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M27 : Sciences du Langage et enseignement des langues

Objectifs du cours :

Réflexion de départ

➢ Qu’est-ce qu’une langue ?


➢ Comment fonctionnent les langues ?
➢ Quels sont les éléments constitutifs des langues et quelles sont leurs propriétés ?
➢ Qu’est que le langage ?
➢ Quels sont les processus cognitifs qui sous-tendent le langage, c.-à-d. comment fait-on
pour apprendre une langue (maternelle ou seconde) ?,
➢ En quoi consiste le processus de traduction ?

Section 1 : Sciences du Langage (rappel des concepts clés)

1.1 Définition des Sciences du Langage

Les sciences du langage est une discipline qui s’intéresse à l’étude du langage humain
dans toutes ses dimensions, à la fois en tant que système structuré et en tant que moyen de
communication sociale. Cette discipline englobe la linguistique, la psycholinguistique, la
sociolinguistique, la pragmatique, la sémiotique, et d'autres domaines connexes.
Les sciences du langage jouent un rôle crucial dans l'enseignement des langues en
fournissant des bases théoriques solides et des perspectives empiriques sur la manière dont les
langues fonctionnent.
1.2 Panorama historique des théories linguistiques

Le xixe siècle : la philologie et l’analyse comparée des langues


À la in du xviiie siècle, se développent en Allemagne la philologie et la grammaire
comparée qui étudient les langues dans une optique évolutionniste de l’époque. Il s’agit, d’une
part, de reconstituer, par la comparaison des termes et des grammaires des différentes langues,
leur parenté et leur histoire évolutive. C’est ainsi qu’a été reconstituée l’hypothèse d’une langue
souche dite indo-européenne, matrice du latin, du grec, du slave, du sanskrit. L’objet de cette
étude comparée des langues était aussi de retrouver des lois de permutation des signes qui ont
gouverné le passage d’une langue à l’autre (la loi de Grimm). Le Danois R. K. Rask (1787-
1832) et l’Allemand F. Bopp (1791-1867) furent les pères de la philologie.
Début du xxe siècle : la révolution saussurienne
F. de Saussure (1857-1913) est le père de la linguistique moderne. Il rompt avec une
approche descriptive et historique des langues pour rechercher des règles formelles de son
fonctionnement. C’est un point de vue « structural » où la langue est étudiée comme un tout
ayant une cohérence propre à un moment donné (approche synchronique). Un signe possède
une double face : un signifiant qui est le support matériel du signe (son ou graphisme) et un
signifié qui correspond à l’idée contenue dans le signe.
Les années 1930-1950 : fonctionnalisme et structuralisme
Dans le sillon du structuralisme de F. de Saussure se sont airmés plusieurs courants :
– la glossématique, théorie élaborée par le Danois L. Hjelmslev (1899-1965) qui forma le
projet de constituer une « algèbre immanente des langues ». C’est une démarche
résolument théorique et formaliste, au demeurant fort difficile d’accès ;
– la phonologie (étude de la langue comme système fonctionnel) est issue du Cercle de
Prague, dont R. Jakobson (1896-1982) et N. Troubetskoï (1890-1938) sont les
principaux représentants ;
– le distributionnalisme de L. Bloomfield (1887-1949) est une tentative, d’inspiration
behavioriste, pour expliquer les faits de langage à partir du calcul mathématique de la
fréquence d’apparition des mots.
Les Années 1960-1970: les grammaires génératives
Cette époque vit dominer les grammaires transformationnelle et générative. Leur but est
de reconstituer une grammaire universelle du langage humain qui permettrait, à partir d’une
structure profonde, de générer l’ensemble des discours particuliers. Ce projet de grammaires
formelles a en partie échoué même si son programme de recherche n’est pas épuisé du fait
même des enjeux des sciences cognitives. N. Chomsky (né en 1928) est la figure de proue de
la grammaire générative. À partir des années 1980 se développent de nouvelles grammaires,
dites « grammaires d’unification », dont l’objectif est d’unifier syntaxe et sémantique. Les
modèles formels des grammaires d’unification sont explicitement forgés dans le cadre de la
traduction automatique.
Sémantique et sémiologie
Comment la langue véhicule-t-elle de la signification ? Comment le sens, matériau
impalpable indispensable à l’homme, se construit-il à l’échelle du mot, de la phrase ou du
discours ? Ce sont les questions auxquelles tente de répondre la sémantique. La sémantique, à
l’origine était essentiellement lexicale (à l’échelle du mot), a peu à peu pris en charge le contexte
syntagmatique (la phrase, le discours), puis, plus récemment, le contexte extralinguistique (la
situation, les gestes, les mimiques), intégrant la dimension pragmatique de la communication
La sociolinguistique
La sociolinguistique, discipline née aux États-Unis dans les années 1960, et dont le chef
est W. Labov, se propose d’étudier les différences linguistiques selon les groupes sociaux
(Sociolinguistique, Minuit, 1976). W. Labov a réalisé des études sur la stratification sociale de
l’anglais à New York. Selon lui, les différences d’usage de l’anglais selon les milieux ne
sauraient être de simples épiphénomènes ou déformations. Les variations étudiées étant
systématiques au sein d’une communauté et cohérentes entre elles, chaque système possède sa
propre logique. On parle parfois à son propos de linguistique variationniste.
Les années 1980:
 La pragmatique
C’est une discipline qui envisage le langage en tant qu’outil pour agir sur le monde et non
pas seulement comme un outil pour exprimer des pensées ou pour transmettre des informations.
Le philosophe anglais J. Austin (19111960) est la principale figure de la pragmatique. Austin
parle d’« actes de langage » pour désigner des énoncés en tant qu’ils permettent d’agir sur soi,
sur les autres, sur les événements (Quand dire, c’est faire, trad. fr. Seuil, 1970). Le courant
pragmatique s’est développé dans deux directions : l’analyse de l’argumentation et celle des
présupposés et des implicites du discours qui permettent d’en reconstruire le sens.
 La linguistique de l’énonciation
Le propre des linguistiques de l’énonciation est d’étudier la façon dont les gens parlent en
situation réelle. M. Bakhtine (1895-1975) en est l’un des pionniers. Selon sa conception
dialogique du langage, le langage est avant tout le produit du dialogue et les mots sont eux-
mêmes traversés de sens divers qui leur sont attribués par l’interaction verbale.
Synthèse
Quatre grandes périodes historiques.

 Les origines de la linguistique: La réflexion sur le langage (comment le langage est-il


apparu ? d’où vient le sens des mots ? quelles sont les règles qui permettent de les
assembler ?)
 La renaissance: Grammaire de Port-Royal. Fixer les canons de la langue écrite de
nombreux pays, où l’on réfléchit aux liens entre grammaire et logique.
 Le début du xix S°: naissance de la linguistique comme discipline autonome. Les
langues évoluent comme les formes vivantes et animales,
 La révolution saussurienne: la langue forme un système et doit être étudiée comme un
tout ayant une cohérence propre à un moment donné. Un signe possède une double : un
signifiant qui est le support matériel du signe (son ou graphisme) et un signifié
qui correspond à l’idée contenue dans le signe.

Section 2. Rôle des sciences du langage dans l'enseignement des langues


Les sciences du langage jouent un rôle essentiel dans l'enseignement des langues en
fournissant des bases théoriques et des outils pratiques pour comprendre, analyser et enseigner
les langues.
Compréhension de la structure linguistique : les sciences du langage fournissent une
compréhension approfondie de la structure des langues, y compris la syntaxe, la sémantique, la
phonologie, et la morphologie. Cette connaissance est cruciale pour enseigner la grammaire, la
prononciation et d'autres aspects structurels d'une langue de manière précise et efficace.
Développement de méthodologies d'enseignement : les chercheurs en sciences du langage
contribuent au développement de méthodologies d'enseignement fondées sur des principes
théoriques solides. Ces méthodologies peuvent intégrer des approches communicatives, des
activités interactives, et des stratégies pédagogiques qui favorisent l'acquisition linguistique.
Analyse des erreurs et difficultés d'apprentissage : les sciences du langage permettent
d'analyser les erreurs courantes commises par les apprenants lors de l'acquisition d'une langue.
En comprenant ces erreurs, les enseignants peuvent mieux cibler leurs interventions pour
remédier aux difficultés spécifiques des apprenants.
Étude du processus d'acquisition linguistique : les chercheurs en sciences du langage
s'intéressent au processus d'acquisition linguistique, notamment à la façon dont les individus
acquièrent leur langue maternelle et/ou une langue étrangère. Ces connaissances sont précieuses
pour concevoir des programmes d'enseignement qui reflètent les meilleures pratiques basées
sur la recherche.
Conception de matériel pédagogique : les sciences du langage contribuent à la conception de
matériel pédagogique, tels que les manuels, les exercices, les supports multimédias, en
s'appuyant sur une compréhension approfondie des structures linguistiques et des processus
d'apprentissage.
Intégration des technologies éducatives : les avancées technologiques permettent d'intégrer
des outils numériques dans l'enseignement des langues. Les chercheurs en sciences du langage
peuvent contribuer à la conception et à l'évaluation d'outils tels que les applications mobiles,
les plates-formes en ligne et les logiciels éducatifs pour améliorer l'efficacité de l'apprentissage
linguistique.
Sensibilisation à la diversité linguistique et culturelle : les sciences du langage contribuent à
sensibiliser les enseignants et les apprenants à la diversité linguistique et culturelle. Cela peut
favoriser une approche plus inclusive et respectueuse des différentes variétés linguistiques et
des contextes culturels.
Évaluation Linguistique : les sciences du langage fournissent des outils pour évaluer les
compétences linguistiques des apprenants de manière précise et objective. Les méthodes
d'évaluation peuvent être élaborées en tenant compte des aspects linguistiques, communicatifs
et culturels.
Formation des Enseignants : les sciences du langage jouent un rôle central dans la formation
des enseignants de langues en leur fournissant des connaissances théoriques et des compétences
pratiques pour concevoir des programmes d'enseignement efficaces.
Adaptation aux Évolutions Linguistiques : les langues évoluent, et les sciences du langage
aident à comprendre ces évolutions, permettant aux enseignants de maintenir leurs cours
pertinents et adaptés aux besoins linguistiques contemporains.
En résumé, les sciences du langage enrichissent l'enseignement des langues en fournissant des
fondements théoriques, des méthodologies pratiques et des outils pour mieux comprendre,
évaluer et enseigner les langues. L'intégration de ces connaissances dans les programmes
éducatifs contribue à former des apprenants compétents, sensibles sur le plan culturel et
capables de naviguer dans la diversité linguistique mondiale.
Section 3. Sciences du langage et didactique des langues
La didactique des langues est une discipline qui se consacre à l'étude de l'enseignement
et de l'apprentissage des langues. Elle englobe la théorie, la recherche et la pratique de
l'enseignement des langues étrangères, secondes ou maternelles. La didactique des langues
cherche à comprendre les processus d'acquisition linguistique, à développer des méthodes
pédagogiques efficaces et à fournir des outils pour l'évaluation des compétences linguistiques.
Selon Christen Puren (2018) la didactique des langues est une « discipline centrée sur
l'observation, l’analyse, l’interprétation et l’intervention concernant les environnements,
pratiques et processus situés et interreliés d'enseignement-apprentissage des langues-cultures »
Il s’agit d’« Une discipline « constituée » avec ses concepts, ses modèles, ses méthodes,
son histoire, ses publications, ses institutions, ses lieux d’échanges… » (Ibid.)
La didactique des langues est un concept englobant linguistique appliquée (c’est-à-dire
le quoi enseigner, les contenus) et méthodologie (ou comment enseigner et apprendre), mais
sur un mode hypothétique : «(elle) se veut quelque chose d’autre qu’une simple méthode
d’analyse et d’intégration de pratiques existant en dehors d’elle : le véritable lieu constitutif
d’une discipline nouvelle qui aurait son autonomie conceptuelle et méthodologique ; » (H.
Besse,1985 : 11).
Besse rappelle que cette dénomination (didactique) « est contestée parce qu’elle
rappelle trop la didactique des disciplines, et qu’elle risque de réduire la didactique des langues
à une simple pédagogie de la transmission de connaissances élaborées par des spécialistes »
(Ibid.).

