, puis on vérifie.


IDÉE

46

UTILISER UNE BANDE NUMÉRIQUE HORIZONTALE

La production des nombres à l’aide d’écritures chiffrées suit une

règle logique de régularité qui lui confère un aspect algorithmique :

tout se passe entre 10 et 20, comme entre 20 et 30 : il suffit d’écrire le

premier chiffre, 1, suivi de 0, puis de 1, puis de 2… puis de 9 ; on

répète ensuite la même série derrière le chiffre 2 : 2 suivi de 0, puis

de 1, etc. ; puis la même série avec le chiffre 3, etc.

Deux supports visuels indispensables permettent de mettre en

évidence le rythme de renouvellement de cette règle : les bandes

numériques et le tableau des nombres.

Les bandes numériques

La bande numérique horizontale est présente dès l’école

maternelle, affichée au tableau, souvent jusqu’à 30 en grande section.

Elle permet aux élèves, en s’appuyant sur leur connaissance de la suite

orale et sur le principe de correspondance terme à terme, de trouver

l’écriture chiffrée des premiers nombres. Il leur suffit de réciter la suite,

de faire correspondre une case avec un mot, la dernière case

permettra de trouver l’écriture chiffrée du dernier mot nommé.

Par exemple, « quinze » ; en récitant la comptine, l’enfant retrouve

qu’il s’écrit « 15 ».
La manipulation régulière de cette bande numérique va aider les

élèves à se construire une « image mentale » de la suite des nombres

qui permet de mettre en relation les nombres les uns avec les autres,

qui les organise et les structure.

Il faut que chaque élève dispose de sa propre bande numérique,

en plus de la bande de la classe affichée au tableau. Certains élèves

pourront s’en détacher plus rapidement que d’autres. Les élèves en

difficulté doivent pouvoir disposer de cet outil aussi longtemps qu’ils

en auront besoin.

Pour faire apparaître la règle des changements à 10, replier la

bande en accordéon par dizaine : premier pli de 1 à 9 ; deuxième pli

de 10 à 19 ; troisième pli de 20 à 29, etc.

Faites colorier d’une même couleur tous les nombres qui n’ont

qu’un seul chiffre, et colorier d’une autre couleur tous les nombres

commençant par 1, puis d’une autre couleur les nombres

commençant par 2, et ainsi de suite.

Ces coloriages faciliteront le repérage.

Les bandes seront prolongées au fur et à mesure des acquisitions ;

leur longueur sera différente d’un enfant à l’autre et dépendra de ses

connaissances.

On pourra ensuite reprendre les mêmes activités à partir de bandes

numériques verticales : de 1 à 10, de 11 à 20,…


IDÉE

47

UTILISER UN TABLEAU DES NOMBRES

Le tableau des nombres de 0 à 99 permet de comprendre la

logique de l’écriture des nombres en faisant apparaître, en lignes ou

en colonnes, des « familles » de nombres : les nombres qui n’ont

qu’un seul chiffre, ceux qui se terminent par 0 ; ceux qui commencent

par 3…

QUELQUES PROPOSITIONS D’ACTIVITÉS


Prévoir un tableau ou une partie de tableau (la moitié par

exemple) dont le format sera adapté pour chaque élève en fonction de

ses compétences.

Prévoir un tableau rempli par élève et un grand tableau collectif

affiché.

Remplir les trous


Confectionner des tableaux avec quelques trous (de 5 à 10) à la

place de certaines cases. Les étiquettes correspondantes sont posées

en vrac. L’élève doit retrouver les nombres manquants. L’enfant valide

ses réponses à l’aide de son tableau rempli ou de celui qui est affiché.

Coloriages

Prévoir des tableaux remplis, un par élève.

Donner des consignes de coloriages pour faire « ressortir » les

familles :

Colorier en bleu les nombres à un chiffre.

Colorier en vert les nombres qui se terminent par 1.

Colorier en jaune ceux qui commencent par 3. Faire remarquer

que les nombres de même couleur sont tous sur une même ligne

ou sur une même colonne.

Puzzles

Prévoir dix bandes correspondant aux lignes du tableau ; les

mélanger. Faire reconstituer le tableau.

Prévoir dix bandes verticales correspondant aux colonnes du

tableau ; les mélanger. Faire reconstituer le tableau.

Découper tout le tableau en morceaux de formes et de tailles

variées. Mélanger les morceaux. Faire reconstituer le tableau.

Faire verbaliser les procédures utilisées.

Écrire les nombres qui manquent

Dans un tableau, écrire la moitié des nombres (ou davantage, en

fonction des élèves) de façon éparpillée.

Faire écrire les nombres manquants.

Au besoin, les élèves peuvent s’aider d’un tableau rempli.

Compléter les croix

Isoler une croix dans le tableau.


Montrer à l’aide de flèches que si l’on passe

d’une colonne à la suivante on ajoute 1 ( + 1)

d’une colonne à la précédente on soustrait 1 (-1)

d’une ligne à la suivante on ajoute 10 ( + 10)

d’une ligne à la précédente on soustrait 10 (-10)

Donner aux élèves des croix à compléter :

inscrire uniquement son centre ; par exemple : 25 ;

ou inscrire un des côtés.

etc.

À ce sujet voir : Apprentissages numériques et résolution de

problèmes GS ERMEL, Édition Hatier, 2005


IDÉE

48

PRINCIPE DU GROUPEMENT PAR 10

Lorsque les quantités d’objets deviennent plus grandes, les

groupements apparaissent comme un moyen sûr et efficace de

dénombrement.

Notre système de numération repose sur le principe suivant :

chaque fois qu’on arrive à 10 unités, on change de dizaine ; chaque

fois qu’on arrive à 10 dizaines, on change de centaine ; etc. Pour aider

les élèves dans la compréhension de ce principe, il faut leur proposer

des situations s’appuyant sur un matériel varié et familier.

Pendant une longue période, les activités devront se faire sans

recours au symbolisme, sans « dicter » de règles, mais en travaillant

sur la communication d’informations concernant les collections.

Quel matériel ?

Du matériel usuel, connu des enfants et se trouvant facilement en

grande quantité (jusqu’à des milliers). Par exemple, des allumettes, des

bâtonnets d’esquimaux, des trombones, des boutons, des marrons, …

Pourquoi ?

À travers ce matériel, l’enfant exécutera des actions : il fera des

groupements, il les défera, il les refera. Ces groupements lui

permettront de trouver rapidement des informations sur les collections

manipulées : il devra coder, décoder ces informations.

Tout cela est nécessaire à la compréhension de l’aspect décimal et

positionnel de notre système.

Comment ?

Sur le long terme (au moins trois mois) et de façon régulière.


L’activité devra toujours donner lieu à une verbalisation, à une

interrogation sur ce qu’on voit.

Au début, il faudra prendre le temps de faire et défaire : « Tu vois,

ce paquet d’allumettes (il y a dix allumettes dans le paquet). Peux-tu

me dire combien il y a d’allumettes dans ce paquet ? Défais-le et

vérifie. »

On deviendra de plus en plus exigeant sur la communication et le

codage des informations avant de parvenir à l’écriture chiffrée du

nombre d’objets.

À ce sujet voir : Apprentissages numériques et résolution de

problèmes GS ERMEL, Édition Hatier, 2005


IDÉE

49

TRAVAILLER LES GROUPEMENTS PAR 10 À L’AIDE


DE PAILLES

Matériel : des pailles : les « uns » ; des petits et des grands


élastiques ; des grandes boîtes sans couvercle.

Toutes les pailles, même attachées avec les élastiques, resteront

toujours visibles et facilement dénombrables.

Faire

On s’arrête toujours à 10.

Dès que j’ai compté 10 pailles, je les entoure d’un petit

élastique : cela fait un tas.

Dès que j’ai compté 10 petits tas, je les entoure d’un grand

élastique : cela fait un fagot.

Dès que j’ai compté 10 fagots, je les mets dans une boîte…

Chaque configuration a toujours la même place (principe de

position) ; sur la table, sont disposés de gauche à droite : les

boîtes, les fagots, les tas, les pailles.

Des rubans adhésifs colorés séparent les différentes « classes ».

Dire

Questionner les élèves :

Pourquoi mets-tu ce tas ici ? Combien y a-t-il de pailles dans un

tas ?

Pourquoi mets-tu ce fagot ici ? Combien y a-t-il de tas dans un

fagot ?

Regarde, voici un tas et 9 pailles. Je rajoute une paille. Maintenant,

qu’est-ce que je peux faire ?

Écrire
Pour écrire le nombre d’objets, on complète la feuille de comptes :

Dans la première ligne on dessine, et dans la deuxième, on écrit

combien on en voit.

Faire deviner

Des élèves cachent une certaine quantité de pailles : par exemple,

1 fagot et 6 pailles. Un élève disposant de pailles, en posant des

questions, doit reproduire la même quantité cachée de pailles. Une

fois qu’il sait qu’il doit y avoir 1 fagot, il doit reconstituer dix tas

contenant chacun 10 pailles…

Utiliser le symbolisme

Dernière étape :

Passer directement des boîtes, fagots, tas et pailles à l’écriture

(812 par exemple).

Pouvoir reconstruire une collection de boîtes, de fagots, de tas et

de pailles (toute seules) à partir d’une écriture (205 par exemple).

Ce matériel peut être également utilisé pour l’introduction des

nombres décimaux : pour introduire le dixième, couper une paille en


1
dix parties d’à peu près la même longueur .
1- Sur ce sujet, voir par exemple :

Bernadette Guéritte-Hess, Isabelle Causse-Mergui et Marie-Céline Romier, Les maths

à toutes les sauces. Éd. le Pommier, 2005.

Bernadette Guéritte-Hess, avec la collaboration de Marie Benoît, Au fait, c’est quoi

pour vous la virgule en mathématiques ? : une toute autre démarche d’apprentissage. Éd.

du Papyrus, 2009.
IDÉE

50

COMMENT TRAVAILLER LES ÉCHANGES

Matériel : des pièces de 1 euro, des billets de 10 euros (factices !) ;

des feuilles de papier représentant des porte-monnaie : sur chaque

feuille sont représentés neuf contours de pièces de 1 euro, et neuf

contours de billets de 10 euros ; une quarantaine de cartons sur

lesquels sont écrits quelques prix compris entre 5 et 20 euros.

Jeu 1

Chaque joueur dispose d’un porte-monnaie. Le banquier dispose

d’un coffre-fort rempli avec des pièces de 1 euro et des billets

de 10 euros (une trentaine de chaque catégorie, par exemple). Chaque

joueur à tour de rôle lance un dé (constellations ou chiffres de 1 à 6)

et passe commande au banquier du nombre d’euros indiqué par le dé,

puis il range les pièces obtenues dans son porte-monnaie (4 pièces,

par exemple). Mais, une fois qu’il aura rangé 9 pièces dans son porte-

monnaie, il n’aura plus de place pour les suivantes : il sera donc

obligé d’échanger 10 pièces contre 1 billet de 10 euros, qu’il placera

dans son porte-monnaie, et ainsi de suite. Le jeu s’arrête au bout de


six à dix tirages. Les joueurs doivent alors comparer le contenu de leur

porte-monnaie pour savoir qui est le gagnant.

Jeu 2

Chaque joueur dispose de pièces de 1 euro (entre dix et trente) et

de billets de dix (une dizaine)

Le marchand (ou la marchande) dispose de petits objets à vendre

dont les prix (inférieurs à 50 euros) sont écrits sur des cartons. Chaque

joueur à tour de rôle choisit un objet et paie. Le marchand refuse

qu’on lui donne plus de 9 pièces de un euro par achat.

Au bout de trois achats (par exemple), on regarde les objets

achetés et on compare l’argent restant à chacun.

La contrainte présente dans ces deux jeux, « Pas plus de 9 pièces

de 1 euro », oblige à échanger régulièrement dix pièces de 1 euro

contre un billet de 10, favorisant ainsi la compréhension : « Une

dizaine, c’est dix unités ».


IDÉE

51

FRACTIONS

En fin d’école primaire, les compétences sur les fractions sont

limitées à savoir « écrire, nommer, comparer et utiliser quelques

fractions simples (demi, tiers, quart, dixième, centième) ». Cette étude

sert essentiellement de support à celle des nombres décimaux à partir

des fractions décimales (fractions de dénominateur 10, 100, 1 000,

etc.). Aucun formalisme n’est requis, aucune règle de calcul ne doit

être institutionnalisée.

Tout l’apprentissage des fractions sera fait à partir d’actions et de

représentations dans des situations de partage ou de codage de

mesures de longueurs et d’aires. Lors de ces activités, l’importance de

l’action et de la mise en mots est primordiale : une correspondance

doit être établie entre « faire, voir et dire ».

Faire

Sur une table, sont posés des ciseaux et une vingtaine de bandes

de papier, toutes de longueur identique ; certaines bandes de papier

seront partagées en 2, d’autres en 3, d’autres en 4 (par l’élève lui-

même de préférence, avec des indications si nécessaire, et la

possibilité de tâtonner et plier). Prévoir au moins une bande de

référence entière (l’unité) qui restera sur la table pendant toute

l’activité.

Placer les morceaux de bandes coupées en deux dans une

enveloppe sur laquelle on inscrit : /2 (le / symbolisant les ciseaux, et


signifiant : « coupée en 2 ») ; de même pour les autres (« coupées

en 3 » ou « en 4 »).

Prévoir des petits morceaux de papier sur lesquels sont inscrites

des commandes.

L’élève tire un bon et doit préparer la commande.

Par exemple, s’il tire « 2/3 », il doit sortir deux morceaux de

l’enveloppe marquée /3.

Voir

Si l’unité est partagée en trois, un tiers (1/3) représente une part ;

deux tiers (2/3) représente 2 parts ; trois tiers (3/3) représente 3 parts,

c’est-à-dire l’unité entière.

Dire

On verbalisera ainsi : « Deux tiers, c’est un tiers plus un tiers : c’est

deux fois un tiers. 2, le nombre de parts à préparer, est le numérateur ;

3, le nombre de parts coupées, est le dénominateur. »

À l’école, on s’appuie sur le langage, sur la description orale d’une

situation plutôt que sur des écritures symboliques du genre :

2/3 = 1/3 + 1/3 = 2 x 1/3.

C’est seulement à partir du collège qu’une fraction sera définie

comme quotient de deux nombres entiers, et que les règles de calcul

seront introduites.
IDÉE

52

QU’EST-CE QUE CALCULER ?

L’activité calculatoire est une part importante de l’activité

mathématique, mais c’est surtout peut-être la plus visible et la plus

« entraînée ». Cela conduit d’ailleurs assez souvent à confondre calcul

et mathématiques.

Mais qu’est-ce donc que le calcul ?

L’acte de calculer comporte deux aspects essentiels :

choisir et ordonner la séquence des opérations à faire pour arriver

au résultat recherché (concevoir l’algorithme) ;

exécuter ces opérations en obéissant à des règles immuables et

précises (appliquer l’algorithme).

Seul le premier aspect requiert une réflexion et un choix de la part

de l’exécutant. L’exécution, en elle-même, ne laisse aucune marge de

manœuvre. Face à des activités de calcul issues d’aucun problème, les

symboles manipulés ne renvoient à rien, ne viennent de nulle part.

Malgré tout, certains élèves en sont friands et sont très habiles.

Possédant une solide mémoire, ils appliquent aveuglément les règles

sans erreur ou presque.

D’autres élèves – et ils sont nombreux – ne réussissent pas à bien

faire les calculs proposés et font beaucoup d’erreurs. Dans les deux

cas, les élèves ne savent pas ce qu’ils font, ni pourquoi ils le font.

Lorsque cette pratique devient intensive et prend trop de place par

rapport aux activités qui mobilisent la pensée, qui donnent du sens

aux notions et aux concepts, de nombreux élèves peuvent se dégoûter

du calcul, des mathématiques et même de l’école.

L’apprentissage du calcul doit venir après le sens et la

conceptualisation : l’expérimentation des nombres et de la numération

doit être privilégiée avant de soumettre les élèves à des automatismes

aveugles (« automathismes », mot de Stella Baruk). L’apprentissage du


calcul ne doit pas se limiter à celui du calcul posé : une grande place

doit être laissée au calcul mental, réfléchi et au calcul instrumenté.


IDÉE

53

QUELS SONT LES DIFFÉRENTS MOYENS DE


CALCULER ?

La diffusion des nouvelles technologies a profondément modifié

les pratiques de calcul en usage dans notre vie professionnelle et

sociale. La plupart des techniques opératoires (algorithmes) dont

l’apprentissage occupait jadis une place primordiale dans la scolarité

sont aujourd’hui facilement et communément prises en charge par une

calculette.

L’objectif prioritaire devient donc aujourd’hui d’aider les élèves à

construire des connaissances calculatoires au service des problèmes

qu’elles permettent de résoudre. Pour cela, nous disposons de trois

moyens de calcul : le calcul mental, le calcul écrit, et le calcul

instrumenté.

Le calcul mental

C’est le moyen de calcul dont l’apprentissage doit prendre la place

prépondérante à l’école primaire (ce que confirment les programmes

en vigueur).

