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Chapitre 1.
Qu’est-ce que la linguistique ?
1. Origines, objectifs et domaines d’étude. 2. La linguistique aujourd’hui 3. La sémantique. 3.1.
L’étude du sens. 3.2. La construction sémantique de la phrase et du discours. 4. La sémiologie.
4.1. « Sémiotique ou sémiologie ? ». 4.2. Sémiologie et linguistique. 5. Le signe. 5.1. Le signe en
sémiotique. 5.2. Le signe en linguistique.
Si le terme linguistique date du début du XIXème siècle, on peut dire que c’est à la
fin de ce siècle, après les grandes réalisations de la grammaire comparée, que la
linguistique va chercher à se constituer en discipline scientifique. Les grands noms
auxquels on peut identifier ce tournant marquant dans les préoccupations relatives au
langage sont : W. Whitney (1827-1894), F. de Saussure (1857-1913), E. Sapir (1884-
1939) et L. Bloomfield (1887-1949). Pour eux, le plus intéressant, dans l’étude du
langage, n’est pas de recenser de petits faits vrais dans le détail de telle ou telle langue
et de leur évolution historique, mais d’essayer de saisir la nature du langage de façon
théorique. C’est pourquoi on trouve chez ces penseurs une réflexion sur certains
concepts fondamentaux comme : le langage, la langue, la parole, etc.
Reste donc à se poser la question : à quoi sert la linguistique ? Dans son ambition la
plus fidèle à celle des précurseurs que nous venons de nommer, la linguistique à
proprement parler ne sert pas à grand-chose : elle est un discours scientifique, objectif,
descriptif de l’objet langage ou de l’objet langue. Dans cette visée, on parle de
linguistique générale. Néanmoins, une grande part de la linguistique peut avoir une
utilité pratique : on parle alors de linguistique appliquée.
2. La linguistique aujourd’hui
Dans le courant du XXème siècle, la linguistique s’est développée dans des directions
parfois très éloignées les unes des autres. On peut se la représenter comme un tronc se
ramifiant en une multitude de branches. Cependant, quelques grandes influences se
distinguent. Dans un premier temps, la linguistique a été très marquée par un souci
qu’on pourrait appeler « formaliste ». Il faut entendre par là qu’elle a souvent eu comme
objectif de donner des langues et du langage une description très formelle, un peu à
l’image des mathématiques. Cet objectif éclate particulièrement dans le structuralisme.
Dans un second temps, la linguistique a été très marquée par les travaux réalisés en
pragmatique : ceux-ci ont la particularité de s’intéresser moins à la structure des langues
qu’à la parole et au discours. Ainsi, la linguistique a été conduite à sortir un peu du
cadre de la stricte analyse des langues pour se tourner vers l’étude des situations dans
lesquelles il est fait usage du langage. Enfin, signalons une dernière influence : celle des
sciences cognitives. La psychologie, la philosophie, les neurosciences, etc. ont elles
aussi développé des théories sur le langage. La situation de monopole dont jouissait
la linguistique il y a quarante ans a disparu : cela explique que l’on parle plus
volontiers, actuellement, de sciences du langage que de linguistique.
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La pragmatique est le domaine qui étudie l’usage qui est fait de la langue dans le discours et la
communication et vise à décrire l’interaction entre les connaissances linguistiques et les connaissances
extralinguistiques (ou contextuelles) nécessaires pour comprendre les phrases énoncées. Le domaine de la
linguistique, à strictement parler, s’arrête à la sémantique. Cependant, la frontière entre la linguistique et
la pragmatique est sujette à discussion, selon que l’on considère que les règles d’usage des expressions
linguistiques font partie de leur signification ou qu’elles en sont indépendantes.
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3. La sémantique
La sémantique peut être définie comme étant la discipline qui étudie le sens dans le
langage ; ce sens peut être rapporté à des unités, comme le mot ou la phrase.
Il est donc possible d’affirmer que, par analogie, la langue est vivante. Ceci veut
dire que l’utilisation que nos grands-parents, ou nos arrière-grands-parents faisaient de
la langue n’est pas exactement la même que celle que nous en faisons. Par exemple, il
est facile de voir une série de nouveaux termes qui ont été introduits par l’avènement
des ordinateurs dans notre monde moderne. Nous parlons maintenant de courriels,
d’autoroute électronique, de téléchargement, de foire aux questions, le IA, etc. Projetée
sur plusieurs centaines d’années, cette évolution crée des modifications importantes de
la langue. Les plus incrédules pourront visionner un film comme « Les visiteurs » ou
lire une pièce de Molière pour voir la dichotomie entre l'état de la langue à plusieurs
siècles d’intervalle.
Cependant, afin de faire l’étude d’une langue dans son évolution, il est nécessaire
d’avoir une description de son état à un moment précis de son histoire. Cette étude de la
langue appartient la linguistique synchronique (du grec, sun-chronos « en même
temps »). Dans la sémantique synchronique, on étudie les mots à un moment donné de
l’histoire. Autrement dit, l’évolution de la langue à travers le temps n’est pas prise en
compte, ainsi, la langue est considérée comme un système en soi. Selon Saussure, le
passé n’a pas d’importance pour la compréhension du système linguistique vu que les
locuteurs ne connaissent pas en général l’histoire de leur langue, il insiste sur le fait que
la langue doit être étudiée en elle-même et pour elle-même.