Figure 1: la didactique des langues selon H.Besse

3.1 Les domaines d’étude de la didactique des langues


Théorie de l'enseignement : la didactique des langues s'intéresse aux principes et aux
méthodes qui sous-tendent l'enseignement des langues. Elle explore comment organiser le
contenu linguistique, adapter les approches pédagogiques en fonction des apprenants et
concevoir des programmes éducatifs pertinents.
Processus d'apprentissage : elle examine les mécanismes par lesquels les individus acquièrent
une nouvelle langue. Cela inclut la compréhension des facteurs psychologiques, cognitifs et
socioculturels qui influent sur le processus d'apprentissage linguistique.
Développement des compétences linguistiques : la didactique des langues vise à faciliter le
développement des compétences linguistiques, notamment la compréhension orale et écrite,
l'expression orale et écrite, ainsi que la compétence culturelle associée à la langue enseignée.
Évaluation : elle propose des méthodes d'évaluation pour mesurer les progrès des apprenants
et évaluer leur niveau de compétence linguistique. Cela comprend la conception de tests,
d'examens et d'autres formes d'évaluation.
Adaptation pédagogique : la didactique des langues encourage l'adaptation des méthodes
d'enseignement en fonction des besoins spécifiques des apprenants, de leur contexte culturel,
de leurs styles d'apprentissage et de leurs objectifs linguistiques.
Recherche : elle s'appuie sur la recherche linguistique pour informer les pratiques
d'enseignement. La didactique des langues est souvent alimentée par des études sur l'acquisition
des langues, la psycholinguistique, la sociolinguistique et d'autres domaines connexes.
La didactique des langues cherche à fournir des bases théoriques et pratiques pour
l'enseignement des langues, en tenant compte des processus d'apprentissage spécifiques aux
langues étrangères, secondes ou maternelles. Elle évolue constamment pour s'adapter aux
nouvelles découvertes en linguistique et à l'évolution des besoins éducatifs.
3.2 Les disciplines connexes de la didactique des langues
La didactique des langues est étroitement liée à plusieurs disciplines connexes qui
contribuent à enrichir la compréhension de l'enseignement et de l'apprentissage des langues.
Voici quelques-unes des disciplines connexes à la didactique des langues :
Linguistique appliquée : La linguistique appliquée se concentre sur l'application des principes
linguistiques à des problèmes pratiques, y compris l'enseignement des langues. Elle offre des
perspectives sur la structure des langues, les méthodes d'enseignement et les stratégies
d'apprentissage.
Psycholinguistique : La psycholinguistique examine la manière dont le langage est produit et
compris au niveau cognitif. Dans le contexte de la didactique des langues, elle peut aider à
comprendre les processus mentaux impliqués dans l'apprentissage des langues.
Sociolinguistique : La sociolinguistique étudie la relation entre le langage et la société. Elle est
pertinente pour la didactique des langues en ce qu'elle explore les variations linguistiques, les
dialectes et les contextes sociaux dans lesquels les langues sont utilisées.
Neurolinguistique : La neurolinguistique se penche sur les bases neurobiologiques du langage
et de son traitement dans le cerveau. Comprendre ces aspects peut éclairer les pratiques
pédagogiques dans l'enseignement des langues.
Anthropologie linguistique : Cette discipline étudie la relation entre le langage et la culture.
Dans le contexte de l'enseignement des langues, elle peut contribuer à intégrer des éléments
culturels dans le curriculum pour une compréhension plus approfondie de la langue.
Technologie éducative : L'utilisation de la technologie dans l'enseignement des langues est
devenue de plus en plus importante. La technologie éducative examine comment les outils
numériques peuvent être intégrés de manière efficace dans le processus d'enseignement et
d'apprentissage des langues.
Didactique : La didactique, en général, se concentre sur les méthodes et les principes
d'enseignement. La didactique des langues s'inscrit dans ce cadre en explorant les meilleures
pratiques pour transmettre les compétences linguistiques.
Éducation comparée : Cette discipline compare les systèmes éducatifs à l'échelle mondiale,
ce qui peut fournir des perspectives utiles pour améliorer les approches d'enseignement des
langues en tenant compte des diversités culturelles et éducatives.
L'interaction entre ces disciplines contribue à une compréhension plus complète de la
didactique des langues, permettant ainsi le développement de méthodes d'enseignement plus
efficaces et adaptées aux besoins des apprenants.
Synthèse

Section 4. Les théories d’apprentissage


Pourquoi les théories d’apprentissage ?
Apprendre fut une des préoccupations majeures de l’homme qui essaie non seulement
d’apprendre mais de comprendre et d’apprendre comment apprendre, d’où la naissance des
théories d’apprentissage. Ce terme « théorie d’apprentissage » désigne habituellement un
ensemble de lois ou de principes qui décrivent et expliquent la manière dont l'apprentissage se
déroule.
Au début du XXème siècle le béhaviorisme ou comportementalisme fut la pensée
dominante à l’époque, issue des travaux des chercheurs américains Watson et Thorndike
et du chercheur soviétique Pavlov, ce courant se développe au néo-béhaviorisme sous
l’impulsion de Skinner.
En même temps, à peu près et en s'opposant à quelques-uns des principes de base du
béhaviorisme, est né le gestaltisme en se basant sur les travaux de chercheurs allemands
(Wertheimer, Kohler, Kofka), ce courant va également poser les premiers jalons du modèle
cognitiviste et constructiviste qui se développera à partir de la fin des années 60 avec les études
de Piaget et autres auteurs.
On s'appuyant sur le modèle constructiviste et quelques principes de Skinner (influence
de l’environnement sur l’apprentissage de l’homme), d’autres auteurs comme Vygotski ont
créé la théorie du socioconstructivisme.
La connaissance de ces théories d'apprentissage ne nous aide pas seulement à
comprendre comment se déroule l'apprentissage mais elle nous permet également de
concevoir des cours, des ressources pédagogiques et des modules de formation plus
cohérents et plus efficaces

Figure 2Triangle didactique de Houssay

4.1 Le béhaviorisme et néo-béhaviorisme :


Le béhaviorisme est une théorie de l'apprentissage qui a fortement marqué les domaines
de l'enseignement, de l'éducation et de la formation. Le terme « béhaviorisme » vient du mot
anglais « behavior » qui signifie « comportement ». Ce comportement est marqué par une
manifestation observable de la maîtrise d'une connaissance qui permet de s'assurer l'atteinte des
objectifs visés. Le béhaviorisme (ou comportementalisme) définit l'apprentissage comme un
processus de modification du comportement par l’établissement et le renforcement de
nouvelles associations entre des stimuli et des réponses (apprendre à répondre de telle ou telle
manière en présence de tels facteurs déclenchant) ou l’extinction d’associations existantes
(apprendre à ne plus réagir de telle ou telle manière en présence de tels stimuli).
Il est donc individualisé par stimulation, entraînement, renforcement des réponses
positives, motivation, pratiques répétées pour augmenter la performance, renforcement des
réponses positives…
Ivan Pavlov, John Watson, Edward Thorndike, Burrhus F. Skinner, Clark Hull, Edward
Tolman, sont les principaux fondateurs de ce courant, chacun a contribué à l’enrichissement
de ce courant et leurs études ont constitué le soubassement de la vision actuelle de la pédagogie
active.
– Ebbinghaus : la mémorisation et l’association :
Ebbinghaus s’est intéressé à l’étude de la mémorisation et l’oubli des syllabes sans signification.
Pour interpréter ses résultats, il fait appel à la notion d’association. Le réapprentissage des
syllabes est plus facile quand elles sont dans un même ordre. Le temps consacré au
réapprentissage est moins que le temps consacré à l’apprentissage initial (sans ordre).
–Thorndike : L’apprentissage par essai et erreur :
Quant à Thorndike et à partir de ses expériences sur les animaux, il formule ces deux principales
lois et sa théorie sur l’apprentissage :
La loi de l’exercice : Les connexions entre la situation et la réponse sont renforcées par
l'exercice et affaiblies lorsque l'exercice est arrêté.
La loi de l’effet : Une connexion est renforcée ou affaiblie par l'effet de ses conséquences. Et
selon lui l’apprentissage se fait par l’essai et l’erreur (des essais infructueux pour aboutir à la
solution).
– Pavlov : Le conditionnement répondant :
En travaillant sur les animaux et la réaction stimulus-réponse, Pavlov fonde son approche à la
fois sur le modèle associationniste et sur l'étude des réflexes. Par la procédure stimulus-
réponse, l’animal acquiert une nouvelle conduite, ou plus exactement il manifeste un
comportement, un réflexe, en présence du stimulus. C’est ainsi que La loi du conditionnement
répondant a été découverte au cours d’une étude expérimentale sur le chien (chaque fois que
l’on présente au chien un morceau de viande, il salive. On va associer à la nourriture un son
ou un signal lumineux et ce à plusieurs reprises. Au bout d’un certain temps, le son ou le signal
lumineux suffira seul à provoquer la salivation). A noter ici que Le sujet n’est pas actif dans
son apprentissage.
– Skinner et le néo-béhaviorisme
Skinner n'a pas été d'accord avec les théories de Watson et Pavlov qui prétendent que toute
réponse dépend d'un stimulus, même si ce dernier n'est pas identifiable. Burrhus. F. Skinner a
développé alors le concept de « conditionnement opérant ». Sa thèse est que « le
comportement peut être structuré par l'utilisation appropriée des conditionnements appropriés
» d’où l’apparition du néo-béhaviorisme (développé par Skinner, Hull, Tolman, ...)
Skinner définit l'apprentissage comme une modification du comportement provoquée par les
stimuli venant de l'environnement et influencée par le vécu. Il affirme que l'apprentissage peut
être obtenu par l'utilisation de récompenses appelées « renforcements positifs » et de punitions
appelées « renforcements négatifs ». Ainsi, l'individu adopte un comportement lui permettant
d'éviter les renforcements négatifs et d'augmenter la chance d'obtenir les renforcements positifs.
Pour développer sa théorie, Skinner utilise les rats et le lien stimulus /réponse en ajoutant l’agent
de renforcement (cage de Skinner); et il constate qu’une nouvelle conduite s’acquiert vite en
présence d’un agent de renforcement. C’est le conditionnement opérant.
En 1971, il a critiqué sérieusement l'enseignement traditionnel fondé essentiellement sur
des renforcements négatifs et a proposé de remplacer ceux-ci par des renforcements positifs. Il
recommande également d'organiser l'enseignement en vue de minimiser l'apparition des erreurs
dans le cadre d'une méthode qu'il appelle l'apprentissage sans erreur. Pour lui, tout
comportement, qu'il soit psychomoteur ou cognitif, peut être acquis de manière efficace en
évitant à l'élève de commettre des erreurs. Les travaux de Skinner sont adaptés aux situations
d'apprentissage et le modèle qui en résulte est celui de l'enseignement programmé.
D’autres auteurs comme Hull et Guthrie ont essayé de promouvoir le béhaviorisme en
introduisant d’autres variables intermédiaires liés à l’individu et à ses motivations internes
d’apprentissage. Contrairement au béhaviorisme qui se base sur l’idée que le comportement est
placé sous le contrôle exclusif des stimuli extérieurs.
- Béhaviorisme schématisé