Il convient de distinguer ce qu’il faut mémoriser (calcul

automatisé) et ce qu’il faut être capable de reconstruire en s’appuyant

sur ce qu’on connaît des nombres et des propriétés des opérations

(calcul réfléchi). Une pratique régulière du calcul réfléchi permet

d’ailleurs au fil du temps l’automatisation et la mémorisation des faits

numériques les plus souvent rencontrés.

Le calcul écrit (ou calcul posé)

Ce travail doit prendre une « juste » place. Seul son usage dans

des cas simples doit être maîtrisé, aucune virtuosité n’est visée. Pour

l’addition, la soustraction, la multiplication, on pourra se limiter à des


nombres de 2, 3 ou 4 chiffres ; pour la division, on pourra se limiter à

un dividende de 2, 3 ou 4 chiffres et un diviseur de 1 ou 2 chiffres.

Pour cette dernière opération, on gardera la trace des soustractions

successives.

Ce mode de calcul ne doit pas être enseigné prématurément car il

nécessite une bonne installation des nombres et de la numération.

Chaque opération doit d’abord être introduite à l’aide de problèmes

lui donnant du sens (s’appuyer sur des procédures de calculs diverses

avant l’introduction d’une technique imposée).

Le calcul instrumenté

Dans la vie courante, ce mode de calcul a largement remplacé le

calcul écrit. La pratique du calcul instrumenté doit, elle aussi, faire

l’objet d’un apprentissage spécifique permettant de comprendre les

fonctionnalités de la machine et de s’interroger sur ses limites. Il faut

d’une part apprendre à organiser ses calculs, et d’autre part apprendre

à contrôler les résultats en s’appuyant sur des ordres de grandeur.

Cette pratique doit être particulièrement encouragée chez les

élèves en difficulté en calcul lors des activités de résolution de

problème. Cela leur permet d’alléger la charge de travail et de se

concentrer sur la compréhension de l’énoncé, la représentation du

problème et la mise en opérations.


IDÉE

54

MÉMOIRE ET CALCULS

Dans la mémoire à long terme, les informations sont stockées sous

forme d’unités organisées en réseaux.

L’entraînement régulier, l’utilisation de supports imagés, colorés,

rythmés aident les élèves à se construire des automatismes. Ceux-ci

facilitent le rappel des informations ce qui allège la charge de travail.

Lorsque dans un problème il faut effectuer « 7 + 5 », le délai de

réponse va dépendre de la capacité de l’élève ; certains enfants

reconstruisent la réponse à l’aide du comptage ou du surcomptage,

d’autres arrivent à rappeler directement le résultat (en général vers le

CE2, mais cela dépend des enfants).

Ce n’est pas la taille des nombres qui rend la mémorisation plus

facile : les résultats des doubles (2 + 2 ; 3 + 3 ; 4 + 4…) et des carrés

(2 x 2 , 3 x 3,…) sont plus facilement accessibles et la raison peut être

« auditive » : cela « sonne mieux » et on s’en rappelle mieux. D’autres

sont plus récalcitrants et peuvent le rester longtemps ! C’est le cas par

exemple de 4 + 3, 7 x 8 ou 8 x 9.

Lorsqu’un élève a des difficultés à mémoriser les résultats des

tables, on peut l’entraîner dans un premier temps à une simple

mémorisation de nombres. Par exemple :

Réciter à haute voix une suite de nombres (plusieurs fois).

Prévenir l’élève qu’on va lui demander de retrouver des nombres,

qu’il doit essayer de les répéter dans sa tête.

Réciter à nouveau la suite mais en omettant un (ou plusieurs)

nombres. Faire retrouver le (ou les nombres) manquants.

En cas de besoin, faire répéter plusieurs fois la séquence pour

essayer de mémoriser les nombres entendus ; puis recommencer.

Diminuer ou augmenter le nombre de mots en fonction des résultats.

Faire ensuite mémoriser la suite complète.

É
• Écrire une suite de nombres en chiffres. Laisser l’enfant

l’observer quelques instants puis cacher un ou deux nombres ; les faire

écrire de mémoire. Diminuer ou augmenter la quantité de nombres

cachés en fonction des résultats. Faire ensuite mémoriser la liste

complète.

On alternera ce jeu de Kim visuel et le jeu de Kim sonore

précédent pour élargir les compétences des visuels et des auditifs.


IDÉE

55
CLASSER LES PROBLÈMES À DONNÉES NUMÉRIQUES

Face à un problème dont l’énoncé est écrit, l’élève doit

successivement :

lire et comprendre le texte : c’est la phase de décodage des

informations ;

se représenter la situation : c’est la phase de compréhension du

problème ;

construire une procédure et effectuer un calcul : c’est la phase de

résolution ;
rédiger une solution : c’est la phase de communication.

Dans le domaine des apprentissages numériques, G. Vergnaud

(1996) a délimité deux « champs conceptuels » : celui des structures

additives, et celui des structures multiplicatives.

L’expression « structures additives » fait référence aux problèmes

dont le traitement appelle une addition, une soustraction ou une

combinaison des deux. L’expression « structures multiplicatives » fait

référence aux problèmes dont le traitement appelle une multiplication,

une division ou une combinaison des deux.

À l’intérieur de chaque champ, G. Vergnaud a abouti à une

catégorisation de problèmes pour lesquels les phases de représentation

et de résolution n’ont pas toutes le même degré de difficulté.

Cette catégorisation permet d’une part d’avoir une vue d’ensemble

des situations que l’élève doit rencontrer pour maîtriser le domaine

conceptuel concerné. D’autre part, cela permet de respecter les

contraintes développementales des élèves.

Dans chaque champ, les apprentissages fonctionnent en

s’appuyant sur la réversibilité de la pensée (voir l’Idée 10), ils s’étalent

sur plusieurs années et sont très différents d’un élève à l’autre. Dans la

plupart des problèmes numériques, la difficulté principale n’est pas

l’opération en jeu : c’est la place de l’inconnue (voir l’Idée 57).


IDÉE

56

ORDRE DU LANGAGE ET ORDRE DES ACTIONS

Le langage exige de la mobilité de pensée : les mots se déroulent

souvent dans l’ordre inverse des actions qu’ils décrivent.

Par exemple : « Le camion rouge suit la petite voiture ». Sur le

bord de la route, un piéton qui regarderait passer les voitures, verrait

d’abord passer la petite voiture et le camion ensuite, alors que dans la

phrase, c’est le camion qui est cité en premier. Par contre, dans cette

autre phrase : « Le camion rouge précède la petite voiture », les objets

sont énoncés dans le même ordre que précédemment, mais dans la

réalité décrite, ils arrivent dans l’ordre inverse.

« Tracer la droite D’ parallèle à la droite D passant par A » : il faut

débuter en traçant le point A, puis la droite D et enfin D’ (lire de droite

à gauche….)

De même, pour « Prendre les 2/5 de 20 € » : il faut d’abord

e e
chercher ses pièces (4 chose énoncée), en compter 20 (3 ), puis les

e re
partager en 5 tas égaux (2 ), dont on prendra 2 parties (1 chose

énoncée). Tout est à l’envers et on doit remonter la phrase pour réunir

la somme.

« Machin a trois allumettes de plus que Truc » oblige à donner

d’abord sa part au dernier cité.

En cuisine, on se méfiera des énoncés du type : « Mettre le sucre

après avoir battu les blancs en neige », plus complexe que : « Battre

les blancs en neige, puis mettre le sucre ».

Pour la même raison, on voit les petits enfants sourds dessiner « le

chapeau de ma mère », en faisant d’abord le chapeau, puis la mère à

côté. Le « my mother’s hat » anglais pose moins de problèmes.

L’éducateur doit avoir conscience de ces difficultés constantes.

Située à la frontière entre la réalisation du geste, le langage et les

maths, la psychomotricité peut aider à travailler dans l’espace et le


temps ce lien entre les actions et leur représentation, dans, puis hors

du contexte.
IDÉE

57

LES PROBLÈMES ADDITIFS

1- Problèmes avec action

Voici quelques exemples de problèmes relevant d’ajout ou de

retrait, de gain ou de perte :

problème 1

Jean avait 6 billes ; il en a gagné (ou perdu) 3. Combien en a t-il

maintenant ?

problème 2

Jean avait des billes ; il en a gagné 4 (ou perdu) ; maintenant il en

a 6. Combien en avait-il au début ?

problème 3

Jean avait 6 billes (ou 9 billes) ; maintenant il en a 9 (ou 6).

Combien en a-t-il gagné ? (ou perdu).

Dans ces trois problèmes, il y a une situation initiale (avoir un

certain nombre de billes), une action (en gagner ou en perdre), puis

une situation finale.

Dans le problème 1, on cherche la situation finale (6 + 3 ou 6 - 3) ;

c’est le plus facile à se représenter car l’ordre est chronologique.

Dans le problème 2, on cherche la situation de départ, il faut donc

« remonter le temps », ce qui augmente la difficulté.

Dans le problème 3, on cherche ce qui s’est passé et il faut, là

encore, s’éloigner de l’ordre chronologique pour trouver le résultat.

C’est donc la place de l’inconnue, plus que l’opération sous-

jacente, qui est le premier facteur de difficulté d’un problème relevant

d’une adition ou d’une soustraction (voir l’Idée 56).


2- Problèmes sans action

Passons en revue quelques exemples de problèmes relevant de la

recherche du tout ou d’une partie.

Dans un vase, il y a 4 roses et 3 tulipes. Combien y a-t-il de

fleurs ?

Dans un vase, il y a 7 fleurs : des roses et des tulipes. Sachant

qu’il y a 3 roses, combien y a-t-il de tulipes ?

Dans le premier problème, il s’agit de réunir deux collections et de

trouver le tout ; le second est plus difficile car il faut trouver une

partie : le raisonnement nécessite la maîtrise de l’inclusion de classes

(voir l’Idée 28). On voit bien ici l’importance du travail sur ce thème.

Enfin, les problèmes de comparaison cumulent des difficultés de

représentation et de langage, les termes utilisés – « de plus » ou « de

moins » – étant souvent inducteurs de procédures erronées. Les

problèmes de ce type sont souvent les moins réussis.

Léo a 4 bonbons. Jean en a 3 de plus (ou de moins). Combien

Jean a-t-il de bonbons ?

Léo a des bonbons. Il en a 3 de plus (ou de moins) que Max. Max

a 5 bonbons. Combien Léo a-t-il de bonbons ?


IDÉE

58

LE JEU DE LA TABLE D’ADDITION

Matériel : une grille pour deux joueurs ; deux dés à 6 faces ;


10 jetons d’une couleur et 10 d’une autre.

Sur chaque dé, il y aura les chiffres 1, 2, 3, 4, 5 (ou les


1
constellations correspondantes). Sur la sixième face, il y aura un petit

cœur : ce symbole signifie que l’on peut choisir le nombre que l’on

veut entre 1 et 5.

Règle du jeu

Le premier joueur lance deux dés, calcule la somme et place un

jeton sur la case correspondante ; s’il tombe sur « cœur » il choisit un

nombre (entre 1 et 5) et annonce l’opération correspondante.

Par exemple, le premier dé tombe sur 4, le deuxième dé sur

« cœur ». Le joueur choisit « 2 » et annonce : « 4 + 2 = 6 ». Il place

alors un jeton sur une case « 6 ».

Puis c’est à l’autre joueur de jouer.

Le premier à avoir posé ses dix jetons a gagné.

Remarques :
Pour les élèves n’ayant pas du tout mémorisé les résultats additifs,

on fournira des dés à constellations qui permettront de retrouver les

sommes correspondantes soit par comptage ou surcomptage. On fera

dire tout haut et on fera écrire sur un petit carnet de jeu. Ainsi, que

l’enfant soit visuel ou auditif, il pourra commencer à mémoriser.

Le lancer de dés permet de « tomber » sur les résultats dans tous

les sens :

Là encore, faire expliciter, verbaliser :

« 3 + 4 = 7 » ; « 4 + 3 = 7 »

« Je choisis 2 à la place de « cœur » car je sais que 4 = 2 + 2 ».

La présence de la face « » oblige les élèves à anticiper et à

effectuer des additions à trou, donc à soustraire, ce qui favorise la

réversibilité de la pensée (voir l’Idée 10).

1- Les constellations sont les différents arrangements de points figurant sur les faces des

dés.
IDÉE

59

AIDER À APPRENDRE LES TABLES D’ADDITION

Des programmes individuels s’adressant à des élèves

dyscalculiques ou présentant des troubles du calcul ont été

expérimentés avec succès en Australie (2000-2002) et en Angleterre

(2001).

La durée des prises en charge variait de vingt minutes par semaine

pendant cinq mois à une demi-heure par jour pendant trois mois.
1
Ces programmes se révèlent efficaces lorsqu’ils ciblent avec

précision les points les plus déficitaires, et surtout lorsque la prise en

charge est individuelle. Les résultats les plus encourageants sont

obtenus lorsque les objectifs sont limités : renforcement des habiletés

de comptage et des faits numériques déjà connus pour construire de

nouveaux résultats.

Comment aider les élèves à constituer un premier stock de

résultats additifs ?

En aidant à la mémorisation des sommes des nombres de 1 à 5,

les plus faciles étant les successeurs (2 + 1 ; 3 + 1, …) et les

doubles (1 + 1 ; 2 + 2 ;…), et les plus difficiles étant 2 + 3 ; 3 + 4 ;

3 + 5 ;…

En entraînant à construire un résultat qu’on ne connaît pas à partir

de résultats qu’on connaît :

2 + 3, c’est 2 + 2 + 1

3 + 4, c’est 3 + 3 + 1

3 + 5, c’est 3 + 3 + 1 + 1

Et ainsi de suite.

Comment aider les élèves à augmenter le stock des résultats

mémorisés ?
Il faut passer beaucoup de temps à réviser les faits numériques

déjà connus et à les utiliser (lors de jeux comme le loto, le Mémory

des tables que l’on construit en fonction des connaissances de

l’élève) ; l’utilisation des résultats lors des jeux permet d’entretenir et

de renforcer la mémoire. Puis on s’entraîne à trouver de nouveaux

résultats en s’appuyant sur ce qu’on sait déjà et sur les procédures

explicitées ci-dessus.

Petit à petit, la taille des nombres augmente, le stock des résultats

mémorisés augmente, et on continue en fonction des résultats

obtenus.

1- Voir « Troubles des apprentissages : dyslexie, dysorthographie, dyscalculie… », sur le

site INSERM « Neurosciences, sciences cognitives, neurologie, psychiatrie » :

http://www.inserm.fr/thematiques/neurosciences-sciences-cognitives-neurologie-

psychiatrie/dossiers-d-information
IDÉE

60

LES DÉCOMPOSITIONS DE 10

Il existe des hiérarchies dans le développement des habiletés

numériques. C’est pourquoi il convient d’être particulièrement vigilant

dans le choix des entrainements proposés à des élèves présentant des

troubles du calcul. Par exemple, si un élève ne compte pas

correctement jusqu’à 10, il ne pourra pas compter correctement au-

delà de 10, d’où l’importance de l’entraînement au comptage et au

calcul sur des nombres allant jusqu’à 10. Il convient d’y passer tout le

temps nécessaire.

Les décompositions additives de 10 (1 + 9 ; 9 + 1 ; 2 + 8 ; 8 + 2…)

sont à la base de nombreux calculs car 10 est un nombre pivot dans

notre système de numération. La tâche sera donc facilitée pour les

élèves qui arrivent à les mémoriser.

Si l’élève est amené à les construire à travers une situation, la

mémorisation sera plus efficace.

Exemple de situation pour travailler les décompositions de 10 :

Les tiroirs du 10
Prévoir une commode en carton ayant 5 tiroirs.

Placer 10 marrons en vrac sur la commode : c’est la collection

témoin.

Placer un sac avec 1 marron dans le premier tiroir, un sac

avec 2 marrons dans le deuxième tiroir… un sac avec 5 marrons dans

le cinquième tiroir.

Sur chaque tiroir sont inscrites deux additions à trou :

1 +… = 10 … + 1 = 10

2 +… = 10 … + 2 = 10

3 +… = 10 … + 3 = 10

4 +… = 10 … + 4 = 10
5 +… = 10 … + 5 = 10

Les élèves doivent remplir 5 sacs avec des marrons pour qu’il y ait

toujours 10 marrons en tout dans chaque tiroir, et compléter les

additions à trous.

Dans le premier tiroir il faudra donc placer un sac avec 9 marrons,

dans le deuxième tiroir un sac avec 8 marrons… jusqu’à placer dans

le dernier tiroir un sac avec 5 marrons.

À tout moment, l’élève doit pouvoir renverser le contenu des sacs

pour vérifier le nombre total de marrons, et vérifier en comptant si

besoin. L’utilisation des 10 doigts de la main sera autorisée, et même

suggérée en cas de difficulté.

Là encore, la mobilité des sacs permet de travailler dans tous les

sens, ce qui entraîne la réversibilité de la pensée et fait le lien entre

addition et soustraction.

