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Résumé
Marquée par une forte urbanisation, la région de Dakar trouve un souffle à travers la forêt classée de
Mbao qui constitue le dernier poumon vert de la presqu'île du Cap-Vert. Mais cette zone verte est de
plus en plus menacée par l’avancée du front d’urbanisation et de ses multiples types d’agressions dont
la multiplication des dépôts sauvages en son sein.
L’objectif de cette recherche est de proposer des solutions à mettre en œuvre pour la préservation de la
forêt classée de Mbao face à la prolifération des déchets solides dans cette zone.
La démarche méthodologique employée est quantitative avec l’élaboration d’un questionnaire destiné
aux acteurs économiques (femmes maraîchère) qui travaillent dans la forêt classée de Mbao (FCM), et
qualitative à travers des entretiens (histoires de vie), et des focus groupes.
Les résultats de l’enquête réalisée en 2021, ont montré que la FCM fait office de dépotoir pour les
populations de Diamaguene, Mbao, Yeumbeul et Keur Massar, qui n’ont pas accès au service public de
collecte des déchets, d’où l’augmentation considérable des dépôts sauvages. De ce constat, est née l’idée
de proposer un modèle participatif de gestion des déchets pour la préservation de la forêt classée. Dès
lors, il est nécessaire que toutes les parties prenantes prennent les mesures idoines allant dans le sens
d’une meilleure préservation de cette zone verte.
Mots clés : gestion des déchets solides, poumon vert, forêt classée de Mbao, sursis
Introduction
Le monde produit 2,01 milliards de tonnes de déchets municipaux par an. Sans action
immédiate, ce chiffre va augmenter de 70% et atteindre 3,4 milliards de tonnes d’ici 205021.
Dans cette production, le Sénégal y contribue à hauteur de 1 730 000 tonnes de déchets. Cette
situation aggrave les émissions de gaz à effet de serre et les risques de catastrophes, avec des
effets proportionnellement plus élevés parmi les pauvres. Dans l’optique de faire face à ces
problèmes l’ONU a mis en place les Objectifs de Développement Durable (ODD), dont
l’objectif N°11 et 12, relatifs aux villes et communautés durables et à l’établissement des modes
de consommation et de production durables, qui recommandent de bâtir des villes et des
établissements humains ouverts à tous, sûrs, résilients et durables.
Le Sénégal s’est inscrit dans cette dynamique par la ratification des initiatives
internationales et la mise en œuvre de plans et programmes allant dans le sens de préserver
l’environnement. L'Accord de Paris est le premier accord universel sur le climat qui a été
approuvé par l'ensemble des 195 délégations, dont le Sénégal, le 12 décembre 2015 et est entré
en vigueur le 4 novembre 2016. A ce titre, le Sénégal à l’instar des autres pays, devrait mettre
en œuvre l’intégralité de l’agenda 2030, tout en tenant compte de la diversité des situations. Le
Sénégal, à l’instar des pays en développement, fait face à plusieurs défis dans la gestion des
déchets solides municipaux. La production annuelle d’ordures ménagères de l’agglomération
dakaroise pour l’année 2019, 953 599 tonnes, équivaut à près de 2613 t/j, (soit 0.5 kg de déchet
par personne et par jour). L’exploitation des résultats des deux campagnes de caractérisation
(saison sèche et humide), révèle que les conteneurs des ménages sont majoritairement est
composés d’éléments fins (55,76%) suivis des putrescibles (10,83%), et enfin des plastiques
(8,58%) et complexes (5,01%) (UCG 2015).
Le Sénégal a inscrit la gestion des déchets solides dans ses priorités de développement,
de lutte contre la pauvreté et l’amélioration du cadre de vie des populations. En effet, la gestion
des déchets est un secteur à fort potentiel économique, et aussi un facteur de développement
durable. Une gestion efficiente des déchets est source de richesse (création d’emplois), de bien-
être social (amélioration du cadre de vie) et de préservation de l’environnement.