4.1 Le Gestaltisme :
Au cours de la période 1930-1960, en s’opposant aux béhavioristes, l’école gestaltiste
fut fondée par trois chercheurs allemands : Wertheimer, Koffka et Köhler. La Gestalt est un
mot allemand signifiant «forme globale» ou «forme organisée», d’où est tiré le Gestaltisme
qui évoque les formes autant qu’éléments fondamentaux et indécomposables de l'activité
humaine.
Pour ce courant, l’apprentissage se définie comme un processus d’organisation des
éléments d’une situation, c’est aussi pouvoir donner sens à ce qu’on perçoit. C’est le résultat de
l’insight ‫ االستبصات‬qui est la découverte soudaine d'une solution après une réorganisation des
éléments du problème, est la pensée créative, basée sur des restructurations et des totalités.
L’apprentissage ici passe par des opérations mentales observation, réflexion, compréhension,
solution ...
- Principes du Gestaltisme :
Lorsqu’on veut structurer une forme, notre perception obéit à des lois comme :
• La loi de la bonne forme : Un ensemble de parties informe tend à être perçu
d'abord comme une forme.

• La loi de bonne continuité : des points rapprochés tendent à représenter des


formes lorsqu'ils sont perçus comme des prolongements les uns par rapport aux autres.

• La loi de la proximité : veut dire que des choses qui sont plus proches seront
vues comme appartenant à un même groupe.

• La loi de clôture : une forme fermée est plus facilement identifiée comme une
figure qu'une forme ouverte.
- Les limites du Gestaltisme :

• Il s’agit d’un type d'apprentissage par essais et erreurs.

• L’apprentissage est laissé au hasard.

• Les illusions influent sur la perception et la dirigent...

• Apprendre n’est pas fondé sur des motifs scientifiques du fait que la présence de
Köhler dans les situations pilotes y introduit des variables non désirées

Le Gestaltisme schématisé

4.3 Le cognitivisme :
Le cognitivisme, dont l'appellation renvoie au terme cognition (connaissance dans le
sens de processus et de produit), regroupe tous les modèles d’apprentissage construits en
opposition plus ou moins radicale au béhaviorisme.
Il « privilégie l'étude du fonctionnement de l'intelligence, de l'origine des connaissances
ainsi que des stratégies employées pour assimiler, retenir et réinvestir les connaissances ; et
s'intéresse essentiellement à la perception, le traitement en mémoire, le langage et ce, en regard
du fonctionnement du cerveau. » (Legendre (1993), Gauthier et Tardif (2000))
Le courant cognitiviste se prolonge dans deux versions de la psychologie cognitive, donnant
naissance à la théorie du traitement de l’information et à l’apprentissage stratégique.
Traitement de l’information :
Cette théorie se fonde sur la représentation des opérations qui se déroulent dans un
ordinateur et assimile l’esprit humain à un système de traitement de l’information. Elle explique
comment la mémoire recueille, traite et emmagasine les nouvelles informations et repère, par
la suite, ces informations. Dans cette optique, on considère les processus mentaux comme
responsables de cette succession d'étapes du traitement.
Parmi les auteurs les plus influents ayant développé la théorie du traitement de
l’information on retrouve les travaux de Gagné ainsi que ceux de Ausubel.
Apprentissage stratégique
Cette théorie est fondée sur l’importance de l’appropriation graduelle et effective des
stratégies mentales cognitives et métacognitives (générales et spécifiques aux tâches
proposées), jugées nécessaires à une démarche structurée d’apprentissage. Présenté par Tardif,
ce modèle a pour objet général de susciter l'engagement cognitif et affectif (motivation
scolaire), de montrer à l'apprenant comment traiter les informations d'une façon adéquate,
d'amener l'élève à effectuer des transferts. On vise le développement d'une pensée efficace et
autonome en référant au concept de métacognition.
- Le cognitivisme schématisé :

4.4 Le Constructivisme :
Le constructivisme est une théorie d’apprentissage développée par Piaget en 1923, elle
met en valeur les capacités mentales de l’apprenant dans la construction de sa connaissance, sur
la base du milieu et l’environnement qui l’entourent. L’approche constructiviste valorise
l’activité et la capacité de chaque sujet qui lui permettent « d’appréhender la réalité qui
l’entoure»1. Avec le constructivisme, les connaissances développées par les apprenants sont

1 Jean michel Besnier ( 2005), Les théories de la connaissance,p13


une reconstruction de la réalité. Cette réalité est construite par le sujet « au cours de ses activités
en interaction avec l’environnement »2. La compréhension chez l’apprenant est alors souvent
renouvelée. Elle s’élabore à partir de ses représentations des événements vécus antérieurement.
“Apprendre est donc, un processus d’ajustement de nos modèles mentaux pour s’adapter
à de nouvelles expériences”. En effet, l’apprenant confronte les connaissances reçues avec ce
qu’il a appris à travers ses propres expériences. Cette confrontation permet à de faire une re-
conceptualisation interne des connaissances reçues. Il s’agit en fait du phénomène de
restructuration conceptuelle à travers ses expériences.
L’assimilation et l’accommodation
Selon Jean Piaget (1964) un individu confronté à une situation donnée va mobiliser un
certain nombre de structures cognitives, qu’il nomme schèmes opératoires. L’apprentissage
de ces schèmes se fait à travers deux processus complémentaires : L’assimilation et
l’accommodation
L’assimilation est l'action de l'individu sur les objets qui l'entourent, en fonction des
connaissances et aptitudes acquises par le sujet. Mais il y a inversement une action du milieu
sur l'organisme, appelée accommodation, qui déclenche des ajustements actifs chez ce dernier.
Pour que le mécanisme d’accommodation s’opère il faut dans un premier temps, qu’une
tentative d’assimilation ait lieu afin que les structures cognitives soient déjà mobilisées.
L’assimilation crée une perturbation au sein des structures cognitives que Piaget nomme
«conflit cognitif» qui est elle- même régulée afin d’arriver à une nouvelle forme d’équilibre.
Le constructivisme considère l’appropriation du savoir à travers des conflits cognitifs, des
phases de rupture et de consolidation capables de faire avancer la construction des
connaissances.
Constructivisme schématisé :

4.5 Le socioconstructivisme :
Le socioconstructivisme, qui remonte à Vygotsky (1978)3, est une approche selon
laquelle la connaissance interpersonnelle est réalisée par sa construction sociale. Le monde

2 Francis DANVERS ( 2009), S’orienter dans la vie : une valeur suprême? : Essaie d’anthropologie
de la formation, P123

3 Vygotsky, L. S ( 1978) Mind in society: The development of higher psychological


processes,Cambridge,MA: Harvard University Press
social d'un étudiant ou d’un élève est un concept important dans le socioconstructivisme. Il
comprend tous les gens qui peuvent avoir un impact direct sur cette personne, y compris des
professeurs, des amis, des étudiants, des administrateurs et des participants à toutes les formes
d'activité. Ceci prend en considération la nature sociale des processus d'acquisition et la place
que peut occuper une collaboration sociale plus large pour le développement de la connaissance
sur un sujet donné.
Le socioconstructivisme met alors l'accent sur le rôle des interactions sociales multiples
dans la construction des savoirs. La construction d'un savoir s'effectue dans un cadre social. Les
informations sont en relation avec le milieu social et le contexte. Elles sont le résultat à la fois
de ce que l'on pense et des interactions des autres. Il s’agit en effet d’une confrontation entre un
processus inter psychique et un processus intrapsychique.
Partant, nous pouvons affirmer que le web favorise une large interaction sociale grâce
aux échanges qui s’effectuent à travers des modalités de type « chat », ou « forum ». Ils
s’effectuent également à travers des constructions hypertextuelles ou multimédias avec l’envoi
des courriers électroniques. Dans ce cas, la théorie de Vigotsky, selon laquelle l’apprentissage
est le fruit d’une interaction sociale, est en train de s’étendre. En effet, un nouveau moyen de
socialiser est en train de se concrétiser de plus en plus : des groupes de discussion, une
participation personnelle active à la construction intersubjective d’hypothèses et des
interprétations ou choix opérationnels partagés et soutenus par une communauté virtuelle. Les
membres de cette communauté virtuelle, sans se connaître, sans se rencontrer partagent des
valeurs et des ressources matérielles. Pour ce faire, ils trouvent dans le tutorat des modalités de
guide, un soutien émotionnel et nouent tout de même un lien de solidarité à moyen terme. Bref,
les concepts clé de la communauté éducative sont la synergie, le partage et l’interaction.
Socioconstructivisme schématisé :

Section4. Les modèles d’apprentissage


Les modèles d'apprentissage représentent des structures théoriques ou des schémas
conceptuels qui tentent de décrire et d'expliquer les processus d'acquisition de connaissances et
de compétences chez les apprenants. Il existe plusieurs modèles d'apprentissage, chacun mettant
l'accent sur différents aspects du processus éducatif.
Le modèle transmissif, également connu sous le nom de modèle didactique ou modèle
de transmission, est une approche traditionnelle de l'enseignement qui met l'accent sur le rôle
central de l'enseignant en tant que détenteur du savoir. Ce modèle est souvent caractérisé par
une transmission unidirectionnelle de l'information de l'enseignant vers l'apprenant, avec une
importance accrue accordée à la mémorisation de faits et à la reproduction de connaissances.
Bien que le modèle transmissif ait été largement utilisé dans le passé et puisse encore
être observé dans certaines situations d'enseignement, il a fait l'objet de critiques pour son
manque d'interaction, sa passivité des apprenants et son éloignement des principes
pédagogiques plus modernes qui encouragent l'engagement actif, la réflexion critique et la
construction du savoir par les apprenants. Les approches pédagogiques contemporaines tendent
souvent à intégrer des éléments d'interaction, de collaboration et d'application pratique dans le
processus d'enseignement.
Le modèle béhavioriste de l'apprentissage est basé sur les principes du behaviorisme,
une approche théorique qui considère le comportement observable comme le principal
indicateur de l'apprentissage. Les théoriciens du behaviorisme, tels que B.F. Skinner et John B.
Watson, ont influencé ce modèle, en mettant l'accent sur les stimuli externes, les réponses
comportementales et les conséquences de ces réponses.
Bien que le modèle béhavioriste ait été critiqué pour sa simplification de la complexité de
l'apprentissage humain en ignorant les aspects cognitifs, il a contribué à développer des
techniques d'enseignement efficaces, en particulier dans les contextes où des objectifs
comportementaux spécifiques doivent être atteints. De nos jours, les éléments du behaviorisme
sont souvent intégrés à d'autres modèles d'apprentissage pour former des approches plus
complètes.
Le modèle socioconstructiviste de l'apprentissage repose sur les principes du
constructivisme, une théorie de l'apprentissage qui met l'accent sur le rôle actif des apprenants
dans la construction de leur propre savoir. Le socioconstructivisme étend cette perspective en
soulignant également l'importance des interactions sociales dans le processus d'apprentissage.
Le socioconstructivisme vise à créer un environnement d'apprentissage interactif,
dynamique et centré sur l'apprenant, où la construction du savoir est le résultat d'interactions
sociales significatives et d'une réflexion active. Ce modèle a des implications profondes pour
la conception des programmes d'enseignement et la pratique pédagogique.
Synthèse