Exemple de verbalisation ou d’écritures notées dans un petit carnet

de comptes :

9 + 1 = 10 1 + 9 = 10 10 - 1 = 9 10 - 9 = 1

Sur ce sujet, voir aussi l’Idée 90.


IDÉE

61

LES RÉGLETTES CUISENAIRE POUR ADDITIONNER


ET SOUSTRAIRE

1
Les réglettes Cuisenaire sont de petits morceaux de bois colorés

mesurant entre 1 et 10 cm de long et d’1 cm2 de section.

Ces réglettes permettent une sensibilisation manuelle aux notions

d’opérations et de leurs propriétés.

Pour les enfants souffrant d’agnosie digitale ou d’un manque de

coordination, les réglettes peuvent servir de supports pour les calculs.

Principe :

Chaque couleur se trouve associée à un nombre :

blanc : 1 ; rouge : 2 ; vert clair : 3 ; rose : 4 ; jaune : 5 ; vert foncé :

6 ; noir : 7 ; marron : 8.

Ce matériel relève d’une utilisation individuelle ou en groupes et

nécessite la présence d’un médiateur (enseignant, parent ou

rééducateur…) pour faire verbaliser.

Si l’on désire utiliser les réglettes à fin d’entraînement ou de

remédiation, il faut démarrer avec des jeux libres qui vont permettre à

l’enfant de s’approprier ce matériel très coloré et de se familiariser

avec les couleurs. Il va pouvoir fabriquer des objets variés et raconter

des histoires.

Puis viendra une phase de jeux dirigés pendant laquelle les

consignes deviendront plus précises, et du vocabulaire sera introduit :

plus petit, plus grand, devant, derrière, dessus, dessous.

Les réglettes permettent une approche de l’addition et de la

soustraction
Par exemple, le fait de poser sur la réglette rose (4) la réglette vert

clair (3) et la réglette blanche (1), peut permettre à l’enfant de « voir »

que 3 + 1 = 4 et que 1 + 3 = 4 ou même que 1 + 1 + 1 + 1 = 4 ;

On peut avec ce matériel retrouver les décompositions additives

de 10, et associer les résultats soustractifs correspondants : 4 – 1 = 3 ;

4 – 3 = 1…

Ce matériel permet, à partir d’une visualisation des nombres, de

construire des résultats additifs et/ou multiplicatifs et d’aider à la

construction du concept de fraction (voir l’Idée 66). Il peut être utilisé

en petits groupes pour construire les apprentissages, en soutien pour

les consolider, ou en remédiation pour les élèves ayant du mal à

construire et à mémoriser les faits numériques.

1- Georges Cuisenaire (1891 - 1975), instituteur et pédagogue belge. Il est l’inventeur

d’une méthode d’enseignement de l’arithmétique à l’aide de bandes de carton colorées

qui permettent de concrétiser les calculs élémentaires.


IDÉE

62

LES PROBLÈMES MULTIPLICATIFS

Le champ conceptuel des problèmes multiplicatifs (voir l’Idée 55)

est plus complexe que celui des structures additives, en particulier

parce qu’une simple procédure de comptage ne permet plus à elle

seule de trouver une solution.

Les situations de proportionnalité et les calculs d’aires et de

volumes représentent les principales occasions de faire des

multiplications ou des divisions que ce soit dans la vie professionnelle,

dans la vie quotidienne ou à l’école. Ces situations peuvent être

posées dans un contexte numérique ou dans un contexte géométrique.

Les situations posées dans un contexte numérique peuvent


se représenter directement par une « addition réitérée ».

Exemple 1 :

Cherche le prix à payer pour 5 croissants valant 2 euros pièce :

c’est « 2 euros répété 5 fois », c’est donc 2 + 2 + 2 + 2 + 2. Cela

s’écrit 2 x 5 et peut se lire aussi « 2 multiplié par 5 »

Exemple 2 :

Chercher le nombre d’images possédées par Max, sachant qu’il

possède 4 sachets contenant chacun 5 images :

c’est « 5 répété 4 fois », c’est donc 5 + 5 + 5 + 5.

Cela s’écrit 5 x 4, et peut se lire aussi « 5 multiplié par 4 ».

Le symbole multiplicatif apparaît alors comme une écriture

simplifiée d’une addition réitérée :

A x B signifie « A répété B fois ».


Certains élèves ont beaucoup de difficultés à passer d’une addition

réitérée au produit équivalent correspondant. En effet, alors que

l’addition ou la soustraction mettent en jeu des nombres ayant le

même statut, ce n’est plus le cas pour la multiplication (voir l’Idée 64).

Pour entraîner à la correspondance entre les deux écritures, on

peut utiliser des jeux de loto ou de Mémory (voir l’Idée 73) en

réalisant des cartes à apparier, comme par exemple :

4 x 3 et 4 + 4 + 4.

Les situations posées dans un contexte géométrique peuvent


se représenter par un quadrillage.

Exemple

On cherche le nombre de carrés qu’il y a dans une tablette de

chocolat, ou l’aire d’un champ rectangulaire de 3 sur 5.

Pour trouver ce nombre, on peut raisonner « en lignes » : il y

a 5 carreaux par ligne, il y a 3 lignes, donc il y a 5 + 5 + 5 carreaux,

c’est-à-dire 5 x 3 (5 répété 3 fois).

Mais on peut aussi raisonner « en colonnes » : il y a 3 carreaux par

colonne, il y a 5 colonnes, donc il y a 3 + 3 + 3 + 3 + 3 carreaux,

c’est-à-dire 3 x 5 (3 répété 5 fois).

La plupart des enfants en déduisent que 5 x 3 = 3 x 5. Mais ce

n’est pas une évidence pour tous. Il y aura des prérequis à travailler,

avec des gestes, pour ceux qui n’ont pas l’équivalence numérique

(5 carreaux, c’est aussi 1 ligne), pour ceux qui n’ont pas la

conservation du nombre total (certitude que le nombre de carrés


ramassés dans un sens est le même au total quand on les ramasse dans

l’autre sens), et pour ceux qui sont mal à l’aise avec les classifications

(ils voient mal qu’un carreau appartient à la fois à l’ensemble des

carreaux de telle ligne et à ceux de telle colonne). (Voir l’Idée 64).

Confronter les élèves à ces deux contextes de problèmes permettra

de mettre en relation les deux représentations de la multiplication, et

de relier le cadre numérique et le cadre géométrique ; le cadre

géométrique permet une représentation de a x b, de visualiser le

produit, les lignes ou les colonnes pouvant même être mises en

couleur, pour faciliter le repérage.

Faire le lien entre la multiplication et la division en questionnant :

« Combien de cases dans un quadrillage de 3 sur 4 ? Combien de

colonnes dans un quadrillage de 12 cases ayant 4 carreaux par

ligne ? »
IDÉE

63

LES PROBLÈMES DE DIVISION

En s’appuyant sur les problèmes de groupements et de partages on

peut aborder la notion de division.

On distingue les problèmes de division-quotition et les problèmes

de division-partition.

1- Les problèmes de division–quotition

Dans les problèmes de division-quotition, il s’agit de chercher le

nombre de « parts », de « groupements ».

Exemple 1

Max a 20 images ; il les range par paquets de 4. Combien de

paquets a-t-il fait ? (Reste nul)

Exemple 2

Max a 13 images. Il les range par paquets de 4. Combien de

paquets a-t-il faits ?

Combien reste-t-il d’images non rangées ? (Reste non nul)

2- Les problèmes de division-partition

Dans ces problèmes il s’agit de chercher la « valeur » d’une part

lors d’un partage équitable.

Exemple 3

Max a 10 images qu’il répartit en 5 paquets en mettant le même

nombre d’images dans chaque paquet. Combien y a-t-il d’images dans

un paquet ? (Reste nul)

Exemple 4
Max a 14 images. Il les répartit en 5 paquets. Il met le même

nombre d’images dans chaque paquet. Combien y a-t-il d’images dans

un paquet ? Combien reste-t-il d’images non rangées ? (Reste non nul)

(Voir l’Idée 64)

Ces problèmes peuvent être mimés à l’aide de matériel. Puis, en

s’appuyant sur cette expérimentation, ils pourront être représentés et

enfin symbolisés. La dernière étape peut prendre beaucoup de temps :

la mise en mots ainsi que l’explicitation devraient la faciliter. Le

vocabulaire de la division sera énoncé en situation.

Les nombres en jeu doivent être suffisamment familiers aux élèves

pour qu’ils ne bloquent pas à cause des nombres et/ou des calculs. Le

contexte utilisé devra être simple et à la portée des élèves. Le fait de

varier les problèmes de multiplication et de division tout en gardant

des nombres simples (2, 3, 4, 5, 6, 10, 12..) et très proches d’un

problème à l’autre, permet de se concentrer sur le choix des

opérations.
IDÉE

64

ESPACE ET TEMPS DANS LES ÉNONCÉS DE


1
PROBLÈMES

Espace et temps se mêlent tour à tour ou ensemble dans les

énoncés de problèmes.

L’addition et la soustraction temporalisées sont de la forme :


j’avais —> j’ai ajouté —> j’ai à présent.

j’avais —> je veux enlever —> je peux, ou je ne peux pas —> si je

peux, j’agis sur les objets —> et à présent j’ai.

L’une et l’autre opération sont faisables par des tout-petits : ils

agissent, représentent les actions puis, le dessin fini, miment encore.

On peut en faire un petit film, ou une suite de photos, de dessins (état

initial et état final), l’action entre les deux étant à symboliser par une

flèche, le signe + ou un verbe. Il faut s’organiser pour faire un récit

dans l’ordre des actions (les temps des verbes varient), puis la

symboliser.

L’addition spatialisée est du type : « Il y a 19 garçons dans la


classe et 11 filles. Combien d’enfants y a-t-il en tout ? ».

Cette opération nécessite d’être à l’aise avec les classifications (les

garçons et les filles sont des enfants). On n’a pas d’action dans

l’histoire, sinon une action de réflexion interne de « mettre ensemble

en pensée ».

La soustraction spatialisée est du type : « Dans un groupe


de 30 élèves, on a 16 filles, combien a-t-on de garçons ? ».

La pensée s’appuie ici sur la capacité à concevoir le tout (les

élèves) et la partie (les filles, les non-filles), c’est-à-dire l’inclusion de

classes, vraiment acquise vers la fin du primaire. La recherche du

complémentaire, « les non-filles », la rend ardue.


La multiplication est spatio-temporelle : on prend une quantité
d’objets un certain nombre de fois. Les objets d’une « fois » se

photographient, sont spatiaux ; les « fois » sont temporelles, ce sont

des coups sur la table, des rangées, des trajets, des mains frappées. Les

termes de la multiplication ne sont donc pas de même nature. C’est

pourquoi il est utile de distinguer les termes en notant 5 x 3 = 15,

c’est-à-dire 5 objets par rangée (un contenu) sur 3 rangées (un

contenant).

On enseigne la multiplication comme une addition réitérée. Mais

dans l’exemple de « 3 caisses de 5 pots », lorsqu’on écrit 5 + 5 + 5, les

jeunes voient seulement le 5. Si bien que, souvent, ils écrivent :

5 x 5 ou 5 + 3 au lieu de 5 x 3, pour avoir le nombre total de pots.

Le 3 gagne à être matérialisé par un geste ou un son (tape sur l’épaule,

coup sur la table, son d’une cloche) effectué quand le jeune a les yeux

fermés : il se concentre alors sur le nombre de fois, de coups et

les 5 pots s’« effacent » pour devenir 1 coup ou 1 caisse.

Pour montrer l’aire d’un rectangle, il faudra que le geste de la

main balaye les 5 carrés d’une ligne, puis ceux de la deuxième, puis

ceux de la troisième :

Rappelons qu’il y a deux sortes de divisions (voir l’Idée 63).

La division-partition est du type : « On partage 100 billes


entre 11 enfants, combien de billes aura chacun ? » Cette division-

partition exige des gestes organisés pour répartir un à un à chacun

comme un joueur de cartes, en plusieurs tours. Des billes divisées par

des enfants donnent des billes par enfant : 100 : 11 = 9


La question « On donne 100 billes à répartir dans des petits sacs

de 11. Combien de sacs pourra-t-on faire ? » amène une division-

quotition, ou des soustractions successives. La main enlève 11,

encore 11… Des billes divisées par des billes dans un sac font des

sacs. 100 : 11 = 9.

La difficulté est de passer d’une vision du tout à une vision de la

partie attribuée à chacun, et d’un nombre d’objets à un nombre de

gestes.

1- Idée inspirée de l’article de B. Guéritte-Hess et C. Decour dans Évolutions

psychomotrices, n°74.
IDÉE

65

LES FACTEURS DE DIFFICULTÉ DES PROBLÈMES


NUMÉRIQUES

La première difficulté vient de la structure arithmétique du

problème, les problèmes multiplicatifs étant souvent moins maîtrisés

que les problèmes additifs :

la maîtrise complète des problèmes relevant d’une addition ou

d’une soustraction prend plus d’une dizaine d’années ;

en fin d’école primaire, de nombreux élèves ne savent pas encore

reconnaître l’emploi de la multiplication ou de la division, même

dans des situations simples. Cet apprentissage se prolongera

jusqu’à la fin du collège.

C’est donc d’un apprentissage sur le très long terme qu’il s’agit,

avec par surcroît des variations individuelles qui peuvent être

importantes.

Mais il existe aussi d’autres facteurs de difficulté :

Le contexte

Si la situation évoquée dans le problème est compliquée, l’élève

aura du mal à sélectionner les indices nécessaires à la résolution du

problème.

Un contexte familier à l’enfant, comme une histoire de bonbons

ou de chocolat, facilitera la compréhension du problème et donc sa

résolution ; avec des élèves ayant des difficultés particulières, il faut

toujours choisir un contexte simple, accessible pour leur permettre de

se concentrer sur la mise en œuvre de procédures de résolution.

On peut demander à l’élève de faire un dessin pour représenter la

situation. Cette tâche l’obligera à sélectionner les indices dans

l’énoncé. Lorsque c’est possible, on peut aussi matérialiser certains


éléments du problème (par exemple, des billes) et mimer certaines

actions (par exemple, ajouter, retirer, distribuer, partager…).

Certains énoncés peuvent être formulés sous forme d’histoire, de

récit : cela permet de mieux en comprendre la chronologie et d’en

favoriser la représentation (voir l’Idée 56).

On peut aussi demander à l’élève de raconter l’énoncé, car

l’expression orale, la verbalisation en langage courant, peuvent

favoriser la mémorisation de certains indices.

En cas de mise en œuvre d’une procédure non valide, le fait de

demander à l’élève d’expliciter sa démarche peut suffire dans certains

cas à lui faire prendre conscience d’une contradiction, et à l’amener à

mettre au point une procédure de résolution valide.

La taille et la nature des nombres en jeu

La présence de « petits nombres » (inférieurs à 10) permet une

représentation plus facile du problème, ce qui permettra à l’élève de

passer plus facilement de la phase de représentation à la résolution

Ainsi, des élèves bloqués par les grands nombres pourront réfléchir

au sens des opérations et commencer à mémoriser quelques résultats,

comme 2 x 3 ou 5 x 2. La présence de nombres décimaux peut

également être un obstacle à la résolution.

Une première aide consiste alors à proposer aux élèves de

remplacer le « grand nombre » ou le « nombre à virgule » par un

« petit nombre » entier pour trouver une façon de résoudre le

problème.

Enfin, l’utilisation d’une calculatrice, en le déchargeant de la tâche

calculatoire, permet à l’enfant de se concentrer sur la compréhension

du problème.
IDÉE

66

RÉGLETTES CUISENAIRE POUR LA


MULTIPLICATION ET LA DIVISION

Le problème de départ est le suivant : il faut faire un « train » de

réglettes ; pour cela il faut aligner au-dessous d’une réglette de couleur

donnée (par exemple grise) des rangées constituées de plusieurs

réglettes d’une seule couleur dont la longueur totale est exactement

celle de la réglette grise.

Verbaliser : Il faut 2 fois vert foncé (6) pour faire gris (12).
Cela peut s’écrire : 2 x 6 = 12.

Il faut 3 fois rose (4) pour faire gris (12).

Cela peut s’écrire : 3 x 4 = 12.

Combien de fois rouge (2) est-il contenu dans gris (12) : 6 fois

Cela peut s’écrire 12 : 6 = 2.

Combien de fois rose (4) est-il contenu dans gris (12) : 3 fois.

Cela peut s’écrire 12 : 4 = 3.

Fractions
Par exemple :

Faire recouvrir une réglette rose avec des réglettes blanches, et

verbaliser : « Il faut 4 réglettes blanches pour faire une réglette rose :

une réglette blanche c’est ¼ (un quart) d’une réglette rose ».

Faire recouvrir une réglette grise avec des réglettes vert foncé, et

verbaliser : « Il faut 2 réglettes vertes pour faire une réglette grise : une

réglette verte, c’est ½ d’une grise. 1/2 se lit « un demi » d’une grise, ou

la moitié d’une grise »

En utilisant les réglettes adéquates, on peut introduire les fractions

simples du programme de l’école : demi, tiers, quart, dixièmes.


