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Thomas Pellard
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Philologie 4 La parenté des langues
1. 『モモ太郎:日本昔噺』1926
2. coréen ㅸ
ㅏ βa chinois fǎ Familles de langues
『伊路波』 1492 『書史会要』 1630 – ensembles de langues < d’un ancêtre commun
· indo-européen : lgs italiques, germaniques, celtiques,
3. balto-slaves, indo-iraniennes, grec, arménien…
· afro-asiatique : lgs sémitiques, berbères, couchi-
tiques, tchadiques, omotiques, égyptien
… まず平家物語の書 · ouralien : finnois, estonien, hongrois…
き始めには,奢りを極め,人をも人と · niger-congo : lgs bantoues, mandées…
思わぬようなるものはやがて滅びたという · austronésien : lgs de Taïwan, de Malaisie-Indonésie
(『天草版平家物語』1592) et d’Océanie, malgache, thaï
· sino-tibétain : chinois, tibétain, birman…
4. 『類聚名義抄』 fin xi e s.
· austro-asiatique : vietnamien, khmer, munda…
5. 比 比迩波(日には) · nombreuses autres familles : lgs caucasiques
迩 pjijX nyeX pa du Nord-Est, kartvéliennes, nilo-sahariennes, dra-
波 『古事記』 (712, poème 26) vidiennes, eskimo-aléoutiennes, na-denés, algon-
quiennes, iroquoises, mayas, uto-aztèques, pama-
nyungans, trans-nouvelle-guinéennes…
Emprunts au chinois – certaines langues restent sans parent connu (isolats) :
– chi. p- ⇒ jp. h- : 波 pa (> bō) ⇒ ha basque, aïnou, sumérien, étrusque…
– mais chi. x- ⇒ jp. k- : 海 xojX (> hǎi) ⇒ kai – une classification n’est pas un but en soi mais une
hypothèse visant à expliquer des faits linguistiques
En résumé
*p > ɸ > h / # Ressemblances entre langues : explications possibles
>w /V V (> ∅ / {i, u, e, o}) – hasard : ressemblance accidentelle
>b /N (et dans le rendaku) – tendances universelles : mots enfantins, onomatopées…
*pp > pp – contact : emprunt de mots et de formes, influence
– parenté : divergence depuis une origine commune
3 « Lectures » multiples des caractères chinois
4.1 Hasard
En japonais un même caractère chinois peut avoir diffé-
rentes lectures chinoises (音読み) selon les mots, c.à.d. Ressemblances accidentelles (langues non-apparentées)
des mots de prononciation dissemblable peuvent être – mbabaram dog (< *gudaga) ≠ ang. dog
notés avec des caractères communs – chi. yú (<*r.ŋa) ≠ oki. jʼu (= jp. iwo > uo) « poisson »
– 日本 nihon vs. 本日 honjitsu – hongr. sótaran ≠ jp. shio taran « non (assez) salé »
– 一ヶ月 ikkagetsu vs. 一月 ichigatsu
– 本人 honnin vs. 日本人 nihonjin Changements phonétiques rendent des formes mécon-
naissables
Différentes strates chronologiques d’emprunts lat. fr. jp. méd. jp. mod.
1. goon 呉音 : peut-être via la péninsule coréenne, no- aquam > eau wepamu > yōō 酔おう
tamment dans le domaine du bouddhisme aquārium > évier kepu > kyō 今日
2. kan’on 漢音 : emprunts au dialecte chinois médiéval avicellus > oiseau tepu > chō 蝶
de Chang’an (長安) des viie et viiie s.
3. tōsōin 唐宋音 : plus tardifs et moins nombreux Formes apparentées mais peu ressemblantes
fr. ang. ōgami jp. yonaguni jap.
Exemples des différences entre strates nous = us pɯː = i 居 suː = kyō 今日
goon 行 gyō « ligne » 胡麻 goma « sésame » venir = come fks = kuchi 口 dwaŋ = yowai 弱い
kan’on 行為 kōi « acte » 胡椒 koshō « poivre » quoi = what kfː = tsukuri 作り tʼaŋ = chikai 近い
tōsōin 行灯 andon « lampion » 胡乱 uron « douteux »
Formes ressemblantes mais non-apparentées entre
Dévoisement en chinois reflété en kan’on langues de la même famille
b > pʱ 分 bun > fun (< pun) – fr. avoir (< habēre <*gʰeHb-) ≠ ang. have (<*keh₂p-)
d > tʱ 大 dai > tai – fr. feu (< focum <*dʰegʷʰ- ?) ≠ ang. fire (<*péh₂wr̥ )
g > kʱ 下 ge > ka – lat. deus (< *deywós) ≠ gr.anc. θεός theós (< *dʰéh₁s)
2
Éliminer le hasard et les universaux · fr. bougette « bourse » ⇒ ang. budget ⇒ fr. budget
– comparer des associations forme-sens et non des struc- – vocabulaire de base plus stable : parties du corps,
tures grammaticales ou des traits typologiques : objets et phénomènes naturels, numéraux, etc.