Section 5. Quelques approches pédagogiques pour l’enseignement des langues

5.1 La pédagogie par objectifs

Emergence de la notion :
La Pédagogie par objectifs trouve son origine aux Etats – Unis dans un contexte socio-
économique de rationalisation des processus de production industrielle (Taylor) notamment
dans l’industrie automobile. Cette méthode de travail consiste à spécialiser une tâche à
l'extrême. La mise en œuvre consiste à faire des actions répétitives simples dans un processus
de production. Ce système est bien mis en évidence dans les procédés de travail à la chaîne
(production automobile Ford, 1920).
La pédagogie par objectifs trouve également son origine dans le contexte théorique du
béhaviourisme. Cette conception rejette la référence à la conscience, elle postule qu’il faut se
centrer sur les comportements observables et mesurables que l’apprentissage permet et que l’on
peut produire n’importe quel apprentissage à condition d’utiliser les techniques adéquates.
L’idée prônée par Ralph Tyler (1935), initiateur de la pédagogie par Objectifs, est de proposer
une organisation scientifique et rationnelle de l’éducation. Celle-ci doit adapter l’homme aux
besoins et valeurs de la société et les traduire en objectifs. Il faut sortir des généralités
grandiloquentes et infécondes en matière d’action éducative. Il faut une formulation claire des
objectifs pour pouvoir les évaluer et donc pour contrôler l’enseignement. Les objectifs doivent
être définis en termes de comportements attendus, en termes de réactions externes à la
conscience. Les formulations renvoient à des activités vues du point de vue de l’élève et non du
point de vue du projet de l’enseignant. La formation est d’autant plus efficace si l’on nomme le
résultat attendu, si l’on dit ce que l’on attend exactement que l’apprenant fasse à l’issue de la
formation, dans des termes précis et sous forme de comportement observable.
Définitions des notions
Outre la notion de comportement observable, la PPO s’articule autour de deux notions
principales : l’objectif général et l’objectif spécifique
Un comportement observable s’oppose à une action mentale : c’est la manifestation externe
d’une activité interne. Un observateur peut se rendre compte par au moins l’un des cinq sens de
l’activité de la personne et attester de sa réalisation.
L’intention pédagogique exprime la direction de changement que le formateur formule pour
l’apprenant, ce qu’il sera capable de faire au terme de l’apprentissage, c’est une orientation qui
va donner du sens à la séquence pédagogique. Elle ne fournit pas d’indication précise sur les
résultats escomptés
L’objectif pédagogique exprime le résultat visible qu’un apprenant doit atteindre, ce qu’il sera
capable de faire au terme de l’apprentissage. Il objective l’effet attendu, le rend concret,
observable. C’est pourquoi il est libellé avec un verbe d’action et qu’il privilégie les faits.
L’intention concerne plus le contenu, l’objectif concerne plus la personne.
Intention et Objectif sont deux notions complémentaires, l’objectif matérialise l’intention,
l’intention donne du sens à l’objectif qui a besoin d’être mis en perspective dans une vision
globale à moyen ou long terme.
Exemple : « Je veux que les jeunes comprennent l’importance de l’argent dans la vie
quotidienne », cette phrase prononcée par un formateur de jeunes adultes exprime une intention
pédagogique. « Le jeune doit être capable d’établir un budget prévisionnel équilibré à partir des
informations suivantes… » est un objectif.
Selon des auteurs comme Hameline et Mager,
L’objectif général est un énoncé d’intentions pédagogiques décrivant en terme de capacités de
l’apprenant l’un des résultats escomptés d’une séquence d’apprentissage.
L’objectif spécifique ou opérationnel est issu de la démultiplication d’un objectif général en
autant d’énoncés rendus nécessaires pour que 4 exigences opérationnelles soient satisfaites :
- décrire de façon univoque le contenu de l’intention pédagogique
- décrire une activité de l’apprenant identifiable par un comportement observable
- mentionner les conditions dans lesquelles le comportement souhaité doit se manifester
- indiquer à quel niveau doit se situer l’activité terminale de l’apprenant et quels critères
serviront à évaluer le résultat

Les conditions de réalisation d’un objectif opérationnel sont les circonstances dans lesquels
le comportement va se manifester. Elles peuvent inclure le temps, le matériel, les supports, la
guidance,… Elles font référence à l’exécution des tâches.
Les critères de réussite d’un objectif opérationnel indiquent ce que l’on exige exactement. Ils
définissent les performances minimales exigées.
Exemple d’objectif opérationnel (d’après J.P Martin et E Savary : Formateur d’adultes)
«L’adulte sera capable de procéder dans des conditions réelles, à la mise en marche d’une
locomotive, en se conformant aux mesures de sécurité en vigueur »

Autres exemples d’objectif opérationnel :


- L’élève sera capable de reconnaître en les nommant au moins 4 poissons parmi les dix
représentés sur la feuille
- Le candidat sera capable de rédiger une synthèse de ces tris documents en 1000 mots, avec
10% de tolérance, en respectant les nuances qu’ils introduisent sur le thème.
Pédagogie Par Objectifs, approche par objectifs
La pédagogie par objectifs est une référence employée par beaucoup d’organismes et de
formateurs ; les mêmes mots prennent pourtant des significations, des acceptations différentes.
La première acceptation est celle d’une méthode pédagogique construite rationnellement.
Toutes les connaissances, compétences à acquérir sont déclinées en termes d’objectifs généraux
et opérationnels. Des niveaux intermédiaires peuvent être introduits (objectifs intermédiaires)
quand l’objectif général est important. On se réfère à des méthodes de construction des objectifs
pédagogiques, comme on se réfère à des process et méthodes dans l’industrie. Des taxonomies
ont été construites pour aider les formateurs à formuler les objectifs. Dans l’apprentissage, seuls
sont évalués les comportements observables.
La Pédagogie Par Objectifs fait partie des méthodes co-actives dans le sens où il y a deux actions
articulées dont l’une détermine le déroulement de l’autre, celle du formateur et celle de l’élève.
L’activité de l’élève est requise mais guidée de l’extérieur. L’élève est actif mais sous un
contrôle externe.
La deuxième acceptation est plus large et floue. La pédagogie par objectifs est une
référence ou une technique ; on parle alors d’approche par objectifs. Elle n’est pas incompatible
avec les méthodes qui prennent en compte les opérations mentales, les processus de
raisonnement, l’influence de l’environnement social, … pour lesquelles l’acte d’apprendre est
beaucoup plus que l’association d’un stimulus et d’un comportement observable.
La définition d’objectifs est une technique qui permet de :
- De construire des référentiels de formation ou d’évaluation avec la préoccupation de mettre
en évidence les compétences visées en référence à la situation professionnelle, sociale ou
culturelle.
- De rendre explicites les buts de la formation pour tous les partenaires :
o L’apprenant qui peut choisir une formation en connaissance de son but, peut évaluer sa
progression
o Le commanditaire de la formation qui peut négocier précisément les résultats visés
o Le formateur qui peut contractualiser les attendus avec l’apprenant et le commanditaire.
o D’évaluer de façon pertinente et explicite les résultats de la formation.
Richesse et limites de la Pédagogie par Objectifs
Les richesses
- elle construit la programmation et la progression autour de l’activité de l’apprenant
- elle représente un guide dans l’action pédagogique
- la précision des critères d’évaluation permet de réduire l’impact des valeurs
- elle fournit une base rationnelle pour l’évaluation formative
- elle permet d’établir les bases d’un apprentissage individualisé.
Les limites
- Une entrée étroite par les objectifs peut isoler le comportement du contexte social dans
lequel il est produit
- Elimination des valeurs humaines par l’illusion de la transparence, de la clarification des
intentions
- Le morcellement des contenus implique la perte d’un point de vue d’ensemble
- Un trop grand découpage des contenus est réducteur et contribue à une perte de sens
- L’apprenant risque d’être soumis aux objectifs de l’enseignant, celui-ci ne fait aucune place
à l’imprévu
- L’apprenant a une place d’exécutant, il ne prend pas part à la découverte progressive des
contenus en suivant son propre progression.
- Le travail intellectuel de l’apprenant est réduit, le travail est « mâché ».
Pédagogie Par Objectifs et Enseignement Programmé
Tout comme la PPO, l’enseignement programmé trouve dans le behaviorisme ses fondements
théoriques. L’enseignement programmé se réfère plus radicalement à la théorie du
conditionnement opérant développé par Skinner (1940) : on renforce par une récompense telle
réponse souhaitée.
Les principes fondamentaux de l’enseignement programmé (Skinner, Crowder) sont :
- Les connaissances à transmettre, les compétences à acquérir sont décomposables en unités
élémentaires
- Le programme d’enchaînement des unités fixe la progression de l’apprentissage
- Implicitement, il existe une meilleure formule pour faire acquérir chacune des unités
élémentaires
- L’acquisition est vérifiée pas à pas à partir de la réponse fournie
- La progression ne se poursuit que si la réponse fournie le permet
A partir de ces principes, des programmes qui ordonnent stimuli réponses sont développés.
L’enseignement programmé permet de ne pas faire appel à un enseignant mais d’utiliser des
machines à enseigner. C’est la forme ultime de la rationalisation de l’éducation et de
l’organisation scientifique de l’apprentissage.