IDÉE

67

LE JEU DE YAM’S

2 joueurs (ou plus).

Matériel : 5 dés et une piste. Une grille par joueur.

4 4 + 4 + 4 = 3 x 4 = 12

total

Le but du jeu est d’obtenir un maximum de points.

Règle du jeu

Chaque fois que c’est son tour, le joueur peut lancer les 5 dés trois

fois : en fonction des résultats du premier lancer, il choisit les dés qu’il

veut garder, en privilégiant le nombre qui est apparu le plus de fois

(sauf s’il a déjà fait la ligne correspondante) puis relance les autres (il

peut aussi choisir de les relancer tous) ; il a droit à un troisième lancer

après avoir à nouveau sélectionné des dés et comptabilise ses points

uniquement à partir des répétitions du nombre choisi.

Par exemple, si le premier lancer donne « 3, 4, 4, 5, 6 » et que le

joueur n’a pas encore rempli sa ligne de 4, il peut choisir de

garder 4 et 4 et de relancer les 3 autres dés. Si son deuxième lancer

donne « 3, 4, 2 » le joueur peut choisir de garder le 4 et de relancer

les deux autres dés. Au troisième lancer, il obtient par exemple « 5, 1,

6 » ; il remplit la ligne des 4 de sa grille et calcule les points obtenus


en totalisant uniquement les 4 : il peut les calculer en effectuant les

additions ou, plus rapidement, en annonçant : « 3 x 4 = 12 ».

Une calculatrice et des tables de Pythagore de l’addition et de la

multiplication peuvent être mises à disposition des joueurs.

Lorsque tous les joueurs ont rempli leurs grilles, ils font le total de

leurs points (à l’aide de la calculatrice, si besoin) ; le joueur ayant le

plus grand total a gagné.

Remarque.

À l’issue d’une partie, faire écrire sur une affiche les 6 produits

obtenus, et les faire lire à haute voix

Lorsque les élèves jouent souvent à ce jeu, ils rencontrent

régulièrement certains produits (uniquement de nombres compris

entre 1 et 6) consultables sur l’affiche. Petit à petit, ces produits

pourront être ensuite mémorisés.

Ce jeu permet de travailler les additions et les multiplications de

petits nombres, et il peut permettre de passer petit à petit de l’addition

réitérée à la multiplication. Il demande aux joueurs d’anticiper et de

choisir ; il fait donc travailler l’attention, la mémorisation et la logique.


IDÉE

68

DÉMARRER LE TRAVAIL SUR LES TABLES DE


MULTIPLICATION

Avancer petit à petit mais pas table par table ; faire compléter la

table de Pythagore de la multiplication au fur et à mesure pour que

chaque enfant repère ce qu’il sait ou non.

Commencer par les résultats plus faciles à mémoriser, comme les

carrés :

2 x 2, 3 x 3, 4 x 4… : il y a seulement deux nombres répétés à

entendre et à retenir, au lieu de trois pour les autres produits

comme 6 x 4 = 24, par exemple.

Les dire à haute voix ou les chanter ; et, pour les visuels, les

colorier en rouge.

Représenter les produits à l’aide de cubes emboîtables, et revenir

au sens de la multiplication : faire construire 3 tours de 4 cubes

chacune ; faire compter les cubes, un à un ou 4 par 4, ou 3 par 3.


Faire noter le résultat :

3 x 4 = 12, et aussitôt après : 4 x 3 = 12.

Écrire les produits sur des cartes recto-verso.

Par exemple :

3 x 4 d’un côté de la carte, et le résultat 12, de l’autre

Représenter les produits à l’aide de quadrillages sur papier

calque. Découper deux morceaux superposables. Sur le premier,

représenter un quadrillage correspondant au produit cherché.

L’élève peut toujours retrouver lui-même le résultat en comptant

les carreaux, un à un, ou ligne par ligne, ou colonne par colonne.

Sur le deuxième morceau, inscrire bien visiblement au milieu, le

résultat, en couleur.
IDÉE

69

S’ENTRAÎNER À MÉMORISER LES TABLES DE


MULTIPLICATION

Pour aider à la mémorisation des tables de multiplication, mieux

vaut travailler brièvement (par séquences de 5 à 10 minutes), mais

fréquemment (si possible tous les jours, que ce soit en classe ou à la

maison).

On peut s’appuyer sur des situations de jeux traditionnels

(dominos, lotos, Mémory, cartes, tableaux de nombres…) adaptés aux

résultats à mémoriser (voir l’Idée 73). Le fait de mettre l’enfant en

situation d’utiliser les résultats visés l’aide à les mettre en mémoire,

tant il est vrai qu’on mémorise mieux ce dont on sait qu’on aura à se

resservir (observation amplement confirmée par la gestion mentale).

Pendant les cinq premières minutes, toujours débuter par une activité

très facile, rituelle, utilisant des résultats bien connus (par exemple la

table de 2 ou une partie de la table de 2) ; cette étape est destinée à

focaliser l’attention et permet à l’enfant de démarrer en situation de

réussite.

Pendant les cinq minutes suivantes, faire trouver un nouveau

produit à partir de ceux déjà connus. Pour cela on pourra :

reconstruire le résultat à partir d’un résultat mémorisé : par

exemple, si l’élève connaît 2 x 5, lui faire trouver 3 x 5 à partir

de 2 x 5, en raisonnant ainsi : « 3 fois 5, c’est 2 fois cinq et

encore cinq, donc c’est 10 et 5, c’est-à-dire 15 » ;

chercher le résultat dans une table de Pythagore de la

multiplication et le faire surligner en couleur ;

inscrire une liste de 3 réponses à choisir pour un produit, et faire

trouver la bonne réponse. Par exemple : 3 x 5 = 10… 12… 15


chercher le résultat à l’aide de cartes recto-verso, de quadrillages

(voir l’Idée 68), ou d’une calculatrice ;

faire verbaliser chaque fois ; faire écrire 3 x 5 = 15, puis faire

compléter 3 x 5 = ?

Ne pas prévoir plus de 2 ou 3 nouveaux résultats par séquence.

faire calculer mentalement dans tous les sens :

se concentrer sur quelques résultats comme 2 x 3 = 6

ou 3 x 4 = 12, et faire raisonner et verbaliser « dans tous

les sens » :

6, c’est 2 fois 3.

dans 6, il y a 3 fois 2.

dans 6, il y a 2 fois 3.

6 = 3 x ?

6 = 2 x ?

6 : 2 = 3.

6 : 3 = 2.

Revenir toujours sur les acquis avant d’introduire un nouveau

résultat.

Dans tous les cas, à la fin de cette séquence, faire dire à l’enfant ce

qu’il sait, ce qu’il a appris et comment il a fait pour trouver le résultat


1
afin de démarrer en situation de réussite .

1- Sur la pédagogie de l’apprentissage des tables de multiplication, on pourra consulter

le site Internet de H. Planchon et M.O. Roux : http://www.acim.ouvaton.org/spip.php?

article25
IDÉE

70

COMMENT RETROUVER LA TABLE DE 9 AVEC LES


DOIGTS ?

Pour trouver 9 x n, placer dix doigts devant soi à plat sur la table,

ième
abaisser le n doigt, et il n’y a plus qu’à lire le résultat. Mais

attention à ne pas confondre dizaines et unités !

Exemple :

9 x 4 ; le quatrième doigt est baissé, il y a donc 3 doigts levés à

gauche et 6 doigts levés à droite du doigt baissé ; on lit 9 x 4 = 36


IDÉE

71

RÈGLE DE TROIS OU PROPORTION ?

L’histoire de l’enseignement des maths se confond avec celle de

cette règle, qui entre ou sort régulièrement des programmes. Le

trouble dans son acquisition est assez répandu, et l’école a du mal à

l’enseigner dès le primaire. Sa maîtrise doit se renforcer tout au long

de la vie.

Le terme « règle de trois » désigne ici le type de raisonnement basé

sur le passage à l’unité. Par exemple « Si 4 stylos valent 2,42 euros,

combien coûtent 14 stylos ? » Pour résoudre ce problème, on peut

passer par l’unité, étape intermédiaire qui ne figure pas dans la

demande initiale. Puis on multiplie le prix d’1 stylo par 14, soit

Cela s’écrit avec peu de formalisme mathématique. Il faut bien

savoir mettre en mots (« Un stylo coûte 4 fois moins, et 14 stylos

valent 14 fois plus »), manier multiplication et division, avoir une

pensée mobile passant de l’une à l’autre, et avoir de la logique

(« Si 4 stylos… alors un stylo… et donc… »).

L’ennui de ce procédé est la difficulté de la division, et le jeune

peu à l’aise avec le calcul tendra à inverser 2,42 : 4 et faire 4 : 2,42. À

charge pour l’adulte de lui faire alors découvrir le calcul dans l’ordre

l’inverse de l’écrit : d’abord 2,42 x 14 puis division par 4.

Mais dans nombre de situations, on n’est pas obligé de passer par

le prix d’1 stylo : si on cherche le prix de 8 stylos, ou de 2, ou de 10,

on trouve plus vite avec le double des 4 stylos, la moitié ou le double

ajouté de la moitié. Donc, en fonction des nombres, on peut raisonner

par proportions, si on a la notion que 8 est le double de 4. Alors on


introduit les tableaux de proportionnalité et l’égalité des rapports,

e
abordables plutôt en 6 .
IDÉE

72

TRAVAILLER LES PROPORTIONS

Une proportion est un rapport entre deux quantités. Un très jeune

enfant peut vivre cette expérience : plus on est nombreux, plus on met

d’assiettes et de verres sur la table. Plus tard, il comprendra que dans

notre société, plus on achète, plus on paie. Au collège, il connaîtra

assez les magasins pour savoir que le prix de 3 disques est le triple de

celui d’un disque (sauf s’il y a une promotion !). Il sait aussi que plus

on est nombreux à table, moins chacun mangera d’un même gâteau

(la taille d’une part est inversement proportionnelle au nombre

d’invités).

Pour faire sentir qu’une quantité varie en fonction de l’autre, on

prend des jetons et on dit : « La règle du jeu est que tu dois toujours

avoir un jeton de plus que moi. Si j’ai 5 jetons, combien dois-tu en

avoir ? Si j’en ai un seul ? 3 ? 20 ?... » L’enfant observe que les parts

varient à l’infini. Il note les couples de nombres et, selon l’âge, fait un

graphique avec la part fixée en abscisse et l’autre en ordonnée : on

obtient des points alignés, sortes de « photos » de cette situation.

« Changeons la règle : tu dois maintenant avoir toujours le double

de moi. Dis-moi ta part et la mienne. » Si le jeune répond : « Je ne sais

pas combien tu en as ! », c’est qu’il sent laquelle doit être fixée pour

calculer l’autre. On répond : « Combien penses-tu trouver de

possibilités ? » Une infinité.

Ici, il y a proportionnalité car on multiplie (ou on divise) une part

pour avoir l’autre. On la comprend mieux si on la confronte à des

situations de non-proportion, comme ci-dessus, à l’exemple de la

promotion commerciale.

« Changeons encore la règle : chaque fois que je pose 2 jetons, tu

dois en poser 3. »

« J’en ai posé 6 : combien dois-tu en poser ? »

« Si tu en as 12, j’en ai combien ? »

À
« À nous deux, nous en avons 15. Combien en as-tu ? »

etc.
IDÉE

73

DES JEUX POUR FAVORISER L’ATTENTION ET LA


MÉMORISATION

Les règles des jeux traditionnels s’adaptent facilement à différents

contextes : nombres, numération, calculs divers. Les nombres et les

opérations seront choisis en fonction des élèves et des opérations

travaillées. Le travail sera individuel ou en atelier.

1. Le loto

Il est bien d’avoir ou de fabriquer un jeu de loto pour la

numération, un jeu de loto de l’addition, et un jeu de loto de la

multiplication ; plusieurs niveaux étant possibles dans chaque

catégorie.

Prévoir des grilles et des cartes.

Une grille par joueur (9 à 12 cases, dont certaines peuvent être

noires). Lors de la conception de la grille, n’utiliser pratiquement que

des nombres ou des résultats connus du ou des joueurs, introduire

petit à petit un nouveau résultat qui peut facilement être reconstruit à

partir d’un autre résultat connu, la mise en mémoire étant souvent plus

difficile pour certains enfants.

Le meneur de jeu énonce un nombre ou un calcul (additif ou

multiplicatif).

Si un joueur trouve sur sa grille le nombre énoncé ou le résultat du

calcul, il place un jeton sur la case correspondante. Le premier joueur

qui a recouvert tous les nombres de sa grille a gagné.

2. Mémory

Les mêmes nombres ou les mêmes calculs retenus pour les jeux de

loto précédents peuvent servir de supports à des jeux de Mémory.

Mais il faut constituer des paires : par exemple, 6 et 2 x 3.


La règle est-celle du jeu traditionnel : les cartes sont disposées en

rectangle sur la table, face cachée. Le joueur retourne deux cartes : si

les deux nombres et/ou calculs correspondent, il gagne les deux

cartes, sinon il les replace sur la table, face cachée, et ainsi de suite.

De plus, ce jeu fait travailler la mémoire à court terme.

3. Jeu de cartes (flashcards)

Avec un bon outil informatique, on pourra fabriquer de

nombreuses cartes adaptées pour chaque enfant. Ces cartes

permettront aux élèves qui possèdent des repères visuo-spatiaux de

recourir petit à petit à des procédures de calcul car sur chaque carte

est représentée une certaine quantité d’objets dont la disposition

favorise une décomposition additive.

La carte de gauche favorise 3 + 3, celle de droite favorise 4 + 1 ;

les élèves qui en ont besoin peuvent recourir au comptage pour

trouver le résultat. Certains regroupements peuvent être donnés à

colorier pour aider à la visualisation.

Règle du jeu
Une carte est montrée au joueur puis est cachée ; l’élève doit

annoncer le nombre d’objets le plus rapidement possible. Là encore,

confectionner des cartes permettant à l’élève de réussir puis, petit à

petit, diminuer le temps où la carte est visualisée et introduire de

nouveaux calculs ; faire verbaliser en fin de jeu les décompositions

trouvées.
IDÉE

74

JEU FAISANT FONCTIONNER LES QUATRE


OPÉRATIONS

Matériel de base :

Un serpent (ou autre support) avec des cases numérotées

(de 0 à 20 par exemple) ; 10 jetons par joueur. 2 joueurs, 2 ou 3 dés.

Le nombre de dés et le nombre de faces sur les dés permettent de

faire varier les difficultés du jeu et de l’adapter au niveau et à l’âge des

élèves :

le nombre de jetons (entre 5 et 12) ;

le nombre de dés : 2 ou 3 ;

le nombre de faces des dés : 4, 6, ou 10 (se trouvent dans le

commerce) ;

dés à constellations ou dés à chiffres ;

la bande numérique peut s’arrêter à 10 ou 20 ou 30 ;

les opérations utilisées : + ; + ou – ; + ou - ou x ; + ou – ou x ou :

(si quotient exact).

Le but du jeu est de placer le plus vite possible tous ses jetons sur

la bande numérique (sans déplacement).

Règle

Chaque joueur lance les dés et effectue une opération, qu’il choisit

en fonction de ses compétences ou des consignes, entre les nombres

représentés par les dés.

Quatre cas se présentent :


si la case correspondant au résultat de l’opération est libre, le

joueur peut y placer un jeton ;

si cette case est déjà occupée par celle de l’adversaire, le jeton lui

est rendu et le joueur prend sa place ;

si cette case est déjà occupée par un jeton du joueur lui-même, il

peut ajouter un second jeton par-dessus le premier et faire

« dame » ; il devient alors « imprenable » ;

si cette case est déjà occupée par une « dame », le joueur passe

son tour. Le premier qui a placé tous ses jetons a gagné.

Exemples :

le tirage (3, 4) permet de se placer sur la case 7 (si on utilise

uniquement l’addition) ;

le tirage (3, 4) permet aussi de se placer sur la case 1 (4 - 3), ou

sur la case 12 (3 x 4).

Remarques :

Avec des dés à constellations, des élèves peuvent utiliser des

procédures de comptage, de dénombrement.

Pour favoriser le calcul, si les compétences de l’élève le

permettent, l’utilisation de dés à chiffres (à 4 faces ou 6 faces dans un

premier temps), peut être proposée.

Petit à petit, des stratégies pourront s’installer, un joueur ayant

souvent intérêt à choisir l’opération qui permettra par exemple de

prendre la place de l’adversaire ou de faire dame.

Pour les joueurs capables de choisir entre les quatre opérations et

de jouer avec 3 dés à 6 faces, il est utile de prévoir une feuille de

calcul.

Ce jeu favorise la réflexion et, s’il est utilisé régulièrement,

contribue à faire mémoriser les tables. Laisser à disposition des élèves

des tables d’addition, de soustraction et de multiplication (voire, une

calculatrice).
IDÉE

75

TECHNIQUES OPÉRATOIRES DE L’ADDITION ET DE


LA SOUSTRACTION

1- L’ADDITION

La compréhension de la technique de l’addition repose sur celle

des principes de la numération décimale de position, et la rapidité de

sa mise en œuvre nécessite la connaissance des tables d’addition.

