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N° 72

OUEST

Pratique notariale
du Droit International Privé

Février 2006

Alain ARDILLIER
Docteur en Droit
Directeur du CRIDON-OUEST
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

AVERTISSEMENT

Pendant longtemps, le droit international privé n’a occupé qu’une place limitée parmi les
matières intéressant la pratique notariale. Il n’en est plus de même aujourd’hui et ce depuis
quelques décennies comme le révèlent les statistiques des Cridon.

Des facteurs aussi divers que la création de la communauté européenne, la rapidité des
moyens de communication, la nécessité de s’expatrier pour des raisons professionnelles,
l’importance prise par les loisirs, ont multiplié les problèmes de droit international privé dans
des matières relevant de l’activité traditionnelle du notaire.

Sans doute la profession n’est-elle plus désorientée devant un afflux de dossiers d’un genre
nouveau, des stages, des congrès, des conférences l’ayant sensibilisé à une matière
traditionnellement délaissée ; les Cridon eux-mêmes par leurs publications ont largement
contribué à cette familiarisation.

Ce souci de répondre aux besoins de la profession notariale nous a conduit il y a quelques


années (1990) à rédiger une brochure sur les acquisitions par les étrangers abordant déjà la
plupart des questions de droit international privé concernant le notariat : état et capacité des
personnes, régimes matrimoniaux, successions…

La nécessaire réactualisation de cet ouvrage déjà vieux de plus de 15 ans et surtout l’entrée en
vigueur de la convention de la Haye du 14 mars 1978 en matière de régime matrimoniaux, le
1er septembre 1992, qui a bouleversé les solutions antérieures, comme la multiplication des
questions posées au Cridon-Ouest dans des matières qui en suscitaient jusque là fort peu,
justifiaient que soit proposée à la pratique notariale une nouvelle brochure de droit
international privé.

Dans le souci de répondre le plus largement possible à ses préoccupations, nous avons divisé
cette étude en trois rubriques regroupant chacune plusieurs matières que nous examinerons
successivement : l’état des personnes, le droit de la famille et les successions, les acquisitions
par les étrangers.

Auparavant, il convient de rappeler les principes généraux qui animent le droit international
privé.
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PRINCIPES GENERAUX DE DROIT INTERNATIONAL PRIVE

Le droit international privé tend à résoudre les problèmes juridiques résultant de l’application
à un même rapport de droit d’au moins deux systèmes juridiques distincts. Il diffère ainsi du
droit comparé qui a pour objet d’étudier le contenu du droit interne étranger. Les deux
disciplines vont néanmoins interférer, la règle de conflit qui détermine la loi applicable à une
situation juridique comportant des éléments d’extranéité, pouvant donner compétence aussi
bien à la loi française qu’à la loi étrangère.

Certes, limiter le droit international privé aux conflits de lois dans l’espace est contestable, la
doctrine française lui assignant un domaine beaucoup plus vaste puisqu’elle y inclut la
nationalité, la condition des étrangers et les conflits de juridictions, mais ils constituent la
pierre d’angle du droit international privé.

Pratiquement inconnus du droit romain, les conflits de lois sont apparus au Xème siècle dans
l’Italie du Nord lorsque les diverses cités marchandes se dotent « de statuts », codes
municipaux régissant spécialement les relations de droit privé. Les conflits qui devaient
inévitablement voir le jour entre ces cités régies par des dispositions légales spécifiques sont à
l’origine de l’élaboration au XIIIème et XIVème siècle de la théorie des conflits de lois (théorie
des statuts) par les glossateurs qui ont dégagé les principales catégories de rattachement
encore utilisées aujourd’hui..

Si le droit des conflits est ainsi profondément enraciné dans le temps – il prend la forme dans
l’ancien droit de conflits de coutumes – il s’agit néanmoins d’une discipline juridique récente
qui prend son essor au XIXème siècle avec le développement des relations internationales.

Ses sources actuelles sont très diversifiées : à côté des sources traditionnelles du droit interne
(loi, doctrine, jurisprudence rendue principalement en matière notariale dont l’importance est
considérable), il faut citer les principales sources internationales telles la coutume (certaines
règles formulées au Moyen-âge font partie du droit positif comme celle régissant la forme des actes),
la jurisprudence internationale (les décisions de la Cour de justice internationale de la Haye) et les
traités et conventions de plus en plus nombreux (traités bilatéraux et multilatéraux), notamment
les conventions élaborées par la conférence de la Haye dans des matières très diverses :
régimes matrimoniaux, incapacité, contrat, légalisation, etc..

Il existe plusieurs méthodes pour déterminer la loi nationale applicable à un rapport de droit :

- La méthode des solutions directes qui consiste à énoncer des règles matérielles
substantielles indépendamment des lois internes des Etats et qui règlementent directement
la situation juridique internationale. Cette méthode n’est guère plus utilisée que dans les

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conventions internationales (en matière de commerce international de transport, de navigation,


mais aussi de condition des étrangers, ou de nationalité).

- La méthode des conflits de lois dans l’espace qui, contrairement à la précédente ne


donne pas la solution du problème et se borne à désigner la loi applicable laquelle peut
être aussi bien la loi française que la loi étrangère.

Enfin, « des lois dont l’observation est nécessaire pour la sauvegarde de l’organisation
politique, sociale ou économique du pays » qualifiées de lois de police devront être
appliquées par le juge français même si la règle de conflit ne les désigne pas : ce sont des
règles d’application immédiate ou nécessaire. Il en est ainsi de la législation du travail, de la
législation sur les loyers, des dispositions du Code Civil sur le régime primaire, etc.

I- LA METHODE DES CONFLITS DE LOIS

La finalité de la règle de conflit de lois est de déterminer la loi applicable à un rapport de droit
mettant en jeu des éléments d’extranéité.

Un anglais décède en France où il était domicilié. Quelle est la loi applicable à sa succession.
Plusieurs lois sont susceptibles de s’appliquer : la loi anglaise, loi nationale ou personnelle du
défunt, la loi de son domicile ou de sa résidence au moment de son décès, voire la loi du lieu
de situation de ses biens.

Un ressortissant étranger âgé de 20 ans se propose d’acquérir un immeuble en France où il est


domicilié. En a-t-il la capacité. Deux lois sont susceptibles de permettre de répondre à la
question, la loi française, loi de son domicile ou de sa résidence habituelle, ou sa loi nationale.

Pour résoudre ces conflits de loi, une règle de conflit ou règle de rattachement a été élaborée
qui, comme son nom l’indique, relie le problème juridique soulevé à une loi qui peut être
indifféremment la loi française ou la loi étrangère.

De multiples règles de conflit variant d’une matière à l’autre ont été élaborées.

Ensemble elles constituent le système français de conflit de lois dans l’espace.

Les principales règles de conflit dans l’espace appliquées en France sont les suivantes :

 L’état et la capacité des personnes (statut personnel) relèvent de la loi nationale ;


 Les biens (statut réel) sont soumis à la loi du lieu de leur situation (lex rei sitae) ;
 Les contrats sont soumis à la loi d’autonomie ou loi choisie par les parties ;

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 La forme des actes juridiques est régie par la loi du lieu où ils sont passés (locus regit
actum) ;
 Les faits juridiques relèvent de la loi du lieu où ils se sont produits ;
 La procédure obéit à la loi du tribunal saisi (lex fori).

Les régimes matrimoniaux sont soumis à la loi d’autonomie sous réserve de l’application de
la convention de la Haye du 14 mars 1978 en matière de régimes matrimoniaux.

En matière de succession, il convient d’opérer une distinction entre les successions


immobilières qui relèvent de la loi du lieu de situation des immeubles et les successions
mobilières qui relèvent de la loi du lieu du dernier domicile du défunt.

Ces règles de conflit ou de rattachement peuvent se décomposer en deux éléments :

- Un rapport de droit qui entre dans l’une des catégories énoncées plus haut (l’état et la
capacité des personnes, les contrats, les biens, forme des actes, procédure).

- Un élément de rattachement (personnes, choses (biens), évènements (actes juridiques ou


faits juridique) environnement juridique (forme et procédure)).

La règle de conflit fait ainsi application à un rapport de droit d’une législation désignée par un
point de rattachement 1.

Si les législations contemporaines connaissent à peu près toutes des règles de conflit
analogues, elles vont diverger sur la loi déclarée applicable désignée par le point de
rattachement. Exemple : le statut personnel relève en France de la loi nationale, dans les pays
anglo-saxon de la loi du domicile. En droit espagnol, les successions relèvent du statut
personnel alors qu’en droit international privé français celles-ci seront soumises à la loi du
lieu de leur situation pour les immeubles au moins. Ce conflit de rattachement génère le
mécanisme du renvoi.

Par ailleurs, le contenu des catégories peut différer d’une législation à l’autre. La prohibition
de tester en la forme conjonctive est-elle une question de forme ou une question de fond ? La
loi applicable dépendra de la qualification qui sera donnée à l’interdiction de tester en la
forme conjonctive.

Cette divergence sur le contenu des catégories et sur la loi déclarée applicable en fonction du
point de rattachement est désignée sous les noms respectifs de problème des qualifications et
théorie du renvoi.

1
Cf J. DERRUPPE, Mémento Dalloz de D.I.P.

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A- Le problème des qualifications

La prohibition édictée par l’article 968 du Code civil français de tester en la forme
conjonctive illustrera la difficulté (nombreux sont les pays étrangers qui ignorent une telle
disposition, le droit allemand notamment).

Deux époux danois qui possèdent un patrimoine immobilier en France ont pris des
dispositions testamentaires en la forme conjonctive sur leur territoire national où cette forme
testamentaire est admise. Ils s’interrogent sur l’efficacité de leur testament sur les immeubles
qu’ils possèdent en France.

Celle-ci dépendra de la loi qui lui est applicable, laquelle dépendra de la qualification qui sera
faite de la prohibition de tester en la forme conjonctive.

Ou bien l’on qualifie de question de forme la prohibition de tester en la forme conjonctive et


la loi du lieu de rédaction de l’acte, la loi danoise sera compétente, et le testament sera
efficace en France, ou bien l’on fait de l’interdiction de tester en la forme conjonctive une
question de fond, relevant de la loi applicable à la succession et le testament ne peut recevoir
d’application en France sur les immeubles qui s’y trouvent.

La jurisprudence française, comme la convention de La Haye du 5 octobre 1961 en matière de


forme des dispositions testamentaires, devait qualifier l’interdiction de tester en la forme
conjonctive de question de forme.

Dès lors le testament en cause rédigé en la forme conjonctive dans un pays qui admet la
validité des dispositions testamentaires prises sous cette forme est efficace sur les immeubles
possédés en France par le testateur.

Qualifier consiste ainsi à déterminer dans quelle catégorie de rattachement entre le rapport de
droit ou l’institution juridique en cause.

La question s’est alors posée de savoir selon quelle loi le rapport juridique en cause devait
être qualifié. Pour les auteurs comme pour la jurisprudence, la qualification doit se faire lege
fori, c'est-à-dire que le juge saisi doit qualifier la situation juridique en cause d’après les
concepts de son propre système juridique.

Ainsi, les parts de SCI sont qualifiées de biens meubles en droit français, alors que dans de
nombreux pays étrangers elles sont considérées comme des biens immobiliers.

Qualifier consiste par conséquent à déterminer dans quelle catégorie de rattachement entre le
rapport de droit ou l’institution juridique en cause, cette détermination se faisant selon les
concepts de la loi du tribunal saisi.

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B- Le problème du renvoi

Le renvoi trouve sa source dans la divergence des règles de conflit sur la désignation des
points de rattachement.

L’application des deux règles de conflit qui diffèrent à une même situation juridique peut
donner lieu à deux types de conflit :

- Un conflit positif lorsque chaque système donne compétence à sa propre loi.

Exemple : Un français est domicilié en Grande Bretagne. A l’occasion d’une opération


réalisée dans ce pays on s’interroge sur sa capacité. La règle de conflit française donne
compétence à la loi nationale, la règle de conflit britannique à la loi du domicile soit en
l’espèce à la loi britannique.

- Un conflit négatif lorsque chaque système décline sa compétence et l’attribue à l’autre.

Exemple : Quelle est la loi applicable à la dévolution de la succession immobilière


espagnole d’un français décédé domicilié en France ? La règle de conflit française
donne compétence à la loi espagnole du lieu de situation de l’immeuble tandis que la
règle de rattachement espagnole donne compétence à la loi française, loi nationale du de
cujus.

C’est de ce conflit négatif que naît le renvoi.

La jurisprudence française devait admettre ce renvoi de la loi étrangère pour la première fois
en matière de succession dans la célèbre affaire FORGO 2.

Le renvoi est admis aujourd’hui en matière de succession, de divorce et de statut personnel. Il


est exclu toutefois en matière contractuelle et en matière de régime matrimoniaux. Il est
encore écarté lorsqu’un bien immobilier est situé en France quel que soit le domicile ou la
nationalité du de cujus.

Exemple : La succession immobilière espagnole d’un français domicilié en France sera


dévolue selon la loi française, la règle de conflit espagnole désignant comme législation
applicable à la dévolution des successions la loi nationale du de cujus.

Ce renvoi au premier degré peut se doubler d’un renvoi au second degré, lequel est admis par
la jurisprudence française lorsque la loi désignée décline sa compétence au profit d’une loi
tierce.

2
Cass. 24 juin 1878, 579, 1, 156 ; Req. 22 février 1982, D.P. 82, 1, 204

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Exemple : Quelle est la loi applicable à la succession mobilière d’un allemand qui inclut
des biens mobiliers situés en France, décédé domicilié en Italie ? En vertu de la règle de
conflit française la succession est dévolue selon la loi italienne. Mais la règle de conflit
italienne donnant compétence à la loi nationale du de cujus, la succession mobilière
obéira aux règles de dévolution du droit allemand.

C- Les conflits mobiles

Une même situation juridique peut être successivement soumise, dans le temps, à des lois
différentes par suite d’un changement de son élément de rattachement. Il y a ce que l’on
appelle alors un conflit mobile.

Exemple : Deux époux philippins ont acquis la nationalité française. Quelle sera la loi
nationale compétente en cas de divorce, la loi française qui admet le divorce ou la loi
des Philippines qui le prohibe.

Les auteurs se prononçant en faveur des solutions dégagées en matière de conflit de lois
dans le temps, selon lesquelles le nouvel élément de rattachement doit être retenu, ces
époux philippins, devenus français, pourront divorcer en France.

II- LES INCIDENCES DE LA REGLE DE CONFLIT

La règle de conflit donne compétence indifféremment à la loi française ou à la loi étrangère.

Exemple : Un italien domicilié en Italie décède, en laissant en France un important


portefeuille de valeurs mobilières.

En vertu de la règle de conflit française et italienne en matière de succession, le


portefeuille de valeurs mobilières situé en France doit être dévolu selon la loi italienne.

L’application sur le territoire français de la loi italienne dans l’exemple précédent comme de
toute loi étrangère désignée par une règle de conflit, soulève trois difficultés, celle de sa
connaissance, celle de son application d’office et celle de savoir s’il est toujours opportun
d’en faire application sur le territoire national.

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A- La connaissance de la loi étrangère

Traditionnellement, on enseigne que le contenu de la loi étrangère est porté à la connaissance


de l’autorité chargée d’en faire application au moyen d’un certificat de coutume, lequel est
délivré par un juriste étranger. Ce n’est pas le seul. Des ouvrages tels le Juris-Classeur de
législation comparée, le Juris-Classeur Formulaire, v° Législation comparée ou tout autre
ouvrage de droit étranger, voire internet, permettront encore de connaître le contenu de la loi
étrangère.

Il convient toutefois de faire observer que l’on ne doit recourir au certificat de coutume pour
avoir connaissance de la loi étrangère que si la règle de conflit applicable à la situation
juridique lui donne compétence. La seule présence d’un élément d’extranéité dans un
rapport de droit ne saurait justifier la demande d’un certificat de coutume. Celui-ci n’est
requis que si la loi étrangère est compétente en vertu de la règle de conflit et si l’on ne peut
pas avoir connaissance du contenu de la loi étrangère par d’autres moyens (Juris-Classeur
Notarial, Cridon qui ont une documentation importante en droit comparé, etc.). Si par exemple un
français décède domicilié en France en laissant un immeuble situé en Espagne, il n’y a pas
lieu de demander un certificat de coutume pour connaître la dévolution des successions en
Espagne, car en vertu de la règle de conflit espagnole et le jeu du renvoi, l’immeuble est
dévolu selon la loi française.

B- L’application d’office de la loi étrangère

La question s’est posée de savoir pour les juristes français et par conséquent pour les notaires,
mais aussi pour les juges, si l’on devait faire application de la loi étrangère alors que les
parties n’en ont pas fait état.

Dans le célèbre arrêt BISBAL 3, la Cour de cassation avait estimé que les juges « n’avaient pas
l’obligation d’appliquer d’office la loi étrangère compétente en vertu des règles de conflit de
lois ». La Cour de cassation devait opérer un revirement de sa jurisprudence 4 puis en revenir
à la jurisprudence BISBAL avant de l’abandonner à nouveau en déclarant que le juge français
qui reconnaît la loi étrangère applicable doit en rechercher la teneur, soit d’office
personnellement, soit avec le concours des parties 5.

En pratique, cela signifie que le notaire doit faire application de la règle de conflit française et
qu’il doit rechercher le contenu de la loi étrangère lorsque celle-ci est compétente en vertu de
la règle de rattachement.

3
Cass. 12 mai 1950, D. 60, 610
4
Cass. 11 et 18 octobre 1988, JDI 1989, p. 352
5
Cass. Civ. 4 décembre 1990, JDI 91, 371, note BUREAU ; Cass. Civ. 1ère, 28 juin 2005, D. 2005, n° 41, p. 2853

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C- L’opportunité de l’application de la loi étrangère

La loi étrangère déclarée compétente sera écartée chaque fois qu’elle sera incompatible avec
l’ordre public en France ou lorsque son application résulte d’une fraude à la loi française
normalement compétente.

1- L’ordre public

Chaque fois que la loi étrangère désignée par la règle de conflit de lois contiendra des
dispositions qui viennent heurter nos propres conceptions politiques, sociales ou juridiques, le
juge comme le notaire écarteront son application et y substitueront la loi du for. C’est ainsi
qu’un musulman ne pourra contracter en France un mariage polygamique autorisé par sa loi
nationale 6 ou répudier son épouse.

D’une façon générale sera écartée toute législation étrangère qui établira des discriminations
entre les personnes fondées sur l’âge, le sexe, la race ou la religion. A ce titre, on refusera
d’appliquer en France la loi musulmane qui ne reconnaît pas aux héritiers de sexe différent
des droits successoraux égaux.

Mais au nom de l’ordre public l’on ne pourra pas s’opposer à l’effet en France de situations
valablement créées à l’étranger qui n’auraient pas pu voir le jour en France. La Cour de
cassation parle alors d’ordre public atténué. Ont ainsi été reconnus en France des divorces
prononcés à l’étranger alors que ceux-ci étaient encore prohibés en France 7 et il a été admis
que les épouses d’un musulman polygame puissent se partager l’usufruit de sa succession 8.

2- La fraude à la loi

La fraude à la loi consiste à utiliser la règle de conflit pour échapper à l’application de la loi
normalement compétente. Il y aura fraude à la loi chaque fois qu’il y aura changement
volontaire d’un élément de rattachement comme la nationalité ou le domicile pour éluder
sciemment la loi normalement compétente.

La Cour de cassation a jugé que constituait une fraude à la loi le fait de prendre une
nationalité étrangère pour divorcer à une époque où la loi française prohibait le divorce 9.

6
E.D. Ordre public, par P. LAGARDE n° 1
7
Arrêt BULKLEY Cass. 28 février 1860, S 60, 1, 260
8
Cass. Civ. 3 janvier 1980, Rev. crit. DIP 1980, 331, note BATIFFOL
9
Cass. Civ. 18 mars 1878, D 1878-1-193, note LABBE

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Dans la célèbre affaire CARON 10 le de cujus avait apporté des biens immobiliers à une société
pour substituer à la loi successorale française normalement applicable, en raison du lieu de
situation des immeubles, une loi successorale étrangère, celle du domicile du défunt qui
ignorait la réserve héréditaire du droit français. Le changement de qualification des biens de la
succession (transformation d’immeubles en biens meubles) permettait d’éluder la loi française
normalement compétente.

Il convient toutefois d’observer que toute mobilisation des immeubles français n’est pas
nécessairement constitutive d’une fraude à la loi. Celle-ci ne peut être invoquée lorsque cette
mobilisation a pour objet de soumettre une succession à une même loi (mobilisation de
l’immeuble situé en France appartenant à des anglais pour soumettre toute leur succession à la loi
anglaise) ou lorsqu’elle se justifie par une meilleure gestion du patrimoine ou pour bénéficier
d’une fiscalité plus avantageuse.

10
Cass. Civ. 20 mars 1985, Rev. crit. DIP 1986, 66, note LEQUETTE, JCP N 1987, II, 78, note BOULANGER

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TITRE I : L’ETAT DES PERSONNES


- La nationalité
- L’état civil
- Le statut des étrangers en France
- Le statut des mineurs et des majeurs
incapables

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Sous cette rubrique, seront étudiés tout d’abord la nationalité dont on sait, après le bref rappel
qui a été fait des principes généraux de droit international privé qu’elle détermine souvent la
loi applicable à la situation juridique en cause, puis l’état civil en droit international privé qui
abordera la question de l’efficacité des actes de l’état civil en droit international, mais aussi le
statut des étrangers, les conditions de leur admission en France, leur activité, les droits qui
leurs sont reconnus et enfin le statut et la représentation des majeurs et des mineurs en droit
international, qui intéresse directement le notaire appelé à recevoir un acte dans lequel un
incapable est intéressé ou à régler une succession dans laquelle il est partie prenante.

SECTION I – LA NATIONALITE

La nationalité se définit comme l’appartenance juridique et politique d’une personne à la


population constitutive d’un Etat. Le droit de chaque Etat de déterminer quels sont ses
nationaux est un principe incontesté. 11.

A l’intérieur d’un même état, il y a deux catégories de personnes, les nationaux et ceux qui ne
le sont pas : les étrangers.

La détermination de la nationalité d’une personne s’avère le plus souvent indispensable en


droit international privé car un certain nombre de problèmes juridiques relèvent de la loi
nationale. Ainsi en est-il de la capacité des personnes (régimes de protection des incapables,
majeurs ou mineurs), des contrats entre époux (ventes, donations, sociétés entre époux) qui peuvent
être soumis à la loi nationale des époux lorsqu’ils sont de même nationalité.

D’autre part, les étrangers en France ont un statut différent de celui des nationaux : leur
entrée, leur séjour et leur activité sont réglementés. Des cartes sont exigées pour l’exercice de
certaines activités (cartes de résident…).

Un même individu peut avoir plusieurs nationalités. Si la multi-nationalité est exceptionnelle,


la double nationalité est fréquente ; elle se définit comme l’appartenance simultanée à la
nationalité de deux pays. Mais la France ne retient pas la double nationalité lorsque l’une des
nationalités est la nationalité française : elle tient le double national français et étranger pour
français ce qui permettra par exemple de soumettre les questions relatives à l’état et à la
capacité des personnes à la loi française.

Si l’intéressé possède plusieurs nationalités, on tiendra compte de la nationalité la plus


effective si aucune n’est française.

11
P. LAGARDE, La nationalité française, p. 1, D. 85

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Le droit français de la nationalité relève des articles 17 à 33-2 du Code civil.

Une personne peut se voir reconnaître la nationalité d’un pays soit par la loi du sang, c’est à
dire par filiation (jus sanguinis) soit par sa naissance sur le territoire du pays (jus soli).

La France a toujours combiné les deux éléments privilégiant selon les époques l’un ou l’autre
des modes d’accès à la nationalité.

C’est ce que nous allons observer en examinant successivement l’attribution de la nationalité


française dès la naissance (§ 1), l’attribution de la nationalité française après la naissance (§ 2)
et la perte de la nationalité française (§ 3) 12 avant d’envisager la preuve de la nationalité (§ 4).

§ 1- L’ATTRIBUTION DE LA NATIONALITE FRANÇAISE DES LA NAISSANCE

L’attribution de la nationalité française dès la naissance résulte soit de la filiation, soit de la


naissance en France.

A- Attribution de la nationalité française en raison de la filiation

Aux termes de l’article 18 du Code civil « est français l’enfant légitime ou naturel, dont l’un
des parents au moins est français ». Cette condition est suffisante. Il importe peu que l’autre
parent de l’enfant soit de nationalité étrangère.

« Toutefois, si un seul des parents est français, l’enfant qui n’est pas né en France a la faculté
de répudier la qualité de français dans les six mois précédant sa majorité et dans les 12 mois
la suivant » (article 18-1 du Code civil).

Tandis que l’enfant né en France ne pourra pas renoncer à sa nationalité française à sa


majorité, l’enfant né à l’étranger pourra répudier sa nationalité dans les conditions fixées à
l’article 18-1 du Code civil.

L’enfant étranger ayant fait l’objet d’une adoption plénière en France ou à l’étranger pourra se
prévaloir des dispositions prévues aux articles 18 et 18-1 du Code civil, l’adoption plénière
ayant pour effet de le faire entrer dans la famille de l’adoptant.

En revanche, l’adoption simple n’exerce aucun effet sur la nationalité (article 21 du Code civil).
Toutefois, l’enfant qui a fait l’objet d’une adoption simple par une personne de nationalité
française peut, jusqu’à sa majorité, déclarer qu’il réclame la qualité de français, si à l’époque
de sa déclaration il réside en France (article 21-12 du Code civil).
12
Aménagement des conditions d’octroi de la nationalité française, Décret du 14 janvier 2005, D. 27 janvier
2005, p. 238 et 239

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B- Attribution de la nationalité française en raison de la naissance en France

La naissance en France n’est jamais suffisante pour conférer la nationalité française. Elle doit
s’accompagner d’autres circonstances.

1- Enfant né en France de parents inconnus

L’enfant né en France de parents inconnus sera français dès sa naissance (article 19 du Code
civil), il sera toutefois réputé n’avoir jamais été français si sa filiation est établie à l’égard d’un
étranger durant sa minorité. Il en sera de même de l’enfant né en France de parents apatrides.

2- Naissance en France de l’enfant et de l’un de ses auteurs

Est français l’enfant légitime ou naturel né en France lorsque l’un de ses parents au moins y
est lui même né (article 19-3 du Code civil).

Par l’expression « en France », on entend, aux termes de l’article 17-4 du Code civil : « le
territoire métropolitain, les départements et les territoires d’Outre-mer et les collectivités
territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon ».

L’enfant a la faculté de répudier la nationalité française si un seul de ses parents est né en


France, l’autre étant né à l’étranger. Cette faculté doit s’exercer dans les six mois précédant sa
majorité ou dans les 12 mois la suivant (article 19-4 du Code civil). Cependant, cette faculté se
perd si l’un des parents acquiert la nationalité française durant la minorité de l’enfant.

L’article 19-3 du Code civil s’applique aux enfants nés en France avant le 1er janvier 1994
« d’un parent né sur le territoire qui avait au moment de la naissance de ce parent, le statut
de colonie ou de territoire d’outre-mer de la République française ».

Les enfants algériens sont traités de façon différente : les enfants algériens nés en France d’un
parent né avant l’indépendance de l’Algérie soit avant le 3 juillet 1962 conservent le droit à
l’attribution de la nationalité française à leur naissance (article 25 de la loi du 16 mars 1998).

3- L’acquisition automatique de la nationalité à raison de la naissance et de la


résidence en France

En vertu de l’article 21-7 du Code civil les jeunes étrangers nés en France de parents étrangers
n’acquièrent automatiquement la nationalité à leur majorité que s’ils ont leur résidence en

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France à cette date et s’ils y ont eu leur résidence habituelle « pendant une période continue
ou discontinue d’au moins 5 ans depuis l’âge de 11 ans ».

L’enfant a la possibilité d’échapper à la qualité de français en effectuant une déclaration dans


les 6 mois qui précèdent sa majorité ou les 12 mois que la suivent. Il doit en outre avoir la
nationalité d’un Etat étranger.

L’article 21-11 du Code civil permet au mineur né en France de prendre la nationalité


française par une procédure de déclaration dès l’âge de 16 ans.

Enfin, la loi du 16 mars 1998 a crée un nouveau document « le titre d’identité républicain »
destiné à être délivré à tout mineur né en France qui pourra à sa majorité devenir français.

§ 2 – ATTRIBUTION DE LA NATIONALITE FRANÇAISE APRES LA NAISSANCE

Il existe divers modes d’acquisition de la nationalité française. L’acquisition peut être


automatique, résulter d’une déclaration ou d’une décision de l’autorité publique.

A- Acquisition automatique

Elle peut résulter de la filiation ou du mariage.

1- Acquisition par filiation

La légitimation d’un enfant par un père français lui confère la nationalité française.

L’adoption plénière : l’enfant qui fait l’objet d’une adoption plénière par un français acquiert
la nationalité française (article 20 alinéa 2 du Code civil).

2- Acquisition par mariage (article 21-1 et suivants du Code civil)

Si le mariage n’exerce de plein droit aucun effet sur la nationalité, il permet d’acquérir la
nationalité française par déclaration sous certaines conditions.

a) Les conditions de l’acquisition

- Le mariage doit être valide et non dissous.

18
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

- Le conjoint étranger doit justifier d’une connaissance suffisante de la langue française.

- La communauté de vie ne doit pas avoir cessé entre les époux et le conjoint français doit
avoir conservé sa nationalité.

- La déclaration qui doit être faite devant le juge d’instance en vue d’acquérir la nationalité
française peut être effectuée deux ans après le mariage (article 21-2 du Code civil), si le
déclarant peut justifier d’une résidence ininterrompue en France pendant au moins un an à
compter du mariage et trois ans après le mariage s’il ne justifie pas d’une telle résidence.

La dérogation à la condition de délai en cas de naissance d’un enfant commun avant ou après
le mariage a été supprimée.

b) Les empêchements à l’acquisition de la nationalité française

Au nombre de trois, ils sont énoncés à l’article 21-27 du Code civil :

 Condamnation par un tribunal français pour crimes ou délits constituant une atteinte aux
intérêts fondamentaux de la nation ou actes de terrorisme.

 Condamnation par un tribunal français à une peine égale ou supérieure à 6 mois


d’emprisonnement ferme quelque soit l’infraction considérée.

 Avoir fait l’objet d’un arrêté d’expulsion.

→ L’opposition du Gouvernement (article 21-4 du Code civil)

Le Gouvernement peut s’opposer par décret en Conseil d’Etat, pour indignité ou défaut
d’assimilation, à l’acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger dans un délai
d’un an à compter de la date du récépissé visé à l’article 26 du Code civil, remis à l’intéressé
lorsque l’ensemble des pièces ont été déposées auprès du juge d’instance chargé de suivre la
procédure.

N.B. : En cas d’acquisition de la nationalité française par mariage la dissolution du mariage


n’a aucun effet sur la nationalité des époux.

La nullité du mariage ne rend caduque l’acquisition de la nationalité française que si celui-ci a


été contracté de mauvaise foi (article 21-5 du Code civil).

19
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

B- Acquisition par déclaration (article 21-12 du Code civil)

Peuvent réclamer la nationalité française :

- les enfants qui ont fait l’objet d’une adoption simple ;

- les enfants recueillis soit par un français, soit par le service de l’aide sociale à
l’enfance, soit recueillis ou élevés dans des conditions qui leur ont permis de recevoir
une formation française.

C- Acquisition par décision de l’autorité publique

Celle-ci peut résulter d’une naturalisation ou d’une réintégration sollicitée par le ressortissant
étranger ou du fait pour un étranger de servir dans l’armée française.

1- La naturalisation (article 21-15 du Code civil)

a) Les conditions de la naturalisation

La naturalisation est une concession de la nationalité française par l’Etat français à l’étranger
qui la demande.

La législation a plusieurs fois varié en cette matière tant les intérêts en présence sont difficiles
à concilier : assimiler les nombreux étrangers en France et éviter une entrée massive de ceux-
ci.

L’octroi de la nationalité française relève du pouvoir discrétionnaire de l’Etat. Il est soumis à


des conditions strictes.

- Âge : seules les personnes âgées de plus de 18 ans peuvent être naturalisées (article 21-22 du
Code civil).

- Capacité : le mineur de moins de 16 ans doit être représenté par celui ou ceux qui exercent
l’autorité parentale à son égard. En revanche, il pourra déposer sa demande de
naturalisation dès qu’il aura atteint l’âge de 16 ans (article 17-3 du Code civil).

- Résidence : « nul ne peut être naturalisé, s’il n’a en France sa résidence au moment de la
signature du décret de naturalisation » (article 21-16 du Code civil). De plus, l’étranger doit
satisfaire a une condition de stage fixée à 5 ans de résidence en France.

20
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

- De nombreuses dispenses de stages sont prévues (article 21-19 du Code civil) en raison de
l’existence de lien de parenté, de liens particuliers avec la France, de services importants
rendus à notre pays (pour les étrangers francophones article 21-20 du Code civil). (La condition
de stage est remplie si l’intéressé réside en France depuis plus de cinq ans au moment du dépôt de
sa demande et lors de la signature du décret de naturalisation – article 25-17 du Code civil).

- Moralité et assimilation : le postulant aux termes de l’article 21-23 du Code civil doit
remplir des conditions de bonne vie et mœurs et ne pas avoir fait l’objet de condamnations
en France prévues à l’article 21-27 du Code civil ; aux termes de l’article 21-24, il doit
justifier de son assimilation à la communauté française notamment par une connaissance
suffisante, selon sa condition, de la langue française.

b) La procédure

Le dossier est déposé auprès du Préfet du département de la résidence de l’intéressé. Si le


postulant est à l’étranger auprès du consul de France. Le dossier diligenté par la Préfecture est
transmis au ministre chargé de la naturalisation (article 47 du Décret du 30 décembre 1993).

Aux termes de l’article 21-25-1 « la réponse de l’autorité publique à une demande


d’acquisition de la nationalité française par naturalisation doit intervenir 18 mois au plus
tard après la date à laquelle a été délivré au demandeur le récépissé constatant la remise de
toutes pièces nécessaires à la constitution d’un dossier complet ».

Le décret de naturalisation est pris par le Premier Ministre sur le rapport et avec le contreseing
du Ministre chargé des naturalisations et publié au Journal Officiel.

2- La réintégration (article 24 du Code civil)

La réintégration a pour objet de permettre à une personne qui a perdu sa nationalité française
de la recouvrer. Elle n’a aucun effet rétroactif.

La réintégration peut être obtenu à tout âge et sans condition de stage.

Elle résulte d’une décision discrétionnaire du Gouvernement. Elle obéit aux règles de la
naturalisation (cf supra).

Les personnes qui ont perdu leur nationalité française à la suite d’un mariage avec un étranger
ou de l’acquisition par mesure individuelle d’une nationalité étrangère peuvent à la condition
de ne pas avoir été condamné pour un crime ou un délit ou un acte de terrorisme… être
réintégrées dans la nationalité française par déclaration (article 24-2 du Code civil). Mais celles-

21
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

ci « doivent avoir conservé ou acquis avec la France des liens manifestes notamment d’ordre
culturel, professionnel, économique ou familial » (article 24-2 alinéa 2).

3- Acquisition de la nationalité française par les militaires étrangers engagés dans les
armées françaises

L’article 21-14-1 accorde la nationalité française aux étrangers engagés dans les armées
françaises et blessés en mission et à leurs enfants mineurs en cas de décès. Mais ceux-ci
doivent remplir les conditions de résidence prévues à l’article 22-1 du Code civil.

§ 3- LA PERTE DE LA NATIONALITE FRANÇAISE

La perte de la nationalité française, rare en pratique, ne résulte pas nécessairement de la


naturalisation à l’étranger. Elle peut prendre trois formes :

A- La perte changement (articles 23 et 23-4 du Code civil)

1- Acquisition volontaire d’une nationalité étrangère

La personne de nationalité française, majeure, résidant habituellement à l’étranger et qui a pris


volontairement une nationalité étrangère perd la nationalité française si elle en fait
expressément la déclaration dans les formes prévues aux articles 26 et s. du Code civil (article
23 du Code civil).

Perd également la nationalité française « le français même mineur qui ayant une nationalité
étrangère est autorisé à sa demande par le Gouvernement français à perdre sa qualité de
français » (article 23-4 du Code civil).

2- Perte à la suite d’une répudiation de la nationalité française (article 23-3 du Code


civil)

Le français qui déclare exercer la faculté de répudiation qui lui est offerte par les articles 18-1
et 22-3 du Code civil perd la nationalité française (article 23-3 du Code civil). Est visé l’enfant
français qui a la possibilité de renoncer à la nationalité française dans les 6 mois précédant sa
majorité et les 12 mois qui la suivent.

La nationalité française peut également être perdue par un français à l’occasion de son
mariage avec un étranger à la condition d’avoir acquis la nationalité étrangère de son conjoint
et que la résidence habituelle du ménage ait été fixée à l’étranger (article 23-5).

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CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

B- La perte abdication

1- Établissement prolongé à l’étranger (article 23-6 du Code civil)

« La perte de la nationalité française peut être constatée par jugement lorsque l’intéressé,
français d’origine par filiation, n’en a point la possession d’état et n’a jamais eu sa résidence
habituelle en France, si les ascendants, dont il tenait la nationalité française, n’ont eux-
mêmes ni possession d’état de français, ni résidence en France depuis un demi-siècle ».

Le Tribunal de Grande Instance détermine la date à laquelle la nationalité française est


perdue. L’intéressé doit être français d’origine par filiation, ne pas avoir conservé la
possession d’état de français, résider à l’étranger et ses ascendants doivent eux-mêmes ne pas
avoir eu ni la possession d’état de français, ni de résidence en France depuis un demi siècle.

2- Refus d’abandonner un emploi à l’étranger

Le français qui refuse de se soumettre dans le délai qui lui est imparti à l’injonction du
Gouvernement qui lui est fait de résilier l’emploi qu’il occupe à l’étranger dans une armée, ou
un service public étranger, ou dans une organisation internationale dont la France ne fait pas
partie, perd sa qualité de français par décret (article 23-8 du Code civil).

C- Perte déchéance (article 25 du Code civil)

Le français qui a acquis la nationalité française après sa naissance et qui a commis des faits
répréhensibles dans les 10 ans de l’acquisition de la nationalité française peut être déchu de la
nationalité française par décret pris après avis du Conseil d’Etat, sauf si la déchéance a pour
résultat d’en faire un apatride, « s’il est condamné pour acte qualifié de crime ou de délit
constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou pour un crime ou un délit
constituant un acte de terrorisme » (article 25-10) ou pour différents autres crimes et délits
visés au chapitre II du titre III du livre IV du Code pénal et s’il s’est livré au profit d’un Etat
étranger à des actes incompatibles avec la qualité de français et préjudiciables aux intérêts de
la France.

§ 4- LA PREUVE DE LA NATIONALITE

La charge de la preuve de la nationalité française incombe à celui qui la revendique (article 30


alinéa 1er du Code civil).

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CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

La preuve de la nationalité résulte d’un certificat de nationalité délivré par le greffier en chef
du tribunal d’instance du domicile du requérant s’il réside en France ou de son lieu de
naissance s’il réside à l’étranger mais est né en France 13.

Un passeport, une carte d’identité délivrés par les autorités françaises, voire une attestation
établie par l’une d’elles (consuls, préfets, maires…) ne constitue pas une preuve de la nationalité
française.

SECTION II – L’ETAT CIVIL EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE

L’état civil d’une personne dépend d’un certain nombre d’évènements familiaux (mariage,
naissance, reconnaissance, décès) qui peuvent se produire en France ou à l’étranger et qui
peuvent aussi bien concerner des français que des étrangers.

Ces faits sont constatés dans des actes de l’état civil que les intéressés sont appelés à produire
en France ou à l’étranger.

La question se pose de leur efficacité en France, qu’ils concernent des français ou des
étrangers lorsqu’ils ont été dressés en pays étranger.

Les agents diplomatiques ou consulaires français à l’étranger sont également aptes à recevoir
des actes de l’état civil pour les ressortissants français.

Après avoir examiné l’efficacité en France des actes dressés à l’étranger concernant aussi bien
des français que des étrangers, nous nous interrogerons sur la réception des actes de l’état
civil concernant les étrangers en France et sur l’état civil des réfugiés et des apatrides.

§ 1- L’EFFICACITE EN FRANCE DES ACTES DE L’ETAT CIVIL REÇUS A L’ETRANGER

Les actes de l’état civil reçus à l’étranger concernant des français et des étrangers ne sont
efficaces en France que s’ils ont été reçus par les autorités locales compétentes ou par les
agents diplomatiques ou consulaires.

13
Cf Dictionnaire Permanent Droit des étrangers, v° Nationalité

24
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

A- Les autorités locales compétentes pour dresser un acte de l’état civil

La loi étrangère détermine les autorités compétentes pour dresser des actes de l’état civil.
Ainsi sont valables en France, les actes de naissance, de mariage, de décès, dressés par les
autorités religieuses compétentes en vertu de la loi locale.

L’acte doit revêtir les formes usitées dans le pays. Il doit répondre aux conditions de
présentation matérielle de rédaction des actes prévues par la loi locale.

Il appartient à celui qui se prévaut d’un acte de l’état civil de rapporter la preuve que celui-ci
répond aux exigences de fond et de forme de la loi du pays de réception de l’acte.

Les actes de l’état civil reçus à l’étranger doivent être légalisés (cette exigence n’est toutefois pas
une condition de leur validité au fond – cf infra) mais ils ne doivent pas être revêtus de
l’exequatur.

Les actes de l’état civil des français à l’étranger, reçus par les autorités locales, sont transcrits
sur les registres tenus par les agents diplomatiques ou consulaires français, soit d’office, soit à
la demande des intéressés (article 7 du décret du 3 août 1962) qui peuvent s’adresser directement
au Consul de France dans le ressort duquel l’acte a été reçu ou au Ministère des affaires
étrangères Service central de l’état civil à Nantes. Cette transcription peut avoir lieu plusieurs
années après la survenance de l’évènement d’état civil.

Exemple : Des époux qui se sont mariés à Las Vegas peuvent, de nombreuses années
après leur mariage, demander la transcription de celui-ci sur les registres du consulat de
France au Nevada. Le défaut de transcription est en France sans incidence sur la validité
et l’opposabilité de leur union.

Le législateur, à l’occasion de la loi du 26 novembre 2003 relative à l’émigration, a modifié


l’article 47 du Code civil en le complétant ainsi : tout acte de l’état civil des français et des
étrangers fait en pays étranger fera foi s’il a été rédigé dans les formes usitées dans le pays
« sauf si d’autres actes ou pièces détenues, des données extérieures ou des éléments tirés de
l’acte lui-même établissent que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont
déclarés ne correspondent pas à la réalité ».

Conformément à l’article 46 du Code civil, « lorsqu’à l’étranger il n’aura pas existé de


registre ou qu’ils seront perdus, la preuve en sera reçue tant par titre que par témoins ; dans
ce cas, les mariages, naissances et décès pourront être prouvés tant par les registres et
papiers émanés des pères et mères décédés que par témoins ».

Ce texte permet de rapporter la preuve de tout fait d’état civil survenu à l’étranger par tous
moyens, notoriété, témoignage, présomption, etc.

25
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

B- Les agents diplomatiques et consulaires

« Tout acte de l’état civil des français en pays étranger sera valable s’il a été reçu
conformément aux lois françaises par les agents diplomatiques ou par les consuls » (article 48
alinéa 1er du Code civil).

Les fonctions comme les pouvoirs de ce dernier sont mentionnés dans l’Instruction générale
sur l’état civil consulaire du Ministère des affaires étrangères.

§ 2- LES ACTES DE L’ETAT CIVIL DES ETRANGERS EN FRANCE

Les officiers de l’état civil français sont-ils compétents pour constater des évènements d’état
civil survenus en France concernant des étrangers, ou ceux-ci doivent-ils recourir aux agents
diplomatiques ou consulaires de leur pays d’origine ?

A- L’intervention des officiers d’état civil français

Les officiers d’état civil français peuvent être appelés à recevoir des actes de l’état civil
concernant des étrangers en France, comme les autorités locales étrangères peuvent recevoir
des actes de l’état civil concernant des français à l’étranger.

Mais encore faut-il qu’il s’agisse d’actes de l’état civil au sens français du terme, c’est à dire
des actes se rapportant à la naissance, à la reconnaissance d’enfants, au mariage et au décès 14.

L’intervention de l’officier de l’état civil est obligatoire lorsqu’il s’agira de constater des
évènements survenus sur le territoire français (il en est ainsi des actes de naissance et de décès en
vertu de l’article 3 du Code civil). Elle est facultative et concurrente pour les actes de
reconnaissance d’enfant naturel par un étranger ou pour célébrer l’union de deux
ressortissants étrangers en France. Ceux-ci peuvent en effet s’adresser aux agents
diplomatiques et consulaires de leur pays d’origine.

B- Les agents diplomatiques ou consulaires étrangers en France

Les agents diplomatiques ou consulaires étrangers en France peuvent agir en qualité


d’officiers d’état civil si l’exercice de cette fonction leur a été reconnu par leur pays (dans la
limite de l’ordre public français, répudiation, polygamie).

14
Juris-Classeur Législation comparée, v° Acte de l’état civil, Fasc. 544, n° 9

26
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Ils doivent exercer leurs fonctions dans les limites fixées par leur loi nationale, mais ils
doivent encore être compétents au regard de la loi française et celle-ci n’accorde la qualité
d’officier d’état civil qu’aux seuls agents diplomatiques et consulaires accrédités.

Enfin, les autorités consulaires ne sont compétentes que dans la limite de leur
circonscription 15.

§ 3- L’ETAT CIVIL DES REFUGIES ET DES APATRIDES

Le phénomène des réfugiés politiques dans les relations internationales datant du début du
XXème siècle est imputable à la montée des régimes totalitaires (communisme, fascisme,
dictatures en tout genre).

Il faudra attendre le milieu du XXème siècle pour que leur protection soit assurée et qu’un
véritable statut leur soit reconnu par la convention de Genève du 28 juillet 1951.

Le réfugié se définit comme toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du
fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité ou de ses opinions politiques se trouve hors
du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut, ou du fait de cette crainte, ne veut se
réclamer de la protection de ce pays ».

Le terme « apatride » désigne une personne qu’aucun Etat ne considère comme son
ressortissant par application de sa législation (Convention New York 28 septembre 1954).

A- Le statut de réfugié

Le statut de réfugié est régi par la loi du pays de son domicile ou à défaut de domicile par la
loi du pays de sa résidence (convention article 12-1). Toutefois, « les droits précédemment
acquis par le réfugié et découlant du statut personnel, seront respectés par tout Etat
contractant ».

La reconnaissance de la qualité de réfugié et celle de leur statut relèvent de l’Office Français


des Réfugiés et Apatrides (OFPRA) (article 2 de la loi du 25 juillet 1952 créant l’office) , dont les
pouvoirs ont été renforcés par la loi du 10 décembre 2003 relative au droit d’asile (201 rue
Carnot, 94136 Fontenay sous Bois Cedex).

15
Juris-Classeur précité n° 52

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B- La délivrance de certificats et pièces d’état civil aux réfugiés et apatrides

L’OFPRA est habilitée a délivrer aux réfugiés et apatrides les pièces qui leur sont nécessaires
pour leur permettre d’accomplir les divers actes de la vie civile ou de demander l’application
de la loi interne ou d’accords internationaux concernant leur protection, notamment des pièces
tenant lieu d’actes de l’état civil.

En effet, ces personnes qui ont fuit leur pays d’origine sont dépourvues d’actes d’état civil,
soit parce qu’aucun acte de l’état civil n’a été dressé, soit parce qu’ils sont dans
l’impossibilité de réclamer une expédition de tels actes aux services de l’état civil du pays
dont ils sont originaires.

Le Directeur de l’Office est appelé à :

- certifier la situation de famille et l’état civil des intéressés tels qu’ils résultent d’actes
passés ou de faits ayant eu lieu dans leur pays d’origine ;

- attester la régularité, la valeur et la conformité aux anciennes lois du pays d’origine des
actes passés dans ce pays.

- établir lors de la délivrance de certificat de réfugié ou d’apatride un livret de famille. Ce


livret comporte, selon le cas, les extraits de certificat tenant lieu d’acte de mariage des
époux et d’acte de naissance des enfants issus du mariage ou les extraits de certificat tenant
lieu d’acte de naissance des parents et de leurs enfants naturels.

Seul l’OFPRA est en mesure d’établir des documents d’état civil aux réfugiés pour des
évènements d’état civil antérieurs à leur arrivée en France. Les autorités judiciaires françaises
et les officiers d’état civil français sont incompétents pour établir de tels actes 16.

Les actes et documents délivrés par le Directeur de l’OFPRA ont la valeur d’actes
authentiques.

En revanche, c’est aux officiers de l’état civil français qu’il appartient d’établir pour des
réfugiés des actes de l’état civil constatant un évènement survenu en France.

16
Dictionnaire Permanent Droit des étrangers, v° Etat civil, n° 95

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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

SECTION III – LE STATUT DES ETRANGERS EN FRANCE

Sous ce titre nous examinerons les conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France et
les conditions dans lesquelles ils peuvent exercer une activité en France.

§ 1- L’ADMISSION DES ETRANGERS EN FRANCE

A- L’entrée et le séjour des étrangers en France sont réglementés

1- L’entrée

Pour entrer en France « tout étranger doit être muni des documents et visas exigés par les
conventions internationales et les règlements en vigueur » (art. L 211-1 du Code de l’Entrée et
du Séjour des Étrangers et du droit d’Asile (CESEA)).

La présentation d’un document d’identité (passeport, carte nationale d’identité) et d’un visa
est exigée de tous les étrangers, quel que soit leur pays d’origine, et d’un visa.

Cependant, certains étrangers en raison de leur nationalité sont dispensés de présenter un


passeport et un visa pour entrer en France. Une simple carte d’identité ou un document
équivalent est suffisant (en Grande Bretagne la carte d’identité est inconnue). Il en est ainsi de tous
les ressortissants de l’Union européenne et de l’Espace Économique Européen.

Outre ces documents, l’article L 211-1-2° du CESEA exige la production de documents


relatifs à l’objet et aux conditions de leur séjour, à leur moyen d’existence et aux garanties de
leur rapatriement ainsi qu’à l’exercice d’une activité professionnelle. De nombreuses
dispositions dérogatoires sont prévues notamment pour les ressortissants de l’Union
européenne et de l’Espace Économique Européen, mais aussi pour les Suisses, les
monégasques les andorrans…

2- Le séjour

L’article L 311-2 du CESEA institue deux cartes de séjour : la carte de séjour temporaire et la
carte de résident.

a) La carte de séjour temporaire (articles L 313-1 et s. du CESEA)

L’étranger qui entre sur le territoire français ne peut y séjourner que pendant la durée de
validité de son visa et s’il est dispensé de visa au plus pendant trois mois. Passé ce délai, s’il

29
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

est âgé de plus de 18 ans, il doit être muni d’une carte de séjour, sauf dispense ou régime
dérogatoire.

Sur la carte de séjour temporaire peut figurer différentes mentions, en fonction de la situation
de l’intéressé et du motif de son séjour en France : visiteur, étudiant, salarié, commerçant,
artisan, exploitant agricole « scientifique », profession artistique et culturelle, vie privée et
familiale.

La carte de séjour temporaire ne permet pas à l’étranger d’exercer une activité


professionnelle, celle-ci est subordonnée à une autorisation qui résultera de l’apposition sur la
carte de séjour de la mention « activité salariée » ou « profession artistique et culturelle »…

Cette carte de séjour temporaire délivrée par la Préfecture est accordée pour une durée qui, en
général, ne peut être supérieure à une année, ni excéder la validité des documents ou visas
obtenus pour entrer en France. En toute hypothèse, lorsqu’elle est accordée aux étrangers pour
exercer une activité professionnelle soumise à autorisation, elle ne peut excéder la durée de
cette autorisation ; de même lorsqu’elle est accordée à des étrangers admis en France pour y
faire des études, suivre un enseignement, ou gérer un stage, elle ne peut excéder la durée de
ces études, du stage, ou de cet enseignement (article 11 de l’ordonnance du 2 novembre 1945).

Dans de nombreux cas visés à l’article 313-11 du CESEA, la carte de séjour temporaire
(portant la mention vie privé et familiale), est accordée de plein droit.

A l’expiration de la durée de validité de la carte de séjour temporaire l’étranger doit obtenir le


renouvellement de sa carte ou la délivrance d’une carte de résident s’il ne veut pas être obligé
de quitter le territoire national (article L 313-1 du CESEA).

b) La carte de résident

Aux termes de l’article 314-8 du CESEA, les étrangers peuvent dans certaines conditions (il
suffira pour son obtention que l’une des conditions soit remplie), telles que résider de façon
ininterrompue depuis au moins 5 ans en France, disposer de moyen d’existence ou exercer
une activité professionnelle, obtenir une carte dite carte de résident.

L’attribution de la première carte de résident « est subordonnée à l’intégration républicaine


de l’étranger dans la société française appréciée au regard de sa connaissance suffisante de
la langue française et des principes qui régissent la République française » (article L 314-2 du
CESEA).

Comme en matière de carte de séjour temporaire, il est prévu, dans un certain nombre de cas,
une délivrance de plein droit de la carte de résident (article L 314-11 du CESEA).

30
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Mais la délivrance de plein droit de la carte de résident peut être refusée si la présence de
l’intéressé constitue une menace pour l’ordre public (article L 314-3 du CESEA).

En cas de regroupement familial, la carte de résident n’est plus attribuée de plein droit au
conjoint et aux enfants mineurs de l’étranger, auquel est remis seulement une carte de séjour
temporaire. L’étranger, époux d’un ressortissant français, doit avoir résidé régulièrement en
France pendant au moins deux ans, et non plus un an, pour recevoir la carte de résident (article
L 314-9 du CESEA).

La carte de résident est délivrée par la Préfecture. Elle est valable dix ans et renouvelable de
plein droit (article L 314-1 du CESEA), sauf si son titulaire vit en état de polygamie (article L
314-4 du CESEA).

A la différence de la carte de séjour temporaire (sauf si elle porte la mention de « salarié » ou


« vie privée et familiale » ou « scientifique »), la carte de résident permet à l’étranger d’exercer
une activité professionnelle de son choix (article L 314-4 du CESEA).

Elle dispense de l’autorisation préfectorale prévue à l’article L 122-1 du Code de commerce et


vaut autorisation de travail.

L’entrée et le séjour irréguliers en France des étrangers font l’objet de sanctions


administratives (reconduite à la frontière) ou de sanctions pénales.

B- L’entrée et le séjour des ressortissants des Etats membres de l’Union


Européenne et de l’Espace Économique Européen (EEE) et la Suisse 17

1- L’entrée

Les ressortissants d’un Etat membre de l’Union européenne et de l’EEE et la Suisse peuvent
entrer librement dans un autre Etat de l’Union européenne sur la présentation d’un passeport
ou d’une carte d’identité. Aucun visa n’est nécessaire, seule la présentation d’un document de
voyage est exigée uniquement pour attester l’identité et la nationalité de l’intéressé. (Ne font
pas partie de l’Union européenne Monaco, Saint-Marin, Le Vatican, Andorre, le Groenland, les îles
anglo-normandes, l’île de Man).

Les membres de la famille des ressortissants communautaires bénéficient du droit d’entrer sur
le territoire d’un autre Etat dans les mêmes conditions que le titulaire d’origine.

Il en est de même des membres de la famille d’un ressortissant d’un Etat membre de l’Espace
Économique Européen.

17
Dictionnaire Permanent Droit des étrangers, v° Libre circulation des personnes en Europe

31
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

2- Le séjour

La loi du 26 novembre 2003 sur la maîtrise de l’immigration dispose que les ressortissants des
États membres de l’Union européenne, les ressortissants de la Confédération Helvétique qui
souhaitent établir en France leur résidence habituelle, ne sont pas tenus de détenir un titre de
séjour.

S’ils en font la demande, il leur sera délivré un titre de séjour sous réserve d’absence de
menace pour l’ordre public.

La dispense de titre de séjour n’est pas applicable immédiatement aux ressortissants des dix
nouveaux Etats entrant dans l’Union qui doivent pendant la période transitoire détenir une
carte de séjour d’une durée de validité de dix ans contenant la mention « toutes activités
professionnelles » pour exercer une activité économique salariée 18.

§ 2- L’ACTIVITE DES ETRANGERS EN FRANCE

A- Les étrangers exerçant une activité salariée

Sauf s’il en est dispensé en raison de sa nationalité, tout étranger voulant exercer une activité
salariée en France doit être titulaire d’un titre de travail.

Un étranger ne peut exercer à temps partiel ou à temps plein une activité professionnelle
salariée en France sans être titulaire d’une autorisation de travail en cours de validité (article L
341-4 et R 341-1 du Code du travail).

Pour les étrangers autres que les algériens, le titre les autorisant à travailler est soit une carte
de séjour temporaire, soit une carte de résident.