Lexique des principaux termes utilisés dans la PPO


Finalité :
Une finalité est une affirmation de principe à travers laquelle une société (ou un groupe social)
identifie et véhicule ses valeurs. Elle fournit des lignes directrices à un système éducatif.
But ou intention pédagogique
Un but (ou intention pédagogique) est un énoncé définissant de manière générale les intentions
poursuivies par une institution, ou un groupe ou par un individu (formateur) à travers un
programme ou une action déterminée de formation
Le but introduit dans le projet pédagogique la notion de résultat attendu.
Référentiel
Un référentiel définit les compétences attendues pour obtenir un diplôme (référentiel diplôme)
ou pour exercer un métier (référentiel métier). Il fait l’inventaire des capacités requises pour le
métier. Le référentiel diplôme définit les objectifs de formation.
Compétence
Une compétence est l’aptitude à réaliser une action dans des conditions observables, selon des
exigences définies.
Capacités
Manifestation d’aptitudes acquises dans un ou plusieurs domaines. Elle n’est pas mesurable en
tant que telle, mais induit des compétences qui, elles sont évaluables.
Capacité transversale
Aptitude commune aux différents domaines, exemple s’approprier un message, s’informer
Taxonomie
C’est une classification qui instaure un ordre entre les éléments, elle se veut exhaustive, les
classes sont mutuellement exclusives. Par exemple, la taxonomie de Bloom définit 6 grandes
catégories d’objectifs organisées du plus simple au plus complexe : connaître (mémoriser),
Comprendre (reformuler, reconnaître), Appliquer (pouvoir utiliser), Analyser (décomposer en
parties, comprendre les relations), Synthétiser (organiser un ensemble cohérent), Evaluer
(fonder un jugement en fonction de critères).
Savoirs
Ensemble de connaissances que l’élève maîtrise. Les savoirs relèvent du domaine cognitif
Savoir – faire
le degré d’habilité que l’élève manifeste pour résoudre un problème posé. Un savoir-faire peut
désigner un acte psychomoteur mais également la maîtrise d’une procédure ou d’une technique
Savoir être
Un comportement, une attitude à prendre dans une situation donnée. On est dans le domaine du
socio affectif.
Pré-requis
Minimum de connaissances nécessaires pour réaliser l’exercice demandé
Evaluation formative
Diagnostic en cours de formation, permettant de modifier, adapter l’action en cours ; l’objectif
est de prendre connaissance des progrès du stagiaire et de repérer ses difficultés d’apprentissage
pour y remédier
Evaluation sommative
Diagnostic permettant de faire le bilan après une période de formation. L’objectif est de faire
un bilan des objectifs que le stagiaire a atteint en vue d’une validation
Evaluation normative
Comparaison de la performance obtenue par un élève aux performances du groupe, ou à des
normes en vigueur
Evaluation prédictive ou diagnostic
L’objectif est de connaître le niveau d’entrée du stagiaire afin de construire son itinéraire de
formation
Evaluation critériée
Evaluation fixant la performance atteinte en fonction de conditions et d’exigences connues
5.2 L’approche par compétences :
L'approche communicative est une méthode d'enseignement des langues qui met l'accent sur la
communication effective et la compréhension contextuelle plutôt que sur la simple acquisition
de règles grammaticales. Cette approche vise à former les apprenants à utiliser la langue de
manière pratique dans des situations réelles. Cependant, comme toute méthode d'enseignement,
elle présente à la fois des apports et des limites. Les principes de base de l’approche
communicative sont les suivants :
5.2.1 La centration sur l’apprenant et la prise en compte de ses besoins
La révolution qui s’est opérée dans l’enseignement des langues étrangères n’aurait sans
doute été qu’un coup d’épée dans l’eau si elle n’avait pas porté un regard nouveau sur
l’apprenant et sur le rôle qu’il doit jouer dans la construction de son apprentissage. L’approche
communicative met l’accent sur l’apprenant en tant qu’"acteur principal de son apprentissage
" et "sujet actif et impliqué de la communication" (F. Debyser, 1986, cité par Martinez, 1996 :
76), ce qui vise à la fois sa responsabilisation, sa conscientisation et son autonomisation, mais
également l’individualisation qui contribue à augmenter la motivation de l’apprenant, "facteur
clé de la réussite de l’apprentissage des langues" (Brodin, 2002, cité par E. Duchiron, 2003 :
12 ).
Selon Richterich, puisque l’enseignement d’une langue est en étroite relation avec le
type de public auquel il s’adresse, il est indispensable de faire une description minutieuse de ce
public et de centrer l’activité enseignante sur ses besoins et ses motivations. En effet, c’est à
partir de ces besoins et de ces motivations que part l’approche communicative pour
l’élaboration des programmes d’enseignement. Cette centration se matérialise également par la
prise en compte des productions des apprenants, qui constituent le point de départ dans
l’établissement de la progression à suivre et du dosage des activités (évaluation diagnostique).
Déjà, depuis le début de ce siècle, Jean Dewey, un pédagogue américain, a insisté sur
un pôle important de la situation didactique. Avant lui, l’enseignement est focalisé sur les
contenus et rien que sur les contenus. Autrement dit, "pour enseigner le latin à John, il faut
connaître le latin". Jean Dewey, quant à lui, estime que "pour enseigner le latin à John, il faut
connaître John" (A. Rieunier, 2000 : 37-38).
Cependant, le recensement des besoins langagiers des apprenants – notamment en
milieu scolaire – n’est pas chose aisée, d’autant plus que l’éventail de ces besoins est
extrêmement large, puisqu’il s’agit en fait de définir, de la manière la plus complète, la
personnalité de l’apprenant auquel l’enseignement est destiné. En outre, ces besoins ne peuvent
être clairement exprimés par les apprenants eux-mêmes. C’est pourquoi il appartiendrait au
didacticien de les déterminer de façon globale.
5.2.2 Le recours aux documents authentiques
L’approche communicative se caractérise par le recours aux documents authentiques,
l’une des innovations les plus importantes de cette démarche. Par documents authentiques, on
désigne :
"Des énoncés produits dans des situations réelles de communication et non en vue de
l’apprentissage d’une seconde langue. Ils appartiennent ainsi à un ensemble très étendu de
situations de communication et de messages écrits, oraux et visuels, d’une richesse et d’une
variété inouïes : des documents de la vie quotidienne (plan d’une ville, horaires de train,
dépliants touristiques, etc.) à ceux d’ordre administratif (fiches d’inscription, formulaires pour
ouvrir un compte bancaire ou pour obtenir une carte de séjour, etc.) en passant par les
documents médiatiques écrits, sonores ou télévisés (articles, bulletins météorologiques,
horoscopes, publicité, feuilletons, etc.), sans oublier les documents oraux (interviews,
chansons, conversations à vif, échanges spontanés, etc." ni ceux qui allient textes et images
(films, bandes dessinées, etc.) ou ceux qui sont uniquement iconographiques (photos, tableaux,
dessins humoristiques, etc.) (J.-P. Cuq, 2002 : 391-392).
L’utilisation de ces documents authentiques se justifie par la motivation fournie à
l’apprenant, d’une part parce que cela lui permet de comprendre des échanges réels et parce
qu’on s’est rendu compte que la langue n'est acquise que lorsqu'on arrive à communiquer avec
ses interlocuteurs dans des situations réelles. D’autre part, il est confronté à une langue variée
socialement et il développe son autonomie, dans la mesure où les stratégies utilisées en classe
pour appréhender le sens des documents authentiques sont supposées réinvestissables hors de
la classe (J-J. Richer, 2003 : 93).
Même fabriqués dans une perspective pédagogique, ces documents doivent avoir une
apparence authentique, comme l’expliquent H.BOYER, M. BUTZBACH et M. PENDANX
(1990 : 37) : "leur contenu se veut porteur d'une certaine authenticité : on peut parler de
vraisemblance à propos de ces documents que certains qualifient de réalistes. " Cependant, il
faut noter que les documents authentiques nécessitent, comme le souligne J.-P. Cuq une analyse
prépédagogique :
"La complexité de certains documents, leur longueur ou une langue trop spécialisée peuvent
constituer des aspects particulièrement rebutants ; il est donc quelquefois judicieux de savoir
renoncer à l’aspect brut du document et de le didactiser, par exemple, par des coupures
signalées." (J.-P. Cuq, ibid. : 393).
5.2.3 L’emphase sur le discours
L’approche communicative privilégie le travail sur le discours. C’est pourquoi elle
limite au maximum le recours aux phrases, surtout quand elles sont décontextualisées, et
préfèrent utiliser des documents de toutes sortes comme supports d’enseignement. En effet, il
est parfois difficile de saisir certaines notions grammaticales quand nous avons recours aux
phrases dans les activités ou dans les exemples. Ainsi, il n’est pas possible par exemple de
comprendre le sens de la locution conjonctive « sous prétexte que » dans la phrase suivante, ni
la différence de sens qui existe entre elle et la locution conjonctive « parce que » :
II n'est pas venu sous prétexte qu'il a eu un problème avec sa voiture.
5.2.4 L’emphase sur le sens
La linguistique formelle s’intéresse davantage aux formes linguistiques qu’aux
significations qu’elles revêtent. Si cette situation est légitime pour le chercheur, laquelle
situation est considérée comme une option de recherche, ce n’est sans doute pas le cas pour un
apprenant en langue étrangère qui est appelé à s’exprimer en langue étrangère ou à comprendre
un discours en langue étrangère :
" L’élève qui apprend une langue étrangère n’a pas les mêmes préoccupations que le linguiste
; la seule chose qui compte pour lui c’est le sens, soit qu’il essaie de s’exprimer : dans ce cas
ce qui lui importe est de communiquer du sens avec des formes nouvelles ; soit qu’il cherche à
comprendre et dans ce cas il cherche à tirer du sens d’une suite de formes étrangères."
(F.Debyser, cité par P. Bertocchini et E. Costanzo, 1989 : 75)
Ainsi, après une disparition totale des méthodes audiovisuelles, la grammaire réapparaît dans
les approches communicatives pour s’attacher cette fois-ci à l’organisation du sens : "pour dire
