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Obertone Laurent - Guerilla Tome 2
Obertone Laurent - Guerilla Tome 2
– Luc 10.3
I – LA TERRE
TROISIÈME NUIT
– Victor Hugo
1
STATION, subst. fém.
Lieu où l’on s’arrête.
LA COURNEUVE,
LE QUATRIÈME JOUR, 0H15.
CHÂTEAU DE VINCENNES,
LE QUATRIÈME JOUR, 1H03.
PARIS 14e,
LE QUATRIÈME JOUR, 1H37.
VÉLIZY-VILLACOUBLAY,
LE QUATRIÈME JOUR, 1H58.
PARIS 17e,
LE QUATRIÈME JOUR, 2H15.
PARIS 14e,
LE QUATRIÈME JOUR, 2H23.
PARIS 16e,
LE QUATRIÈME JOUR, 2H44.
PARIS 7e,
LE QUATRIÈME JOUR, 2H51.
PREMIÈRE SEMAINE
CHÂTEAU DE VINCENNES,
LE QUATRIÈME JOUR, 9H01.
PARIS 12e,
LE QUATRIÈME JOUR, 12H02.
HAUTS-DE-SEINE,
LE QUATRIÈME JOUR, 13H27.
PARIS 17e,
LE CINQUIÈME JOUR, 23H14.
PARIS 5e,
LE SIXIÈME JOUR, 11H29.
LA COURNEUVE,
LE SIXIÈME JOUR, 12H48.
PARIS 17e,
LE SEPTIÈME JOUR, 20H34.
PARIS 12e,
LE HUITIÈME JOUR, 10H12.
PARIS 13e,
LE HUITIÈME JOUR, 16H33.
HAUTS-DE-SEINE,
LE NEUVIÈME JOUR, 16H05.
PARIS 17e,
LE NEUVIÈME JOUR, 22H13.
PARIS 20e,
LE DIXIÈME JOUR, 8H34.
PARIS 13e,
LE DIXIÈME JOUR, 9H16.
EN MER MÉDITERRANÉE,
LE DIXIÈME JOUR, 12H22.
PARIS 12e,
LE DIXIÈME JOUR, 15H00.
DEUXIÈME SEMAINE
– Virgile
PARIS 17e,
LE ONZIÈME JOUR, 9H10.
EN MER MÉDITERRANÉE,
LE ONZIÈME JOUR, 11H04.
PARIS 13e,
LE DOUZIÈME JOUR, 12H02.
PARIS 12e,
LE TREIZIÈME JOUR, 16H34.
CHÂTEAU DE VINCENNES,
LE QUATORZIÈME JOUR, 19H54.
PARIS 7e,
LE QUINZIÈME JOUR, 12H13.
PARIS 17e,
LE QUINZIÈME JOUR, 22H59.
PARIS 13e,
LE SEIZIÈME JOUR, 3H06.
« Y en a de la neige, hein ? »
Simplet lui avait proposé de faire une sortie. Le comptable
ne s’en remettait pas. Ce puissant débile s’y était opposé douze
jours durant, borné comme une table basse, avant de se
décider, tout à coup, comme frappé d’illumination. Comme si
ça avait été son idée. Et chemin faisant, il s’était senti autorisé
à lui parler, de lui, de son métier, de sa vache à la con, écrasée
par il ne savait qui, comme si lui pouvait en avoir quelque
chose à foutre, de sa saloperie de vache de merde. Voilà à peu
près ce que le comptable pensait. Il ne se sentait pas moins
oppressé ici qu’à la grotte. Ce dehors ne changeait rien. C’était
un trompe-l’œil. Un trou de vie au milieu du froid. Un piège à
con. Ils marchaient l’un derrière l’autre, dans la neige épaisse,
sans point de repère, sans savoir où ils étaient, où était le
soleil, où ils allaient. Il n’y avait que le silence blanc, les pas
qui s’enfonçaient parfois jusqu’aux cuisses, la neige glacée qui
tombait dans les chaussures, les ronces qui s’accrochaient aux
jambes, les fondrières qui tordaient les chevilles, et ces arbres
noirs, ramifiés de neige, par milliers, partout autour d’eux, à
n’en plus finir.
