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LECLERC Léa 21600776

UEO Celtes – Arts, Lettres, Langues


Licence 3, semestre 5 – Imaginaire et transferts culturels

Analyse de récit :
La première branche du Mabinogi : Pwyll, prince de Dyved

Enseignant : Erwan Hupel 05/12/2018

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Le récit de Pwyll, prince de Dyved est la première branche du Mabinogi, recueil de contes
issus de la littérature médiévale galloise, écrits en Moyen-Gallois et contenu dans les manuscrits du
Livre Blanc de Rhydderch et du Livre rouge de Hergest, copiés respectivement vers 1350 et entre
1380 et 1410 par différents scribes. Ce sont parmi les plus importants manuscrits médiévaux gallois.
Le Livre Blanc est conservé à la bibliothèque nationale du Pays de Galles à Aberystwyth, et le Livre
Rouge à Oxford. Pwyll, Prince de Dyved est un conte légendaire écrit en prose, dont le récit est
probablement issu d’une tradition orale bien antérieure. Nous basant sur la version de l’édition de
Pierre-Yves Lambert publiée en 1993 aux éditions Gallimard, Les quatre branches du Mabinogi et
autres contes gallois du Moyen-Âge, nous commenceront pas donner une description de l’œuvre,
avant de la replacer dans son contexte de création, d’abord à travers la forme du récit, puis en
étudiant le mélange de différentes cultures dans ce conte, avant de finir par la présentation qu’il fait
des bases du pouvoir royal du royaume de Dyved.

le Mabinogi de Pwyll est composé de plusieurs parties. La première partie du récit raconte la
rencontre de Pwyll et Arawn, roi d’Annwvyn, l’Autre-Monde, alors que Pwyll lui à dérobé le produit
de sa chasse. En réparation, ils échangent leurs identités pendant un an à la fin duquel Pwyll doit
vaincre l’ennemi d’Arawn, Havgan. Cet échange est bénéfique aux deux royaumes, et Pwyll obtient
le surnom de prince d’Annwvyn. Après cela, Pwyll rencontre Rhiannon, une cavalière que personne
ne peut rattraper. Pwyll l’appelle, déclarant qu’elle veut l’épouser, ce que le héros, conquis par sa
beauté, accepte. Pour pouvoir célébrer leur mariage, Pwyll use de ruse pour se débarrasser de
Gwawl, à qui avait été promise Rhiannon. Ce passage fait référence au genre appelé Tochmarc,
« recherche de mariage », dans la littérature Irlandaise ancienne. Trois ans après naît un enfant de
leur union, mais le bébé est enlevé, et les servantes de Rhiannon l’accusent d’infanticide par peur
d’être punies pour leur négligence. Rhiannon doit faire pénitence en restant assise à l’entrée du
château, racontant son histoire et proposant aux passants de leur servir de monture. l’enfant est
trouvé et élevé par un autre seigneur, qui finit par se rendre compte de sa parenté avec le prince de
Dyved et le ramène chez lui, délivrant Rhiannon de sa pénitence. l’enfant est appelé Pryderi, il
succédera à son père à la mort de Pwyll.
Ce récit à lieu principalement dans le Dyved, royaume du Sud-Ouest du Pays de Galles qui
disparaît vers 920. Un autre lieu du récit est l’Annwvyn, l’Autre-Monde, royaume de la mythologie
celtique galloise. Dans toute légende issue de la culture celte, l’autre-Monde est un lieu important,
royaume de créatures féeriques et comportant nombre de merveilles auxquelles se confrontent les
héros. c’est l’équivalent du Sidh de la mythologie Irlandaise, et peut aussi rappeler l’Avalon de la
légende Arthurienne. Comme Avalon, l’Annwvyn sera assimilé à l’Enfer, le royaume des morts,
avec la diffusion de la religion Chrétienne.
Arawn est également un personnage issu de la mythologie celtique galloise, proche d’une
divinité en tant qu’il est roi de l’Autre-Monde et qu’il utilise des capacités merveilleuses en
changeant son apparence et celle de Pwyll. Rhiannon, dont le nom signifie « grande reine » peut
être rapprochée de la déesse gauloise Epona, les deux étant associées avec le cheval, bien que la
dimension divine du personnage ait disparu. Pryderi, dont le nom veut dire « souci », à aussi des
caractéristiques surnaturelles, paraissant avoir trois ans quand il n’en a qu’un. Comme son père, il
fait partie de la dynastie des princes de Dyved, et il est dit qu’au cours de son règne, il agrandit le

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royaume. Rhiannon et Pryderi apparaissent dans la troisième branche du Mabinogi, Manawydan
fils de Llyr, et Pryderi meurt durant la branche suivante, Math fils de Mathonwy. Ce récit est un
mythe fondateur racontant les origines de la dynastie des princes de Dyved, tout en présentant un
modèle de conduite à respecter pour tout bon seigneur.