1- Carte de séjour temporaire

La carte de séjour temporaire portant la mention « salarié » ou la mention « vie privée et


familiale » autorise son titulaire à exercer une activité professionnelle. Il en est de même de la
carte de séjour portant la mention « scientifique » qui permet à l’étranger de faire des
recherches ou d’enseigner à l’université (cf supra p. 26).

La durée de validité de la carte de séjour temporaire ne peut dépasser un an. Elle ne saurait
aussi excéder la durée de validité des documents ou visas obtenus par l’intéressé pour rentrer
en France. Elle ne peut dépasser non plus la durée de l’autorisation de travail.

18
D. 2005-1332 du 24 octobre 2005

32
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

2- Carte de résident

La carte de résident confère à son titulaire le droit d’exercer sur l’ensemble du territoire
français de la France métropolitaine toute activité professionnelle salariée de son choix (article
341-4 alinéa 4 du Code du travail).

La carte de résident est valable dix ans.

Cette carte est renouvelable de plein droit sauf si l’étranger vit en état de polygamie.

B- Les étrangers exerçant une activité non salariée

1- Professions commerciales, industrielles et artisanales

a) Le principe

L’exercice en nom personnel par un étranger, personne physique, d’une activité industrielle,
commerciale et artisanale sur le territoire français est subordonné à l’obtention d’une
autorisation préfectorale 19 (article L 122-1 nouveau du Code de commerce). Il en est de même
pour les agents commerciaux qui sont liés par contrats et agissent comme mandataires de
sociétés ou de commerçants personnes physiques.

Doivent également être titulaires d’une autorisation préfectorale :

- les gérants de SARL ou d’EURL ;

- les associés tenus indéfiniment et solidairement de dettes sociales, associés en nom


collectif, commandités dans les sociétés en commandite simple et dans les sociétés en
commandite par actions, ainsi que les associés et les tiers de nationalité étrangère
ayant le pouvoir de diriger, gérer ou le pouvoir général d’engager à titre habituel la
personne morale (article 3 du décret du 28 janvier 1998).

- les présidents de directoire ou de Conseil d’administration d’une société anonyme et


les directeurs généraux ayant le pouvoir d’engager la société vis-à-vis des tiers.

- l’administrateur d’une société qui a le pouvoir d’engager le groupement vis-à-vis des


tiers ;

19
Ordonnance du 25 mars 2004 alinéa 1er, JO du 27 mars

33
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

- toute personne physique soumise aux dispositions de l’article 1er du décret ayant le
pouvoir d’engager une personne morale de droit étranger au titre d’un établissement,
d’une successorale ou d’une représentation commerciale implantée en France (article 4
du décret du 28 janvier 1998).

La délivrance de cette autorisation préfectorale est elle-même subordonnée à la production


d’un titre de séjour l’autorisant à séjourner en France ;

L’étranger qui sollicite une telle autorisation devra donc en même temps solliciter un titre de
séjour.

S’il entend séjourner en France en qualité de commerçant, il devra en faire la demande s’il
réside à l’étranger, dans son pays d’origine ou dans un Etat tiers, auprès du consulat de
France.

Si l’étranger réside déjà régulièrement en France avec un titre de séjour temporaire ne


l’autorisant pas à exercer une activité commerciale, en tant que visiteur salarié, il devra faire
une demande de changement de statut auprès de la Préfecture de son lieu de résidence pour
obtenir l’autorisation préfectorale prévue à l’article L 122-1 du Code de commerce.

Pour obtenir cette autorisation, l’étranger devra fournir divers documents (bancaires, fiscaux…)
et satisfaire à toutes les conditions légales pour exercer une activité commerciale.

Les services préfectoraux instruisent la demande.

b) Les exceptions

Sont dispensés de cette autorisation préfectorale :

- les ressortissants communautaires d’un Etat partie à l’accord sur l’Espace Économique
Européen ou d’un Etat membre de l’OCDE (Allemagne, Australie, Autriche, Belgique,
Canada, Union européenne, Corée, Danemark, Espagne, USA, Finlande, France, Grèce,
Hongrie, Irlande, Islande, Italie, Japon, Luxembourg, Mexique, Norvège, Nouvelle Zélande,
Pays-Bas, Pologne, Portugal, Royaume-Uni, République Slovaque, République Tchèque,
Suisse, Suède, Turquie) ;

- les titulaires de la carte de résident ;

- les étrangers pouvant se prévaloir d’une convention internationale qui les en dispense
(les ressortissants de l’Andorre, de Monaco ou d’Algérie).

34
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Enfin, les ressortissants des pays ayant conclu avec la France une convention d’établissement
peuvent bénéficier de cette autorisation lorsqu’ils demandent à s’établir en France (Suisse,
Etats-Unis, Pays ayant appartenu à l’Union française).

2- Professions agricoles

L’étranger qui exploite un fond rural doit être en possession d’une carte d’exploitant agricole
ou d’un avis favorable délivré par le Directeur Départemental de l’Agriculture qui en tient
lieu (article R 333-1 et s. du Code rural).

Les ressortissants de l’Union européenne sont assimilés à des exploitants français. La Cour de
cassation a rappelé en effet que depuis le 1er janvier 1970, l’article 52 du Traité de Rome
interdit toute restriction à la liberté d’établissement. Ainsi, l’obligation d’obtenir une
autorisation administrative pour exploiter n’est elle plus exigée pour les ressortissants de
l’Union européenne 20.

C- Les droits reconnus aux étrangers en France

L’article 11 du Code civil dispose que « l’étranger jouira en France des mêmes droits civils
que ceux accordés aux français par traités de la nation à laquelle cet étranger
appartiendra ».

Une interprétation très large étant faite de ce texte par la Cour de cassation, les étrangers sont
pratiquement assimilés à des nationaux et disposent de droits identiques. Seul un texte peut
refuser à un étranger la jouissance d’un droit.

Ces droits étant multiples et très divers, nous passerons en revue les principaux droits
patrimoniaux des étrangers en France et les droits professionnels qui leurs sont reconnus qui
suscitent des interrogations dans la pratique notariale.

1- Les droits patrimoniaux des étrangers en France

a) Le droit d’acquérir

Le droit d’acquérir en France est aujourd’hui largement ouvert aux étrangers : en matière
immobilière, il n’y a pratiquement plus de restriction, surtout depuis l’assouplissement voire
la suppression de la réglementation des changes (cf infra).

20
Cass. Civ. 15 décembre 1975, D. 77, p. 33

35
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Toutefois, certains biens immobiliers comme les anciens ouvrages et postes militaires ne
peuvent être acquis par les étrangers. En matière mobilière en revanche, les restrictions tenant
à la nature des biens acquis : bateaux, aéronefs, etc., sont plus nombreuses.

Le droit d’acquérir des immeubles à usage d’habitation en France, ne confère pas aux
étrangers le droit de résider en France et réciproquement, il n’est pas nécessaire pour un
étranger de disposer d’un titre de séjour pour acquérir un immeuble en France.

Mais le notaire qui n’a pas à exiger un titre de séjour doit conserver la preuve écrite de ce
qu’il a satisfait à son devoir de conseil en informant l’acquéreur que son acquisition n’est pas
créative d’un droit de séjour et qu’il sera soumis aux règles régissant l’entrée et le séjour des
étrangers en France.

L’acquéreur étranger d’un immeuble situé en France jouira de tous les droits réels attachés à
la propriété (prescription acquisitive, servitudes, accession, publicité…).

→ Une modalité particulière d’acquisition : le pacte tontinier

Les étrangers qui sont ressortissants de pays ignorant la réserve héréditaire souhaitent recourir
à ce mode d’acquisition, connu du droit français et de certains pays étrangers (USA et Grande
Bretagne) et ignoré par d’autres (Allemagne…). Une telle acquisition est-elle possible ?

La vente d’immeuble relève en droit international privé de la convention de Rome (cf infra) et
celle-ci dispose que lorsque le contrat a pour objet un droit réel immobilier, à défaut de
stipulation contraire des parties, il est présumé être soumis à la loi du pays de situation de
l’immeuble (article 4 § 3).

L’achat d’un immeuble en France relève ainsi de la loi française. Celle-ci admettant la validité
du pacte tontinier, qui n’est qu’un mode particulier d’acquisition, des étrangers peuvent se
porter acquéreurs d’un immeuble situé en France en stipulant une clause d’accroissement.

Mais les conditions exigées en France pour la validité d’un pacte tontinier doivent être
remplies (le pacte tontinier est un contrat aléatoire à titre onéreux qui suppose que chaque
coacquéreur court des risques de gain et de perte « qualitativement et quantitativement égales ») 21.

b) Le droit de prendre à bail

Les restrictions à la possibilité pour les étrangers de prendre à bail sont de plus en plus
limitées qu’il s’agisse de baux à usage d’habitation, à usage commercial, ou de baux ruraux.

21
Cf Brochure Cridon n° 57, « Pratique de la tontine »

36
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

→ Baux d’habitation : la loi du 6 juillet 1989 relative aux baux à usage d’habitation et à
usage professionnel et d’habitation ne comporte aucune disposition concernant les étrangers.
Ils peuvent donc s’en prévaloir comme tout ressortissant français.

La loi du 1er septembre 1948 bénéficie à tous les locataires ou occupants sans distinction de
nationalité. En revanche, la nationalité n’est pas sans incidence sur le droit de reprise. En
effet, celui prévu aux articles 18, 19 et 20 de la loi n’est ouvert qu’aux propriétaires de
nationalité française et aux ressortissants d’un Etat membre de l’Union européenne ainsi qu’à
certains ressortissants étrangers pouvant se prévaloir d’une réciprocité législative et
diplomatique.

→ Baux commerciaux : si les étrangers peuvent librement conclurent un bail commercial,


les dispositions relatives à son renouvellement ne peuvent en principe être invoquées par des
ressortissants de nationalité étrangère. Cette règle comporte néanmoins des dérogations. En
effet bénéficient de la propriété commerciale :

 les étrangers qui peuvent invoquer la réciprocité législative ;


 les étrangers pouvant se prévaloir d’une convention diplomatique intervenue entre leur
pays et la France ;
 les étrangers ayant combattu pendant les guerres de 1914 et 1939 sous les armées
française ou alliées ;
 les étrangers ayant des enfants de nationalité française ;
 les ressortissants des Etats membres de l’Union européenne.

Quand au droit de reprise pour habiter (article 14 du Décret du 30 septembre 1953), il n’est ouvert
au propriétaire étranger que s’il remplit les mêmes conditions que le locataire qui veut
bénéficier du droit au renouvellement. Par conséquent, il n’en bénéficiera que s’il entre dans
l’une des dérogations énoncées plus haut.

Nombreuses étant les conventions diplomatiques, l’octroi de la propriété commerciale est


ouvert à de nombreux étrangers. Elle est refusée aux turcs. Mais rien ne saurait interdire aux
parties intéressées d’étendre conventionnellement le statut de la propriété commerciale.

→ Baux ruraux : l’étranger qui désire exploiter une entreprise agricole doit y être autorisé
(article R 333-1 du Code rural). Cette règle s’applique aussi aux groupements lorsque la majorité
des associés est de nationalité étrangère et aux sociétés lorsque la majorité du capital
appartient directement ou indirectement à des étrangers (article R 333-5 du Code rural).
L’autorisation d’exploiter et la carte professionnelle sont délivrées par la Préfecture. Les
ressortissants de l’Union européenne sont dispensés de cette autorisation.

37
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

→ Statut du fermage et du métayage : le preneur de nationalité étrangère est exclu du


bénéfice du statut du fermage.

La règle à ses exceptions au profit :

- des exploitants étrangers ressortissants d’un Etat membre de l’Union européenne ;

- des preneurs étrangers dont les enfants sont de nationalité française.

- des exploitants étrangers ressortissants de pays liés à la France par une convention
diplomatique (Suisse, Union européenne, Roumanie et certains Pays d’Afrique noire).

2- Les droits professionnels des étrangers en France

A l’instar d’autres Etats, la France limite l’accès de certaines professions à des étrangers. Les
motifs qui conduisent un Etat à restreindre l’accès des étrangers à certaines professions sont
de nature très diverses :

- Politiques : la sécurité publique, la défense nationale sont mieux assurées par des nationaux
(fabrication d’armes, activités minières particulières, nucléaires).

- Économiques : protection de l’économie nationale. Les gouvernements redoutent que des


secteurs importants de l’économie nationale tombent dans des mains étrangères (banque,
assurance, transports, activités liées à la Bourse…).

- Professionnels : protection des français de la concurrence étrangère (agents commerciaux,


pharmaciens…).

- Moralité publique : casino, cinéma, imprimerie, presse, débit de boissons.

Ces limitations à l’accès de certaines professions à des ressortissants étrangers tendent à se


réduire sous l’influence du droit communautaire et des conventions diplomatiques 22 avec des
pays non communautaires.

Dans la pratique notariale, quelques professions seulement suscitent pour l’heure des
interrogations.

22
Cf Juris-Classeur DIP, Fasc. 525-20, Étrangers Fasc. 18, n° 53

38
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

→ Les débits de boissons 23

L’article L 3332-3 du Code de la Santé publique interdit aux étrangers d’ouvrir un débit de
boissons à consommer sur place, 1ère, 2ème, 3ème et 4ème catégorie. Il faut être français ou
ressortissant d’un Etat de l’Union européenne ou d’un Etat partie à l’accord sur l’Espace
Économique Européen (Islande, Norvège, Liechtenstein). Les personnes d’une autre nationalité
ne peuvent en aucun cas exercer la profession de débitant de boissons, et notamment les
ressortissants turcs.

La règle ici encore a ses exceptions : les étrangers ressortissants d’un pays ayant signé un
traité avec la France prévoyant l’assimilation aux nationaux, pourront néanmoins exploiter un
débit de boissons : Algérie, Andorre, Monaco, Saint Marin, Confédération helvétique, USA,
Bulgarie, Roumanie, Congo Brazzaville, Mali, Sénégal, Togo, Centrafrique.

Les étrangers peuvent néanmoins acquérir un débit de boissons à consommer sur place ou un
établissement pourvu d’une licence de restaurant.

Seule est interdite en effet l’exploitation de droit ou de fait du débit de boissons. Dès lors un
étranger peut acquérir un débit de boissons à consommer sur place s’il confie la gestion à une
personne de nationalité française, ou à un étranger bénéficiaire de l’assimilation au national,
ou à un ressortissant de l’Union européenne ou de l’Espace Economique Européen.

→ Coiffeur

La loi du 23 mai 1946 modifiée par la loi du 5 juillet 1996 exige que l’exploitant d’un salon
de coiffure soit titulaire d’un diplôme (brevet professionnel) qu’il soit français ou étranger. Les
ressortissants communautaires ayant exercé la profession pendant deux ans au moins dans un
Etat de l’Union européenne, autre que la France, sont dispensés de l’obtention d’un diplôme
français. Les diplômes obtenus dans les Etats qui ne font pas partie de l’Union européenne ni
partie à l’accord sur l’Espace Économique Européen peuvent faire l’objet d’une attestation
d’équivalence 24.

Un italien qui aura exercé l’activité de coiffeur en Italie pendant plus de deux ans, pourra
ouvrir un salon de coiffure en France puisqu’il n’aura pas besoin de diplôme français et qu’il
aura exercé auparavant en Italie. Aucune autorisation préfectorale n’est requise s’agissant
d’un ressortissant de l’Union européenne titulaire d’une carte de résident.

23
RM 22 février 2005, JOAN 26 juillet 2005, p. 7446, n° 58206
24
Juris-Classeur DIP, Fasc. 525-20, Fasc. 18, n° 102

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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

→ Agent immobilier

Aucun texte ne subordonne l’exercice de la profession d’agent immobilier à la nationalité


française. Mais la loi du 2 janvier 1970 dite loi HOGUET, subordonne l’exercice de la
profession à la délivrance d’une carte professionnelle qui n’est remise qu’au titulaire d’un
diplôme acquis ou d’équivalences.

Le décret du 9 février 1993 est venu préciser dans quelles conditions des ressortissants
communautaires peuvent prendre la qualité d’agent immobilier en France.

Ceux-ci en effet peuvent en l’absence de diplôme français obtenir la carte professionnelle s’ils
ont suivi avec succès un cycle d’études d’une durée minimale de trois ans ou d’une durée
équivalente à temps partiel dans une université ou dans un établissement supérieur ou dans un
autre établissement de même formation d’un Etat membre ainsi que, le cas échéant, la
formation professionnelle requise en plus de ce cycle d’études et qui justifient de certains
diplômes, certificats, ou autres titres permettant l’exercice de l’activité d’administrateur de
biens ou agent immobilier dans un Etat membre ou qui justifient d’une expérience
professionnelle pendant deux ans au moins au cours des dix années précédentes, acquise dans
un Etat membre qui ne réglemente pas la profession. Peuvent encore bénéficier de la carte
professionnelle les titulaires de diplômes délivrés par un Etat membre sanctionnant des études
juridiques, commerciales, économiques d’une durée minimale de deux ans ou d’un
baccalauréat délivré par un Etat membre à la condition d’avoir travaillé pendant au minimum
une année chez un professionnel titulaire de la carte.

Une connaissance suffisante de la langue française est requise du demandeur.

Les agents immobiliers ressortissants de l’Union européenne doivent d’autre part satisfaire à
toutes les autres exigences de la loi du 2 janvier 1970 (loi HOGUET).

→ Marchands de biens

L’activité de marchand de biens n’est soumise à aucune réglementation particulière. Son


exercice est ouvert en France à toute personne physique ou morale quelle que soit sa
nationalité.

Comme tout marchand de biens l’étranger sera tenu de satisfaire aux obligations inhérentes à
la profession définies par la loi française (obligations fiscales et comptables… immatriculation au
registre du commerce).

S’il s’établit en France, il devra posséder une carte de résident, une carte de séjour de l’Union
européenne s’il est ressortissant de celle-ci, ou avoir été autorisé par le Préfet à exercer cette

40
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

profession, autorisation qui est venue remplacer la carte de commerçant (ordonnance du 25


mars 2004).

Si l’activité est exercée sous forme sociale, ces cartes et autorisations devront être possédées
par les associés tenus indéfiniment et solidairement aux dettes sociales, les gérant d’une
société à responsabilité limitée, le Président du Directoire, le Président directeur général d’une
société anonyme ou l’administrateur d’un Groupement d’intérêt économique.

→ Pharmaciens

Pour exercer la profession de pharmacien, il faut :

- être titulaire du diplôme français d’Etat de docteur en pharmacie ou de pharmacien.

- être de nationalité française, citoyen andorran, ressortissant de l’un des Etats membres de
l’Union européenne ou ressortissant d’un pays dans lequel les français peuvent exercer la
pharmacie lorsqu’ils sont titulaires du diplôme qui en ouvre l’exercice aux nationaux de ce
pays.

Le titulaire d’un diplôme, certificat ou autre titre de pharmacie délivré par l’un des Etats
membres de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace Économique Européen,
peut exercer la pharmacie en France si ces diplômes et certificats figurent sur des listes
établies par arrêté conjoint du Ministre de la santé et du Ministre chargé des universités ou
s’ils sanctionnent une formation répondant à certaines exigences.

Le Ministre de la santé, après avis du Conseil Supérieur de la pharmacie, peut autoriser un


pharmacien ressortissant d’un autre pays non membres de l’Union européenne ou de l’Espace
Economique Européen, titulaire du diplôme français d’Etat de docteur en pharmacie ou de
pharmacien, à exercer la profession de pharmacien (article 4221-1 à 14 du Code de la santé
publique) 25.

SECTION IV – LE STATUT DES MINEURS ET LES MAJEURS INCAPABLES EN DROIT


INTERNATIONAL PRIVE

La capacité et la représentation des incapables relèvent traditionnellement en Droit


international privé du statut personnel et par conséquent de la loi nationale des intéressés.

25
Juris-Classeur Législation comparée, Fasc. 525-20, Fasc. 18, n° 107

41
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Le statut des majeurs protégés continuera d’être régi par la loi nationale aussi longtemps que
la convention de la Haye du 13 janvier 2000 sur la protection internationale des adultes ne
sera pas entrée en vigueur en France. Le statut des mineurs n’est plus, quant à lui,
qu’exceptionnellement soumis au droit commun relevant désormais en France de la
convention de la Haye du 5 octobre 1961 concernant « la compétence des autorités et la loi
applicable en matière de protection des mineurs » mais surtout du règlement (C.E.) dit
Bruxelles II bis entré en vigueur le 1er mars 2005.

§ 1- LA REPRESENTATION ET LA CAPACITE DES MAJEURS EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE

A- En droit commun

En Droit international privé français, le régime de protection des incapables majeurs relève en
vertu de l’article 3 alinéa 3 du Code civil de la loi personnelle de l’incapable. C’est la loi
personnelle du majeur, c'est-à-dire sa loi nationale, qui va déterminer son régime de
protection. Si le majeur est de nationalité française par exemple, il sera placé sous le régime
de la tutelle ou de la curatelle

La loi nationale du majeur est compétente pour assurer la protection de sa personne et de ses
biens. Ainsi un sujet belge pourvu d’un conseil judiciaire ne pourra aliéner l’immeuble lui
appartenant situé en France qu’avec l’accord de celui-ci. Réciproquement, l’immeuble situé
en Belgique appartenant à un majeur français en curatelle ne pourra être aliéné qu’avec
l’accord de son curateur.

Selon les règles de rattachement habituel, la procédure de la mise sous tutelle ou sous
curatelle relève de la loi du tribunal saisi (lex fori). Si un majeur domicilié hors de France fait
l’objet d’une mesure de protection conformément à la loi étrangère de sa résidence, ces
mesures seront reconnues en France sans exequatur.

En droit commun la juridiction compétente pour prendre les mesures de protection qui
s’imposent est celle du domicile de l’incapable. La première chambre de la Cour de cassation,
dans un arrêt de principe en date du 9 décembre 2003 26, devait cependant rappeler qu’en
vertu des articles 14 et 15 du Code civil « dans la mesure où son bénéficiaire n’y a pas
renoncé et ou elle n’est pas écartée par un traité international, le juge des tutelles français est
compétent même si l’incapable de nationalité française est domicilié à l’étranger ».

Ainsi, le juge des tutelles français est compétent pour mettre sous curatelle un français majeur
domicilié en Suisse. Il est également compétent pour ouvrir le régime de protection d’un
étranger domicilié en France. Mais il aura la possibilité de faire application de la loi étrangère.

26
JCP N 2004, p. 676, note D. BOULANGER

42
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

L’urgence, comme le principe de proximité, conduisaient souvent à faire application de la loi


du tribunal saisi.

Une des difficultés rencontrées dans la pratique notariale à l’occasion d’une acquisition par
exemple ou de tout autre contrat, est celle de savoir si le cocontractant est frappé ou non
d’incapacité.

Si certains pays à l’instar de la France ont organisé une publicité des incapacités (Allemagne,
Autriche, Belgique, Italie…) d’autres comme la Grèce, la Grande Bretagne et la Suisse n’ont
rien prévu.

Il sera donc souvent difficile au notaire de savoir si un majeur a ou non la capacité juridique
de contracter et quelle est l’étendue de son incapacité.

B- La convention de la Haye du 13 janvier 2000 sur la protection


internationale des adultes (non ratifiée par la France) 27

1- Le champ d’application de la convention

Les personnes auxquelles s’applique la convention lorsqu’elle sera entrée en vigueur sont
celles qui en raison d’une altération ou d’une insuffisance de leurs facultés personnelles ne
sont pas en état de pourvoir à leurs intérêts (article 1er de la convention).

Les autorités compétentes pour prendre des mesures de protection concernant les majeurs
protégés sont les autorités administratives ou judiciaires de l’Etat de la résidence habituelle
(article 5 § 1 de la convention).

Les mesures de protection qui peuvent être prises sont énumérées par l’article 3 de la
convention : sauvegarde de justice, curatelle, tutelle et autres institutions analogues.

Mais la compétence principale des autorités de l’Etat de la résidence habituelle de l’adulte


n’est pas exclusive.

Les autorités de l’Etat dont l’adulte possède la nationalité, ou les autorités de l’Etat du lieu de
la situation de ses biens, peuvent être compétentes.

La compétence des autorités nationales de l’adulte est cependant subsidiaire : les autorités
nationales doivent informer les autorités de la résidence habituelle des mesures prises ; par
ailleurs, les mesures prises cessent dès lors que les autorités de la résidence habituelle auront
statué sur la protection de l’adulte (article 7 de la convention).

27
Rev. crit. DIP 2000, p. 159 et s. par P. LAGARDE

43
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

L’article 13 de la convention précise que « les autorités qui prennent une mesure de
protection appliquent leur propre loi. Toutefois, dans la mesure où la protection de la
personne ou des biens de l’adulte le requiert, elles peuvent exceptionnellement appliquer ou
prendre en considération la loi d’un autre Etat avec lequel la situation présente un lien
étroit ».

2- Le mandat d’inaptitude

Aux termes de l’article 15 de la convention précitée, non encore en vigueur, le mandat


d’inaptitude concerne « les pouvoirs de représentation conférés par un adulte, soit par un
accord, soit par un acte unilatéral pour être exercé lorsque cet adulte sera hors d’état de
pourvoir à ses intérêts ».

Aux termes du même article « le mandat est régi par la loi de l’Etat de la résidence habituelle
de l’adulte au moment de l’accord ou de l’acte unilatéral ».

Il en résulte que le mandat conféré même en France par un français ayant sa résidence
habituelle à New York sera valable et le restera, même si ce français s’établit ultérieurement
en France. En revanche, le mandat conféré par un américain résidant à Paris est nul et le
demeure même si cet américain venait à résider à New York 28.

Mais dans l’hypothèse où la loi de la résidence habituelle ne connaîtrait pas l’institution,


l’adulte pourra choisir la loi de l’Etat dont il a la nationalité, la loi de l’Etat d’une résidence
habituelle précédente et celle de l’Etat dans lequel sont situés ses biens, mais seulement en ce
qui concernera ces biens.

La loi ainsi désignée s’appliquera « à l’existence, l’étendue, la modification et l’extinction des


pouvoirs de représentation conférés par un adulte » (article 15 § 1).

Si la loi de la résidence ou la loi choisie par l’adulte ne connaît pas le mandat d’inaptitude,
comme notre législation aujourd’hui encore, les pouvoirs conférés par l’adulte seront
inexistants. Des mesures de protection devront être prises 29.

§ 2- LA CAPACITE ET LA REPRESENTATION DES MINEURS

Les règles relatives à la capacité et la représentation des mineurs ont été profondément
modifiées par la convention de la Haye du 5 octobre 1961 concernant la compétence des

28
Cf P. LAGARDE « La convention de la Haye du 13 janvier 2000 sur la protection internationale des adultes »,
Rev. crit. DIP 2000, p. 159, spec. p. 176 et s.
29
Cf P. LAGARDE précité, p. 176 et s.

44
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autorités et la loi applicable en matière de protection des mineurs (modifiée par la convention de
la Haye du 19 octobre 1996 – non encore entrée en vigueur) puis par le règlement (CE) du 27
novembre 2003 entré en vigueur le 1er mars 2005 dit « Bruxelles II bis ».

Lorsque la loi nationale du mineur déterminait systématiquement son régime de protection,


une question préalable se posait souvent, celle de savoir quelle nationalité il convenait de
reconnaître à l’enfant lorsque ses parents étaient de nationalité différente.

En pareille hypothèse, comme dans toutes les situations juridiques dans lesquelles se trouve
une personne ayant à la fois la nationalité française et étrangère, on ne doit retenir que la
nationalité française du sujet.

Ainsi, lorsqu’un juge des tutelles se trouve en présence d’un mineur ayant la double
nationalité française et étrangère, il doit obligatoirement le considérer comme français et faire
appliquer la loi française sur la protection du mineur et leur représentation.

Exemple : Un mineur franco-américain qui réside de manière habituelle à New York


avec sa mère depuis le décès de son père de nationalité française, est appelé à la
succession de sa grand-mère paternelle qui s’est ouverte en France.

La mère entend accepter purement et simplement la succession pour le compte de son


fils mineur.

Le mineur est français comme né d’un parent français (article 18 du Code Civil). La loi
française lui est applicable. Il se trouve placé sous le régime de l’administration légale
sous contrôle judiciaire de sa mère. Le juge des tutelles français du lieu d’ouverture de
la succession devra donner son autorisation pour accepter purement et simplement la
succession.

A- La capacité et la représentation des mineurs en droit commun

Tout ce qui a trait à la capacité des mineurs et à leur représentation relève du statut personnel.
La loi nationale de l’enfant est seule compétente pour assurer la protection de sa personne et
de ses biens.

La loi nationale de l’enfant déterminera par conséquent son régime de protection


(administration légale, tutelle…) mais également les formalités habilitantes pour accomplir des
actes déterminés concernant le patrimoine du mineur30.

30
Cf A. RAISON « Le statut des mineurs et des majeurs protégés », n° 780

45
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B- La capacité et la représentation des mineurs depuis l’entrée en vigueur de


la convention de la Haye du 5 octobre 1961 et du règlement (CE) du 27
novembre 2003 dit Bruxelles II bis

1- La convention de la Haye du 5 octobre 1961

La convention de la Haye du 5 octobre 1961 sur la protection des mineurs est entrée en
vigueur en France le 10 novembre 1972. Elle est applicable en France sans réciprocité. Cette
convention a également été ratifiée par l’Allemagne, l’Autriche, l’Espagne, l’Italie, le
Luxembourg, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la Suisse et la Turquie. Son importance se
trouve restreinte depuis l’entrée en vigueur du règlement (CE) du 27 novembre 2003 dit
Bruxelles II bis qui l’a abrogée expressément dans les matières communes, à savoir la
compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière de responsabilité
parentale.

Cette convention concerne les mineurs (non émancipés) qui ont cette qualité tant au regard de
sa loi personnelle qu’au regard de la loi de sa résidence.

Toutes les mesures individuelles de protection de droit privé ou de droit public qui tendent à
la protection de sa personne ou de ses biens relèvent de la convention.

En France, elle est applicable à tous les mineurs résidant sur le territoire national quelle que
soit leur nationalité.

L’article 3 édicte qu’« un rapport d’autorité résultant de plein droit de la loi interne dont le
mineur est ressortissant est reconnu dans tous les Etats contractants ».

Ce texte, malgré une rédaction quelque peu ambiguë, donne compétence à la loi nationale du
mineur 31. Celle-ci est compétente chaque fois qu’elle connaîtra un régime qui assure la
protection du mineur sans qu’il soit nécessaire de recourir à l’office du juge (administration
légale, autorité parentale…).

Mais lorsque pour assurer la protection du mineur des mesures doivent être prises, le régime
de protection du mineur cesse de relever de sa loi nationale au profit de la loi de sa résidence.

Compétence est ainsi donnée aux autorités de la résidence habituelle du mineur pour prendre
les mesures prévues par sa loi nationale (autorisation du juge du lieu de résidence du mineur pour
l’autoriser à vendre un immeuble sous le régime de l’administration légale sous contrôle judiciaire ; en
matière de tutelle, les autorités de l’Etat contractant où réside le mineur seront compétentes pour
organiser la tutelle, réunir le conseil de famille…).

31
DROZ JDI 1973, 612, n° 14

46
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Toutefois, les autorités de l’Etat dont le mineur est ressortissant peuvent en cas d’urgence
prendre des mesures tendant à la protection de sa personne ou de ses biens.

2- La convention de la Haye du 10 octobre 1996 sur la protection des mineurs

Cette nouvelle convention, non encore entrée en vigueur, tend à pallier les difficultés
d’application de la convention du 5 octobre 1961 sur la compétence des autorités et la loi
applicable en matière de protection des mineurs.

Celles-ci tenant essentiellement au caractère artificiel de la distinction opérée entre « les


rapports d’autorité de plein droit » et « les mesures de protection », les premiers relevant de
la loi nationale du mineur les secondes de la loi de la résidence du mineur, la convention dans
son article 16 soumet les rapports d’autorité, désormais dénommés responsabilité parentale,
attribués de plein droit, à la loi de la résidence habituelle de l’enfant.

Par responsabilité parentale, il faut entendre « l’autorité parentale ou tout autre rapport
d’autorité analogue déterminant les droits, les pouvoirs et les obligations des parents d’un
tuteur ou autre représentant légal à l’égard de la personne ou des biens de l’enfant » (article
1er-2).

L’article 3 précise les matières sur lesquelles peuvent porter les mesures de protection :
l’attribution, l’exercice et le retrait total ou partiel de l’autorité parentale, le droit de garde, la
tutelle, la curatelle et les institutions analogues de placement de l’enfant.

Toutefois, la convention prévoit la compétence éventuelle d’autres autorités : autorité de


l’Etat dont l’enfant est ressortissant, ou de l’Etat du lieu de situation de ses biens ou de l’Etat
avec lequel l’enfant présente les liens les plus étroits. Mais ces autorités éventuelles
n’interviennent que sous le contrôle des autorités de l’Etat de la résidence du mineur
(article 9).

→ Plusieurs conventions bilatérales ont été signées concernant les mineurs :


convention franco-polonaise (5 avril 1967), convention franco-belge (8 juillet 1899), convention
franco-marocaine (10 août 1981), convention franco-portugaise (20 juillet 1983), convention
franco-algérienne (21 juin 1988), convention franco-tunisienne (18 mars 1982), …

→ Mais aussi des conventions multilatérales : convention de la Haye du 25 octobre


1980 sur les aspects civils de l’enlèvement des enfants ; conventions des nations unis du 26
janvier 1990 relatives au droit de l’enfant et enfin, de nombreuses conventions consulaires.

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C- La capacité et la représentation des mineurs depuis l’entrée en vigueur du


règlement (CE) du 27 novembre 2003 dit Bruxelles II bis

Le règlement (UE) n° 2201/2003 du 27 novembre 2003 constitue depuis le 1er mars 2005 le
droit commun de 24 des 25 Etats membres de l’Union européenne (à l’exception du Danemark),
pour les questions relatives à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en
matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale (expression qui s’est substituée à
celle de rapport d’autorité utilisée dans la convention de la Haye du 5 octobre 1961) , dès lors qu’un
élément d’extranéité apparaît dans le litige.

La responsabilité parentale désigne l’ensemble des droits et obligations conférés à une


personne physique ou morale à l’égard de la personne ou des biens de l’enfant (article 2 du
règlement). En France, elle trouvera donc à jouer en matière d’administration légale ou de
tutelle.

Le règlement pose le principe de la compétence des juridictions de l’Etat membre de la


résidence habituelle de l’enfant (Règlement, article 8).

Il y a existe des exceptions à cette règle.

Lorsque la résidence habituelle de l’enfant ne peut être déterminée, les juridictions de l’Etat
membre sur le territoire duquel l’enfant est présent sont compétentes sous certaines
conditions.

Lorsqu’il n’est pas possible de déterminer la compétence d’un tribunal, chaque Etat pourra
appliquer sa législation nationale et les ressortissants communautaires pourront invoquer en
France les privilèges de juridiction des articles 14 et 15 du Code civil.. Il sera encore possible
de renvoyer l’affaire devant une juridiction mieux placée dans des circonstances
exceptionnelles si cela est dans l’intérêt supérieur de l’enfant (article 15 du règlement) et si cette
juridiction ne s’y oppose pas (Règlement, article 15).

Le règlement remplace les conventions existantes conclues entre deux ou plusieurs Etats
membres portant sur la matière du règlement.

Depuis le 1er mars 2005, lorsqu’un mineur, quelle que soit sa nationalité, réside dans un Etat
de l’Union européenne, la juridiction du pays de résidence habituelle sera compétente pour
assurer la protection de sa personne et de ses biens.

Mais le règlement ne pose pas de règle de détermination de la loi applicable par le tribunal
compétent en vertu de celui-ci. C’est au juge du tribunal compétent qu’il appartiendra
d’appliquer la loi désignée par ses règles de conflit de lois.

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La juridiction saisie rend incompétent tout autre tribunal de l’Union européenne. Le jugement
rendu produit ses effets de plein droit sur tout le territoire de l’Union sans que la compétence
du juge saisi ou la loi appliquée (Règlement articles 24 et 26) puisse être ultérieurement
soulevées. Cette décision produit effet sans qu’il soit nécessaire de recourir à une procédure
(Règlement article 21) ni à la légalisation (Règlement article 52).

Aussi faudra-t-il se référer au droit international privé de chaque Etat membre et aux
conventions internationales en vigueur, la convention de la Haye du 5 octobre 1961 par
exemple si l’état concerné l’a ratifiée.

D- Exemples

Trois situations se rencontrent le plus souvent en pratique :

→ Le mineur français réside à l’étranger

 Mineur résidant hors communauté européenne

Exemple : Un enfant mineur ayant la double nationalité française et américaine est


appelé à la succession de son père de nationalité française qui s’est ouverte en France.
Depuis le décès de celui-ci, l’enfant est domicilié aux USA avec sa mère de nationalité
américaine. Un immeuble situé en France doit être vendu.

Lorsque, comme en l’espèce, le mineur est à la fois français et étranger, il faut


considérer que le mineur est français (cf supra).

Les USA n’ayant pas ratifié la convention de la Haye, le droit commun s’applique.

Or, en droit international privé français, la protection des mineurs relève de la loi
nationale de celui-ci. Dès lors, l’enfant mineur domicilié aux USA est placé sous le
régime français de l’administration légale sous contrôle judiciaire. Sa mère ayant la
qualité d’administratrice légale.

Pour parvenir au règlement de la succession et à la vente de l’immeuble, il convient de


rechercher quel est le juge des tutelles compétent pour donner les autorisations requises
sachant que le mineur réside à l’étranger. Il est admis en pareil cas que le représentant
du mineur peut s’adresser indifféremment au juge de sa résidence ou au juge français 32.

32
Cf A. RAISON précité

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Si la famille du mineur ou son représentant a conservé en France son domicile par


commodité, on pourra s’adresser au juge français.

Si le mineur n’a plus aucune attache en France, on fera application des articles 14 et 15
du Code Civil 33 qui sont des textes à caractère général applicable en matière gracieuse
comme en matière contentieuse.

Conformément à la jurisprudence rendue à leur sujet, il est possible de s’adresser au


juge que « des circonstances spéciales font apparaître comme particulièrement désigné
au regard d’une bonne administration de la justice » 34. On pourra ainsi s’adresser au
juge du domicile d’origine de la famille ou à celui dans la circonscription duquel se
trouvent les immeubles de la famille. Dans une circulaire du 1er juillet 1966 relative à la
tutelle, le Ministre de la justice a estimé qu’était particulièrement qualifié pour donner
les autorisations requises « le juge du lieu de situation des biens du mineur, celui de son
ancien domicile, celui du domicile de certains membres de sa famille ».

Dès lors, le juge des tutelles susceptible de donner à l’administratrice légale les pouvoirs
pour accepter purement et simplement la succession puis vendre l’immeuble est le juge
des tutelles du lieu d’ouverture de la succession si elle a eu lieu en France, ou du lieu de
situation des immeubles s’il en existe, voire de la dernière résidence en France du
mineur ou de parents proches.

 Mineur résidant dans l’Union européenne

Exemple : Un enfant mineur de nationalité française est propriétaire d’un immeuble en


France dont la vente est envisagée par ses parents de nationalité française. Ceux-ci
résident en Italie. Comment parvenir à cette vente ?

L’article 389-5 du Code civil français exige l’accord du juge des tutelles pour vendre
l’immeuble. L’enfant résidant en Italie, pays qui a ratifié la convention de la Haye,
l’autorité judiciaire italienne compétente donnera l’autorisation exigée de la loi
française, loi nationale de l’enfant.

→ Le mineur étranger réside en France

 Mineur ressortissant de l’Union européenne

33
BATIFFOL et LAGARDE T II, n° 680
34
Cass. 9 février 1960, DP 1960, I, 285 ; cf RAISON op. cit.

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Exemple : Un mineur belge qui vit en France avec sa mère depuis le décès de son père a
hérité d’un immeuble situé en France. Sa mère souhaite vendre cet immeuble. Comment
parvenir à la vente.

Le mineur résidant en France, seuls les tribunaux français sont compétents. Mais en
raison de la nationalité de l’enfant, ceux-ci devraient faire application de la loi belge. En
pareil cas, le mineur se trouve placé sous le régime de la tutelle exercée par sa mère.
Sous ce régime, celle-ci ne peut aliéner l’immeuble qu’avec l’autorisation du conseil de
famille. Mais la vente amiable de l'immeuble est possible avec l’autorisation du conseil
de famille et après homologation par le tribunal de première instance.

Le juge des tutelles français du lieu de résidence du mineur pourra autoriser la vente
amiable, le mineur étant domicilié en France, après autorisation du conseil de famille.

Exemple : Un mineur de nationalité allemande réside avec ses parents en France. Ces
derniers envisagent de vendre un immeuble appartenant à leur enfant mineur.

L’enfant résidant en France, seules les juridictions françaises sont compétentes.

Le mineur étant de nationalité allemande, la loi allemande régit le régime de protection


de ce mineur.

Aux termes de l'article 1643 du Code Civil allemand, les parents du mineur doivent être
autorisés par le tribunal des tutelles pour accomplir des actes juridiques intéressant le
mineur, dans les cas où le tuteur en aurait besoin, conformément aux dispositions des
articles 1821 et 1822, n° 1-3-5-8 à 11, soit a) pour disposer d’un immeuble ou d’un droit
immobilier, b) …, c) … 35.

Au cas exposé, l’enfant étant domicilié en France avec ses parents, la vente de
l'immeuble qui lui appartient pourra être autorisée par le juge français du domicile du
mineur.

Exemple : Un mineur anglais vit en France avec sa mère depuis le décès de son père, ses
parents étaient tous deux de nationalité britannique. Sa mère entend vendre l’immeuble
situé en France dont il a hérité seul de son père.

En vertu du règlement de Bruxelles II bis, le juge des tutelles français du lieu de


résidence habituelle du mineur est seul compétent.

35
Cf Juris-Classeur DIP, v° Législation comparée, Allemagne

51
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Mais le mineur réside en France, la convention de la Haye du 5 octobre 1961 sur la


protection des mineurs est donc applicable. Celle-ci donne compétence à la loi nationale
du mineur.

La vente est possible en vertu de l’article 8 du règlement (qui donne compétence aux
juridictions de la résidence du mineur) avec l’autorisation du juge français, le droit
anglais exigeant l’autorisation du tribunal pour vendre un immeuble appartenant à un
mineur.

 Mineur non ressortissant de l’Union européenne

Exemple : L’hypothèse est la même que pour les exemples précédents, mais l’enfant est
chilien comme ses deux parents et tous résident sur le territoire français.

Le tribunal français est compétent, l’article 8 du règlement Bruxelles II bis


reconnaissant une compétence de principe aux juridictions d’un Etat membre sur le
territoire duquel l’enfant a sa résidence habituelle quelle que soit sa nationalité. La
convention de la Haye du 5 octobre 1961 est applicable, l’enfant résidant en France.
Celle-ci donne compétence à la loi nationale de l’enfant, la loi chilienne. Une
autorisation de justice étant exigé au Chili pour aliéner l’immeuble d’un mineur, la mère
de l’enfant s’adressera au juge français de la résidence du mineur.

→ Mineur étranger à l’étranger

Exemple : Un mineur franco belge résidant habituellement en Belgique possède un


immeuble en France provenant de la succession de son père. Étant par hypothèse
domicilié en Belgique, la juridiction belge est compétente. L’immeuble ne pourra être
vendu que dans les conditions prévues par la loi belge pour l’aliénation des biens
appartenant à des mineurs. La convention franco-belge de 1989 est abrogée sur tous ces
points.

Exemple : Un mineur de nationalité italienne est propriétaire d’un immeuble en France


que ses parents, avec lesquels il vit à Rome, envisagent de vendre. Comment parvenir à
la vente ?

Le mineur étant de nationalité italienne et résidant en Italie, les tribunaux italiens sont
seuls compétents et feront application de la loi italienne. En vertu de l'article 320 alinéa
3 du Code Civil italien, les parents qui exercent l’autorité parentale ne peuvent aliéner

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les biens d’un mineur qu’avec l’autorisation du juge des tutelles, celle-ci est donnée
lorsque l’acte apparaît nécessaire ou d’une utilité évidente 36.

Munis de l’autorisation du juge des tutelles italien, juge du lieu de résidence du mineur,
les parents de l’enfant mineur pourront vendre l’immeuble qui lui appartient situé en
France.

Exemple : Un mineur de nationalité britannique domicilié en Angleterre possède en


France un immeuble hérité d’un de ses oncles. La vente de cet immeuble est envisagée
par ses parents qui résident avec lui.

Les tribunaux anglais seront compétents. Ils feront application de la loi du domicile du
mineur et par conséquent la loi anglaise qui gouverne les règles relatives à sa capacité et
à sa représentation.

Or le children act de 1989 ne donne pas aux parents de l’enfant mineur (ou à son tuteur)
le pouvoir de disposer de ses biens 37.

En pareil cas, il faut alors saisir la juridiction anglaise, seule compétente (Règlement
articles 8 et 66) puisque le mineur réside en Angleterre pour parvenir à la vente de
l’immeuble français (sauf à invoquer éventuellement l’article 15 du règlement – Renvoi à une
juridiction mieux placée pour connaître l’affaire).

La « Chancery division of the high court of justice » doit être saisie en arguant que la
vente est motivée par la nécessité de protéger les intérêts de l’enfant et de lui assurer des
ressources. Un avocat est nécessaire. La procédure est longue, coûteuse et aléatoire.

36
Cf Juris-Classeur Législation comparée, Italie, Fasc. 3, n° 45
37
Cf « Quelques aspects de la vente d’un bien immobilier en France par un mineur anglais », Def. 1995,
art. 36135 et « De quelques difficultés suscitées par la détention d’immeubles en France par des mineurs
anglais » Rep. Def. 2004, art. 38022 par M. REVILLARD et R-A.D. URQUHART

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TITRE II : DROIT DE LA FAMILLE,


DES SUCCESSIONS
ET DES LIBERALITES

- Mariage, divorce, union libre


- Les régimes matrimoniaux
- Les successions et les libéralités

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Ce titre qui recouvre une branche du droit particulièrement vaste traitera du mariage et
notamment de sa validité lorsqu’il est célébré à l’étranger, du divorce international dont les
dispositions n’ont pas été modifiées par la loi du 26 mai 2004, de l’union libre depuis l’entrée
en vigueur de la loi du 15 novembre 1999 sur le pacte civil de solidarité et de la filiation.

Un développement important sera consacré aux régimes matrimoniaux et aux successions.

En effet, la convention de la Haye du 14 mars 1978 en matière de régimes matrimoniaux a


bouleversé les règles antérieures de détermination du régime matrimonial de deux époux
mariés sans contrat après son entrée en vigueur et a grandement facilité les changements de
loi et de régime matrimonial puisque ceux-ci sont rendus possibles le plus souvent en dehors
de toute homologation judiciaire.

En revanche, les règles régissant les successions internationales n’ont pas été modifiées, la
convention de la Haye du 1er août 1989 sur la loi applicable aux successions n’étant toujours
pas entrée en vigueur ; il en est de même du droit des libéralités. Mais la fiscalité qui leur est
applicable a profondément évolué.

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CHAPITRE I – MARIAGE, DIVORCE, UNION LIBRE

Les mariages mixtes ou entre étrangers ou les mariages célébrés à l’étranger et dont il est fait
état en France, se sont multipliés avec le brassage des populations, la facilité des moyens de
communication, la mobilité professionnelle et le désir d’acquérir plus facilement la nationalité
française (c’est le phénomène des mariages blancs bien connus des pouvoirs publics). Il en est
résulté de nombreuses interrogations sur la validité de ces unions et sur les conditions de leur
formation.

Avec la multiplication de ces mariages, les divorces, comportant eux-mêmes des éléments
d’extranéité, sont devenus de plus en plus fréquents et il n’est pas rare de voir un notaire
français exécuter une convention de divorce établie à l’étranger.

Enfin, ne cessent de se développer en marge du mariage, des unions entre personnes de même
sexe ou de sexe différent auxquels certaines législations reconnaissent les effets du mariage. Il
n’est plus possible de les occulter surtout depuis l’entrée en vigueur en France de la loi du 15
novembre 1999 sur le pacte civil de solidarité.

Nous examinerons ainsi successivement les règles de conflit de lois en matière de mariage, de
divorce et d’union libre.

SECTION I – LE MARIAGE EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE 38

Après un examen des conditions de formation du mariage en Droit international privé, nous
étudierons ses effets sur la personne et sur les biens des époux.

§ 1- LA FORMATION DU MARIAGE EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE

La formation du mariage en Droit international privé obéit à des conditions de fond et de


forme.

A- Les conditions de fond

Une fois déterminée la loi applicable au mariage, il convient de s’interroger sur son champ
d’application

38
E.D. v° Mariage

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1- La détermination de la loi applicable

Une doctrine et une jurisprudence unanimes admettent la compétence de la loi nationale des
futurs époux pour régir les conditions de fond du mariage.

Lorsque les époux sont de nationalité différente, on fait une application distributive des lois
en présence. Chaque époux devra remplir les conditions exigées de sa loi personnelle sans
avoir à répondre des exigences de la législation nationale de l’autre.

Si l’un des époux est apatride, l’on fera application de la loi de son domicile. S’il possède
plusieurs nationalités, on retiendra sa nationalité effective ou la nationalité française si celle-ci
figure parmi les nationalités possédées par lui à l’exclusion de toute autre.

Lorsque l’intéressé possède la nationalité d’un pays dont la législation n’est pas unifiée (USA,
Canada, pays du Maghreb, du Moyen Orient, d’Afrique), on se réfère à la règle de conflit
interprovinciale, interfédérale, interconfessionnelle ou interethnique de l’Etat considéré dans
la mesure où elle existe 39.

2- Le domaine de la loi applicable

La loi nationale de chaque époux détermine les règles qui constituent les conditions de fond
du mariage : âge, consentement des époux, consentement des parents, empêchement résultant
de la parenté ou de l’alliance, nécessité de ne pas être dans les liens d’un précédent mariage,
délai de viduité 40.

Au nom de l’ordre public, dans certains cas qualifiés d’empêchements bilatéraux, l’on fera
une application non plus distributive des lois nationales des futurs époux mais cumulative.

L’exemple type d’empêchement bilatéral, en dehors des prohibitions tenant à la parenté ou à


l’alliance dont le caractère bilatéral est unanimement admis, est l’empêchement au mariage
tenant à l’existence d’une union antérieure non dissoute. Une française même célibataire ne
pourra épouser un étranger dont le mariage n’est pas dissous. La polygamie n’est pas admise
en France. De même, un étranger ressortissant d’un pays admettant la polygamie ne pourra
pas se marier en France alors que son mariage antérieur n’est pas dissous et le mariage d’une
française à l’étranger avec un ressortissant étranger engagé dans les liens du mariage sera
considéré comme nul en France.

39
E.D. DI, v° Mariage
40
E.D. DI, v° Mariage

60
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Mais après le vote de la loi sur le pacte civil de solidarité, un mariage entre personnes de
même sexe ressortissants d’un pays admettant une telle union doit être considéré comme
valable en France.

En revanche, n’est pas une condition de fond du mariage l’obligation de se marier en la forme
religieuse imposée dans certains pays. Depuis le célèbre arrêt CARASLANIS 41, le caractère
religieux du mariage est considéré en France comme une condition exclusivement de forme.
A ce titre, sera valide en France le mariage d’un ressortissant d’un pays exigeant la forme
religieuse du mariage, célébré devant l’officier de l’état civil français.

B- Les conditions de forme

En tant qu’acte juridique, le mariage est soumis à des conditions de forme et en vertu de la
règle locus regit actum celles-ci relèvent de la loi du lieu de sa célébration.

D’une façon générale, sont valables les mariages célébrés selon la forme locale ou devant les
agents diplomatiques ou consulaires.

1- Mariage des français à l’étranger 42

Les français ne sont pas tenus de se marier en France. Ils peuvent se marier à l’étranger, soit
dans les formes locales, soit devant les agents diplomatiques ou consulaires.

a) Mariage selon la forme locale étrangère

L’article 170 du Code civil édicte que « le mariage contracté en pays étranger entre français
et français et étrangers sera valable s’il a été célébré dans les formes usitées dans le
pays… ».

C’est ainsi qu’ont été reconnus valables les mariages célébrés à l’étranger uniquement selon la
forme religieuse (Italie, Espagne), encore faut-il que les formes suivies soient bien celles de la
loi locale. Aussi a été annulé un mariage célébré en Mongolie par un prêtre catholique belge,
entre une américaine et un explorateur français, les coutumes mongoles ignorant le mariage
religieux 43.

Mais si la loi locale subordonne les effets civils d’un mariage religieux à une formalité
complémentaire comme la transcription sur les registres de l’état civil en présence d’un

41
Civ. 22 juin 1955, D. 56, 73, obs. CHAVRIS
42
La régularité du mariage célébré à Las Végas, JCP N 2004, n° 259, p. 1893, par D. BOULANGER
43
CA Paris 14 avril 1926, DP 1927-2-9, note ESCARRA

61
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fonctionnaire, celle-ci doit être respectée 44 sous peine d’application des sanctions prévues par
la loi interne étrangère.

Les mariages célébrés à l’étranger selon la forme locale étrangère ne sont toutefois valables
en France que si les conditions de fond de la loi française sont remplies (cf supra) et si le
mariage a été précédé d’une publication en France.

L’article 170 du Code civil impose en effet aux français se mariant à l’étranger une formalité
préalable à la célébration, la publicité du projet de mariage que prévoit l’article 63 du Code
civil.

Toutefois, l’inobservation des formalités de publication prescrites par l’article 170 du Code
civil n’entraîne la nullité du mariage que « si les parties ont voulu faire fraude à la loi
française et éluder la publicité prescrite par elle 45.

C’est ainsi qu’ont été annulés des mariages célébrés à l’étranger et non précédés de publicité
en France (il s’agissait de jeunes gens ayant franchi la frontière dans la seule intention d’éluder les
oppositions de leurs parents 46).

En revanche, lorsque l’omission n’a aucun caractère intentionnel et n’a généré aucune
clandestinité, la nullité a été écartée 47.

En sus de cette publication préalable, il est fait obligation aux français se mariant à l’étranger
d’être présents au mariage (article 146-1 du Code civil). Le mariage par procuration est ainsi
interdit à un français. Cette disposition a pour but de lutter contre les fraudes et les
simulations. Cette interdiction est sanctionnée par la nullité du mariage.

Exemple : Mariage de deux français à l’étranger : deux français se sont mariés à Berlin
dans les formes locales sans faire précéder leur mariage d’une publication en France.
Quelle est la validité de leur mariage.

Ce mariage célébré en Allemagne dans les formes locales est valable en France (cf
supra). L’inobservation des formalités préalables de publicité n’entraînera la nullité du
mariage que si leur son respect n’était inspiré que par le désir de frauder à la loi
française.

La transcription de ce mariage sera effectuée sur les registres du consulat de France à


Berlin à la demande des intéressés, voir du Procureur de la République. L’absence de

44
Cass. req. 31 janvier 1927, D.P. 1927, 1, 559
45
Cass. Civ. 13 février 1961, 349, note HOLLEAUX
46
H. BATIFFOL et LAGARDE n° 421
47
Cass. Civ. 13 juillet 1926, S. 1926, I, 263, mariage de Sarah BERNHARDT avec l’acteur DAMALA à Londres, T.
Civ. Seine 12 juillet 1888, JDI 89, 64

62
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

transcription n’entraîne pas la nullité du mariage ni l’inopposabilité de l’union. Cette


transcription peut être demandée plusieurs années après la célébration du mariage.

Lorsque l’acte de naissance d’un époux marié à l’étranger ne fait pas état de son mariage à
l’étranger, c’est le plus souvent parce que la transcription n’a pas été effectuée. Elle peut être
demandée à tout moment par l’un des intéressés.

b) Mariage en la forme diplomatique ou consulaire

Les français qui le désirent peuvent se marier à l’étranger devant les agents diplomatiques ou
consulaires français, mais le recours à la forme locale est toujours possible.

La compétence des agents diplomatiques ou consulaires résulte pour les mariages entre
français de l’article 48 du Code civil ; pour les mariages entre français et étrangers de l’article
170 alinéa 2 et 3 du Code civil 48. En ce qui concerne ces derniers, le consul ne peut célébrer
le mariage que si l’époux étranger est ressortissant d’un pays dont la liste est fixée par décret :
Afghanistan, Arabie Saoudite, Cambodge, Chine, Égypte, Irak, Iran, Japon, Laos, Liban,
Maroc, Oman, Syrie, Thaïlande, Yémen. La liste est limitative.

Exemple : Un français se propose d’épouser une allemande en Allemagne. Le mariage


peut-il être célébré au consulat de France ? La réponse est négative, l’Allemagne ne fait
pas partie de la liste des pays figurant sur le décret autorisant les consuls de France à
célébrer le mariage entre français et étranger. Le mariage devra être célébré en
conformité avec la loi allemande.

Le mariage sera transcrit sur les registres du consulat, soit à la demande des époux soit
d’office. Aucun délai n’est prévu pour demander la transcription. Elle peut avoir lieu
plusieurs années après le mariage.

Le mariage figurera sur les registres du Ministère des affaires étrangères (service central
de l’état civil à Nantes) auquel le consul aura transmis le second exemplaire de ses
registres.