Bernard suivait Létang, les yeux cirés par le froid, encore
rouges du feu de bois. Il regardait cette friche capillaire, cette
démarche, cette fumerolle d’haleine chaude qu’il laissait dans
son sillage. Il écoutait ce souffle rauque. Il sentait cette odeur.
Mais quel débile, pensait-il, quel foutu débile. Non seulement
ce type ne servait à rien, mais si jamais ils tombaient sur
quelque chose à bouffer, il en prendrait la moitié. Pas question,
pas question que ça arrive. Il fallait la mériter, la bouffe. Et
l’immonde Simplet ne méritait que de crever.
Il s’était remis à neiger, fort. Le paysan grommela quelque
chose. Le comptable comprit qu’il regrettait d’avoir quitté la
grotte. C’était bien temps d’y penser. Simplet allait trahir,
c’était presque certain. À la première occasion. Il se débinerait
avec le feu. Il les perdrait. Il ferait fuir le gibier, avec son
souffle rauque et son odeur de pisse. Ou alors il profiterait
d’un moment d’inattention pour lui faire la peau. Et peut-être
bien qu’il le boufferait. Ils n’auraient jamais dû quitter cette
grotte, jamais, et cette précieuse eau claire, qui devait y couler
depuis des millénaires… Ils s’en étaient gavés avant de partir,
faute de pouvoir en emporter. Cette eau glacée avait longtemps
clapoté dans leurs entrailles, comme une carène liquide, et ils
avaient déjà soif. Simplet prétendait qu’il ne fallait pas boire la
neige. Ils n’avaient pris que les couvertures de survie, et le
paysan portait un restant de feu dans un pot de fer. Il semblait
impossible de bivouaquer dans cette neige et ce blizzard. Et
Simplet ne savait pas où il allait, ça crevait les yeux. Il n’aurait
jamais dû suivre ce demeuré.
« Attention à pas tomber. »
Était-il obligé de parler si fort ? D’être aussi bête ? Bernard
trébucha sur une souche morte, et tomba dans la poudreuse en
jurant. Létang se retourna.
« Ça va ? Faut faire attention à pas tomber. »
Cet enfoiré de Simplet l’avait fait exprès. Aucun doute. Et
dire qu’il l’avait écouté jusqu’ici, docilement suivi. Il avait
attendu son feu vert. Il avait pensé à ces téléfilms à la con où
le simplet a toujours raison avant tout le monde, tandis que le
notable sans scrupules se trompe dès le départ et est humilié à
la fin. Il n’était pas dans un film. Qu’attendait-il pour
reprendre le contrôle ? Avait-il si peu d’amour-propre qu’il
laissait un simplet le mener par le bout du nez, jusqu’à décider
de sa vie et de sa mort ? C’en était trop. Il devait agir. Et,
d’une manière ou d’une autre, en finir avec Simplet.
50
MOMENT, subst. masc.
Espace de temps favorable, propice.
PARIS 20e,
LE SEIZIÈME JOUR, 14H09.
PARIS 13e,
LE SEIZIÈME JOUR, 17H08.
PARIS 20e,
LE SEIZIÈME JOUR, 17H21.
PARIS 13e,
LE DIX-SEPTIÈME JOUR, 0H34.
TROISIÈME SEMAINE
– Proverbe espagnol
57
COUTEAU, subst. masc.
Instrument tranchant formé d’une lame emmanché.
PARIS 17e,
LE DIX-SEPTIÈME JOUR, 1H01.
PARIS 13e,
LE DIX-SEPTIÈME JOUR, 1H43.
PARIS 12e,
LE DIX-SEPTIÈME JOUR, 1H59.
PARIS 13e,
LE DIX-SEPTIÈME JOUR, 2H05.
PARIS 17e,
LE DIX-NEUVIÈME JOUR, 22H39.
PARIS 12e,
LE VINGT-ET-UNIÈME JOUR, 14H08.
PARIS 13e,
LE VINGT-QUATRIÈME JOUR, 15H43.
CHÂTEAU DE VINCENNES,
LE VINGT-QUATRIÈME JOUR, 20H56.
QUATRIÈME SEMAINE
– Cormac McCarthy
76
APOCALYPSE, subst. fém.
Vision ou catastrophe comparable à la fin du monde.