· pratiquement la moitié des langues du monde ont – formes grammaticales (conjugaison, déclinaison)
l’ordre des mots sov, l’autre svo moins facilement empruntées que les mots
· tandis que peu ont un impératif en -e (jp.) ou un – l’emprunt de paradigmes entiers et de formes irrégu-
accusatif en -m (latin, sanscrit, etc.) lières est rarissime
– comparer des systèmes (conjugaisons ou déclinaisons
entières) plutôt que de formes isolées : peu probable 4.3 Parenté
de trouver par hasard des langues qui partagent l’en-
semble des formes conjuguées d’un verbe « Lorsque vous avez éliminé l’impossible, ce qui reste, si
« être » skt grec latin gotique v.slav. improbable soit-il, est nécessairement la vérité ». A. C.
sg. 1 ásmi eimí (εἰμί) sum im jesmĭ Doyle, Le signe des quatre, 1890.
2 ási eî (εἶ) es is jesi
3 ásti estí (ἐστί) est ist jestŭ La meilleure preuve de parenté est quand la comparaison
pl. 1 smás esmén (ἐσμέν) sumus sijum jesmŭ permet d’expliquer les langues
2 sthá esté (ἐστέ) estis sijuþ jeste – en v.ang. alternance þ ([θ], [ð]) ~ d ([d]) dans le
3 sánti eisí (εἰσί) sunt sind sǫtŭ prétérit de « devenir » : 1/3sg. wearþ ~ pl. wurd-on
– établir des correspondances récurrentes et régulières – < la loi de Verner : syllabe accentuée précédant la
consonne → þ, suivant la consonne → d
Régularité des changements phonétiques « devenir 1sg » « devenir 1pl »
– sons changent de manière « mécanique » selon des lois v. angl. wearþ wurd-on
en principe sans exception et aveugles à la grammaire, ≠
sanskrit va-várta va-vr t imá
au sens, et à l’identité des mots
– la cible des changements phonétiques est donc le son cf. « frère » « père »
ou le phonème, et non pas le mot, même si des v. angl. brōþor fæder
changements de forme peuvent affecter certains mots ≠
sanskrit bhrā ́ t ar pi t ár
de manière sporadique et irrégulière
– si les changements phonétiques entre une langue mère Le numéral « un » en japonais
et une langue fille sont réguliers, alors les correspon- – racine hito- < pi1 to2 -
dances entre des langues sœurs sont aussi régulières – Makura no sōshi (1001) : fite-tu kuruma « un attelage »
– formes reconstruites de la proto-langue = modèles (186) au lieu de fito-tu kuruma
permettant de résumer et de dériver les formes des – la comparaison avec les autres langues japoniques
langues filles en expliquant leurs évolutions montre que l’alternance o ~ e est en fait originelle
nakijin tɕu- tˀiː-tɕi
Correspondances régulières hirara pɿtu- pɿti-tsɿ
– fr. p- = ang. f- fr. p- = ang. f- hachijo to- te-tsu
père = father pour = for
pied = foot poisson = fish 5 Origines de la langue japonaise
– jp. kus- = onotsu s- = ōgami ff- = yonaguni tsʼ-
kusa = sa = ffa = tsʼaː L’hypothèse « ouralo-altaïque »
kusuri = sui = ffuɯ = tsʼui – hypothèse totalement abandonnée
kuso = su = ffu = tsʼuː – ressemblances purement superficielles
3
Liens avec l’aïnou – les « clés » sémantiques ont été ajoutées a posteriori
– langues en contact mais typologiquement différentes pour distinguer certains homonymes
– ressemblances limitées à quelques emprunts comme – parmi les mots se prononçant comme *bˤrak 白
jp. tonakai ⇐ aï. tunakay « blanc », on distingue en rapport avec :
· les nombres (一) *pˤrak 百 « cent »
L’hypothèse coréenne · la main (扌) *mə-pʰˤrak 拍 « frapper »
– peu ou pas de morphologie commune · l’eau (氵) *[b]ˤak 泊 « immobile, amarrer »
– emprunts préhistoriques
tjə́l ⇒ tera « temple » Principe du rébus vs. explications fantaisistes
pùthjə̀ (< ?*putɨk( j)e) ⇒ hotoke (< poto2 ke2 ) « Bouddha » – 薬 (藥) *[r]ˤawk « plante médicinale » n’est pas à in-
ǒj (< *òrí) ⇒ uri (< *ori) « courge » terpréter comme « l’herbe qui rend joyeux » : l’élément
楽 (樂) *m-r[e]wk est ici phonétique
Archéologie – 道 *[kə.l]ˤuʔ « chemin » inclut 首 « tête » *l ̥uʔ pour
-14 500–950 av. jc : cultures Jōmon, chasse et cueillette, des raisons phonétiques et non pas en raison d’une
horticulture (millets, noix, haricots…), céramique hypothétique coutume ancienne où l’on traçait les
-950–+300 : culture Yayoi, migrations de la péninsule, chemins avec le sang des têtes coupées d’ennemis
agriculture du riz, métallurgie, chefferies – 福 *pək « bonheur » contient une « cruche d’alcool »
300–700 : culture Kofun, tombes monumentales, forma- 畐 *[b]ək uniquement pour des raisons phonétiques
tions étatiques hiérarchisées
Bibliographie
Anthropologie
– Japonais < mélange entre les Jōmons et les Yayois Frellesvig, Bjarke. 2010. A history of the Japanese lan-
– Aïnous < Jōmons, avec un apport génétique des po- guage. Cambridge : Cambridge University Press. https:
pulations de la Sibérie, puis des Japonais //doi.org/10.1017/CBO9780511778322.