A l’échelle locale, la forêt classée de Mbao, située dans le département de Pikine, est
considérée comme le « poumon vert » de Dakar (carte 1). Pour certains, il s’agit de la seule
zone verte et naturelle de la région. « Elle abrite un écosystème riche et diversifié, menacé par
la croissance démographique, l’urbanisation rapide, la gestion inadéquate des déchets solides
et liquides, (…) » (cf. PNUD, 2021). Il est important de noter que l’arrêté général portant
classement du périmètre de reboisement de Mbao a été pris le 7 mai 1940 (Arrêté 979 SE/F),
mais l’immatriculation des terrains en cause au nom de l’Etat date de novembre 1908. Une forêt
classée est un domaine forestier placé comme propriété de l’état et régie par un texte
réglementaire sous surveillance du service des Eaux et Forêt (PAFCM, 2008). L’exploitation
des ressources de ces forêts nécessite un plan d’aménagement et de gestion pour la production
des ressources végétales, la protection des sols et la conservation de la biodiversité. L’objectif
est de mettre à l’abri certains types d’écosystèmes en limitant la pression anthropique (PAFCM,
2008). Mais de nos jours, le peuplement naturel a presque disparu ; il n’en reste plus que des
21 What a Waste 2.0: A Global Snapshot of Solid Waste Management to 2050 | Groupe de la Banque mondiale (worldbank.org)
individus isolés : Acacia albida Del. (Kad), Adansonia digitata L. (Baobab), Elaeis guineensis
Jacq (Palmier à huile) en bordure des Niayes., Maytenus senegalensis Lam., Parinari
macrophylla Sabine. (Neew), Ximenia americana. En effet, elle représente un laboratoire
d’étude pertinent, à travers lequel nous pouvons nous inspirer pour appréhender la situation de
tous les espaces naturels classés sur le territoire sénégalais et qui sont menacés par plusieurs
formes d’agressions dont la prolifération des déchets. Malgré sa situation dégradante, la FCM
joue un rôle important dans la génération de revenus, pour les communautés qui y ont
traditionnellement travaillé, avec des autorisations d’utilisation des terres (2008).
Cela dit, la question pertinente qu’il faut se poser est « quelles sont les solutions à
préconiser pour la préservation de la forêt classée de Mbao face à la prolifération des déchets
solides dans cette zone » ? L’objet de ce travail de recherche est de dresser l’état des lieux de
la gestion des déchets solides dans les communes limitrophes de la FCM et de proposer un plan
de gestion intégrée des déchets (PGID) pour cet espace vert. Le quel état des lieux, passe par
un diagnostic du dispositif de gestion des rebuts dans cette zone naturelle. A la fin de
l’évaluation, en fonction des résultats obtenus, un modèle de gouvernance pouvant permettre
de sauver cet espace en sursis, face à l’invasion des déchets, est proposé.
Ce travail est sous-tendu par l’hypothèse selon laquelle « l’absence de dispositif de
collecte et de gestion des déchets, aux alentours de la FCM, serait à l’origine de la forte présence
de dépôts sauvages d’ordures dans cet espace naturel sensible, dans un contexte de changement
climatique ».
La contribution est structurée autour de trois points : d’abord la méthodologie de l’étude,
ensuite les résultats structurés autour de l’état des lieux de la gestion des déchets et la
proposition d’un modèle de gestion participative et enfin une discussion des résultats.
Methodologie
La capitalisation des données pour la rédaction de cet article a nécessité l’adoption d’une
méthodologie basée sur la recherche documentaire, la collecte et le traitement des données.
L’analyse théorique a consisté à s’approprier les concepts de base sur la gestion des
déchets à partir des différents ouvrages (thèses, mémoires, articles, et rapports d’étude). Ainsi,
dans le but de glaner une littérature suffisante, relative à la prolifération des déchets à Dakar de
manière générale, et dans la FCM en particulier, nous a conduit à fréquenter beaucoup de
structures publiques comme privées. Le ciblage fait dans la documentation nous a permis de
réajuster nos ambitions, d’avoir une meilleure perception de la réalité étudiée et de mieux
planifier nos missions de terrain.
L’étape de la collecte des données de terrain s’est déroulée selon deux approches ; une
quantitative, qui a consisté à élaborer un questionnaire destiné aux acteurs économiques qui
opèrent dans la FCM, alors que celle qualitative a consisté à faire des entretiens et des séances
de focus groupe avec différents types d’acteurs.