Les derniers manuscrits contenant ce récit ayant été mis à l’écrit vers la fin du XIV ème siècle,
il à été composé en prose, les romans en prose devenant de plus en plus courants à partir du XIII ème
siècle. On reconnaît le style d’écriture médiéval, toujours marqué par les traditions orales, et dans
lequel on trouve régulièrement des répétitions. Ainsi, dans plusieurs récits des Quatre branches du
mabinogi et autres récits gallois du Moyen-Âge, est répétée l’expression « Entre moi et Dieu ». de
même. En outre, plusieurs fois dans le conte de Pwyll la structure du récit est elle aussi répétitive :
Lorsque Pwyll rencontre Rhiannon, pendant plusieurs jours il envoie un de ses guerriers prendre un
cheval et tenter de rattraper Rhiannon sans succès, chaque journée se passant ainsi : Pwyll et sa cour
vont au tertre de Gorsedd Arberth, s’assoient dessus, voient arriver la cavalière, le roi demande à un
de ses guerriers d’aller chercher un cheval puis de rattraper Rhiannon, ce qu’il tente sans succès
avant de retourner vers son roi, et la cour de rentrer. En outre, on remarque le retour par quatre fois
du topique du délai d’un an : quand Pwyll et Arawn échangent leurs apparences, quand Pwyll et
Rhiannon prévoient leur mariage, Quand Pwyll se venge du prétendant de Rhiannon et quand on
demande à Pwyll de répudier Rhiannon pour avoir un héritier. Cette structure répétitive se trouve
principalement dans des contes et autres récits anciens, en particulier issus du Moyen-Âge.
Ce conte, écrit au XIVème siècle mais issu d’une tradition plus ancienne, se trouve ainsi entre
différentes époques : L’influence de la culture celtique galloise est évidente, à travers des
personnages liés à l’Histoire du Pays de Galles, comme Pwyll et Pryderi, supposés par ce récit
descendants de la dynastie de Dyved, ainsi que des personnages issus de la mythologie comme
Arawn, prince d’Annwvyn. D’ailleurs, les couleurs de ses chiens de chasse, « […] d’un blanc
brillant et lustré, leurs oreilles étaient rouges. »1, sont caractéristiques des animaux de l’Autre-
Monde dans les légendes celtiques. En outre, le récit présente également des coutumes anciennes.
Pwyll suit donc un usage avéré lorsqu’il envoie son fils être élevé chez un autre seigneur, à la fin du
récit. Mais ce conte contient aussi des traces de christianisation, les premières versions du récit
ayant été modifiées au fur et à mesure que la religion chrétienne gagnait en importance au Pays de
Galles, d’autant plus que les copistes du Moyen-Âge étaient souvent des membres du Clergé. Ainsi,
l’expression récurrente « Entre moi et Dieu » marque la présence d’une religion monothéiste, les
copistes ayant probablement remplacé une autre expression similaire qui aurait fait référence aux
cultes polythéistes de la culture celte. En outre, la punition de Rhiannon, faussement accusée
d’infanticide présente également des marques d’influence du christianisme, se rapprochant de la
pénitence chrétienne plutôt qu’une justice que l’on pourrait imaginer très brutale au vu d’un crime
de cette ampleur. De même, il y a une référence au baptême, lorsque le seigneur Teirnon recueille le
fils de Pwyll et le fait baptiser, détail de l’histoire qui n’est sans aucun doute pas apparu avant la
christianisation du Pays de Galles. On peut ensuite trouver des éléments relevant de l’idéal courtois
médiéval. En effet, lors de l’épisode autour du mariage de Pwyll et Rhiannon, c’est la femme qui à
le dessus. Lorsque Pwyll se fait manipuler par le prétendant, c’est son épouse qui lui dit comment

1 Lambert P.-Y., Les quatre branches du Mabinogi et autres récits gallois du Moyen-Âge, collection Aube de
l’Humanité, éd. Gallimard, Paris, 1993, P. 36.

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régler le problème, c’est donc elle qui à le pouvoir de décision et qui choisit son favori comme
époux, ce qui fait d’autant plus sens si, comme son nom l’indique, Rhiannon, la « grande reine »,
est liée à la souveraineté.
Ce récit est aussi une légende royale, servant à raconter les origines de la lignée des princes
de Dyved. En présentant le règne de Pwyll comme accordé par le roi de l’Autre-Monde, qui devient
son allié, sa souveraineté devient sacrée, ce qui rend sa légitimité absolue. Ce conte, dans ses
premières versions orales, à donc pu avoir été à une époque utilisé pour rappeler les origines
mythiques du pouvoir royal de la dynastie de Dyved, bien qu’à l’époque d’écriture des manuscrits,
le royaume de Dyved n’existe plus depuis plusieurs siècles. Cette première branche du récit présente
également les fondements du pouvoir royal selon la tradition galloise : Le caractère sacré de la
royauté, le mariage qui d’habitude est un moyen d’ascension au trône, nombre des héros de récits
médiévaux deviennent seigneurs ou rois à la fin de leurs aventures et après s’être mariés. Il y à
ensuite l’importance de la succession, au centre de la troisième partie du récit, dans laquelle on
conseille à Pwyll de prendre une autre femme pour avoir un héritier le plus rapidement possible, ce
qui souligne l’importance de ce sujet au Moyen-Âge. La première branche du Mabinogi se termine
donc par le récit de la succession et un résumé du règne de Pryderi.

Le Mabinogi de Pwyll, prince de Dyved est donc un récit mythologique adapté d’une
tradition orale celtique, qui fut remis au goût du jour par différents scribes, si bien que ce conte,
bien que mis à l’écrit à une époque dominée par le christianisme, garde des influences de ses
origines celtiques galloises et de tradition orale, remontant jusqu’à des marques de la mythologie
indo-européenne. Dans les quatre branches du Mabinogi, Pryderi est l’un des rares personnages à
réapparaître, bien que son rôle soit moindre dans les autres branches où il apparaît. De même, dans
Manawydan fils de Llyr, on assiste aux conséquences des événements de la première branche du
Mabinogi, le Dyved étant ensorcelé par un ami de Gwawl, ancien prétendant de Rhiannon, qui
voulait le venger.

Bibliographie :
Lambert P.-Y., Les quatre branches du Mabinogi et autres récits gallois du Moyen-Âge, collection
Aube de l’Humanité, éd. Gallimard, Paris, 1993.

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