– populations les plus proches génétiquement des Japo- Hock, Hans. 1991. Principles of historical linguistics.
nais sont les Coréens puis les Chinois du Nord Berlin : Mouton de Gruyter. https://doi.org/10.1515/
– pas de lien particulier avec les Austronésiens 9783110219135.
Kinsui, Satoshi (金水 敏) & Takayama, Yoshiyuki (高山
Scénario probable 善行) & Kinuhata, Tomohide (衣畑 智秀) & Okazaki,
– l’ancêtre des langues japoniques est sans doute arrivé Tomoko (岡崎 友子). 2011. Bunpōshi (文法史) (Shirīzu
avec les agriculteurs du riz de Yayoi Nihongo-shi 3). Tokyo : Iwanami Shoten.
– les parents du japonique restés sur la péninsule ont Meillet, Antoine. 1925. La méthode comparative en lin-
été peu à peu remplacés par le coréen < Nord guistique historique. Oslo : H. Aschehoug, Otto Harras-
– le japonais a remplacé dans l’archipel principal les sowitz & Honoré Champion. http://gallica.bnf.fr/ark:
autres langues japoniques et les langues pré-existantes /12148/bpt6k934150p.
Ōki, Kazuo (大木 一夫). 2013. Gaido bukku Nihongo-shi
6 Les caractères chinois (ガイドブック日本語史). Tokyo : Hitsuji Shobō.
Okimura, Takuya (沖森 卓 也) (éd.). 2010. Nihongo-shi
Contrairement aux idées reçues gaisetsu (日本語史概説). Tokyo : Asakura Shoten.
– les caractères chinois ne sont pas des idéogrammes Sagart, Laurent. 2006. L’emploi des phonétiques dans
notant des idées abstraites l’écriture chinoise. In Bottéro, Françoise & Djamouri,
– toutes les écritures notent des mots combinés dans des Redouane (éds.), Écriture chinoise : Données, usages
phrases, et reposent sur des principes phonétiques et représentations, 35–53. Paris : École des hautes
– écriture = passage de dessins représentant des objets études en sciences sociales & Centre de recherches lin-
ou des idées abstraites à des signes notant de manière guistiques sur l’Asie Orientale. https://halshs.archives-
conventionnelle les mots dénotant ces objets et idées ouvertes.fr/halshs-00103227.
Takayama, Michiaki (高山 倫明) & Kibe, Nobuko (木
Primauté du principe phonétique 部 暢子) & Matsumori, Akiko (松森 晶子) & Hayata,
– un même caractère pouvait noter des (quasi-) homo- Teruhiro (早田 輝洋) & Maeda, Hiroyuki (前田 広幸).
phones selon le principe du rébus : un signe notant 2016. On’inshi (音韻史) (Shirīzu Nihongo-shi 1). Tokyo :
un mot facile à représenter sert pour un mot de pro- Iwanami Shoten.
nonciation proche mais difficile à représenter Vovin, Alexander. 2017. Origins of the Japanese language.
– p. ex. 来 (來), à l’origine un pictogramme pour le blé, In Aronoff, Mark (éd.), Oxford Research Encyclopedia
notait à la fois « blé » *m-rˤək et « venir » *mə.rˤək in Linguistics. Oxford University Press. https://doi.
– rébus franco-chinois : 島結米歩 org/10.1093/acrefore/9780199384655.013.277.