2- Mariage des étrangers

→ Mariage des étrangers en France

Les étrangers peuvent se marier en France, soit selon la forme française, soit en la forme
diplomatique ou consulaire si aucun d’eux ne possède la nationalité française.

48
Cf E.D. DI, v° Mariage précité

63
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Ils ne peuvent valablement contracter un mariage en France sous une autre forme et
notamment, ils ne pourront se marier selon les formes du pays dont ils sont ressortissants (un
mariage consensuel ou seulement religieux est nul).

En cas de mariage selon la forme locale française, l’officier de l’état civil n’a pas à se
préoccuper de la régularité du séjour de l’intéressé, ni à exiger des justificatifs à cet égard.
L’irrégularité du séjour d’un étranger en France ne saurait être un empêchement au mariage.
Toutefois, l’article 175-2 du Code civil permet à l’officier de l’état civil lorsqu’il a des doutes
sérieux sur la sincérité du mariage de saisir le Procureur de la République.

→ Mariage des étrangers à l’étranger

Ces mariages sont valables en France dès lors qu’ils ont été célébrés selon la forme locale
étrangère ou devant les agents diplomatiques ou consulaires du pays dont les époux sont
ressortissants 49.

§ 2- LES EFFETS DU MARIAGE

Les effets du mariage sont d’ordre personnel et patrimonial. Ils affectent en effet la personne
des époux et leurs biens car l’union de deux personnes a nécessairement des conséquences sur
leur patrimoine.

La loi qui régit les effets personnels du mariage est la loi nationale des époux s’ils sont de
même nationalité, la loi de leur domicile commun s’ils sont de nationalité différente et en
l’absence de domicile et de nationalité commune la loi du juge saisi.

A- Effets sur les personnes

1- Effets sur les deux époux

Le mariage génère entre époux des obligations réciproques de cohabitation, de fidélité, de


secours et d’assistance, qui caractérise le mariage ; la loi régissant les effets personnels du
mariage trouvera naturellement à s’appliquer. Il y a peu de jurisprudence sur la question si ce
n’est en matière d’obligation alimentaire entre époux en raison du caractère quasi moral de
ces obligations.

49
Cf E.D. DI, v° Mariage n° 131 et s.

64
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

2- Effets sur la personne de chacun des époux

Vont relever de la loi qui régit les effets personnels du mariage le nom de la femme mariée 50,
l’autorité maritale, la capacité de la femme mariée.

B- Effets sur les biens des époux

Les effets du mariage sur les biens des époux constituent d’une façon générale le régime
matrimonial des époux. Or en droit français, le régime matrimonial est une catégorie
autonome obéissant à ses propres règles comme l’a confirmé la convention de la Haye du 14
mars 1978 sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux entrée en vigueur en France le 1er
septembre 1992.

Mais ce serait oublier que la loi du 13 juillet 1965 a institué un statut patrimonial de base
appelé communément régime primaire, applicable à tous les époux du seul fait du mariage
quelque soit leur régime matrimonial.

Par ailleurs, en raison des liens particuliers existant entre les époux, certaines législations vont
prohiber ou encadrer les contrats que les époux sont amenés à passer entre eux. Dès lors il
paraissait normal de les soumettre à une loi unique.

→ Le régime primaire

Les auteurs se sont interrogés sur la loi applicable au régime primaire. Certains auteurs l’ont
soumis à la loi qui régit les effets personnels du mariage, d’autres ont préconisé l’application
de la loi applicable au régime matrimonial ; enfin certains y ont vu des lois d’application
immédiate ou des lois de police.

Tous y voient des dispositions hétéroclites interdisant de les soumettre à une loi unique.

Ainsi :

- les articles 212 et 213 du Code civil (devoir de fidélité, secours et assistance…) relèveront
de la loi personnelle des époux ;

- l’article 214 du Code civil (contribution aux charges du mariage) ressortira de la loi
applicable aux obligations alimentaires déterminées par la convention de la Haye du 2
octobre 1973 ;

50
CA Paris 13 juin 1923, Rev. Crit. DIP 1924, 394

65
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

- l’article 215 aliéna 3 qui tend à protéger le logement de la famille est une loi
d’application immédiate à tous les époux se trouvant sur le territoire national quelles
que soient les lois auxquels sont soumis les effets personnels ou pécuniaires du
mariage ;

- les articles 220-1 du Code civil (pouvoir ménager des époux) et 222 (comptes de dépôt et
présomption de pouvoir) en tant que loi de police trouvent à s’appliquer à tous les époux
se trouvant sur le territoire national ;

- l’article 223 du Code civil (l’exercice d’une profession séparée et le droit de disposer de ses
gains et salaires) constitue une disposition d’ordre public ;

- les articles 217 et 219 du Code civil (aménagement judiciaire des pouvoirs de gestion)
trouvent à s’appliquer au titre de loi de police ou d’urgence ;

- les articles 218 (mandat entre époux) et 225 du Code civil (disposition des biens
personnels) ressortissent de la loi du régime matrimonial.

Exemple : Deux époux anglais résidant en France, mariés sous le régime de la


séparation de biens qui vendent le logement de la famille, ne peuvent l’aliéner que d’un
commun accord (article 215 alinéa 3 du Code civil) même s’il appartient à l’un seulement
des époux. Si l’un des époux refuse de donner son consentement, le recours à l’article
217 du Code civil serait possible devant le juge français.

→ Les contrats entre époux

La plupart des auteurs estiment avec la jurisprudence qu’en ce qui concerne les contrats entre
époux, il convient de faire application de la loi qui régit les effets personnels du mariage.

Dès lors, les ventes entre époux comme la société entre époux vont relever de leur loi
nationale s’ils sont de même nationalité, et de la loi de leur domicile commun s’ils sont de
nationalité différente (pour les donations entre époux – cf infra).

Exemple : Un époux saoudien propriétaire à la Baule d’une résidence secondaire


envisage de la vendre à son conjoint (de même nationalité). Cette aliénation est-elle
possible ?

Les ventes entre époux relèvent de la loi qui régit les effets personnels des époux et par
conséquent de leur loi nationale. La loi coranique autorise les ventes entre époux. La
vente est donc possible.

66
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

SECTION II – LE DIVORCE EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE

Longtemps la pratique notariale n’a été confrontée au divorce international qu’à l’occasion de
la liquidation d’un régime matrimonial. Il en est différemment aujourd’hui. Il n’est pas rare
que les notaires soient interrogés sur la détermination du tribunal compétent sur la loi
applicable au divorce et sur les effets des jugements de divorce étrangers en France.

§ 1- LE TRIBUNAL COMPETENT POUR PRONONCER LE DIVORCE

Traditionnellement, les tribunaux français étaient compétents lorsque les intéressés résidaient
en France ou lorsque l’une des parties était de nationalité française.

Ces deux critères de compétence n’ont plus désormais qu’un rôle secondaire depuis le 1er
mars 2005, date d’entrée en vigueur du règlement CE du 27 mai 2003 dit Bruxelles II bis qui
a abrogé le règlement du 29 mai 2000 dit Bruxelles II.

En effet, le règlement du 17 mai 2003, entrée en vigueur le 1er mars 2005 dans tous les Etats
de l’Union européenne, sauf le Danemark, détermine les règles de compétence internationales
des juridictions des Etats membres de l’Union européenne pour statuer en matière de divorce
et de responsabilité parentale.

Aux termes de l’article 3-1 du règlement, les juridictions d’un Etat membre compétentes pour
statuer sur les questions relatives au divorce, à la séparation de corps et à l’annulation du
mariage des époux sont celles :

 de la résidence habituelle des deux époux ;


 de leur dernière résidence habituelle dans la mesure où l’un d’eux y réside encore ;
 de la résidence habituelle du défendeur ;
 de la résidence habituelle de l’un ou de l’autre époux en cas de demande conjointe ;
 de la résidence habituelle du demandeur s’il y a résidé depuis au moins une année
immédiatement avant l’introduction de la demande et s’il est soit ressortissant de
l’Etat membre dont s’agit soit dans le cas du Royaume Uni, et de l’Irlande, s’il y a son
domicile.

Sont également compétentes les juridictions de l’Etat (membre de l’Union) de la nationalité


commune des époux ou dans le cas du Royaume Uni et de l’Irlande, du « domicile » commun.

Il s’agit là de chefs de compétence alternatifs.

67
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Le premier qui saisit le juge fixe la compétence à son profit 51.

Exemple : Un époux franco italien résidant avec sa famille en France s’établit en Italie.
Six mois après son départ, il demande le divorce. Il peut saisir le juge italien. Si son
épouse saisit le juge français, celui-ci devra se déclarer incompétent.

Exemple : Deux époux italiens se sont établis en France avec leurs enfants. Le mari
pourra demander le divorce en Italie même si les époux résident en France. La femme
saisira vainement le juge français.

Aux termes de l’article 6 du règlement, les règles de compétence rappelées plus haut ont un
caractère exclusif. Il n’est plus possible d’invoquer par exemple des règles de compétence
fondées sur le droit interne. On ne peut utiliser que celles énoncées à l’article 3-1 du
règlement.

§ 2- LA LOI APPLICABLE AU DIVORCE

A- Détermination de la loi applicable au divorce

La loi applicable au divorce est énoncée à l’article 310 du Code civil : « le divorce et la
séparation de corps sont régis par la loi française :
- lorsque l’un et l’autre époux sont de nationalité française ;
- lorsque les deux époux ont l’un et l’autre leur domicile sur le territoire français ;
- lorsqu’aucune loi étrangère ne se reconnaît compétente alors que les tribunaux
français sont compétents pour connaître du divorce et de la séparation de corps. »

1- Les époux sont français

La loi française est applicable au divorce international lorsque les deux époux sont français. Il
n’est pas nécessaire qu’ils aient un domicile commun en France ou à l’étranger.

2- Les deux époux sont domiciliés en France

La loi française est applicable lorsque les deux époux ont leur domicile en France, qu’ils
soient de même nationalité étrangère ou de nationalité différente, sauf convention
internationale contraire (polonais, serbes, marocains).

51
H. FULCHIRON « Bruxelles II bis : le nouveau droit judiciaire européen du divorce et de la responsabilité
parentale », Droit et patrimoine avril 2005, n° 136

68
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

3- Application de la loi française à titre résiduelle

La loi française est encore compétente lorsqu’aucune loi étrangère ne se reconnaît


compétente.

Lorsque les deux époux ne sont ni tous les deux français ni tous les deux domiciliés en
France, la loi étrangère qui se reconnaît compétente sera applicable. Si aucune loi étrangère
n’est compétente, le juge français fera application de la loi française.

Exemple : Deux époux, l’un portugais, l’autre français ont deux domiciles séparés, l’un
en France l’autre en Belgique. La loi portugaise n’est pas compétente car elle donne
compétence soit à la nationalité commune, soit à la loi du domicile commun. La loi
belge non plus, la règle de conflit belge désignant la loi nationale commune ou la loi
belge si l’époux est belge. Le juge fera application de la loi française 52.

B- Le domaine de la loi applicable

La loi applicable au divorce détermine les causes du divorce (consentement mutuel, rupture de la
vie commune…), les conditions de la conversion de la séparation de corps en divorce.

Les effets du divorce relèvent également de la loi du divorce notamment la dissolution du


régime matrimonial et la date à laquelle elle se produit. Mais les conditions et délais dans
lesquels est possible le remariage relèvent de la loi personnelle des époux. Relève également
de cette dernière loi le nom de la femme divorcée.

Les pensions alimentaires, les prestations, les dommages et intérêts sont également soumis à
la loi du divorce. Les obligations alimentaires sont régies par la convention de la Haye du 2
octobre 1973 sur la loi applicable aux obligations alimentaires.

L’autorité parentale échappe à la loi du divorce.

§ 3- LA RECONNAISSANCE DES JUGEMENTS ETRANGERS DE DIVORCE ET DE SEPARATION DE


CORPS

Depuis l’entrée en vigueur du règlement Bruxelles II bis, il convient d’opérer une distinction
selon que le jugement étranger de divorce est rendu à l’intérieur de l’Union européenne ou
dans un pays tiers.

52
Cf E.D., v° Divorce, n° 142

69
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A- Le jugement étranger de divorce est rendu dans un pays tiers

1- Principes généraux

Dans le célèbre arrêt MUNZER 53, la Cour de cassation a énoncé les conditions d’efficacité en
France d’une décision rendue à l’étranger : le juge étranger doit être compétent, la procédure
doit avoir été régulière, la loi étrangère appliquée doit avoir été désignée par la règle de conflit
française et la décision étrangère doit être conforme à l’ordre public français (ordre public
atténué et exempt de fraude).

2- Les effets du jugement étranger de divorce

Le principe de l’efficacité du jugement étranger de divorce a été formulé dans le célèbre arrêt
BULKLEY 54 « les jugements rendus par un tribunal étranger relatifs à l’état et à la capacité
des personnes produisent leurs effets en France indépendamment de toute déclaration
d’exequatur, sauf le cas où ces jugements doivent donner lieu à des actes d’exécution
matérielle sur les biens ou d’exécution sur les personnes ».

Sans exequatur le jugement étranger de divorce permet le remariage en France ; il interdit


toute demande nouvelle en divorce en France.

Il peut être transcrit à l’état civil55. Il permet la liquidation conventionnelle du régime


matrimonial.

Avec exequatur, les jugements étrangers de divorce qui « donnent lieu à des actes de
l’exécution matérielle sur les biens et de coercition sur les personnes », sont opposables en
France 56.

B- Le jugement de divorce est rendu dans un Etat de l’Union européenne

Le règlement Bruxelles II bis pose le principe de la reconnaissance de plein droit des


décisions rendues dans un Etat de l’Union et simplifie les conditions et les modalités de
l’exequatur.

53
Cass. 7 janvier 1964, Rev. crit. DIP 1964, 302, note BATIFFOL, JD éd. 1964, 302, note GOLDMAN, JCP 64, II,
13590, note M. ANCEL
54
Cass. Civ. 28 février 1860, DP 60-1-57
55
Cass. 29 mars 1989, D. 90, som. 115, obs. BENABENT et art. 21-2 du règlement Bruxelles II bis
56
Cass. Req. 3 mars 1930, S. 1930-1-377, note NIBOYET

70
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

L’article 21-1 du règlement prévoit que « les décisions rendues dans un Etat membre sont
reconnues dans les autres Etats membres sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune
procédure lorsqu’elles sont accompagnées d’un certificat (article 39 du règlement) délivré par
l’autorité de l’Etat dont elles émanent ». (En pratique, même en l’absence de ce certificat il sera
possible de se prévaloir de la décision rendue).

Il en est de même des actes authentiques reçus et exécutoires dans un Etat membre.

Certains formalismes qui avaient été maintenus sous l’emprise du règlement Bruxelles II ont
été supprimés. Ainsi pour les actes de l’état civil, l’article 21-2 du règlement Bruxelles II bis
affirme qu’aucune procédure n’est requise pour la mise à jour des actes de l’état civil d’un
Etat membre, en matière de divorce, de séparation de corps ou d’annulation de mariage.

Cependant, si la régularité d’une décision est présumée, la reconnaissance peut être contestée.

Des motifs de non reconnaissance des décisions ont été énoncés à l’article 22 du règlement :

 la reconnaissance est manifestement contraire à l’ordre public

 l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent n’a pas été signifié ou notifié au
défendeur défaillant en temps utile et de telle manière qu’il puisse pourvoir à sa
défense, à moins qu’il ne soit établi que le défendeur a accepté la décision de manière
non équivoque.

 elle est inconciliable avec une décision rendue dans une instance opposant les mêmes
parties dans l’Etat membre requis.

 elle est inconciliable avec une décision rendue antérieurement dans un autre Etat
membre ou dans un Etat tiers dans une affaire opposant les mêmes parties, dès lors
que cette première décision réunit les conditions nécessaires à sa reconnaissance dans
l’Etat membre requis (une décision de séparation de corps serait inconciliable avec une
décision de divorce) 57.

57
H. FULCHIRON précité, Droit et patrimoine n° 136, p. 41

71
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C- L’exécution en France d’une décision étrangère de divorce et l’exécution à


l’étranger d’une décision française de divorce

a) L’exécution en France d’une décision étrangère de divorce

La pratique notariale est de plus en plus souvent confrontée à l’exécution en France d’une
décision de divorce rendue à l’étranger qui s’accompagne d’une convention passée entre les
parties relativement au partage de leurs biens.

Aux termes de cette convention, il a été décidé d’attribuer l’immeuble situé en France au mari
par exemple et l’immeuble situé à l’étranger à la femme.

Se pose en France la question de la mutation de l’immeuble en France au nom du mari.

Pour muter l’immeuble au nom de l’époux attributaire en France, il conviendra tout d’abord
de déposer une copie du jugement contenant l’attribution au rang des minutes du notaire
français, accompagnée du certificat attestant qu’il est devenu définitif dans l’ordre juridique
étranger et de publier l’acte de dépôt dans les conditions de l’article 4 du décret du 4 janvier
1955. Le jugement doit au préalable être traduit, par tout traducteur de son choix, juré ou non,
et légalisé, sauf apostille ou dispense de légalisation (cf infra). Ce dépôt peut être effectué par
l’un seulement des ex-époux.

Si la décision a été rendue par une juridiction de l’Union européenne, aucune légalisation
n’est requise (article 52 du règlement Bruxelles II bis).

Exemple : aux termes d’un jugement de divorce rendu à Londres, il a été attribué au
mari un immeuble situé à Vannes et à la femme un appartement acheté par les époux à
Glasgow.

Comment muter l’immeuble au nom du mari.

Une copie du jugement traduite sera adressée au notaire français. Celui-ci la déposera au
rang de ses minutes et publiera son acte de dépôt.
En principe, le droit de 1 % est perçu sur la totalité des biens partagés y compris sur les
biens situés à l’étranger.

On ne peut échapper au droit de 1 % sur la totalité des biens qu’en procédant à la


licitation de l’immeuble situé en France ou en faisant déclarer aux parties que leurs
biens situés à l’étranger ont été partagés, que ne subsiste en indivision que l’immeuble
français, que celui-ci a été attribué à l’un d’eux moyennant une soulte versée et
quittancée.

72
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

b) L’exécution à l’étranger d’une décision de divorce rendue en France

Pour rendre exécutoire à l’étranger une décision de divorce rendue en France, il suffit
d’adresser une copie traduite et légalisée, si nécessaire, du jugement, à l’autorité étrangère
chargée de liquider le régime matrimonial.

D- La transcription du jugement de divorce

La transcription du jugement de divorce sur les registres de l’Etat civil tenus par une autorité
française n’est pas obligatoire et est sans effet sur la validité de la décision prononcée à
l’étranger.

Elle n’est effectuée que si l’intéressé en fait la demande.

Cette mention du jugement de divorce sur les registres de l’Etat civil en France n’exige pas
que la décision de divorce soit revêtue de l’exequatur car il s’agit d’une mesure de publicité et
non d’exécution 58 (pour les jugements rendus par une juridiction de l’Union, art. 21-2 du règlement
Bruxelles II bis).

SECTION III – L’UNION LIBRE 59

La loi du 15 novembre 1999 a donné à l’union libre un statut en France. De nombreuses


législations avaient déjà consacré cette nouvelle manière de vivre en couple : les Pays-Bas, la
Suède, la Norvège, le Danemark et l’Allemagne (loi du 16 février 2001) connaissent le
partenariat enregistré, la Belgique la cohabitation légale, l’union civile en Catalogne.

Les auteurs, en présence de cette nouvelle institution du droit français, ont tenté de déterminer
la loi qui lui était applicable, s’efforçant de la faire rentrer dans l’une des grandes catégories
de rattachement connue en Droit international privé.

Son aspect contractuel très marqué, l’article 515-1 du Code civil ne définit-il pas le pacte
comme un contrat conclu par deux personnes physiques majeures de même sexe ou de sexe
différent pour organiser leur vie commune, conduit à le faire rentrer dans la catégorie des
contrats et à le soumettre à la convention de Rome du 19 juin 1980 sur les obligations

58
Cass. Civ. 1ère 29 mars 1989, D. 90, Somm. 115, note BENABENT, Rev. crit. DIP 352, note MAYER
59
« La reconnaissance en France des partenariats enregistrés à l’étranger » Guilaume KESSLER, AJ famille
n° 7-8 2004, p. 272 ; « Le Pacs, les partenariats enregistrés et les mariages homosexuels dans la pratique du
DIP », M. REVILLARD, Def. 2005, n° 38128, p. 461

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CRIDON-OUEST
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contractuelles entrée en vigueur le 1er avril 1991, mais on peut être tenté de le faire rentrer
dans le statut personnel dans la mesure où il a des effets directs sur la personne.

Néanmoins, en raison du lien très étroit entre le régime du PACS et la loi dont il relève, tout
morcellement paraît exclu.

Force est alors de soumettre le PACS à la loi de l’institution, entendue comme loi du pays, dans
laquelle les partenaires ont contracté, la volonté des partenaires ne pouvant s’exprimer que
dans le cadre de cette loi et dans les limites fixées par elle.

Dès lors deux personnes de nationalité étrangère ou de nationalité française et étrangère qui
viendront à se pacser en France seront soumis aux dispositions des articles 505 et suivants du
Code civil.

Mais l’application de la loi régissant l’institution n’écartera pas le jeu de la loi successorale au
décès des partenaires, de la loi personnelle lorsqu’il s’agira d’apprécier leur capacité de
contracter, voire la loi d’autonomie lorsqu’ils contracteront entre eux…

Même si la loi française régit les relations personnelles et patrimoniales de deux personnes
qui entendent se pacser en France, il faut néanmoins s’interroger sur les incidences de la
présence d’un élément d’extranéité aussi bien au regard des conditions de sa formation (§ 1)
que de ses effets (§ 2).

§ 1- LES CONDITIONS DE FORMATION DU PACS

L’article 515-1 du Code civil définit le PACS comme « un contrat conclu entre deux personnes
physiques majeures de sexe différent ou de même sexe pour organiser leur vie commune ».

La loi ne fait aussi aucune distinction selon que les partenaires seront de même nationalité
étrangère, ou de nationalité française et étrangère, ou de nationalité étrangère différente. Elle
autorise même expressément le PACS entre étrangers dans son article 12 de la loi du 16
novembre 1995 en prévoyant que le PACS est un moyen pour les étrangers d’obtenir plus
facilement un titre de séjour en France.

Mais les personnes de nationalité étrangère qui viendront se pacser en France devront
satisfaire aux conditions de fonds de la loi française, savoir aux empêchements tenant à
l’inceste, à la bigamie, à la conclusion d’un PACS ou d’une institution similaire par les
partenaires ou l’un d’eux seulement.

La circulaire du 11 octobre 2000 exige pour des personnes de nationalité étrangère nées hors
de France un certificat de coutume des consuls étrangers en France énumérant les pièces

74
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d’état civil qu’il convient de produire pour vérifier l’absence d’empêchement à conclure un
PACS.

Cette exigence peut conduire à priver certains étrangers du droit de conclure un PACS
(ressortissants d’Etats prohibant les relations homosexuelles par exemple).

C’est la raison pour laquelle une réponse ministérielle est venue préciser qu’« en raison des
difficultés auxquelles se heurtent les étrangers pour obtenir de leurs autorités nationales un
certificat de coutume afin de conclure un PACS avec un français résidant à l’étranger, les
agents diplomatiques et consulaires chargés de vérifier l’absence d’empêchement à conclure
un PACS devront faire preuve de souplesse et accepter de la part de la personne étrangère un
certificat de célibat, une attestation sur l’honneur indiquant qu’elle n’est pas sous tutelle » 60.

C’est dire aussi que les greffiers devront en France faire preuve de la même souplesse que les
agents diplomatiques ou consulaires à l’égard des étrangers qui veulent se pacser en France.

L’article 515-3 alinéa 1er du Code civil exige des personnes qui concluent un PACS une
résidence commune. Il n’est pas exigé qu’elles aient un domicile commun. Elles pourront
donc avoir des domiciles séparés mais devront avoir une résidence commune.

Exemple : Des partenaires de nationalité britannique domiciliés en Grande Bretagne qui


ont acquis un immeuble à Roscoff pourront se pacser au greffe d’instance dans le ressort
duquel se trouve leur résidence secondaire. Il suffira aux partenaires d’attester sur
l’honneur que leur résidence commune en France est située à Roscoff.

Ainsi des partenaires français et étrangers voire étrangers qui déclareront avoir une résidence
commune en France pourront conclure un PACS en France.

De même, les partenaires français et étrangers qui auront une résidence commune à l’étranger
pourront se pacser à l’étranger. En effet, l’article 515-3 du Code civil édicte que « à
l’étranger l’inscription de la déclaration conjointe d’un PACS liant deux partenaires dont l’un
d’eux au moins est français et les formalités prévues aux deuxième et quatrième aliénas sont
assurées par les agents diplomatiques et consulaires français… », ce qui implique qu’il n’est
pas nécessaire que les partenaires français et étranger aient une résidence commune en
France. Une résidence commune à l’étranger n’est pas un obstacle à la conclusion d’un PACS.

En revanche, en raison de la rédaction même de l’article 515-3 du Code civil, la conclusion


d’un PACS régi par la loi interne française à l’étranger entre partenaires étrangers est exclue.

60
RM n° 58140, JOAN 13 août 2001, p. 4722

75
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

§ 2- LES EFFETS DE LA CONCLUSION D’UN PACS

A- Les effets en France de la conclusion d’un PACS

Les effets en France d’un PACS conclu entre partenaires de nationalité française et étrangère
ou de nationalité(s) étrangère(s) sont ceux du droit français.

Les conséquences personnelles et patrimoniales du PACS seront identiques et ce, quelles que
soient la nationalité et la résidence des partenaires et le PACS pourra être rompu dans les
mêmes conditions.

Sur le plan fiscal, les dispositions prises en faveur des concubins pacsés et notamment en
matière de donation et de succession (mais aussi en matière d’impôts sur le revenu) seront
applicables (si la loi fiscale française s’applique) à des partenaires de même nationalité ou de
nationalité différente à la condition toutefois que ceux-ci aient conclu un PACS dans les
conditions du droit français 61.

Par ailleurs, la seule conclusion d’un pacte civil de solidarité par un ressortissant étranger
avec un ressortissant étranger en situation régulière n’emporte pas la délivrance de plein droit
d’une carte de séjour temporaire (article 12 de la loi du 15 novembre 1999).

La conclusion d’un tel contrat constitue cependant pour l’autorité administrative un élément
de la situation personnelle de l’intéressé dont elle doit tenir compte pour apprécier si un refus
de délivrance de la carte de séjour sollicitée par le demandeur, compte tenu de l’ancienneté de
la vie commune avec son partenaire, n’entraînerait pas une atteinte excessive à son droit au
respect de sa vie privée 62.

Le PACS en revanche n’a aucun effet sur la nationalité, mais pourra être pris en compte pour
apprécier l’assimilation à la communauté française en cas de demande de naturalisation.

B- Des effets inattendus

La possibilité offerte en France aux concubins de même sexe ou de sexe différent de se


pacser, interdit aujourd’hui d’écarter en France, au nom de l’ordre public français,
l’application d’une législation étrangère connaissant une institution semblable (partenariat aux
Pays-Bas, en Norvège, en Islande, au Danemark, en Suède, cohabitation légale en Belgique…).

Ainsi lorsqu’une législation étrangère (Danemark, Norvège, Allemagne, Pays-Bas…) confèrera


aux concubins survivants des droits dans la succession de son partenaire prédécédé, ces droits
devront être reconnus en France sur les biens dévolus selon la loi étrangère.
61
RM JOAN 13 mars 2000, p. 1674
62
Trib. adm. de Lille, 3 juillet 2002, D. 2004 com. p. 587

76
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

De même si deux concubins sont liés par un contrat de partenariat qui soumet les partenaires à
un régime de communauté universelle (Pays-Bas), tous les biens des partenaires, y compris
ceux qu’ils viendraient à acquérir en France tomberont dans la communauté universelle.

Le mariage homosexuel admis dans certains pays (Belgique, Pays-Bas) soulèvera les mêmes
interrogations. La France acceptera-t-elle de faire produire effet à une telle union, la notion
d’ordre public ne sera-t-elle pas un obstacle à cette reconnaissance, à moins que ici encore on
fasse application de la notion d’ordre public atténuée 63.

Quant aux PACS conclus en France, ils n’auront à l’étranger que l’efficacité que la législation
étrangère leur reconnaîtra.

SECTION IV – LA FILIATION EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE

Le développement des moyens de communication, du tourisme et des migrations


internationales a multiplié les mariages mixtes ou d’étrangers vivant en France ou les
relations plus ou moins durables entre personnes de nationalité différente. La fréquence des
conflits de lois en matière de filiation s’en est trouvée accrue.

A partir d’un seul texte censé régir la matière, l’article 3 du Code civil, la jurisprudence avait
patiemment élaboré des règles de rattachement. Celles-ci devaient être abandonnées par la loi
du 3 janvier 1972 qui a introduit dans le Code civil des dispositions relatives aux conflits de
loi en matière de filiation (articles 311-14 à 311-18 du Code civil).

D’autre part le nombre restreint d’enfants français susceptibles d’être adoptés avait poussé les
couples à se tourner vers des pays étrangers à forte densité de population.

Pour éviter les abus auxquelles ces adoptions internationales avaient parfois donné lieu et leur
remise en cause par les pays d’origine ignorant les formes d’adoption du droit français, la loi
du 6 février 2001 a introduit dans le Code civil de nouveaux articles (articles 370-3 et 370-5 du
Code civil) qui ont quelque peu modifié ici encore le droit positif antérieur.

L’examen de l’adoption internationale sera ainsi précédé de l’étude des conflits de loi en
matière de filiation.

63
H. FULCHIRON, « Réflexions sur les unions hors mariage en Droit international privé », JDI 2000, p. 889 et s.
– E. FONGARO « Retour sur les effets en France d’une union homosexuelle célébrée à l’étranger » JCP N 2005,
n° 1258 – Marc SCHMITT, JCP N 9 janvier 2004, n° 1006 « L’incidence en France des lois belge et néerlandaise
introduisant le mariage homosexuel »

77
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

§ 1- LES CONFLITS DE LOIS EN MATIERE DE FILIATION

La loi du 30 janvier 1972 réformant le droit international de la filiation contient 5 articles


concernant les conflits de lois relatifs à l’établissement de la filiation (articles 311-14 à 311-18 –
L’article 311-16 a été abrogé par l’ordonnance du 4 juillet 2005).

A- Les principes relatifs à l’établissement de la filiation en Droit international


privé

La loi du 3 janvier 1972 a voulu unifier la filiation maternelle ou paternelle, autour de la loi
de la mère. Sa compétence est de principe même lorsqu’il s’agit d’établir la paternité de
l’enfant.

L’article 311-14 du Code civil le précise sans ambiguïté : « la filiation est régie par la loi
personnelle de la mère au jour de la naissance de l’enfant ; si la mère n’est pas connue, par
la loi personnelle de l’enfant ».

Par la loi personnelle de la mère on entend sa loi nationale. Si celle-ci a une double nationalité
française et étrangère on ne retiendra que sa nationalité française. Si la mère est réfugiée ou
apatride, la loi applicable est celle de son domicile ou de sa résidence.

Si la mère est inconnue, on appliquera la loi de l’enfant c’est à dire la loi de son père si la
filiation est établie à son égard ou la loi française si l’enfant est né en France de parents
inconnus.

Exemple : Une femme de nationalité allemande est décédée en 1980 en laissant un


enfant naturel né en Allemagne qui ne porte à l’Etat civil que le nom de sa mère. Peut-il
venir à sa succession en France ?

L’article 311-14 disposant que la filiation de l’enfant est régie par la loi personnelle de
la mère au jour de la naissance de l’enfant, la loi allemande est compétente. Or celle-ci
comme la loi française depuis l’ordonnance du 4 juillet 2005 considère que la simple
indication du nom de la mère dans l’acte de naissance de l’enfant vaut reconnaissance.
La filiation de l’enfant se trouve établie à l’égard de sa mère.

Ce rattachement à la loi de la mère n’est véritablement qu’un principe car le législateur a


multiplié les rattachements subsidiaires. L’unité du statut de la filiation voulue par le
législateur a quelque peu volé en éclat.

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CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

B- Les exceptions au principe du rattachement de la filiation à la loi de la


mère

Elles sont énoncées aux articles 311-15, 311-17 et 311-18 du Code civil.

1- Les effets de la possession d’état selon la loi française (article 311-15 du Code civil)

Lorsque l’enfant ainsi que ses parents résident en France, l’un des modes de preuve de sa
filiation à savoir la possession d’état ne relève plus de la loi de la mère mais de la loi
française : article 311-15 du Code civil « si l’enfant et ses père et mère, ou l’un d’eux, ont en
France leur résidence habituelle, commune ou séparée, la possession d’état produit toutes les
conséquences qui en découlent selon la loi française, alors même que les autre éléments de la
filiation auraient pu dépendre d’une loi étrangère ».

2- La reconnaissance volontaire (article 311-17 du Code civil)

L’article 311-17 du Code civil a repris les solutions antérieures de la jurisprudence « la


reconnaissance volontaire de paternité ou de maternité est valable si elle est faite en
conformité soit de la loi personnelle de son auteur, soit de la loi personnelle de l’enfant ».

La loi fait ainsi une distinction entre l’établissement judiciaire de la filiation naturelle qui
relève de la loi de la mère ou de l’enfant (article 311-14 du Code civil) et l’établissement
volontaire par reconnaissance qui relève de la loi de l’auteur de la reconnaissance ou de la loi
de l’enfant.

Elle constitue une mesure prise dans l’intérêt de l’enfant.

Exemple : Monsieur X de nationalité française a eu, pendant son mariage, un enfant


d’une femme de nationalité allemande. Ce dernier n’a été reconnu que par sa mère.

Après le décès de son épouse, le père de l’enfant l’a reconnu à son tour en France puis
s’est marié avec sa mère. Il vient de décéder. L’enfant est-il appelé à la succession de
son père ?

La filiation de l’enfant à l’égard de son père a été établie conformément à la loi


française. Sa filiation se trouve établie à son égard.

Il vient donc à sa succession avec les mêmes droits que les enfants issus du premier
mariage de son père.

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CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

3- L’action à fins de subsides

L’article 311-18 du Code civil prévoit que l’action à fins de subsides est régie au choix de
l’enfant soit par la loi de sa résidence habituelle, soit par la loi de la résidence habituelle du
débiteur.

Cette disposition est devenue caduque depuis l’entrée en vigueur en France le 1er octobre
1977 de la convention de la Haye du 2 octobre 1973 sur la loi applicable aux obligations
alimentaires.

§ 2- L’ADOPTION INTERNATIONALE

Les solutions apportées à l’adoption internationale ont longtemps été d’origine


essentiellement jurisprudentielles. Elle est aujourd’hui régie par la loi du 6 février 2001 qui a
introduit trois articles dans le Code civil, les articles 370-3 à 370-5. Ils régissent l’adoption
internationale des mineurs comme des majeurs.

Ces textes déterminent les conditions et les effets de l’adoption internationale. Mais il est
difficile d’occulter les conventions internationales qui ont été conclues en ce domaine.

A- Les conditions de l’adoption en Droit international privé

Les conditions de fond de l’adoption internationale et la détermination de loi applicables


seront examinées avant le formalisme préalable à l’adoption.

1- Les conditions de fond de l’adoption et la loi applicable

L’article 370-3 du Code civil opère une distinction entre l’adoptant et l’adopté.

a) Les adoptants

Aux termes de l’alinéa 1er « les conditions de l’adoption sont soumises à la loi nationale de
l’adoptant ou, en cas d’adoption par deux époux, par la loi qui régit les effets de leur union.
L’adoption ne peut toutefois être prononcée si la loi nationale de l’un et l’autre époux la
prohibe ».

Ainsi, lorsque l’adoption est demandée par une seule personne, les conditions de l’adoption
sont soumises à la loi nationale de celle-ci. En revanche, l’adoption par deux époux relève de

80
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

la loi qui régit les effets personnels du mariage (loi nationale des époux s’ils sont de même
nationalité, loi de leur domicile commun s’ils sont de nationalité différente).

La loi compétente détermine ainsi l’âge requis pour adopter, la différence d’âge entre
adoptant et adopté, le consentement du conjoint, voire des enfants…

En cas d’adoption par deux époux, l’adoption n’est possible que si la loi nationale de l’un et
de l’autre ne l’interdit pas.

Ainsi, deux époux marocains ne pourront adopter un enfant en France, le Maroc comme les
pays musulmans prohibant l’adoption (à l’exception de la Tunisie pour les mineurs).

De même deux époux britanniques ne pourront adopter un enfant majeur. La loi britannique
prohibant l’adoption d’enfant majeur même s’il s’agit de l’enfant du conjoint. Il en est de
même en droit néerlandais.

b) L’adopté

L’alinéa 2 de l’article 370-3 édicte que « l’adoption d’un mineur étranger ne peut être
prononcée si sa loi personnelle prohibe cette institution, sauf si ce mineur est né et réside
habituellement en France ».

Ce texte qui interdit d’adopter des enfants ressortissants de pays prohibant l’adoption
(notamment des pays musulmans) a vu sa portée réduite. Il est écarté lorsque l’enfant est né et
réside habituellement en France et ne concerne que les pays qui prohibent l’adoption par
principe. L’adoption est possible lorsque les enfants sont ressortissants de pays connaissant
des institutions voisines ou l’adoption simple.

Ainsi, deux époux français pourront adopter un enfant algérien né et résidant en France,
même si la loi algérienne prohibe l’adoption.

L’interdiction ne vise pas les majeurs.

2- Le formalisme

Ce prononcé de l’adoption est subordonné au respect d’un certain formalisme.

81
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

a) Agrément

Préalablement au prononcé de l’adoption les adoptants doivent avoir obtenu l’agrément pour
adopter (ou en être dispensés). C’est ce que décide l’article 353-1 du Code civil « dans le cas
d’adoption d’un enfant étranger qui n’est pas l’enfant du conjoint le tribunal vérifie avant le
prononcé de l’adoption que le ou les requérants ont obtenu l’agrément pour adopter ou en
étaient dispensés ».

Cet agrément est délivré par le président du Conseil Général du Département de résidence du
ou des adoptants après enquête du service social à l’enfance.

b) Recherche d’un enfant et consentement à adoption

Après avoir obtenu cet agrément, les adoptants vont rechercher un enfant à l’étranger.

Dans cette hypothèse, il faut distinguer selon que l’Etat étranger dont l’adopté sera
ressortissant est ou non partie à la convention de la Haye du 29 mai 1993 sur la protection des
enfants et la coopération en matière d’adoption internationale.

Si l’enfant est ressortissant d’un pays ayant ratifié la convention de la Haye, l’adoption n’est
possible que par l’intermédiaire d’autorités centrales chargées de l’accomplissement des
procédures visant à l’adoption (en France la mission de l’adoption internationale).

Si l’enfant est ressortissant d’un pays n’ayant pas ratifié la convention de la Haye du 29 mai
1993 et réside à l’étranger, le consentement à l’adoption et la forme de celui-ci obéiront aux
règles du pays de résidence de l’enfant en matière de représentation.

L’article 370-3 du Code civil précise que « le consentement à adoption doit être libre, obtenu
sans aucune contrepartie après la naissance de l’enfant et éclairé sur les conséquences de
l’adoption, en particulier s’il est donné en vue d’une adoption plénière, sur le caractère
complet et irrévocable de la rupture du lien de filiation préexistant ».

c) Le prononcé de l’adoption

En droit français, qu’elle soit interne ou internationale, l’adoption passe par une procédure
judiciaire.

Aux termes des articles 14 et 15 du Code civil, les tribunaux français sont compétents dès lors
que les adoptants ou l’adopté sont de nationalité française 64.

64
CA Paris 11 juillet 1975, D. 76, 682, Note POISSON-DROCOURT, Rev. crit. Droit international privé 1976, 695,
note J. FOYER

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CRIDON-OUEST
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Ces articles s’appliquent en pratique à défaut de critère ordinaire de compétence territoriale en


France.

Ces critères relèvent de l’article 1166 alinéa 2 du Nouveau Code de procédure civile. Le
tribunal compétent est le tribunal du lieu où demeure le requérant lorsque celui-ci demeure en
France ; le tribunal du lieu où demeure la personne dont l’adoption est demandée lorsque le
requérant demeure à l’étranger ; le tribunal choisi en France par le requérant lorsque celui-ci
et la personne dont l’adoption est demandée demeurent à l’étranger.

S’agissant le plus souvent d’adoptants demeurant en France et d’adoptés demeurant à


l’étranger, les tribunaux français seront compétents et feront application des règles françaises
de procédure.

B- Les effets de l’adoption internationale

Les articles 370-4 et 370-5 opèrent une distinction selon que l’adoption est prononcée en
France ou à l’étranger.

1- L’adoption est prononcée en France

Les effets de l’adoption prononcée en France sont ceux de la loi française (article 370-4), le
législateur ayant voulu unifier le statut des enfants adoptés en France.

La loi française déterminera ainsi l’existence de l’adoption et ses effets sur la famille
d’origine selon qu’il s’agira d’une adoption simple ou d’une adoption plénière, le caractère
révocable ou non de l’adoption. C’est encore la loi française qui déterminera si l’adoption
prononcée est une adoption plénière ou une adoption simple.

En revanche, l’autorité parentale relèvera de la loi nationale de l’adoptant, les droits


successoraux de la loi successorale, l’établissement du lien de parenté de la loi personnelle de
l’adoptant ou des adoptants 65.

2- L’adoption est prononcée à l’étranger

L’article 370-5 du Code civil dispose : « l’adoption régulièrement prononcée à l’étranger


produit en France les effets de l’adoption plénière si elle rompt de manière complète et

65
Cf E.D., v° Adoption n° 380 et s.

83
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

irrévocable le lien de filiation préexistant. A défaut, elle produit les effets de l’adoption
simple ».

Cette disposition n’est qu’une application particulière de la jurisprudence selon laquelle les
jugements relatifs à l’état et à la capacité des personnes sont opposables en France sans
exequatur, dès lors que la décision a été régulièrement rendue à l’étranger.

Selon que l’adoption prononcée à l’étranger entraînera une rupture complète et irrévocable
avec la famille d’origine ou non, l’on sera en présence d’une adoption simple ou d’une
adoption plénière.

Si l’adoption prononcée à l’étranger ne rompt pas tout lien de filiation avec la famille
d’origine, lorsque celle-ci aura donné son consentement « l’adoption simple peut être
convertie en adoption plénière, si les consentements requis ont été donnés expressément en
connaissance de cause » (article 370-5 dernier alinéa).

Cette conversion est prévue par l’article 27 de la Convention de la Haye sur l’adoption
internationale.

Les droits musulmans prohibent l’adoption simple comme l’adoption plénière. Les actes
dénommés « Kafalah » ne créent aucun lien de filiation, ne génèrent aucune vocation
successorale mais seulement une dation d’autorité parentale.

Observons en terminant que tandis que l’adoption simple n’a aucun effet sur la nationalité
(article 21 du Code civil, toutefois article 21-12 du Code civil) l’adoption plénière, qu’elle soit
prononcée en France ou à l’étranger, confère à l’enfant la nationalité française depuis sa
naissance.

L’adoption sera transcrite dans certaines conditions sur les registres de l’Etat civil 66 et pourra
figurer sur le livret de famille.

C- Les conventions internationales en matière d’adoption

→ Conventions bilatérales :

 convention franco yougoslave du 18 mai 1971(ne concerne plus que la Serbie).


 convention franco polonaise du 5 avril 1967.
 convention franco vietnamienne du 1er février 2000.

66
Cf E.D. v° Adoption précitée

84
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Exemple : Adoption par des français de trois enfants mineurs de nationalité polonaise.

Il y a lieu d’appliquer la convention franco polonaise du 5 avril 1967. Aux termes de


celle-ci lorsque les adoptants sont domiciliés en France et les adoptés en Pologne, les
conditions et les effets de l’adoption relèvent de la loi de l’adopté.

La loi polonaise est compétente en l’espèce. Celle-ci admettant l’adoption d’enfants


mineurs et non majeurs, l’adoption de ces enfants est possible.

→ Convention multilatérale : La Convention de la Haye du 29 mai 1993 sur la protection


des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale.

Cette convention détermine les conditions de fond et de forme auxquelles doit satisfaire le
projet d’adoption qui sera soumis au tribunal.

Celle-ci ne s’applique toutefois que si les parties, adopté et adoptant, résident dans l’un des
Etats contractants.

Les adoptions réalisées selon la convention sont reconnues de plein droit dans les Etats
contractants, qu’il s’agisse d’une adoption simple ou plénière.

Le prononcé de l’adoption donne lieu à la délivrance d’un certificat de conformité.

L’adoption entraîne alors « la reconnaissance d’un lien de filiation entre l’enfant et ses
parents adoptifs, la responsabilité parentale des parents adoptifs à l’égard de l’enfant. Enfin
la rupture du lien préexistant de filiation entre l’enfant et sa mère et son père si l’adoption
produit cet effet dans l’Etat contractant où elle a eu lieu » (article 26 de la convention).

85
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

CHAPITRE II – LES REGIMES MATRIMONIAUX

Parmi les matières de Droit International Privé qui suscitent aujourd’hui le plus
d’interrogations dans la pratique notariale, les régimes matrimoniaux occupent une place
d’importance.

La raison en est double : le nombre croissant des mariages comportant un élément


d’extranéité et la complexité de la matière. Rares sont les notaires qui n’ont pas encore été
confrontés à un problème de droit international concernant les régimes matrimoniaux.

→ Le nombre croissant des mariages comportant des éléments d’extranéité

Le développement et la rapidité des moyens de communication, la liberté de circulation


existante dans la presque totalité de l’Europe, le besoin de trouver un emploi, ont multiplié
l’expatriation de français vers l’étranger ou au contraire les installations d’étrangers en
France. De nombreux mariages entre étrangers ou entre français et étrangers s’en sont suivis.

Les relations pécuniaires des époux ont été affectées par un élément d’extranéité tenant tantôt
à leur domicile, tantôt au pays de la situation de leurs biens, tantôt à leur nationalité.

La question de la détermination de la loi applicable à leur régime matrimonial se pose ainsi


avec une acuité particulière.

 La complexité de la matière

Celle-ci est imputable à différents facteurs.

 Le régime matrimonial est au confluent de plusieurs matières 67

- du droit des contrats, les futurs époux ayant le choix de leur régime matrimonial ;
- du droit des biens puisqu’il concerne les relations pécuniaires des époux ;
- du mariage dont il est l’un des effets ;
- de l’environnement juridique, certains pays ignorant la notion même de régime
matrimonial.

Doit-on dès lors le rattacher aux effets du mariage, à la loi du lieu de situation des biens, à
celle qui régit les actes juridiques, ou à celle choisie par les parties ?

67
Cf Juris-Classeur Form. v° Régimes matrimoniaux, Fasc. 300

86
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

 La dualité du système de conflit 68

Depuis l’entrée en vigueur en France le 1er septembre 1992 de la convention de la Haye du 14


mars 1978 en matière de régimes matrimoniaux, il faut opérer une distinction entre les époux
mariés avant le 1er septembre 1992 et qui restent soumis au système ancien de conflit et ceux
mariés après cette date auxquels la convention de la Haye est applicable.

 La diversité des systèmes juridiques en présence

L’étude des régimes matrimoniaux en droit comparé révèle que certaines législations ignorent
la notion même de régime matrimonial (pays de droit coranique, pays de common law.)
Néanmoins, par commodité de langage, on parlera de régime matrimonial et d’époux séparés
de biens alors que ces derniers sont en réalité étrangers l’un à l’autre dans leurs relations
pécuniaires. Quant aux pays auxquels la notion de régime matrimonial n’est pas étrangère,
comme les pays de droit romano-germanique, ils connaissent un régime légal parfois
plusieurs (Portugal) et des régimes conventionnels, le régime de la communauté étant le plus
répandu, qu’il s’agisse d’une communauté d’acquêts, ou de la communauté de meubles et
acquêts ou la communauté universelle comme aux Pays-Bas, voire la participation aux
acquêts (Allemagne, Suisse…).

 La diversité des rattachements

Les rattachements diffèrent d’un pays à l’autre. Certains systèmes juridiques rattachent les
régimes matrimoniaux à la loi nationale commune (Suède, Italie, Espagne…), d’autres à la loi
du domicile des époux (Brésil, Danemark, Pérou…), d’autres encore à la loi d’autonomie
(France) ou encore à la loi du lieu de situation des biens (pays de Common Law) en distinguant
entre les biens meubles et les immeubles, les premiers relevant de la loi du domicile, les
seconds de la loi du lieu de leur situation. Enfin, certains pays connaissent le principe de
l’indivisibilité du régime matrimonial (France, Italie…) alors que dans les systèmes
scissionnistes (pays de Common Law) les biens des époux peuvent être soumis à des lois
différentes.

Ainsi, la multiplication des mariages mixtes entre français et étrangers ou entre étrangers en
France ou à l’étranger, comme le mariage des français à l’étranger, alliée à la complexité de la
matière, explique la place prise par les régimes matrimoniaux en droit international privé dans
la pratique notariale.

La détermination du régime matrimonial des deux époux ne souffrira guère de difficultés


lorsque les époux auront adopté un contrat de mariage, car ils auront désigné à la fois la loi
applicable à leur régime matrimonial et celui-ci.

68
G. DROZ, E.D. DIP v° Régimes matrimoniaux

87
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Il en sera différemment lorsque les époux se seront mariés sans contrat, d’autant que depuis
l’entrée en vigueur en France de la convention de la Haye du 14 mars 1978, le système
français de conflit de loi a un caractère dualiste. Il faut en effet opérer une distinction selon
que les époux se sont mariés avant ou après l’entrée en vigueur de la convention.

Cette recherche de la loi applicable au régime matrimonial de deux époux mariés sans contrat
et de leur régime matrimonial sera le plus souvent le prélude à une demande de changement
de régime matrimonial. Au cours du mariage, en effet, les époux, pour des motifs très divers,
peuvent souhaiter changer de régime matrimonial. Les conditions de ce changement de
régime ont été considérablement assouplies par la convention de la Haye précitée, mais
l’homologation judiciaire exigée encore dans certains pays ne sera pas systématiquement
écartée.

Enfin, certaines institutions proches des régimes matrimoniaux seront soumises à une loi
différente en fonction de la qualification qui en sera donnée. Leur examen permettra de
déterminer le champ d’application de la loi applicable aux régimes matrimoniaux.

L’étude de ceux-ci en droit international privé sera divisée par conséquent en trois parties : la
détermination de la loi applicable, le changement de régime matrimonial et le domaine de la
loi applicable.

SOUS-CHAPITRE I – LA DETERMINATION DE LA LOI APPLICABLE

La question de la détermination du régime matrimonial de deux époux mariés sans contrat


s’était déjà posée dans l’Ancien droit sous la forme de conflits de coutumes. Elle avait donné
lieu à la très célèbre consultation de Charles Dumoulin faite aux époux de GANEY en 1529,
dans laquelle l’avocat parisien, dans le souci d’éviter « le fractionnement » du régime
matrimonial en raison de la pluralité des coutumes susceptibles de s’appliquer, avait proposé
de soumettre celui-ci à une coutume unique : celle du domicile des époux que ceux-ci étaient
présumés avoir adoptée.

La règle de conflit dégagée par Dumoulin, consacrée ultérieurement par la jurisprudence du


Parlement de Paris, a été reprise et systématisée au XIXème : les régimes matrimoniaux
relèveront de l’autonomie de la volonté, « la soumission des intérêts civils des époux à tel ou
tel régime dépend de leur volonté, qu’il appartient aux juges de reconnaître lorsqu’elle n’a
pas été exprimée dans un contrat de mariage » 69.

69
Cass. 4 mars 1857, S. 57-1, 247

88
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Cette règle de conflit a prévalu en France jusqu’à l’entrée en vigueur le 1er septembre 1992 de
la convention de la Haye du 14 mars 1978 en matière de régimes matrimoniaux.

Mais celle-ci n’était pas partagée par de nombreuses législations qui préféraient soumettre les
régimes matrimoniaux à la loi nationale de l’un des époux ou à la loi commune des époux, à
la loi de leur domicile ou à la loi du lieu de situation de leurs biens.

Cet « éclatement » des règles de conflit 70 et les difficultés de mise en œuvre qui en résultaient
a incité les Etats à établir une convention qui harmoniserait des règles de conflit aussi
disparates.

C’est dans ce contexte que devait être élaborée la Convention de la Haye. Elle ne pouvait dès
lors être que d’une extrême complexité. Celle-ci explique les vives critiques d’une parties des
auteurs pour lesquels il convient de la « dénoncer dans les plus brefs délais » 71 ou qui
estiment que « le droit international privé français abdique sa propre expérience pour laisser
sa place à cette sorte de volapuk juridique qui constitue aujourd’hui le droit privé
conventionnel » 72.

Ces critiques non dépourvues de fondement expliquent sans doute que la convention ne soit
entrée en application en France que quatorze ans après sa ratification et que seulement trois
pays européens (la France, les Pays-Bas et le Luxembourg) aient accepté de l’appliquer.

La convention ne s’applique toutefois qu’aux époux mariés postérieurement au 1er septembre


1992, ceux dont le mariage a été célébré avant cette date continueront de relever de la règle de
conflit traditionnelle en matière de régimes matrimoniaux patiemment élaborée par les
tribunaux.

Toutefois, l’article 21 de la convention permet aux époux mariés avant son entrée en vigueur,
de bénéficier des dispositions de celle-ci, ce qui leur permettra de changer de régime
matrimonial.

Désormais lorsqu’il s’agira de déterminer la loi applicable au régime matrimonial de deux


époux mariés sans contrat, il faudra donc opérer une distinction selon que les époux se seront
mariés avant le 1er septembre 1992 ou après cette date.

Il est à noter que parmi les autres conventions internationales ratifiées par la France en
matière de régimes matrimoniaux, seule la convention franco polonaise du 5 avril 1967 trouve
encore à s’appliquer, comme la convention franco-yougoslave du 18 mai 1971 pour la Serbie.
D’autre part, dans les pays ayant accédé à l’indépendance, les français résidant dans ces pays
restent soumis à leur loi personnelle, la loi française, tandis que les ressortissants de ces pays

70
G. DROZ, E.D. DIP précité
71
E. KERKHOVE, note sous Chambéry, 20 juin 1995, J. de DIP, p. 663
72
B. ANCEL et Y. LEQUETTE Grands arrêts de jurisprudence française de DIP, 5 ème éd. 1998

89
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

seront en France soumis à la règle de conflit française (Laos, Tunisie, Algérie, Pays d’Afrique
Noire).

SECTION I – LE MARIAGE DES EPOUX A ETE CELEBRE AVANT LE 1ER SEPTEMBRE


1992, DATE D’ENTREE EN VIGUEUR DE LA CONVENTION DE LA HAYE

La règle de conflit dégagée par Dumoulin recevra application durant le XIXème siècle et
jusqu’à l’entrée en vigueur de la convention de la Haye, que les époux aient adopté un contrat
de mariage ou se soient mariés sans contrat.

SOUS-SECTION I – LES EPOUX ONT ADOPTE UN CONTRAT DE MARIAGE

Le principe de l’autonomie de la volonté offrait aux époux un choix illimité de lois et de


régime matrimonial. Rien ne pouvait leur interdire de choisir une loi (et un régime matrimonial)
qui ne soit ni celle de la nationalité ou du domicile de l’un d’eux, ni celle de la situation de
leur immeuble, même s’il leur était recommandé de choisir la loi du lieu de la localisation de
leurs intérêts pécuniaires. Seul, l’ordre public pouvait constituer une limite à leur liberté de
choix. Mais en pratique, force était de constater que leur choix se portait toujours sur une
législation en rapport direct avec leur situation personnelle.

Généralement le régime choisi s’accompagnait de la désignation de la loi qui lui était


applicable. S’il en était différemment, des indices permettaient de la déterminer, comme la
référence à des articles du Code Civil, à certains textes de lois, le recours à des formules
propres à certaines législations, ou la nationalité du rédacteur du contrat de mariage.

Du point de vue de la forme, le contrat adopté revêtait le plus souvent celle usitée dans le pays
où l’acte était reçu. Il était fait application de la règle séculaire locus regit actum. Mais celle-
ci n’ayant qu’un caractère facultatif, il était possible de soumettre la forme du contrat à la loi
nationale commune des parties ou à une toute autre loi choisie par eux.

Quant à la publicité du contrat de mariage des époux, elle était assurée de la façon suivante :

- lorsque le mariage d’un français et d’un étranger était célébré en France, le contrat de
mariage était porté à la connaissance des tiers en France par sa mention en marge de l’acte
de mariage des époux, exigée par l’article 75 du Code Civil. Si les époux devaient se fixer
à l’étranger, le notaire devait inciter les époux à rechercher si des formalités particulières
de publicité n’étaient pas imposées par la législation des pays où ils établissaient leur

90
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

domicile après leur mariage pour qu’ils soient opposables aux tiers (inscription sur un
registre des régimes matrimoniaux en Allemagne par exemple).

- lorsque le mariage d’époux français était célébré à l’étranger, le contrat de mariage était
porté à la connaissance des tiers quand les époux demandaient la transcription de leur
mariage sur les registres du Consulat de France.