PARIS 17e,
LE VINGT-CINQUIÈME JOUR, 9H08.
PARIS 13e,
LE VINGT-CINQUIÈME JOUR, 14H52.
PARIS 17e,
LE VINGT-SIXIÈME JOUR, 9H32.
PARIS 12e,
LE VINGT-SIXIÈME JOUR, 10H02.
CHÂTEAU DE VINCENNES,
LE VINGT-SIXIÈME JOUR, 10H08.
PARIS 12e,
LE VINGT-SIXIÈME JOUR, 10H18.
« Contact ! »
Les crépitements secs de la mitrailleuse légère annonçaient
ce que tous ici attendaient. Le nouvel assaut des soldats du
Califat. La météo était meilleure. On avait mobilisé, des deux
côtés, tous les hommes qui tenaient debout. Danjou avait
ordonné un tir de suppression, et l’histoire semblait se répéter.
Une fois le premier djihadiste lancé à découvert abattu à
quelques mètres de son point de départ, l’ennemi fut fixé sur
ses positions par la précision des militaires. Une nouvelle fois,
Kalach, Glock et Tokarev semblaient s’épuiser en vain. Mais
Danjou pressentait que cet assaut-là leur réservait des
surprises. « Et pas forcément que des cons cachés derrière des
portières », avait-il dit à ses hommes. L’officier voyait juste, il
ne savait pas encore à quel point.
Après cette première escarmouche, le silence retomba. Les
culasses et les canons fumaient de part et d’autre. On
enclencha de nouveaux chargeurs. Danjou était sur le toit du
POPB, prêt à rejouer Camerone, avec son sniper, l’opérateur
de la 12,7, tournée vers le nord, et un autre soldat. À côté
d’eux leurs coffrets précieux, scintillants de munitions. Ils
s’étaient aménagés sur leur saillant un épais retranchement,
constitué de sacs de sable et de plusieurs rangées de parpaings.
C’est alors qu’ils les virent avancer, à découvert, les bras
levés. Comme s’ils se rendaient. Les militaires, surpris, se
redressèrent. Ils étaient des dizaines, des centaines. Il en sortait
de partout.
« Mon capitaine ? »
Danjou hésitait. Ils n’étaient pas armés. Les soldats, œil
dans le viseur, verrouillaient leur cible et attendaient un ordre.
Il y avait des civils, utilisés par le Califat. Des femmes. Des
enfants. Il y avait aussi ces types blafards, manifestement mal
en point, qui peinaient à marcher. Et parmi eux se mirent à
courir ces hommes enragés, sortis de nulle part.
« Mon capitaine ? »
Le calife avait promis aux mille survivants affamés de
Fleury-Mérogis la liberté, s’ils parvenaient à investir le POPB.
Le Califat envoyait parmi eux ses malades les plus atteints et
les plus contagieux. Les djihadistes y avaient aussi mêlé les
derniers kouffars raflés pour servir de leurres, et ajouter à la
confusion.
« Feu », ordonna Danjou.
Les armes régulières répondirent aussitôt, et leur nappe de
balles éteignit l’assaut, couchant net des dizaines de
marcheurs. On hurlait. Certains refluèrent, d’autres
continuaient. De leurs positions les djihadistes ripostèrent,
massivement, cherchant à empêcher les militaires d’ajuster
leurs tirs. Ça marchait. Derrière la fumée des impacts, il
devenait impossible de contenir la course d’une telle foule.
Dans la confusion la plus parfaite, les soldats du Califat
massacraient les civils faisant mine de battre en retraite.
« Grenades », ordonna Danjou.