ceci, j'ai besoin de tel outil linguistique, et celui-ci fonctionne ainsi." G. CORDIVAL, ( ?)). Ce
sens ne peut plus être celui de l’énoncé isolé, mais celui qui résulte de l’interaction entre les
énoncés qui précèdent ou succèdent, le contexte, l’intention de communication, etc.
5.2.5 L’emphase sur la compétence communicative
Avec l’approche communicative, il n’y a pas que la compétence linguistique qui doit
être enseignée, mais également et surtout la compétence communicative dans toutes ses
composantes constitutives. "La langue est vue avant tout comme un instrument d’interaction
sociale. Dès lors, il s’agit de développer chez l’apprenant une compétence de communication"
(K. TANRIVERDIEVA (2002 : 36). C’est pourquoi l'activité, ou la tâche communicative, vient
supplanter la structure linguistique et une large place est accordée au jeu de rôle et à la
simulation qui s'approchent des conditions réelles d'échanges langagiers, d’où la focalisation,
à partir de 1980, sur l’enseignement du « français fonctionnel » qui a pour objectif d’aider
l’apprenant à faire de la langue un outil de communication, c’est-à-dire un système qui lui
permet d’entrer en contact avec les autres et non pas à mémoriser une infinité de structures
linguistiques. De façon concrète, cela consiste à l’aider à comprendre et à produire, aussi bien
à l’écrit qu’à l’oral, des discours narratifs, descriptifs, informatifs, argumentatifs, informatifs,
etc. et à lui proposer des activités de grammaire qui le rapprochent de la communication
authentique au lieu d’être des exercices mécaniques qui répondent à des questions sans but de
transmission réelle d'information comme "quelle est la couleur de cette chemise ?" ou
"combien de crayons ai-je dans ma main ?".
Par ailleurs, contrairement à la méthodologie audiovisuelle, l’approche communicative
s’est préoccupée de cet aspect pragmatique de la communication, en prenant les performances
communicatives (demander, exprimer son opinion, ordonner, etc.) comme objectifs des cours.
5.2.6 Les interactions en classe
Avec l’approche communicative, une nouvelle façon de concevoir et d‘organiser une
classe de langue a été instaurée : On favorise les activités qui demandent de la créativité et qui
privilégient l’interaction en classe comme les travaux de groupe. Par interaction, Goffman
"entend à peu près l’influence réciproque que les partenaires exercent sur leurs actions
respectives lorsqu’ils sont en présence physique immédiate les uns des autres." (Goffman,
1973, cité par E. Duchiron, 2003 : 13). Les interactions dans la classe sont également
considérées comme une ligne de force des approches communicatives :
"Dans l'approche communicative, la parole (talk) est générée par l'élève et non par
l'enseignante ou l'enseignant, l'interaction entre les élèves est au coeur de l'expérience
d'apprentissage et ce dernier se fait au moyen de tâches (taskbased) plutôt que d'instructions
portant sur des structures grammaticales précises (discrete point)." (S. de LOTBINIERE -
HARWOOD, 2001).
5.2.7 Le travail de groupe
François Muller (1998) a constaté qu’en milieu hétérogène, le travail de groupe est plus
efficient que le travail individuel. En effet, dans un enseignement de type socioconstructiviste,
il est clair que les interactions et les communications entre élèves favorisent l’apprentissage. Il
peut constituer un environnement favorable aux progrès individuels. Par ailleurs, la résolution
en groupe de certaines situations-problèmes favorisera le développement des connaissances et
des compétences cognitives individuelles.
5.2.8 Les activités ludiques, le jeu de rôle et la simulation
L’adjectif « ludique », vient du latin «ludus » qui veut dire « plaisanterie », « école ».
"Tout est dit, remarque Christine Partoune, écoles et activités plaisantes sont une sorte de
pléonasme" (C. Partoune, 1999).
Nous savons tous que les activités de grammaire et de vocabulaire occupent une place
prépondérante dans la classe de langue et un temps considérable. Toutefois, beaucoup de
didacticiens affirment que ces activités, bien qu’elles soient correctement réalisées par les
apprenants, ne mènent pas forcément à une amélioration de leurs productions écrites. En effet,
Schneuwly, cité par F. Mangenot (1997) souligne qu’aucun effet du travail mené dans ces
domaines n’est constaté sur la production écrite des élèves. A son tour, F. Mangenot (1997)
confirme ce constat :
" Je dois dire que je suis frappé, chaque fois que je fais des visites dans des classes de ZEP, par
le décalage qui existe entre les connaissances déclaratives (les élèves sont généralement
capables de réciter un certain nombre de règles ou de conjugaisons) et les connaissances
procédurales (aucune règle n'est respectée dans leurs textes)"
Déjà bien avant eux, Caré & Debyser, (1978), avaient déjà vu que "le jeu, mieux que beaucoup
d'exercices, permet le maniement de certaines régularités de la langue".
L’apprentissage classique d’une langue, avec les activités très peu motivantes qu’il met
en œuvre, est de surplus stressant pour l’apprenant par le sérieux et la concentration qu’il
impose d’une part, et la peur de se tromper et d’être ridiculisé par ses camarades d’autre part.
Tous ces problèmes peuvent être évités par les activités ludiques. D’ailleurs, quand il s’agit de
ces activités, même les élèves qui n’ont jamais pris la parole en classe y prennent part. Dans ce
sillage, P. Julien (1988 : 4) dira :
"Lorsqu'on joue, le poids des éventuels échecs n'est-il pas allégé ? Ne peut-on pas toujours
rejouer et gagner ? En fait, grâce aux activités ludiques, les capacités individuelles sont mises
en cause de manière beaucoup moins culpabilisantes qu'à travers les modes d'évaluation
traditionnels du système scolaire".
Ce point de vue est également partagé par Janine Courtillon (2002). Il est préférable,
dit-elle, que les activités soient ludiques car elles stimulent alors même les plus timides et qu’on
utilise également des chansons et des scènes de théâtre brèves.
L’approche communicative fait également appel au jeu de rôle et à la simulation. Le jeu
de rôle, allant des entretiens d'embauche à une conversation avec l’épicier, offre à l’apprenant
une occasion de participer aux situations réelles de communication.
Beaucoup plus élaborée que le jeu de rôle, la simulation globale "consiste à faire inventer par
un groupe d’apprenants un univers de référence – par exemple un immeuble, un village, une
île, un hôtel (…) et à simuler toutes les fonctions du langage que ce cadre (…) peut faire surgir"
(J.-P. Cuq, 2003 : 221). Avec ces deux types d’activités, l’apprenant s’amuse et s’implique si
bien qu’il oublie qu’il est en train d’acquérir une langue étrangère.
5.2.9 La motivation de l’apprenant
La motivation en contexte scolaire se définit "comme un état dynamique qui a ses
origines dans les perceptions qu'un élève a de lui-même et de son environnement et qui l'incite
à choisir une activité, à s'y engager et à persévérer dans son accomplissement afin d'atteindre
un but." (F. Muller, 1998). Avant tout apprentissage, il est nécessaire de passer par la recherche
de trucs, de recettes, d'outils pouvant motiver les élèves, de moyens qui permettent à l’apprenant
d’avoir une représentation positive du travail qu’il accomplit, d’avoir le sentiment d'être en
sécurité dans sa réalisation et d’y être actif. Tous ces sentiments peuvent lui être procurés par
les activités ludiques.
5.2.10 La dimension sociale du langage
Bien que les travaux de Bruner et Vygotski soient traduits en français depuis les années
80, la dimension sociale du langage n’est prise en compte que depuis peu dans l’enseignement
du français.
Enseigner la langue dans sa dimension sociale, signifie prendre en considération les
registres et variétés de la langue ainsi que les différents rôles sociaux des individus. En effet,
avec l’approche communicative, l’enseignement de la grammaire n’est pas seulement focalisé
sur les règles d'usage (système linguistique), mais aussi sur les règles de prise de parole qui
varient selon les sociétés et parfois à l'intérieur d'une même société. Ces variations sont
tributaires du lieu, du moment, du thème et des interlocuteurs en présence. Il est clair qu’on
n'intervient pas de la même façon lors d'une discussion entre amis, d'une réunion
professionnelle, d'une conférence....
Ainsi, puisque la langue est parlée différemment selon les milieux et les situations de
communication, l’apprentissage doit diversifier les occasions de pratique de la langue et tenir
compte des différents registres, en diversifiant les supports. C’est ce qu’explique R’kia Laroui
(2004 : 9) :
"La maîtrise de la langue s’acquiert par la pratique et grâce aux occasions diversifiées qui
placent l’élève en situations de communications authentiques. Le texte littéraire perd sa
suprématie au profit des textes utilitaires: lettres, articles de journaux et de périodiques,
réclames, affiches, bandes dessinées… La langue orale devient objet d’étude au détriment
d’une approche axée sur la maîtrise de la langue écrite comme moyen d’accès à des formations
culturelles".
5.2.11 La contextualisation des activités
Les activités visant l’appropriation de la compétence communicative doivent être
contextualisées. Autrement dit, elles doivent s’inscrire dans un temps et un lieu précis, avec des
acteurs caractérisés socialement et répondre à un échange réel de communication : Les
participants à la communication doivent réellement donner un point de vue, expliquer un
phénomène, réfuter une opinion, véhiculer du sens tel que le résume J. Courtillon (1995 :
118) :
"Et c'est en cela que réside le second facteur qui entraîne à la production : la possibilité et
bientôt le désir de parler en langue étrangère pour exprimer un point de vue, une idée, une
demande ou une remarque, bref de s'exprimer pour dire quelque chose et non pour faire une
phrase correcte."
Ainsi, la contextualisation renvoie explicitement l’apprenant à la situation spatio-
temporelle dans laquelle il est engagé, incluant aussi bien les éléments humains que matériels.
A titre d’exemple, dans le cadre de l’expression de l’ordre, on peut proposer l’activité suivante
: «Vous êtes vendeur de robots de cuisine. Vous expliquez à votre client le fonctionnement de
cet appareil en lui précisant ce qu’il doit faire et ce qu’il doit éviter… »
Sythèse
Apports de l'approche communicative :