L’utilisation de ces deux techniques de collecte avait pour objectif de mieux dresser un état des
lieux sur la présence des dépôts sauvages dans la FCM, mais aussi de réunir des informations
techniques et financières, nécessaires à la mise en place d’un PGID.
La dernière étape de la méthodologie est le traitement des données recueillies sur le
terrain. Elle s’est faite par le biais de divers logiciels de traitement de données, et de
cartographie. Cette étape a permis d’évaluer les systèmes de gestion des déchets en vigueur
dans les communes ceinturant la FCM, mais aussi de fournir des propositions allant dans le
sens d’amélioration la gouvernance des rebuts autour de la FCM.
Resultats
Etat des lieux du service de nettoiement dans la forêt classée de Mbao
L’état des lieux commence par un rappel historique de la gestion des déchets et une cartographie
des dépôts sauvages, avant de procéder à un audit poussé du service public de collecte des
déchets, notamment de l’UCG autour de la forêt classée de Mbao.
L’historique de la gestion des déchets au Sénégal remonte aux années 1960. A cette
époque, l’implication de l’autorité compétente en matière de gestion des déchets, ne concernait
que Dakar. Elle correspondait à une gestion directe et administrée par les services techniques
communaux (STC), sans autonomie administrative ou budgétaire. Cette approche a prévalu
dans les trois communes de la capitale sénégalaise, que sont Dakar, Gorée, et Rufisque (L.
Verriere, 1965), qui disposaient au moins d’une forme d’organisation en matière de
gouvernance des rebuts. Les moyens techniques et financiers étaient limités à l’époque, d’où la
fermeture de l’usine de traitement de déchets de Mbao construite en 1967. Et l’ouverture de la
décharge de Mbeubeuss en 1970 fut une alternative à cette fermeture.
La Société Africaine de Diffusion et de Promotion (SOADIP) a pris le relais en 1971, sur la
base d’un contrat de concession signé avec le ministère des Travaux Publics de l’Urbanisme et
des Transports. Plusieurs initiatives et programmes ont été mis en place au fil des années.
L’Arrêté n° 012551 du 17 novembre 2011, portant création de l’UCG, en remplacement de la
Société pour la Propreté du Sénégal (SOPROSEN S.A.), a été perçu comme un nouvel espoir.
Entre 2012 et 2022, l’UCG a eu à faire des réalisations majeures, qui vont de la mise en œuvre
du Programme National de Gestion des Déchets (PNGD), à la cartographie de toutes les
données entrant dans la gestion des déchets, tels les dépôts sauvages, ceux récurrents, les
circuits de collecte, les circuits de désensablement, les décharges, entre autres.
Ce petit rappel sur l’évolution institutionnelle de la gestion des déchets dans la région
de Dakar montre que la FCM n’a jamais bénéficié d’une considération particulière, qui a réussi
à la protéger de la prolifération des déchets solides.
Les différentes communes qui encerclent la FCM connaissent de nombreuses insuffisances qui
affectent sensiblement leur capacité à gérer convenablement les déchets dans leur territoire
communal (Enquêtes 2021). Les difficultés notamment financières sont à l’origine de
l’insuffisance de fonds alloués à la gestion des déchets, ou pis encore l’inexistence de ligne
budgétaire dédiée à la gestion des déchets. Pourtant la loi 2013-10 du 28 décembre 201322,
transfère aux collectivités locales les compétences dans le domaine de l’environnement en
général et de la gestion des ordures ménagères en particulier. Mais en raison de l’absence de
mesures d’accompagnement, en termes de ressources (financière, humaines, matérielle, et
logistique), les municipalités entreprennent très peu d’initiatives locales en matière de gestion
des déchets. Ainsi, la collecte primaire des déchets solides est gérée de manière individuelle par
des structures privées et/ou communautaires, ou des tiers qui interviennent de manière
informelle. Il est aussi à noter qu’il n’y a aucune forme de collaboration, encore moins
22
Loi n° 2013-10 du 28 décembre 2013 portant Code général des Collectivités locales
35,0%
30,0%
25,0%
20,0%
15,0%
10,0%
5,0%
0,0%
A côté du Rail A l'intérieur de Aux alentours A côté des Le long de la Le long des Sur les contours Sur Axe keur
la Forêt des champs Garages de piste laterite sentiers de la Forêt Massar-Boune
mécanique
Mais selon nos enquêtes, 49% des répondants estiment que les dépôts que l’on retrouve dans la
FCM, sont de grande taille. 47% d’entre eux sont de taille moyenne, contre seulement 4% qui
sont de petits dépôts. Les enquêtes effectuées dans le cadre de cette recherche ont révélé que
les charrettes (49,1%) sont les premières pourvoyeuses de déchets dans la FCM, suivi des
riverains (37,7%), puis des camions (11,3%), ou de tout autre acteurs pourvoyeurs de déchets
solides dans la FCM (1,9%).
