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Selon la TBS, la métaphore usuelle, “Pierre est un lion”, n’est pas une métaphore du tout. En effet, le
processus imaginaire n’est pas déclenché parce que le système de la langue est ici autosuffisant, il
nous guide droit au sens de “Pierre est un lion”.
Que faire avec “Pierre est une chaise posée sur la table” ? On dirait que la rupture avec le système de
la langue est opérée, et nous y sommes éjectées : ce qui suit est donc pas du tout linguistique ? Ma
réponse est que ce qui suit est en effet une expulsion du sujet (du faisceau de son attention conscient)
envers un autre module cognitif. Mais que la linguistique pourrait et devrait se positionner par rapport
à cette éjection, y compris une théorie non-référentialiste comme la TBS.
Rappelons de l’aspect qui appartient à la signification du mot mur : l'emploi du mot mur pose l’idée
d’une séparation et présuppose l’idée de la proximité ou raison qu’il devrait y avoir une
communication. L’aspect est noté comme RAISON DE COMMUNIQUER PT SÉPARATION.
Ainsi il est prévisible que “Il y a un mur entre Pierre et son fils” soit facilement saisissable. Il
ne s’agit pas d’un emploi métaphorique du mot mur, mais d’un emploi prévu par sa signification : il y
a une raison de communiquer entre Pierre et son fils, pourtant ils ne communiquent pas. Le groupe
nominal “Pierre et son fils” évoque la parenté, donc la raison de communiquer entre les deux.
C’est ceci qui est nommé métaphore usuelle par d’autres courants.
C’est ceci qui n’est pas métaphore pour nous.
Slide 5 Exemple du mot mur dans la TBS : incongruité ou métaphore nouvelle 1m30 = 4m
Je dirai que cette incongruité est une métaphore nouvelle aussi. Elle l’est d’une manière bien plus
subtile que “Pierre est une chaise posée sur la table”. Nous reviendrons à l’analyse de cet exemple
après la présentation de notre hypothèse.
Selon la conception structuraliste, la langue fonctionne en tant que module indépendant, ou en tout cas
nettement séparé d’autres modules cognitifs. La TBS est en accord avec cette idée : les mots renvoient
aux mots, les mots peuvent être expliqués par d’autres mots, entrelacements de mots, paraphrases. Il
n’y pas besoin ni d’un métalangage ni des références au monde afin d'expliquer des phénomènes
linguistiques, des règles d’emplois de mots pleins ou mots argumentatifs par excellence. Tout est
prédicat au sein du système de la langue. Des prédicats fusionnent en nouveaux prédicats atomiques,
ainsi la langue s’affine et le sens qu’elle permet d'exprimer est de plus en plus exact.
N’étant pas référentialistes, il faudrait tout de même aborder le sujet qui a un rapport avec ce
qui est communément appelé référence. Ceci pour plusieurs raisons, entre autre :
1) Il est possible d’acquérir les nouveaux termes de la langue par un moyen métalinguistique (“un mur
est un cloison”), par l’usage (si on entend des emplois de type “Il y a un mur entre Pierre et Jean, ils
ne pourront jamais se réconcilier”). Mais il est également possible pour un nouveau terme de se créer
par un moyen référentiel (C’est quoi maman ? Ça c’est un mur).
3) Si je vous apprendre que le mot glauque (communément connu en français moderne comme
synonyme aux termes triste, effrayant) signifiait originellement la couleur bleue pâle et la signifie
encore pour certains groupes de locuteurs (ceci est une information fausse à des fins démonstratifs),
vos instances de la structure du mot glauque en seront affecté de ce nouvel élément d’information. Le
terme glauque deviendra structurellement un terme dit concret. Son emploi s'accompagnera d’une
sensation d'exactitude. Ceci est subjectif, mais il est vrai qu’il plus facile de dire “je sais exactement
ce que X veut dire” pour un terme concret vs abstrait.
Illustrons ceci.
Selon cette conception, quand l’enfant apprend le mot mur par un moyen référentiel (C’est quoi
maman ? Ça c’est un mur), son instance de la signification mur n’en est pas moins argumentatif, elle
ressemble à cela :
Mur
Grâce à cette signification (limitée) il saura produire des phrases comme “Ceci est un mur”, “Imagine
un mur”.
Une fois que l’enfant sera exposé à toute la plénitude d’emplois du mot mur, son instance de la
signification du mot mur va se compléter :
Mur
Ayant posé une conception (approximative) de l’aspect IO, nous pouvons maintenant donner une
définition à ce que j'appelle un court-circuit linguistique. Il est possible et même fréquent de se servir
du système de la langue sans recourir à l’aspect IO, ou plutôt sans que l’aspect IO soit mobilisé, mis
en arrière de plus en plus, même quand il s’agit des énoncés qui ont pour vocation de désigner,
comme “ceci est un mur”.
(2) Les chercheurs russes et japonais ont une raison de collaborer POURTANT ils ne collaborent pas.
Slide 11 Conclusion
Il n’est pas en effet évident de réactualiser l’aspect IO lors de la situation de la pure parole.
L'incongruité sémantique (dont la métaphore nouvelle est peut être un synonyme exact), pourrait être
considérée comme un acte de langage de nature métalinguistique, une stratégie énonciative dont le but
est de pallier l’éventuel court-circuit linguistique. Ceci a des fins persuasives : car qu’est-ce qui peut
être plus persuasif qu’un recours aux émotions, à la mémoire imagée chez l’interlocuteur.