La sémantique peut ainsi considérer que le sens d’un mot est composé de plusieurs
unités de sens minimales et indécomposables, appelées sèmes (analyse sémique). On
parle alors de sémantique componentielle ; on utilise ce type d’analyse pour résoudre
des questions sémantiques au niveau des micro-systèmes lexicaux (petits groupes de
mots ayant une base sémantique commune) :
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Lexèmes (= mots) / Sèmes Cours d’eau (S1) Finit dans l’océan (S2)
Rivière + -
Fleuve + +
La plupart des mots sont polysémiques, autrement dit, ils ont plusieurs sens. Par
ailleurs, dès qu’il est employé, un mot se dote immédiatement de connotations ; pour
décrire l’établissement du sens, celles-ci sont aussi importantes à prendre en compte que
les dénotations :
[Signifiant + Signifié] = Langage de dénotation
Langage de dénotation + Autre Signifié = Langage de connotation
Si les mots et les morphèmes sont les plus petites unités de sens du langage, il est
rare que nous ne communiquions le sens à l’aide de ces seules unités. La plupart du
temps, nous utilisons des phrases : celles-ci sont régies par des règles syntaxiques et
sémantiques. Ces deux types de règles ne coïncident par forcément. Si vous dites :
« Ma sœur est mon seul enfant » ou « Mon chien a fait la vaisselle », par exemple, votre
phrase est sémantiquement incorrecte, bien que syntaxiquement correcte. Il faut donc
veiller à respecter les propriétés sémantiques des mots que l’on assemble.
À l’échelle du discours, ou de l’enchaînement de plusieurs phrases entre elles,
l’identification du sens et la description des phénomènes qui règlent le sens peuvent
s’avérer très complexes. Lorsque plusieurs sens peuvent être identifiés, on parle
d’ambiguïté (Ex. La voleuse a été détenue par la police qui était cachée → plusieurs
interprétations sont possibles).
Une grande place est accordée aujourd’hui aux phénomènes qui relèvent de
l’argumentation ou de l’implicite : en les étudiant, on découvre combien le sens des
mots, des phrases et du discours peut dépendre d’intentions cachées : en ce sens, le
contexte joue un rôle déterminant.
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4. La sémiologie
La sémiologie est une science des signes ou l’étude scientifique des systèmes de
signification ; elle s’est développée simultanément en Europe, aux États-Unis et en
Union soviétique au XXème siècle.
Deux termes sont en concurrence pour désigner une discipline qui a connu dans les
années 60-70 une grande diffusion : les termes de « sémiotique » et « sémiologie » :
ceux-ci viennent du grec semeion qui signifie « signe ». Le terme français
« sémiotique » peut être considéré comme une traduction de l’anglais semiotics. Le
terme « sémiologie » a été forgé par Saussure et il est revendiqué en France par le
mouvement structuraliste. Une distinction entre les deux termes a été proposée, mais
elle ne s’est pas vraiment imposée.
La sémiologie se fonde sur trois concepts : le code, le signe et le système. Pour elle,
tout langage au sens large, est un code qui repose sur l’organisation en système
d’un ensemble de signes. On peut appliquer cette théorie à de nombreuses activités
humaines. Prenons le cas de l’art, par exemple : le peintre Matisse note que, dans la
création artistique, on invente des signes qui n’ont de valeur que dans le moment où on
les crée et que dans le cadre de l’œuvre précise où ils doivent trouver place. Hors de ce
moment et de ce cadre, ils n’ont aucune valeur. C’est pourquoi la peinture, la musique,
le cinéma, peuvent être analysés comme des systèmes de signes.
5. Le signe
Si la langue est un système, quels en sont les éléments ? Pour Saussure, la notion de
mot, ambiguë et floue doit être rejetée au profit du terme de signe. Le « véritable objet
de la linguistique est l’étude interne et synchronique des systèmes de signes que
constituent les états de langue. »
- L’icône est le signe artificiel qui a pour propriété d’imiter ce à quoi il se réfère.
C’est un signe qui est en rapport de ressemblance avec la réalité extérieure, il
présente les mêmes propriétés que l’objet en question. Le mode de déchiffrage
de l’icône est l’analogie. Par exemple : l’icône d’un passage piéton, les icônes
dans le bureau de l’ordinateur. Les hiéroglyphes, les dessins. Les onomatopées
sont des icônes sonores.
- L’indice est un signe qui signifie du fait de sa proximité avec l’objet représenté.
C’est un signe qui est en relation de contigüité (voisinage) avec une réalité
extérieure. L’indice est un phénomène perceptible qui nous fait connaitre
quelque chose sur un autre phénomène non perceptible. Son mode de
déchiffrage est la déduction. Il existe donc un lien logique entre l’indice et ce à
quoi il renvoie. Par exemple : le symptôme pour la maladie, la fumée est l’indice
de l’existence d’un feu, les larmes sont l’indice de la tristesse ou d’une forte
émotion, la couleur sombre du ciel peut être l’indice d’un orage à venir.
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Même dans le cas des onomatopées censées reproduire des bruits de la réalité, la
diversité tant historique que géographique des signes utilisés témoigne de ce
caractère arbitraire : par exemple, le « cocorico » gaulois devient « kikiriki »
chez les Espagnols. Les onomatopées sont également conventionnelles.
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