Avant de démarrer l’apprentissage du calcul posé, il faut donc

s’assurer de ces acquisitions.

Le recours à un ou plusieurs matériels déjà utilisés pour la

numération permet d’illustrer la technique et de mieux la comprendre.

Exemple d’utilisation des pailles (voir l’Idée 49) pour

effectuer 37 + 26

étape 1 : représentation des nombres 37 et 26 avec des pailles.


Pour 37 : 3 tas de 10 pailles et 7 pailles toutes seules ; pour 26 : 2 tas

de 10 pailles et 6 pailles toutes seules (voir l’Idée

étape 2 : on réunit les deux collections de pailles :


il y a 13 pailles toutes seules, on fait donc un tas de 10 et il

reste 3 pailles.

Il y a donc 1 + 3 + 2 = 6 tas de dix et 3 pailles toutes seules.

étape 3 : on écrit l’opération :


Pour certains élèves, il est difficile d’aligner les chiffres ; dans ce

cas, pour aider au repérage, on peut par exemple surligner en couleur

une colonne sur deux.

2- LA SOUSTRACTION

L’apprentissage d’une technique de la soustraction est plus difficile

que celle de l’addition ; plusieurs méthodes existent mais la méthode

par « emprunt », qui repose sur les principes de la numération

décimale, sera privilégiée car sa mise en place pourra se faire avec le

même matériel que pour l’addition. Les difficultés viendront du fait

qu’il faudra « casser » des tas de dix, si on n’a pas suffisamment de

pailles dans les unités pour soustraire.

D’autre part, cette technique présente de nombreuses surcharges

d’écriture et ne sera enseignée qu’après un long travail préalable sur

les résultats additifs et soustractifs. Le sens des opérations, à travers la

résolution de problèmes, et le calcul mental seront exercés de façon

régulière, même si cela doit être au détriment du calcul posé.


IDÉE

76

TECHNIQUES OPÉRATOIRES DE LA
MULTIPLICATION ET LA DIVISION

1- LA MULTIPLICATION

La compréhension de la technique usuelle de la multiplication par

un nombre à un chiffre nécessite la connaissance :

des tables de multiplication ;

du principe fondamental de la numération pour la gestion des

retenues.

Elle est un préalable indispensable au passage à un multiplicateur

à deux ou trois chiffres.

Lorsqu’on passe à la multiplication par un nombre à deux chiffres,

il faut rajouter la connaissance de la règle de la multiplication d’un

nombre par 10, 20, 30…

Les élèves qui ont beaucoup de difficultés pour mémoriser les

tables ou pour « aligner » les chiffres ne devront pas être mis en échec

par les activités de calcul posé ; Il ne faudra pas hésiter à leur laisser

l’usage d’une calculatrice lors des activités de résolution de

problèmes, et pour eux, il faudra favoriser les activités donnant du

sens aux opérations et le calcul mental (en particulier la reconstruction

de résultats inconnus à partir de résultats connus).


1
On pourra utiliser la technique « per gelosia », qui ne vise pas à

remplacer la technique classique mais vient en complément. Elle

constitue une autre approche de la multiplication, qui permet aussi

d’éclairer la technique classique.

Elle présente les avantages suivants :

elle est plus simple que la méthode moderne ;

les erreurs sont faciles à détecter ;

pas de gestion des retenues de multiplication, seulement

d’addition ;
on peut s’arrêter et reprendre quand on veut ;

pas de décalage de ligne à gérer ;

pas de difficulté pour les zéros intercalés comme dans 205.

Son seul inconvénient est une certaine lourdeur de mise en œuvre

car il faut dessiner un tableau.

Exemple

Soit à multiplier 24 par 35 :

Dessinez tout d’abord un carré, et placez ainsi les nombres à

multiplier :

Tracez ensuite les diagonales des cases :

On remplit ensuite chaque case par le produit des nombres

correspondants, ici 4 × 3 :

On remplit de même les autres cases :


On additionne maintenant les nombres à l’intérieur de chaque

diagonale et on écrit les résultats en regard à l’extérieur du

tableau :

Le résultat est donc : 840.

2- LA DIVISION

Enseigner une technique de la division ne pourra se faire qu’après

un long travail sur la numération, sur les propriétés de la

multiplication et sur la mémorisation des tables. La maîtrise de la

technique de la soustraction est également nécessaire à la mise en

place de celle d’une division. Pour aider les élèves dans la mise au

point de cette technique et pour alléger la mémoire de travail, le

répertoire multiplicatif du diviseur sera écrit à côté (par exemple, si le

diviseur est 8 on fournira la table de 8), et toutes les soustractions

intermédiaires seront posées.

La technique opératoire de la division est la technique qui

déclenche le plus d’erreurs : elle ne sera que rarement travaillée avec

des élèves ayant des troubles du calcul. Le travail sera orienté

principalement sur le sens des opérations à travers la résolution de

problèmes et le calcul mental.


1- Cette technique de multiplication (appelée aussi italienne, ou grecque) vient d’Orient.
e e
Elle a été très utilisée aux XIV et XV siècles. Son nom italien, per gelosia (par jalousie)

provient des fenêtres « à jalousies », sorte de volets à travers lesquelles la lumière passe

en diagonale, et qui permettent de voir sans être vu (pratique pour les maris jaloux...).
IDÉE

77

QU’EST-CE QUE MESURER ?

Les quantités discontinues, exprimées par des nombres,

comportent moins d’embûches que les quantités continues, que l’on

mesure. Les pommes qu’on peut dénombrer, en commençant à

compter 1, 2,… avec la main, sont un exemple de discontinu (ou

« discret »). Si elles ont fusionné en compote, on ne les compte plus,

on est dans le continu. Pour savoir quelle quantité on a, on doit

mesurer les tasses, les bocaux, les litres de compote (en commençant

par le fond, figurant le zéro).

Mesurer devient nécessaire si on veut échanger entre humains :

l’échange d’un sanglier contre un menhir est un système qui peut

convenir pendant quelques années, mais si on veut troquer un

morceau de sanglier, la viande devient du continu, et on doit la diviser

en parts plus petites : on est amené à mesurer et à graduer. On rend

donc discontinu du continu pour exprimer une quantité de matière

par un nombre directement lié à l’unité-étalon choisie. Une fois

l’étalon choisi, il s’agit ensuite de le reporter un certain nombre de

fois, sans chevauchement, ni espacement, en comptant, afin de

réaliser une partition de cette matière.

Toute la physique est fondée sur ce besoin de chiffrer les

phénomènes du monde continu où nous vivons (le temps et l’espace,

abordés plus loin, sont des domaines du continu), et qui a conduit à

créer une grande variété d’instruments gradués : balance, horloge,

verre mesureur, thermomètre, audiomètre…


Soit un ensemble X quelconque. Un ensemble P de sous-

ensembles de X est une partition de X si :

aucun élément de P n’est vide.

l’union des éléments de P est égale à X.

les éléments de P sont deux à deux disjoints.

Les éléments de P sont appelés les parties de la partition.


IDÉE

78

DIFFÉRENTES FAÇONS DE MESURER

Pour Piaget, la mesure est un cas particulier des opérations

spatiales. Il a observé l’évolution de la notion de mesure chez l’enfant

à travers l’activité suivante : une tour est construite au sol avec des

cubes ; sur une table basse, l’enfant doit construire avec des cubes

d’une taille différente une autre tour qui doit avoir la même hauteur

que la tour modèle. Diverses baguettes et ficelles de longueurs

différentes sont mises à sa disposition.

Vers 3-4 ans, l’évaluation perceptive est directe : l’enfant copie


simplement le modèle à vue : « J’ai de bons yeux ». Soit il regarde
une fois le modèle et fait une copie approximative, soit il compare les

deux en construisant, par des va-et-vient du regard de la hauteur du

modèle vers la hauteur de la copie (premier souci de vérification,

inconscient).

Vers 5 ans, l’enfant veut porter la copie à côté du modèle par


une technique facilitatrice : un bâton tenu comme un fusil à hauteur

des yeux pour viser le sommet du modèle ; ou un bâton posé sur le

haut des deux tours ; ou déplacement du modèle et de la copie

rapprochés au même niveau pour évaluer à vue (il n’a plus confiance

dans le seul transport visuel).

Vers 6 ans, il pose une main en haut de la tour, une autre à la


base et essaie de transporter cette hauteur à titre d’intervalle vide,

en gardant la position des mains constante. Il utilise un moyen terme :

son propre corps. Il prend conscience de ce raisonnement par

transitivité : si le modèle est égal au moyen terme, si celui-ci est égal à

la copie, alors le modèle est égal à la copie.


Ensuite, il utilise des objets : il bâtit une troisième tour qu’il porte

de la copie au modèle, ou il prend un bâton de longueur égale à la

tour : la réplique est mobile. Il arrive que l’enfant évalue globalement

la longueur, se serve d’un bâton plus long et marque du doigt le point

coïncidant avec le sommet.

Plus tard encore, l’enfant est capable de considérer qu’une

longueur n’est plus à mesurer d’emblée dans sa totalité. Il arrive à se

servir d’un bâton plus petit en le reportant un certain nombre de fois

sur le modèle et sur la copie.

Il nous semble intéressant de laisser les jeunes passer par ces

différentes étapes, où ils inventent des outils, avant de leur faire

prendre un double décimètre gradué en centimètres.


IDÉE

79

RENDRE LE TEMPS VISIBLE

Tous les termes désignant le temps sont véhiculés par le langage, la

seule chose visible par quelqu’un vivant hors de la société, ou un

enfant sourd, est l’alternance des jours et des nuits ; les saisons se

voient aussi, mais sont déjà trop espacées pour construire une idée

permanente du temps. Pour éduquer la notion de temps chez une

personne qui ne l’acquiert pas spontanément, ce manque d’existence

physique du temps implique qu’on doit sans cesse avoir recours à un

dispositif concret, visible, à poser devant soi : bougies, cahiers,

photos, calendriers et horloges. Il faut du temps pour travailler le

temps, comprendre qu’il est irréversible et trouver des moyens de

comparer des durées.

Chez les petits, on structure la temporalité grâce à des activités

comme la cuisine, le jardinage ou la création d’un journal de bord,

d’un cahier de vie. Dans un grand cahier, on laisse les premières

pages blanches pour représenter le passé de l’enfant. Chaque jour, à

un moment régulier, on détache avec lui le petit papier d’un

éphéméride et on le colle sur une page du cahier. Quand on en a

collé 7 sur la page, on change de page (pour matérialiser

l’équivalence 1 semaine = 7 jours). Et puis, on colle photos, images

découpées dans des revues ou des publicités, cartes postales, tickets

de métro… pour raconter sa vie quotidienne. Chaque jour, on déplace

des papiers autocollants marqués « aujourd’hui », « hier »,

« demain ». Cela permet de visualiser qu’« aujourd’hui » change tous

les jours de place, de même que « hier » qui est constamment avant et

« demain » qui est après (spatialement, vers la droite).

Peu à peu, les pages blanches du début de vie se remplissent, à

l’occasion, grâce à des photos de lui bébé. Ce cahier fournit aussi un


instrument de travail riche et précieux pour la réintégration dans la vie

quotidienne des enfants traumatisés crâniens, des adultes illettrés, des

patients âgés, déprimés, au chômage ou malades mentaux, qui tirent

un grand profit du fait de se projeter dans l’avenir. Ces traces donnent

de l’épaisseur à leurs journées.

De plus, nous conseillons chaque fois qu’il est possible dans la

conversation, de montrer son agenda, le calendrier collé au frigo ou

tout autre support visuel pour parler du prochain week-end, du

voyage passé.

Dans une école ou un centre de formation à l’apprentissage, on

peut accrocher au mur une bande de papier collective (ou une bande

par jeune) pour repérer les activités de l’année. Des cases sont prêtes

pour placer les papiers d’un petit éphéméride. Les apprentis ont

souvent besoin de couleurs pour distinguer les semaines travaillées ou

chômées, 5 semaines de vacances salariées, les anniversaires (un

apprenti n’a pas le même salaire horaire selon l’âge). Quand leur

emploi du temps est-il fixé ? Change-t-il ? On verra tel enseignant à

telle période, combien de fois dans l’année ?

On aide ainsi à l’anticipation des examens, à la préparation de

dossiers. Avec les futurs agriculteurs, on peut aussi noter les périodes

de récoltes (frise avec photos de plantes : sacs de graines accrochés,

durée de croissance des radis de 18 ou 21 jours, …).


IDÉE

80

DIFFÉRENCIER ÉVÉNEMENT ET DURÉE

Il s’écoule deux ou trois ans entre le moment où un enfant sait lire

l’heure (vers 7 ans) et celui où il sait dire : « Je viens

dans 10 minutes ». Car « Il est 9 h 15 » est une lecture instantanée de

l’heure, représentable par un point sur une droite, alors que

« dans 10 minutes » implique une durée, un intervalle entre deux

points.

Parmi les problèmes de langage posés par le temps, on notera que

« Dans une heure » ou « Il y a une heure » est souvent compris « À

une heure ».

Il y aura donc à respecter une progression entre des problèmes

comme : « Il est 7 h, je dois travailler pendant 2 h, à quelle heure

aurai-je fini ? » (question portant sur l’événement final), et d’autres

comme : « J’ai commencé à jouer à 6 h, j’ai fini à 9 h, combien de

temps ai-je joué ? » (durée entre deux moments) ».

Enfin, le plus difficile est ce qui porte sur l’événement initial et

oblige mentalement à un retour en arrière, une réversibilité : « Je dois


étudier pendant 3 h, si je veux avoir fini à 11 h, à quelle heure dois-je

commencer ? »

La montre numérique ne signale que les instants. Cette durée entre

deux faits ponctuels sera rendue visible si on offre à l’enfant une

montre à aiguilles où elle apparaît grâce à l’espace du cadran balayé

par l’aiguille. La lecture d’une montre numérique est basée sur de

bons acquis en numération et en calcul. La montre à aiguilles

demande beaucoup de prérequis. On peut les avoir côte à côte chez

soi pour s’habituer aux deux lectures.


IDÉE

81

FAIRE UN ARBRE GÉNÉALOGIQUE

Il existe deux sortes d’arbres généalogiques : le plus simple est-

celui dont la pointe part de l’enfant lui-même et aboutit à huit arrière-

grands-parents (arbre d’ascendance) ;

Le modèle d’arbre généalogique le plus difficile part d’un couple

d’ancêtres pour arriver à tous les arrière-petits-enfants de la même

génération que notre enfant. Il est alors l’un parmi de nombreux

cousins : il lui faut se décentrer, d’où une plus grande difficulté à se

situer.
L’arbre généalogique est intéressant à divers titres.

Sur le plan psychologique : à notre époque de familles

recomposées, il permet de savoir d’où l’on vient, de se constituer des

racines et une identité. Cette activité permet aux petits de questionner

les grands autour d’anciennes photos, de parler des souvenirs, fêtes,

événements heureux ou non, régions de naissance, noms de famille…

Sur le plan logique, il fait travailler les relations : par exemple, si

Lise est la cousine de Belle, alors Belle est la cousine de Lise : la

relation est symétrique. Par contre, si Léo est l’oncle de Rémi, alors

Rémi n’est pas l’oncle de Léo mais son neveu. Devant un arbre

constitué, on peut jouer au portrait, et faire deviner quel personnage

on a choisi, en travaillant les déductions :

– J’ai 2 garçons. – Alors tu es Bruno ou Paul.

– Tes parents sont-ils sur l’arbre ?

– J’ai plus de garçons que de filles.

– T’appelle-t-il maman ?

– Quand tu présentes Bastien à quelqu’un, quelle phrase

peux-tu dire ?

– As-tu le même nom de famille que moi ?

Les possibilités sont nombreuses.


Sur le plan du langage, il permet de se familiariser avec des mots

comme neveu, arrière-grand-père maternel, gendre, belle-sœur…


IDÉE

82

VIVRE LES ÉVÉNEMENTS AVEC LE CORPS

Devant le cadran d’une horloge à aiguilles, on dit : « Ça débute

quand tu dors » (zéro), et l’enfant mime qu’il dort. On fera de même

pour les heures types de la journée (on les fera tomber sur l’heure

« juste » ou « la demie »). Avec un jeune enfant, on affichera au mur

cinq photos d’actions et on y associera le dessin des horloges. Il

montrera bientôt la bonne horloge à l’heure de dormir ou manger.

Plus tard, il répondra à des questions plus précises :

« Es-tu déjà allé à une grande fête ? » : oui.

« À quelle heure t’étais-tu couché ? » : à 11 heures.

« Que fais-tu d’abord le matin ? » : « Je mange, je me lave, je

m’habille… » « Toujours dans le même ordre ? » : non.

« À quelle heure arrives-tu à l’école ? » : à 8 h 23.