- Focalisation sur la communication réelle : l'approche communicative met l'accent sur


la communication authentique, ce qui signifie que les apprenants sont encouragés à utiliser
la langue dans des situations pratiques et réelles. Cela favorise le développement de
compétences de communication efficaces.
- Contextualisation du langage : les activités sont souvent conçues pour se dérouler dans
des contextes réels, ce qui aide les apprenants à comprendre comment et quand utiliser la
langue de manière appropriée.
- Engagement actif des apprenants : les apprenants sont activement impliqués dans des
tâches et des activités qui simulent des situations de communication. Cela peut rendre
l'apprentissage plus motivant et stimulant.
- Développement des compétences linguistiques intégrées : l'approche communicative
cherche à développer les compétences de compréhension orale, de production orale, de
compréhension écrite et de production écrite de manière intégrée.
Limites de l'approche communicative :

- Manque de focus sur la précision grammaticale : certains critiques estiment que


l'approche communicative peut négliger la précision grammaticale au profit de la
communication. Cela peut conduire à des lacunes dans la maîtrise des règles grammaticales.
- Difficulté à évaluer certaines compétences : l'évaluation de certaines compétences
linguistiques, notamment la compréhension écrite et la production écrite, peut-être plus
complexe dans le cadre de l'approche communicative.
- Besoin de temps pour la préparation des activités : concevoir des activités
communicatives peut être chronophage pour les enseignants, ce qui peut être un obstacle,
en particulier dans des environnements où les ressources sont limitées.
- Difficulté à appliquer dans de grandes classes : l'approche communicative peut être
plus difficile à mettre en œuvre dans des classes surpeuplées où il peut être difficile de
donner à chaque apprenant suffisamment d'opportunités de pratique.
Section 7. La perspective actionnelle
La perspective actionnelle, également connue sous le nom d'approche/actionnelle, est
une approche pédagogique en enseignement des langues qui met l'accent sur l'utilisation
effective de la langue dans des situations réelles et significatives. Elle vise à préparer les
apprenants à être capables de communiquer et d'agir dans divers contextes de la vie quotidienne
plutôt que de simplement acquérir des connaissances linguistiques abstraites.
Après sa publication en 2001, le Cadre Européen Commun de Référence pour les
langues (désormais CECR) est devenu un outil central dans les classes et le choix
méthodologique des méthodes de français. Il nous est donc difficile d’échapper à ses références.
Son objectif est le plurilinguisme dans la mesure où il vise à former à la fois un médiateur
culturel et linguistique à travers la réalisation de tâches. Le CECR adopte donc une perspective
actionnelle qui vise à préparer les apprenants à être des acteurs sociaux à travers la réalisation
de tâches réelles (effectives) ou proches de la vie réelle (virtuelle) en classe de langue étrangère.
Cette nouvelle approche, qui commence petit à petit à remplacer les exercices et les activités
traditionnels, offre de nouvelles perspectives à l’enseignement/apprentissage des langues
étrangères selon lesquelles la langue devrait être utilisée non seulement comme un instrument
de communication, mais aussi comme un instrument d’action sociale. Les apprenants vont, dans
cette perspective, co-acquérir des connaissances au sein d’un groupe pour être capables de faire
face aux différents contextes lorsqu’ils seront en contact avec des francophones.
Dans la vie quotidienne, la communication ainsi que l’apprentissage de langues vivantes
passent, selon la perspective actionnelle, par la réalisation de tâches. Ces tâches ne sont pas
uniquement langagières même si elles impliquent le recours à des activités langagières et
sollicitent la compétence à communiquer des individus. On trouve, d’une part, des tâches
essentiellement langagières, c'est-à-dire que les actions requises ainsi que les stratégies mises
en œuvre pour leur réalisation portent d’abord sur des activités langagières, par exemple
demander des renseignements par téléphone, participer à une conférence, etc. D’autre part, on
trouve des tâches qui comportent une composante langagière et dont les actions requises ainsi
que les stratégies sont tributaires en partie des activités langagières et d’autres aspects non
langagiers comme, par exemple, préparer un plat à partir d’une recette. Par ailleurs, il est à noter
que certaines tâches peuvent s’effectuer sans faire appel à des activités langagières. Donc, les
tâches communicationnelles ou les tâches d’apprentissage ne sont que des tâches parmi
d’autres. Elles s’inscrivent, selon Robert (2008 : 94) « dans un acte social plus large de la vie
quotidienne ». Cette action en contexte social est liée à plusieurs domaines relevant de la vie
quotidienne : personnel (on passe un coup de téléphone à un ami pour avoir de ses nouvelles) ;
public (on prend les transports en commun, on achète un billet de bus, d’avion, etc. ;
professionnel (on participe à une réunion, on rédige une note, etc. ; éducationnel (on suit un
cours de langue, on s’inscrit à l’université, etc.).
La notion de tâche, suivant l’opinion de Coste « renvoie à une action finalisée, avec un
début, un achèvement visé, des conditions d’effectuation, des résultats constatables (réparer une
machine, remplir un formulaire, acheter un billet de train sur internet, jouer au loto) » (2009 :
15).
En ce qui nous concerne, on s’intéresse à la réalisation de tâches communicatives en classe de
langues étrangères, les tâches non langagières ne présentant pas forcément un grand intérêt.
La notion d’action dans le CECR est, selon Coste, très directement liée à une double option :
« poser l’apprenant aussi bien que l’utilisateur de langues comme un acteur social
œuvrant dans différents domaines ;considérer l’apprentissage et la communication
comme des actions de cet acteur social » (2009 : 15).
En effet, l’action en contexte authentique d’interactions sociales s’appuie sur la
réalisation d’activités langagières de réception, de production, d’interaction et de médiation qui
peuvent à leur tour être analysées en termes de production/compréhension d’actes de parole
(‘se’ présenter, saluer, remercier, demander une information, etc.) et de genres (conférence,
débat, etc.). Cependant, cette action comporte également des activités non langagières : se
déplacer, manipuler des outils, etc.
Pécheur, lors de son intervention au 7e congrès Panhellénique et International des
Professeurs de Français à Athènes le 24 octobre 2010, schématise la perspective actionnelle
comme suit : « notes personnelles »

Apprenant-utilisateur : acteur social (au centre de l’apprentissage)

Tâches Acquisition de savoir-faire, savoir, savoir-être, savoir-apprendre.

Contextes et situations

L’intérêt de cette schématisation de la perspective est triple :


- passer de l’homme en tant qu’acteur réagissant à un acteur agissant ;
- l’interaction entre l’utilisateur et l’environnement est pensée comme tâche à accomplir.
- La grammaire est considérée comme secondaire par rapport à la tâche à accomplir ;
ce schéma vaut autant pour l’utilisateur que pour l’apprenant. En effet, l’apprenant est un
utilisateur qui accomplit des tâches en utilisant la langue et la classe de langue est considérée
comme le premier milieu social ou le premier contexte situationnel dans lequel l’apprenant aura
des tâches à accomplir, comme par exemple les tâches de négociation, d’une part entre
apprenants-professeur et, d’autre part, entre apprenants eux-mêmes.

1. De l’approche communicative à la perspective actionnelle


Le CECR adopte la perspective actionnelle et la définit comme suit :
« La perspective privilégiée ici est [...] de type actionnel en ce qu’elle considère avant tout
l’usager et l’apprenant d’une langue comme des acteurs sociaux ayant à accomplir des tâches
(qui ne sont pas seulement langagières) dans des circonstances et un environnement donné, à
l’intérieur d’un domaine d’action particulier. Si les actes de parole se réalisent dans des
activités langagières, celles-ci s’inscrivent elles-mêmes à l’intérieur d’actions en contexte
social qui seules leur donnent leur pleine signification. Il y a tâche dans la mesure où l’action
est le fait d’un (ou de plusieurs) sujet(s) qui y mobilise(nt) stratégiquement les compétences
dont il(s) dispose(nt) en vue de parvenir à un résultat déterminé. » (2005 : 15)

Ce que l’on se propose donc désormais dans cette perspective actionnelle est de former
dans nos classes de langues, non plus un étranger de passage (comme c’est le cas des approches
communicatives) ou à l’inverse celui qui rencontre chez lui des étrangers de passage, mais un
acteur social plurilingue et pluriculturel, capable de s’adapter ou de s’intégrer dans les
différentes sociétés. Un acteur social qui, dans le cadre de sa formation universitaire et de sa
profession, doit désormais être capable de travailler en langue/culture étrangère. En d’autres
termes, l’objectif de l’enseignement/apprentissage de langues étrangères n’est plus de former
un apprenant capable de se comporter seulement dans des situations de communication
attendues mais de l’aider à devenir un utilisateur autonome et efficace de la langue/culture
étrangère.
Cette notion d’action est considérée d’après Springer comme la clé qui permet de « transformer
l’approche communicative en une matière plus noble et plus riche d’espoir pédagogique à
travers la notion d’action » (2009 : 28).
D’après cette présentation de la perspective actionnelle par le CECR, Puren (2008 : 2) observe
quatre prises de distance d’avec l’approche communicative :
- la distinction entre « apprentissage et usage » (apprenant et usager). Dans l’approche
actionnelle, la tâche de référence est la simulation dans laquelle cette distinction est
neutralisée puisqu’on demande à l’apprenant de faire précisément comme s’il était un
usager.
- l’approche communicative « privilégie les tâches langagières » et notamment les tâches
communicatives. Cependant, le CECR affirme que les tâches ne sont pas seulement
langagières.
- « l’agir de référence de l’approche communicative est l’acte de parole », qui est un agir
sur l’autre par la langue. Or l’agir de référence dans la perspective actionnelle est « l’action
sociale », à laquelle les actes de parole sont hiérarchiquement subordonnés.
- la situation de référence de l’approche communicative est « l’interaction conçue
principalement comme action réciproque de deux interlocuteurs ». Or la notion d’action
sociale dans le CECR élargit cette situation de référence à l’ensemble de la communauté,
aussi bien pour l’usage dans la société que pour l’apprentissage dans la classe.

En effet, on perçoit « des proximités, des continuités avec les approches communicatives :
conception de l’apprentissage reposant sur l’activité de l’apprenant ; souci de motiver
l’apprenant en l’impliquant dans des pratiques qui lui importent » (Coste, 2009 : 16).
Rosen (2009 : 9) établit le tableau suivant qui propose une synthèse des évolutions, réalisées
sous forme de continuum, mettant en avant moins des ruptures que des continuités marquées :

Approche communicative Perspective actionnelle


Public ciblé étranger de passage, développement citoyens européen/du monde, acteur
par la des échanges social à part entière
formation → sensibilité à la réalité de la → sensibilisation à une éducation
communication exolingue plurilingue et pluriculturelle
Objectif apprendre à communiquer en LE réaliser des actions communes,
ciblé par la → parler avec l’autre collectives, en LE
formation → agir avec l’autre
Activités par production/réception de l’oral et de interaction (voire co-action) et
excellence l’écrit médiation
→ pédagogie par activités → pédagogie par tâches
→ jeux de rôle et simulations → pédagogie par projet
→ recours aux outils et
environnements collaboratifs (web)
Principes importance donnée au sens importance donnée à la co-
forts - pédagogie non-répétitive, grâce au construction du sens dans un
développement d’exercices de contexte social de solidarité
communication. - pédagogie non répétitive, grâce à
- centration sur l’apprenant une participation à des activités
(l’apprenant devient le sujet et collectives pour accomplir à
l’acteur de l’apprentissage) plusieurs un but partagé
- aspects sociaux et pragmatiques de - centration sur le groupe (classe),
la communication (l’apprenant devient un citoyen actif
et solidaire.
- aspects sociaux-culturel et
pragmatiques de la communication
Arrière-plan passerelles établies entre théories théorie de l’activité mettant en avant
théorique linguistiques autour de la notion de une visée socio-culturelle et sociale :
compétence de communication (CC) → apprentissage envisagé comme
et apprentissage des langues une activité sociale et l’élève comme
→ questionnement sur l’acquisition acteur social
et l’enseignement de CC, passant → on n’apprend pas seul, mais avec
d’une pédagogie de l’enseignement à et grâce aux autres et en
une pédagogie de l’apprentissage transformant, de manière personnelle
et créative, ce qui a déjà été appris par
une communauté humaine

→ importance de la notion d’acte de


théories socio-cognitives de
communication pour l’enseignementl’apprentissage mettant l’accent sur
d’une langue
la dimension sociale du processus
→ importance accordée à
d’apprentissage :
l’autonomie individuelle
→ importance des actes langagiers et
→ formation d’un individu critique et
autres non langagiers
autonome → prise en compte de l’action dans
sa complexité
→ formation d’un individu critique
et autonome ainsi que d’un citoyen
responsable et solidaire
Évaluation - évaluation de la compétence de - évaluation des compétences
communication communicatives langagières et des
compétences générales individuelles
et sociales
- mise en place de dispositifs d’auto-
évaluation et d’évaluation formative