Ces déchets jetés dans cette zone verte sont souvent de type plastique (polyétilène), des
cadavres d’animaux, du fumier, du gravât, des déchets de chantier, des boues de vidange, des
déchets ménagers, des e-déchets (déchets électroniques), des huiles usagées issues des travaux
de maintenance mécanique, des eaux usées, etc. De nos entretiens avec les maraîchères, il est
ressorti que les déchets exercent un impact négatif sur le couvert végétal de la FCM, comme
indiqué dans le tableau ci-dessous :
Les déchets plastiques entrent dans les champs avec l'effet du vent
L'odeur et les microbes peuvent constituer des risques pour les êtres vivants et les et cultures
Parfois, ils détruisent nos plans agricoles, car les déchets sont versés sur les périmètres maraichers
Les impacts induits par la mauvaise gestion des déchets et les contraintes technique,
financière, logistique, organisationnelle et managériale dans la prise en charge de la salubrité
publique sont à l’origine de la mise en place de l’UCG qui a instauré un dispositif afin de
booster les aptitudes des collectivités locales.
Les interventions de l’UCG dans toute l’étendue de la région de Dakar en général, et dans les
communes limitrophes de la FCM en particulier se résument au balayage de la voie publique,
à la pré-collecte, à la collecte, au transport et la mise en décharge. Pour ce qui est de la collecte
par apport volontaire, nous avons recensé les circuits de collecte de l’UCG, qui sont au nombre
de 42, dans l’ensemble des quatre (4) communes limitrophes. Nous avons évalué le maillage
dans l’étendue des communes de Yeumbeul Sud, Diamaguène-Sicap-Mbao, et Mbao (carte2)
et il s’est avéré qu’il y a un éloignement entre les circuits de collecte et la limite de la FCM,
comme il est mis en évidence par le figuré en jaune sur la carte 2.
Carte 2 : distribution spatiale des circuits de collecte de l’UCG et des dépôts autour de la
FCM
Cette carte montre que la distribution spatiale du système de collecte de l’UCG dans les
communes limitrophes de la FCM fait preuve d’un maillage plus ou moins satisfaisant. Mais à
Keur Massar, on a remarqué un éloignement qui varie par endroit de 399m à 165m entre les
circuits de collecte et la limite de la FCM, ce qui explique pourquoi le réseau de circuits y est
sommaire, ou parfois absent. Cette absence de circuits de collecte dans cette zone, favorise la
prolifération des dépôts d’ordures autour de la FCM. L’absence d’un système de collecte de
déchets solides, justifie pourquoi, les riverains ont tendance à déverser leurs ordures dans la
forêt.
Nous avons également apprécié la dissémination des points de regroupement normalisés (PRN)
à l’échelle des quatre communes concernées. Ces ouvrages ont pour objectif de combler les
manquements générés par le service de collecte, mais aussi de rapprocher les populations au
service public de collecte des déchets. La carte 3 montre que la faible distribution de ces
équipements de gestion des déchets autour de la FCM est aussi en partie à l’origine de la
multiplication des dépôts sauvages.
Au vu de l’organisation du système de gestion des déchets déjà mis en place dans les communes
qui encerclent la FCM, il n’est pas étonnant de remarquer que la forêt classée de Mbao soit
considérée comme une décharge d’ordure par les riverains. Pourtant, cet espace défini par
certains comme le poumon vert de Dakar, et par d’autres comme le seul espace vert de cette
région, mérite plus d’attention à la hauteur de ses services écosystémiques qu’elle rend. Alors,
il serait intéressant de proposer un plan de gestion intégrée des déchets solides afin de limiter
considérablement la prolifération des dépôts sauvages et de contribuer ainsi à la sauvegarde de
cette zone verte.