- lorsque le mariage d’époux étrangers ou français et étrangers était célébré à l’étranger, le


contrat de mariage n’était opposable aux tiers que si les époux en faisaient état lorsqu’ils
contractaient avec eux (sauf l’exception rappelée ci-dessus).

SOUS-SECTION II – LES EPOUX SE SONT MARIES SANS CONTRAT AVANT LE 1ER SEPTEMBRE
1992

L’article 21 de la convention de la Haye prévoyant que celle-ci ne s’applique qu’aux époux


mariés après son entrée en vigueur, la règle antérieure de conflit en matière de régime
matrimonial en présence d’époux mariés sans contrat, continue de s’appliquer.

Cette règle de conflit ou de rattachement repose sur le principe de l’autonomie de la volonté.


Les époux sont présumés avoir choisi la loi applicable à leur régime matrimonial et le régime
légal de cette législation. Mais en pratique, la détermination de cette loi et de ce régime n’est
pas exempte de difficultés.

§ 1- LA REGLE DE CONFLIT OU DE RATTACHEMENT

Le droit positif français soumet le statut matrimonial de deux époux mariés sans contrat avant
le 1er septembre 1992 à la loi choisie par les parties.

Comme la Cour de cassation l’a rappelé « c’est aux juges du fond qu’il appartient d’apprécier
souverainement d’après les faits et circonstances, le statut matrimonial que les époux ont eu
en se mariant la volonté commune d’adopter pour le règlement de leurs intérêts
pécuniaires » 73.

L’on ne pouvait en effet consacrer le principe de l’autonomie de la volonté et soumettre le


statut matrimonial des époux à une loi, désignée d’une façon arbitraire.

Aussi, pour déterminer cette volonté présumée des époux, les tribunaux vont devoir
rechercher certains indices, relever certaines circonstances antérieures, concomitantes voire

73
Civ. 22 avril 1958, D. 59, 460

91
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

postérieures au mariage, en faisant néanmoins du premier domicile matrimonial des époux un


indice prépondérant.

A- Un indice prépondérant : le premier domicile matrimonial

Aux termes de la jurisprudence, la volonté des époux s’exprime « notamment » ou


« principalement » ou « spécialement » dans le choix de leur premier domicile matrimonial 74
et ce domicile matrimonial est « le lieux où les époux ont eu lors du mariage la volonté de
localiser leurs intérêts pécuniaires et dont la loi régira ces intérêts » 75.

La jurisprudence n’a pas précisé la durée de ce premier domicile, mais la pratique notariale
considère qu’après deux ans de domiciliation commune d’une façon stable et effective dans le
même pays, les époux sont présumés avoir adopté le régime matrimonial légal de ce pays.

Ce premier domicile peut être établi plusieurs années après le mariage.

Exemples :

- Deux époux de nationalité différente qui se sont mariés en Allemagne en 1985 et qui
ont résidé quinze mois en Autriche avant de se fixer d’une façon stable et continue en
France, sont présumés mariés sous le régime légal français de la communauté d’acquêts.

- Deux époux portugais qui se sont mariés au Portugal en 1983 et qui sont allés s’établir
quelques semaines plus tard à Londres, sont présumés mariés sous le régime légal
anglais de la séparation des biens.

- Deux époux de nationalité différente qui se sont mariés à Oslo en 1980, puis se sont
installés durablement en France après leur mariage avant de s’établir en Autriche, se
trouvent mariés sous le régime légal français de la communauté d’acquêts.

- Deux époux algériens qui se sont mariés à Alger en 1980 et qui sont venus s’établir en
France cinq ans après leur mariage, se trouvent mariés sous le régime coranique selon la
forme musulmane et doivent en conséquence être considérés comme séparés de biens.

- Deux époux musulmans se sont mariés avant l’indépendance de l’Algérie (1er janvier
1963) dans ce pays devant le cadi. Ils se sont fixés en France en 1965 et ont pris la
nationalité française. Sous quel régime matrimonial sont-ils mariés ?

74
Cass. Civ. 2 décembre 1997, D. 98, IR 20 – JCP 98, IV, 1124 ; Cass. Civ. 4 janvier 1956, Rev. crit. DIP 1956,
p. 99, note BATIFFOL ; 22 avril 1958, 26 février 1953, etc.
75
Cass. Civ. 5 avril 1978, Bull. Civ. I, n° 146, JDI 1979, 140, note JF KAHN

92
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Malgré leur établissement en France, les relations pécuniaires de ces époux relèvent de
la loi coranique, auraient-il prix la nationalité française et ceux-ci doivent être
considérés comme séparés de biens. Il en était déjà ainsi avant l’indépendance de
l’Algérie.

Il en serait de même si le mariage de ces époux avait été célébré devant l’officier de
l’Etat civil français en Algérie (article 3 du décret du 17 septembre 1959) 76.

Cette prépondérance reconnue à l’indice du premier domicile matrimonial stable (au moins
deux ans) se présente en pratique comme une véritable présomption de droit, mais il ne s’agit
pas d’une présomption irréfragable. Celle-ci supportera la preuve contraire, chaque fois
notamment que les circonstances entourant le mariage laisseront supposer que les époux n’ont
pas entendu se soumettre à la loi de leur premier domicile matrimonial et au régime légal de
cette législation.

D’autres indices seront retenus par les tribunaux qui viendront tantôt conforter la présomption
en faveur de la loi du premier domicile matrimonial tantôt l’écarter lorsque celui-ci est
indéterminable ou ne correspond pas à la réalité.

B- Les indices subsidiaires

Ces indices seront le plus souvent insuffisants pour déterminer la loi régissant le régime
matrimonial des époux. Mais ils viendront confirmer que le souhait des époux était de
soumettre leurs intérêts pécuniaires à la loi de leur premier domicile matrimonial.

 Le lieu de la célébration du mariage

Le lieu de célébration du mariage n’est retenu que s’il coïncide avec le lieu de domiciliation
des époux après le mariage 77.

On ne rencontrera de véritables difficultés que lorsque des époux étrangers de même


nationalité se seront mariés au consulat de leur pays d’origine en France, la célébration de leur
mariage devant l’autorité consulaire dont ils relèvent pouvant laisser penser qu’ils ont entendu
placer leur régime matrimonial sous l’empire de leur loi personnelle.

Mais la Cour de cassation 78 devait, non sans hésitation, décider que la seule célébration
devant le consul était insuffisante pour déduire que l’intention des époux était de soumettre
leur régime matrimonial à leur loi nationale 79.

76
Cf Cahiers Cridon-Lyon 1996, n° 17, p. 15 ets.
77
Cf E.D. n° 16
78
Cass. 19 janvier 1954, Bull. Civ. I, n° 27
79
Cass. 5 avril 1978, JCP G 80, IV, 124

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Exemple : Deux époux italiens qui se sont mariés devant le consul d’Italie en France et qui se
sont fixés en France après leur mariage célébré en 1985, sont présumés mariés sous le régime
légal français de la communauté d’acquêts.

 La nationalité commune

Comme la célébration du mariage devant le consul du pays dont les époux sont ressortissants,
la nationalité commune n’est jamais suffisante pour présumer que les époux ont voulu
soumettre leurs relations patrimoniales à leur loi nationale, hormis l’hypothèse où les époux
auraient été animés d’un « esprit de retour ». Encore faudra-t-il que d’autres indices
corroborent cet esprit de retour : lieu du mariage, retours périodiques dans le pays d’origine,
localisation dans ce même pays de leurs intérêts pécuniaires, installation à l’étranger pour des
raisons essentiellement professionnelles.

Exemple : Deux époux italiens se sont mariés en France en 1990 au consulat d’Italie. Le
mari ingénieur dans une entreprise en Italie a été muté en France après son mariage. Les
époux retournaient régulièrement en Italie lors de leurs congés et y avaient acquis des
immeubles. Quel est leur régime matrimonial ?

Ce sont des raisons professionnelles qui ont conduit les époux à se fixer en France après
leur mariage, leur intention était de s’établir ensuite en Italie. Dès lors, ces époux sont
mariés sous le régime légal italien de la communauté d’acquêts. Le retour des époux
dans leur pays d’origine, la localisation de leurs intérêts pécuniaires sont autant
d’indices qui viennent corroborés l’indice de la nationalité commune, qui ne peut être
retenue isolément.

 La localisation des intérêts pécuniaires des époux

L’acquisition de biens mobiliers, immobiliers, l’exercice d’une profession, la création d’un


fonds de commerce, d’une entreprise industrielle ou artisanale l’acquisition d’une entreprise
agricole dans un pays déterminé, laissent présumer que les époux ont entendu soumettre leurs
intérêts matériels à la loi du lieu de l’exercice de leur activité ou de la situation de leurs biens.

Ces circonstances postérieures au mariage ne doivent néanmoins être retenues que si elles
confirment l’intention des époux, au moment de leur mariage d’établir leur domicile
matrimonial au lieu de la situation de leurs intérêts pécuniaires. Cet indice sera écarté s’il
exprime la volonté des époux de se soumettre à un régime matrimonial autre que celui choisi
au moment du mariage.

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CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Exemple : Un français a épousé une espagnole en Italie en 1983. Après leur mariage,
compte tenu de l’activité du mari, les époux ont vécu successivement un an en Italie,
deux ans en Grande Bretagne, trois ans en Allemagne. Ils se sont aujourd’hui établis
définitivement en France où les époux avaient acquis deux immeubles dont une maison
d’habitation dans laquelle ils passaient régulièrement leurs vacances avec leurs enfants.
Si le changement successif de résidence rend la détermination du régime matrimonial
difficile, il est possible de considérer que les époux ont eu au moment de leur mariage
l’intention de s’établir en France, pays dont le mari est ressortissant, les époux y ayant
localisés leurs intérêts matériels, même si ces époux ont résidé deux ans en Grande
Bretagne et trois ans en Allemagne.

Ainsi, lorsque les époux auront fixé leurs intérêts pécuniaires dans un pays autre que celui de
leur premier établissement, d’autres indices comme la nationalité des époux, leur retour
fréquent dans leur pays d’origine, le lieu voire la forme de la célébration de leur mariage
peuvent laisser présumer que les époux n’ont pas entendu soumettre leur régime matrimonial
à la loi de leur premier domicile matrimonial.

 Les actes notariés

Lorsqu’après leur mariage les époux viennent à contracter, il n’est pas rare que ceux-ci
déclarent dans l’acte notarié qu’ils ont adopté tel régime matrimonial. Des décisions ont
admis à plusieurs reprises ou tenu compte de déclarations ainsi faites par les époux 80.

Toutefois, ces déclarations ne peuvent être retenues que si elles suivent de très près le mariage
(la Cour de Paris 81 a refusé de tenir compte d’une déclaration dans un acte notarié faite dix ans après
le mariage allant à l’encontre de l’application de la loi du premier domicile matrimonial) et viennent
corroborer avec d’autres indices la volonté des époux de se soumettre à un régime
matrimonial légal précis. Il s’agit là d’éviter que les époux puissent changer de régime
matrimonial sans respecter le formalisme qui y est attaché. La Cour de cassation dans un arrêt
du 13 décembre 1997 82 devait d’ailleurs rappeler que la détermination de la loi applicable au
régime matrimonial de deux époux mariés sans contrat doit s’effectuer « principalement » en
considération de la fixation de leur premier domicile matrimonial.

Ces précisions étant apportées, la règle de conflit française en matière de détermination du


régime matrimonial de deux époux mariés sans contrat avant le 1er septembre 1992 peut
s’énoncer de la façon suivante.

80
Cass. 1ère Civ. 27 janvier 1969, JDI 1969, p. 644, note PONSARD ; Cass. Civ. 9 octobre 1991, JCP N 92, p. 177
et G. 1992, II, 21873, note KERKHOVE
81
Cass. Civ. 1ère, 9 octobre 1991, Rev. crit. DIP 92 ; 479, note KAIRALALH, Defrénois 1992, 35, note REVILLARD
82
Cass. Civ. 1ère, 2 décembre 1997, D 98, IR 20

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En droit international privé français, deux époux mariés sans contrat avant le 1er septembre
1992, date d’entrée en vigueur en France de la convention de la Haye du 14 mars 1978 en
matière de régimes matrimoniaux, sont présumés avoir soumis leur régime matrimonial à la
loi du pays où ils ont fixé leur premier domicile matrimonial stable (au moins deux ans) et
adopté le régime matrimonial légal de cette législation, présomption qui supporte toutefois la
preuve contraire (qui peut être rapportée par divers indices), notamment lorsque les époux ont
entendu localiser leurs intérêts pécuniaires dans un pays autre que celui de leur premier
établissement.

§ 2- LES PROBLEMES PRATIQUES DE MISE EN ŒUVRE DE LA REGLE DE CONFLIT

La règle de conflit telle que nous venons de l’énoncer n’est pas sans avantage : empreinte
d’une très grande souplesse, elle n’impose pas aux époux de soumettre leurs relations
patrimoniales à une législation particulière, elle leur laisse le choix de cette législation en
soumettant leurs intérêts pécuniaires à la loi du pays où ils entendent se fixer d’une façon
stable et facilite leurs relations juridiques.

Mais force est d’admettre que, dans certaines situations, il sera quasiment impossible aux
époux de connaître la loi qui régit leur statut matrimonial ; d’autre part, la règle de conflit
mettra parfois en œuvre le mécanisme du renvoi ; enfin, elle privera les époux qui ont rompu
tout lien juridique avec le pays de leur premier domicile matrimonial de changer de loi et
d’adopter un régime matrimonial.

A- Les actions déclaratoires

En cas de changements successifs de domicile, en l’absence de localisation des intérêts


pécuniaires dans un pays déterminé, de nationalité commune des époux…, la règle de conflit
traditionnelle française ne permet pas de déterminer avec certitude le régime matrimonial de
deux époux mariés sans contrat de mariage. Quel est par exemple le régime matrimonial d’un
diplomate, d’un militaire, d’un salarié travaillant dans une multinationale et qui a changé
plusieurs fois de domicile ?

En pareille hypothèse, le tribunal de grande instance de Paris avait admis que soit introduite
une action déclaratoire par les époux ayant pour finalité de déterminer la loi applicable à leur
régime matrimonial lorsqu’ils étaient mariés sans contrat 83. L’action était dirigée contre le
Ministère public. Mais son opposabilité aux tiers était néanmoins contestée 84.

83
TGI Paris 21 juin 1970, JDI 1971, p. 566 ; CA Paris 12 juillet 1972, JDI 72, p. 855 – TGI Paris 26 février
1986, JDI 88, p. 420 ; DROZ « L’action déclarative en détermination de la loi applicable au régime matrimonial
légal » J. Not. 1972, art. 50357
84
MALAURIE note sous CA Paris, 21 janvier 1970, Def. 72, art. 30020, contra Eric KERKHOVE, Juris-Classeur
Formulaire v° Régimes matrimoniaux, Fasc. 300, n° 36 et 37

96
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Une telle jurisprudence a perdu tout son intérêt depuis l’entrée en vigueur de la convention de
la Haye, car celle-ci permet aux époux de déclarer dans un acte notarié la loi applicable à leur
régime matrimonial, qu’ils soient mariés avant ou après l’entrée en vigueur de la convention
(articles 6 et 21 de la convention).

Ainsi, deux époux de nationalité différente, mariés en 1988, qui ont vécu successivement dans
plusieurs pays sans y résider plus de deux ans d’une façon stable et effective en raison de
l’activité professionnelle de l’un des époux, par exemple, vont pouvoir préciser la loi
applicable à leur régime matrimonial par voie de déclaration expresse dans un acte notarié
ayant la forme du contrat de mariage sans homologation judiciaire (cf infra) sans qu’il soit
nécessaire de recourir aux actions déclaratoires.

B- Le renvoi

En droit international privé le renvoi suppose que la règle de conflit française donne
compétence à un ordre juridique étranger dont la règle de conflit décline sa compétence au
profit de la loi française ou au profit d’une loi tierce.

Admis pour la première fois en matière de succession 85 la question s’est posée de son
admission également en matière de régimes matrimoniaux.

Exemple : Deux époux français se sont mariés en 1980 en Italie où ils ont établi leur
premier domicile matrimonial. Ces époux domiciliés en Italie sont-ils soumis au régime
matrimonial légal italien ou au contraire au régime légal français, la règle de conflit
italienne donnant compétence à la loi nationale du mari, la loi française en l’espèce.

Dans le célèbre arrêt GOUTHERTZ 86 du 1er février 1972 et LARDANS 85, le renvoi fut rejeté
motif pris que « le choix du régime matrimonial dépendant de la volonté expresse ou implicite
des époux, ceux-ci n’ont pu se référer qu’à la loi interne (étrangère) à l’exclusion des règles
(étrangères) de conflit de lois dont la Cour d’appel déclare qu’il n’est pas raisonnable de
penser qu’ils aient soupçonné l’existence ».

Le renvoi étant exclu en matière de régime matrimonial, les deux époux dans l’exemple
proposé sont mariés sous le régime légal italien.

85
Affaire FORGO (cf infra)
86
Rev. crit. DIP 1972, p. 644, note WIEDERKEHR, JDI 72, p. 504, note KAHN, Defrénois 72, art. 30159, p. 1003,
note MALAURIE ; Cass. Civ. 1ère, 27 janvier 1969, Def. 70, art. 29731 ; Cass. Civ. 3 décembre 1991, SIBONI, JCP
92 N II, p. 358, note KERKHOVE

97
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Ainsi, le fondement du rejet du renvoi en matière de régime matrimonial est clair : le choix du
régime matrimonial appartient aux époux (principe de l’autonomie de la volonté), admettre le
renvoi serait contraire à leur choix ce qui serait illogique 87.

C- La permanence de la loi applicable

Sous jacent à la règle de la permanence du rattachement, on ne peut occulter le principe de


l’indivisibilité du régime matrimonial, selon lequel la loi choisie par les époux régit
l’ensemble de leurs relations pécuniaires quelque soit le lieu de situation de leurs biens (mais
la convention de la Haye du 14 mars 1978 a remis en cause ce principe – cf infra).

1- Le principe

En droit international privé, le régime matrimonial choisi par les époux est définitivement fixé
au moment du mariage. Aucune circonstance ultérieure, tel un changement de nationalité ou
de domicile, ne peut influer sur le régime matrimonial des époux. C’est ce que l’on appelle en
droit international privé la permanence du rattachement.

Exemple : Deux époux espagnols se sont mariés à Madrid en 1980 où ils se sont établis
après leur mariage. Trois ans plus tard, ils fixent en France leur domicile et prennent la
nationalité française. Ces époux mariés sans contrat en Espagne à Madrid où ils se sont
établis de façon stable et effective, sont présumés mariés sous le régime légal espagnol
de la communauté d’acquêts.

Cette règle est très contraignante lorsque les époux n’ont conservé aucun lien avec leur pays
d’origine ou ont perdu leur nationalité initiale, voire localiser leurs intérêts pécuniaires dans
un autre pays.

Aussi la convention de la Haye est-elle venue remédier à cette situation en offrant aux époux
mariés avant l’entrée en vigueur de la convention la possibilité de changer de loi et de régime
et d’adopter notamment la loi de leur domicile, ou la loi de leur résidence (cf infra).

2- Exception

Le principe de la permanence du rattachement comporte néanmoins une exception notable


lorsque le contenu de la loi interne étrangère a évolué, lorsque le régime matrimonial légal de
la législation étrangère a été modifié.

87
Cf Audit Dt Economica 2000, n° 849 et E. KERKHOVE préc. n° 55

98
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Pour prendre des exemples récents, l’Italie a modifié son régime matrimonial en 1975 (article
228 de la loi italienne du 19 mai 1975) la communauté d’acquêts s’étant substituée à la
séparation des biens ; la Suisse a substitué au régime de l’union des biens à compter du 1er
janvier 1988 la participation aux acquêts (loi Suisse du 5 octobre 1984), la Belgique en 1976 a
adopté la communauté d’acquêts et la Turquie après le 1er janvier 2002, la communauté
d’acquêts avec possibilité dans le délai d’un an de déclarer vouloir conserver le régime légal
antérieur (séparation des biens).

En ce qui concerne par exemple les époux mariés avant le 1er janvier 1978 sous le régime
suisse de l’union des biens ou avant le 20 septembre 1975, date d’entrée en vigueur de la loi
du 19 mai 1975, sous le régime italien de la séparation de biens, fallait-il tenir compte des
modifications de la loi interne étrangère qui leur était applicable.

Faisant application du principe selon lequel le droit étranger doit être appliqué en tenant
compte de ses propres règles de droit transitoire 88, la jurisprudence avec l’appui de la
doctrine a estimé qu’il y avait lieu de tenir compte des modifications intervenues dans la loi
étrangère régissant le régime matrimonial des époux 89.

Les dispositions de fond de la loi nouvelle, comme ses dispositions transitoires sont
applicables aux époux mariés sous la législation étrangère antérieure.

Exemple : Deux époux italiens se sont mariés à Rome en 1965 et y ont vécu pendant
huit ans. Sous quel régime matrimonial, ceux-ci se trouvent-ils mariés sachant que
plusieurs années après leur mariage ceux-ci sont venus s’établir en France.

Les époux qui se sont fixés en Italie après leur mariage étaient mariés sous le régime
légal italien jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi du 19 mai 1975 le 20 septembre 1975,
qui a substitué au régime de la séparation des biens le régime de la communauté
d’acquêts.

Les époux n’ayant pas par ailleurs opté pour le maintien de leur régime matrimonial
antérieur avant le 15 janvier 1978 se trouvent mariés sous le nouveau régime légal
italien de la communauté depuis le 20 septembre 1975. Mais ce changement de régime
consécutif à la loi nouvelle n’a pas d’effet rétroactif.

Exemple : Deux époux français se sont établis en Suisse immédiatement après leur
mariage célébré en 1980. Sous quel régime matrimonial se trouvent-ils mariés.

Depuis le 1er janvier 1988 la Suisse a substitué au régime légal de l’union des biens la
participation aux acquêts. Tous les époux mariés sous l’ancien régime légal suisse se

88
Audit op. cit. n° 298 et 852
89
Paris 2 juillet 1954, Rev. crit. DIP 1954, 810, note BATIFFOL, CA Aix en Provence 22 mars 1955, Rev. crit. de
DIP 56, 274, note YL

99
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trouvent mariés aujourd’hui sous le régime de la participation aux acquêts, la loi


nouvelle ayant un effet rétroactif.

→ L’exception de l’exception : la théorie de la pétrification

Si l’on doit tenir compte des évolutions de la loi interne étrangère et de ses dispositions
transitoires pour la détermination du régime matrimonial des époux, celui-ci se trouvera dans
certains cas « pétrifié » et régi par le droit antérieur qui était applicable.

En effet, il a été admis en jurisprudence qu’en cas de changement du contenu de la loi interne
étrangère et du régime matrimonial légal, la nouvelle législation est inopposable aux réfugiés,
car ceux-ci ont perdu tout lien avec la législation nouvellement applicable 90.

Exemple : Deux époux roumains se sont mariés en 1940 à Bucarest. Dès la fin de la
guerre, ces époux ont quitté ce pays et sont venus s’établir en France où ils ont pris la
qualité de réfugiés.

Le régime de la communauté d’acquêts qui s’est substitué au régime légal de la


séparation des biens en Roumanie après leur départ ne leur est pas applicable.

Comme on l’a fait remarquer 91, cette jurisprudence concorde avec la convention de Genève
du 28 juillet 1951 relative aux réfugiés qui dispose que ceux-ci conservent leurs droits
découlant de leur statut personnel et ne sont pas concernés par la modification législative
intervenue après l’obtention du statut de réfugié. C’est ainsi que l’on a pu écrire que l’arrêt
GOUTHERTZ (précité) qui a consacré le rejet du renvoi en matière de régimes matrimoniaux « a
pérennisé l’empire des Tsars ».

SECTION II – LE MARIAGE DES EPOUX EST POSTERIEUR A L’ENTREE EN VIGUEUR DE


LA CONVENTION DE LA HAYE DU 14 MARS 1978

La convention de la Haye du 14 mars 1978 sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux
entrée en vigueur en France le 1er septembre 1992, vient modifier sensiblement la règle
antérieure de conflit française en matière de régimes matrimoniaux, règle de conflit qui n’était
pas partagée par tous les systèmes juridiques étrangers.

90
CA Fort-de-France 21 juin 1962, Rev. crit. DIP 1963, note DROZ ; CA Paris 18 avril 1966, Rev. crit. 1967, p.
323, note PATARIN
91
Juris-Classeur Int. Fasc. 556, Contrat de mariage, Fasc. 20

100
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Ayant pour finalité d’unifier les règles de conflit des pays auxquels la notion même de régime
matrimonial n’est pas étrangère et de tenir compte des droits des pays de Common Law, elle
se présente comme un compromis qui ne pouvait être que d’une extrême complexité.

Alors qu’auparavant la loi applicable en matière de régime matrimonial n’était désignée que
par un point de rattachement : la volonté commune des époux, la convention reconnaît
plusieurs éléments de rattachement, la résidence des époux, la nationalité commune, dans le
souci de rechercher la loi la mieux adaptée aux relations patrimoniales des époux en tenant
compte des diverses situations susceptibles de se présenter.

Néanmoins, la convention de la Haye dans son article 3 alinéa 1 er fait encore de la volonté des
époux un élément déterminant de la loi applicable puisque elle dispose que « le régime
matrimonial est soumis à la loi interne désignée par les époux au moment du mariage » et
laisse aux époux le choix de la loi applicable à leur régime matrimonial au cours de leur
mariage (article 6 de la convention).

Avant d’examiner les dispositions de la convention, il est important de souligner son caractère
universel qui résulte de son article 2 : « la convention s’applique même si la nationalité, ou la
résidence habituelle des époux, ou la loi applicable en vertu des articles ci-dessous ne sont
pas celles d’un Etat contractant ».

Cela signifie en clair que lorsqu’il s’agira en France ou dans un Etat contractant de déterminer
le régime matrimonial d’époux de même nationalité étrangère ou de nationalité étrangère
différente ou de nationalité française et étrangère, voire de même nationalité française, mariés
en France ou à l’étranger, établis en France ou à l’étranger, à l’occasion d’un acte juridique
quelconque, il faudra faire application de la convention de la Haye.

SOUS-SECTION I – LA DETERMINATION DE LA LOI APPLICABLE AU REGIME MATRIMONIAL


LORS DU MARIAGE

Depuis l’entrée en vigueur de la convention de la Haye du 1er septembre 1992, les époux
n’ont plus une totale liberté dans le choix de la loi applicable à leur régime matrimonial. Cette
liberté de choix est limitée. Mais les lois susceptibles d’être choisies auront un lien direct avec
la situation des époux. La convention s’est voulue réaliste. En effet, sous l’ancien système qui
a prévalu jusqu’à l’entrée en vigueur de la convention, les époux ne se sont jamais placés sous
une législation avec laquelle ils n’avaient aucune attache.

La désignation de la loi applicable à leur régime matrimonial par les époux obéit à un certain
formalisme dont il conviendra de faire état avant d’envisager la publicité du régime
matrimonial des époux choisi par eux au moment de leur mariage.

101
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

§ 1- LE CHOIX DE LA LOI REGISSANT LE REGIME MATRIMONIAL DES EPOUX AU MOMENT DU


MARIAGE

Aux termes de l’article 3 alinéa 1er de la convention « le régime matrimonial est soumis à la
loi interne désignée par les époux avant le mariage ». Le texte consacre ainsi le principe de
l’autonomie de la volonté admis par la doctrine et la jurisprudence française.

Mais la liberté de choix des époux n’est pas totale. Les futurs époux ne peuvent choisir que
l’une des lois suivantes :

- la loi d’un Etat dont l’un des époux a la nationalité au moment de cette désignation (si l’un
des époux a plusieurs nationalités celui-ci pourra à sa convenance choisir l’une des lois
nationales) ;

- la loi de l’Etat sur le territoire duquel l’un des époux a sa résidence habituelle au moment
de cette désignation ;

- la loi du premier Etat sur le territoire duquel l’un des époux établira une nouvelle
résidence habituelle après le mariage.

Ce sont ainsi six lois qui sont susceptibles d’être retenues par les époux pour régir leurs
relations patrimoniales.

Une septième loi s’offre encore à eux : les époux peuvent soumettre en totalité ou en partie
leurs immeubles, mais seulement ceux qui ont cette qualification juridique (et non leurs biens
meubles), à la loi du lieu de leur situation. Les époux « peuvent désigner en ce qui concerne
les immeubles ou certains d’entre eux, la loi où ces immeubles sont situés » (article 3 dernier
alinéa de la convention).

Cette disposition a été prise en faveur des pays de Common Law dont la règle de conflit
donne compétence à la loi réelle. Mais cette disposition sera source de difficultés lorsqu’il
s’agira de liquider le régime matrimonial des époux, car tous les biens des époux ne seront
pas soumis à un régime matrimonial unique.

L’article 3 dernier alinéa de la convention ne permet pas néanmoins aux futurs époux qui ont
des immeubles dans des pays différents de les soumettre à la loi de la situation de l’un d’entre
eux seulement. En revanche, ils pourront décider que les immeubles qui seront ultérieurement
acquis par eux seront soumis à la loi de leur situation.

Après avoir choisi l’une des lois permises par la convention, les futurs époux pourront opter
pour le régime légal ou l’un des régimes conventionnels de la législation désignée.

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CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Les futurs époux doivent néanmoins être informés que le régime matrimonial choisi par eux
sera inefficace dans un pays qui ne le pratique pas. Aussi il serait inutile à deux futurs époux
dont l’un est roumain de soumettre les immeubles qu’il viendrait à acquérir en Roumanie au
régime de la participation aux acquêts, ce pays ne connaissant aujourd’hui encore que la
société d’acquêts. De même, il serait vain de conseiller à des futurs époux dont l’un est
allemand ou italien ou ressortissant d’un pays musulman d’adopter la communauté
universelle avec clause d’attribution de la communauté au survivant, le droit allemand, italien
ou musulman prohibant ce type de convention.

Exemple : Deux futurs époux, l’un français (le mari) l’autre suisse (la femme) peuvent
soumettre leur régime matrimonial, soit à la loi française, loi nationale du mari, soit à la
loi suisse, loi nationale de l’épouse. Mais ils pourraient également le soumettre à la loi
allemande si l’un des époux après le mariage établissait sa première résidence habituelle
dans ce pays.

Si l’épouse possède des biens immobiliers en Suisse, le époux pourront convenir que
ces immeubles seront soumis à la loi suisse et au régime légal de ce pays, la
participation aux acquêts. Mais ces époux ne peuvent soumettre les immeubles qu’ils
possèdent dans d’autres pays au régime légal suisse.

§ 2- LE FORMALISME DE LA DESIGNATION DE LA LOI APPLICABLE

L’article 11 de la convention prévoit que « la désignation de la loi applicable doit faire


l’objet d’une stipulation expresse ou résulter indubitablement d’un contrat de mariage ».

Ainsi, la convention offre aux époux deux possibilités, soit établir un contrat de mariage, soit
désigner la loi applicable au régime matrimonial.

A- L’établissement d’un contrat de mariage

« Celui-ci devra toujours faire l’objet d’un écrit daté et signé par les deux époux. Il ne sera
valable en la forme que si celui-ci répond, soit à la loi interne applicable au régime
matrimonial, soit à la loi interne en vigueur au lieu où le contrat est passé » (article 12). Si par
conséquent le contrat est reçu en France et si les futurs époux ont désigné la loi française, le
contrat de mariage sera valable s’il revêt la forme authentique du droit français. En revanche,
si la loi désignée n’exige pas la forme authentique, le contrat de mariage pourra revêtir la
forme sous seing privé. Le recours a un notaire ne sera pas nécessaire.

103
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Ainsi, des futurs époux qui soumettraient leur régime matrimonial à la loi britannique
pourront recourir en la forme sous seing privé admise en droit britannique 92. Il en est de
même en cas de choix de la loi néerlandaise, suédoise, norvégienne, danoise…

B- La stipulation expresse

La désignation par stipulation expresse de la loi applicable doit revêtir la forme prescrite pour
les contrats de mariage, c'est-à-dire, soit par la loi interne désignée, soit par la loi du lieu où
intervient cette désignation (cf supra).

Cette déclaration expresse doit faire l’objet d’un écrit daté et signé par les deux futurs époux
(article 13 de la convention de la Haye).

Ce formalisme est destiné à éviter toute contestation sur le choix des époux. Mais en pratique,
il risque de conduire les époux à adopter systématiquement un contrat de mariage. En effet, si
les époux se soumettent par déclaration expresse à la loi française, le notaire français chargé
de recevoir la déclaration proposera le plus souvent aux futurs époux d’adopter un contrat de
mariage.

Une fois désignée, la loi applicable à leur régime matrimonial par contrat de mariage ou
stipulation expresse, les futurs époux peuvent désigner un régime matrimonial de leur choix,
connu de la législation sous laquelle ils ont entendu se placer.

En l’absence de désignation du régime choisi, les époux seront présumés mariés sous le
régime légal de la législation désignée.

Certaines législations étrangères offrent aux futurs époux la possibilité de choisir entre
plusieurs régimes matrimoniaux lors de la célébration de leur mariage, devant l’officier de
l’Etat civil (Sénégal, Madagascar, Mexique, Côte d’Ivoire…). Les époux se trouveront alors
mariés sous le régime choisi qui sera mentionné dans l’acte de mariage, à la condition d’avoir
été signé par les deux époux.

Exemple : Monsieur X de nationalité sénégalaise a épousé à Dakar Mademoiselle Y de


nationalité française. Devant l’officier de l’Etat civil, ils ont opté pour le régime de
participation aux meubles et acquêts. Quelques mois après leur mariage ils se sont
établis en France. Sous quel régime matrimonial sont-ils mariés ?

Au Sénégal, les futurs époux ont le choix entre trois régimes matrimoniaux, la
séparation des biens, le régime dotal et le régime de la participation aux meubles et
acquêts. Seuls peuvent être choisis le régime dotal et la séparation des biens en cas de

92
Cf ED précité n° 122

104
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

mariage polygamique. Les époux ayant opté pour le régime de la participation aux
meubles et acquêts lors de leur mariage devant l’officier de l’Etat civil, seront
considérés en France comme mariés sous ce régime aussi longtemps qu’ils n’auront pas
changé de régime matrimonial.

→ Quelques difficultés rencontrées dans la pratique notariale

Lors de la déclaration de la loi applicable et du régime matrimonial par contrat de mariage


voire par stipulation expresse, la pratique notariale s’interroge souvent sur les points de savoir
si elle peut recevoir un contrat de mariage pour un époux dont le titre de séjour n’est pas
régulier et si le contrat peut être reçu par procuration.

- Titre de séjour irrégulier : Un notaire français appelé à recevoir un contrat de mariage par
des étrangers n’a pas à vérifier la régularité du titre de séjour des futurs époux. Il en est de
même de l’officier de l’Etat civil.

- Contrat de mariage par procuration : Un ressortissant français doit épouser une russe à
Paris. Les futurs époux ont décidé d’adopter par contrat de mariage reçu devant un notaire
français le régime de la séparation des biens. L’épouse ne pourra être présente à la signature
du contrat. Celui-ci peut-il être reçu par procuration.

L’article 1394 alinéa 1er du Code Civil prévoit la possibilité pour un futur époux de se faire
représenter par un mandataire. Mais le mandat doit être spécial, c’est à dire reprendre
l’intégralité des dispositions devant figurer dans le contrat de mariage. C’est à l’occasion de
l’établissement de cette procuration que sera dispensé le devoir de conseil du notaire ou de
l’agent diplomatique ou consulaire français à l’étranger compétent pour recevoir des actes
notariés pour les français mais aussi pour des étrangers lorsque ces actes sont destinés à être
utilisés en France (sur la compétence des agents diplomatiques ou consulaires français à l’étranger –
cf infra).

Dans l’hypothèse précédente, le notaire français adressera un modèle de procuration,


reprenant toutes les dispositions du contrat de mariage, au consul de France compétent qui a
les attributions d’un notaire français. Celui-ci expliquera à la future épouse le contenu du
contrat et après signature de la procuration, la retournera au notaire français appelé à recevoir
le contrat de mariage.

§ 3- LA PUBLICITE DU REGIME MATRIMONIAL DES EPOUX LORS DU MARIAGE

La loi du 28 octobre 1997, modifiant le Code Civil pour l’adapter aux stipulations de la
convention de la Haye sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux, organise les formalités
de publicité et d’opposabilité aux tiers de la loi applicable et du régime matrimonial désigné
par les époux.

105
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Il faut distinguer par conséquent selon que les époux ont fait un contrat de mariage ou déclaré
la loi applicable à leur régime matrimonial.

A- Les futurs époux ont établi un contrat de mariage

Une nouvelle distinction doit être opérée selon que le mariage des époux est célébré en France
ou à l’étranger.

1- Le mariage a été célébré en France

L’article 75 du Code Civil fait obligation aux futurs époux de déclarer à l’officier de l’état
civil s’ils ont fait un contrat de mariage et dans l’affirmative la date du contrat ainsi que le
nom et la résidence du notaire qui l’a reçu. La déclaration est mentionnée dans l’acte de
mariage (article 76-8°du Code civil). Cette déclaration repose sur le certificat du notaire
rédacteur, établi conformément à l’article 1394 aliéna 2 du Code civil.

Si le contrat de mariage a été reçu à l’étranger et le mariage célébré en France et s’il n’est pas
possible de fournir un certificat semblable à celui prévu à l’article 1394 alinéa 2, l’officier de
l’Etat civil s’en tiendra à la déclaration des parties.

Ces dispositions s’appliquent à tous les futurs époux qui se marient en France en adoptant un
contrat de mariage, mais également aux époux dont le mariage est célébré devant des agents
diplomatiques ou consulaires français à l’étranger.

2- Le mariage a été célébré à l’étranger

 Le mariage a été célébré au consulat de France

Dans cette hypothèse, lors de la transcription du mariage sur les registres du consulat, la
mention de l’existence du contrat de mariage sera apposée sur justificatif en marge de l’acte
de mariage.

 Le mariage a été célébré à l’étranger et le contrat de mariage reçu à l’étranger

Si le contrat de mariage n’a pas été mentionné sur l’acte de mariage, le consul est alors
habilité à mentionner sur justificatif le contrat de mariage lors de la transcription du mariage
sur les registres du consulat.

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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

La publicité des contrats de mariage est organisée dans de nombreux pays, le plus souvent
sous la forme d’une inscription sur des registres matrimoniaux (Portugal, Pays-Bas, Suède,
Danemark, Turquie, Allemagne) ou au tribunal du domicile du mari (Finlande) et en cas de
changement de domicile sur les registres du nouveau domicile.

Aussi, lorsqu’un notaire reçoit en France un contrat de mariage pour des époux qui vont se
fixer à l’étranger, doit-il les inciter à rechercher si dans le pays de leur établissement une
publicité des régimes matrimoniaux est organisée pour les rendre opposables au tiers.

Exemple : Deux époux, l’un français l’autre allemand, se sont mariés en France après
avoir fait un contrat de mariage. Les époux vont s’établir en Allemagne.

L’Allemagne comme d’autres pays prescrit l’inscription du contrat de mariage sur un


registre prévu à cet effet. Le contrat de mariage des époux devra donc être mentionné au
registre des régimes matrimoniaux du Tribunal d’Instance de leur domicile (article 1558
du BCB) pour être opposable aux tiers en Allemagne seulement.

S’ils viennent à changer de domicile, une nouvelle inscription sur les registres des
régimes matrimoniaux sera requise auprès du tribunal d’instance de leur nouveau
domicile.

Quant au notaire français appelé à recevoir un acte pour des époux étrangers mariés à
l’étranger, il devra se faire remettre par les époux qui déclarent avoir adopté un régime
matrimonial une copie de ce contrat de mariage pour pouvoir leur préciser le sort du bien
qu’ils acquerront à titre gratuit ou onéreux ou consulter l’acte de mariage étranger si la loi
étrangère permet de désigner le régime matrimonial légal ou conventionnel dans l’acte de
mariage.

Le contrat de mariage reçu à l’étranger dans les formes prévues par la loi locale est applicable
en France en dehors de toute procédure 93.

B- Les futurs époux ont désigné la loi applicable à leur régime matrimonial

L’article 76 du Code Civil dans son neuvième alinéa énumère les mentions qui doivent être
portées sur l’acte de mariage et prévoit que celui-ci devra faire état « s’il y a lieu de la
déclaration qu’il a été fait un acte de désignation de la loi applicable… ainsi que la date et le
lieu de la signature de cet acte et le cas échéant, le nom et la qualité de la personne qui l’a
établi ».

93
Cf M. REVILLARD, op. cit. n° 310 et s.

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CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Les époux doivent ainsi préciser à l’officier de l’état civil s’il a été fait ou non une déclaration
de loi applicable par stipulation expresse.

L’article 1397-3 précise les modalités de la publicité de cette désignation : « lorsque la


désignation de la loi applicable est faite avant le mariage, les futurs époux présentent à
l’officier de l’état civil, soit l’acte par lequel il ont exposé cette désignation, soit un certificat
délivré par la personne compétente pour établir cet acte. Le certificat énonce les noms et
prénoms des futurs époux, le lieu où ils demeurent, la date de l’acte de désignation ainsi que
les noms, qualité et résidence de la personne qui l’a établi ».

On observera que ce texte ne réserve pas uniquement aux notaires la rédaction de l’acte de
désignation de loi applicable. Il permet, de par son énoncé, que ce certificat soit établie par
une autre personne que le notaire 94.

SOUS-SECTION II – LA DETERMINATION DE LA LOI APPLICABLE ET DU REGIME MATRIMONIAL


ER
DE DEUX EPOUX MARIES SANS CONTRAT POSTERIEUREMENT AU 1 SEPTEMBRE 1992

Lorsque les époux n’auront pas désigné la loi applicable à leur régime matrimonial avant la
célébration de leur mariage, la convention de la Haye du 14 mars 1978 en matière de régimes
matrimoniaux a retenu deux critères objectifs de rattachement : la loi de la résidence
habituelle des époux dans le même Etat (§ 1) et la loi nationale commune (§ 2) pour la
déterminer. Néanmoins, dans certains cas particuliers, une troisième loi peut être retenue,
celle avec laquelle le régime présente les liens les plus étroits (§ 3).

La convention pose ainsi comme principe que deux époux mariés sans contrat sont présumés
avoir soumis leurs intérêts pécuniaires à la loi de leur résidence habituelle. Mais en cas de
nationalité commune, la loi du pays dont les époux sont ressortissants peut se substituer à la
loi de la résidence habituelle, notamment lorsque les époux seront ressortissants d’un Etat
ayant fait une déclaration en faveur de sa loi interne (article 5 de la convention).

§ 1- COMPETENCE DE PRINCIPE DE LA LOI DE LA RESIDENCE HABITUELLE

Aux termes de l'article 4 de la convention « si les époux n’ont pas avant le mariage désigné la
loi applicable à leur régime matrimonial, celui-ci est soumis à la loi interne de l’Etat sur le
territoire duquel ils établissent leur première résidence habituelle après le mariage ».

94
Cf D. BOULANGER, Premiers regard sur la loi du 28 octobre 1997, JCP N 1997, D. p. 1525

108
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Cette disposition paraît consacrer le principe français du rattachement du régime matrimonial


à la loi choisie par les époux que l’on présume être celle de leur premier domicile
matrimonial.

Toutefois, il existe une différence notable entre la règle traditionnelle de conflit française en
matière de régimes matrimoniaux et le principe posé par la convention de la Haye. Celle-ci en
effet ne retient plus comme critère celui du « premier domicile matrimonial stable », mais
celui de la « première résidence habituelle ». Cette différence peut s’interpréter comme
signifiant qu’il suffira d’une résidence habituelle de quelques mois dans le même pays
étranger après le mariage pour que les époux soient présumés mariés sous le régime
matrimonial légal de cette première résidence habituelle, notion de pur fait. Monsieur DROZ
écrit à ce sujet 95 « dans la pratique notariale, il ne sera pas difficile de mettre en jeu ce
facteur de rattachement, il suffira de rapprocher la date du mariage des innombrables
documents administratifs qui s’abattent sur un couple qui s’installe : taxe d’habitation,
documents EDF, etc ».

Exemple : Quel est le régime matrimonial de deux époux l’un de nationalité française
l’autre de nationalité britannique qui se sont mariés à Londres en 1998 et qui y ont établi
leur résidence après leur mariage

Les deux époux de nationalité différente sont actuellement, en vertu de l’article 4 de la


convention, présumés avoir soumis leur relations patrimoniales à la loi anglaise et par
conséquent au régime légal anglais de la séparation des biens.

Exemple : Quel est le régime matrimonial actuel de deux époux l’un de nationalité
espagnol l’autre de nationalité suédoise, qui se sont mariés à Paris et qui y ont établis
après leur mariage leur première résidence habituelle.

Le régime légal français de la communauté d’acquêts.

§ 2- COMPETENCE EXCEPTIONNELLE DE LA LOI NATIONALE COMMUNE

La règle selon laquelle deux époux mariés sans contrat sont présumés avoir soumis leurs
intérêts pécuniaires à la loi de leur première résidence habituelle après le mariage, comporte
deux exceptions notables lorsque les époux sont de même nationalité.

95
ED précité n° 38

109
CRIDON-OUEST
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A- Défaut de résidence habituelle commune

La loi nationale commune va se substituer à la loi de la première résidence habituelle après le


mariage « lorsque les époux n’établissent pas sur le territoire du même Etat leur première
résidence habituelle après le mariage » (article 4-3 alinéa 1er de la convention).

Exemple : Deux époux portugais se sont mariés au Portugal en 1993. Après le mariage
le mari est venu seul travailler en France. En l’absence de première résidence habituelle
après leur mariage, les époux sont présumés mariés sous le régime matrimonial légal du
pays de leur nationalité commune.

Il en est ainsi même si les époux de même nationalité sont ressortissants d’un pays non
partie à la convention (pays musulmans par exemple).

B- Déclaration en faveur de la loi nationale commune

La loi nationale commune s’applique encore lorsque l’Etat contractant dont les époux ont la
nationalité a fait une déclaration en ce sens (en faveur de sa propre loi) en vertu de l’article 5
alinéa 1 de la convention de la Haye : « tout Etat (contractant) pourra… faire une déclaration
entraînant l’application de sa loi interne, selon l’article 4 alinéa 2 chiffre 1 ».

Actuellement, il n’y a que trois Etats contractants : la France, les Pays-Bas et le Luxembourg
et seuls les Pays Bas ont fait une déclaration en faveur de leur loi interne.

L’article 5 dans son alinéa 2 devait réduire la portée de l’alinéa 1er en disposant que la
déclaration faite par un Etat contractant en faveur de sa loi interne sera sans effet « pour les
époux qui conservent tous deux leur résidence habituelle sur le territoire de l’Etat où, au
moment du mariage, l’un et l’autre avait eu leur résidence habituelle depuis cinq ans au
moins, sauf si cet Etat est un Etat contractant ayant fait une déclaration prévue par l’alinéa
1er du présent article (déclaration en faveur de sa loi interne) ou un Etat non partie à la
convention et dont le droit international privé prescrit l’application de la loi nationale ».

C- Les règles de conflit en présence donnant compétence à la loi nationale


commune

La loi nationale commune des époux est également compétente lorsque l’Etat dont ils sont
ressortissants « n’est pas partie à la convention, que sa loi interne est applicable selon son
droit international privé et que les époux établissent leur première résidence habituelle après
le mariage
- dans un Etat ayant fait la déclaration prévue par l’article 5,

110
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

- dans un Etat qui n’est pas partie à la convention et dont le droit international privé prescrit
également l’application de leur loi nationale » (article 4-2).

Ces dispositions, pour être comprises, supposent que l’on fasse une distinction selon que l’on
est en présence d’époux ressortissants ou non d’un Etat contractant

1- L’Etat de la nationalité commune des époux est un Etat contractant

 L’Etat dont les époux sont ressortissants a fait une déclaration en faveur de sa
loi interne conformément à l’article 5 de la convention (seuls les Pays Bas ont fait
cette déclaration).

Dans cette hypothèse, la loi nationale commune se substitue à la loi de la première résidence
habituelle.

Exemple : Deux époux néerlandais qui se fixent en France après leur mariage sont
mariés sous le régime légal des Pays-Bas, la communauté universelle différée.

 Exception : article 5 alinéa 2

La loi de la première résidence habituelle se substitue à nouveau à la loi nationale commune si


l’un et l’autre ont eu leur résidence habituelle avant leur mariage et pendant cinq ans au moins
dans l’Etat où ils se fixent après le mariage.

Exemple : Deux époux néerlandais qui se sont mariés à Amsterdam se sont fixés à Paris
après leur mariage. Ils vivaient à Paris depuis plus de cinq ans lorsqu’ils se sont
épousés. Quel est leur régime matrimonial ?

Les époux ont la même nationalité, néerlandaise. Les Pays-Bas sont un Etat contractant
qui ont fait une déclaration en faveur de leur propre loi, mais les époux résidant en
France depuis plus de cinq ans avant leur mariage sont réputés avoir adopté le régime
légal français de la communauté d’acquêts et non la communauté universelle du droit
néerlandais.

Cette substitution de la loi de la résidence à la loi nationale commune n’est pas systématique
lorsque les époux se fixent après leur mariage dans le pays où ils résident depuis plus de cinq
ans avant leur mariage.

En effet, la loi nationale commune des époux sera compétente :

- lorsque les époux résident dans un Etat contractant ayant fait une déclaration en faveur de
sa loi interne (article 5 alinéa 1er) ;

111
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- lorsque les époux résident dans un Etat non partie à la convention mais dont la règle de
conflit en matière de régime matrimoniaux donne compétence à la loi nationale.

Exemple 1 : Deux époux néerlandais qui habitaient depuis plus de cinq ans avant leur
mariage en Grande Bretagne s’y sont fixés après celui-ci. Quel est le régime
matrimonial des époux ?

Les époux sont ressortissants d’un pays contractant ayant fait une déclaration en faveur
de sa loi interne.

En revanche, ils se sont fixés en Grande Bretagne où ils résidaient depuis plus de cinq
ans avant leur mariage. La Grande Bretagne n’est pas partie à la convention et n’a donc
pas fait de déclaration en faveur de sa loi interne et sa règle de conflit ne donne pas
compétence à la loi nationale. Les époux sont donc mariés sous le régime légal anglais.

Exemple 2 : Même exemple que précédemment. Toutefois les époux, au lieu de se fixer
en Grande Bretagne, se sont fixés en Espagne où ils résidaient depuis plus de cinq ans
avant leur mariage.

Les Pays-Bas, parties à la convention, ont fait la déclaration de l'article 5. L’Espagne


n’est pas un Etat contractant. Les époux devraient donc a priori être mariés sous le
régime légal de leur première résidence habituelle, c’est à dire sous le régime légal de la
Province espagnole où ils se sont fixés après leur mariage et où ils résidaient
antérieurement.

Mais la règle de conflit espagnole donne compétence à la loi nationale. Les époux sont
donc mariés sous le régime légal néerlandais.

Exemple 3 : Deux époux néerlandais se fixent au Luxembourg après leur mariage où ils
résidaient depuis plus de cinq ans avant leur mariage. Quel est leur régime
matrimonial ?

Le Luxembourg est un Etat contractant mais n’a pas fait de déclaration en faveur de sa
loi interne et la règle de conflit luxembourgeoise donne compétence à la loi du domicile.

Ces époux sont donc mariés sous le régime légal luxembourgeois de la communauté.

2- L’Etat de la nationalité commune des époux n’est pas un Etat contractant

L’Etat de la nationalité commune des époux n’étant pas un Etat contractant, n’a pas fait de
déclaration en faveur de sa loi nationale.

112
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Dans cette situation les époux sont présumés être soumis à la loi de leur première résidence
habituelle.

Néanmoins, en vertu de l’article 4-2 de la convention, la loi nationale commune des époux va
se substituer à la loi de la résidence lorsque la « loi interne de l’Etat est applicable selon son
droit international et que les époux établissent leur première résidence habituelle après le
mariage
a) dans un Etat ayant fait la déclaration prévue à l’article 5,
b) dans un Etat qui n’est pas partie à la convention mais dont le droit international privé
prescrit également l’application de leur loi nationale ».

Exemple : Quelle est la loi applicable au régime matrimonial de deux époux de


nationalité espagnole qui se sont mariés à Bruxelles, venus s’installer en Italie après leur
mariage célébré en 1998 ?

Les époux ont la même nationalité commune, la nationalité espagnole. L’Espagne


comme l’Italie ne sont pas parties à la convention de la Haye, mais leurs règles de
conflit donnent compétence à la loi nationale des époux.
Les époux sont donc mariés sous la loi espagnole et le régime de la communauté
d’acquêts (article 4-2b).

Exemple : Deux époux de nationalité italienne se sont mariés en octobre 1992 à


Florence. Ils se sont établis en France en 2001. Quelle est la loi applicable à leur régime
matrimonial ?

Les époux sont tous deux de nationalité italienne. L’Italie n’est pas un Etat contractant.
Les époux se sont établis en Italie après leur mariage. Ils sont donc mariés sous le
régime légal italien.

On observera qu’il y a convergence entre la règle de conflit issue de la convention de la


Haye et la règle de conflit italienne.

En effet, l’Italie, où se fixent les époux après leur mariage, est un Etat qui fait
application du principe de la nationalité.

Or l’article 4-2 b de la convention de la Haye prévoit que le régime matrimonial des


époux est soumis à leur loi nationale commune, lorsque ceux-ci sont ressortissants d’un
Etat non contractant mais dont la règle de conflit donne compétence à la loi nationale.

Ces époux italiens sont ainsi mariés sous le régime légal italien de la communauté
d’acquêts.

113
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Il y a ainsi convergence des règles de conflit.

De même, deux époux marocains de statut musulman qui se sont établis au Maroc après
leur mariage pendant plusieurs années avant de s’installer en France, sont mariés sous le
régime coranique de la séparation des biens conformément à la loi marocaine qui fait
application du principe de la nationalité et la convention de la Haye qui donne
compétence à la loi nationale commune lorsque les époux sont ressortissants d’un Etat
non contractant comme le Maroc, mais dont la règle de conflit donne compétence à la
loi nationale.

Parmi les pays européens non parties à la convention dont la règle de conflit donne
compétence à la loi nationale commune, on citera : l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, la
Bulgarie, l’Espagne, la Finlande, la Grèce, la Hongrie, l’Italie, le Lichtenstein, la Pologne, le
Portugal, la Roumanie, la Suède, les Républiques Tchèque et Slovaque, la Turquie et le
Vatican.

Il en est encore ainsi au Maroc, en Algérie, en Tunisie et dans de nombreux autres pays
musulmans.

§ 3- LE DEFAUT DE NATIONALITE ET DE RESIDENCE COMMUNE

L’article 4 alinéa 3 de la convention dispose que lorsque les époux n’ont pas de résidence
habituelle dans le même Etat après leur mariage et n’ont pas de nationalité commune ou ont
plusieurs nationalités communes « leur régime matrimonial est soumis à la loi interne de
l’Etat avec lequel, compte tenu de toutes les circonstances, il présente les liens les plus
étroits »

Le juge disposera, dans cette situation, des pouvoirs les plus larges pour déterminer, compte
tenu des circonstances antérieures concomitantes ou postérieures au mariage, sous quelle loi
les époux ont entendu soumettre leurs relations pécuniaires.

Exemple : Deux époux de nationalité différente se sont mariés à Las Vegas en 1997. En
raison de leurs activités professionnelles, les époux ne résident pas depuis leur mariage
dans le même pays. Quelle est la loi applicable à leur régime matrimonial ?

En pareille hypothèse, le juge devra rechercher, en tenant compte de certains indices, à


quelle loi les époux ont entendu soumettre leur régime matrimonial, comme il le fait
encore aujourd’hui pour les époux mariés avant le 1er septembre 1992 (cf supra).

Mais il n’y a plus lieu aujourd’hui de recourir à une action déclaratoire. Les époux peuvent en
vertu de l'article 6 de la convention de la Haye déclarer la loi applicable à leur régime
matrimonial dans un acte notarié.

114
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

SOUS-CHAPITRE II – LE CHANGEMENT DE REGIME MATRIMONIAL ET/OU DE LA LOI


APPLICABLE

Dès avant la loi du 13 juillet 1965 qui a autorisé en France le changement de régime
matrimonial, la question s’était posée de savoir si des époux mariés sous une loi étrangère
autorisant le changement de régime matrimonial, pouvaient changer de régime matrimonial en
France alors que celui-ci était prohibé.

La jurisprudence avait décidé qu’il appartenait à la loi interne régissant le régime matrimonial
des époux, de déclarer si le changement de régime était possible ou ne l’était pas. Lorsque la
loi interne prohibait le changement de régime, celui-ci devait être écarté ; dans le cas
contraire, il était autorisé.

Cette règle était particulièrement gênante lorsque le régime matrimonial des époux était
soumis à une législation avec laquelle ils avaient perdu toute attache.

Par ailleurs, le principe de la permanence du régime (cf supra) interdisait la soumission du


régime matrimonial à une loi autre que celle à laquelle les époux étaient soumis depuis leur
mariage alors que ceux-ci pouvaient avoir changé de nationalité de domicile ou fui leur pays
d’origine sans espoir de retour.