Quand on a une activité exigeant une certaine organisation de ses

actions, on peut raconter leur ordre, en chercher un autre. En cuisine,

on ne peut pas toujours inverser : la pâte feuilletée implique un

respect strict de la succession des actions, alors que le quatre-quarts

admet plus de souplesse. La prise de conscience de l’ordre temporel

e
reste ardue même pour des jeunes en 6 : ils ont du mal à relater une

expérience qu’ils viennent de faire, alors qu’ils revoient en détail le

matériel et les actions séparément. Ils ré-évoquent mal la chronologie

d’une leçon vue en classe. Le travail sur le temps s’effectue donc sur

les plans moteur et verbal.

On peut symboliser des actions sur des cartons (sauter = 0, crier =

V, arrêter = *, …) et les exécuter dans des ordres variés : « Je fais

plusieurs actions, tu montres les cartons » ; « Je montre une série de

cartons, tu agis dans le même ordre. »


L’ordre est partout : pour une addition, unités d’abord, dizaines

ensuite… ; dans les graphiques, l’axe des abscisses avant l’axe des

ordonnées. Dans un calcul, il faut faire la multiplication avant la

division.
IDÉE

83

OBSERVER LES HORLOGES À AIGUILLES ET LES


HORLOGES NUMÉRIQUES

Devant une montre à trois aiguilles, on frappe des mains avec

l’enfant à chaque seconde de la trotteuse. « Que fait chaque aiguille ?

Laquelle est la plus rapide ? » À propos de la trotteuse et de la grande

aiguille, puis de la grande et de la petite : « Quand l’une fait un tour,

que fait l’autre ? La grande est allée d’ici à là, la trotteuse a fait

combien de tours ? » Pour un enfant plus âgé : « Dans la journée la

petite fait 2 tours, la grande, 24. Quand la petite fait un tour, l’autre en

fait 12. Comme il faut 2 tours… »

Pour coordonner trois mouvements de vitesses différentes, on imite

le parcours des aiguilles. Chacun a un cadran circulaire avec des

graduations sans nombres. On part ensemble de zéro : l’un fait

avancer la grande aiguille (un bâton ou un lacet tenu au centre) d’un

tour, et l’autre la petite (un bâtonnet ou le lacet raccourci) d’un trait à

l’autre à chaque quart d’heure.

Signalons une difficulté : la petite avance doucement (elle est plus

souvent entre deux nombres) et se trouve à mi-chemin entre le 4 et

le 5 s’il est 4 h 30.

Une heure s’écoule ainsi en accéléré. On inverse les rôles.

Il est difficile de s’orienter sur un cercle : 12 portions égales, place

des chiffres, tour dans un seul sens se travaillent en fabriquant une

montre avec une assiette en carton, 2 ou 3 aiguilles en carton fixées,

avec, puis sans modèle sous les yeux.

On prend conscience sur les deux horloges du regroupement des

unités par 60 ou par 24, en comptant à voix haute jusqu’à 59. À 60,

on voit qu’ensuite il y a 1, 2, 3… car le compteur s’est remis à zéro.

Mais on peut aussi dire : « 59, zéro, un… » Pendant que l’un dit

« 60 secondes », l’autre dit « 1 minute », et on demande qui a raison,

pour constater l’équivalence entre les deux.


IDÉE

84

VIVRE LES DURÉES AVEC LE CORPS

Il est impossible d’agir sur le temps, qui est par nature toujours

passé ou encore à venir, et donc d’opérer directement, d’expérimenter,

de revenir en arrière. Comment estimer des durées, difficiles à

conserver, représenter et comparer ? On peut au moins en parler,

susciter des réflexions.

Prenons des photos (ou étiquettes) parlant d’actions déjà vécues

par l’enfant : tirer la langue, attendre au feu rouge, laver la voiture,

voyager pour aller chez mamie, peindre une pièce, faire pipi, cuire un

œuf à la coque, un œuf au plat, un œuf dur, se faire couper les

cheveux chez le coiffeur, voir un film ou une publicité à la télé, faire

un gâteau…

D’abord le petit enfant jauge la durée globalement : le très court et

le très long, pas le « moyen ». Il classe les photos en deux tas.

Ensuite, il sent des relations d’égalité, d’inégalité : « aussi long »,

« plus long que »... : « On a roulé plus longtemps pour aller chez Jules

que pour aller chez mamie. C’est plus long de marcher jusqu’au parc

que pour aller jusqu’à la poste. Les devoirs ont duré plus aujourd’hui

qu’hier ». S’il n’a pas inventé lui-même un moyen pratique pour

mesurer, autre que la montre (créer un sablier ou faire la course), on

lui suggère : « Tu dis l’alphabet, je récite ma poésie en même temps »,

etc… On dit aux tout-petits : « Tu as trois nuits à dormir et on part »,

on peut dire à des plus âgés : « Nous avons pu faire 3 parties de

cartes, chanter 5 fois tel chant, … »

Il peut donc classer les photos en plusieurs tas de durées

équivalentes, eux-mêmes sériés entre eux (classification et sériation).

Pour cela, il confrontera chaque durée à toutes les autres : « c’est plus

court que ça, et que ça, mais plus long que ça et c’est aussi long que

ça ».
IDÉE

85

MESURER LES DURÉES

Enfin, l’enfant devient capable de mesurer, de concevoir une unité

de mesure ainsi qu’une opération de comptage de ces unités qui sont

des parties du temps, de même durée. Ceci revient à transformer le

temps en un ensemble d’éléments distincts séparables par la pensée.

Quand il saura les unités légales de mesure, il s’amusera à trouver tout

ce qu’on peut faire en 1 minute ou en 5 minutes, en 1 heure,

1 journée, un an… C’est utile pour gérer ses devoirs à la maison.

Compter les petites graduations de la montre soulève le problème

des intervalles. Sur une droite graduée ou un grand cercle, tracés au

sol, on sautera d’un trait à l’autre en passant par 4 bâtons : pour les

durées, il faut insister sur le comptage des sauts et non des bâtons

(extrémités des intervalles).

Cette difficulté se retrouve quand les enfants mesurent des

longueurs et comptent le premier trait en disant « 1 », ou quand ils

comptent de 3 à 9 : ils ne savent pas s’ils comptent le départ ou non.

S’ils se déplacent sur un axe orienté tracé au sol avec des nombres

relatifs, ils comptent mal les pas à faire pour aller de -3 à + 5. Ils

comptent les extrémités, par contre ils sautent le zéro !

Après le CM1, on pourra changer d’origine (ce n’est plus

seulement minuit) et compter les minutes séparant deux points

quelconques du cadran (voir l’Idée 88).


On peut passer d’une horloge à l’autre avec le programme de télé,

noté en écriture numérique : « Si on passe tel film où sont les

aiguilles ? », « Si elles sont ici, quel est le programme ? », « À quelle

heure finit le film ? », « Combien dure-t-il ? »

Événements et durées sont mélangés.


IDÉE

86

LES PIÈGES DE L’HORLOGE À AIGUILLES

Il est très ardu pour les enfants de devoir coordonner deux points

de vue pour une seule lecture : on dit 4 si la petite aiguille est sur le 4,

mais on ne le dit pas si la grande aiguille y est. Pour distinguer les

heures des minutes, on peut fabriquer trois horloges en plastique

transparent (rhodoïd) : l’une de 0 à 11 pour la petite aiguille, l’autre

de 0 à 59 pour la grande aiguille, la troisième qui superpose les deux.

Il existe des montres avec des aiguilles de couleurs différentes et deux

cadrans correspondant à la couleur. On lit toujours dans un certain

ordre : la petite aiguille avant la grande, même si la petite est plus

lente.

Il faut s’entraîner pour apprendre à dire autre chose que ce qu’on

voit : « Il est 13 h 45 », alors qu’on voit 1 et 9. On peut donc nommer

« menteuse » la grande aiguille des minutes. Elle dit quelquefois la

vérité : à moins 10. Mais quand les aiguilles sont sur le 12, on dit

« Midi pile » ou « Minuit ». Comparer à l’horloge numérique qui

note 00 : 00, puis 00 : 05…

Et puis, on ne dit pas tout ce que fait la grande aiguille, mais plutôt

sa position sur les gros traits-repères : 45, 50, 55… Pour aider à

compter plus vite de 5 en 5, on chuchote 1, 2, 3, 4, et on dit 5 à voix

haute en tapant des mains ; 6, 7, 8, 9, à voix basse, puis 10 à voix

haute, etc.
IDÉE

87

LIRE L’HEURE « COMME LES GRANDS »

On doit apprendre que la partie droite du cadran indique l’heure

plus quelque chose, et la gauche, l’heure suivante moins quelque

chose : 2 h 35 c’est aussi 3 heures moins 25.

On peut déplacer la grande aiguille dans le sens normal,

entre 2 h 35 et 3 heures juste, en mesurant la durée intermédiaire :

de 35 à 40, ça fait déjà 5 minutes, de 40 à 45…

On peut aussi déplacer la grande aiguille à l’envers en partant

de 3 h juste, et dire : « 3 heures, 3 heures moins 05, 3 heures

moins 10,... »

On peut travailler les complémentaires à 60 avec 60 pailles à

boire dans la main d’un enfant (elles représentent des minutes), 0 dans

la main d’un autre. L’un en passe 5 à l’autre, chacun dit ce qu’il a :

« Moi 55 et toi 5 ». On passe à nouveau 5 à l’autre, etc… jusqu’à

obtenir 0 et 60.

On entoure une très grande horloge, tracée au sol, d’une ficelle

qu’on déroule ensuite pour passer du circulaire au linéaire. On fait

parcourir cet axe gradué entre 2 et 3 avec 60 pailles. À chaque pas, on


en pose 1 (ou 5 après 5 pas) : si l’on se retourne, on voit 2 h et 05,

puis 2 h et 10... Quand arrivent les 29 dernières minutes, on doit

coordonner deux visions de la même situation : on regarde derrière soi

et on dit 2 h et 35 ; devant soi on voit 3 moins 25 (ce qui reste dans

l’autre main). On pose des questions : « Débrouille-toi pour

avoir 10 pailles devant toi. Quelle heure est-il ? »


IDÉE

88

CALCULER UNE DURÉE : RETOUR À L’ORIGINE

Le calcul d’une durée est l’une des difficultés du domaine du

continu et de la mesure.

Voici un problème : « Quelle est la durée du jour si le lever du

soleil est à 4 h 44 et le coucher à 19 h 06 ? »

L’heure du lever du soleil et du coucher sont des points :

04 h 44 et 19 h 06. Si vous arrivez après, il est trop tard. Or, nous

savons tous que pour trouver la durée du jour, il faut soustraire :

l’heure du coucher, moins l’heure du lever. Comment est-il possible

d’enlever un point d’un autre point situé ailleurs ? La réponse peut-elle

être une durée, qui est de toute autre nature ?

Dans ce cas, réfléchissons avec l’enfant sur le sens réel de

chacune des données. « Que représentent les « 4 » du lever ? Où se

situent-ils ? » L’enfant découvrira qu’il y a eu un minuit : c’est

l’origine. Depuis minuit, il s’est donc écoulé 4 intervalles d’une heure

(pour arrondir) où la partie de la Terre où il se trouve n’était pas

éclairée. L’enfant pose 4 allumettes bout à bout. De même, pour « Il

se couche à 19 h », il retourne à l’origine : minuit. Il ajoute des

allumettes pour aller jusqu’à 19. Nos questions le guident : « Montre

avec les allumettes le temps total écoulé (il montre toutes les

allumettes) ; « Montre la nuit » (il montre les 4) ; « Arrange-toi pour

voir seulement le temps du jour » (il retire les 4). Il découvre

que 15 intervalles se sont écoulés entre le 4 h et le 19 h punctiformes.

L’opération prend alors tout son sens.

Il faut comprendre que les opérations dans le domaine du continu

ne se réalisent jamais sur des points, mais sur des intervalles.

Ainsi, pour compter le temps, on débute à 0 heure. Qui n’a pas vu

un enfant faire le top-chrono en disant « 1 » ?


IDÉE

89

LE CORPS ET LES MATHS : DROITE OU GAUCHE ?

La latéralité est une dominance fonctionnelle (principalement de

l’œil, de la main et de la jambe) qui repose sur un fondement

neurologique et différents facteurs de maturation.

Ressentir la différence d’adresse entre les deux côtés de son corps

permettra de pouvoir déterminer un côté droit et un côté gauche, et

ainsi d’avoir une base d’orientation spatiale (complétée par les notions

haut/bas ; devant/derrière, …). Ce processus permettra un

développement harmonieux de l’enfant.

La bonne coordination entre l’œil et la main, indispensable aux

prérequis de l’écriture, dépendra en partie de l’affirmation de la

latéralisation d’un œil (œil directeur) et d’une main (dominance

manuelle).

Repères d’âge :

2 à 3 ans : dominance oculaire fixe + dominance du membre

inférieur

5 ans : instabilité dans la dominance manuelle.

6 ans : dominance manuelle plus stable (correspond à la fin du

processus neurologique de latéralisation).

L’enfant affine son orientation spatiale et peut nommer sa gauche

et sa droite sur lui.

7 ans, 8 ans : c’est à partir de cet âge qu’on peut dire qu’un enfant

est latéralisé. Il continue en effet à progresser encore dans le domaine

de l’orientation spatiale et peut enfin nommer la gauche et la droite

sur autrui. Il a donc accès à la réversibilité.

Pour ce qui nous intéresse ici, une bonne latéralité est à la base de

la lecture : b ou d ; rap ou par. Dans la numération, 13 n’a pas la

même signification que 31 : on place les allumettes à droite, les


paquets de 10 à leur gauche, les paquets de 100 encore plus à

gauche, mais on lit et on écrit ensuite en sens inverse. Les quatre

opérations demandent une aisance haut/ bas ; droite /gauche. La

géométrie également.

On peut mettre un ruban autour de la main pour faire prendre

conscience de sa préférence pour se brosser, manger, etc…

Il vaut mieux éviter d’imposer trop tôt un choix ou de changer une

latéralité déjà établie. On veillera à organiser des postures correctes de

travail en classe et à la maison.

La plupart des troubles de la latéralité sont dus à une latéralité

empêchée. On voit même consulter en orthophonie ou en

psychomotricité des droitiers contrariés ! Distribuer des cartes, faire les

marionnettes, frapper un ballon du pied, regarder d’un œil à travers un

trou seront les tests de dépistage.


IDÉE

90

COMPTER SUR LES DOIGTS ?

Chercheurs belges et français suggèrent que l’usage des doigts est

bien une étape préalable utile à l’apprentissage du calcul et à la

construction du nombre. Les enfants ne parvenant pas à se représenter

leurs doigts présentent des troubles plus ou moins graves de

l’arithmétique.

On peut entraîner régulièrement les performances perceptivo-

tactiles, quelques minutes, selon ces étapes (souvent sur plusieurs

mois) :

« Ouvre 3 doigts d’un coup » (sans les allonger un à un).

« Pose tes deux mains à plat sur la table. Ouvre 9 doigts. »

« Je cache tes doigts avec un cahier » (ou « Tu fermes les yeux »).

« Tu ne les vois pas, mais je les vois. Ouvre 8 doigts. »


On gardera toujours la même configuration pour un même

nombre… :

« Ouvre 4 doigts de deux façons différentes. »

« Regarde mes doigts : combien ai-je de doigts ouverts ? »

« Ferme 2 doigts » (exiger que ce soient les mêmes que lors de

l’ouverture des 8). Fermes-en 6… »


« Je te montre mes doigts, combien sont fermés ? »

« Si tu as 4 doigts ouverts, combien sont fermés ? Alors tu peux

dire : « 4 est l’ami de 6 ».

« 9 est l’ami de combien ? »

« Montre avec tes doigts : 7 + 3 = 10 » (ouvrir 7 puis les 3

manquants), « 3 + 7 = 10 ; 10 – 3 = 7 ; 10 – 7 = 3 ».

« Combien font 8 + 2 ? Combien font 10 - 8 ? et 10 - 2 ?… »

L’enfant pourra bientôt répondre sans se servir de ses doigts. S’il en

a besoin plus longtemps, il vaut mieux l’accepter.


IDÉE

91

TRAVAILLER LES IMAGES MENTALES À L’AVEUGLE

Une activité utile pour exercer les images mentales chez l’enfant,

repose sur la stéréognosie (connaissance par le toucher). Soit des

objets cachés dans un sac opaque, ou derrière un écran, ou avec un

masque : l’enfant doit sortir deux objets identiques (classification), ou

un objet identique à un autre qui lui est montré, ou sortir des objets de

taille croissante (sériation), ou dessiner en vraie grandeur ou en

réduction l’objet qu’il touche à l’intérieur du sac… Les objets cachés

peuvent être des objets parmi les plus usuels (paire de gants, boîtes

d’allumettes) ou au contraire des objets peu familiers, géométriques et

composés de formes différentes. Les doigts analysent la consistance, la

matière, le volume, l’ouverture des angles, le nombre d’éléments…

On peut également exercer « à l’aveugle » diverses activités motrices :

épluchage, pliage, confection d’un nœud.