Proposition d’un modèle de gestion participative des déchets pour la préservation de la FCM
Après avoir statué sur la situation de référence de la prolifération des dépôts sauvages aux
alentours et dans la FCM, on est amené à proposer des solutions susceptibles de contribuer
positivement à la préservation de ce « poumon vert ». Il s’agira donc de proposer : un nouveau
schéma de collecte ; l’implantation de PRN ou de points de propreté ; la réhabilitation du mur
de clôture de la FCM et d’évaluer les besoins matériels et financiers.
o Extension du schéma de collecte
La préservation de la FCM passe par une amélioration ou une réorganisation des activités de
nettoiement à l’échelle des communes qui l’entourent. Nous avons alors considéré les zones
vierges (où il n’y a pas de circuits de collecte), qui sont obtenues en superposant deux (2)
couches d’informations à références spatiales, à savoir les circuits de collecte par apport
volontaire (UCG, 2021), et la couche voirie de la région de Dakar (Agéroute, 2019). Ce procédé
nous a permis de constater l’existence d’un gap de vingt-quatre (24) tronçons d’une longueur
de 4,75 km, à intégrer dans le schéma de collecte groupée (cf. carte 4).
La prise en charge de ces circuits serait éventuellement assurée par une (1) benne-tasseuse, qui
fera du porte-à-porte et par trois (3) tricycles qui feront la collecte dans les zones non
accessibles, et assureront le lien entre les points de propreté ou PRN et le circuit le plus proche.
La périodicité de levée ne peut être définie qu’après deux (2) à trois (3) semaines d’observation.
Mbao 12 2931,1
Diamaguène-Sicap-Mbao 4 646
Total 23 4754,9
Dans le cadre de l’extension des circuits de collecte sus mentionnés, les collectivités locales ont
un rôle important à jouer car la gestion des déchets dans sa globalité demeure une compétence
transférée. Nous proposons dès lors que les acteurs concernés (collectivités locales, acteurs
communautaires, Eaux et forêts…) collaborent avec la SONAGED/SA (ex, UCG) pour ajouter
ces tronçons dans les circuits de collecte par apport volontaire, dans leur dispositif.
o Installation de Points de Regroupement Normalisé (PRN) ou de Points de propreté
Après l’observation de l’emplacement des infrastructures de gestion des déchets, nous avons
jugé nécessaire d’analyser les zones les mieux indiquées à recevoir des PRN ou des points de
propreté. Ce process a consisté à réaliser une analyse multicritère, en mettant l’accent sur
l’occupation du sol, les sites de forte production, les dépôts récurrents, la production potentielle,
à travers le ratio densité et production/personne/jour, le réseau routier, et le mobilier urbain de
propreté. Ce qui nous a permis de pouvoir déterminer les espaces favorables à l’implantation
d’infrastructures de gestion des déchets (cf. Carte 5).
Carte 5 : Zones favorables à l’implantation de PRN par analyse multicritère
La FCM présente alors de petites portions de zones favorables et une zone moins favorable,
beaucoup plus importante. Ceci confirme la nécessité d’appréhender en amont l’implantation
de PRN ou des points de propretés car beaucoup d’entre eux sont posés dans des zones non
favorables.
Ces PRN jouent le rôle de point de chute et permettent aux riverains de ne plus dépoter leur
chargement de déchets n’importe où, et de manière frauduleuse. Pour cela, nous préconisons
l’implantation de dix (10) PRN ou points de propreté, tout autour de la FCM (cf. Carte 6).