2. Qu’est-ce qu’une tâche ?


Le concept de tâche n’est pas nouveau dans la didactique des langues ; c’est aux
recherches et aux didacticiens anglo-saxons, comme Nunan (1989), Willis (1996) et Ellis
(2003) que l’on doit l’approche fondée sur la réalisation des tâches Task-Based learning (TBL).
Le noyau central du TBL est que les apprenants soient confrontés activement à la résolution
d’un problème dans la langue-cible (lors d’achats à effectuer, d’une visite médicale, etc.).
Ensuite, cette notion a été largement reprise par le CECR.
Kazeroni fait remarquer qu’il n’y a pas de « consensus sur une définition unique du
terme de tâche » (2004 : 163). Dans le présent article, on en cite trois qui nous semblent les plus
pertinentes, les plus complètes et les plus proches de notre conception. Nunan définit la tâche
communicative de la manière suivante : «une tâche est un plan de travail en classe qui implique
les apprenants dans la compréhension, la manipulation, la production ou l’interaction dans la
langue cible tandis que leur attention est principalement focalisée sur le sens plutôt que sur la
forme » [(1989 : 10) Notre traduction1].
Ellis, quant à elle, propose la définition suivante :
Une tâche est un plan de travail qui exige des apprenants qu’ils traitent la langue de manière
pragmatique dans le but de réaliser un résultat qui peut être évalué selon que le contenu des
propositions a été réalisé de façon correcte ou appropriée. Pour ce faire, elle exige d’eux de
centrer premièrement leur attention sur le sens et d’employer leurs propres ressources
linguistiques, la tâche peut également les obliger à choisir des formes particulières. Une tâche
vise à avoir un résultat sur l’utilisation de la langue qui doit ressembler, directement et
indirectement, à la manière dont on utilise la langue dans la vie réelle. Comme d’autres activités
langagières, une tâche peut engager une compétence de production ou de réception, des
compétences orales ou écrites et également différents processus cognitifs. [(2003 : 16) Notre
traduction2]
Le CECR définit la notion de tâche ainsi :
« Toute visée actionnelle que l’acteur se présente comme devant parvenir à un résultat donné
en fonction d’un problème à résoudre, d’une obligation à remplir, d’un but qu’on s’est fixé […]
Si l’on pose que les diverses dimensions ci-dessus soulignées se trouvent en interrelation dans
toute forme d’usage et d’apprentissage d’une langue, on pose aussi que tout acte
d’apprentissage/enseignement d’une langue est concerné, en quelque manière, par chacune de
ces dimensions : stratégies, tâches, textes, compétences individuelles, compétence langagière
à communiquer, activités langagières et domaines. » (2005 : 16)
Cette définition adoptée par le CECR est très proche de celle formulée par Ellis, car on
y retrouve la notion de résultat.
Ellis (2003 : 1-35) identifie plusieurs dimensions, que l’on a adaptées à notre manière, pour
définir une tâche3 :
- « La portée de la tâche » : elle inclut les tâches langagières, comme la réservation d’un
billet d’avion et les tâches non-langagières, comme par exemple les dessins. Elle permet de
distinguer la fonction sémantique de l’exercice et pragmatique de la tâche.
- « La perspective à partir de laquelle la tâche est considérée » : elle permet de distinguer
le canevas imaginé par l’enseignant du processus effectivement mis en place par les
apprenants. Ceci relève de la distinction entre la tâche centrée sur le sens et celle centrée
sur la forme. En effet, une tâche peut avoir été conçue pour encourager une approche centrée
sur le sens alors que sa mise en œuvre effective par les apprenants peut entraîner une
centration sur la forme plutôt que sur l’utilisation effective de la langue.
- « L’authenticité de la tâche ». Ellis (2003 : 6 et 305-307) prône des tâches présentant
deux types d’authenticité :
« Authenticité situationnelle », lorsque la tâche correspond à des actions de la vie réelle :
dessiner un enfant, par exemple.
« Authenticité interactionnelle », lorsque la tâche permet, aux apprenants en classe de langues
étrangères, la mise en œuvre de processus communicatifs présents dans la vie réelle.
- « Les compétences linguistiques nécessaires à la réalisation de la tâche » : la réalisation
d’une tâche nécessite des activités langagières orales et écrites, par exemple « réserver un
billet d’avion » ou « remplir un chèque », exige des compétences orales et écrites en même
temps.
- « Les processus cognitifs mis en place lors de la réalisation d’une tâche » : la réalisation
d’une tâche engage également un certain nombre de processus cognitifs, comme par
exemple la sélection, le raisonnement, la classification, etc.
- « Le résultat de la tâche » : le résultat de la tâche peut être jugé non seulement en
fonction des compétences linguistiques mais il est tributaire également du contenu, par
exemple raconter une histoire à partir d’une série d’images peut être évalué dans la mesure
où les apprenants ont réussi à raconter avec succès l’histoire ou non incluant tous les
événements réels de l’histoire et non de « faux événements ». Il est nécessaire, ici, de
distinguer entre le résultat outcome et l’objectif aim de la tâche. Le résultat se réfère à ce
que les apprenants sont arrivés à faire une fois la tâche terminée (raconter une histoire, par
exemple). Par contre, l’objectif se réfère aux propositions pédagogiques de la tâche qui
suscitent l’utilisation de la langue centrée sur le sens, réceptive et/ou productive.

3. Les tâches et leur rôle dans l’enseignement des langues étrangères


Selon Ellis, beaucoup de linguistes, de didacticiens et de spécialistes reconnaissent les
avantages de l’introduction des tâches en classe de langues étrangères. Elles peuvent être
introduites de deux manières :
- soit on les introduit dans les méthodes traditionnelles d’enseignement (« Task-supported
language teaching») ;
- soit on élabore l’ensemble du cursus autour des tâches (« Task-based language
teaching ») (2003 : 27).
Il est à souligner que dans les deux cas, l’utilisation des tâches dans la classe rend
l’enseignement/apprentissage d’une langue étrangère plus communicatif et interactif. En effet,
les tâches développent chez les apprenants la capacité d’une utilisation authentique de la langue
dans de vraies situations de communications liées au monde réel.
Dans une situation de communication authentique qui suppose l’utilisation de la langue
étrangère en voie d’acquisition, les tâches peuvent avoir deux fonctions :
- une fonction interactionnelle qui sert à établir et à maintenir le contact; A ce propos,
Mangenot et Louveau précisent que la tâche « est alors une activité qui n’est pas seulement
vraisemblable en termes de similitude avec la vie réelle, mais aussi interactionnellement
justifiée dans la communauté où elle se déroule (la classe, en général) » (2006 : 38). Elle
doit donc impliquer une communication la plus réelle possible entre les apprenants. Dans
cette perspective, l’introduction des tâches en classe est justifiée dans la mesure où elle
permet de créer de l’interaction par laquelle passe l’enseignement/apprentissage d’une
langue étrangère, comme dans l’acquisition naturelle d’une langue ;
- une fonction transactionnelle servant à échanger de l’information entre les
interlocuteurs.
Les tâches développent ces deux habilités chez les apprenants à travers la mise en œuvre
de situations de communication réelles. En fait, selon les principes de la perspective actionnelle,
la langue est acquise en communiquant. Les apprenants d’une langue étrangère découvrent le
système de la langue cible à travers l’apprentissage du processus de communication dans cette
langue et non le contraire. Pour certains auteurs comme Nunan, les tâches sont placées au centre
de toute conception du processus d’enseignement et d’apprentissage de langues étrangères.
Nunan (1989 : 11) représente le statut qu’il donne à la tâche de la manière suivante :
Teacher
Goals
role

Learner
Input TASKS
role

Activities Settings
D’après ce schéma, on remarque que la conception d’une tâche exige la prise en
considération de six paramètres : les objectifs, le support de départ (input), les activités que les
apprenants doivent effectuer, les rôles respectifs de l’apprenant et de l’enseignant, et enfin la
situation. D’autres auteurs, comme Willis et Ellis ajouteront un septième paramètre : le résultat,
qui constitue pour les apprenants l’objectif de la tâche.
Le CECR considère l’approche par la tâche comme le centre de gravité de toute la
conception du processus d’enseignement/apprentissage de langues étrangères. Elle permet de
repenser l’apprentissage-enseignement en tenant compte des besoins des apprenants et en
motivant le travail par une production finale. Springer affirme que « la tâche pédagogique
communicative constitue l’élément moteur d’une rénovation pédagogique de type actionnel »
(2009 : 33).
Les tâches effectuées en classe doivent, selon Rosen, présenter les caractéristiques
globales suivantes : « elles sont généralement choisies par l’enseignant en fonction de ses
objectifs ; elles sont effectuées par un seul apprenant ou par plusieurs ; leur accomplissement
donne lieu à une évaluation qui porte sur le fond (la tâche menée à bien avec succès), mais
également sur la forme (une réalisation linguistique correcte) » (2009 : 7).
Ces tâches sont censées contribuer au développement d’une capacité à communiquer en langue
étrangère. Cependant, Coste insiste sur le fait que l’exécution doit présenter un « intérêt
intrinsèque pour l’apprenant » et lui permettre de progresser en comportant des « enjeux réels »
(2009 : 18).
Par ailleurs, par opposition aux approches communicatives qui suivent une démarche
basée sur la séquence traditionnelle : présentation, pratique, production (PPP), la perspective
actionnelle commence par expliciter le produit final de la tâche.
Dans un cours de langue, le CECR, Guide pour les utilisateurs, confirme que :
La langue assume un autre rôle par rapport aux tâches à effectuer. On attendra non seulement
des apprenants qu’ils accomplissent correctement une tâche mais, qu’en outre, ils la réalisent
en employant les termes appropriés et corrects de la langue. C'est le cas même des approches
pédagogiques qui considèrent que les tâches à accomplir dans les cours de langues doivent être
le reflet fidèle de la vraie vie - puisque après tout, l'objectif des cours de langues consiste bien
à apprendre une nouvelle langue. Même dans une telle approche, il faut insister autant sur
l'apprentissage du système formel de la langue que sur le contenu de chaque tâche. (2002 : 102)
Le recours aux tâches en classe de langues étrangères doit s’appuyer aussi sur l’imaginaire et
la créativité, ce qui facilite bien évidemment l’enseignement/l’apprentissage dans la mesure où
les apprenants sont placés dans des situations proches du réel et que la réalisation des tâches en
classe permettra aux apprenants de les réaliser dans la vie quotidienne, notamment lorsque les
apprenants sont en situation exolingue n’ayant aucun ou peu de contact avec la langue étrangère
cible. Ces tâches simulées, bien qu’elles ne soient pas toujours identiques à la vie réelle,
permettent aux apprenants de créer des interactions et des échanges comparables aux échanges
réels. Par ailleurs, l’objectif dans une tâche, selon Bérard, « est double : c’est non seulement la
tâche elle-même qui est visée mais également la correction de la langue utilisée pour la
réaliser » (2009 : 40).

Synthèse :
Apports de la perspective actionnelle :
Contextualisation de l'apprentissage : la perspective actionnelle encourage l'apprentissage
dans des contextes authentiques, favorisant ainsi une meilleure compréhension de la langue
dans des situations réelles de communication.
Motivation et engagement : les tâches communicatives et les projets concrets stimulent la
motivation des apprenants, les encourageant à participer activement et à développer des
compétences linguistiques de manière naturelle.
Développement des compétences intégrées : les apprenants sont amenés à utiliser toutes les
compétences linguistiques (écouter, parler, lire, écrire) de manière intégrée, ce qui reflète plus
fidèlement la réalité de l'utilisation d'une langue.
Focus sur la fonction communicative : la perspective actionnelle met l'accent sur la fonction
communicative de la langue plutôt que sur des structures linguistiques isolées, favorisant ainsi
une utilisation pratique des connaissances linguistiques.
Évaluation formatrice : les performances des apprenants dans des situations réelles peuvent
servir d'évaluation formative, offrant des retours immédiats pour ajuster l'enseignement.
Limites de la perspective actionnelle :
Nécessité de la planification : la mise en œuvre de tâches authentiques nécessite une
planification minutieuse, et il peut être difficile de garantir que chaque apprenant atteigne les
mêmes objectifs linguistiques.
Temps nécessaire : les tâches communicatives peuvent prendre plus de temps que les activités
traditionnelles axées sur la grammaire, ce qui peut être un défi dans le cadre d'un programme
d'enseignement limité en termes de temps.
Équilibre entre compétences et contenus : certains critiques soutiennent que la perspective
actionnelle pourrait négliger l'enseignement explicite de certaines compétences linguistiques et
structures grammaticales essentielles.
Adaptation à tous les contextes : la perspective actionnelle peut ne pas être aussi facilement
adaptable à tous les contextes d'enseignement, en particulier dans des environnements où l'accès
à des situations de communication authentiques est limité.
Évaluation formative complexe : évaluer les performances des apprenants dans des tâches
communicatives peut être plus complexe que des évaluations traditionnelles, nécessitant
souvent des critères plus souples et subjectifs.

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