Ces considérations devaient inciter les rédacteurs de la convention de la Haye à autoriser les
changements de loi (et de régime matrimonial) chaque fois que la situation personnelle et
patrimoniale des époux avait évolué.

La règle antérieure du conflit en matière de mutation de régime matrimonial s’en est trouvée
modifiée.

Avant d’envisager les changements de loi et de régime matrimonial sous l’empire du droit
antérieur et de la convention de la Haye il convient d’observer que ces changements de loi et
de régime, admis dans les pays signataires de la convention ou dans un pays dont la
législation admet les changements de régime, ne seront pas nécessairement reconnus
dans les pays qui ne sont pas parties à la convention ou qui n’admettent pas le
changement de régime matrimonial.

Exemple : Les Pays-Bas ayant ratifié la convention de la Haye, si deux époux


néerlandais résidant en France soumettent leur régime matrimonial à la loi française,
celle-ci sera applicable au Pays Bas.

De même, deux époux espagnols qui opteront en France pour la loi espagnole pourront
se prévaloir de l’application de cette loi en Espagne.

115
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

En revanche, deux époux algériens qui changeraient de loi et de régime matrimonial en


France resteront néanmoins mariés sous le régime de la séparation des biens dans le
pays dont ils sont ressortissants.

SECTION I – LE CHANGEMENT DE REGIME MATRIMONIAL AVANT LE 1ER SEPTEMBRE


1992

La jurisprudence française soumettait les conditions de fonds comme les conditions de forme
du changement de régime matrimonial à la loi interne qui régissait le régime.

§ 1- LES CONDITIONS DE FOND DU CHANGEMENT DE REGIME

Après avoir rattaché le changement de régime matrimonial au statut personnel, les tribunaux
s’étaient prononcés en faveur de la loi interne régissant le régime matrimonial des époux 96 au
motif que le problème de l’immutabilité du régime participait à sa nature même 97.

Cela signifiait que le changement de régime matrimonial n’était possible que si la loi régissant
le régime l’autorisait.

C’est ainsi que des époux mariés sous un régime portugais, roumain ou japonais ne pouvaient
changer de régime matrimonial, les lois portugaise, roumaine et japonaise prohibant le
changement de régime.

Par ailleurs, lorsque la loi interne autorisait le changement de régime, les époux ne pouvaient
adopter qu’un régime connu de la législation applicable.

Cette jurisprudence a prévalu jusqu’à l’entrée en vigueur de la convention de la Haye malgré


quelques décisions de Cours d’appel qui avaient remis en cause le principe de la permanence
du rattachement 98.

§ 2- LES CONDITIONS DE FORME

La loi interne régissant le régime matrimonial des époux ne se bornait pas à indiquer si le
changement de régime était autorisé ou prohibé, elle fixait également les modalités de ce
changement de régime.

96
Cass 4 juin 1935, Rev. crit. 1936, 755
97
E.D. précité édition n° 179
98
CA Colmar Rev. crit. DIP 1973, p. 524, note A.P. ; CA Paris 13 octobre 1988, Def. 1991, art. 350 32, note
RIALLAND

116
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Si la loi interne autorisait le changement de régime par simple acte notarié, celui-ci était
possible en France par acte notarié.

Deux époux français mariés sous le régime légal allemand de la communauté différée des
augments pouvaient changer de régime matrimonial en France par simple acte notarié, le droit
allemand autorisant le changement de régime sous cette forme (article 1408 du BGB), pour
adopter un régime allemand.

Ainsi, avant l’entrée en vigueur de la convention de la Haye la règle de conflit en matière de


régime matrimonial pouvait être formulée de la façon suivante : la possibilité de changer de
régime matrimonial dépendait de la loi du régime et obéissait à ses règles 99.

SECTION II – LE CHANGEMENT DE LOI ET DE REGIME MATRIMONIAL DEPUIS LE 1ER


100
SEPTEMBRE 1992

Précédemment, le changement de régime matrimonial dépendait du contenu de la loi interne


applicable et n’était possible que si celle-ci l’autorisait ; depuis l’entrée en vigueur de la
convention de la Haye, le changement de régime pourra être consécutif à un changement de
loi.

Les rédacteurs de la convention de la Haye ont en effet abandonné le principe de la


permanence du rattachement, si souvent dénoncé lorsque les époux avaient perdu toute
attache avec la législation qui leur était applicable.

Il est vrai que la règle avait déjà été remise en cause par la jurisprudence 101.

Aussi la véritable nouveauté de la convention réside-t-elle dans le fait d’avoir admis à côté de
ce changement volontaire de loi et de régime (§ 1), des cas de mutation automatique de la loi
applicable au régime matrimonial (§ 2).

§ 1- LE CHANGEMENT VOLONTAIRE DE LOI APPLICABLE AU REGIME MATRIMONIAL

Si la convention de la Haye du 14 mars 1978 en matière de régimes matrimoniaux devait


autoriser le changement de loi applicable au régime matrimonial, en revanche, elle restait
muette sur le régime matrimonial sous lequel les époux se trouvaient mariés.

99
CA Paris 29 juin 1970, Rev. crit. DIP 1970, p. 302, note PONSARD
100
Formules : Juris-Classeur Form. v° Contrat de mariage, Fasc. 95, Rep. Defrénois 1999, art. 36951
101
TGI Dijon 18 novembre 1969, Rev. crit. DIP 72, 448, note DROZ, Def. 1971, 1251, note Ph. MALAURIE, CA
Paris 5 juillet 1990 précité

117
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Étaient-ils soumis obligatoirement au régime légal de la législation adoptée ou pouvaient-ils


adopter un régime conventionnel connu de celle-ci ? La loi du 28 octobre 1997 devait
combler cette lacune en permettant aux époux de désigner en même temps la loi et le régime
matrimonial légal ou conventionnel connu de la législation adoptée.

A- Le changement de loi applicable proprement dit

L’article 6 de la convention de la Haye dispose que « les époux peuvent au cours du mariage
soumettre leur régime matrimonial à une loi autre que celle jusqu’alors applicable ».

Cette disposition obéit à certaines conditions qu’il conviendra de déterminer avant d’examiner
la date d’effet de ce changement de loi tant à l’égard des tiers que des époux ainsi que la
publicité de celui-ci.

1- Les conditions du changement de loi

Le choix de la loi applicable n’est pas totalement libre. La convention ne permet aux époux
de choisir que l’une des lois suivantes :

- la loi de la nationalité de l’un d’eux au moment de cette désignation (article 6-1) ;

- la loi de la résidence habituelle de l’un d’eux au moment de cette désignation (article


6-2) ;

- en ce qui concerne les immeubles ou certains d’entre eux, la loi du lieu où ces immeubles
sont situés (article 6 alinéa 3).

Les époux peuvent également décider que les immeubles qu’ils viendraient à acquérir seront
soumis à la loi du lieu de leur situation (cette disposition de l'article 6 alinéa 3 ne s’applique qu’aux
immeubles et seulement à ceux-ci).

La loi choisie au cours du mariage s’applique à l’ensemble des biens des époux. Mais ce
principe de l’indivisibilité de la loi déclarée applicable est battu en brèche par l’article 6 alinéa
3 qui permet de soumettre les immeubles à la loi du lieu de leur situation laquelle peut être
différente de celle qui régit leurs autres intérêts patrimoniaux.

Ce changement de loi peut intervenir à tout moment et pendant la durée du mariage, il peut
avoir lieu plusieurs fois sans qu’il y ait lieu de respecter un délai entre le changement de lois.

118
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Supposons, par exemple, que deux époux britanniques mariés sous le régime légal anglais de
la séparation des biens aient décidé de soumettre en France l’immeuble qu’ils ont acquis
indivisément, au régime de la communauté universelle avec clause d’attribution de la
communauté au survivant en vertu de l'article 6 alinéa 3, et qu’ils souhaitent ensuite que
l’immeuble soit indivis entre eux, il leur suffira de changer de loi, de le soumettre à la loi
britannique pour que l’immeuble redevienne indivis entre eux.

Cette possibilité de changer de loi n’est pas réservée aux seuls époux mariés après l’entrée en
vigueur en France de la convention le 1er septembre 1992. Elle est également offerte aux
époux dont le mariage est antérieur à cette date en vertu de l'article 21 alinéa 1er de la
convention. Des époux mariés avant le 1er septembre 1992 peuvent ainsi soumettre leur
régime matrimonial à une autre loi que celle qui les régissait auparavant, dans les conditions
fixées par la convention.

L’article 6 de la convention ne vise que le changement de loi et ne se soucie pas du


changement de régime. On ne saurait s’en étonner, la convention a seulement pour objet de
déterminer la loi applicable et ne se soucie pas du choix du régime matrimonial.

Mais ce changement de loi ne sera le plus souvent que le prélude à un changement de régime.
Un simple changement de loi sera parfois suffisant pour répondre au désir des époux : deux
époux marocains de religion musulmane mariés en France sous le régime de la communauté
souhaitent être séparés de biens. Il leur suffit de changer de loi et de désigner la loi marocaine
pour que ceux-ci soient séparés de biens (plus exactement étrangers l’un à l’autre dans leurs
relations pécuniaires). De même, deux époux néerlandais mariés sous le régime légal
néerlandais de la communauté universelle différée, qui viennent prendre leur retraite en
France et qui souhaitent adopter le régime de la communauté d’acquêts français, seront
soumis à ce régime s’ils déclarent soumettre leurs intérêts pécuniaires à la loi française sans
autre précision.

Ce changement de loi autorisé par la convention n’exige aucune homologation judiciaire. A


la différence de l'article 1397 du Code Civil français, il n’exige le respect d’aucun délai entre
la date du mariage et du changement de loi ou entre la date de changement de loi et celle du
précédent changement de loi.

Des conditions de forme sont prévues par la convention pour ce changement de loi : « la
désignation de la loi applicable doit faire l’objet d’une stipulation expresse ou résulter
indubitablement des dispositions d’un contrat de mariage » (article 11).

En vertu de l’article 13 de la convention « la désignation par stipulation expresse de la loi


applicable doit revêtir la forme prescrite pour les contrats de mariage soit par la loi interne
désignée, soit par la loi interne du lieu où intervient cette désignation ».

119
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Si le changement de loi intervient en France, et si la loi choisie est la loi française il revêtira
par conséquent la forme notariée ; s’il intervient à l’étranger, il pourra revêtir la forme prévue
par la loi étrangère (sous seing privé par exemple) ou celle prévue par la loi nouvellement
adoptée.

2- La date de prise d’effet de ce changement de loi à l’égard des tiers et à l’égard des
époux

a) Date d’effet à l’égard des époux

Le changement de loi a un effet rétroactif au jour de l’union. La loi nouvelle régit non
seulement les biens acquis ultérieurement par les époux, mais également ceux acquis avant
l’acte de désignation. C’est ce qui résulte de l'article 6 alinéa 3 de la convention qui déclare
que « la loi ainsi désignée s’applique à l’ensemble des biens » des époux mais aussi d’une
interprétation a contrario de l'article 8 alinéa 1er concernant la mutabilité automatique du
régime qui déclare que dans cette hypothèse, le changement de loi n’a d’effet que pour
l’avenir et que les biens qui appartenaient auparavant aux époux ne sont pas soumis à la loi
désormais applicable.

Cette rétroactivité du changement de loi au jour de l’union est contraire aux dispositions de
l’article 1397-4 du Code Civil qui dispose « lorsque la désignation de la loi applicable est
faite en cours du mariage, cette désignation prend effet entre les parties à compter de
l’établissement de l’acte de désignation… ».

Mais les auteurs 102 s’accordent à reconnaître que la rétroactivité est préférable car elle évite la
multiplication des lois applicables au régime matrimonial et que dans l’état actuel des textes
et leur interprétation, il est permis de prévoir conventionnellement la rétroactivité du
changement de loi au jour de l’union, motif pris que l’on est « dans le domaine de
l’autonomie de la volonté et d’une totale liberté de choix de mutation du régime
matrimonial » 103.

Toutefois, la rétroactivité peut parfois être dangereuse si nous supposons par exemple que
deux époux marocains sont mariés sous le régime de la communauté légale française et qu’ils
décident d’adopter la séparation légale de droit musulman marocain, l’épouse sera totalement
spoliée si la rétroactivité du régime est stipulée au jour de leur mariage, si le mari s’était porté
seul acquéreur des biens.

102
M. REVILLARD, DIP et Pratique notariale n° 279 et D. BOULANGER « Les modifications du régime
matrimonial d’époux mariés dans un contexte international », journées d’information du Cridon Nord Est
103
D. BOULANGER précité

120
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

b) Date d’effet à l’égard des tiers

La loi désignée par les époux est opposable aux tiers. L’article 1397-4 du Code Civil précise
la date de prise d’effet de ce changement de loi à l’égard des tiers : trois mois après que les
formalités de publicité prévues à l’article 1397-3 du Code Civil aient été effectuées (cf infra).
Néanmoins, si ces formalités n’ont pas été accomplies, la loi nouvelle adoptée est opposable
aux tiers si, dans les actes pris avec eux, les époux ont fait état de la loi nouvelle régissant
leurs intérêts pécuniaires.

3- La publicité de la déclaration de la loi applicable au régime matrimonial au cours du


régime

Au cours du mariage, les époux peuvent déclarer la loi applicable à leur régime matrimonial
mais aussi changer de loi applicable, c’est à dire déclarer une nouvelle loi applicable à leur
régime matrimonial. Dans l’un et l’autre cas, la publicité de cette déclaration ou de ce
changement de loi est organisée.

L’article 1397-3 aliéna 2 édicte que « lorsque la désignation de la loi applicable est faite au
cours du mariage, les époux font procéder aux mesures de publicité relatives à la désignation
de la loi applicable dans les conditions et formes prévues au NCPC... » (articles 1303-1 et s. du
NCPC).

Deux situations doivent être envisagées :

 Les époux n’ont pas fait de contrat de mariage

- Si l’acte de mariage est conservé par une autorité française, celle-ci mentionne en marge
de cet acte, à la demande des époux ou de l’un d’eux, l’acte portant désignation de la loi
applicable au régime matrimonial (article 1301-1 alinéa 1er du NCPC).

- Si l’acte de mariage n’est pas conservé par une autorité française (étrangers mariés à
l’étranger venus s’installer en France) mais si l’acte de changement de loi a été établi en
France en la forme authentique ou si l’un des époux est français, celui-ci sera, à la
demande des époux ou de l’un d’eux, inscrit au répertoire civil annexe tenu au Service
Central de l’Etat civil du Ministère des Affaires étrangères (article 1303-1 alinéa 2 du NCPC)
sur présentation d’une copie simple de l’acte.

Exemple : Deux époux anglais mariés sous le régime anglais de la séparation des biens
en Angleterre qui viennent prendre leur retraite en France ont décidé de soumettre les
immeubles qu’ils y possèdent à la loi française et au régime de la communauté
universelle avec clause d’attribution de la communauté au survivant.

121
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Ce changement est effectué en France devant un notaire français.

Le notaire qui aura reçu l’acte se chargera au nom des époux de sa publication au
Répertoire civil annexe.

L’acte sera opposable aux tiers trois mois après que les formalités de publicité auront
été accomplies (articles 1397-4 alinéa 1er, 1397-6 alinéa 1er).

Exemple : Ces mêmes époux anglais au lieu de changer de régime matrimonial en


France ont changé de loi et de régime en Grande Bretagne. L’acte a été reçu par un
sollicitor. Un tel acte peut-il être publié au Répertoire civil annexe ?

La réponse est négative. L’inscription au Répertoire Civil annexe n’est possible que
dans deux cas :

- lorsque l’acte de désignation de la loi applicable a été établi en France en la forme


authentique ;

- lorsque l’un des époux est de nationalité française.

Un tel acte qui ne peut faire l’objet d’une publicité n’est pas dépourvu d’efficacité. Il est
valable entre le époux et sera opposable au tiers si dans les actes passés avec eux, les
époux ont déclaré la loi applicable à leur régime matrimonial (article 1397-4 alinéa 2 du
Code civil).

Ainsi, lorsque deux époux sont de nationalité étrangère, l’inscription au Répertoire civil
annexe suppose que l’acte ait été établi en France en la forme authentique.

Néanmoins, si un acte de changement de loi a été établi à l’étranger en la forme sous seing
privé au profit de deux époux étrangers, celui-ci pourra être publié au Répertoire civil annexe,
si les parties à l’acte le dépose au rang des minutes d’un notaire français avec reconnaissance
d’écriture et de signature, car l’on est alors en présence d’un acte établi en France en la forme
authentique 104

En revanche, si l’un des époux avait été français, la publicité au Répertoire civil annexe aurait
été possible en cas d’établissement de l’acte de changement de loi en la forme locale en
Grande Bretagne.

Pour effectuer cette publicité, il suffit d’adresser au service central de l’Etat civil du Ministère
des Affaires étrangères une copie de l’acte de désignation de la loi applicable ou du certificat
délivré par l’autorité compétente qui l’a reçu.

104
Cf G.K. Cridon Paris, 15 juin 2004, n° 10-11

122
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

 Les époux ont fait un contrat de mariage

Lorsque les époux ont fait un contrat de mariage, ils peuvent toujours déclarer la loi
applicable à leur régime matrimonial ou changer de loi.

Dans cette hypothèse, l’article 1303-2 du Nouveau Code de procédure civile dispose
« lorsqu’un contrat de mariage a été passé en France, les époux ou l’un d’eux adressent au
notaire détenteur de la minute du contrat, par lettre recommandée avec accusé de réception,
copie de l’acte de désignation de la loi applicable au régime matrimonial. Si le contrat de
mariage a été reçu par un agent diplomatique ou consulaire français, au moins l’un des
époux avise le Ministre des Affaires étrangères » (article 1303-2 alinéa 1er).

Le notaire, l’agent diplomatique ou consulaire français, ou le Ministre des Affaires étrangères


fait mention de la loi applicable ainsi désignée sur la minute du contrat de mariage. Il ne peut
en être délivré aucune copie ou extrait sans reproduire cette mention (article 1303-2 alinéa 2 du
NCPC).

En revanche, aucune disposition n’a été prévue lorsque le contrat de mariage a été reçu à
l’étranger et que le changement de loi intervient en France. Mais on adressera au notaire
détenteur de la minute du contrat, copie de la désignation de la loi applicable au régime
matrimonial, quel que soit le sort qui sera réservé à cette notification.

B- Le changement de régime matrimonial consécutif à un changement de loi

1- Les conditions

L’article 6 de la convention de la Haye n’évoque que le changement de loi applicable. Il n’est


jamais fait état de changement de régime matrimonial. Il ne faut pas s’en étonner, l’objet de la
convention n’est pas de déterminer le régime matrimonial de deux époux mariés avec ou sans
contrat dont la situation présente un élément d’extranéité, mais la loi applicable à leur régime
matrimonial.

Aussi, dès l’entrée en vigueur de la convention, la question s’est posée de savoir sous quel
régime matrimonial se trouvaient les époux qui avaient désigné la loi applicable à leur régime
matrimonial.

Jusqu’à la loi du 28 octobre 1997, aucun texte ne répondait à cette question.

Dans le silence des textes, les auteurs estimaient que les époux étaient mariés sous le régime
légal de la législation nouvellement adoptée. Il en résultait souvent un changement de
régime : deux époux tunisiens mariés sous le régime légal français de la communauté par

123
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

suite de leur établissement en France après leur mariage, se trouvaient séparés de biens
lorsqu’ils déclaraient vouloir soumettre leurs intérêts patrimoniaux à la loi tunisienne.

Le changement de loi réalisant souvent un changement de régime, on s’était demandé si les


époux ne pouvaient pas à l’occasion de ce changement de loi changer également de régime et
adopter un régime conventionnel connu de la législation nouvelle choisie.

La doctrine devait répondre par l’affirmative à cette question mais en considérant que la règle
de conflit rappelée plus haut selon laquelle la possibilité de changer de régime matrimonial
dépend de la loi du régime et obéit à ses règles, devait trouver à s’appliquer. Autrement dit, le
changement de régime était possible si la loi du régime l’autorisait et dans les formes prévues
par la législation applicable.

Exemple : Deux époux roumains mariés sous le régime légal de leur pays d’origine où
le changement de régime était prohibé pouvaient changer de loi et se soumettre à la loi
française. Mais jusqu’à la loi du 28 octobre 1997, ils ne pouvaient adopter un régime
conventionnel français qu’en respectant les dispositions de l’article 1397 du Code Civil
français et donc avec homologation judiciaire.

Cette position doctrinale, non dépourvue de fondement devait être critiquée 105 car elle
établissait une discrimination entre les législations qui permettaient de changer de régime
matrimonial sans aucun formalisme, comme le droit italien, le droit allemand ou le droit
suisse et celles comme la loi française qui soumettaient les changements de régime à
l’homologation judiciaire.

La loi du 28 octobre 1997 106 aujourd’hui insérée dans le Code Civil (article 1397-3 alinéa 3)
devait tenir compte de ces critiques en édictant qu’« à l’occasion de la désignation de la loi
applicable avant le mariage ou au cours de celui-ci, les époux peuvent désigner la nature du
régime choisi par eux ».

L’article 1397-3 permet ainsi aux époux qui désignent la loi française comme loi applicable à
leur régime matrimonial, de choisir librement un régime conventionnel connu de la législation
française (ou le régime légal) et sans homologation judiciaire.

Exemple : Deux époux mariés sous le régime légal belge, résidant aujourd’hui en
France, peuvent déclarer la loi française applicable à leur régime matrimonial et adopter
la communauté universelle avec clause d’attribution de la communauté au survivant.

Deux époux roumains peuvent se soumettre à la loi française et en vertu de l’article


1397-3 adopter le régime de la participation aux acquêts du droit français.

105
Cf DROZ, E.D. de DIP Régimes matrimoniaux, n° 71
106
JO du 29 octobre 1997

124
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Mais l’on ne peut recourir aux dispositions de l’article 1397-3 alinéa 3 que si la loi
choisie est la loi française. Si la loi désignée est une loi étrangère, le changement de
régime matrimonial n’est possible que dans les formes prévues par la loi interne
désignée.

Si les époux désignent par exemple la loi belge, l’homologation judiciaire sera requise.

2- Les particularités de ce changement de régime

 Ce changement de loi et de régime est possible sans le moindre contrôle administratif ou


judiciaire. Il a lieu par simple acte notarié dans les formes du contrat de mariage et sans
homologation judiciaire.

 Mais il doit faire l’objet d’un acte « spécial ». Il ne peut être effectué dans un acte de
vente, d’échange ou dans tout autre acte.

 Un tel changement est possible à tout moment sans qu’il soit nécessaire de respecter un
délai entre la date du mariage et le changement de régime matrimonial, voire entre les
changements de régime matrimonial.

 L’existence d’un contrat de mariage n’est pas un obstacle à un tel changement de loi et de
régime. Après avoir désigné la loi applicable, les deux époux pourront choisir un régime
matrimonial connu de la loi nouvellement adoptée, ce qui entraînera la caducité du contrat
de mariage.

Toutefois, le recours à l’article 1397-3 alinéa 3 ne se conçoit que si la loi choisie est la loi
française 107.

Exemple : Deux époux mariés sous le régime légal français qui désigneraient la loi
allemande comme loi applicable à leur régime matrimonial, l’un d’eux étant de
nationalité allemande, ne pourraient échapper aux dispositions de la loi allemande en
matière de changement de régime matrimonial.

Exemple : Deux époux mariés sous le régime légal français qui voudraient adopter un
régime belge devront faire homologuer leur changement de régime matrimonial, le droit
belge exigeant l’homologation judiciaire.

Enfin, comme l’ont également fait observer, la plupart des auteurs, l’article 1397-3 alinéa 3
du Code Civil a sonné le glas de l’homologation judiciaire en France.

107
D. BOULANGER, étude du Cridon du Nord Est « Le changement de régime matrimonial » septembre octobre
1998, p. 76 et s.

125
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

On peut en effet établir une discrimination entre les époux selon que leur régime matrimonial
comporte ou non un élément d’extranéité, puisqu’en l’absence d’un tel élément, il faut
recourir à l’homologation judiciaire, alors qu’en présence de l’un d’eux celle-ci n’est pas
requise. La loi du 28 octobre 1997 n’a pas mesuré toutes les conséquences de l'article 1397-3
alinéa 3 du Code Civil.

3- Incidences pratiques

S’il est des dispositions législatives qui ont fait florès en raison des possibilités qu’elles
offraient aux époux dont le régime matrimonial comportait un élément d’extranéité, ce sont
bien les articles 6 et 21 de la convention de la Haye du 14 mars 1978 et de l'article 1397-3
alinéa 3 du Code Civil.

De nombreuses difficultés rencontrées dans la pratique notariale en matière de régimes


matrimoniaux en droit international privé en ont pu en effet être aplanies en recourant à ces
dispositions.

(Mais ils ne sauraient à eux seuls lever les réserves faites par la doctrine la plus autorisée sur la
convention).

 Deux époux dont la loi régissant le régime matrimonial prohibe le changement


de régime matrimonial vont pouvoir adopter une autre loi qui autorise le
changement de régime et changer de régime.

Exemple : Deux époux portugais, roumains ou japonais dont la législation nationale


prohibe le changement de régime auront la possibilité de changer de loi, adopter une
législation admettant le changement de régime et choisir un régime matrimonial, connu
de la législation nouvellement adoptée. Si, par exemple, ils adoptent la loi française, ils
pourront opter pour un régime conventionnel français sans homologation judiciaire.

Mais ce changement de loi et ce régime ne sera pas reconnu dans les Etats étrangers
susvisés.

 Les époux pourront déterminer avec certitude leur régime matrimonial.

En présence de deux époux mariés avant le 1er septembre 1992 qui n’ont pas eu de domicile
matrimonial stable après leur mariage, il était parfois difficile de déterminer leur régime
matrimonial. Il était possible néanmoins de recourir à la procédure contestable des actions
déclaratoires.

126
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Désormais, les époux pourront déclarer la loi applicable à leur régime matrimonial et préciser
le régime légal ou conventionnel choisi.

Exemple : Deux époux franco américain se sont mariés au USA en 1998. Ils ont résidé 8
mois dans l’Etat de New York après leur mariage puis se sont établis pour une année en
Suisse avant d’être mutés en Allemagne pour 18 mois. Ils résident actuellement en
Grande Bretagne.

Quel est leur régime matrimonial ?

Il est difficile dans cet exemple de déterminer le régime matrimonial de ces époux. Sous
l’empire du droit antérieur, on aurait pu recourir aux actions déclaratoires. Depuis
l’entrée en vigueur de la convention de la Haye du 14 mars 1978 (articles 21 et 6), il
suffit aux époux de déclarer la loi applicable à leur régime matrimonial et de désigner
un régime connu de la législation choisie. S’ils choisissent la loi française, ils pourront,
en vertu de l’article 1397-3 alinéa 3, adopter un régime matrimonial français par simple
acte notarié et sans homologation judiciaire.

Exemple : Deux époux franco allemand se sont mariés en Allemagne en septembre


2005. Immédiatement après leur mariage, ils se sont établis en France sans intention
déclarée d’y fixer leur résidence.

Sous quel régime matrimonial se trouveront-ils mariés lors de l’acquisition d’un


immeuble en France le 15 décembre 2005 ?

Dans cette hypothèse, la détermination du régime matrimonial des époux est quasiment
impossible. Les époux devront recourir à l’article 6 de la Convention de la Haye qui leur
permet de déterminer la loi applicable à leur régime matrimonial et partant leur régime
matrimonial.

 L’harmonisation des intérêts pécuniaires des époux avec la législation du pays


où ceux-ci sont localisés est rendue possible en recourant aux dispositions de
l’article 6 de la convention.

Exemple : Deux époux français se sont fixés dans l’Etat de New York aux USA après
leur mariage célébré le 15 juin 1992, en raison de leur activité professionnelle.
Régulièrement ils rapatrient leurs revenus en France pour réaliser des investissements
immobiliers. Ces époux qui n’ont pas d’enfant souhaitent que le survivant d’eux soit
seul propriétaire de ce patrimoine.

Il suffira pour leur donner satisfaction de soumettre leur régime matrimonial à la loi
française, alors qu’il est actuellement soumis à la loi américaine, par suite de leur

127
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

établissement à New York et de leur faire adopter la communauté universelle avec


clause d’attribution de la communauté au survivant.

 Il sera encore possible aux époux de faire échec à la réserve héréditaire connue
du droit français, ignorée de la législation étrangère applicable à la succession
tout en bénéficiant d’avantages fiscaux.

Exemple : Deux époux britanniques ayant deux enfants communs ont acquis une maison
en France où ils souhaitent prendre leur retraite. Ils désirent que le survivant d’eux
puisse conserver la toute propriété de l'immeuble sans être inquiété par l’un des enfants
qui invoquerait la réserve héréditaire du droit français.

La convention de la Haye dans son article 6 permettant aux époux de soumettre tout ou
partie de leurs immeubles à la loi du lieu de leur situation, ces époux pourront les
soumettre à la loi française et sur le fondement de l'article 1397-3 alinéa 3 adopter, en ce
qui les concerne, la communauté universelle avec clause d’attribution de la communauté
au survivant. Les biens recueillis en vertu de cette convention de mariage seront
exemptés de droits de mutation.

Toutefois, le recours à l’article 6 de la convention de la Haye et à l’article 1397-3 alinéa


3 suppose qu’il n’existe aucun enfant d’un précédent mariage car l’article 1527 du Code
Civil trouverait à s’appliquer (cf infra).

 Enfin, les époux pourront faire échec à la mutabilité automatique.

La convention dans son article 7 prévoit de nombreux cas de mutabilité automatique de


changement de régime (cf infra).

Le changement de loi et de régime permettra d’y faire échec.

Exemple : Deux époux français mariés sous le régime de la communauté française qui
iraient s’établir en Angleterre seront, dix ans après leur établissement en Grande-
Bretagne, présumés mariés sous le régime anglais de la séparation des biens (cf infra).
Pour échapper à ce changement automatique de régime, non souhaité par les époux,
ceux-ci pourront déclarer la loi applicable à leur régime matrimonial et préciser qu’ils
entendent rester soumis au régime légal français.

128
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

4- Date d’effet et publicité du changement de régime matrimonial 108

Après avoir examiné la date d’effet du changement de régime matrimonial, nous envisagerons
les formalités de publicité sans lesquelles l’acte de changement de régime matrimonial serait
inopposable au tiers.

a) La date d’effet du changement de régime matrimonial

Le régime matrimonial adopté s’applique à l’ensemble du patrimoine des époux, hormis


l’hypothèse où ceux-ci ont soumis leurs immeubles à une loi distincte de celle régissant leur
régime matrimonial comme le permet la convention.

Encore faut-il s’interroger sur la date à partir de laquelle le régime matrimonial prend effet
entre les époux et à l’égard des tiers.

 A l’égard des époux

L’article 1397-6 du Code Civil dispose que « le changement de régime matrimonial prend
effet entre les parties à dater de la décision ou de l’acte qui le prévoit… ».

Ainsi, le changement de régime matrimonial consécutif à un changement de loi n’aurait aucun


effet rétroactif.

Ce texte surprend à première vue. En effet, l’article 1397-6 (mais aussi l’article 1397-4) paraît
en contradiction avec l’article 6 de la convention de la Haye tel qu’il est interprété par la
doctrine qui considère, en effet, que la loi désignée au cours du mariage et le régime choisi
ont un effet rétroactif au jour de l’union. La loi nouvelle comme le régime nouveau régit tous
les biens des époux y compris ceux acquis avant le changement de loi et de régime.

L’argumentation est fondée sur l’article 6 alinéa 3 de la convention de la Haye qui dispose
que « la loi désignée s’applique à l’ensemble des biens des époux » mais aussi sur une
interprétation a contrario de l'article 8 alinéa 1er de la convention qui prévoit que le
changement « automatique » de la loi applicable en vertu de l'article 7 alinéa 2 n’a d’effet que
pour l’avenir et les biens appartenant aux époux antérieurement à ce changement ne sont pas
soumis à la loi désormais applicable.

108
« La publicité en matière de régimes matrimoniaux », D. BOULANGER, JCP N 1998, n° 1825 commentaire du
décret du 23 juin 1998

129
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Par ailleurs, l’article 1397-6 du Code Civil qui est contraire au principe de rétroactivité
résultant de l’article 6 de la convention de la Haye, est en contradiction avec l’article 55 de la
Constitution qui consacre le principe de la primauté de la convention sur la loi interne 109.

Monsieur KAIRALLAH s’est efforcé de concilier les textes des articles 1397-4 et 1397-6 du
Code Civil et l’article 6 de la convention considérant que les textes du Code Civil ne
concernent que la publicité du changement de régime et ne règlent pas le problème de son
application dans le temps, ils se bornent à fixer la date à laquelle les époux sont censés en
France être passés d’un régime matrimonial à un autre 110.

Ainsi, deux époux mariés sous un régime français qui se placeraient en cours de régime sous
une loi étrangère seront considérés en France comme soumis à cette loi dès la date de
l’établissement de l’acte dans leur rapport entre eux (à l’égard des tiers, trois mois après les
formalités de publicité), mais la loi choisie régira l’ensemble des biens des époux (article 6 de la
111
convention) .

Si la loi choisie régit l’ensemble des biens des époux, c’est à compter de la date
d’établissement de l’acte que le nouveau régime leur sera applicable.

Plaider en faveur de la rétroactivité du changement de régime n’est pas dépourvu d’intérêt


pratique.

En effet, la rétroactivité fait échec à la succession dans le temps de plusieurs régimes


matrimoniaux qu’il conviendrait de liquider séparément et répond aux souhaits des époux de
voir la loi et le régime s’appliquer à leur biens, de manière identique depuis leur mariage.

Malgré cette contradiction des textes, les auteurs estiment qu’il est possible de prévoir
conventionnellement dans l’acte, la rétroactivité du changement de loi et de régime, l’un et
l’autre relevant en droit international privé français de l’autonomie de la volonté 112 et de
stipuler, en conséquence, chaque fois que les époux en manifesteront le désir, que le
changement de loi et de régime rétroagira au jour de leur mariage et portera sur l’ensemble de
leurs biens.

 A l’égard des tiers

Le changement de régime matrimonial prend effet « à l’égard des tiers trois mois après que
les formalités de publicité prévues à l’article 1397-5 du Code Civil auront été accomplies »
(article 1397-6 alinéa 1er du Code Civil).

109
Cf M. REVILLARD op. cit. n° 279, et . BOULANGER op. cit.
110
E. KERKHOVE « La loi du 28 octobre 1997 » Rev. crit. DIP 1998, p. 249
111
Cf Juris-Classeur Rép. Not. Régimes matrimoniaux, Fasc. 300, p. 30, par Eric KERKHOVE
112
Cf D. BOULANGER art. préc. p. 91, M. REVILLARD op. cit. n° 279

130
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Toutefois, si ces formalités n’ont pas été effectuées, le changement de régime matrimonial
leur est opposable si dans les actes passés avec eux les époux déclarent qu’ils ont modifié leur
régime matrimonial (article 1397-6 alinéa 2 du Code Civil).

La question de la rétroactivité du régime choisi à leur égard se pose dans les mêmes termes
qu’à l’égard des époux.

b) Publicité du changement de régime matrimonial

En raison des dispositions de l’article 1397-5 du Code Civil, il convient d’opérer une
distinction selon que le changement de régime matrimonial est obtenu en application de la loi
française ou d’une loi étrangère :

 Le changement de régime matrimonial par application de la loi française

La publicité du changement de régime matrimonial consécutif à un changement de loi obéit à


des règles similaires à celles édictées en cas de changement de loi applicable au régime
matrimonial en cours de régime (cf supra).

 Le changement de régime par application d’une loi étrangère

L’article 1303-3 du NCPC envisage l’hypothèse où le changement de régime a été obtenu par
application d’une loi étrangère et non plus par application de la loi française.

Dans cette hypothèse, il faut opérer une distinction selon que l’acte de mariage est conservé
ou non par l’autorité française.

Si l’acte de mariage est conservé par une autorité française, le changement de régime
matrimonial obtenu en application de la loi étrangère est mentionné en marge de cet acte
(article 1303-3 alinéa 1er du NCPC).

Si une autorité française n’a pas conservé l’acte de mariage, le changement de régime
matrimonial sera inscrit au Répertoire civil annexe. Toutefois, dans ce cas, le changement de
régime doit résulter d’une décision d’un tribunal français, d’un acte établi en France en la
forme authentique ou d’un acte concernant les époux, dont l’un au moins est français (article
1303-3 alinéa 2 du NCPC).

Si le changement a donné lieu à une décision d’un tribunal français la mention en marge de
l’acte de mariage ou d’inscription au Répertoire civil annexe est faite conformément au 2°, 3°
et 4° de l'article 1294 du NCPC. Dans les autres cas, le Procureur de la République du lieu où

131
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

est conservé l’acte de mariage ou le Répertoire civil annexe fait procéder à cette mention ou à
cette inscription à la demande des époux ou de l’un d’eux (article 1303-4 du NCPC).

L’article 1303-5 du Code Civil édicte par ailleurs que lorsque les époux ont passé un contrat
de mariage en France, ils doivent adresser « au notaire détenteur de la minute du contrat, par
lettre recommandée avec accusé de réception, une copie ou un extrait de l’acte de mariage
mis à jour conformément aux articles 1303-3 et 1303-4 ou un certificat d’inscription au
Répertoire civil annexe. Si le contrat de mariage a été reçu par un agent diplomatique ou
consulaire français, les époux ou l’un d’eux avisent le Ministre des Affaires étrangères. Le
notaire, l’agent diplomatique ou consulaire français ou le ministre des Affaires étrangères,
fait mention du changement de régime matrimonial sur la minute du contrat de mariage et ne
doit plus en délivrer aucune copie ou extrait sans reproduire cette mention » (article 1303-5).

Enfin, en cas de changement de régime matrimonial intervenu à l’étranger, en application de


la loi française, les mesures de publicité prévues en cas de changement de régime matrimonial
par application d’une loi étrangère sont identiques (article 1303-6 du NCPC).

Exemple : Deux époux français mariés sous le régime légal français qui résident à
l’étranger veulent adopter le régime de la participation aux acquêts du droit français.

La loi régissant le régime matrimonial des époux étant la loi française, ce changement
de régime est soumis à l’homologation judiciaire prévue à l’article 1397 du Code Civil.

Après obtention du jugement d’homologation mention de ce changement de régime sera


effectué en marge de leur acte de mariage.

N.B. : Le Répertoire civil annexe du Service Central d’Etat civil du Ministère des Affaires
étrangères à Nantes pour assurer cette publicité « délivre à la demande de tout intéressé, des
certificats attestant de l’inscription au Répertoire civil annexe, d’actes, certificats, décisions
et extraits ». Il peut également délivrer des copies.

§ 2- LE CHANGEMENT AUTOMATIQUE DE LOI APPLICABLE (ARTICLE 7 DE LA CONVENTION).

Le changement automatique de régime matrimonial énoncé à l’article 7 de la convention de la


Haye est l’une des dispositions les plus contestées et les plus contestables de la convention 113.

Avant d’examiner ces hypothèses de changement automatique de régime, il convient toutefois


de préciser que ceux-ci ne concernent pas des époux mariés avant le 1er septembre 1992 ni les
époux qui ont déclaré la loi applicable à leur régime matrimonial ou adopté un contrat de
113
R. CRONE « Le changement automatique de loi applicable au régime matrimonial : une bombe à
retardement », Def. 2001, p. 1026

132
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

mariage et qu’en toute hypothèse, ces changements automatiques de régime n’ont aucun
effet rétroactif.

Exemple : Deux époux, l’un italien l’autre français, ont adopté par contrat de mariage
établi devant un notaire à Nantes en 1988, le régime français de la séparation des biens.
Ces deux époux resteront soumis à ce régime, même s’ils s’établissent en Italie pendant
plus de dix ans, aussi longtemps qu’ils n’auront pas manifesté leurs intentions de
changer de loi et de régime.

Cette permanence du rattachement lorsque les époux ont désigné la loi applicable ou établi un
contrat de mariage est repris par l’article 7 de la convention « la loi compétente en vertu des
dispositions de la convention demeure applicable aussi longtemps qu’ils n’en ont désigné
aucune autre et même s’ils changent de nationalité ou de résidence habituelle ».

Mais ce principe de la permanence du rattachement est battu en brèche par de nombreuses


exceptions qui le vident de sa substance.

En effet, lorsque la soumission des époux à une loi dépend d’un critère objectif (résidence
habituelle, nationalité) une mutation automatique du rattachement se produit.

La loi de la résidence habituelle va se substituer à la loi précédemment applicable. Dans trois


situations, il y aura substitution de la loi de la résidence habituelle à la loi précédemment
applicable.

Mais cette substitution n’aura aucun effet rétroactif.

1° La loi interne de l’Etat où les époux ont tous deux leur résidence habituelle va se substituer
à la loi précédemment applicable, lorsqu’après le mariage cette résidence dure depuis plus de
10 ans.

Exemple : Deux époux belges qui se sont établis après leur mariage célébré sans contrat
le 10 septembre 1992 aux Pays Bas, se trouvent donc mariés sous le régime légal
néerlandais de la communauté universelle différée. Si un an plus tard ils se sont fixés en
France où ils résident toujours depuis le 11 septembre 2003, ils seront automatiquement
soumis à la loi française et au régime légal français de la communauté d’acquêts.

2° La loi interne de l’Etat où les époux fixent leur résidence habituelle se substitue à la loi
précédemment applicable à leur régime matrimonial lorsque ceux-ci ont la nationalité de cet
Etat ou dés qu’ils acquièrent cette nationalité.

133
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Exemple : Deux époux français se sont fixés à Francfort pendant deux ans après leur
mariage célébré en 1993. Ils se trouvent mariés sous la loi allemande et sous le régime
légal allemand de la communauté différée des augments. Dés leur retour en France, ils
se sont trouvé mariés sous le régime légal français.

3° La loi de la résidence habituelle commune des époux se substitue à leur loi nationale
commune lorsqu’auparavant ils étaient soumis à cette dernière loi uniquement parce qu’ils
n’avaient pas de résidence dans le même Etat au moment du mariage. Il faut toutefois que
l’Etat de la nationalité n’ait pas fait de déclaration en faveur de la loi nationale.

Exemple : Deux époux algériens se sont mariés sans contrat en Algérie. Le mari est
venu travailler en France après son mariage tandis que sa femme restait en Algérie. En
vertu de l’article 4 aliéna 2-2 de la convention, les époux de même nationalité qui n’ont
pas de résidence commune sont réputés soumis à la loi algérienne et au régime de la
séparation des biens.

Lorsque la femme rejoindra son mari en France, les époux se trouveront


automatiquement placés sous l’empire du droit français et seront présumés mariés sous
le régime légal français.

Ces changements automatiques de régime n’ont pas d’effet rétroactif et les biens acquis
par les époux avant ceux-ci ne relèveront pas de la loi et du régime nouvellement
applicable (article 8 alinéa 1er).

Mais ils auront pour effet de soumettre les époux durant leur vie à plusieurs régimes
matrimoniaux successifs et ce à leur insu le plus souvent, régimes qu’il conviendra de liquider
en fonction de la nature de chacun

Exemple : Deux époux français se sont fixés à Londres après leur mariage célébré au
mois de septembre 1992. Trois ans plus tard, ils s’installent en France. L’immeuble
acquis par le mari seul à Londres lui sera propre, tandis qu’un autre immeuble acquis
par lui-même en France sera commun.

Si les époux souhaitent conférer un caractère commun à l’immeuble acquis par le mari à
Londres, il leur suffit dans un acte notarié ayant la forme du contrat de mariage et sans
homologation judiciaire, de déclarer qu’ils entendent depuis leur mariage être placés
sous la loi française et le régime de la communauté d’acquêts (cf supra).

En déclarant la loi applicable à leur régime matrimonial avant ou après le mariage, ou en


adoptant un contrat de mariage, les époux feront échec à ces changements automatiques de

134
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

régime qui soulèveront dans la pratique notariale des difficultés lorsqu’il s’agira de les
liquider.

Mais ces changements de loi et de régime volontaires ou automatiques ne sauraient


préjudicier aux droits acquis par les tiers (article 8 de la convention).

SOUS-CHAPITRE III – LE DOMAINE DE LA LOI APPLICABLE AU REGIME MATRIMONIAL

Nous examinerons sous ce titre les matières qui relèvent du champ d’application de la loi
régissant le régime matrimonial des époux lors de son adoption, pendant la durée du régime et
au moment de sa dissolution.

Sans doute l’article 1er de la convention dispose-t-il que la loi applicable aux régimes
matrimoniaux « ne s’applique pas aux obligations alimentaires entre époux, aux droits
successoraux du conjoint survivant, à la capacité des époux ». Mais cette exclusion n’a rien
de limitatif, d’autres matières peuvent en être exclues et il est toujours possible aux parties de
soumettre à la loi régissant le régime, des matières exclues de son champ d’application par
l’article 1er de la convention.

SECTION I – LE DOMAINE D’APPLICATION DE LA LOI REGISSANT LE REGIME


MATRIMONIAL LORS DE SON ADOPTION

Le problème du champ d’application de la loi régissant le régime matrimonial lors de son


adoption suppose que les époux adoptent un contrat de mariage ou fassent une déclaration
expresse de la loi applicable au régime. En effet, la question de savoir de quelle loi relève, la
capacité des époux, leur consentement, la forme de la convention ne se posent pas lorsque la
détermination du régime s’établit à partir de la volonté présumée des époux ou sur un
rattachement objectif comme la résidence habituelle ou la nationalité commune des époux.

§ 1- LA CAPACITE DES EPOUX

Dans son article 1er la convention de la Haye exclut de son champ d’application la capacité
des époux. Dès lors se pose la question de savoir si la capacité des futurs époux de conclure
un contrat de mariage relève de leur loi personnelle ou de la loi du régime matrimonial.

135
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Dans son arrêt en date du 16 juillet 1971 114, la Cour de cassation devait confirmer sa
jurisprudence antérieure 115 : « la capacité de chaque époux de conclure un contrat de
mariage est déterminée par sa loi nationale ».

Exemple : Un néo-zélandais âgé de 19 ans entend faire précéder son mariage qui sera
célébré en France avec une française, d’un contrat de mariage. Le consentement de ses
parents sera requis, l’âge de la majorité en Nouvelle Zélande étant fixé à 20 ans.

§ 2- LE CONSENTEMENT DES EPOUX

Avant l’entrée en vigueur de la convention de la Haye, il était admis en l’absence de


jurisprudence que le consentement des époux au contrat de mariage relevait de la loi régissant
les effets du contrat. L’article 10 de la convention de la Haye devait partager cette analyse en
disposant que « les conditions relatives au consentement des époux quant à la loi déclarée
applicable sont déterminées par cette loi ».

§ 3- LA FORME DU CONTRAT DE MARIAGE

Si auparavant la forme du contrat de mariage relevait de la loi du lieu de rédaction du contrat


(locus regit actum) même si la règle n’avait qu’un caractère facultatif, depuis le 1er septembre
1992, il ne subsiste aucune ambiguïté sur la loi applicable à la forme du contrat. L’article 12
de la convention dispose en effet que « le contrat de mariage est valable quant à sa forme si
celle-ci répond, soit à la loi interne applicable au régime matrimonial, soit à la loi interne en
vigueur au lieu où le contrat a été passé (locus regit actum). Il doit toujours faire l’objet d’un
écrit daté et signé des deux époux ».

Quant à la désignation de la loi applicable par stipulation expresse, « elle doit revêtir la forme
prescrite pour les contrats de mariage, soit par la loi interne désignée, soit par la loi du lieu
ou intervient cette désignation. Elle doit toujours faire l’objet d’un écrit daté et signé des
deux époux » (article 13 de la convention).

Exemple : Deux époux roumains désirent changer de loi applicable à leur régime
matrimonial, adopter la loi française et un régime conventionnel français. Ce
changement de loi et de régime devra revêtir la forme notariée du droit français.

114
Rev. crit. DIP 1972, 612, note DROZ ; JDI 1972, 287, note LEHMANN
115
Cass. Civ. 1ère, 15 mai 1963, JCP 1963, II, p. 366, note MOTULSKY, Rev. crit. DIP 1964, 506, note
P. LAGARDE

136
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

SECTION II – LE DOMAINE D’APPLICATION DE LA LOI REGISSANT LE REGIME


MATRIMONIAL PENDANT LA DUREE DU REGIME

La loi applicable au régime matrimonial détermine la composition du patrimoine des époux


en déclarant propres ou communs les biens des époux lorsqu’ils sont mariés sous le régime de
la communauté ; elle précise en outre le formalisme à respecter pour conférer un caractère
propre à certains biens acquis durant le mariage 116.

Ainsi le remploi relèvera de la loi du régime : la Cour de cassation a fait application de la loi
belge régissant le régime matrimonial des deux époux lors de l’acquisition d’un immeuble
situé en France 117 pour déterminer le caractère propre ou commun d’un bien acquis en France
par l’un des époux avec clause de remploi.

La loi du régime s’applique encore aux pouvoirs respectifs des époux sur les biens propres ou
communs sous réserve des dispositions relatives au régime primaire (cf infra) et régira
l’obligation et la contribution aux dettes des époux.

D’autre part, il n’est pas contesté que les questions relatives aux incapacités générales qui
peuvent atteindre l’un ou l’autre des époux relèvent de la loi personnelle, comme l’incapacité
de la femme mariée ou l’autorité maritale qui sont soumises à la loi qui régit les effets
personnels du mariage 118. En revanche, l’on peut hésiter sur certaines institutions qui sont à
« la frontière » de la loi du régime, de la loi qui régit les effets du mariage ou de la loi
réelle 119.

Il en est ainsi de l’hypothèque légale du régime primaire et des contrats entre époux.

§ 1- L’HYPOTHEQUE LEGALE

La question de la détermination de la loi applicable à l’hypothèque légale des époux est


controversée. Certaines décisions des tribunaux et certains auteurs soumettent l’existence de
l’hypothèque légale à la loi qui régit les effets du mariage 120, tantôt de la loi du régime, tantôt
de la loi de la créance garantie 121.

116
Cf Rép. Not. Form. Régimes matrimoniaux, Fasc. 300, n° 92 ; Rép. not. DIP, Fasc. 556, n° 115 et s. ; E.D.
v° Régimes matrimoniaux n° 134 ; Versailles 20 décembre 1990, JDI 1992, 101, note REVILLARD
117
Cass. Civ. 1ère, 12 juin 1978, D. 80, 202, note F. BOULANGER
118
Encyclopédie Dalloz DIP, v° Mariage, n° 213 et s.
119
Juris-Classeur Form. Régimes matrimoniaux, Fasc. 300, n° 92
120
Amiens 5 février 1990, Juris-Data 048070
121
Paris 16 octobre 1975, Rev. crit. DIP 1976, 495, note FADLAHAH

137
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Dans la mesure où l’hypothèque légale entre époux a pour finalité de garantir les créances
entre époux qui ont vu le jour au cours du régime, il paraît souhaitable de rattacher
l’hypothèque légale à la loi du régime matrimonial 122.

§ 2- LE REGIME PRIMAIRE 123

Les dispositions des articles 214 à 226 du Code Civil introduites dans celui-ci par la loi du 13
juillet 1965 ont générées ce qu’il est coutume d’appeler aujourd’hui un régime primaire ou un
régime matrimonial de base applicable par le seul effet du mariage et quel que soit le régime
matrimonial des époux (article 226 du Code Civil).

La question s’est alors posée de savoir à quelle loi devrait être soumis le régime primaire ou
statut fondamental.

Certains auteurs ont préconisé l’application de la loi qui régit les effets personnels du
mariage, d’autres l’application de la loi du régime matrimonial d’autres enfin ont prétendu
qu’il s’agissait de lois de police immédiatement applicables à tous les époux se trouvant sur le
territoire national.

Mais une partie de la Doctrine constatant le caractère « composite » 124 du régime primaire,
voire « hétéroclite », 125 et doutant de la possibilité d’appliquer une loi unique, considère qu’il
y a lieu de rechercher cas par cas la loi applicable à chaque disposition du régime primaire 126.

C’est ainsi que les articles 212 et 213 du Code Civil concernant l’obligation de fidélité,
secours et assistance relèveront de la loi qui régit les effets personnels du mariage, tandis que
l’article 214 du Code Civil (contribution aux charges du mariage) relèvera de la loi applicable
aux obligations alimentaires, telle qu’elle résulte de la convention de La Haye du 2 octobre
1973.

L’article 215 alinéa 3 (qui interdit à chacun des époux de disposer du local pour lequel est assuré le
logement de la famille ainsi que des meubles meublants), les articles 217, 219, 220-1 et 220-3 qui
ont pour objet de remédier à des situations matrimoniales de crise, les articles 220 (pouvoir
ménager des époux), 221 (comptes de dépôts et de titres) et 222 (présomptions de pouvoirs), textes
qui ont trait au crédit public et à l’intérêt des tiers, enfin l’article 223 (exercice d’une profession
séparée et perception des gains et salaires), sont en revanche applicables à tous les étrangers
résidant sur le territoire national au titre de loi de police ou d’urgence.

122
Form. not. Régimes matrimoniaux, Fasc. 300, n° 105
123
Supra p. 56
124
LAGARDE, Rev. crit DIP 1967, p. 462
125
LOUSSOUARN et BOREL n° 314
126
BATIFFOL et LAGARDE n° 631 bis et note Rev. crit. 1967, 462 , WIEDERKEHR JCP DIP n° 556, n° 312 et s

138
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Enfin, les articles 218 et 225 (mandat entre époux et disposition de leurs biens) doivent être
soumis à la loi qui régit leur régime matrimonial 127

Exemple : Un époux de nationalité anglaise marié sans contrat en 1990, domicilié en


France désire vendre l’immeuble qu’il a acquis dans ce pays et qui constituait le
logement de la famille. Le consentement de l’épouse est-il nécessaire ?

Les époux s’étant par hypothèse mariés sous le régime anglais de la séparation des
biens, l’immeuble acquis par le mari seul lui est propre. Mais celui-ci constituant le
logement de la famille, son aliénation suppose l’accord de l’épouse. Dans l’hypothèse
où celle-ci refuserait de donner son consentement, il sera possible de recourir aux
dispositions de l’article 217 du Code Civil.

§ 3- LES CONTRATS ENTRE EPOUX

Les contrats entre époux, notamment les ventes entre époux, les sociétés entre époux et les
donations entre époux, ne relèvent pas de la loi applicable au régime matrimonial mais de la
loi qui régit les effets personnels du mariage (loi nationale des époux s’ils sont de même
nationalité, loi de leur domicile commun s’ils sont de nationalité différente et à défaut d’un tel
domicile la loi du tribunal saisi).

En revanche, lorsque le contrat comprendra des stipulations liées au régime matrimonial lui-
même (clause d’emploi ou de remploi par exemple), c’est la loi du régime matrimonial dont il
conviendra de faire application.

D’autre part, la loi du contrat peut également trouver à s’appliquer (condition de formation du
contrat ou de forme) ainsi que la loi personnelle (capacité de contracter).

Ainsi, les ventes entre époux et les sociétés entre époux relevant de la loi qui régit les effets
personnels du mariage ne seront valables que si celles-ci sont autorisées par la loi du domicile
commun des époux, si ceux-ci sont de nationalité différente ou par la loi nationale de ceux-ci
s’ils sont de même nationalité128.

Exemple : Un anglais marié sous le régime anglais de la séparation de biens a acquis un


immeuble en France, ou il réside. La vente de celui-ci est envisagée au profit de son
épouse de nationalité française.

Une telle vente est-elle possible ?

127
JCP DI Fasc. 556, n° 126 et s.
128
Pour des exemples cf infra

139
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

En droit international privé les ventes entre époux relèvent de la loi qui régit les effets
personnels du mariage (loi nationale des époux s’ils sont de même nationalité, loi de leur
domicile commun s’ils sont de nationalité différente). En l’espèce les époux étant de
nationalité différente, la loi française est applicable et celle-ci autorise les ventes entre
époux séparés de biens.

Quant aux donations entre époux, il faudra opérer une distinction selon que l’on est en
présence d’une donation de biens présents ou de biens à venir (cf infra).

SECTION III – LE CHAMP D’APPLICATION DE LA LOI APPLICABLE AU REGIME


MATRIMONIAL A LA FIN DU REGIME

La loi dont relève le régime matrimonial va se heurter parfois à la loi successorale.

§ 1 – LA DISSOLUTION ET LA LIQUIDATION DU REGIME MATRIMONIAL

A- Les causes de la dissolution

Il était traditionnellement enseigné que la loi applicable au régime matrimonial déterminait les
causes de sa dissolution 129. Mais les auteurs s’accordent aujourd’hui à reconnaître que « cette
règle peut avoir pour conséquence le maintien du régime alors que le mariage est dissout ou
déclaré nul pour une cause que ne retient pas la loi du régime » 130.

C’est pourquoi on fait une distinction entre les causes de dissolution du régime qui
n’entraînent pas la dissolution du mariage (changement volontaire ou non du régime – qui relève
de la loi du régime) et les causes de dissolution du régime qui entraînent la dissolution du
mariage et qui relèvent de la loi applicable aux institutions qui mettent fin au mariage.