Carte 6 : Infrastructures de gestion des déchets à intégrer dans le dispositif opérationnel
de l’UCG
25
Démolition Maçonnerie, évacuation gravats et terrassements Ml 1 25 000
000
45
Remise en état Maçonnerie y compris enduit et finitions) Ml 1 45 000
000
135
PRIX UNITAIRE AU Mètre Linéaire =
500
Discussion
Les résultats de l’analyse de la gestion des déchets solide dans la FCM montrent que cet espace
vert au cœur de la région de Dakar est aujourd’hui plus que jamais menacé par la prolifération
des dépôts sauvages de déchets solides. La mauvaise gestion des déchets dans cette zone est à
l’origine d’une grande partie des nuisances et pollutions (odeurs nauséabondes, émissions de
gaz à effet de serre, pollutions des sols et des nappes phréatiques, etc.). La forêt classée de
Mbao, en tant qu’entité spatiale, n’a pas fait l’objet de programme particulier dans la politique
de gestion des déchets au niveau national. Cette situation interroge la politique de la gestion de
déchets au Sénégal car de l’indépendance à nos jours, « aucun des projets de système de collecte
n’a atteint les objectifs fixés » (S. S. Diallo, 2010). Les contraintes technique, financière,
logistique, organisationnelle et managériale auxquelles les collectivités territoriales sont
confrontées dans la prise en charge de la salubrité publique sont à l’origine de la mise en place
de l’unité de coordination et de gestion des déchets. Les communes font aussi face à une
augmentation des volumes, à une évolution de la nature des déchets (plus forte proportion de
plastiques), et face à une pénurie de moyens humains, techniques et financiers » (J. Rouyat et
al., 2005). On a constaté dans le cadre de cette étude un manque criard de moyens humains et
matériels pour la pré-collecte et la collecte des déchets solides dans les communes limitrophes
de la forêt ; ce qui rejoint donc les travaux de (A. S. WARI, 2012 et J. Rouyat, et al., 2005).
Dans les communes limitrophes de la FCM, l’UCG a déployé un dispositif de ramassage des
ordures (circuits, bacs à ordures et PRN) qui longe les circuits de collecte et de balayage.
Néanmoins, des insuffisances sont notées dans la distribution spatiale du système de collecte
de l’UCG d’où la proposition d’un plan de gestion intégré des déchets solides dans cette zone.
L’élimination des déchets nécessite une approche technologique et méthodologique. Ainsi, il
est nécessaire de mettre à jour le schéma de collecte, d’étudier techniquement la pertinence des
zones d’implantation de PRN ou de points de propreté, de réhabiliter le mur de clôture de la
FCM, et d’évaluer les besoins matériels et financiers pour la mise œuvre des solutions
préconisées. Ce plan de gestion intégrée des déchets (PGID) dans la FCM prendra en charge
les considérations de (K. Edem et al, 2015, p.4) qui pense qu’une telle vision doit se traduire
« par le développement de technologies adaptées au contexte local et devrait prendre en compte
la croissance des populations, les concentrations des déchets, les préoccupations
environnementales et le développement durable ». Les solutions préconisées s’inscrivent dans
la même logique que les travaux de S. Sané (2013) qui a constaté des manquements dans la
gestion des déchets à Fatick et la nécessité de réagir de façon méthodique pour préserver
l’environnement. Le financement de ces opérations exige la mobilisation de plusieurs sources.
Les travaux de M. Diallo (2013) sur le consentement des populations à payer pour améliorer le
service de déchets via la méthode d’évaluation contingente en prenant en compte les caractères
socioprofessionnels des habitants, se rapprochent des conclusions de notre recherche. Mais
notre travail a indiqué d’autres sources de financements plus conséquentes qui permettraient
d’atteindre plus rapidement les résultats escomptés.
Conclusion
Il ressort de cette analyse que la FCM présente d’énormes contraintes pour une bonne
gouvernance des déchets solides. Avec une population relativement importante, la production
de déchets ne cesse de s’accroitre. Au vu de ce qui découle de notre diagnostic, les difficultés
sont d’ordre divers (économique, sociale, financière, environnementale, organisationnelle).
Ce qui se traduit par les manquements notés dans le mode de gestion jusqu’ici adopté, d’où
la nécessité de trouver d’autres alternatives capables de pallier ces disfonctionnements. Pour
une bonne intervention de tous les acteurs, dans le secteur, il s’est avéré impératif et nécessaire
de s’appuyer sur cet outil (PGD) collaboratif, inclusif, et opérationnel pour protéger ce joyau
contre l’envahissement des déchets.
Références bibliographiques
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