On entendit le clappement caractéristique des lanceurs
AG36, puis une série d’explosions sourdes, fauchant les
assaillants par dizaines, s’élevant en panaches de fumée au-
dessus des toits. La 12,7 entra en action, ébranlant les airs et
transperçant les corps, qui tombaient par grappes au milieu de
ce réseau de fer. Les premiers rangs atteignaient cependant
déjà le bâtiment. Les trois militaires postés le long de l’édifice
durent se replier vers l’unique porte laissée ouverte. Les
détenus et quelques civils désespérés vinrent s’y faire fusiller,
presque à bout portant. Une jeune femme, parvenue à quelques
mètres de l’entrée, se fit exploser au milieu d’un groupe de
malades. Les projections de chair et de sang maculèrent les
vitres du bâtiment. Sous ce déluge de fer cette minute était
totale, pleine et entière, et pour ces soldats jamais rien
n’égalerait l’intensité de ce moment. Les armes automatiques
égrenaient leurs chapelets de balles, les ennemis tombaient, et
certains feignaient la mort, et d’autres se dispersaient pour
multiplier les cibles. On entendit parmi les cris de guerre et
d’horreur des appels à l’ouverture et à la pitié, et l’on vit ces
yeux dilatés d’épouvante s’effondrer au milieu des trouées
sanglantes. Cette masse humaine semblait n’avoir pas de fond,
et ses vagues venaient s’abattre sans fin contre les balles. Et
les soldats eux-mêmes, qui étaient pourtant des êtres rationnels
et aguerris, habitués à la folie des batailles, se demandaient de
quoi cette foule était faite, par quoi elle était possédée, et
jusqu’où s’étendrait sa volonté de mort.
« Des zombies, lâcha un policier, à l’intérieur de
l’enceinte. Ils nous envoient des zombies ! »
Les militaires tenaient bon cependant, et grâce à leur feu
croisé pas un assaillant ne put atteindre le hall. La porte
réduite à largeur d’homme en annulait le nombre. Sur le toit, le
capitaine participait au feu nourri, le dextrochère de son béret
vert étincelant au-dessus des casques de ses hommes. La 12,7
balayait des amas d’assaillants. Le sniper cherchait à cibler les
djihadistes glissés parmi la foule. C’était mission presque
impossible. Ils étaient les trois-cents, et la Perse leur envoyait
tous les damnés de son empire. Leur science et leurs armes
étaient supérieures, mais les autres avaient pour eux la folie et
le nombre. Et ces autres-là n’étaient pas des combattants, pas
même des hommes. Danjou quitta le toit, en y maintenant ses
trois soldats, avec pour consigne de continuer à grenader la
foule, de ne pas y laisser un seul djihadiste sur ses jambes.
L’officier dévala les escaliers des couloirs de service, traversa
seul les coulisses du carnage, et l’immense salle vide, où
résonnait pour son petit parterre privilégié de civils la grande
symphonie du massacre. Tous étaient terrifiés, et tous le furent
encore un peu plus en voyant le chef d’orchestre quitter son
pupitre. Ils comprirent qu’il ne faisait que passer, et se rendait
à l’entrée.
« Tenez bon, capitaine ! » cria quelqu’un. C’était une
supplication.
Danjou en avait la ferme intention. Mais ses hommes ne
contrôlaient plus les abords du bâtiment. Les autres
trouveraient bien le moyen d’en percer la structure, voire de
l’incendier. Il n’avait plus la main. Et les vagues, de malades,
de détenus, de civils et d’assaillants se succédaient, sans faiblir
et sans fin. Ils ne tiendraient pas longtemps.
90
RAID, subst. masc.
Opération militaire menée par des éléments très mobiles ayant pour mission la
destruction d’un objectif.
PARIS 12e,
LE VINGT-SIXIÈME JOUR, 10H26.
PARIS 12e,
LE VINGT-SIXIÈME JOUR, 10H29.
PARIS 12e,
LE VINGT-SIXIÈME JOUR, 10H32.
PARIS 12e,
LE VINGT-SIXIÈME JOUR, 10H47.
VINCENNES,
LE VINGT-SIXIÈME JOUR, 10H48.
PARIS 12e,
LE VINGT-SIXIÈME JOUR, 10H51.
PARIS 12e,
LE VINGT-SIXIÈME JOUR, 10H58.
VINCENNES,
LE VINGT-SIXIÈME JOUR, 11H01.
PARIS 19e,
LE VINGT-SIXIÈME JOUR, 11H06.
PARIS 11e,
LE VINGT-SIXIÈME JOUR, 11H42.
BOIS DE VINCENNES,
LE VINGT-SIXIÈME JOUR, 12H07.
PARIS 17e,
LE VINGT-SIXIÈME JOUR, 20H37.
PARIS,
LE VINGT-SEPTIÈME JOUR, 10H38.
PARTOUT,
LE VINGT-SEPTIÈME JOUR, 11H00.