Le régime matrimonial sera dissous si la loi française applicable considère que le mariage est
dissous. C’est ainsi que la mort de l’un des conjoints, le divorce prononcé en France ou
prononcé à l’étranger mais reconnu en France, la nullité du mariage, entraîneront en France la
dissolution du régime quelle que soit la loi du régime.

En revanche, les causes de la dissolution du régime intervenant durant le mariage relèveront


de la loi qui régit le régime matrimonial.

129
BATTIFOL et LAGARDE n° 633
130
E. KERKHOVE Juris-Classeur notarial formulaire précité n° 112 ; G. DROZ E.D. DIP, v° Régimes
matrimoniaux, n° 171

140
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

La date de dissolution du régime matrimonial par divorce dépendra du jugement de divorce et


de la loi du divorce. La rétroactivité du divorce connue en droit français, ne trouvera à
s’appliquer que si la loi française est applicable au divorce 131

B- La liquidation du régime

La loi du régime précise les règles selon lesquelles doit s’effectuer la liquidation de la
communauté. Elle détermine les droits respectifs des époux. Elle sera encore compétente pour
la preuve des reprises et le partage des biens 132.

De la loi du régime dépend encore l’existence et les effets voire la forme d’une renonciation à
communauté 133.

La loi du régime régit encore le recel.

Les auteurs estiment néanmoins que les époux capables et maîtres de leurs droits peuvent
convenir d’une liquidation de leur régime matrimonial sur des bases différentes sous réserve
des droits des tiers134.

En revanche, le régime de l’indivision et sa cessation sont soumis à la loi du lieu de situation


des biens 135.

§ 2- L’APPLICATION DE LA LOI SUCCESSORALE

S’il est constant que les droits successoraux du conjoint survivant sont régis par la loi
successorale, en revanche on s’est demandé si les avantages matrimoniaux que les époux ont
pu se consentir relevaient de la loi du régime matrimonial ou de la loi successorale.

D’une façon générale, la doctrine française soumet les avantages matrimoniaux à la loi du
régime et non à la loi successorale puisqu’il ne s’agit pas de libéralités 136.

Mais qu’en est-il de l’action en retranchement de l’article 1527 du Code Civil qui vient
limiter la portée de l’avantage matrimonial (par exemple l’adoption de la communauté universelle
avec clause d’attribution de la communauté au survivant) ?

131
Cf Juris-Classeur notarial formulaire précité, n° 112 et E.D. G. DROZ préc. n° 172
132
Cass. Civ. 12 juin 1979, D 79, IR 460, note B. AUDIT ; Cass. Civ. 3 janvier 1985, Rev. crit. DIP 85 652, note
BATIFFOL
133
CA Paris 2 juillet 1954, Rev. crit. DIP 1954, 810
134
Paris 3 janvier 1985 précité et « Liquidation du régime matrimonial et choix de la loi applicable » JCPN
2005, n° 1450, p. 1871, note D. BOULANGER
135
Cass. Civ. 22 octobre 1985, JDI 1988, 1005, note WIEDERKEHR
136
Cf M. REVILLARD, op. cit. n° 656

141
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

L’action en retranchement a pour but de protéger les héritiers contre des avantages
matrimoniaux qui porteraient atteinte à la réserve héréditaire. Aussi les auteurs la soumettent
ils à la loi successorale. Elle trouvera donc à s’appliquer sur les immeubles successoraux
situés en France (même dans l’hypothèse où le régime matrimonial relèverait d’une loi étrangère 137).

Exemple : Deux époux britanniques mariés sous le régime légal anglais de la séparation
des biens ayant chacun des enfants issus d’un précédent mariage ont acquis un
immeuble en France.

Ils souhaitent adopter la communauté universelle avec clause d’attribution de la


communauté au survivant pour leur immeuble en France en vertu de l'article 6 de la
convention de la Haye.

Quelle sera l’efficacité de cette clause au décès ?

Les immeubles situés en France seront dévolus selon la loi française qui connaît l’action
en retranchement édictée par l’article 1527 du Code Civil. Celle-ci relevant de la loi
successorale, les enfants du premier lit du prémourant des époux pourront l’invoquer ou
renoncer à l’exercer.

137
Cf M. REVILLARD op. cit. n° 626, DROZ E.D. précité n° 179

142
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

CHAPITRE III – LES SUCCESSIONS ET LES LIBERALITES


EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE 138

Les successions comportent aujourd’hui de plus en plus souvent les éléments d’extranéité,
que le défunt soit de nationalité étrangère et possède des biens en France, ou qu’il soit de
nationalité française et possède des biens situés à l’étranger. Les acquisitions notamment de
résidences secondaires en France par des étrangers ou à l’étranger par des français en sont la
cause principale.

La question se pose alors de savoir qu’elle est la loi applicable à la succession qui s’est
ouverte en France ou à l’étranger. Question d’importance s’il en est car les droits des héritiers
ne sont pas les mêmes d’une législation à l’autre. Par ailleurs, les règles de conflit qui
permettent de déterminer la loi applicable ne sont pas identiques dans tous les pays : la France
et les pays anglo-saxons soumettent les successions immobilières à la loi du lieu de situation
des immeubles, les successions mobilières à la loi du domicile du défunt alors que l’Espagne,
l’Italie, l’Allemagne… soumettent les successions à une loi successorale unique : la loi
nationale du défunt.

Souvent avant même le décès de l’acquéreur, les biens acquis en France ou à l’étranger par
des français ou des étrangers font l’objet de donation de biens présents (donation, donation
partage) ou de donation de biens à venir entre époux. Il conviendra de s’interroger sur les
conditions de leur efficacité tant en France qu’à l’étranger.

SECTION I – LES SUCCESSIONS

Sous ce titre, nous examinerons successivement la détermination de la loi applicable à la


succession et son champ d’application.

SOUS-SECTION I – LA DETERMINATION DE LA LOI APPLICABLE A LA SUCCESSION

Après un rappel de la règle traditionnelle de conflit en matière de succession, qui s’applique


aussi bien aux successions ab intestat qu’aux successions testamentaires, nous passerons en
revue les situations dans lesquelles son application est exclue.

138
E.D. de DI par Paul LAGARDE, v° Les successions, M. REVILLARD, op. cit. n° 502 et s.

143
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

§ 1- LA REGLE DE CONFLIT FRANÇAIS EN MATIERE DE SUCCESSION

A- Une règle toujours actuelle

 Les successions mobilières sont dévolues selon la loi du lieu du dernier domicile du
défunt.

 Les successions immobilières sont dévolues selon la loi du lieu de situation des
immeubles.

Cette règle est aujourd’hui appliquée sans réserve par les tribunaux.

Exemple : Un français est décédé en France où il résidait. Il possédait un immeuble à


Londres. L’immeuble successoral sera dévolu selon la loi britannique qui ignore la
réserve héréditaire.

Exemple : Un espagnol domicilié en France lors de son décès possédait un compte


bancaire en France. Ce compte sera dévolu selon la loi française.

Exemple : Un algérien décède domicilié en France. Ses biens mobiliers seront dévolus
selon la loi française.

Exemple : Un ressortissant suisse marié avec une française sous le régime de la


séparation des biens est décédé ab intestat en Suisse où il était domicilié, laissant pour
lui succéder son épouse survivante et deux enfants d’une précédente union.

L’actif de sa succession se compose de comptes bancaires ouverts en France et en


Suisse, d’un appartement à Genève et d’un hôtel particulier à Paris.

Les comptes bancaires ouverts en France et en Suisse seront dévolus selon la loi du lieu
du dernier domicile du défunt, la loi suisse.

L’immeuble de Genève sera dévolu selon la loi suisse, loi du lieu de sa situation et
l’hôtel particulier français selon la loi française.

En droit suisse, le conjoint survivant peut appréhender la moitié de sa succession, les


enfants l’autre moitié.

En droit français, en présence d’enfant d’un précédent mariage, l’épouse survivante ne


peut prétendre qu’au quart de la succession en toute propriété (article 757 du Code civil).
Les droits du conjoint survivant sont ainsi différents selon qu’il est fait application de la
loi française ou la loi suisse.

144
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

B- Les critiques portées à l’encontre de la règle

La principale critique faite à la règle de conflit française est de morceler les successions. Il y a
autant de successions que de masses de biens soumises à des législations différentes.

Lorsqu’un français décède en laissant un immeuble en France, un immeuble en Grande


Bretagne et un immeuble aux USA, trois successions devront être réglées : une en France, une
aux USA et une en Grande Bretagne.

Ainsi, tandis que certains pays soumettent les successions à une loi successorale unique
consacrant ainsi le principe de l’unité de la succession, la France retient le principe de la
pluralité des successions (cf annexes).

D’autre part, la règle de conflit française contraint à une qualification des biens de la
succession car la loi applicable dépendra de leur nature mobilière ou immobilière. Cette
qualification, qui varie d’un pays à l’autre, se fait « lege fori », c’est à dire selon les critères
du tribunal saisi. En France les parts de SCI sont qualifiées de biens meubles, tandis que
d’autres pays les considèrent comme des biens immobiliers.

La règle de conflit en matière successorale exige encore que l’on détermine le domicile exact
du de cujus selon les critères du droit français (articles 102 et s. du Code Civil).

Enfin, la règle de conflit française multiplie les renvois.

Le problème du renvoi trouve sa source dans un conflit de rattachement dû à la variété des


règles de conflit d’un Etat à l’autre.

On parlera de conflit positif lorsque plusieurs Etats déclarent leur propre loi compétente et de
conflit négatif lorsqu’un Etat déclinera la compétence que l’autre lui attribue.

Exemple de conflit positif : Une juridiction française est saisie d’une question d’état et
de capacité des personnes concernant un anglais domicilié en France. En droit
international privé français la loi compétente est la loi nationale, en droit international
privé britannique la loi compétente est la loi du domicile.

Exemple de conflit négatif : Un français qui a acquis un immeuble en Espagne est


décédé en France. Quelle est la loi applicable à la dévolution de l'immeuble situé en
Espagne ?

La règle de rattachement française donne compétence à la loi espagnole, l’immeuble


successoral étant situé en Espagne et la règle de conflit espagnole donne compétence à
la loi française, loi nationale du de cujus.

145
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Ce renvoi de la loi étrangère devait être reconnu par les tribunaux français pour la première
fois dans la célèbre affaire Forgo 139. Il est admis aujourd’hui dans tout règlement de
succession lorsque la règle de conflit étrangère déclarée compétente par la loi française donne
elle-même compétence à la loi française.

Dans l’exemple précédent, l’immeuble situé en Espagne sera dévolu par le jeu du renvoi selon
la loi française.

En raison de l’admission du renvoi en droit international privé français, le notaire chargé du


règlement de la succession devra systématiquement rechercher quelle est la règle de conflit
étrangère en matière de succession.

C- Le projet de convention de la Haye du 1er août 1989 sur la loi applicable


aux successions

L’un des principaux griefs fait à la règle de conflit français qui consacre le principe de la
pluralité des successions, c’est d’interdire à toute personne qui possède des biens immeubles
dans des pays différents de procéder à un règlement anticipé de sa succession 140.

La convention de la Haye du 1er août 1989 sur la loi applicable aux successions à cause de
mort entend remédier à cette situation en soumettant les successions à une loi successorale
unique.

Ainsi, l’article 3 de la convention énonce que les successions à cause de mort sont régies soit
par :

 la loi de la résidence habituelle du de cujus, si celui-ci résidait au moment de son


décès dans le pays de sa nationalité ;

 la loi de l’Etat de la résidence du de cujus, si celui-ci a résidé dans cet Etat pendant les
cinq dernières années précédant son décès ;

 la loi nationale du de cujus dans tous les autres cas.

L’article 5 de la convention réserve au de cujus la possibilité de désigner la loi applicable à sa


succession (professio juris). Mais le choix ne pourra porter que sur celle de l’Etat où le défunt
avait sa résidence, ou celle dont il avait la nationalité lors de son décès, ou lors de la
désignation de la loi.

139
Cass. Civ. 2 juin 1878, DP 79, 1, p. 156 ; Cass. req. 22 février 1882, DP 82, 1, p. 301 ; Cass. Civ. 7 mars
1938, Rev. crit. DIP 1938, p. 472
140
Cf G. DROZ E.D. DI v° Successions n° 7

146
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Toutefois, ce principe de la soumission de la succession à une loi successorale unique est


remis en cause par l’article 6, qui offre au défunt la possibilité de soumettre certains biens
successoraux à une loi différente.

La France n’a pas encore ratifié cette convention et il est fort probable qu’elle ne sera pas
ratifiée dans un proche avenir 141.

§ 2- LES DEROGATIONS A L’APPLICATION DE LA REGLE DE CONFLIT FRANÇAISE

La règle de conflit française peut donner compétence aussi bien à la loi française qu’à la loi
étrangère. Or il peut être inopportun d’appliquer sur le territoire national une loi étrangère.
Aussi sera-elle écartée lorsqu’elle sera contraire à l’ordre public français ou lorsque son
application résultera d’une fraude à la loi.

A ces deux cas classiques d’éviction de la loi étrangère déjà rencontrés s’en ajoute une
troisième en matière de succession : le droit de prélèvement.

A- L’ordre public

La loi étrangère normalement compétente en vertu de la règle de conflit française doit être
écartée lorsqu’elle établit des discriminations entre les personnes appelées à une succession,
fondées sur la race, la naissance, le sexe ou la religion.

Exemple : Un algérien décède en Algérie où il était domicilié. Il avait acquis deux


immeubles en France et possédait en outre un portefeuille de valeurs mobilières
déposées dans une banque française et divers biens en Algérie. Le cadi algérien a
adressé une Fredha (acte de notoriété) qui reconnaît à l’héritier mâle des droits supérieurs
à ceux de ses sœurs. Le notaire français doit-il tenir compte de cet acte de notoriété
algérien ?

Les immeubles situés en France seront dévolus conformément à notre règle de conflit
selon la loi française qui n’établit aucune discrimination entre les héritiers fondée sur le
sexe.

La dévolution du portefeuille de valeurs mobilières par application des règles de conflit


française et algérienne relève de la loi algérienne (l’Algérie soumet les successions à une
loi successorale unique : la loi nationale du de cujus). Mais celle-ci sera écartée au nom de
l’ordre public français.

141
Cf RM JO Sénat 26 février 1998, p. 678

147
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Le notaire français devra régler la succession en tenant compte de la loi étrangère mais
en rejetant la discrimination résultant de son application. Le portefeuille de valeurs
mobilières sera recueilli par parts égales entre les héritiers.

Exemple : Un égyptien de confession musulmane est décédé domicilié en Égypte.


L’actif successoral est composé notamment de biens mobiliers situés en France. Le
défunt avait épousé une française de religion catholique et les enfants ont été élevés
dans la religion catholique. La loi successorale égyptienne, normalement compétente en
raison du lieu du décès, interdit à l’instar de tous les Etats musulmans qu’un non
musulman hérite d’un musulman et réciproquement. La loi égyptienne devra être
écartée en France comme contraire à l’ordre public.

B- La fraude à la loi

Celle-ci consiste « à jouer » sur un point de rattachement (la nature mobilière ou immobilière
d’un bien par exemple), pour écarter la loi normalement applicable en vertu de la règle de
conflit avec une intention de fraude aux dispositions impératives de cette loi.

Exemple : Un français, voire un britannique, domicilié en France, ne saurait transférer


précipitamment son domicile en grande Bretagne pour échapper à la réserve du droit
français dont pourrait se prévaloir ses enfants sur ses biens mobiliers.

En matière de succession immobilière la fraude, relativement rare, est illustrée par la


jurisprudence CARON 142.

Un testateur de nationalité américaine domicilié dans les Îles Vierges désirait déshériter ses
enfants au profit d’une tierce personne. Dans ce but, il avait apporté à une société constituée
dans ce pays l’immeuble qu’il possédait en France et remis à un trustee les actions de la
société en lui précisant qu’elles devaient être transférées à son décès à la personne qu’il
voulait gratifier. La Cour de cassation devait confirmer l’arrêt de la Cour d’appel d’Aix en
Provence qui avait vu une fraude dans la « manipulation consistant, par une série d’opération
harmonisée, à modifier l’élément de rattachement constitué à l’origine par la nature
immobilière du bien situé en France, devenu ensuite bien meuble, afin d’écarter l’application
de la loi successorale française prévoyant une réserve ».

Toutefois, l’apport ou la vente à une société française ou étrangère d’un bien immobilier situé
en France ne peut en tant que tel être présumé frauduleux (dans l’arrêt Caron la fraude était
manifeste) « à moins de troubler gravement la pratique notariale qui voit souvent dans ce

142
Cass. 20 mars 1985, JCP 86, G, II, 20630, note F. BOULANGER ; Rev. Crit. DIP 1986, p. 66, note LEQUETTE

148
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

procédé le moyen de régler au mieux les intérêts de ses clients des problèmes d’ordre
économique fiscal ou familial » 143.

C- Le droit de prélèvement

La loi étrangère normalement compétente en vertu de la règle de conflit française peut encore
se trouver écartée par le jeu du droit de prélèvement institué par la loi du 14 juillet 1819
toujours en vigueur, qui dispose dans son article 2 que « dans le cas du partage d’une même
succession entre cohéritiers étrangers et français, ceux-ci prélèveront sur les biens situés en
France une portion égale à la valeur des biens situés en pays étranger dont ils seraient exclus
à quelque titre que ce soit en vertu des lois et coutumes locales ».

La jurisprudence française devait donner au texte une portée plus large encore, si bien qu’il
doit se lire aujourd’hui de la façon suivante : « le français, auquel la loi successorale
étrangère compétente attribue des droits inférieurs à ceux qui résulteraient pour lui de
l’application de la loi française, peut prélever sur les biens situés en France une portion
égale à la différence de ces droits ». C’est une véritable règle de conflit de lois dans l’espace.

Cette institution fortement teintée de nationalisme puisqu’elle ne profite qu’aux héritiers


français est fréquemment appliquée par les tribunaux 144.

Il a essentiellement pour objectif de protéger la réserve successorale telle qu’elle existe en


droit français.

1- Les caractéristiques du droit de prélèvement

- Le droit de prélèvement n’appartient qu’aux héritiers français ayant cette qualité au


moment de l’ouverture de la succession.

- Il peut s’exercer à l’encontre des cohéritiers étrangers mais également à l’encontre des
cohéritiers français, n’y auraient-ils que ceux-ci d’appelés à la succession.

- Il suppose que la diminution des droits de l’héritier français résulte d’une loi étrangère.

- Le prélèvement ne peut être exercé qu’au profit d’héritiers.

143
E. KERKHOVE in Juris-Classeur Form. Successions internationales, Fasc. 10, n° 73
144
Cass. 4 février 1986, Def. 87, art. 33837, p. 4, note REVILLARD

149
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

2- La mise en œuvre du droit de prélèvement

Pour mettre en œuvre le droit de prélèvement, il convient de réunir fictivement en une masse
unique les biens successoraux quels que soient leur nature et le lieu où ils se trouvent.

Le montant du prélèvement est alors égal à la différence entre la part qui reviendrait à
l’héritier français dans la masse successorale si l’on faisait application de la loi française et la
part qui lui est attribuée par la loi étrangère. Le prélèvement ne peut s’exercer que sur la part
de l’héritier avantagé. Mais il s’opère sur tous les biens situés en France quelle que soit leur
nature mobilière ou immobilière 145.

Exemple : Monsieur X de nationalité britannique est décédé à Londres où il était


domicilié avec son épouse de nationalité française, depuis son mariage célébré sans
contrat préalable. Il laisse pour lui succéder son épouse survivante instituée légataire
universelle et deux enfants issus du mariage. Il possédait un immeuble de rapport à
Oxford et une propriété en France acquise avant son mariage.

Les époux s’étant fixés à Londres après leur mariage sont présumés mariés sous le
régime anglais de la séparation des biens.

Quant aux enfants communs nés d’une mère française, ils sont français (article 18 du
Code Civil). L’immeuble situé à Oxford est dévolu conformément à la règle de conflit
française et britannique, selon la loi anglaise, qui ignore la réserve héréditaire. La
totalité de cet immeuble peut en conséquence être appréhendée par l’épouse. Mais les
enfants issus du mariage, de nationalité française, vont pouvoir exercer leur droit de
prélèvement sur l’immeuble situé en France.

Toutefois, les enfants majeurs et maîtres de leurs droits peuvent renoncer à exercer le
droit de prélèvement et consentir à l’exécution de la libéralité.

D- Droit conventionnel

La règle de conflit en matière de succession dont nous avons fait état ne trouve à s’appliquer
qu’en l’absence de convention internationale contraire.

La France n’est plus liée par aucune convention internationale concernant les conflits de lois
en matière de succession 146. La convention de la Haye du 1er août 1989 sur la loi applicable
aux successions n’est pas encore entrée en vigueur (cf supra) et la convention franco suisse du
15 juin 1969 a été abrogée.

145
Pour un exemple de calcul du droit de prélèvement : Juris-Classeur Not. Form., v° Partage, Fasc. B 25, par. E.
BALME
146
Cf E.D. DI, v° Successions n° 104

150
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Il faut toutefois signaler qu’en vertu des accords d’Evian de 1962, les successions des
ressortissants français décédés domiciliés en Algérie sont dévolues selon la loi française, alors
que la succession des algériens décédés domiciliés en France est dévolue selon la loi
française.

En ce qui concerne les pays d’Afrique Noire d’expression française, les conventions passées
entre ces pays et la France soumettent le statut personnel à la loi nationale. La question se
pose alors de savoir si les successions doivent être inclues dans ce statut personnel. Les
tribunaux ne se sont pas encore prononcés sur la question.

Actuellement, l’Algérie, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Sénégal et la Tunisie soumettent


les successions à la loi nationale du défunt.

En revanche, le Congo Brazzaville, la République Centrafricaine, la Cote d’Ivoire et


Madagascar adoptent le principe de la pluralité des successions en distinguant entre les
successions mobilières et immobilières.

Enfin, le Bénin et le Cameroun soumettent les successions mobilières à la loi nationale et non
à la loi du domicile et les successions immobilières à la loi du lieu de situation des
immeubles 147 (voir tableau en annexe).

SOUS-SECTION II – LE CHAMP D’APPLICATION DE LA LOI SUCCESSORALE

La loi successorale désignée par la règle de conflit s’applique indifféremment à la succession


ab intestat et à la succession testamentaire. Un testament pourra ainsi se heurter aux
dispositions impératives de la loi successorale.

Le droit français ne reconnaît pas la « professio juris » qui offre au testateur défunt la
possibilité de désigner la loi applicable à sa succession, laquelle est admise en droit suisse, en
droit allemand, voire en droit québécois et qui est prévue dans la convention de la Haye du 1er
août 1989 sur la loi applicable aux successions.

Le recours à la professio juris permet en effet d’écarter la loi normalement compétente qui
connaît la réserve héréditaire au profit d’une autre qui l’ignore. Si elle était admise en France,
elle permettrait, par voie de déclaration expresse, à un anglais de soumettre ses immeubles
situés en France à la loi britannique qui ignore la réserve héréditaire.

147
Cf M. REVILLARD DIP et pratique notariale, n° 529

151
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

C’est ainsi que la volonté exprimée par un défunt, de nationalité suisse, dans son testament, de
soumettre tous ses biens, quelle qu’en soit la nature et en quelque lieu qu’ils se trouvent, à la
loi suisse, est dépourvu d’efficacité sur les immeubles situés en France qui sont dévolus selon
la loi française.

L’étude de la dévolution des successions testamentaires ou ab intestat qui relève des règles
impératives de la loi successorale et du partage successoral, sera précédée de l’examen des
problèmes soulevés par l’existence d’un testament dans la pratique notariale.

§ 1- LES TESTAMENTS EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE

Un testament n’est efficace dans le pays où il doit s’exécuter que s’il revêt l’une des formes
permises dans ce pays, ou admise par la loi déclarée applicable par les règles de conflit de lois
dans l’espace de cet Etat.

A- Les conditions de validité d’un testament en droit international privé

1- Les règles de conflit

Longtemps régie par la théorie de la forme des actes, la question de la validité en la forme des
testaments, donnait lieu à un important contentieux qui a quasiment disparu depuis l’entrée en
vigueur en France en 1967 de la convention de la Haye du 5 octobre 1961 sur les conflits de
lois en matière de forme des dispositions testamentaires 148. En effet, celle-ci édicte des règles
de conflit alternatives dans le but de favoriser la validité en la forme des testaments.

Cette convention a un caractère universaliste, son article 6 dispose en effet que « l’application
des règles de conflit établies par la convention est indépendante de toute condition de
réciprocité. La convention s’applique même si la nationalité des intéressés ou la loi
applicable n’est pas celle d’un Etat contractant ».

L’article 1er de la convention pose le principe de la validité des testaments qui revêtent les
formes de l’une des lois internes suivantes :

 la loi du lieu où le testateur a disposé ;


 la loi du lieu dans lequel le testateur avait son domicile, soit au moment où il a
disposé, soit au moment de son décès ;
 la loi du lieu dans lequel le testateur avait sa résidence habituelle, soit au moment où il
a disposé, soit au moment de son décès ;

148
Rev. crit. DIP 1968, p. 145, JDI 1968, p. 489

152
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

 la loi d’une nationalité possédée par le testateur, soit au moment où il a disposé, soit
au moment de son décès ;
 ou pour les immeubles, la loi du lieu de leur situation.

L’article 2 de la convention prévoit que « l’article 1er s’applique aux dispositions


testamentaires révoquant une disposition testamentaire antérieure ».

En vertu des dispositions de l’article 1er de la convention de la Haye du 5 octobre 1961 en


matière de forme des dispositions testamentaires, sera valable en France le testament d’un
anglais établi en Angleterre en la forme locale (testament dactylographié établi en présence de
deux témoins et signés par eux et le testateur).

En revanche, sera nul en la forme le testament établi en France par une personne de
nationalité française domiciliée en France au moment de sa rédaction et décédée en France et
ne possédant de patrimoine qu’en France, en la forme anglaise (cf infra), la forme retenue
n’étant ni celle admise par la loi de la résidence ou du domicile du testateur, au moment où il
a disposé ou au moment de son décès, ni celle de sa loi nationale ou du lieu où il a disposé, ni
celle de la situation de ses immeubles.

La révocation des testaments liée à la dévolution successorale relève de la loi successorale. En


revanche, la forme de la révocation obéit à la loi régissant la forme du testament.

2- Dispositions particulières

Si la convention de la Haye ne précise pas ce qu’elle entend par « domaine de la forme par
rapport au fond », elle résout deux difficultés rencontrées fréquemment en pratique, celle de
la validité des testaments conjonctifs et des qualités personnelles du testateur.

 La validité des testaments conjonctifs

L’article 4 de la convention en prévoyant qu’« elle s’applique également aux formes des
dispositions testamentaires faites dans un même acte par deux ou plusieurs personnes » vise
incontestablement les testaments conjonctifs prohibés en France comme dans de nombreux
autres pays (article 968 du Code Civil français). Le testament conjonctif qui revêt la forme de
l’une des lois visées à l’article 1er de la convention est valable.

Mais la convention de la Haye ne précise pas si la prohibition de tester en la forme


conjonctive est une question de fond (et la loi successorale serait alors applicable) ou une
question de forme relevant de la loi du lieu de sa rédaction. Reprenant une opinion partagée

153
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

par la majorité des auteurs, le TGI de Paris 149 devait déclarer que « l’interdiction de procéder
à des testaments conjonctifs édictée par l’article 968 du Code Civil est incluse dans les règles
générales établies par ce code sur la forme des testaments » et que « cette prohibition qui n’a
trait ni à la capacité personnelle du testateur ni à la validité des dispositions sur le fond
prises par le testateur est relative à des conditions de forme et non à des conditions de fond ».
Dès lors, s’agissant d’une question de forme, la loi du lieu de rédaction du testament est
compétente et tout testament établi dans un pays qui admet la validité des testaments
conjonctifs est valable en France.

Exemple : Deux époux de nationalité suédoise ont fait un testament conjonctif dans leur
pays d’origine où cette forme de testament est admise. Ils s’interrogent sur l’efficacité
de leur testament en France où ils possèdent la plus grande partie de leurs immeubles.

La Suède, à l’instar de la Norvège, du Danemark et de l’Allemagne (article 2265 du


BGB), admet la validité des testaments conjonctifs. La France qualifiant de question de
forme la prohibition de tester en la forme conjonctive et la convention de la Haye dans
son article 4 décidant que sont du domaine de la convention les formes des dispositions
testamentaires faites dans un même acte par deux ou plusieurs personnes, ce testament
conjonctif établi en Suède est valable en France.

Exemple : Deux époux français, résidant en Allemagne, peuvent valablement faire un


testament conjonctif conformément au droit allemand. Il pourra s’exécuter sur les biens
mobiliers et immobiliers leur appartenant situés en France.

→ Les pactes successoraux

Connus de plusieurs législations étrangères (Allemagne, Suisse), ils se heurtent en France à


l’article 1130 du Code civil qui prohibe les pactes sur succession future.

Dans la mesure où ceux-ci viennent modifier conventionnellement la dévolution des


successions ab intestat et notamment les droits des héritiers réservataires, ils relèvent de la loi
successorale.

Le pacte successoral établi en Suisse où il est autorisé devrait être tenu pour nul en France et
donc frappé d’inefficacité sur les immeubles français dévolus selon la loi française. Mais
conventionnellement, il sera toujours possible de l’exécuter.

149
24 avril 1980, Rev. crit. DIP 1982, p. 684, note BATIFFOL

154
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

 Les qualités personnelles du testateur

L’article 5 de la convention dispose que « les prescriptions limitant les formes des
dispositions testamentaires admises et se rattachant à l’âge, à la nationalité ou à d’autres
qualités personnelles du testateur sont considérées comme appartenant au domaine de la
forme ».

Il en résulte que sont valables en France les testaments établis par des ressortissants étrangers
dans une forme prohibée par leur loi nationale.

C’est ainsi qu’était tenu pour valable en France, avant que les Pays-Bas abrogent l’article 992
de leur Code Civil, le testament établi en France par un hollandais en la forme olographe alors
que la législation néerlandaise interdisait à ses ressortissants de tester à l’étranger en la forme
olographe.

Cette prohibition étant qualifiée en France de question de forme, le testament qui revêtait
l’une des formes prévues à l’article 1er de la convention de la Haye était donc valable, mais
aux Pays-Bas où la prohibition était qualifiée de question de capacité le testament était
inopérant.

Le Portugal connaît aujourd’hui une disposition semblable à celle de l’article 992 ancien du
Code Civil néerlandais. En effet, le Code Civil portugais, qui ignore la forme olographe des
testaments, impose à ses ressortissants, même résidant à l’étranger, de tester en la forme
authentique. Ainsi le testament olographe d’un portugais, établi en France, sera efficace en
France en raison de la ratification par ce pays de la convention de la Haye du 5 octobre 1961
qui qualifie la prohibition de tester en la forme olographe de question forme ; mais sera
dépourvue d’efficacité au Portugal..

Exemple : Un ressortissant portugais domicilié en France possède des biens immobiliers


tant en France qu’au Portugal. Il souhaite établir son testament en France. Comment
assurer l’efficacité de ce testament tant en France qu’au Portugal ?

Deux hypothèses doivent être envisagées :

- Le ressortissant portugais parle le français (ou le notaire français comprend la langue


portugaise du testateur).

Dans cette hypothèse, le notaire français doit recevoir le testament qui sera efficace non
seulement en France sur les biens qui s’y trouvent mais également sur les biens situés au
Portugal où la forme authentique est requise. Si le notaire français connaît la langue du
testateur qui ne parle pas le français, il devra mentionner dans le testament qu’il a
effectué simultanément la traduction des volontés exprimées par le testateur. Les
témoins devront également comprendre le portugais (cf infra).

155
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

- Le ressortissant portugais ne parle pas le français (et le notaire français ne comprend


pas le portugais).

Dans cette hypothèse, le notaire français devait renvoyer le testateur devant le consulat
de son pays, le consul du Portugal ayant en vertu de l'article 7 de la convention
consulaire franco portugaise du 11 juillet 1866 les attributions d’un notaire. En effet, un
notaire français ne peut recevoir un testament pour un étranger ne parlant pas le français
que s’il est en mesure de traduire les déclarations qui lui sont faites 150. Il ne peut
recourir à un interprète même assermenté à peine de nullité 151.

Les témoins eux-mêmes doivent comprendre la langue utilisée par le testateur 152.

Mais ce ressortissant portugais pourrait aussi recourir au testament international peu


utiliser en pratique.

 Le testament international

La convention de Washington du 26 octobre 1973, entrée en vigueur en France le


1er décembre 1994 crée une nouvelle forme testamentaire qui vient s’ajouter à celles déjà
connues du droit français, le testament authentique, olographe et mystique auquel il
s’apparente.

Aux termes de l'article 3 de la convention, le testament doit être établi par écrit. Mais il n’est
pas nécessaire qu’il soit de la main même du testateur. Il peut être écrit en une langue
quelconque, soit à la main, soit en recourant à toute autre procédé. Il peut être dactylographié
par exemple. Cette forme peut être utilisée notamment par les illettrés ou les infirmes comme
les sourds et muets, voire par les personnes étrangères ne pouvant tester en la forme
olographe, ne parlant pas la langue du notaire qui ne connaît pas lui-même la langue étrangère
de ses clients.

Aux termes de l’article 4, le testateur doit déclarer en présence de deux témoins qui peuvent
être étrangers et d’une personne habilitée à instrumenter à cet effet (en France les notaires ou à
l’étranger les agents diplomatiques ou consulaires) que le document est son testament et qu’il en
connaît le contenu. Le testateur confère au testament un caractère secret et n’en donne
connaissance ni au notaire, ni aux témoins.

L’article 5 prévoit que le testateur doit signer le testament et s’il l’a précédemment signé
reconnaître et confirmer sa signature.

150
Cass. Civ. 3 août 1891, DP 1893, 1, 31
151
Cass. Civ. 18 décembre 1956, JCP 57, II, 9718, note JACQUILLARD
152
CA Rennes 8 janvier 1884, DP 85, 2, 296

156
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Les témoins et la personne habilitée doivent apposer sur le champ leur signature sur le
testament en présence du testateur.

L’article 6 dispose que les signatures doivent être apposées à la fin du testament et que si le
testament comporte plusieurs feuillets, chaque feuillet doit être signé et numéroté.

L’article 7 précise que la date du testament est celle de sa signature par la personne habilitée
et qu’elle doit être apposée à la fin du testament.

Les rédacteurs de la convention n’ont pas prévu de disposition concernant la conservation des
testaments mais encouragent les Etats contractants à instituer un système semblable à la
convention de Bâle du 16 mai 1972 (entrée en vigueur en France le 20 mars 1976) qui permet au
testateur de faire inscrire son testament pour qu’il ne reste pas occulte.

En France, l’organisme d’inscription est le fichier central des dispositions testamentaires


ADSN. Le Conseil Supérieur du Notariat est chargé de la gestion du fichier central de
dernières volontés et répond aux demandes de renseignements.

Enfin, pour faciliter la circulation des testaments internationaux, l’article 9 de la convention


prévoit que la personne habilitée joint au testament une attestation établissant que les
obligations prescrites par la loi uniforme ont été respectées 153.

B- La mise en œuvre du testament en Droit International Privé

Traditionnellement, on opère une distinction entre les mesures conservatoires qui relèvent de
la loi du lieu de la découverte du testament et les mesures d’exécution qui sont régies par la
loi du lieu d’exécution 154.

Deux hypothèses sont alors à distinguer :

 Le testament se trouve en France.

L’article 1007 du Code Civil prescrit le dépôt chez un notaire de tout testament non
authentique laissé par le défunt. Il a été jugé que le texte qui a un caractère procédural
s’applique à tous les testaments découverts en France 155. Lorsque le défunt n’est pas

153
Cf E.D. Testament, DROZ n° 48
154
Cf Juris-Classeur Form. Successions internationales, Fasc. 20, n° 165 et M REVILLARD op. cit. n° 566,
PLANIOL et RIPERT, T V, n° 543 et s.
155
Cass. Civ. 13 janvier 1897, DP 1897-1, p. 357

157
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

domicilié en France, une copie du testament sera adressée au tribunal du lieu de découverte du
testament ou au tribunal dans le ressort duquel se trouve le notaire qui détient le testament 156.

Exemple : Madame X de nationalité néerlandaise domiciliée en Belgique est décédée à


Nice. Un testament rédigé en langue néerlandaise a été découvert dans l’appartement
qu’elle occupait à Nice aux termes duquel elle lègue à l’une de ses nièces son
appartement de Nice et à l’autre sa maison d’Amsterdam. Quelles formalités doit
effectuer le notaire auquel le testament a été remis ?

Les formalités de dépôt de l’article 1007 du Code Civil doivent être effectuées même si
le testament est rédigé en la forme étrangère et en langue étrangère. Le testateur n’étant
pas domicilié en France une copie du testament sera déposée auprès du tribunal du lieu
de la découverte du testament ou auprès de celui dans le ressort duquel se trouve le
notaire qui détient le testament.

Le testament devant être exécuté pour partie aux Pays-Bas, le notaire français devra
adresser une copie du testament à son confrère néerlandais chargé du règlement de la
succession ouverte aux Pays-Bas.

 Le testament se trouve et est conservé à l’étranger.

Les mesures conservatoires auront été prises en principe dans le pays de la découverte du
testament.

Le notaire français chargé du règlement de la succession française devra demander à l’autorité


étrangère qui détient le testament une copie de celui-ci. Le notaire dépose alors le testament
au rang de ses minutes après l’avoir fait traduire. Le testament sera ensuite enregistré
conformément aux articles 1000 du Code Civil et 655 du Code Général des Impôts.

Exemple : Monsieur X de nationalité britannique est décédé en son domicile à Londres.


il a légué à son épouse, au terme d’un testament établi en la forme locale, les immeubles
qu’il possédait à Londres et l’usufruit de l'immeuble qu’il possédait à Paris, ses enfants
étant légataires de la nue-propriété.

Le notaire chargé du règlement de la succession française s’interroge sur l’exécution en


France du testament trouvé à l’étranger.

Le testament ayant été découvert à Londres, les mesures conservatoires auront été
effectuées en Grande Bretagne. Dans ce pays, les successions sont liquidées sous le

156
CA Paris 22 mars 1974, Rev. crit. DIP 75, p. 430, note AUBERT ; Cass. 28 janvier 1976, Rev. crit. DIP 76,
p. 517

158
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

contrôle des tribunaux. Le testament doit être présenté en vue de son homologation à la
Probate Division de la High Court qui délivre une ordonnance de Grant of Probate, lors
de l’homologation du testament.

Le notaire français déposera la copie du testament au rang de ses minutes accompagné


d’une traduction et éventuellement une copie du Grant of Probate. L’ensemble de ces
pièces sera légalisé sous la forme de l’apostille (cf infra) délivré par le Foreign Office.

En vue de son exécution en France, une copie du testament sera enregistrée


conformément aux articles 1000 du Code Civil et 655 du Code Général des Impôts, les
testaments établis à l’étranger ne pouvant être exécutés en France qu’après avoir été
enregistrés.

L’existence d’un testament olographe à l’étranger conduit à s’interroger en France sur


l’application de l’article 1008 du Code Civil qui dispose que lorsqu’un testament est
olographe ou mystique, le légataire universel, même saisi en l’absence d’héritier réservataire,
doit se faire envoyer en possession par une ordonnance du Président du TGI.

Cette disposition qui a essentiellement pour but de vérifier la sincérité du testament s’impose-
t-elle lorsque le testament est découvert à l’étranger ?

Il faut selon les auteurs et la jurisprudence opérer une distinction selon que l’envoi en
possession est connu ou non à l’étranger.

- Si l’envoi en possession a été obtenu à l’étranger où il est connu, il n’est pas nécessaire de
demander l’exequatur de la décision.

- Si l’envoi en possession est inconnu à l’étranger : il n’y a pas lieu de demander l’envoi en
possession en France si la vérification du testament a déjà été faite à l’étranger par une
autorité compétente, « une autorité judiciaire administrative ou un officier public qui a
des liens avec la succession testamentaire en question » 157. Ainsi le Probate délivré par
un juge américain, anglais, irlandais…, le certificat d’héritier délivré par un juge allemand
ou suisse…, dispenseront de l’envoi en possession.

- Si le testament étranger olographe instituant un légataire universel est présenté


directement en France, l’envoi en possession sera exigé.

Exemple : En cas de décès en Grande Bretagne d’un citoyen britannique dont la


succession comporte des immeubles en France, il n’y aura pas lieu de demander l’envoi
en possession dès lors qu’un Grant of Probate aura été délivré par la High Court, car la
sincérité du titre aura été vérifiée.

157
G. DROZ note sous TGI de Paris, 22 avril 1976, Rev. crit. DIP 1977, p. 324

159
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

§ 2- LA DEVOLUTION DES SUCCESSIONS TESTAMENTAIRES ET AB INTESTAT

Avant d’examiner les personnes appelées à la succession et sa transmission, il convient de


s’interroger sur son ouverture.

A- L’ouverture de la succession

Une succession s’ouvre par le décès du de cujus. Mais s’ouvre-t-elle en cas d’absence ou de
disparition ?

En droit international privé, la loi applicable à l’absence et à la disparition est en principe la


loi nationale du disparu ou de l’absent. C’est elle qui fixera notamment les conditions de la
déclaration d’absence et ses effets sur la personne de l’absent et sur ses biens. En particulier,
si la loi personnelle de l’absent permet à la déclaration d’absence d’entraîner l’ouverture de la
succession, celle-ci devra être réglée en faisant application de la règle de conflit énoncée
précédemment.

En cas de décès de plusieurs personnes réciproquement héritières l’une de l’autre dans le


même événement, il fallait appliquer en France la théorie des comourants qui soulevait des
difficultés, la loi qui lui était applicable étant controversée. Mais la loi du 3 décembre 2001 a
abrogé les articles du Code Civil qui régissaient la théorie des comourants. Dorénavant,
lorsque la loi française sera applicable à la succession d’un comourant, comme dans de
nombreuses autres législations, on établira deux règlements de succession séparés, aucun des
comourants n’étant appelé à la succession de l’autre.

B- Les personnes appelées à la succession

1- La détermination des héritiers

La loi successorale détermine les personnes qui sont appelées à la succession en vertu du lien
de parenté existant entre elles même et le défunt. Elle détermine par conséquent l’ordre des
successibles, l’admission de la représentation, la limite du degré de successibilité.

Elle régit encore la vocation successorale des enfants adultérins ou des enfants naturels.
Depuis la loi du 3 décembre 2001, les enfants adultérins ayant des droits égaux à ceux des
enfants légitimes et naturels, on écartera l’application sur le territoire national d’une loi
étrangère qui établirait une discrimination entre eux au nom de l’ordre public.

160
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

La vocation successorale du conjoint survivant relève également de la loi successorale,


comme le droit viager au logement, à la différence du droit temporaire au logement qui relève
du régime primaire.

En ce qui concerne les concubins, l’application de la loi successorale peut soulever des
difficultés. En effet le concubinage est organisé dans de nombreux Etats et certains d’entre
eux reconnaissent des droits successoraux au concubin survivant de même sexe ou de sexe
différent (Bolivie, Venezuela, Israël, Croatie, Australie, Danemark, Norvège, Islande, Pays-Bas). La
question se pose donc de savoir si l’on doit faire application sur le territoire national d’une
législation étrangère qui reconnaît des droits successoraux aux concubins survivants.

Exemple : Un concubin de nationalité israélienne est décédé à Jérusalem où il était


domicilié. Il avait ouvert en France divers comptes bancaires et y possédait un
portefeuille de valeurs mobilières.

Sachant que la loi israélienne reconnaît au concubin survivant des droits successoraux,
doit-on en faire application en France ou au contraire l’écarter au nom de l’ordre public
français ?

En l’absence de toute jurisprudence sur la question, certains auteurs estiment 158 que les
tribunaux ne devraient pas systématiquement écarter l’application de la loi étrangère
normalement compétente au nom de l’ordre public, ceux-ci ayant admis le partage de
l’usufruit légal du conjoint survivant de l’ancien article 767 du Code Civil entre les
épouses d’un polygame, ce qui n’est pas moins choquant que l’attribution de droits
successoraux à un concubin.

 L’établissement du lien de parenté

Si la loi successorale détermine les personnes appelées à la succession en vertu du lien de


parenté existant entre elles-mêmes et le défunt, l’établissement du lien de parenté relève en
revanche de la loi personnelle.

Exemple : Un musulman décède en France où il était domicilié. Sa succession est à la


fois mobilière et immobilière. Il laisse pour lui succéder trois épouses. Se partagent-
elles l’usufruit des biens successoraux reconnu au conjoint survivant par la loi du 3
décembre 2001 ?

Dans un arrêt en date du 3 janvier 1980 159, la Cour de cassation avait affirmé que
« alors que la dévolution successorale d’immeubles situés en France relève de la loi

158
M. REVILLARD, op. cit. n° 552 ; M. SCHMITT, JCP N 2004, P. 1 ; RM MARIANI JOAN, 26 juillet 2005,
p. 7437 ; contra E. FONGARO « Retour sur les effets en France d’une union homosexuelle célébrée à l’étranger »
159
Rev. crit. DIP 1980, p. 331, note BATIFFOL

161
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

française, l’établissement du lien de parenté nécessaire au jeu de cette dévolution est


soumis à la loi algérienne, loi personnelle des intéressés ». La loi algérienne
reconnaissant la polygamie, la Cour suprême devait admettre le partage de l’usufruit du
quart de l’ancien article 767 du Code Civil. Depuis la loi du 3 janvier 2001, c’est un
quart en propriété que se partageront les épouses d’un mari polygame.

C’est aussi encore la loi personnelle qui détermine si une personne a la qualité d’époux ou
d’enfant naturel (validité de mariage, établissement de la filiation…)

2- La preuve de la qualité d’héritier : l’acte de notoriété

L’acte de notoriété a pour finalité de constater les qualités héréditaires de ceux qui prétendent
être appelés à la succession. Lorsque le défunt de nationalité étrangère est décédé domicilié à
l’étranger ou domicilié en France sans laisser d’héritiers ou de personnes qui le connaissait,
l’acte de notoriété devrait être établi par l’autorité étrangère compétente.

En principe l’acte de notoriété ne vaut que dans l’étendue du pays où il a été dressé qui en
admet l’existence 160. Sa force probante peut être contestée à l’étranger. Il est ignoré dans les
pays de Common law comme l’Angleterre, l’Islande, les USA, le Canada.

Mais d’une façon générale, la validité et l’efficacité des actes de notoriété dressés dans des
pays qui en connaissent l’existence sont reconnus en France et réciproquement, les actes de
notoriété français sont efficaces à l’étranger dans les pays qui les pratiquent, tels la Belgique,
les Pays-Bas, le Luxembourg.

Dans d’autres pays, ces actes de notoriété prennent le nom de certificat d’héritier. Il en est
ainsi en Allemagne, en Suisse où ils sont établis par le tribunal des successions. En
Angleterre, ils sont inconnus mais certains les assimilent à des actes connus, comme les
« affidavit » (déclaration faite sous serment devant un « commissioner for oath » qui est un solicitor).

Ils seront utilisés en France dès lors qu’ils sont établis dans un but et des conditions analogues
à celles du droit français.

Si les pays étrangers où résidait le défunt ignoraient l’acte de notoriété, avant le décret du 6
janvier 2004 (cf infra), celui-ci pouvait encore être dressé par le consul de France du pays de
résidence du défunt, membre de l’Union européenne.

Enfin, en cas d’impossibilité de recevoir un acte de notoriété, le notaire français dressera une
attestation notariée à laquelle il annexera tous les documents français et étrangers en sa

160
Juris-Classeur Form. not., v° Acte de notoriété, Fasc. A 15

162
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

possession, attestant des qualités héréditaires des personnes prétendant être appelées à la
succession.

3- Les droits des héritiers

L’étendue des droits des successibles relève de la loi successorale.

Celle-ci est compétente pour déterminer le montant de la réserve et de la quotité disponible


ordinaire ou entre époux. Elle régit encore le droit viager au logement, la réduction des
libéralités excédant la quotité disponible, le rapport des dettes ; elle détermine enfin l’ordre de
réduction des libéralités et les personnes qui peuvent la demander.

C- La transmission des biens héréditaires

La transmission des biens héréditaires suppose que les héritiers aient pris partie sur la
succession. D’autre part, le défunt peut avoir pris des mesures organisant la transmission de sa
succession. Avant d’examiner celle-ci, il convient dès lors de s’interroger sur l’option
successorale et l’administration de la succession.

1- L’option successorale

Il est admis aujourd’hui, tant en doctrine qu’en jurisprudence 161, que les différents partis que
peut prendre l’héritier appelé à une succession (acceptation pure et simple, acceptation sous
bénéfice d’inventaire, renonciation) relèvent de la loi successorale. (De nombreux droits étrangers
ignorent la notion d’option successorale : pays de common law, pays musulmans, d’autres présument
que passé un délai très court (3 mois) sans se prononcer, l’héritier est présumé acceptant.)

L’héritier pourra aussi prendre des partis différents sur chacune des masses de biens soumises
à une loi différente.

Exemple : Monsieur X décède en France en laissant un immeuble et des comptes


bancaires en France et des immeubles au Luxembourg. Ses héritiers peuvent renoncer à
la succession immobilière luxembourgeoise et accepter la succession mobilière et
immobilière française.

En revanche, la capacité pour opter relève de la loi personnelle de l’héritier. Si l’héritier est
mineur au regard de sa loi nationale, il faudra interroger celle-ci pour savoir dans quelles

161
T.I. de Lille 28 mars 1980, Rev. crit. 1981, p. 289, note LEQUETTE

163
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

conditions ce mineur peut prendre parti sur la succession, son régime de protection, les
personnes habilitées à le représenter et les formalités habilitantes à respecter.

Si le mineur a la double nationalité, française et étrangère, le juge, comme le notaire, doit le


considérer comme français.

Si le mineur français réside en France les autorisations requises seront données par le juge des
tutelles français de son domicile.

S’il réside à l’étranger dans un pays de la communauté européenne, le représentant du mineur


s’adressera au juge de la résidence habituelle du mineur (Règlement de Bruxelles II).

S’il réside dans un pays non communautaire qui a ratifié la convention de la Haye du 5
octobre 1961 (Suisse, Turquie), il pourra s’adresser au juge local ou au juge français.

S’il réside dans un pays non communautaire n’ayant pas ratifié la convention de la Haye du 5
octobre 1961, il s’adressera au juge français.

Exemple : Un mineur ayant la double nationalité française et brésilienne est appelé à la


succession de son père de nationalité française décédé à Paris. Il réside en France avec
sa mère, l’actif de la succession se compose d’un immeuble situé au Brésil, de deux
immeubles situés à Paris et d’un portefeuille de valeurs mobilières.

En présence d’un mineur ayant la double nationalité, le notaire comme le juge français
doivent le considérer comme français. Le mineur se trouve donc placé sous le régime
légal sous contrôle judiciaire de sa mère. Celle-ci peut accepter la succession sous
bénéfice d’inventaire, mais si celle-ci souhaite l’accepter purement et simplement,
l’autorisation du juge des tutelles sera requise. L’enfant résidant en France avec sa
mère, celle-ci s’adressera au juge des tutelles de sa résidence.

Si le mineur résidait à l’étranger avec sa mère dans un pays qui a ratifié la convention
de la Haye du 5 octobre 1961 sur la loi applicable à la protection des mineurs ou dans
un pays de la communauté européenne (Bruxelles II bis), il aurait été possible d’obtenir
des autorités locales les autorisations requises.

Quel aurait été le juge des tutelles compétent si le mineur de nationalité française était
domicilié à l’étranger (hors Union européenne) ?

La mère administratrice légale peut s’adresser indifféremment au juge de la résidence


du mineur ou au juge français.

Si la famille du mineur a conservé son domicile en France, on s’adressera au juge


français.

164
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation 162, le juge compétent est celui


que « les circonstances font apparaître comme particulièrement désignés au regard
d’une bonne administration de la justice ».

Depuis, une circulaire du ministre de la justice (1er juillet 1966 relative à la tutelle 163)
précise que le juge le mieux placé pour donner les autorisations nécessaires est « le juge
du lieu de la situation des biens du mineur, celui de son domicile, celui du domicile de
certains membre de la famille du mineur ».

Dès lors le juge des tutelles le mieux placé pour permettre à la mère du mineur
d’accepter la succession sera soit celui du domicile de ses grands-parents, s’il en a, ou
du lieu de situation des immeubles.

 Forme et délai de l’option

La forme de l’option est également régie par la loi successorale. Lorsque celle-ci est une loi
étrangère, il appartient au notaire français d’interroger la loi étrangère pour savoir dans quels
délais et selon quelles formes l’option doit être prise.

Lorsque la loi successorale française est compétente alors que le défunt est domicilié à
l’étranger (le défunt possédait un immeuble en France) se pose la question de savoir quel est le
tribunal compétent pour renoncer à la succession ou l’accepter purement et simplement ou
sous bénéfice d’inventaire (articles 784 et 793 du Code Civil).

En pareil cas, il est admis que le tribunal compétent est celui du lieu de situation de
l'immeuble. L’héritier renoncera par conséquent à la succession au greffe du lieu de situation
de l'immeuble ou du principal d’entre eux s’il y en a plusieurs.

Lorsque les héritiers ne résident pas en France et qu’ils ne peuvent se déplacer pour prendre
parti sur la succession française à laquelle ils sont appelés, ils peuvent donner une procuration
à cet effet. Cette procuration peut être indifféremment authentique ou sous seing privé, mais
dans ce dernier cas, la signature devra être certifiée. Toutefois, aucun texte n’exige
l’authenticité.

2- L’administration de la succession

Avant son décès, le défunt peut avoir pris des dispositions concernant l’administration de sa
succession : tantôt il aura désigné un exécuteur testamentaire, tantôt il aura constitué un trust.

162
Cass. civ. 1er septembre 1960, D. 60, 508, note LENOAN
163
JO 7 juillet 1966

165
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Enfin, des conventions internationales peuvent organiser l’administration de la succession de


ressortissants étrangers.

a) La désignation d’un exécuteur testamentaire

Les pouvoirs et les attributions d’un exécuteur testamentaire sont très différents d’une
législation à l’autre. Tandis qu’en France ses pouvoirs sont relativement restreints (article 1031
du Code Civil), de nombreux pays étrangers lui reconnaissent des pouvoirs beaucoup plus
étendus (Portugal, Espagne, Suisse, Allemagne). Il est dès lors nécessaire de déterminer la loi
applicable à l’exécution testamentaire.

Les auteurs sont unanimes à le soumettre à la loi successorale 164.

C’est en particulier la loi successorale qui détermine si l’exécuteur testamentaire a ou non la


saisine.

En toute hypothèse, les pouvoirs que reconnaîtrait une loi étrangère à l’exécuteur
testamentaire ne sauraient excéder en France ceux qui lui sont reconnus par la loi française.

b) Les consuls et la liquidation de la succession

Des conventions diplomatiques confèrent aux consuls des pouvoirs en matière


d’administration et de liquidation de la succession de leurs ressortissants ouverte en France.
Toutefois, ces interventions sont exceptionnelles. Chaque fois qu’un consul se présentera pour
régler la succession d’un ressortissant de son pays, le notaire français devra s’assurer qu’une
convention lie bien son pays à la France, lui confère un tel pouvoir et qu’il n’agit que dans les
limites de ses attributions.

A défaut de convention, il ne peut intervenir que comme mandataire des héritiers et doit
produire des procurations 165.

c) Le trust

Le trust est une institution propre aux droits anglo-saxons qui est utilisée dans de nombreux
pays (Royaume-Uni, Canada, Israël, Japon, Australie…). S’il existe plusieurs formes de trust (trust
intervivos, trust légal…) c’est le trust testamentaire, trust mortis causa, que l’on rencontre le

164
Civ 22 juin 1954, Rev. crit. DIP 1955, p. 123, note LOUSSOUARN, Cass. Civ. 6 juin 1967, Rev. Crit. DIP
1969, p. 75, note DESPREZ
165
Cf M. REVILLARD op. cit. n° 620

166
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

plus souvent dans la pratique notariale, lorsqu’il s’agit de régler en France la succession d’un
ressortissant étranger qui a organisé le règlement de sa succession sous cette forme.

La jurisprudence française, bien que cette institution soit inconnue de notre législation, au lieu
d’écarter son application en France, s’est efforcée de lui faire produire des effets en lui
assignant cependant des limites, celles de l’ordre public français.

C’est sans aucun doute parce que des auteurs ont voulu faciliter l’application de cette
institution originale dans des pays où elle était ignorée que la convention de la Haye du 1er
juillet 1985 relative à la loi applicable au trust et à sa reconnaissance a été élaborée.

Après avoir rappelé ce qu’est un trust, nous examinerons ses incidences dans la pratique
notariale avant de présenter brièvement le contenu de la convention de la Haye qui bien que
signée par la France n’a pas encore été ratifiée.