L’œil est un organe globalisateur. Dès l’instant où l’on supprime la

vue, on oblige à se placer dans l’analyse. Au début, les mains de

l’enfant restent inertes ; puis elles explorent au hasard ; enfin, elles

tâtent méthodiquement et vérifient en revenant souvent au point de

départ. L’enfant apprend à faire coïncider point par point la réalité

avec sa perception sensorielle, se créant ainsi une image intérieure.

Cela permet de repérer son degré d’organisation.

L’exploration tactile peut être une bonne technique pour obtenir le

silence et la concentration : on obtient facilement qu’un groupe

d’enfants se calme dès qu’on pose une question dont la réponse est

dans le sac.

On peut inventer toute sorte de jeux avec les objets cachés dans le

sac : évaluer des masses en les soupesant, ou comparer des volumes,

compter et sortir d’un coup 9 morceaux de sucre ;

extraire 357 allumettes en tâtant des paquets de 10, de 100… et

opérer sur ce nombre (en ajouter 22 ; en retirer 13…)


IDÉE

92

APPRENDRE À SE METTRE À LA PLACE D’AUTRUI

La capacité à se situer dans la perspective d’autrui, appelée

décentration, construit notre représentation du monde. Décentrer,

c’est inverser les relations elles-mêmes. C’est un des maillons de la

mobilité de pensée. Un petit enfant qui croit qu’il est caché parce

qu’en fermant les yeux il ne voit plus les autres, n’a pas encore appris

à se décentrer. Il pense que tout le monde voit comme lui.

Plus tard, l’adulte devra momentanément abandonner cette

centration exclusive lorsqu’il sera à un carrefour routier et qu’il devra

se placer mentalement en dehors de sa voiture pour penser : « Qui

passe en premier ? » Puis il se retrouvera face à son propre volant pour

décider : « Qu’est-ce que je fais ? » Mais s’il a repéré qu’il y a un

panneau imposant aux autres conducteurs de s’arrêter, il ne se posera

pas les mêmes questions. Ainsi, la vie quotidienne nous oblige à

coordonner des centrations successives : un professeur se mettant à la

place d’un élève à qui il enseigne, un élève s’adaptant sans cesse au

rythme d’un groupe d’autres, un écrivain décrivant une scène du point

de vue de tel personnage ou de tel autre, un citoyen respectant les

opinions différentes des autres...

On doit tenir compte d’autres points de vue que le sien pour

acquérir les constances perceptives, pour construire l’objet permanent,

l’espace sensori-moteur où l’on situe les objets les uns par rapport aux

autres (corps propre y compris), puis, plus tard, acquérir les différents

invariants de la pensée concrète (la substance, le poids, le volume, le

nombre, les classes et les divers éléments d’une classification logique,

etc.) : « Quel que soit le point de vue où je me place, vu de face, vu

d’en haut, ce litre de lait a toujours les mêmes propriétés. »

On peut s’exercer ainsi :


On vit d’abord l’expérience d’un objet (plan ou volume) observé

sous différents angles, en tournant autour de l’objet immobile. On

dessine ou on parle de ce qu’on voit. Inversement, on a un objet

qu’on fait tourner devant soi (par exemple, le dessin d’un

bonhomme posé à plat sur la table). On le copie dans différentes

positions de la rotation. Dans le cas d’une figure plus complexe,

on peut colorier les parties (par exemple, une barre rouge

horizontale et une barre bleue qui lui est perpendiculaire) et ne

s’occuper que d’une partie à la fois.

Pour passer à l’étape du travail mental, on pose un cache sur

l’objet quand on tourne autour ou qu’on le fait tourner. On le

reproduit dans diverses positions, sans le voir réellement. La

décentration se produit lorsqu’on est capable d’imaginer :

« Qu’est-ce que je voyais quand j’étais de l’autre côté ? », ou

« Que voit l’autre quand il est là où il est ? ».

En dessin (industriel ou non), en géométrie, on fait cela

constamment. Combien de personnes ont l’illusion de ne voir qu’un

losange quand un carré est posé sur l’une de ses pointes !

L’étape la plus difficile est de s’imaginer à la place d’une personne

qui a ses propres pensées et obligations, comme dans la conduite

routière.

Il arrive qu’on soit bloqué dans un jeu où l’enfant joue toujours de

façon hasardeuse, sans chercher à gagner. Il s’avère très fructueux de

lui demander alors ce qu’il pense que l’autre va faire, ou même de lui

donner le pion de l’autre et de lui demander de jouer à sa place, pour

l’amener à penser autrement. Une autre fois, l’enfant jouera seulement

en position défensive : il ne se décentrera que pour imaginer des

attaques de l’autre. Le faire jouer à la place de l‘adversaire l’aidera à

coup sûr à imaginer une offensive.


IDÉE

93

ACTIVITÉS DE MESURE EN UNE DIMENSION

Dans les longueurs, l’usage du corps, de bâtons, de ficelles permet

des comparaisons variées, les yeux ouverts ou non, en rapprochant les

éléments ou non.

Tailler, de loin, une ficelle de même longueur qu’un balai pendu

au mur.

Jouer à la pétanque, évaluer le chemin le plus court vis-à-vis du

cochonnet.

• Tailler deux cordons (un bleu, un rouge) de même longueur. Les

placer en vis-à-vis.

Une fois que l’enfant aura compris qu’ils sont de la même taille,

on lui demandera de :

décaler l’un d’eux.

recouvrir à l’aide d’un tunnel les extrémités gauche des deux

cordons : « Est-ce que les deux chemins ont la même taille, ou

c’est le rouge le plus long ou est-ce le bleu ? ».

Même question en déplaçant le tunnel à droite ; en posant l’un

des cordons d’une manière rectiligne, l’autre en une ligne

sinueuse ; en plaçant l’un vertical, l’autre horizontal ; en coupant

l’un d’eux en morceaux et les remettant bout à bout ; ou en

ajoutant (ou en enlevant) l’un des morceaux au cordon non

coupé.

Deux routes faites d’allumettes de deux couleurs offrent encore

plus de variations, avec les mêmes questions :

Transférer une allumette de l’extrémité d’une route à l’autre

extrémité ; faire varier ainsi les dispositions des routes ou leur

longueur à l’infini ; introduire une troisième route d’une autre

couleur ; faire fabriquer des chemins de même taille.

Juger deux parcours matérialisés, avec ou sans un troisième

instrument ; trouver des moyens pour rendre égales des routes


inégales.

Inventer un procédé pour prouver que les fenêtres de la salle ont

la même largeur ; découvrir des différences.

La mobilité de la pensée s’instaure quand les situations changent


1
et que les éléments posés sont sans cesse mobiles .

1- Idées empruntées au dossier pédagogique de B. Guéritte-Hess : La mesure (voir

bibliographie en fin de volume).


IDÉE

94

JEUX EN DEUX DIMENSIONS

Pour les surfaces, les activités précédentes peuvent être reprises

avec des morceaux de papier peints.

Nombreux sont les jeux de symétrie : plier en deux un papier

portant une tache de peinture ou un découpage aux ciseaux. Observer

ou anticiper la forme une fois la feuille dépliée.

Décider la forme qu’on veut obtenir et s’arranger pour trouver la

coupe correcte (il se peut que l’enfant ne voie bien qu’en collant le

petit papier sur un grand pour que la figure obtenue ne soit pas en

creux).

Plier une feuille carrée selon l’axe horizontal, puis selon l’axe

vertical, puis selon la diagonale : couper des formes, déplier et obtenir

une fleur, un flocon de neige, etc…

Les lettres majuscules de l’alphabet dessinées en grand, trouver le

pli permettant d’avoir 2 parties superposées (déplier lentement

les 2 parties pour voir si elles sont pareilles).

Avec des papiers de mêmes tailles, créer par pliage, découpage et

collage des surfaces différentes, de façon à faire jouxter les morceaux

collés.

Le jeu de Tangram offre de multiples agencements géométriques

ou figuratifs.

On peut aussi utiliser des objets en discontinu : papiers,

©
gommettes, mosaïques, dallages, Kapla … pour créer des formes

globales continues.

Les activités de pavage avec des formes variées (quadrilatères,

polygones) permettent de créer, composer, copier, agrandir, décalquer,

des modèles à colorier avec plusieurs couleurs sans jamais en faire

toucher deux identiques…

En classe, on donnera un paquet de 12 carrés à chaque groupe

d’enfants. Par découpage, chaque enfant d’un groupe doit créer toutes
les figures régulières (ou irrégulières) possibles, mais différentes.

Chaque modèle trouvé est posé sur une feuille support. Quelle

surprise, de pivoter certains supports, et trouver la même forme

globale que son voisin !


IDÉE

95

VA-ET-VIENT ENTRE 2 ET 3 DIMENSIONS

Dès la maternelle, on peut créer un mini-jardin au fond d’un

cageot (par exemple quatre espaces : un potager, un verger, un

parterre de fleurs et un point d’eau) pour expérimenter qu’à surface

égale, les dispositions varient. On part d’un plan déjà fixé ou bien on

dessine après-coup les inventions de chacun, avec ou sans respect des

dimensions, selon l’âge.

©
En primaire, on a des boîtes de cubes, de Lego (à 4, 6 ou 8 plots),

de morceaux de sucre, de savonnettes, de perles cubiques… Chaque

enfant doit construire un immeuble avec ou sans étage, dont chaque

appartement est un sucre, par exemple. L’animateur frappe dans ses

mains, chacun pose son élément en même temps. Après 12 coups, par

exemple, on compare avec les voisins : « Pourquoi un immeuble de

deux étages construit à l’aide de 12 savonnettes ne ressemble-t-il pas à

celui bâti avec 12 morceaux de sucre ? » Les arguments échangés

dans les dialogues qui s’instaurent entre les enfants permettent de

situer le niveau logique de chacun, d’analyser leurs raisonnements et

leurs stades d’évolution face aux notions de conservation et de

comparaison : « il y a le même nombre d’éléments mais les miens sont

plus petits, donc le total prend moins de place ; mon immeuble est

plus large mais il est moins haut que le sien », etc…

Plus tard, s’ils découvrent seuls que dans un cube de 1 décimètre

d’arête, ils peuvent s’organiser et faire entrer 1 000 petits cubes

de 1 centimètre d’arête, ils n’oublieront plus

3 3
que 1 dm = 1 000 cm ni que le volume d’un cube est égal à l’arête

multipliée par elle-même et encore multipliée par elle-même. De

même, on peut leur faire découvrir que l’eau remplissant le cône entre
trois fois dans le cylindre et déduire les formules des volumes

respectifs.

Même au collège il est utile de faire fabriquer des solides

géométriques, soit à l’aide de tiges pour construire les arêtes et de

nœuds comme sommets, le reste restant vide, ou rempli avec de la

mousse ; soit avec des faces recouvertes de papier afin de pouvoir

développer ce patron ; soit encore avec des faces pleines, à l’aide de


1
polydrons .

Les jeunes se repèrent souvent mieux en trois dimensions et

doivent être entraînés à reconnaître telle arête (telle face) sur un dessin

(passage de la 3D à 2D). On pourra leur demander de construire par

imitation, d’après dessin, d’après photo, pour passer

de 2 à 3 dimensions. L’opération inverse consistera à choisir parmi

plusieurs constructions celle qui correspondra à l’image désignée.

Pour le dessin industriel, on s’exercera à voir un objet sous divers

angles.

Le travail dans un sac aide à préciser le langage spatial. Dessiner

ou décrire à autrui un objet (une ou plusieurs formes simples) qu’on a

entre les mains, et lui faire trouver le même dans son sac, ou faire le

même derrière un écran. Ce type d’exercice pousse à structurer sa

phrase et préciser son vocabulaire. On explicite les positions

relatives : entre, au-dessous, à l’intérieur, à l’extrémité… En les tâtant

et en les décrivant point par point, les jeunes nomment mieux le

parallélépipède, le cube et le carré, ou le cercle, l’anneau, le disque et

la sphère, souvent confondus : ça ne passe pas sous la porte, ça

a 8 faces rectangulaires…

L’expérience montre que l’on fait trop d’exercices papier-crayon,

sur des cahiers aux lignes déjà tracées. La géométrie devrait se faire

plus souvent dans l’espace : par exemple, un triangle rectangle sera

présenté par 3 enfants, chacun tenant un anneau accroché à une

ficelle et variant à l’infini l’inclinaison des côtés.

1- Polydron : jeu de construction géométrique en 3D, à l’aide de formes solides,

colorées, qui s’accrochent entre elles à l’aide de charnières et permettent de construire


facilement des polyèdres. Ce matériel donne aux plus jeunes l’occasion d’expérimenter

de manière attrayante la construction de formes et de volumes ; pour les plus grands,

c’est un excellent moyen pour comprendre les solides, développer la perception spatiale,

etc. On pourra consulter à ce sujet l’article publié dans le numéro 57 de la revue Grand

N par J. Helayel et A. Bertotto, disponible sur le site Internet suivant : http://www-

irem.ujf-grenoble.fr/revues/revue_n/fic/57/57n2.pdf
IDÉE

96

CONSERVATION DANS LE CONTINU

Jouer dans le bain avec des flacons de tailles identiques ou


différentes. On peut ainsi susciter des transvasements, des ajouts de

quantités, égales ou non. Faire anticiper l’enfant, même tout jeune :

« Où penses-tu que l’eau arrivera dans le flacon si j’ajoute ce petit

verre ? (on met un élastique autour de la bouteille pour marquer le

niveau). Y aura-t-il davantage ici ou davantage là ? Faisons-le. Que

vois-tu ? Est-ce ce que tu avais prévu ? »

Faire la cuisine avec ses enfants, et se placer dans des situations


qui les poussent à réfléchir à la conservation des quantités.

Avec des boules de pâte à tarte, égales ou inégales, qu’on peut

déformer à volonté (dans des moules différents) en demandant chaque

fois : « Où y a-t-il plus ? Ai-je ajouté ou enlevé de la pâte ? ». Le faire

aussi avec d’autres matériaux : pâte à sel (roulée en boule, en

saucisse, aplatie en crêpe, changée en vermicelles…), couscous,

gruyère râpé ou non… Avec le lait réparti en plusieurs verres, on fait

un retour en arrière vers le récipient de départ.

Devant un verre mesureur indiquant 200 g pour le sucre et, bien

plus haut, 200 g pour la farine, combien d’enfants (et même d’adultes)

ont du mal à comprendre qu’à masse égale, deux matières différentes

ont des volumes différents ! Il faut se détacher de la perception

visuelle (le volume se voit, pas la masse). On pousse ainsi à observer,

à se demander pourquoi, et on instaure un débat. On ne fait que

questionner et, en retenant les réponses les plus proches de la réalité,

on pousse peu à peu à préciser, jusqu’à parler le concept de densité.

Nous recommandons de ne jamais donner la réponse, mais de

toujours questionner pour que le jeune déduise qu’on n’a rien enlevé

ni rajouté et que la quantité n’a pas varié.


IDÉE

97

QUE FAIRE AVEC UN ENFANT DE 7 ANS ?

Les maîtres de maternelle sont de plus en plus attentifs non

seulement à l’acquisition de la comptine numérique, mais aussi aux

prérequis logiques qui sous-tendent le nombre.

Malgré cela, en dehors des pathologies (enfants malentendants,

trisomiques, infirmes moteurs légers, gros retards psychomoteurs,

autistes, …), certains enfants n’avancent pas intellectuellement suivant

le rythme scolaire. Une rééducation orthophonique ou psychomotrice,

avec conseils aux parents, peut être utile après un bilan.

Avec ces enfants, on invente des jeux et des exercices sur un

matériel hétéroclite réuni ou construit au hasard des découvertes et

des besoins du moment. Un jeu construit soi-même oblige à

davantage d’organisation qu’un jeu tout fait (par exemple, un jeu de

divers bonshommes de couleurs différentes dessinés sur des cartes au

lieu des « blocs logiques » pour classer).

Le projet de l’adulte passe par un questionnement. Il ne s’agit pas

de divulguer un savoir à l’enfant, mais de l’accompagner au long de sa

réflexion pour qu’il accède, seul, à des évidences. À travers ces

activités sur un certain support, on vise à créer des systèmes cohérents

et réversibles qui seront applicables à n’importe quel contenu. En

jouant à la dînette ou avec un garage à voitures, on fait des maths, au

sens large.

L’adulte est formé à analyser à tout instant ce qui se passe : si on

pose sur la table des assiettes devant chaque invité, puis des verres, on

fait des correspondances terme à terme préfigurant les relations

d’équivalence. Si on place l’auto de façon à ce qu’elle soit hissée par

l’ascenseur quand on tournera la manivelle, on enchaîne des relations

temporelles et on fait des déductions causales…


IDÉE

98

QUE FAIRE AVEC UN ENFANT DU COURS MOYEN


?

Si l’aide du maître échoue, un suivi orthophonique peut éviter que

l’échec ne s’aggrave au collège, où les objets mathématiques

deviennent plus abstraits.

Selon les nécessités et la demande de l’enfant, on travaillera dans

les divers domaines déjà cités : espace, temps, nombre/ numération,

4 opérations, logique, langage. Ce travail est un complément servant

de base et visant à une meilleure intégration des contenus scolaires,

dont les prérequis sont souvent insuffisamment analysés par l’école :

celle-ci véhicule des évidences, ce qui crée de vrais problèmes pour

de nombreux enfants.