1° Définition du trust

Le trust est une institution par laquelle la personne qui constitue le trust « le settlor » transfère
la propriété d’un bien ou d’un ensemble de biens à une autre personne « le trustee » à charge
pour lui d’en remettre le revenu ou le capital dans certaines conditions au bénéficiaire qui
peut être le constituant lui même ou d’autres personnes. Il réalise un dédoublement de la
propriété en conférant la propriété juridique des biens au trustee et la propriété économique
au(x) bénéficiaire(s).

Il existe plusieurs sortes de trust. Nous signalerons les principaux :

 le trust intervivos : contrat qui intervient entre le settlor et le trustee et qui peut être
utilisé à cause de mort pour organiser tout ou partie de la succession du settlor.

 le trust à cause de mort : créé par testament dans lequel le testateur désigne un
exécuteur testamentaire (trustee) qui détiendra les biens successoraux en trust pour le
compte des héritiers ou des légataires désignés par le testament, avec l’obligation de
leur reverser les revenus ou le capital dans les conditions précisées dans le testament.

 le trust légal : cette forme de trust est imposée par la loi ou le juge dans certains cas
particuliers, spécialement pour assurer la gestion des biens des mineurs ou administrer
une succession.

Le settlor est le propriétaire originaire des biens constitués en trust qu’il transfert au trustee de
son vivant ou aux termes d’un testament.

167
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Le trustee est propriétaire des biens transférés par le settlor. Il les administre, mais il peut
aussi en disposer. Toutefois, les biens constitués en trust sont distincts de son patrimoine
personnel. Le trust n’a pas pour autant la personnalité morale.

Le bénéficiaire est la personne au profit de laquelle le trustee a contracté des obligations


envers le settlor. Elle n’est pas propriétaire des biens elle a seulement vocation à les recueillir
à la date fixée dans l’acte constitutif du trust. Jusqu’à celle-ci il ne dispose que d’un droit de
poursuivre le trustee.

2° Les incidences pratiques du trust

L’originalité de l’institution a rendu vaine toute tentative de le faire rentrer dans une catégorie
juridique de notre droit. Néanmoins, celui-ci lui reconnaît les effets juridiques de la législation
qui le régit dès lors qu’ils ne heurtent pas l’ordre juridique français.

C’est une observation que l’on peut faire aussi bien lorsque la succession est soumise à la loi
étrangère qu’à la loi française.

 La succession est soumise à une loi étrangère

Exemple : Un américain est décédé à New York laissant pour lui succéder ses trois
enfants eux mêmes de nationalité américaine. Sa succession se compose de biens
mobiliers tous situés en France. Par testament à New York, le défunt a fait une
constitution de trust.

Quelle est l’efficacité de ce trust en France.

Le défunt étant décédé domicilié à New York, conformément à la règle de conflit


française et américaine, toute sa succession sera dévolue selon la loi de cet Etat des
USA.

Le droit français soumet les problèmes de transmission héréditaire, de saisine, de prise


de possession, à la loi successorale. Dès lors, conformément à la loi successorale
applicable, la loi de l’Etat de New York, la personne qui détient les biens en trust va
pouvoir, en sa qualité de trustee, entrer en possession des biens situés en France,
liquider l’actif et le passif.

C’est la solution qu’a retenu la Cour de cassation dans un arrêt en date du 3 novembre 1983
166
« suivant la règle de conflit française la désignation et les pouvoirs des exécuteurs

166
Rev. crit. DIP 84, p. 336, note REVILLARD, JDI 1985, p. 45, note B. ANCEL

168
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

testamentaires, voire d’un trust à cause de mort créé unilatéralement, relèvent de la loi
américaine à laquelle était soumise la succession mobilière ».

 La succession est soumise à la loi française

Nous reprendrons l’exemple précédant en précisant toutefois que le défunt avait également
des immeubles en France et a constitué un trust au profit d’un tiers.

Dans cette hypothèse, la loi française est applicable à la dévolution des immeubles, laquelle
connaît la réserve héréditaire. Par ailleurs, les héritiers sont saisis de plein droit de tous les
biens de la succession conformément à l’article 1004 du Code Civil. C’est à eux qu’il
appartient de procéder à la délivrance des libéralités contenues dans le testament.

Le trust apparaît alors difficilement compatible avec le droit successoral français car il opère
un dédoublement de la propriété inconnue du droit français.

Néanmoins, peut-il trouver à s’appliquer dans la limite de la quotité disponible ou en totalité


en l’absence d’héritiers à réserve.

Le testateur en constituant un trust a voulu gratifier une personne déterminée ; il serait


contraire à sa volonté de priver le trust de toute efficacité en France.

Aussi, les auteurs sont-ils favorables à ce que l’on en tienne compte dans le règlement d’une
succession soumise à la loi française et ont suggéré 167 de qualifier les bénéficiaires du trust de
légataires particuliers, de légataires universels ou à titre universel, le trustee d’exécuteur
testamentaire.

Au cas exposé, si les héritiers font valoir leur qualité d’héritiers réservataires et exigent leur
réserve héréditaire, le trust ne pourra s’exécuter que dans la limite de la quotité disponible qui
est d’ordre public. En revanche, il s’exécutera en totalité en l’absence d’héritiers réservataires
ou si ceux-ci renonçaient à se prévaloir de leur qualité de réservataire.

Du fait du dédoublement de la propriété, son existence ne peut être matérialisée à la


conservation des hypothèques. Si le trust porte sur des valeurs mobilières, elles seront
inscrites en France au nom du seul trustee qui exerce tous les droits attachés à la qualité
d’associé.

167
DROZ Rev. crit. DIP 1977-311

169
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

3° La convention de la Haye du 12 juillet 1985 relative à la loi applicable au trust


et à sa reconnaissance

La France n’a pas encore ratifié la convention, mais il est peut être utile d’en connaître les
grandes lignes.

- L’aliéna 1er de l’article 2 de la convention donne une définition du trust « le terme trust
vise les relations juridiques créées par une personne, le constituant par acte entre vifs ou
à cause de mort lorsque les biens ont été placés sous le contrôle d’un trustee dans
l’intérêt d’un bénéficiaire ou dans un but déterminé ».

- L’alinéa 2 de l'article 2 dispose que « les biens du trust constituent une masse distincte du
patrimoine du trustee. Le trustee est investi du pouvoir de gérer, d’administrer, de
disposer des biens selon les termes du trust et les règles particulières imposées au trustee
par la loi. »

- L’article 6 déclare que « le trust est régi par la loi choisie par le constituant », laquelle
doit connaître l’institution du trust (lorsqu’il n’a pas été choisi de loi, le trust est régi par la loi
avec laquelle il présente les liens les plus étroits).

- L’article 8 dispose que la loi choisie régit la validité du trust, son interprétation, ses effets
et l’administration du trust. La désignation, la démission, la révocation du trustee relève
également de la loi régissant le trust.

C’est en fait tout le fonctionnement du trust qui est soumis à la loi qui le régit.

L’article 12 dispose que « le trustee qui désire faire inscrire sur un registre un bien meuble
ou immeuble ou un titre s’y rapportant sera habilité à requérir l’inscription en qualité de
trustee ou de telle façon que l’existence du trust apparaisse » (ce texte ne sera pas sans incidence
sur un plan pratique lorsque la convention sera ratifiée).

Toutefois, l’article 15 de la convention limite considérablement sa portée de celle-ci en


déclarant qu’elle ne fait pas obstacle à l’application des dispositions impératives du for,
notamment en ce qui concerne le patrimoine des mineurs et des incapables, les effets
personnels et patrimoniaux du mariage, les testaments et la dévolution des successions
spécialement la réserve, le transfert de propriété et les sûretés réelles.

Il n’est pas inutile de s’interroger sur les incidences dans la pratique notariale de la
reconnaissance du trust lorsque la ratification de la convention de la Haye interviendra.

Certes, en ce qui concerne les trusts à cause de mort, les solutions rappelées précédemment
resteront inchangées en raison des dispositions de l'article 15 qui prévoit expressément que la

170
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

convention ne fait pas échec aux dispositions de la loi successorale désignée par la règle de
conflit, mais en serait-il de même en cas d’acquisition en France par un trust anglo-saxon ?

Actuellement, un trust n’ayant pas la personnalité morale ne peut se porter acquéreur de biens
immobiliers en France. L’acquisition n’est possible que par le constituant du trust, le trustee
ou le bénéficiaire du trust. La mutation de l’immeuble ne pourra être faite qu’au nom de l’une
ou l’autre de ces personnes, le trust n’ayant pas d’existence juridique.

Si la convention de la Haye venait à être ratifiée par la France l’acquisition par un trustee au
nom du trust sera alors possible. Sans doute c’est le nom du trustee qui sera indiqué sur le
registre et c’est lui qui sera considéré comme le propriétaire mais en vertu de l'article 12 de la
convention qui l’autorise à procéder à cette inscription à son nom, il pourra faire apparaître
l’existence du trust dès lors que la loi de l’Etat où l’inscription doit avoir lieu ne l’interdit pas
ou n’est pas incompatible avec cette loi.

Des instructions devront être données en France aux conservateurs des hypothèques en ce
sens.

3- La transmission de la succession proprement dite

a) La transmission de l’actif

En droit comparé, les systèmes juridiques divergent sur les problèmes concernant la
transmission de l’actif, comme la saisine, l’administration de la succession et le partage.

En effet, alors que dans les pays de droit civil (France, Belgique, Pays-Bas, Allemagne, Italie,
Québec, Suisse…) les héritiers sont dès le décès investis directement des biens héréditaires et
des droits et actions du défunt selon l’adage fameux « le mort saisi le vif », dans les pays de
common law le juge désigne un administrateur qui représente la succession, spécialement
chargé de recouvrer les biens du défunt, de payer ses dettes et de distribuer le surplus à ceux
qui peuvent y prétendre.

Il est donc nécessaire de déterminer la loi applicable à la transmission de l’actif puisque selon
la législation applicable, les héritiers pourront soit entrer en possession des biens
successoraux, soit être soumis à une administration de la succession.

Exemple : Monsieur X de nationalité britannique décède en Angleterre. Sa succession


se compose de biens mobiliers et immobiliers situés en France et en Angleterre. Les
immeubles situés en France seront appréhendés par les héritiers tandis que les biens
meubles et les biens immeubles situés en Angleterre seront soumis à l’administration
d’une personne désignée pour régler la succession.

171
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

En droit international privé français, on soumet aujourd’hui l’ensemble des problèmes


concernant la transmission de l’actif à la loi successorale 168.

La jurisprudence s’est prononcée en ce sens à propos de la saisine et de la prise de possession


des biens 169 et des droits et actions du défunt 170.

Sont encore soumis à la loi successorale, l’exécution testamentaire 171, l’administration de la


succession 172, même lorsqu’il s’agit d’une administration judiciaire 173.

→ Saisine et envoi en possession

La soumission de la saisine et de l’envoi en possession à la loi successorale n’excluent pas


pour autant l’application de la loi de la situation des biens. Il en est ainsi notamment lorsqu’il
s’agit de vérifier la qualité de légataire universel, celle-ci résultant d’un testament olographe.

En effet, l’article 1008 du Code civil français dispose que le légataire universel institué par
testament olographe même saisi en l’absence d’héritiers à réserve doit demander l’envoi en
possession au Président du TGI.

Cette formalité dont le but est de vérifier la sincérité du titre est exigée en France si l’original
du testament y est présenté directement 174.

Lorsqu’à l’étranger où l’envoi en possession est inconnu, une vérification du testament a déjà
eu lieu (par la Cour de Probate en Grande Bretagne par exemple, ou par une attestation notariée visant
le testament olographe 175), il n’y a pas lieu de demander l’envoi en possession en France.

En revanche, si la loi successorale étrangère exige l’envoi en possession et que celui-ci a été
obtenu à l’étranger, l’exequatur de la décision étrangère doit être en principe demandée en
France. Mais une telle exigence exprimée par les auteurs serait sans incidence en pratique s’il
n’y était pas satisfait.

168
LOUSSOUARN Administration des successions en DIP, JDP 1970, p. 251
169
TGI Paris 1er juillet 1972, JCP 73, G, IV p. 107 ; Cass. 22 décembre 1970, J. Not. 1971, p. 660
170
Cass. Crim. 4 juin 1944, DC 1942, p. 4, note NAST ; S. 1944, 1, p. 133 note BATIFFOL
171
Cass. Civ. 22 juin 1954, Rev. crit. DIP 1955, p. 123, note LOUSSOUARN
172
Cass. Civ. 6 juin 1967, Rev. crit. DIP 1969, p. 75, note DEPREZ
173
Cass. Civ. 25 octobre 1972, JDI 1974, p. 135, note DROZ
174
TGI Seine, 18 novembre 1936, JDI 1936, 737
175
Cf E.D. DI, v° Successions n° 181 et M. REVILLARD op. cit. n° 613

172
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

b) La transmission du passif

La question de la transmissibilité du passif a donné lieu à de nombreuses controverses


doctrinales, spécialement lorsque plusieurs masses de biens sont soumises à des lois
successorales distinctes. Tout le problème est en effet de savoir s’il faut et de quelle façon
répartir ce passif entre les diverses masses.

 Lorsque l’ensemble des biens successoraux est soumis à une seule loi, les problèmes liés à
la transmission du passif vont relever de cette loi. La Cour de cassation dans un arrêt du 19
juillet 1976 176 devait en effet affirmer que « le défunt étant domicilié en France, c’est à bon
droit que la succession mobilière et par suite l’étendue de l’obligation des héritiers au passif
comme le droit de poursuite des créanciers sur le fonds de commerce dépendant de la
succession étaient régies par la loi française ».

 Lorsqu’il existe plusieurs masses successorales relevant de lois différentes, plusieurs


solutions ont pu être proposées. Mais les auteurs modernes et la jurisprudence estiment
aujourd’hui qu’au niveau de l’obligation au passif, chaque masse successorale doit supporter
la totalité de la dette, la succession formant une universalité au regard du passif 177. Cette
solution se fonde sur le fait qu’avant le décès du défunt, le passif grève l’ensemble de son
patrimoine et non pas partie de celui-ci.

Aussi, un créancier pourra-t-il saisir par exemple la masse des biens soumise à la loi française
sans avoir l’obligation de diviser ses poursuites entre les autres masses.

Cette solution dissuadera l’héritier de prendre des options différentes sur les diverses masses
successorales 178.

Toutefois, cette solution risque de faire supporter dans certains cas à l’un des héritiers une
partie du passif supérieure à celle qui aurait été mise à sa charge par la loi successorale
applicable.

C’est pourquoi au niveau de la contribution à la dette, chaque masse successorale ne devrait


supporter qu’une part de passif proportionnelle à la fraction qu’elle représente par rapport à
l’ensemble des biens successoraux réparti en diverses masses successorales.

Il ne faut pas néanmoins surestimer les difficultés auxquelles peuvent donner lieu une
pluralité de lois successorales en cas de passif. En effet, comme on l’a fait observer 179, les
dettes successorales seront le plus souvent garanties par des sûretés (hypothèques,
nantissements) et les créanciers se paieront sur leur gage et négligeront les autres biens de la

176
Rev. crit. DIP 78, p. 338, note ANCEL
177
BATIFFOL et LAGARDE, T 2, n° 659, T. Civ. Papeete 7 mars 1975, J. Not. 1976, art. 53341
178
E.D. DI Succession, n° 200
179
Problème de transmission et de partage en DIP, Trav. du Comité français de DIP, 1960-62, p. 68

173
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

succession ou le patrimoine des héritiers. D’autre part, des accords amiables seront
recherchés 180.

§ 3- LE PARTAGE DE LA SUCCESSION

Nous examinerons successivement la loi applicable au partage et son domaine d’application,


la publicité de l’acte de partage (les notaires français étant de plus en plus souvent appelés à publier
des actes de partage en provenance de l’étranger ou à faire publier à l’étranger un acte reçu en France)
et enfin la fiscalité du partage.

A- La loi applicable au partage et son domaine d’application

En raison de son caractère contractuel, on pourrait être tenté de soumettre le partage à la loi
d’autonomie. Mais les auteurs et la jurisprudence estimant que celui-ci n’est que la mise en
œuvre des règles relatives à la dévolution des successions, le soumettent à la loi
successorale 181.

Dès lors la loi successorale va régir le rapport des libéralités, le rapport des dettes, la
formation de la masse partageable, l’attribution préférentielle, la composition des lots et leur
attribution 182.

En revanche, la capacité en matière de partage relève de la loi personnelle de l’incapable.

En ce qui concerne la forme du partage, il faut opérer une distinction selon que le partage est
amiable ou judiciaire.

Si le partage est amiable, il sera régi par la loi du lieu où il est reçu (locus regit acutm) mais
cette règle n’ayant pas un caractère d’ordre public, les parties peuvent soumettre la forme du
partage à une autre loi comme la loi nationale commune des parties ou la loi successorale.

Dans les pays qui autorisent, selon certaines modalités, le partage amiable des biens des
mineurs et des majeurs, c’est la loi personnelle de l’incapable qui imposera la forme du
partage et qui précisera par conséquent si le partage doit être amiable ou judiciaire 183.

180
Cf M. REVILLARD, op. cit. n° 621
181
Cass. Civ. 28 juin 1882, JDI 1882, p. 415 ; Cass. Com. 21 juin 955, JCP 55, II, 8877, note P. LESCOT
182
Juris-Classeur Form. liquidation partage, succession int., Fasc. 30, n° 1 et s.
183
Cass. Civ. 13 avril 1932, DP 32, 1, 89 ; Rev. crit. de DIP 1932, 549 – TI de Montmorency 27 février 1970,
Rev. crit. DIP 1972, 471

174
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Exemple : Des mineurs français domiciliés en France sont appelés à céder à titre de
licitation faisant cession l’indivision leurs droits indivis sur un immeuble situé en
Allemagne à l’un de leur co-indivisaires majeur.

Comment procéder pour parvenir à ce partage.

Le tribunal français est compétent en vertu du règlement Bruxelles II bis. L’état et la


capacité des personnes relevant de la loi nationale, la loi française est applicable. Pour
parvenir au partage une autorisation sera sollicitée auprès du juge des tutelles de la
résidence des mineurs et le partage sera homologué par le Président du TGI.

Exemple : Même exemple que précédemment, mais les mineurs ont la double
nationalité française et belge et sont domiciliés en Belgique et l’immeuble est situé en
Belgique.

Le tribunal belge est compétent (Bruxelles II bis). La règle de conflit belge en matière
de capacité des personnes donnant compétence à la loi nationale et par conséquent à la
loi belge, loi personnelle des mineurs, l’opération est soumise à l’autorisation du juge de
paix et après sa réalisation à son approbation (article 1206 du Code judiciaire belge).

Si le partage est judiciaire, c’est la loi de for, la loi du tribunal saisi qui détermine les
personnes appelées à intervenir aux opérations, leurs attributions et la procédure à suivre 184

B- La publicité de l’acte de partage

Les règles qui seront rappelées sont applicables pour toutes les formes de partage (partage
après divorce, séparation de corps, cessation d’une indivision).

La publicité ayant pour finalité d’informer les tiers relève de la loi du lieu de situation des
biens.

Sur le plan pratique, deux situations doivent être envisagées : le partage est reçu en France et
doit être publié à l’étranger, le partage est reçu à l’étranger et doit être publié en France.

1- Le partage établi en France doit être publié à l’étranger

Un notaire français n’est pas qualifié pour effectuer des formalités de publicité à l’étranger. Il
devra s’adresser à l’autorité locale compétente, le plus souvent l’un de ses confrères, pour

184
BATIFFOL et LAGARDE, n° 666

175
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

effectuer la publicité de l’acte de partage au lieu de situation de l’immeuble, la publicité


relevant en droit international privé de la loi locale.

Exemple : Aux termes d’un partage successoral a été attribué à un héritier français un
immeuble situé en Espagne. Comment publier en Espagne l’acte de partage ?

Le notaire français doit adresser à un confrère espagnol du lieu de situation de


l’immeuble (voire à un gérant administratif – institution espagnole particulière), une copie de
l’acte de partage traduite et légalisée sous la forme de l’apostille (convention du 5 octobre
1961, cf infra).

En pratique, cette publicité risque de soulever des difficultés. En effet, l’article 17 de la


loi du 27 juin 1986 sur les investissements étrangers en Espagne dispose que seuls
peuvent être publiés dans ce pays les actes reçus par un notaire espagnol ou les consuls
de ce pays.

Mais il n’y a pas lieu en Espagne d’inscrire au registre foncier les mutations
d’immeubles de la tête du de cujus sur celle de ses héritiers. Ce n’est donc qu’à
l’occasion d’un partage ou d’une vente que l’on procèdera à cette publicité. A l’instar
d’ailleurs de nombreux autres pays étrangers (Allemagne, Suisse, Italie, Luxembourg,
Monaco) l’Espagne ignore l’attestation notariée après décès.

Un notaire français n’a donc aucune attestation notariée à dresser après le décès d’un
français possédant une résidence secondaire en Espagne.

2- Le partage établi à l’étranger doit être publié en France

Aux termes de l’article 4 alinéa 3 du décret du 4 janvier 1955, pour qu’un acte reçu à
l’étranger puisse être publié en France il faut :

- qu’il soit légalisé (sauf dispense de légalisation) traduit et déposé au rang des minutes d’un
notaire français ;

- ou bien qu’il soit rendu exécutoire en France et que, le cas échéant, il soit accompagné
d’une traduction en langue française certifiée par un fonctionnaire du Ministère des
affaires étrangères ou par un interprète habituellement commis par le tribunal 185.

185
Bull. Ass. nat. des conservateurs des hypothèques 1966, art. 645

176
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

C- La fiscalité du partage

Le droit de partage s’applique à toutes les valeurs partagées, même aux biens situés à
l’étrangers ou situés dans les Territoires d’Outre-Mer 186.

Le droit de partage est un droit d’acte qui est dû même sur les biens étrangers car il ne s’agit
pas d’un droit frappant une mutation, le partage étant considéré en droit français comme un
acte déclaratif 187.

SECTION II – LES LIBERALITES EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE

L’installation de plus en plus souvent de français à l’étranger ou d’étrangers en France,


comme les acquisitions immobilières réalisées par des français à l’étranger ou par des
étrangers en France, ont favorisé la multiplication des libéralités comportant des éléments
d’extranéité tenant au domicile ou à la nationalité des donateurs et donataires.

Celles-ci prendront tantôt la forme d’une donation entre vifs, tantôt d’une donation entre
époux, tantôt d’une donation partage.

Ces diverses formes de donations seront successivement examinées.

SOUS-SECTION I – LES DONATIONS ENTRE VIFS

§ 1- LES REGLES DE FOND

La donation de biens présents est un contrat. A ce titre, sa validité et ses effets dans les
rapports entre donateur et donataire relèveront de la loi d’autonomie de la loi choisie par les
parties 188.

Si les parties n’ont pas désigné la loi applicable, il conviendra de rechercher la volonté
implicite des parties à travers divers indices comme la situation des biens donnés, le lieu
d’exécution ou de conclusion du contrat ou encore le domicile ou la nationalité des parties.

Mais en raison du caractère contractuel de la donation, la convention de Rome du 19 juin


1980 sur les obligations contractuelles s’appliquera. Celle-ci dans son article 3 § 1er soumet

186
Cass. Civ 3 mars 1884, Inst. 2694, § 8
187
D. adm. 7F-123, n° 1, 15 juin 2000
188
BATIFFOl et LAGARDE, op. cit. T II, n° 640

177
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

les donations à la loi d’autonomie et l’article 4 § 1er en l’absence de choix soumet les contrats
à la loi du pays avec lequel ils présentent les liens les plus étroits, sachant que l’on présume
que cette loi est celle de la résidence habituelle du débiteur de la prestation caractéristique,
soit la loi du lieu de la résidence habituelle du donateur.

Lorsque la donation portera sur un immeuble, elle sera en principe soumise à la loi du lieu de
situation de l’immeuble, l’article 4 § 3 de la convention précisant que lorsque le contrat a pour
objet un immeuble « la loi présumée avoir les liens les plus étroits avec le contrat est la loi de
situation de l’immeuble ».

Ainsi lorsque la donation aura pour objet un immeuble situé en France la loi applicable à la
donation sera, sauf volonté contraire des parties, la loi française.

En pratique, le plus souvent, la donation reçue en France sera soumise à la loi française, car
les parties seront présumées avoir voulu soumettre le contrat à la loi du rédacteur de l’acte, le
notaire français, dont l’intervention est obligatoire.

La loi d’autonomie régira l’interprétation du contrat de donation comme les obligations des
parties contractantes la révocabilité de la donation, le retour conventionnel.

Seule la capacité de disposer à titre gratuit et d’accepter la donation relèvera de la loi


nationale du donateur.

Au décès du donateur, les donations consenties de son vivant peuvent être sujettes à rapport et
à réduction. Ce n’est plus alors la loi d’autonomie qui est compétente mais la loi
successorale, laquelle régira aussi les articles 918 et 930 du Code Civil français.

§ 2- LES REGLES DE FORME

L’article 9 de la convention de Rome soumet la forme du contrat soit à la loi du lieu de


rédaction (locus regit acutm), soit à la loi qui le régit au fond.

Mais si la donation a pour objet un immeuble, ce sera la loi du lieu de situation de l’immeuble
qui régira la forme du contrat (article 9 § 6 de la convention de Rome).

Un contrat de donation reçu en France portant sur un immeuble qui y est situé devra revêtir la
forme authentique requise par la loi française qui est à la fois la loi du lieu où l’acte est reçu et
la loi du lieu de situation de l'immeuble.

178
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Si la loi du lieu où l’acte est reçu permet les donations par acte sous seing privé, la donation
que se consentirait deux français par acte sous seing privé dans le pays où cette forme est
admise sera valable en France 189.

Un notaire français peut encore recevoir un acte de donation portant sur un immeuble situé à
l’étranger en la forme française. Mais celui-ci devra veiller à ce que le pays où se trouve
l’immeuble ne réserve pas à certaines autorités locales la rédaction de l’acte authentique
(Algérie, Suisse par exemple) ou à ce que les notaires locaux ne refusent pas de publier les actes
non reçus par leur ministère (Espagne).

SOUS-SECTION II – LES DONATIONS ENTRE EPOUX

Très pratiquée en France, cette institution est inconnue dans de nombreuses législations
étrangères quand elle n’est pas prohibée. De nombreux ressortissants étrangers résidant sur
notre territoire national y recourent néanmoins, même si ces libéralités sont ignorées de leur
législation nationale.

Se pose alors la question de leur validité et de leur efficacité puisque certaines législations
peuvent les prohiber (Argentine, Brésil, Portugal, Chili, Honduras, Paraguay, Uruguay, Venezuela,
Colombie, Equateur, Slovaquie, République Tchèque, Pologne, Roumanie, Liban, Cote d’Ivoire,
Slovaquie et tous les pays musulmans). (L’Italie ne prohibe que les donations de biens à venir et non
les donations de biens présents).

D’autres reconnaissent leur validité (USA, Angleterre, Irlande, Australie, Canada, Allemagne,
Danemark, Autriche, Suisse, Russie, Grèce, Mexique, Japon, Belgique, Luxembourg, Monaco).

Mais il suffit que la donation entre époux relève d’une loi qui la prohibe pour que celle-ci soit
inefficace.

Il convient par conséquent de déterminer la loi applicable à la donation entre époux en opérant
une distinction entre les donations de biens présents et les donations de biens à venir entre
époux.

§1- LES DONATIONS ENTRE EPOUX DE BIENS PRESENTS

Les donations mobilières et immobilières de biens présents sont soumises à la loi qui régit les
effets personnels du mariage, c’est à dire à la loi nationale des époux s’ils sont de même
nationalité, à la loi de leur domicile commun s’ils sont de nationalité différente 190.

189
Cass. Civ. 29 juin 1922, D. 1922, 1, 249, note AUDINET
190
Cass. Civ 15 février 1966, Def. 1967, art. 28997, note G. MORIN – Cass. Civ. 12 juin 1979, JCP N 1980,
7515, J. Not. 1980 art. 95342, note DROZ, JDI 1980, 644, note WIEDERKEHR – Cass. Civ 3 avril 1990, Rev. crit.
DIP 1991, 104, note B.A.

179
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La loi applicable à la donation entre époux régit non seulement sa validité mais aussi sa
révocabilité.

Exemple : Un époux belge a fait donation de l’immeuble situé en France qui lui
appartenait en propre à son épouse de même nationalité.

La loi applicable à cette donation étant la loi belge (loi nationale commune), cette
donation est révocable bien qu’aujourd’hui les donations de biens présents soient
irrévocables en France.

§2- LES DONATIONS ENTRE EPOUX DE BIENS A VENIR

Une distinction s’impose entre les donations mobilières et les donations immobilières de biens
à venir.

A- Les donations immobilières de biens à venir entre époux

Les donations immobilières de biens à venir entre époux sont soumises à la loi successorale
désignée par la règle de conflit, à la loi du lieu de situation des immeubles 191, hormis le cas
où le renvoi trouverait à jouer.

B- Les donations mobilières de biens à venir entre époux

La loi applicable aux donations mobilières de biens à venir n’est pas déterminée aujourd’hui
encore avec certitude.

Deux lois sont en effet susceptibles de s’appliquer :

- la loi qui régit les effets personnels du mariage (loi nationale des époux s’ils sont de même
nationalité, loi de leur domicile commun s’ils sont de nationalité différente) ;

- la loi successorale (loi du dernier domicile).

La jurisprudence est incertaine et cette incertitude ne va pas sans inconvénient puisque la


validité ou l’inefficacité de la donation entre époux sera fonction dans certains cas de la règle
de conflit applicable.

191
Cass. Civ. 7 mai 1924, Def. 24, art. 20605 ; CA Paris 26 février 1964, DGI 26, Defrénois 64, note MORIN, art.
28565 – Rev. crit. DIP 1965, 334, note LE BRIS

180
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

C’est pourquoi, chaque fois qu’une loi étrangère susceptible de s’appliquer prohibera les
donations entre époux, celles-ci devront être confirmées par un testament olographe, à la
condition que l’efficacité de celui-ci ne soit pas remis en cause dans le pays étranger de la
situation des biens (pour le Portugal, cf supra).

Toutefois, l’application éventuelle d’une loi prohibant les donations entre époux ne doit pas
empêcher le notaire français de conseiller à ses clients d’y recourir lorsqu’il existe un
immeuble en France. En effet, dans cette hypothèse, la donation entre époux sera au moins
efficace sur l’immeuble français.

Exemple : Deux époux britanniques domiciliés en France entendent se consentir une


donation entre époux. Quelle sera son efficacité sur les biens meubles et immeubles
situés en Grande Bretagne et en France ?

La Grande Bretagne comme la France admettent la validité des donations entre époux.
Dès lors celle-ci sera efficace sur leurs immeubles, qu’ils soient situés en France ou en
Grande Bretagne.
En ce qui concerne les biens mobiliers des époux, la donation sera également efficace
que l’on fasse application de la loi du domicile (loi successorale), loi française, ou de la
loi nationale commune (loi qui régit les effets personnels du mariage), loi britannique.

Il sera même inutile de faire confirmer cette donation entre époux par un testament.

Exemple : Deux époux de nationalité italienne possédant des biens meubles et


immeubles, tant en France qu’en Italie, se sont consentis une donation entre époux en
France.

Quelle sera l’efficacité de cette donation entre époux sachant que l’Italie prohibe
seulement les donations entre époux de biens à venir ?

- L’Italie prohibant les donations entre époux de biens à venir, celle-ci sera inefficace
sur les immeubles des époux se trouvant en Italie, mais efficace sur les immeubles
situés en France où les donations entre époux sont admises, les donations immobilières
de biens à venir relevant de la loi du lieu de situation des immeubles.

- En ce qui concerne les biens mobiliers des époux, l’efficacité de la donation entre
époux dépendra de la règle de conflit applicable.

Si l’on fait application de la loi du domicile, la loi française est compétente et la


donation sera efficace au moins sur tous les biens meubles situés en France (car il est à
craindre qu’en Italie on écarte l’application de la loi française sur les biens mobiliers).

181
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Si l’on fait application de la loi qui régit les effets personnels du mariage, soit en
l’espèce la loi nationale des époux, la donation mobilière de biens à venir sera inefficace
puisque l’Italie prohibe les donations entre époux.

En raison de cette incertitude sur la règle de conflit applicable aux donations mobilières de
biens à venir entre époux et chaque fois qu’une loi étrangère susceptible de s’appliquer
prohibera les donations entre époux, un testament devra confirmer la donation entre époux.

Si aucune disposition testamentaire n’a été prise, il est toujours possible aux héritiers majeurs
et maîtres de leurs droits de consentir à l’exécution de la donation entre époux.

SOUS-SECTION III – LA DONATION PARTAGE

Pacte familial, pacte sur succession future exceptionnellement autorisé en droit français
(inconnue de nombreuses législations étrangères : USA, Angleterre, Pays Bas, Espagne, pays
musulmans), la donation partage qui organise le règlement entre vifs d’une succession permet
d’éviter les dissensions qui pourraient voir le jour entre les héritiers réservataires au décès de
leur auteur.

Ces risques de discorde se trouvent accrus lorsque les biens mobiliers et immobiliers
composant le patrimoine du donateur ne sont pas tous situés dans le même pays. Une donation
partage pourrait y remédier.

Mais est-elle envisageable ? En droit international privé, la donation partage relève de la loi
successorale. Or celle-ci génère un morcellement de la succession du défunt en autant de
succession qu’il y a de masses de biens situées dans des pays différents, alors que le partage
d’ascendant a pour objectif de répartir une seule masse de biens entre les héritiers en
respectant les droits de chacun. Par ailleurs le changement de domicile peut bouleverser la
donation partage puisque la loi applicable au décès en ce qui concerne les biens mobiliers du
défunt peut ne plus être celle qui était applicable lors de la donation partage.

Enfin et surtout, sur chaque masse de biens soumise à des lois successorales internes
différentes, les codonataires, bien qu’allotis sur d’autres biens, peuvent se prévaloir de leur
qualité d’héritiers réservataires et ainsi remettre en cause toute la donation partage au décès
du donateur.

D’autre part, on ne peut demander au donataire d’une masse de biens de renoncer par avance
à réclamer sa réserve sur une autre masse, car il s’agit là d’un pacte sur succession future,
prohibé, dans certaines législation et notamment en France.

182
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Dans ces conditions, une donation partage ne peut être consentie sans courir le risque d’être
remise en cause en cas de désaccord des donateurs, qu’à la condition d’être soumise à une loi
successorale unique.

Or cette situation peut se rencontrer lorsque les règles de conflit étrangères applicables aux
biens situés à l’étranger renvoient à une loi successorale unique, la loi nationale du défunt.

Exemple : Un ressortissant français envisage de partager entre ses trois enfants trois
immeubles de même valeur qu’il a acquis, l’un en France, le second en Espagne et le
troisième en Italie. Le notaire français consulté peut-il recevoir l’acte de donation
partage, comme le lui demande son client ?

En vertu de la règle de conflit française en matière de succession, l’immeuble situé en


Espagne et l’immeuble situé en Italie devraient respectivement être soumis à la loi
espagnole et à la loi italienne.

Mais les règles de conflit de ces pays donnent compétence en matière de succession à la
loi nationale du défunt, à la loi française, laquelle, au cas exposé, admet ce renvoi de la
loi étrangère.

Dès lors ce sont les trois immeubles du donateur qui seront soumis à une loi
successorale unique lors du décès du donateur, la loi française, qui connaît les partages
d’ascendant.

Néanmoins, la publicité foncière de cette donation partage peut soulever des difficultés.

En effet, en Espagne, les notaires espagnols répugnent à publier des actes qui n’ont pas
été reçus par leur ministère. Il est vrai qu’il est possible de recourir à un gérant
administratif (gestoria institution typiquement espagnole ayant spécialement pour fonction
d’acquitter les droits de succession et d’effectuer la publicité foncière), voire au consulat
d’Espagne en France. En toute hypothèse, l’acte de donation partage devra être adressé
traduit et légalisé sous la forme de l’apostille. En outre des droits de mutation seront dus
en Espagne et en France… même si la France admettra la déduction des droits dus en
Espagne de ceux dus en France.

En Italie, il sera plus difficile encore de parvenir à publier le partage d’ascendant car la
pratique notariale italienne se refuse à publier les actes de donation partage reçu en
France au motif que le partage d’ascendant est inconnu du droit italien et constitue un
pacte sur succession future prohibé (article 548 du Code Civil italien).

183
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

SECTION III – LA FISCALITE DES MUTATIONS A TITRE GRATUIT EN DROIT


INTERNATIONAL PRIVE

Nous examinerons successivement les principes généraux d’imposition des mutations à titre
gratuit puis les problèmes fiscaux propres aux successions.

SOUS-SECTION I – LES PRINCIPES GENERAUX D’IMPOSITION DES MUTATIONS A TITRE


GRATUIT

Ces règles d’imposition sont applicables sous réserve de conventions internationales.

§1- LES REGLES D’IMPOSITION EN L’ABSENCE DE CONVENTIONS INTERNATIONALES


(ARTICLE 750 TER DU CODE GENERAL DES IMPOTS)

A- La masse imposable

L’article 750 ter du Code Général des Impôts qui gouverne la matière distingue selon que le
donateur ou le défunt sont domiciliés en France ou hors de France.

Le domicile fiscal est celui défini en matière d’impôt sur le revenu par l’article 4 B du Code
Général des Impôts.

1- Le donateur ou le défunt est domicilié en France

Tous les biens meubles ou immeubles transmis à titre gratuit sont passibles de l’impôt en
France. Sont ainsi visés tous les biens situés en France ou hors de France quelle qu’en soit la
nature : fonds publics, parts d’intérêts, créances, valeurs mobilières françaises ou étrangères,
les biens meubles corporels et incorporels et tous les immeubles.

2- Le donateur ou le défunt est domicilié hors de France

Une nouvelle distinction est à opérer selon que les héritiers donataires ou légataires sont
domiciliés en France ou hors de France.

184
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

a) Les héritiers, les légataires, les donataires sont domiciliés hors de France

Seuls les biens meubles et immeubles situés en France sont imposables en France.

b) Les héritiers, les légataires, les donataires sont domiciliés en France

Depuis le 1er janvier 1999, lorsque les donataires, héritiers ou légataires sont domiciliés en
France, les biens meubles et immeubles, quel que soit le pays où ils se trouvent, qu’ils
reçoivent d’un donateur ou d’un défunt domicilié fiscalement hors de France, sont passibles
de droits de mutation à titre gratuit (article 750 ter 3°).

Cette disposition ne trouve à s’appliquer que lorsque l’héritier, le donataire ou le légataire a


eu son domicile fiscal en France pendant au moins six ans au cours des dix dernières années
précédant celle au cours de laquelle il reçoit des biens par donation ou succession.

Ce dispositif vise à ne pas pénaliser les personnes qui sont appelées à séjourner de manière
temporaire en France en raison de leur profession ou de leur mobilité géographique 192.

En définitive, sont passibles de droits de mutation à titre gratuit, les donataires, légataires et
héritiers domiciliés en France qui reçoivent des biens meubles et immeubles situés hors de
France et en France d’un donateur ou d’un défunt domicilié à l’étranger (sous réserve des
conditions de durée du domicile fiscal).

Les biens situés à l’étranger ne sont pas soumis à l’impôt en France si le donateur ou le
défunt, les héritiers donataires ou légataires sont tous fiscalement domiciliés à l’étranger.

B- Tarif et liquidation des droits

- Abattement : Les abattements en ligne directe et entre époux constituant un élément du tarif
de l’impôt s’appliquent quelle que soit la nationalité du défunt ou de ses héritiers ou
légataires 193. Ainsi, les ascendants, descendants ou époux d’un donateur ou d’un défunt
étranger, même s’ils sont de nationalité étrangère vont bénéficier de ces abattements. Il en est
de même de l’abattement entre frère et sœur (article 788 I du Code Général des Impôts) et de
l’abattement en faveur des handicapés (article 779 II du Code Général des Impôts).

- Réduction de droit : L’article 783 du Code Général des Impôts dispose que « sous réserve
de textes de réciprocité, les réductions d’impôt ou de taxe, les dégrèvements à la base, les
déductions accordées par les lois pour des raisons de charge de famille ne sont applicables

192
Inst. 26 avril 1999, BOI 7G-5-99
193
Feuillets Lefebvre Enregistrement X, n° 22100 ; art. 775 ter et 779-2 du C.G.I.

185
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

qu’aux citoyens français et aux personnes originaires des territoires d’Outre-Mer ». Aussi,
les réductions pour charge de famille ne pourront être invoquées que par des ressortissants de
pays qui ont conclu avec la France une convention de réciprocité. Toutefois l’administration a
assoupli sa position. Les étrangers domiciliés en France qui ne remplissent pas ces conditions
peuvent bénéficier des mêmes réductions dans le cas de l’existence d’une réciprocité de fait.
Pour l’application de cette mesure, il y a lieu de considérer que la condition d’une réciprocité
de fait se trouve a priori remplie pour tout Etat pour lequel aucun élément d’information ne
vient infirmer cette présomption et il convient en conséquence d’accorder ces avantages à tous
les étrangers domiciliés en France 194

- Les conséquences de l’article 750 ter 195 : L’article 750 ter ne modifie en rien les tarifs et
la liquidation des droits, sauf à tenir compte du rappel fiscal des libéralités antérieures tel qu’il
est indiqué ci-après.

Cependant, l’extension du champ d’application des droits de mutation à titre gratuit aux biens
situés hors de France, lorsque l’héritier, le donataire ou le légataire est domicilié en France et
que le donateur ou le défunt est domicilié hors de France, a pour conséquence d’étendre aux
mêmes biens l’obligation de rappel fiscal prévu à l’article 784 du Code Général des Impôts.

Les obligations imposées aux parties par l’article 784 précité concernent toutes les donations
antérieures consenties depuis moins de dix ans par le défunt ou le donateur aux héritiers,
donataires ou légataires domiciliés en France quelle que soit la forme dans laquelle ces
donations ont été constatées. Elles s’appliquent notamment aux dons manuels déclarés 196.

En conséquence, le rappel fiscal concerne :

 toutes les donations antérieures ayant acquis date certaine et consenties depuis moins
de dix ans, passibles au jour de leur réalisation de l’impôt en France ;

 tous les dons manuels passibles, au jour de leur révélation, de l’impôt français, quelle
que soit la date de leur réalisation.

Compte tenu de la date d’entrée en vigueur au 1er janvier 1999 de l'article 19 de la loi de
finances pour 1999, pour l’application du nouvel article 750 ter 3° du Code Général des
Impôts, le rappel fiscal ne s’applique pas aux libéralités portant sur des biens étrangers
consenties par un donateur domicilié au jour de la donation hors de France et ayant acquis
date certaine avant le 1er janvier 1999.

194
Note 14 avril 1967 ; BOCD 1967, II, 561 ; D. adm. 7G-244, n° 10, 15 décembre 1991
195
Inst. du 26 avril 1999, Def. 1999, art. 37024
196
DB 7 G 3162

186
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

- Imputation des impôts acquittés hors de France : L’article 784 A du Code Général des
Impôts, modifié par le B de l’article 19 de la loi de finances pour 1999, prévoit que, dans le
cas défini à l’article 750 ter 3°, le montant des droits de mutation à titre gratuit acquitté, le cas
échéant hors de France, est imputable sur l’impôt exigible en France. Cette imputation est
limitée à l’impôt acquitté sur les biens meubles et immeubles situés hors de France.

A cet égard, le montant de l’impôt étranger dûment justifié n’est imputable sur l’impôt
français que dans la limite dudit impôt afférent aux biens meubles et immeubles situés à
l’étranger.

En ce qui concerne les modalités de l’imputation, deux situations peuvent se présenter :

- Si l’impôt étranger ayant frappé les biens meubles et immeubles situés hors de France
compris dans l’assiette de l’impôt français a été acquitté avant le paiement des droits dus
en France, le montant reconnu imputable de cet impôt est directement déduit du montant
de l’impôt français à percevoir en raison de la succession ou de la donation concernée.

- Dans le cas contraire, il est procédé par voie de restitution. A cet effet, les intéressés
doivent en faire la demande par écrit au receveur qui a reçu la déclaration de succession
ou enregistré la donation. Cette demande qui doit être accompagnée d’un formulaire
spécial qui porte le n° 2740 au Répertoire général des imprimés et de justificatifs, est
instruite dans les conditions habituelles 197.

§ 2- LES CONVENTIONS INTERNATIONALES EN MATIERE D’IMPOSITION DES MUTATIONS A


TITRE GRATUIT

Le dispositif fiscal résultant de l’article 750 ter du Code Général des Impôts ne trouve à
s’appliquer qu’en l’absence de conventions internationales. Or celles-ci sont relativement
nombreuses (34). Elles ont pour objectif d’éviter les doubles impositions.

Dès lors, à l’occasion d’une donation ou du règlement d’une succession, il faudra s’assurer
qu’il n’existe pas une convention internationale tendant à éviter les doubles impositions entre
la France et le pays étranger concerné.

Sur les 34 conventions fiscales tendant à éviter les doubles impositions, sept seulement
concernent à la fois les donations et les successions (Autriche, USA, Italie, Nouvelle Calédonie,
St Pierre et Miquelon, Suède et Pays-Bas). Les autres conventions ne concernent que les
successions.

197
Inst. 3 novembre 1977, 7G-8-77, D. adm. 7 G-246, n° 7, 20 décembre 1996

187
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

SOUS-SECTION II – LES PROBLEMES FISCAUX LIES AUX DECLARATIONS DE SUCCESSION

§ 1- LE LIEU DE DEPOT DE LA DECLARATION DE SUCCESSION

Lorsque le défunt n’est pas domicilié en France, la déclaration de succession doit être
souscrite au bureau de la recette des non résidents, 9 rue d’Uzès, 75084 Paris Cedex 02. Le
domicile dont s’agit est le « domicile fiscal » tel qu’il est défini à l’article 4 B du Code
Général des Impôts 198.

§ 2- DELAI DE SOUSCRIPTION DE LA DECLARATION DE SUCCESSION

Le délai de souscription de la déclaration de succession est de six mois à compter du jour du


décès lorsque celui dont on recueille la succession est décédé en France métropolitaine. Ce
délai est de une année dans tous les autres cas (article 641 du Code Général des Impôts). Il n’est
tenu compte que du lieu du décès et non du domicile du défunt.

Ainsi, le délai de déclaration de succession est de six mois même lorsque les héritiers sont
domiciliés à l’étranger. Mais une réponse ministérielle du 15 février 1975 199 est venu préciser
que « lorsque les successibles sont domiciliés hors de France, l’administration ne se refuse
pas à examiner avec la plus grande bienveillance les justifications concernant les motifs de
retard du dépôt de la déclaration ».

Dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique, de la Guyane et de la Réunion, le


délai est également de 6 mois à compter du décès lorsque le défunt est décédé dans le
département où il était domicilié et d’une année dans tous les autres cas.

Toutefois, en ce qui concerne la Réunion, le délai est de deux ans à compter du jour du décès
lorsque celui dont on recueille la succession est décédé ailleurs qu’à Madagascar, à l’Île
Maurice, en Europe ou en Afrique (article 642 du Code Général des Impôts).

§ 3- L’ASSIETTE DES DROITS

Les droits sont dus sur l’actif restant après déduction des dettes.

Les biens imposables sont déterminés par l’article 750 ter du Code Général des Impôts sous
réserve des conventions internationales (cf supra).

198
D. adm. 7G-254, n° 1 et 2, 15 décembre 1991
199
JOAN p. 546, n° 15538

188
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

L’évaluation des biens situés à l’étranger est faite conformément aux dispositions du Code
Général des Impôts dans la mesure où celles-ci peuvent s’appliquer compte tenu de la
situation des biens.

L’évaluation des immeubles situés à l’étranger est faite à leur valeur en vente publique à la
date de la transmission d’après la déclaration détaillée et estimative des parties.

Quant aux biens meubles situés à l’étranger, l’évaluation résulte généralement de la


déclaration détaillée et estimative des parties, à moins que ces dernières puissent invoquer un
contrat d’assurance répondant aux prescriptions de l'article 764 II du Code Général des
Impôts 200.

Le forfait mobilier de 5 % se calcule sur l’ensemble des biens imposables en France.

Ce forfait est inapplicable à la succession d’un étranger qui n’a en France ni domicile ni
résidence 201.

Si pour échapper à l’application du forfait de 5 % les héritiers recourent à un inventaire, les


biens situés hors de France seront mentionnés sur une déclaration détaillée et estimative,
article par article, établie et signé par les héritiers.

Les dettes quant à elles sont déductibles dans les mêmes conditions et sous les mêmes
justifications que celles contractées en France.

Toutefois, si l’héritier et le défunt sont domiciliés hors de France l’impôt ne peut atteindre que
les biens situés en France. Seul le passif grevant ces biens est alors déductible (cf supra). Les
impôts locaux en revanche ne le sont pas.

§ 4- LE CALCUL DE L’IMPOT : LE TAUX EFFECTIF

La plupart des conventions signées par la France en matière d’impôt sur les successions
prévoient la possibilité de calculer l’impôt exigible en France à raison des biens héréditaires
imposables en France en vertu de ces conventions d’après le taux moyen qui serait applicable
s’il était tenu compte de l’ensemble des biens imposables en France 202. Certaines conventions
ignorent la règle du taux effectif en l’excluant, comme la convention franco-britannique.

Cette disposition tend à maintenir la progression de l’impôt pour chaque héritier ou légataire.
Elle consiste à calculer l’impôt afférent aux seuls biens imposables en France aux taux de
l’impôt correspondant à l’ensemble des biens qui auraient été imposés en l’absence de
dispositions spécifiques exonérant certains d’entre eux.

200
Inst. 3 novembre 1977, BOI 7G-3-77, D. adm. 7G-2311, n° 26
201
Rép. BIZET, JOAN 3 octobre 1979, p. 7699, n° 18041
202
Inst. du 17 février 1983, Doc. adm. 7G-247, n° 1, 20 décembre 1996

189
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

L’impôt est calculé sur le montant total des biens du défunt, mais il n’est dû qu’en proportion
de la part que représentent les biens soumis à l’imposition, dans le montant total des biens 203.

En principe les conventions signées par la France permettent de calculer le taux de l’impôt
exigible suivant la règle du taux effectif à raison des donations ou des successions qu’elles
visent, que le défunt ou le donateur soit domicilié ou non domicilié en France au moment du
décès ou de la donation.

La cotisation de base est déterminée à partir de l’ensemble des biens successoraux qui
auraient été imposables en France conformément à la loi française applicable en l’absence de
convention 204.

La cotisation de base est calculée, dans les conditions prévues par la loi interne sur la part
nette recueillie par chaque ayant droit, déterminée compte tenu des précisions apportées ci-
dessus. L’impôt est liquidé au tarif fixé par la loi sur l’actif taxable après application sur la
part nette recueillie de l’abattement personnel auquel peut prétendre le successible concerné.

Bien entendu, pour la liquidation de l’impôt, il y a lieu de faire application, le cas échant, des
dispositions de l’article 784 du Code Général des Impôts, relatives au rapport fiscal des
donations antérieures 205.

Le taux moyen de l’impôt est obtenu pour chaque héritier donataire ou légataire en divisant le
montant de la cotisation de base par le montant de la part successorale nette qui aurait été
imposable en France en l’absence de convention, mais avant déduction des abattements
personnels, qui sont considérés comme un élément du tarif 206.

Exemple : La succession d’une personne domiciliée en France, décédée le 3 mars 2005,


comprend les biens suivants :

un appartement en Espagne évalué ................................................................ 300 000 €


le mobilier le garnissant évalué ........................................................................ 80 000 €
un fonds de commerce en France évalué ........................................................ 500 000 €
un immeuble en France évalué ....................................................................... 800 000 €
le mobilier le garnissant évalué ...................................................................... 120 000 €
des valeurs mobilières françaises évaluées ....................................................... 30 000 €
du numéraire (au domicile) .............................................................................. 20 000 €
__________
Actif brut total ............................................................................................. 1 850 000 €

203
Inst. précitée
204
Inst. 17 février 1983, 13 G-1-83, n° 45, D. adm. 7G-247, n° 8, 20 décembre 1996
205
Enr. X-24150s - Inst. 17 février 1983, 13 G-1-83, n° 50 ; D. adm. 7G-247, n° 13, 20 décembre 1996
206
Inst. 17 février 1983, 13G-1-83, n° 51 ; D. adm. 7G-247, n° 14, 20 décembre 1996

190
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Cette succession est grevée d’un passif déductible de 80 000 € garanti pour 30 000 € par
l’appartement situé en Espagne et afférent pour 50 000 € au fonds de commerce situé en
France.

Le défunt laisse pour seul héritier un enfant légitime sans enfant.

 Calcul de la cotisation de base

- En l’absence de convention franco-espagnole, l’impôt serait exigible en France


conformément à la législation française sur l’ensemble des biens – par hypothèse non
exonérés – appartenant au défunt

soit un actif brut de ...................................................................................... 1 850 000 €


moins le passif déductible................................................................................. 80 000 €
_________
actif net ........................................................................................................ 1 770 000 €
abattement à déduire (50 000 € + 50 000 €) (art. 779-1 et 775 ter du C.G.I.) ....... 100 000 €
part nette taxable.......................................................................................... 1 670 000 €

- Montants des droits exigibles :


7 600 € * 5 % ......................................................................................................... 380 €
3 800 € * 10 % ....................................................................................................... 380 €
3 600 € * 15 % ....................................................................................................... 540 €
505 000 € * 20 % ............................................................................................ 101 000 €
330 000 € * 30 % .............................................................................................. 99 000 €
820 000 € * 35 % ............................................................................................ 287 000 €
________
........................................................................................................................ 488 300 €

 Taux moyen
488 300 X 100 = 29,24 %
1 670 000

 Impôts effectivement exigibles :

- Biens imposables en France en application de la convention franco-espagnole du 8


janvier 1963 :

191
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

fonds de commerce en France ........................................................................ 500 000 €


immeuble en France........................................................................................ 800 000 €
mobilier le garnissant ..................................................................................... 120 000 €
valeurs mobilières françaises ............................................................................ 30 000 €
numéraire .......................................................................................................... 20 000 €
__________
actif brut ....................................................................................................... 1 470 000 €
passif déductible (fonds de commerce en France) ................................................ 50 000 €
_________
part nette ...................................................................................................... 1 420 000 €

- Impôt exigible : taux moyen de 29,24 % sur 1 420 000............................... 415 208 €
alors que la simple application du tarif aux seuls biens imposables
en France aurait conduit à un impôt de 383 800 € calculé comme suit :
- biens imposables ....................................................................................... 1 470 000 €
- passif déductible .........................................................................................- 50 000 €
__________
..................................................................................................................... 1 420 000 €
- abattement (50 000 € + 50.000 €) (art. 775 ter et 779-1 du C.G.I.) ................- 100 000 €
__________
part taxable .................................................................................................. 1 320 000 €

- Impôt :
7 600 € * 5 % ......................................................................................................... 380 €
3 800 € * 10 % ....................................................................................................... 380 €
3 600 € * 15 % ....................................................................................................... 540 €
505 000 € * 20 % ............................................................................................ 101 000 €
330 000 € * 30 % .............................................................................................. 99 000 €
470 000 € * 35 % ............................................................................................ 164 500 €
________
........................................................................................................................ 365 800 €

§ 5- LES OBLIGATIONS DES ACQUEREURS D’IMMEUBLES ET DE FONDS DE COMMERCE

Tout acquéreur d’un immeuble ou d’un fonds de commerce situé en France et dévolu à un ou
plusieurs héritiers légataires ou donataires ayant à l’étranger leur domicile, ne peut se libérer
du prix d’acquisition si ce n’est sur la présentation d’un certificat délivré sans frais par le
comptable compétent des impôts et constatant, soit l’acquittement, soit la non-exigibilité de
l’impôt de mutation par décès, à moins qu’il ne préfère retenir, pour la garantie du Trésor, et

192
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

conserver jusqu’à la présentation du certificat du comptable, une somme égale au montant de


l’impôt calculée sur le prix (article 803 du Code Général des Impôts) 207.

L’auteur de toute contravention aux dispositions de l’article 803 du Code Général des Impôts
précité est personnellement tenu des droits et pénalités exigibles, sauf le recours contre le
redevable.

Le notaire qui a reçu l’acte constatant le paiement du prix est solidairement responsable des
droits, pénalités et amendes visés au premier alinéa (article 1833 du Code Général des Impôts).

D’autre part, en vertu de l’article 806 du Code Général des Impôts, les compagnies
d’assurances et organismes assimilés ne peuvent se libérer des sommes et rentes dues par eux
à raison ou à l’occasion du décès de l’assuré domicilié en France ou à l’étranger, si ce n’est
sur la présentation d’un certificat délivré sans frais par le comptable des impôts et constatant
soit l’acquittement, soit la non-exigibilité de l’impôt de mutation par décès.

Or il arrive souvent que les sommes dues par la compagnie d’assurance soit nécessaires au
paiement de l’impôt.

En pareil cas, il appartient aux héritiers de déposer la déclaration de succession et de


demander à la compagnie détentrice des fonds leur appartenant, de verser tout ou partie des
sommes dues par eux en l’acquit des droits de mutation par décès, à la recette des impôts où a
été déposée la déclaration de succession.