En numération, on constate presque toujours une déficience de

construction de l’équivalence numérique : on groupe des allumettes

par 10 pour obtenir des dizaines qui elles-mêmes seront regroupées

par 10 pour faire des centaines, … Même si on croit l’élève à l’aise

pour dire « 1 centaine vaut 10 dizaines, etc. », tout sera à réactiver le

jour où on reprendra les allumettes pour illustrer les soustractions à

retenues, par exemple : « Comme je ne peux pas retirer 8 dizaines

de 5 dizaines, je vais chercher une centaine à côté et je la

transforme… en combien de dizaines déjà ?… » La généralisation d’un

exercice à l’autre ne se fait pas automatiquement pour tous les enfants.

Nos techniques utilisent anticipation, vécu de l’action, récit oral,

symbolisation, travail sur les symboles, avec des allers retours entre les

différentes étapes pour obtenir une mobilité : l’adulte exécute une

action sur des jetons, l’enfant la symbolise ; ou bien il agit d’après le


dessin de l’autre ; ou il écrit une opération arithmétique à partir d’un

récit oral…
IDÉE

99

QUE FAIRE AVEC UN JEUNE DU COLLÈGE ?

À l’arrivée au collège, un jeune peut avoir des difficultés en maths

qu’il n’a jamais jusque là éprouvées : il était noté au-dessus de la

moyenne auparavant. Or, à l’aide de tests, on s’aperçoit vite qu’il

réussissait les opérations arithmétiques pleines d’automatismes, mais

qu’il échouait aux problèmes.

Mises à part quelques pathologies graves, la plupart de ces élèves

n’ont aucun trouble réel de raisonnement. Ils se sont trouvés dans des

situations de conditionnement (codages prématurés, règles apprises

par cœur et non comprises) où les activités ont perdu leur sens. Ils

fonctionnent par mimétisme, souvenir ou application d’une règle, sans

e
se laisser le droit de réfléchir. En classe de 4 , on ne peut plus faire

appel à la mémoire sans appui sur la logique : c’est l’un des moments

scolaires où les problèmes se révèlent le plus.

Les cours particuliers n’offrant pas toujours la possibilité de

remonter aux prérequis déficients, les parents s’adressent souvent aux

rééducateurs.

Selon l’ancienneté des lacunes, on aura à coup sûr à reprendre le

sens des 4 opérations, en lien avec la lecture d’énoncés plus

complexes. On progressera aussi en logique (voir en fin de volume le

dossier du GEPALM sur « classification et inclusion »). En même

temps, on abordera les concepts du programme, qui sont amenés

soudain de façon très abstraite tels la droite, la demi-droite, le nombre

relatif, en épluchant les définitions afin qu’elles aient du sens.

On aura à cœur de faire expliciter au jeune sa pensée, pour

pouvoir partir de ses erreurs dans des situations où il devra prévoir,

anticiper, faire des projets, changer de point de vue, en un mot

mobiliser sa pensée afin de parvenir au raisonnement hypothético-

déductif.
IDÉE

100

QUE FAIRE AVEC UN ADULTE JEUNE OU NON ?

Il arrive assez souvent qu’un adulte vienne consulter, pour lui-

même, les rééducateurs ou les formateurs spécialisés dans l’illettrisme

(les illettrés sont des personnes qui sont allées à l’école mais n’ont pas

tiré profit de leurs apprentissages) ou l’innumérisme (équivalent

mathématique ou calculatoire de l’illettrisme). Un tel adulte a

généralement vécu une scolarité dramatique, et il éprouve le besoin

d’acquérir des qualifications qu’il n’a jamais eues et de renforcer sa

confiance en soi, très défaillante. La pratique actuelle des rééducateurs

peut soigner et structurer. Les résultats sont généralement satisfaisants,

mais il faut déjà un minimum de confiance pour oser demander de

l’aide !

Avec un adulte, on est obligé de procéder autrement qu’à l’école.

Le travail portera le plus souvent sur des difficultés dans la vie

quotidienne comme la gestion de l’argent, la lecture d’un plan et

l’orientation spatiale en ville, l’organisation des rendez-vous, ... Ces

personnes ne connaissent pas la lecture des grands nombres et

n’utilisent pas les 4 opérations arithmétiques ni la règle de trois. Elles

ont du mal à mémoriser plusieurs consignes orales successives et se

trouvent dans des situations professionnelles très angoissantes vis à vis

de leurs donneurs d’ordre.

Or, notre expérience montre que ce n’est pas systématiquement le

manque de motivation ou des problèmes de comportement qui

peuvent expliquer le fait qu’un jeune adulte n’arrive pas à l’heure sur

son lieu d’apprentissage ou de travail. Il peut s’agir plutôt d’un

mauvais fonctionnement de sa pensée : il s’agit souvent d’une

personne qui est incapable de tenir compte simultanément de toutes

les données temporelles, spatiales et opératoires, et de gérer la cause


et les conséquences d’une situation. Par exemple, c’est pour lui un

exercice intellectuel très complexe de remonter par la pensée dans le

temps pour trouver le moment de partir à son rendez-vous : il n’a pas

développé la réversibilité de la pensée (voir l’Idée 10 et l’Idée 80).


ANNEXE 1 :

La Gestion mentale

Il existe un décalage entre ce que les enseignants espèrent transmettre et


ce qui est réellement reçu par les élèves. Afin de réfléchir aux moyens de
réduire ce décalage dans les classes, ils peuvent se former à transmettre la
méthode qui leur permet de réussir. Ainsi ils ne se contenteront plus de
proposer de faire des efforts, sans préciser la nature même de ces efforts.
Que s’agit-il de faire quand on recommande à l’élève de « faire attention »
ou de « mieux apprendre ses leçons » ?
Des réponses efficaces sont données par la théorie des gestes mentaux
qu’Antoine de la Garanderie a établie à partir de l’analyse des habitudes
mentales de très nombreux sujets. Pour lui, la vie mentale s’active et se
développe par sa mise en situation de projet d’évoquer le perçu (c’est-à-dire
ce qui est reçu par les cinq sens et reconnu par le cerveau). C’est seulement
quand le perçu est évoqué par une image visuelle, auditive ou verbale ou
motrice, que les différents gestes mentaux de l’attention, la compréhension,
la mémorisation, la réflexion et l’imagination deviennent possibles.
Un pédagogue de la gestion mentale ne dira pas : « Tu n’as pas fait
attention », mais : « Tu vas lire l’énoncé avec le projet de revoir et
réécouter dans ta tête ». L’élève, lui, ne dira plus : « Je ne suis pas doué »,
mais : « Je ne sais pas m’y prendre ».

Il y a toujours un travail énorme à faire avec les élèves en échec sur


l’attention et les images mentales, que ce soit en rééducation, en classe ou à
la maison. Quand ils améliorent la qualité de leur activité mentale en classe,
ils réussissent mieux.
Les enseignants apprennent à construire leurs cours, de façon à
s’adresser à la totalité de leurs élèves en tenant compte de leurs différences.
Beaucoup ignorent, par exemple, qu’ils enseignent uniquement pour les
auditifs (un tiers environ des élèves est visuel).
Les parents, eux, trouvent dans ces idées un appui afin de mieux
distinguer leur fonctionnement intellectuel de celui de leur enfant qui est,
lui, en situation d’apprentissage. En apprenant à questionner leur enfant de
façon plus fine, ils comprennent mieux pourquoi il ne comprend pas et
peuvent lui conseiller autre chose que la seule imitation.
La gestion mentale conduit à la connaissance de soi (faire prendre
conscience des habitudes mentales mises en œuvre au cours des activités les
plus variées) ; à l’élargissement des compétences (transférer les habitudes
mentales efficaces aux domaines de difficulté) ; à l’autonomie (le sujet est
promoteur, voire créateur, de ses moyens de réussite).

Les Associations Initiative & Formation, créées dès 1978 et regroupées


depuis 1994 au sein d’une Fédération, sont régies par la loi de 1901 sur les
associations à but non lucratif. Elles ont pour objet de promouvoir la
formation pédagogique des éducateurs et des enseignants. Entre autres
approches, elles développent et diffusent les recherches d’Antoine de La
Garanderie sur la pédagogie de la Gestion Mentale.
Chacun se renseignera localement pour trouver un praticien de la
gestion mentale compétent dans un établissement scolaire ou en ville.
ANNEXE 2 :

Le GEPALM

Créé en 1973 par Francine Jaulin-Mannoni, le GEPALM (Groupe


d’étude sur la Psychopathologie des Activités Logico-Mathématiques) est
une association qui organise des formations portant sur l’étude du
développement des structures logiques, mathématiques et cognitives en vue
de la prise en charge des sujets présentant, à des degrés divers, des
difficultés de ce développement.
Les contenus de cette formation portent sur :
La connaissance du développefient des structures du raisonnefient
logico-mathématique qui permet de porter un regard différent dans
l’observation des démarches, de mieux appréhender l’origine des
difficultés et la possibilité de les résoudre.
L’enseignefient de procédés spécifiques qui perfiettent une réelle
structuration des processus de pensée. Cette réflexion menée à partir
de leur mise en application permet une adaptation individuelle à
chaque patient et offre la capacité de créer soi-même une multitude
d’activités rééducatives dans la prise en charge de divers handicaps
chez les jeunes enfants, les adolescents ou les adultes.
Cette formation peut intéresser les orthophonistes, les
psychomotriciens, les enseignants spécialisés et les psychologues, ainsi que
toute personne s’intéressant au développement cognitif. Il existe aussi une
formation spécifique destinée à des enseignants (spécialisés ou non).
L’ensemble de la formation dispensée par le GEPALM se compose de
la formation initiale (douze sessions de 9 heures réparties sur trois années),
de stages d’approfondissement, de stages d’application (observations
d’enfants en milieu scolaire, en situation d’activités logico-mathématiques),
et d’un suivi de formation sous forme de stages de perfectionnement.
En complément, l’ESDAC (Études Supérieures du Développement des
Activités Cognitives) propose un approfondissement théorique concernant
la logique, le nombre et l’espace ainsi qu’une transmission des techniques
élaborées par Riad Al Hammal, psychopédagogue.
GEPALM
51 rue Cantagrel, 75013 Paris
Tél : 01 47 07 82 11
Fax : 01 45 82 24 76
E-mail : info@gepalm.org
Site Internet : http://www.gepalm.org
On trouvera sur ce site une liste par département des rééducateurs
formés en France au GEPALM. Certains s’occupent plutôt des petits
enfants, d’autres des collégiens.
POUR ALLER PLUS LOIN…

Livres spécialisés ou tous publics

B. Guéritte-Hess et M. Bacquet, Le Nombre et la numération. Papyrus,


1997.
B. Guéritte-Hess, Au fait c’est quoi pour vous la virgule ? Papyrus, 2009. I.
Causse, B. Guéritte, M.-C. Romier, Les maths à toutes les sauces. Le
Pommier , 2005.
R. Al Hammal, H. Rousselet, Le passage des 4 opérations aux systèmes
de 2 équations à 2 inconnues. APECT, 2002.
F. Jaulin-Mannoni, L’apprentissage des sériations. APECT, 2001.
F. Jaulin-Mannoni, Rééducation pratique du calcul. APECT, 2001.
Jean Piaget, La genèse des structures logiques élémentaires. Delachaux et
Niestlé
Jean Piaget, La psychologie de l’enfant. PUF, Coll. Que sais-je ?
« La main à la pâte » : Graines de sciences (volumes collectifs, sous la
direction de David Wilgenbus et Didier Pol). Le Pommier, 2000-2008 (vol.
de 1 à 9).
Isabelle Causse-Mergui, À chaque enfant ses talents : vaincre l’échec
scolaire. Le Pommier, 2005 (nelle éd.).
Wynne Harlen (avec des chapitres de Jos Elstgeest et Sheila Jelly ; trad. de
l’anglais par Évelyne et Alain Bouquet), Enseigner les sciences : comment
faire ? Le Pommier, 2004.
Pierre Vermeersch, L’entretien d’explicitation. ESF, 2010 (6e éd.)
Carine Mayo, Devenir bon en maths : y’a pas de problème ! Milan, 1999.
Thierry Rousseau (dir.), Approches thérapeutiques en orthophonie (4 vol.).
Ortho-edition, 2004.
Joëlle Pojé et José Seknadjé-Askénazi (dir.), Élèves en difficulté : les aides
spécialisées à dominante pédagogique. SCEREN, CRDP Nord Pas-de
Calais – Centre national d’études et de formation pour l’enfance inadaptée,
2003 (4e éd.).
Françoise Cerquetti-Aberkane, Enseigner les mathématiques à l’école.
Hachette Éducation, nelle éd. revue et augmentée, 2000.
Rémi Brissiaud, Comment les enfants apprennent à calculer : au-delà de
Piaget et de la théorie des ensembles. Retz, 1989.
Les apprentissages scolaires (ouvrage collectif, sous la coordination de
Annick Weil-Barais). Bréal, 2004.
Jean-François Richard, Les activités mentales : de l’interprétation de
l’information à l’action. Armand Colin, 2005 (4e éd.).
Michèle Mazeau, Neuropsychologie et troubles des apprentissages : du
symptôme à la rééducation. Masson, 2005.
Marylène Stroh et Lydie Morel : « Rééducation des troubles du calcul et du
raisonnement logico mathématique », in T. Rousseau (dir.), Les approches
thérapeutiques en orthophonie, tome 2, chapitre IV. Ortho édition, 2004.
Document d’accompagnement des programmes : Mathématiques, École
primaire SCEREN, 2003
Anne-Marie Doly, Métacognition et médiation. CRDP Auvergne, 1996.
Nombres et calcul, cycle 2. Bordas pédagogie.
Apprentissages numériques et résolution de problèmes de la GS au CM2,
Hatier, collection ERMEL

Anne Van Hout, Claire Meljac, Jean-Paul Fischer, Troubles du calcul et


dyscalculies chez l’enfant. Masson, 2005 (2e éd.)
Michel Fayol, L’enfant et le nombre. Du comptage à la résolution de
problèmes. Delachaux et Niestlé, 1997.
E. Greff, J. Hélayel, Situations-jeux pour des apprentissages mathématiques
en maternelle, Retz, 2009.
A. Bertotto, J. Hélayel, Enseigner la géométrie (GS, CP, CE1). Bordas,
1996.

Articles

Roland Charnay et Michel Mante, « De l’analyse d’erreurs en


mathématiques aux dispositifs de remédiation : quelques pistes », Grand N,
n° 48
B. Guéritte, C. Decour, « Deux données de la psychomotricité : l’espace et
le temps dans les opérations mathématiques ». Évolutions psychomotrices,
n° 74.
M.-P. Legeay et L. Morel, Dossier dyscalculie. éd. Ortho-édition

DVD
« Chacun sa part » (pour devenir un pro des portions). CFPPA Coutances.
BP 722 - 50207 Coutances Cedex. – Tél : 02 33 76 80 50

Sites Internet

Site du projet européen Comenius. Nombreuses séances analysées et


photographiées et un dossier pédagogique théorique sur la mesure :
www.comeniuslamesure.eu
Site de l’exposition itinérante « Kif-Kif le Calife » faite par le musée Cap
Sciences de Bordeaux et B. Guéritte-Hess (dossier pédagogique sur la
mesure). Dossier-pédagogique « Kif-Kif le Calife » :
www.scribd.com/doc/22500079/

Association de recherche en gestion mentale :


www.phonimage.org

Groupe d’Étude Sur les Théories de l’Apprentissage :


hautpotentielintellectuel.com

INSERM, Dyslexie, Dysorthographie, Dyscalculie. Bilan des données


scientifiques. Dossier sur les troubles affectant les apprentissages scolaires.
Ce rapport est téléchargeable sur le site Internet :
index.php/thematiques/neurosciences-sciences-cognitives-neurologie-
psychiatrie/dossiers-d-information/troubles-des-apprentissages-dyslexie-
dysorthographie-dyscalculie

V. Camos :
ValerieCamos.htm

S. Dehaene, et al. (INSERM-CEA), « Dyscalculie : le sens perdu des


nombres », Le point de la recherche en neurosciences sur la dyscalculie :
http://www.unicog.org/publications/MolkoWilsonDehaene_Dyscalculie_La
Recherche2004.pdf

Le site de l’ACIM (Activité de Construction d’Images Modélisées)


acim.ouvaton.org/
Le site du GEPALM :
http://www.gepalm.org/

Le site de l’OCDE sur l’apprentissage :


http://www.oecd.org/department/0,2688,fr_2649_14935397_1_1_1_
1_1,00.html
http://www.oecd.org/findDocument/0,2350,fr_2649_14935397_1_11
9699_1_1_1,00.html

Le site de l’INSERM consacré à la neuro-imagerie cognitive :


http://www.unicog.org/
et chez le même éditeur…
© Alta communication, 2011
Éditions Tom Pousse
34-38, rue Blomet
75015 Paris

EAN : 978-2-35345-079-4

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Ouvrage numérisé en partenariat avec le Centre national du Livre

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