On procède de la même façon lorsqu’il ne s’agit plus de capitaux détenus par une compagnie
d’assurance mais de fonds détenus par des établissements bancaires pour le compte des
héritiers à raison de la succession.

207
D. adm. 7G-272, n° 12, 15 décembre 1991

193
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

194
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

TITRE III : LES ACQUISITIONS


PAR LES ETRANGERS

- La loi applicable aux contrats en DIP


- La loi applicable au contrat de vente
- Les difficultés rencontrées lors de la
rédaction de l’acte d’acquisition
- Les incidences fiscales des acquisitions
réalisées par les étrangers en France
- L’impôt sur le revenu
- Les relations financières avec l’étranger

195
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

196
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

La création de l’Union européenne, associée à un développement des moyens de


communication toujours plus rapides, a incité les ressortissants de l’Union, mais aussi tous les
autres étrangers, à investir en France pour y prendre leurs vacances ou leur retraite.

Les achats d’immeubles comme résidences principales ou secondaires par des étrangers ne
cessent de s’accroître dans certaines régions françaises.

La présence de ces acquéreurs étrangers suscite des interrogations dans la pratique notariale
tout au long de la rédaction de l’acte de vente : quelle loi régira le contrat, comment identifier
les parties, s’assurer de leur capacité…

Soucieux de répondre aux aspirations des praticiens, cette question de l’acquisition par les
étrangers sera abordée d’une façon concrète à travers les divers articles d’une formule de
contrat de vente couramment utilisée dans le notariat.

Mais avait d’examiner les difficultés dues à la présence d’éléments d’extranéité lors de la
rédaction d’un contrat de vente, il convient de rappeler les règles qui animent le droit des
contrats en Droit International Privé.

197
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

198
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

CHAPITRE I – LA LOI APPLICABLE AUX CONTRATS


EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE

Les contrats en Droit international privé relèvent de la convention de Rome du 19 juin 1980
entrée en vigueur en France le 1er avril 1991 relative à la loi applicable aux obligations
contractuelles. Celle-ci se propose d’unifier le Droit international privé des contrats à
l’intérieur de la communauté européenne.

Elle est applicable dans les pays suivants : Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark,
Finlande, France, Grèce, Irlande, Italie, Luxembourg, Suède, Pays-Bas et Royaume Uni.

Elle s’applique à tous les contrats conclus après le 1er avril 1991.

L’article 2 de la convention lui reconnaît un caractère universel : « la loi désignée par la


présente convention s’applique même si cette loi est celle d’un Etat non contractant ». Il en
résulte que la convention s’applique dès lors qu’un contrat est passé par un ressortissant de la
communauté européenne, même si le cocontractant n’en est pas un.

Elle est également applicable aux contrats passés entre des ressortissants d’Etats tiers, si l’un
d’eux a sa résidence habituelle dans un pays de l’Union européenne, ou si les parties ont
choisi la loi de l’un de ces pays pour régir leur contrat 208.

Certaines matières sont exclues du champ d’application de la convention (article 1er) :

 l’état et la capacité des personnes ;


 les obligations contractuelles concernant les testaments et successions, les régimes
matrimoniaux, les droits et devoirs découlant des relations de famille…
 les droits réels ;
 les obligations nées de lettres de change, chèques, billets à ordre ;
 les questions relevant du droit des sociétés ;
 la constitution de trust ;
 les règles de procédure et de preuve ;
 les contrats d’assurance qui couvrent des risques situés dans les territoires membres de
l’Union européenne.

Les donations ne sont pas visées à l’exception de la donation entre époux.

208
Cf M. REVILLARD, op. cit., n° 689

199
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

SECTION I – LA DETERMINATION DE LA LOI APPLICABLE AUX CONTRATS

Il faut opérer une distinction selon que les parties ont ou non déclaré la loi applicable.

§ 1- LES PARTIES ONT DESIGNE LA LOI APPLICABLE AU CONTRAT (ARTICLE 3)

La convention consacre le principe de l’autonomie de la volonté « le contrat est régi par la loi
choisie par les parties. Ce choix doit être exprès ou résulter de façon certaine des dispositions
du contrat ou des circonstances de la cause ».

Toutefois, les parties ne sont pas obligées de soumettre la totalité de leur contrat à la loi
d’autonomie. Il leur est possible de n’en soumettre qu’une partie lors de la signature du
contrat comme après.

Par ailleurs, les parties peuvent convenir à tout moment de faire régir le contrat par une loi
autre que celle qui le régissait auparavant (article 3-2).

§ 2-LES PARTIES N’ONT PAS DESIGNE LA LOI APPLICABLE AU CONTRAT (ARTICLE 4)

Le contrat est dans cette hypothèse régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les
plus étroits.

Il est présumé que le contrat présente les liens les plus étroits avec « le pays où la partie qui
doit fournir la prestation caractéristique a, au moment de la conclusion du contrat, sa
résidence habituelle ou s’il s’agit d’une société, association, personne morale, son
administration centrale » (article 4, § 2).

Dans les contrats synallagmatiques, la prestation de l’un des contractants s’effectue


généralement sous la forme d’un paiement en argent tandis que l’autre doit s’acquitter d’une
prestation spécifique portant sur un bien ou un service qui caractérise le contrat : la prestation
spécifique sera fournie par le vendeur dans la vente, le prêteur dans le prêt, le bailleur dans le
contrat de louage, la caution dans le cautionnement, le donateur dans la donation.

Toutefois, cette règle posée par l’article 4 § 2 de la convention comporte une exception
notoire. « Lorsque le contrat a pour objet un droit réel immobilier ou un droit d’utilisation
d’immeuble, il est présumé que le contrat présente les liens les plus étroits avec le pays où est
situé l’immeuble ».

D’autre part, la présomption édictée par l’article 4 § 2 ne s’applique pas aux contrats de
transfert de marchandise.

200
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Enfin, ces présomptions supportent la preuve contraire chaque fois qu’il résultera de
l’ensemble des circonstances que le contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays
(prêt à usage portant sur un immeuble situé en Espagne consenti entre français).

Des dispositions particulières ont été prises dans la convention pour les contrats conclus par
les consommateurs (article 5) et pour les contrats de travail (article 6).

L’article 5 de la convention prévoit que le choix par les parties de la loi applicable ne peut
avoir pour effet de priver le consommateur de la protection que lui assurent les dispositions
impératives de la loi du pays dans lequel il a sa résidence habituelle.

L’article 6 édicte que : Quelle que soit la loi choisie, elle ne « peut avoir pour résultat de
priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi qui
serait applicable à défaut de choix ».

§ 3- LE CHAMP D’APPLICATION DE LA CONVENTION (ARTICLE 10)

La loi applicable au contrat régit :

 son interprétation ;
 l’exécution des obligations qu’il engendre ;
 les conséquences de l’inexécution totale ou partielle de ces obligations ;
 les divers modes d’extinction des obligations ainsi que les prescriptions et déchéances
fondées sur l’expiration d’un délai ;
 les conséquences de la nullité du contrat.

La loi applicable au contrat régira ainsi l’ensemble du contrat, sa formation, ses conditions de
validité, son contenu, ses effets (consentement, interprétation, résiliation, résolution pour
inexécution, prescription extinctive, effets relatifs du contrat, stipulation pour autrui, etc.).

Mais échappent à la loi applicable au contrat la capacité de contracter (article 1-2a).

SECTION II – LA LOI APPLICABLE A LA FORME DU CONTRAT (ARTICLE 9)

La convention fait une distinction selon que le contrat est conclu par des personnes qui se
trouvent dans le même pays ou des pays différents.

201
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

§ 1- LE CONTRAT EST CONCLU ENTRE DES PERSONNES QUI SE TROUVENT DANS UN MEME
PAYS

Le contrat est valable quant à sa forme,

 s’il répond aux conditions de forme de la loi qui le régit au fond ;


 s’il répond aux conditions de forme de la loi du pays où il a été conclu.

§ 2- LE CONTRAT EST CONCLU ENTRE DES PERSONNES QUI SE TROUVENT DANS DES PAYS
DIFFERENTS

Le contrat est valable quant à sa forme,

 s’il répond aux conditions de la loi qui le régit au fond ;


 s’il répond à la loi de l’un des pays où se trouvent les contractants.

Toutefois, ces règles de forme s’effacent devant les règles impératives de la loi du pays où
l’immeuble est situé lorsque le contrat a pour objet un droit réel immobilier ou un droit
d’utilisation d’un immeuble (article 9 in fine).

Exemple : Un contrat régi par la loi française a été conclu entre un français et un italien
en Espagne. Le contrat sera valable en la forme s’il a été établi en conformité soit avec
la loi qui le régit au fond (loi française), soit avec la loi espagnole si l’on présume que
les contractants se trouvent en Espagne.

Si le contrat porte sur un immeuble situé en Espagne, il devra être établi dans les formes
du droit espagnol.

202
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

CHAPITRE II – LES DIFFICULTES PRATIQUES D’APPLICATION


DE LA CONVENTION DE ROME AUX CONTRATS DE VENTE D’IMMEUBLES
(LES ACQUISITIONS PAR LES ETRANGERS)

Parmi les nombreux contrats mettant en jeu des éléments d’extranéité que les notaires sont
appelés à recevoir, le contrat de vente occupe une place de choix.

Aussi est-il opportun d’examiner sa spécificité au regard de la convention de Rome.

SECTION I – LA LOI APPLICABLE AU CONTRAT DE VENTE

§ 1- LA LOI APPLICABLE QUANT AU FOND

Entérinant la jurisprudence antérieure, la convention de Rome soumet les contrats et par


conséquent le contrat de vente, à la loi d’autonomie. Les parties sont ainsi libres de choisir la
loi applicable au contrat de vente. Le notaire agira prudemment en mentionnant dans l’acte, la
loi choisie par les parties qui régira le contrat.

Si les parties n’ont pas désigné la loi applicable, l’article 4 alinéa 3 de la convention prévoit
que lorsque le contrat a pour objet un droit réel immobilier, celui-ci est présumé avoir les
liens les plus étroits avec la loi du pays où est situé l’immeuble.

Ainsi, en l’absence de désignation de la loi applicable à un contrat de vente portant sur un


immeuble situé en France, le contrat sera présumé relevé de la loi française.

§ 2- LA LOI APPLICABLE QUANT A LA FORME

En vertu de l’article 9 de la convention de Rome, un contrat sera valable en la forme s’il revêt
les conditions de la loi qui le régit au fond ou de la loi du lieu de sa conclusion, mais s’il porte
sur un droit réel immobilier ou un droit d’utilisation d’un immeuble, il doit respecter les
règles de formes impératives de la loi du lieu de situation de l'immeuble.

La validité d’un contrat de vente reçu dans les formes du lieu de la situation de l’immeuble ne
peut être remise en cause.

Ces règles sont applicables à tous les contrats de vente synallagmatique.

203
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

SECTION II – LE CHAMP D’APPLICATION DE LA LOI

La convention de Rome s’applique aux conditions de formation du contrat de vente (échange


et vice du consentement…) comme à ses conséquences (cf supra).

Mais elle ne s’applique pas aux questions relatives à l’état et à la capacité des personnes
(lesquelles relèvent de la loi personnelle - cf infra) qui pourraient se poser lors de l’acquisition
(mineur ou majeur incapable).

Elle ne concerne pas non plus l’objet du contrat, qu’il soit de nature mobilière ou immobilière
lequel relève de la lex rei sitae. C’est en effet la loi du lieu de situation des biens qui régira
tous les droits réels principaux (propriété, usufruit, servitude, mais aussi les droits réels
accessoires dans certaines conditions (sûretés, privilèges, hypothèques…).

Enfin, les formalités de publicité foncière relèvent elles aussi de la loi du lieu de situation de
l’immeuble.

204
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

CHAPITRE III – LES DIFFICULTES RENCONTREES


LORS DE LA REDACTION DE L’ACTE D’ACQUISITION

Lors de l’établissement de l’acte de vente, l’existence d’éléments d’extranéité comme la


nationalité étrangère des parties, la situation à l’étranger de l'immeuble vendu…, susciteront
chez le rédacteur de l’acte des interrogations.

Nous les examinerons à travers les différents paragraphes d’une formule d’acte de vente 209.
Nous serons ainsi conduit à examiner successivement les parties à l’acte, la langue utilisée
dans le contrat, le recours à l’emprunt, le prix et les garanties de paiement.

SECTION I – LES PARTIES A L’ACTE

Deux situations doivent être envisagées selon que les parties sont présentes à l’acte ou sont
représentées.

§ 1- LES PARTIES COMPARAISSENT A L’ACTE

Lorsque les parties comparaissent en personne à l’acte et que l’une d’elle ou toutes les deux
ne sont pas de nationalité française, le praticien doit s’interroger sur leur identité et leur
capacité.

A- L’identification des parties

Le notaire vérifiera l’état civil des parties à l’acte. Celui-ci précisera le nom des parties, leur
prénom et le domicile de toutes les parties et de tous les signataires. Cette obligation concerne
les personnes physiques et les personnes morales.

1- Les personnes physiques

L’identification des parties est établie au moyen d’un extrait d’acte de naissance ayant moins
de six mois de date et pour les personnes nées hors de France le certificat d’identité est établi
indifféremment (article 75 du Décret du 14 octobre 1955) :

209
Brochure Cridon-Ouest n° 57, « Les acquisitions par les étrangers »

205
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

 au vu d’un extrait de l’acte tenant lieu d’acte de naissance prévu aux articles 98 et 98-
2 du Code Civil, ayant moins de six mois de date au jour de l’acte ou de la décision
judiciaire ;

 au vu, en cas de mariage en France, d’un extrait de l’acte de mariage ayant moins de
six mois de date au jour de l’acte ou de la décision judiciaire ;

 au vu d’un des documents administratifs constatant la naturalisation ;

 au vu d’un extrait de l’acte de naissance, quelle que soit sa date.

Dans tous les cas d’impossibilité d’obtenir soit l’extrait d’acte de naissance ayant moins de
six mois de date, visé au cinquième aliéna de l'article 5 du décret du 4 janvier 1955, soit une
des pièces justificatives énoncées ci-dessus, l’identité des parties peut être établie au vu d’un
passeport, d’une carte d’identité ou d’un acte de notoriété (article 75 précité).

Pour les formalités requises sans le concours du titulaire du droit, en cas d’impossibilité
d’obtenir l’une des pièces ci-dessus prévues, le certificat d’identité peut être établi sur la foi
de renseignements d’état civil recueillis en application de l’article 50-3 du décret du 4 janvier
1955 ou, à défaut, au vu des informations figurant dans les documents déjà transcrits ou
publiés ou dans des actes ou décisions précédemment enregistrés.

Lorsqu’elle est rédigée en langue étrangère, la pièce justificative de l’identité est


accompagnée, s’il y a lieu, d’une traduction certifiée conforme par un traducteur figurant sur
une liste d’experts judiciaires.

L’acte de l’état civil peut avoir été dressé à l’étranger.

L’article 47 alinéa 1er du Code Civil précise dans ce cas que « tout acte de l’Etat civil des
français et des étrangers fait en pays étranger fait foi s’il a été rédigé dans les formes usitées
dans le pays ». Ce texte permet d’opposer en France des actes de naissance, de baptême, de
mariage, de décès, dressés par les autorités religieuses auxquelles aura été reconnu le droit de
dresser de tels actes 210.

Les actes de l’Etat civil établis à l’étranger peuvent être transcrits sur les registres du consulat
français à l’étranger à la demande des personnes concernées lorsqu’il concerne des français.
Cette transcription est possible plusieurs années après l’événement. Le double de l’acte sera
adressé au Service central de l’Etat civil du Ministère des Affaires étrangères à Nantes.

210
BATIFFOL et LAGARDE, op. cit. n° 409 et 420

206
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

En cas d’impossibilité de produire en France un acte de l’état civil étranger, l’évènement


d’état civil produit à l’étranger peut être prouvé par tous moyens, témoignages,
présomption… (article 46 du Code civil).

Exemple : Deux époux de nationalité française se sont mariés à Las Vegas en 1980.
Leur mariage n’a pas été précédé de publicité en France et n’a pas été transcrit au
consulat de France.

Quelle est la validité de ce mariage ?

Il est de jurisprudence bien établie 211 que l’inobservation des formalités de publication
du mariage en France n’est pas une cause de nullité du mariage dès lors que cette
omission n’est pas volontaire.

Par ailleurs, un mariage célébré à l’étranger est valable en France s’il a été célébré en la
forme locale étrangère.

Ce mariage célébré à Las Vegas est donc opposable en France.

L’absence de transcription sur les registres du consulat de France ne remet pas en cause
sa validité. Cette transcription peut être demandée à tout moment au consulat de France
ou au Ministère des affaires étrangères.

En ce qui concerne les réfugiés et les apatrides, lorsque ceux-ci ne possèdent pas d’acte de
l’état civil et ne peuvent pas s’en procurer auprès des autorités compétentes du pays dont ils
sont originaires, ils doivent s’adresser à l’office français des réfugiés et des apatrides (OFPRA)
qui est habilité à dresser des certificats attestant des faits d’état civil.

« Le directeur de l’office est appelé notamment à :


- certifier la situation de famille et l’état civil des intéressés tels qu’ils résultent d’actes
passés ou de faits ayant eu lieu dans le pays d’origine du réfugié ;
- attester la régularité, la valeur et la conformité avec les anciennes lois du pays d’origine,
des actes passés dans ce pays » 212.

2- Les personnes morales

En vertu de l’article 6-2 du décret du 4 janvier 1955 « l’identification des personnes morales
est établie au vu de l’original, d’une expédition ou d’une copie collationnée de tout document
constatant la dénomination, la forme juridique et le siège actuel de la personne morale.

211
Jurisprudence Sarah BERNHARD, cf note 50
212
Décret du 2 mai 1953 créant l’office

207
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Toutefois si le siège de la personne morale n’est pas en France métropolitaine ou dans les
départements d’Outre-Mer le document au vu duquel le certificat est établi doit être délivré
ou certifié par l’autorité administrative ou par un agent diplomatique ou consulaire qui
représente la République française au lieu du siège et accompagné s’il est rédigé en langue
étrangère d’une traduction en français certifiée, soit par cet agent, soit par un interprète
habituellement commis par les tribunaux ».

B- La capacité des parties

1- Les personnes physiques

L’article 1123 du Code Civil édicte que « toute personne peut contracter si elle n’en est pas
déclarée incapable par la loi ».

La capacité de vendre et d’acheter est ainsi la règle.

Néanmoins, certaines personnes peuvent être frappées d’une incapacité d’exercice qui leur
interdit d’intervenir seules à un acte de vente.

Il faudra consulter leur régime de protection pour savoir dans quelles conditions de tels actes
peuvent être accomplis (cf la protection des majeurs et des mineurs en Droit international privé – cf
supra).

En France, le dessaisissement consécutif à l’ouverture d’une procédure collective n’est pas


créatif d’une incapacité. Mais le notaire doit rechercher si son client n’est pas frappé d’une
incapacité à la suite d’une telle procédure à l’étranger où elle peut être ouverte contre des non
commerçants.

Un jugement étranger rendu par un pays ne faisant pas partie de l’Union européenne
n’emporte pas de plein droit le dessaisissement, il doit être revêtu de l’exequatur par une
juridiction française et le dessaisissement rétroagit alors au jour du prononcé du jugement
étranger.

Il en est différemment dans l’Union européenne. En effet, en ce qui concerne les procédures
entrant dans le champ d’application du règlement 213, les effets attachés au prononcé de la
décision par une juridiction de l’Union s’étendent à tous les autres Etats.

Il en résulte que le dessaisissement prononcé par une juridiction de l’Union s’étend à tous les
actifs situés dans l’un des pays membres, sans qu’il soit nécessaire d’effectuer une
quelconque publicité.

213
CE 1346/2000 du Conseil 29 mai 2000, JOECE n° L 160, 30 juin

208
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

2- Les personnes morales

a) Les sociétés

Comme une personne physique, une personne morale étrangère peut être amenée à contracter
en France ou à ester en justice.

La question se pose alors de savoir si elle a la personnalité morale et si cette personnalité sans
laquelle elle ne peut être sujet de droits et d’obligations est reconnue en France.

Les sociétés civiles suisses et allemandes par exemple n’ont pas de personnalité juridique ni
de patrimoine propre.

 La reconnaissance en France de la personnalité juridique des sociétés


étrangères

La personnalité juridique des sociétés étrangères a toujours été reconnue en France, au moins
en ce qui concerne les sociétés de personnes 214.

Il en est différemment pour les sociétés de capitaux pour lesquelles la reconnaissance de plein
droit a été exclue par la loi du 30 mai 1857.

Il résulte de ce texte que les sociétés de capitaux étrangères n’ont pas de plein droit la
personnalité juridique en France. Elles doivent à cet effet, bénéficier d’un décret pris en
application de l’article 2 de la loi précitée.

Mais ceux-ci ont généralement été pris à la suite de la loi de 1857 et par ailleurs, les pays qui
n’en bénéficient pas peuvent invoquer des traités de commerce ou des conventions
d’établissement leur conférant les mêmes avantages et demander l’application de la clause de
la nation la plus favorisée.

Enfin, de nombreux traités bilatéraux et multilatéraux ont été signés qui sont venus
considérablement atténuer la rigueur de la loi du 30 mai 1857.

En toute hypothèse, le problème de la reconnaissance en France des sociétés étrangères ne se


pose plus que pour les sociétés constituées en dehors de la communauté européenne.

214
Cf BATIFFOL et LAGARDE, op. cit. t II n° 200

209
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

 Les incidences pratiques

Exemple : Une société anonyme dont le siège social est en Allemagne se propose
d’acquérir un immeuble en France. Quelles précautions doit prendre le notaire français
qui recevra l’acte de vente ?

La société ayant son siège social en Allemagne est donc de nationalité allemande. En
effet, en droit international privé, la nationalité d’une société est déterminée par son
siège social.

Se pose ensuite la question de sa capacité pour acquérir. La France ayant signé avec
l’Allemagne, membre de surcroît de l’Union européenne, un traité portant
reconnaissance des sociétés constituées dans chacun de ces pays, la personnalité
juridique de la société allemande est reconnue en France.

Reste à s’interroger sur les précautions que doit prendre un notaire français lorsqu’il
reçoit un acte pour le compte d’une société étrangère.

Il doit tout d’abord s’assurer que la société a été régulièrement constituée au lieu de son
siège. A cet effet, il se fera remettre une copie des statuts de la société traduits si
nécessaire et légalisée s’ils ont été reçus en la forme authentique et un extrait de son
inscription au registre du commerce si sa législation le prévoit (une copie des statuts n’est
pas toujours nécessaire, notamment si la loi qui régit la société reconnaît au détenteur de la
signature sociale le droit d’engager la société et dès lors que celui-ci signe au nom de la société).
Il devra en outre se faire remettre une attestation par un juriste de droit local certifiant
que l’acte envisagé entre dans l’objet de la société, que son mandataire a le pouvoir de
la représenter et que s’il venait à dépasser les pouvoirs qui lui ont été conférés, la
société se trouverait néanmoins engagée.

Ces attestations seront délivrées par un juriste de droit local.

Ces exigences étant satisfaites, le notaire français pourra recevoir l’acte de vente au
profit de la société allemande.

b) Les associations et les fondations

La personnalité juridique des fondations et des associations étrangères est reconnue en France
dés lors qu’elles auront été régulièrement constituées au regard de leur loi nationale. Mais
celles-ci ne peuvent accomplir en France sans autorisation particulière, que des actes isolés
selon la capacité qu’il leur est reconnue par la loi qui les régit (toutefois cette règle n’est plus
guère observée d’autant qu’elle est contraire aux principes communautaires). Elles pourront recevoir
des dons et legs mais elles doivent y être autorisées par décret conformément aux dispositions

210
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

de l’article 910 du Code Civil. Cette disposition qui a pour but de contrôler les activités des
personnes morales est une loi de police immédiatement applicable sur le territoire national à
toutes les personnes (Etat, étrangers, associations, fondations, collectivités locales…).

§ 2- LES PARTIES SONT REPRESENTEES A LA SIGNATURE DE L’ACTE

Les contrats conclus en France par des étrangers ou par des français à l’étranger sont souvent
reçus hors de leur présence. Éloignées du lieu de signature de l’acte, les parties se feront
représenter par un mandataire. Les notaires sont ainsi amenés à recevoir des procurations
destinées à être utilisées à l’étranger ou en provenance de l’étranger et destinées à être
utilisées en France.

Le mandat en droit international privé obéit à des règles spécifiques et son efficacité est
subordonnée à une procédure particulière, la légalisation.

A- Le régime des procurations en droit international privé

Comme tout contrat, le mandat relève de la loi d’autonomie de la loi choisie par les parties (cf
convention de Rome supra). En l’absence de choix, les auteurs font application de la loi de
l’opération principale, ce qui a le mérite de soumettre toute la convention à une même loi.

La forme du mandat est source de difficulté, en particulier lorsque la loi qui régit le contrat
principal exige que celui-ci soit reçu en la forme authentique à peine d’inefficacité de l’acte.

Si l’on qualifie l’exigence d’authenticité de question de forme, c’est la loi du lieu où l’acte est
reçu qui sera applicable et si celle-ci autorise la forme sous seing privé, l’acte reçu en France
avec une procuration sous seing privé sera valable. Si, en revanche, l’on fait de l’exigence de
l’authenticité une question de fond, c’est la loi de l’opération principale, la loi du contrat, qui
trouve à s’appliquer et si celle-ci exige l’authenticité, la procuration devra revêtir la forme
authentique (exemple : VEFA, donation partage).

La loi française fait application du parallélisme des formes et exige que le mandat revête la
forme du contrat principal. C’est ainsi qu’une donation consentie en France par un anglais
portant sur un immeuble situé dans ce pays devra revêtir la forme authentique.

Cette exigence du droit français qui impose que « l’instrumentum » de la procuration revête la
forme authentique de l’opération principale n’est pas sans incidence dans la pratique notariale,
spécialement lorsque la procuration donnée à l’étranger est destinée à être utilisée en France.
Mais il conviendra également de s’interroger sur la forme des procurations reçues en France
et destinées à être produites à l’étranger.

211
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

1- Procuration donnée à l’étranger et destinée à être utilisée en France

Deux situations peuvent se présenter :

- Le pays étranger connaît l’authenticité du droit français, ce qui est le cas de tous les pays
de notariat latin. Dans cette hypothèse, la procuration peut être établie devant un notaire
local.

Celle-ci ne peut plus être établie depuis le 1er janvier 2005 devant un agent diplomatique
ou consulaire de la France situé sur le territoire des Etats membres de l’Union européenne,
sur le territoire des autres Etats membre de l’Espace Économique Européen (Islande,
Lichtenstein, Norvège), en Andorre, Monaco et au Vatican, leurs attributions notariales
leur ayant été retirées 215.

En revanche, les consuls et agents diplomatiques français exerçant leur activité sur le
territoire des autres Etats (hors Union européenne), sont compétents pour recevoir des
procurations, ceux-ci ayant conservé leurs attributions notariales.

- Le pays étranger ne connaît pas l’authenticité du droit français. La procuration peut être
donnée par un agent diplomatique ou consulaire français en poste à l’étranger dès lors
qu’il ne se trouve pas sur le territoire d’un Etat membre de l’Union européenne ou de
l’Espace Économique Européen en Andorre, à Monaco ou au Vatican.

Si l’on ne peut établir la procuration devant le consul de France et si la procuration


authentique doit être donnée dans un pays ignorant l’authenticité au sens français du terme
(pays de Common Law), on se contentera de l’authenticité locale par application de la règle
locus regit actum.

C’est ainsi que peut être valablement utilisée une procuration en provenance des USA dès lors
que cette procuration aura été établie en présence d’un notary public et d’un lawyer et revêtue
de l’apostille.

Aux USA, le notary public peut seulement attester de la sincérité des signatures portées sur
les actes qui lui sont présentés. Il ne peut leur conférer l’authenticité.

L’assistance d’un lawyer, homme de loi comme son nom l’indique, est seul en mesure de
conférer à l’acte « l’authenticité locale ».

En Grande Bretagne, en revanche, une procuration authentique peut être délivrée par un
« notary public » ou à Londres par un « scrivener notary » car leur statut est différent de celui
215
Arrêté du 6 décembre 2004, JO 8 décembre 2004, p. 21535 ; « La suppression des activités notariales des
Consuls en Europe » par D. BOULANGER, JCP N 1442, p. 1797

212
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

du notary public américain. Sa fonction essentielle en tant que notary public est de conférer
l’authenticité aux actes destinés à être utilisés à l’étranger 216.

Exemple 1 : Procuration donnée en Grande Bretagne pour consentir une donation


partage en France

L’authenticité est requise pour cette procuration. Le donataire étant par hypothèse
domicilié à Londres devra se rendre chez un notary public. La procuration devra être
légalisée (cf infra) sous la forme de l’apostille.

Exemple 2 : Procuration donnée aux USA par un français pour constituer une
hypothèque en France

Le notaire français auquel est adressé la procuration peut se contenter d’utiliser un acte
revêtu seulement de l’authenticité locale, c’est à dire d’un acte établi par un lawyer
certifié par un notary public et revêtu de l’apostille (cf infra). La procuration pourrait
également être établie devant le consul de France.

Certains contestent aux actes délivrés par des juristes étrangers, non délégataires de la
puissance publique, leur caractère authentique. Ainsi n’auraient pas cette qualité les actes
reçus en Eire, en Grande Bretagne, en Suède, au Danemark, en Norvège et en Finlande par un
notary public ou notarius publicus.

Si cette position devait être retenue, elle serait contraire à une pratique ancienne qui n’a
jamais été contestée et interdirait tout commerce juridique avec des personnes ne pouvant se
déplacer en France.

2- Procuration donnée en France destinée à être utilisée à l’étranger

Les notaires français sont aujourd’hui de plus en plus sollicités pour recevoir des procurations
destinées à être utilisées à l’étranger.

Si celles-ci ne doivent pas toujours revêtir la forme authentique, il est bon néanmoins de s’en
assurer auprès des autorités locales.

Exemple : Un français qui vend son immeuble situé en Espagne et qui ne peut se
déplacer pour la signature de l’acte adressera au notaire espagnol une procuration reçue
devant un notaire français et légalisée sous la forme de l’apostille, la législation
espagnole exigeant une procuration authentique lorsqu’elle concerne un immeuble.

216
RM VALLEIX, JO 18 décembre 1989, p. 5586 qui déclare que « le notary public du Royaume-Uni peut être
assimilé mutatis mutandis à un officier public »

213
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

N.B. : Certains pays de l’Union européenne (Allemagne, France, Belgique, Italie, Pays-Bas,
Luxembourg) ont élaboré des procurations. Il n’en existe pas pour l’Espagne, la Grande
Bretagne et le Portugal. Des procurations concernant d’autres pays (Grande Bretagne
notamment) sont proposées par l’UINL et Intranot (www.intranot.fr).

Les procurations élaborées par certains pays de l’Union sont au nombre de cinq (elles sont à la
disposition des notaires dans les Cridon) :

 procuration bancaire
 procuration pour succession
 procuration pour emprunt
 procuration pour vente d’immeuble
 procuration générale

B- La légalisation

La légalisation est l’attestation par un fonctionnaire de l’exactitude de la signature apposée sur


un acte et s’il s’agit d’un acte public de la qualité de ceux qui l’ont reçu ou expédié 217.

C’est une mesure administrative qui a pour objet, en facilitant au plan international la preuve
de l’authenticité des actes ou documents établis conformément aux règles de droit interne, de
favoriser leur production et leur admission à l’étranger 218.

N’étant qu’une simple mesure administrative, son absence ne nuit ni à la validité en la forme
et au fond ni à l’authenticité de l’acte 219. Mais l’absence de légalisation permet à la partie
contre laquelle l’exécution est poursuivie de faire suspendre l’exécution de l’acte non
légalisé 220. C’est un élément de vérification de la sincérité de l’authenticité d’un acte.

D’autre part, pour être valable, la légalisation doit émaner des fonctionnaires qui ont reçu
pouvoir à cet effet de la loi française ou des traités 221 ; la légalisation irrégulière produit les
mêmes effets que l’absence de légalisation 222.

Un acte public en provenance de l’étranger ne peut être publié s’il n’a pas été légalisé 223.

Enfin, seuls les actes sous seing privé revêtus de mentions officielles (comme notamment celles
relatives à l’enregistrement ou visa pour date certaine, ou à la certification de signatures effectuée par

217
Circulaire du 2 janvier 1976, Def. 1976, art. 3114 ; Circulaire du 30 novembre 1978, Def. 1979, art. 31960
218
Circulaire du 30 novembre 1978 précité
219
Cass. Civ. 1ère, 9 novembre 1971 et CA Reims 29 janvier 1974, Rev. crit. DIP 1974, 666, note P. DRAKIDIS
220
Cass. req. 8 novembre 1853, DP 1854, 1, 420
221
Cass. req. 1er août 1987, DP 88-2-379
222
Traité général du notariat, v° Légalisation
223
B.A.M.C. 1966, art. 645

214
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

des notaires, des maires, des commissaires de police, sur des actes sous seing privé) qui de ce fait
sont assimilés à des actes publics, peuvent être légalisés.

La procédure de légalisation des actes en provenance de l’étranger ou à destination de


l’étranger a été considérablement allégée et des conventions internationales sont venues soit
instaurer un régime plus souple, soit dispenser de légalisation.

On opère traditionnellement une distinction entre les actes reçus en France et destinés à être
produits à l’étranger et les actes reçus à l’étranger et destinés à être utilisés en France.

1- Actes reçus en France et destinés à être utilisés à l’étranger

 Régime de droit commun

Les actes publics et actes assimilés sont soumis à la procédure de légalisation sur visa de
conformité délivré par le Ministère des Affaires Étrangères, 34 rue la Pérouse, 75775 Paris
cedex 16.

Pour être admis en visa du Ministre des Affaires Étrangères, ces documents doivent
s’accompagner :

 de la signature manuscrite de l’autorité administrative signataire, à l’exception de sa


griffe ;

 de la mention du nom et de la qualité de l’autorité signataire ;

 du sceau, du cachet, du timbre du service dont relève l’autorité signataire.

En ce qui concerne les actes sous seing privé, les autorités autorisées à certifier la signatures
sont, en France, les mairies, les commissaires de police, les notaires et la chambre de
commerce.

Les signataires doivent faire légaliser ou certifier leur signature auprès des autorités indiquées
ci-dessus, qui apposeront la mention suivante : « vu pour légalisation de la signature de
Monsieur X ». L’autorité doit alors apposer en original le sceau du service dont elle relève et
s’il s’agit d’un notaire de son sceau, sa signature manuscrite suivie de ses nom et qualité 224

Un acte français destiné à être utilisé à l’étranger peut être légalisé par les agents
diplomatiques ou consulaires français en poste dans le pays étranger où l’acte doit être
produit.

224
Dictionnaire Permanent de droit des étrangers, v° Légalisation d’actes, n° 8

215
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

 Régime conventionnel

La France a signé avec de nombreux pays des conventions bilatérales qui dispensent
totalement de légalisation les actes établis dans l’un des Etats signataires qui doivent être
produits dans l’autre état signataire (Allemagne, Italie… - cf tableau infra).

D’autre part une convention a été adoptée à Bruxelles le 25 mai 1987 concernant la
surpression de la légalisation des actes dans les Etats membres de la communauté européenne.
Cette convention est entrée en vigueur en France, au Danemark, en Italie, en Belgique et en
Irlande.

Enfin la convention de la Haye du 5 octobre 1961 a supprimé l’exigence de la légalisation des


actes publics établis sur le territoire d’un Etat contractant et qui doivent être utilisés sur le
territoire d’un autre pays contractant.

Sont considérés comme des actes publics :

 les documents qui émanent d’une autorité ou d’un fonctionnaire relevant d’une
juridiction de l’Etat y compris ceux qui émanent du ministère public, d’un greffier
d’un huissier de justice ;
 les documents administratifs ;
 les actes notariés ;
 les déclarations officielles telles que mentions d’enregistrement, visa pour date
certaine et certification des signatures apposées sur l’acte sous seing privé.

A la légalisation sur visa de conformité, la convention de la Haye précitée a substitué la


formalité de l’apostille, délivrée par l’autorité compétente du pays d’où émane le
document 225.

Exemple : Procuration pour vendre un immeuble en Espagne établie en France.

La procuration devra obligatoirement revêtir la forme authentique, l’Espagne exigeant


l’authenticité des actes concernant les immeubles situés sur son territoire. Elle devra en
outre être traduite et légalisée sous la forme de l’apostille délivrée par le procureur
général près de la Cour d’appel.

225
En France : le Procureur Général près la Cour d’appel, à l’étranger : cf Juris-Classeur Not. Form.,
v° Légalisation, Fasc. 15, p. 12 et s. ; cf infra annexes

216
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

2- Actes dressés à l’étranger et destinés à être utilisés en France

 Régime de droit commun

Les actes passés à l’étranger et destinés à être utilisés en France doivent être légalisés par le
consul de France dans la circonscription duquel ils ont été reçus ou expédiés.

N.B. : Les actes passés à l’étranger peuvent être légalisés en France par le consul de l’Etat sur
le territoire duquel l’acte a été établi et qui exerce sa fonction en France, lorsqu’il s’agit
d’Etats qui accordent à la France la réciprocité, notamment en vertu de conventions
consulaires.

 Régime conventionnel

Comme pour les actes reçus en France et destinés à être produits à l’étranger, tantôt il y aura
dispense de légalisation, tantôt l’acte sera soumis à la formalité de l’apostille.

Exemple : Procuration établie en Allemagne pour recevoir un acte de donation partage


en France.

La procuration établie devant un notaire allemand aura l’authenticité du droit français.


Pour être utilisée en France, elle devra s’accompagner d’une traduction mais n’est pas
soumise à légalisation (convention franco allemande du 13 septembre 1971 dispensant de
légalisation).

Exemple : Procuration établie en Grande Bretagne pour recevoir un acte de donation


partage en France.

La procuration devra être établie devant un notary public traduite et revêtue de


l’apostille délivrée par le Foreign Office.

N.B. : Les actes reçus ou légalisés par les consuls étrangers à l’étranger sont considérés
comme des actes passés à l’étranger, mais la convention de Londres du 7 juin 1968 226 a
supprimé la légalisation des actes dressés par les agents diplomatiques ou consulaires des
pays signataires dans certaines conditions 227 (Chypre, Grande Bretagne, Pays Bas, Suisse,
Autriche, Allemagne, France, Grèce, Italie, Liechtenstein, Luxembourg, Norvège, Portugal, Espagne
et Suède).

226
Conv. de Londres du 7 juin 1968 ; Décret 23 octobre 1970, Rev. crit. DIP 71, p. 124
227
Cf E.D. de DI, v° Légalisation

217
CRIDON-OUEST
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SECTION II – LA LANGUE UTILISEE DANS LES ACTES JURIDIQUES

Il convient d’opérer une distinction selon que l’acte revêt la forme authentique ou la forme
sous seing privé.

§ 1- L’ACTE REVET LA FORME SOUS SEING PRIVE

Il pourra s’agir d’un compromis, d’une procuration pour vendre… Les parties peuvent établir
leur acte dans la langue de leur choix. Le recours à la langue française n’est pas exigé.
Généralement les actes sous seing privé intéressant des étrangers seront rédigés en deux
langues sur la même feuille.

Si l’acte est reçu dans une langue que l’autre partie ne connaît pas, la présence d’un interprète
est nécessaire. Celui-ci doit être choisi par les parties d’un commun accord ; sa présence pour
assurer la traduction orale simultanée est mentionnée dans l’acte. Une traduction écrite jointe
à l’acte n’est pas nécessaire.

§ 2- L’ACTE REVET LA FORME AUTHENTIQUE

Conformément à la tradition de l’ancien droit, les actes notariés doivent être obligatoirement
rédigés en langue française 228. Sa violation n’entraîne pas néanmoins la nullité de l’acte mais
le disqualifie en acte sous seing privé.

Il n’y a d’exception à la règle que pour les actes reçus en Alsace Moselle qui peuvent être
dressés en langue allemande si les parties le requièrent expressément et déclarent ignorer le
français (article 2 de l’arrêté du 2 février 1919).

Lorsque l’une des parties ne parle pas le français, sa volonté manifestée dans sa langue
nationale doit être traduite et exprimée en français dans l’acte.

Deux situations peuvent se présenter :

→ Le notaire comprend la langue étrangère de l’une des parties qui ne parle pas
le français

Le notaire fait connaître les volontés de celle-ci aux autres intéressés par une traduction orale.
L’acte est ensuite rédigé en français. Une traduction peut accompagner l’acte, mais celle-ci est

228
RM JO 2 janvier 1980, JOAN 3 juillet 1989, p. 3079

218
CRIDON-OUEST
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facultative. Le notaire mentionnera dans le corps de l’acte qu’il a effectué la traduction orale
de l’acte.

→ Le notaire ne connaît pas la langue étrangère des parties qui ne parlent pas le
français.

En pareille hypothèse, le notaire doit, à peine de nullité de l’acte, se faire assister d’un
interprète choisi par les parties ou à défaut d’accord entre elles, par le Président du TGI.

Les auteurs estiment qu’il doit être pourvu des qualités exigées des témoins
instrumentaires 229.

L’interprète joue un rôle identique à celui du notaire qui connaît la langue étrangère de la
partie qui ne parle pas le français ; il traduit et exprime aux parties et au notaire les volontés
de celle(s) des parties qui ne comprennent pas le français.

Le notaire rédige ensuite l’acte en français. Une traduction peut être annexée à l’acte mais elle
n’est pas obligatoire.

Les parties choisissent librement le moyen de communiquer entre elles. Le recours à un


interprète traducteur juré près le tribunal n’est pas obligatoire et est tout à fait exceptionnel (la
liste des traducteurs judiciaires peut être consultée au greffe de la Cour d’appel). Si l’interprète n’a
pas prêté serment en justice, il a néanmoins la confiance des parties 230.

En définitive, un notaire peut se faire assister par toute personne connaissant la langue
étrangère de l’une des parties à l’acte, ignorée de lui même et des autres parties. Toutefois,
pour parer à d’éventuelles difficultés on insèrera dans l’acte la formule suivante :

« Après avoir été lu en français par le notaire aux parties et à M. A., interprète, choisi d’un
commun accord par celles-ci, le présent acte a été traduit oralement (en langue étrangère) à
MM XY. (comparants ne comprenant pas le français) qui ont déclaré l’approuver comme étant
l’expression de leur volonté. Ces différentes lectures achevées les parties ont signé le présent
acte avec l’interprète et le notaire »(Testament d’un étranger ne parlant pas le français, cf supra).

229
AUBRY et RAU, T XII, § 755, p. 133, note 27
230
Cf Juris-Classeur Not. Form., v° Acte notarié, Fasc. 32, n° 35

219
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SECTION III – LE RECOURS A L’EMPRUNT

Les étrangers qui réalisent des opérations immobilières en France recourent fréquemment à
l’emprunt et il n’est plus rare de voir des ressortissants français qui souscrivent des emprunts
à l’étranger en raison des taux d’intérêts pratiqués. Le notaire français est ainsi de plus en plus
souvent appelé à recevoir des actes de prêts pour des ressortissants étrangers ou pour des
ressortissants français recourant à un emprunt à l’étranger.

Le prêt, comme tout contrat, relève de la convention de Rome du 19 juin 1980 (cf supra).
Celle-ci prévoit dans son article 5 que « le choix par les parties de la loi applicable ne peut
avoir pour effet de priver le consommateur de la protection que lui assurent les dispositions
impératives de la loi du pays dans lequel il a sa résidence habituelle ».

Si par conséquent la convention de Rome va trouver à s’appliquer au contrat de prêt, elle va


se heurter néanmoins aux dispositions impératives des lois protectrices du consommateur.

§ 1- LA LOI APPLICABLE AU CONTRAT DE PRET

Le contrat de prêt relevant de la convention de Rome est soumis à la loi d’autonomie, à la loi
choisie par les parties.

Ce choix sera exprimé dans l’acte, le plus souvent la loi applicable choisie sera celle du
prêteur.

Si les parties au contrat n’ont pas désigné la loi applicable au contrat de prêt ou si celle-ci ne
résulte pas « des dispositions du contrat ou des circonstances de la cause » (article 3 alinéa 1er
de la convention), le contrat sera présumé « régi par la loi du pays avec lequel il présente les
liens les plus étroits ». Et l’on présume que « le contrat présente les liens les plus étroits avec
le pays où la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a, au moment de la
conclusion du contrat, sa résidence habituelle… » (article 4 § 2 de la convention) et la partie qui
doit fournir la prestation essentielle dans le contrat de prêt est le prêteur. Le prêt sera ainsi
soumis le plus souvent à la loi de la banque.

§ 2- L’APPLICATION DES ARTICLES L 312-1 ET S. DU CODE DE LA CONSOMMATION (ex : Loi


Scrivener du 13 juillet 1979)

La convention de Rome ayant expressément prévu que la loi choisie par les parties ne saurait
faire échec aux dispositions des lois protectrices du consommateur, la question de
l’application des articles L 312-1 et s. du Code de la Consommation allait inévitablement se

220
CRIDON-OUEST
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poser 231 et nul n’ignore aujourd’hui le formalisme de ces dispositions qui va jusqu’à imposer
à l’acquéreur immobilier qui ne recourt pas à un emprunt, d’apposer dans l’acte d’acquisition
une mention manuscrite.

Deux situations peuvent donc se rencontrer :

 L’acquéreur recourt à un prêt

Les articles L 312-1 et s. du Code de la Consommation peuvent s’appliquer à un double titre :

- au titre de la loi du contrat : si les parties soumettent le contrat à la loi française, les
articles L 312-1 et s. du Code de la Consommation d’ordre public, s’appliquent au contrat
de prêt.

- au titre de loi de police. En effet les articles L 312-1 et s. du Code de la Consommation


sont des dispositions de police destinées à protéger l’emprunteur immobilier et qui doivent
être respectées dès lors que les opérations de prêt en matière immobilière sont liées à
l’ordre économique français 232.

Mais dans ce dernier cas, encore faut-il que l’immeuble soit situé en France (condition requise
pour l’application des articles précités) que le prêteur ou l’emprunteur aient leur résidence en
France 233, le prêteur parce qu’il est soumis de par sa profession aux règles françaises et
l’emprunteur parce qu’il peut se prévaloir des lois de protection dans le pays de sa résidence,
pour acquérir un immeuble en France.

Exemple : Prêt souscrit en grande Bretagne, le prêteur comme l’emprunteur résident à


l’étranger. Bien que l’immeuble soit situé en France, les articles L 312-1 et s. du Code
de la Consommation sont inapplicables, le prêt relève de la loi étrangère.

Exemple : Prêt en Grande Bretagne pour acquérir un immeuble en France consenti à un


français résidant en France. L’immeuble est situé en France et l’emprunteur réside en
France : les articles L 312-1 et s. du Code de la Consommation sont applicables.

Exemple : Prêt souscrit en France par des anglais pour acquérir un immeuble en France.
L’emprunteur est domicilié en Grande Bretagne. Les articles L 312-1 et s. du Code de la
Consommation s’appliqueront si le contrat de prêt est soumis à la loi française, mais
également parce que les articles L 312-1 et s. du Code de la Consommation sont des
textes de police contractuelle.

231
P. PELLETIER, Proposition pour l’application dans l’espace de la loi du 13 juillet 1979 relative à l’information
et à la protection de l’emprunteur dans le domaine immobilier, Rev. crit. DIP 1981, p. 247 et s.
232
RM RICHOMME JOAN 2 février 1981, p. 489 ; RM BIERNE JOAN 9 mars 1981, p. 1031
233
Cf P. PELLETIER précité

221
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Exemple : Prêt en France pour acquérir un immeuble à l’étranger. Le contrat de prêt


sera soumis à la loi française, les articles L 312-1 et s. du Code de la Consommation
trouveront à s’appliquer bien que l’immeuble ne soit pas situé en France.

 L’acquéreur ne recourt pas à un prêt

Lorsque l’acquéreur emprunteur ne recourt pas à un prêt, il doit, aux termes de l'article 312-17
du Code de la Consommation, apposer une mention manuscrite dans l’acte indiquant qu’il
n’entend pas recourir à un prêt et que s’il venait à en solliciter un, il ne pourrait se prévaloir
des dispositions protectrices de la loi.

Cette mention de l'article L 312-17 du Code de la Consommation qui est d’ordre public doit
être portée systématiquement dans l’acte, quel que soit le pays de la résidence habituelle ou de
la nationalité de l’acquéreur non emprunteur dès lors que l’immeuble objet de l’avant contrat
est situé en France 234.

Comment dès lors faire apposer une telle mention à un étranger qui ne pratique pas la langue
française.

Deux solutions ont été proposées :

- L’insertion de la mention manuscrite dans l’acte en langue étrangère en le faisant suivre


d’une traduction (cette façon de faire est la plus usitée).

- La réception de l’acte par un second notaire ou sa signature par deux témoins. Mais on a
fait remarquer que cette référence à l’article 9-3° de la loi du 25 ventôse est critiquable car
elle repose sur une interprétation extensive du texte puisqu’il ne vise que les personnes ne
sachant pas signer 235.

§ 3- LA LOI SOLIDARITE ET RENOUVELLEMENT URBAIN (SRU) 236

L’article L 271-1 du Code de la construction et de l'habitation issu de la loi sur la Solidarité et


le Renouvellement Urbain offre un délai de rétractation voire de réflexion à l’acquéreur d’un
immeuble à usage d’habitation.

234
Cf P. PELLETIER précité
235
Cf P. PELLETIER précité
236
D. BOULANGER « L’application dans l’espace de l’article L 271-1 du Code de la construction et de
l'habitation » JCP N 2001, n° 1696

222
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La question s’est posée de savoir si l’acquéreur français ou étranger non résident d’un
immeuble à usage d’habitation situé en France pouvait se prévaloir des dispositions de
l’article L 271-1 du Code de la construction et de l'habitation et réciproquement, si
l’acquéreur d’un immeuble situé à l’étranger pouvait invoquer cette disposition de la loi
française.

Deux situations sont à envisager :

A- L’immeuble est situé en France

Dans ce cas, l’article L 271-1 du Code de la construction et de l'habitation peut s’appliquer à


un double titre :

- en tant que loi de police, loi d’application immédiate, dont l’observation est nécessaire
pour la sauvegarde de l’organisation politique, sociale ou économique du pays car elle a
pour but de protéger l’acquéreur immobilier non professionnel.

- en tant que loi applicable au contrat.

En vertu de la convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations
contractuelles, les contrats, et par conséquent le contrat de vente, sont soumis à la loi
d’autonomie.

Si les parties n’ont pas désigné la loi applicable, le contrat portant sur un immeuble est
présumé soumis à la loi du lieu de sa situation (cf supra), soit à la loi française.

Le délai de réflexion et de rétractation n’étant que l’un des aspects de la loi applicable au
contrat, l’article 271-1 du Code de la construction et de l'habitation est applicable.

N.B. : L’article 271-1 du Code de la construction et de l'habitation prévoyant que l’acte sous
seing privé peut être « notifié à l’acquéreur par lettre recommandée avec accusé de réception
ou par tout autre moyen présentant des garanties équivalentes pour la détermination de la
date de réception ou de remise » n’importe quelle forme de notification peut être retenue dès
lors qu’elle permettra de s’assurer de la réception par le destinataire237.

B- L’immeuble est situé à l’étranger

Dans cette situation, la loi applicable au contrat sera en principe la loi étrangère, la loi
française sera exclue en tant que loi du contrat ou loi de police. La loi SRU sera inapplicable ;

237
Contra : G. KAIRALLAH, consultation Cridon Paris, n° 597, 961, p. 2

223
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Dans l’hypothèse néanmoins où le contrat de vente serait conclu entre français en France et
porterait sur un immeuble situé à l’étranger, l’acquéreur pourra se prévaloir des dispositions
de l’article L 271-1 du Code de la construction et de l'habitation.

Mais l’hypothèse ne se rencontrera pas souvent car ne serait ce que pour des raisons fiscales,
il est déconseillé généralement à un notaire français de recevoir un acte portant sur un
immeuble situé à l’étranger.

SECTION IV – LE PRIX ET LES GARANTIES DE PAIEMENT

§ 1- LE PAIEMENT DU PRIX

Le paiement du prix (ses modalités de versement, la date et le lieu du paiement, …) relève de la loi
du contrat choisie par les parties.

Sur le plan pratique, la question qui se pose relativement au paiement du prix est de savoir s’il
est possible dans un acte notarié de libeller le prix en monnaie étrangère ou d’indexer le prix
de vente sur une monnaie étrangère, en stipulant que le prix sera payé sur la base de la
cotation de l’euro par rapport à la monnaie étrangère.

La jurisprudence tient pour licite les obligations libellées en francs français (aujourd’hui en
euros) dont le cours est indexé sur une monnaie étrangère, non comme instrument de paiement
mais comme monnaie de compte 238.

La monnaie peut se présenter en effet tantôt comme un instrument de mesure de l’obligation,


tantôt comme un moyen de paiement.

La jurisprudence ne prohibe que le choix d’une monnaie étrangère (la livre, le franc suisse)
comme instrument de libération de l’obligation, comme moyen de paiement.

Aussi est-il possible dans un acte de vente, de libeller le prix en dollars, la monnaie
américaine ne pouvant être utilisée que comme monnaie de compte et non servir au paiement
du prix (en règle générale dans cette situation, l’on prévoit une garantie de change).

238
Cass. Civ. 4 février 1969, Bull. Civ. 1, n° 61, p. 46, RTD Civ., 1969, 767, note LOUSSOUARN, Cass. Civ. 12
janvier 1988, Def. 89, art. 34425, note MALAURIE

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§ 2- LES GARANTIES DE PAIEMENT

A- Le privilège de prêteur de deniers

Le privilège de prêteur de deniers est une institution qui n’appartient qu’au droit français. Il
est inconnu des autres législations à l’exception du droit belge, luxembourgeois ou
monégasque qui ne l’utilise pas. La question qui se pose en pratique est de savoir lorsque le
contrat de prêt relève d’une loi étrangère si le prêteur peut bénéficier du privilège de prêteur
de deniers lorsque l’acquisition porte sur un immeuble situé en France.

La doctrine moderne, se fondant sur les caractéristiques du privilège, estime que les privilèges
en général et par conséquent le privilège de prêteur de deniers, ne peut exister en Droit
international privé que s’il est institué par la loi de la situation du bien grevé et par la loi
applicable à la créance (la loi du contrat le plus souvent) 239, que s’il y a une application
cumulative de la loi de la créance et de la lex rei sitae. Le privilège résulte d’une loi et si
celle-ci l’ignore, le privilège ne peut dégénérer en hypothèque.

Ce n’est par conséquent que si un établissement bancaire étranger accepte de soumettre le


contenu du prêt sollicité à la loi française que celui-ci pourra bénéficier du privilège de
prêteur de deniers. Mais les dispositions du Code de la Consommation deviennent alors
applicables, même si l’emprunteur ne réside pas en France.

B- L’acte constitutif d’hypothèque

Les prêts sollicités par des acquéreurs étrangers en France ou à l’étranger sont souvent
garantis par des hypothèques consenties sur des biens situés en France.

Ces constitutions d’hypothèques ne sont efficaces en France que si elles sont reçues par un
notaire français. L’article 2128 du Code Civil dispose en effet que « les contrats passés en
pays étranger ne peuvent donner hypothèque sur les biens situés en France s’il n’y a pas de
dispositions contraires à ce principe dans les lois politiques ou les traités ».

En vertu de ce texte, une hypothèque ne peut être valablement constituée sur un immeuble
situé en France par un acte notarié étranger.

L’article 2128 du Code Civil paraît ainsi en contradiction avec l’article 4 du décret du 4
janvier 1955 qui prévoit et réglemente la publicité au bureau des hypothèques des actes reçus
par des officiers publics étrangers : légalisation, traduction, exequatur, dépôt au rang des
minutes d’un notaire français, mentions devant figurer dans l’acte.

239
Cf E.D. DI, v° Monnaie, n° 90 et s.

225
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Les auteurs qui se sont efforcés de concilier ces deux textes font valoir que cette publicité
peut concerner une vente ou même une hypothèque reçue dans un pays ayant conclu avec la
France un traité dérogeant à l’article 2128 du Code Civil 240.

Confronté à cette difficulté, le Bulletin de l’Association des Conservateurs conseille à ces


derniers de ne pas refuser la publication d’un acte constitutif d’hypothèque passé à l’étranger
dès lors que cet acte est traduit, légalisé, déposé au rang des minutes d’un notaire français ou
rendu exécutoire en France 241.

Néanmoins, les auteurs qui s’accordent aujourd’hui à considérer que l’article 2128 du Code
Civil trouve toujours à s’appliquer considérant qu’il a été introduit dans le Code Civil à la
suite d’une confusion, estiment que son champ d’application doit être limité aux hypothèques
conventionnelles immobilières (elle ne s’appliquent pas aux hypothèques mobilières sur les navires,
bateaux et aéronefs), qu’il ne vise que la constitution d’hypothèques et ne saurait concerner le
mandat de constituer une hypothèque. Une procuration donnée à l’étranger en la forme
authentique locale pour constituer une hypothèque en France peut être valablement utilisée en
France.

En revanche, on ne peut prendre, par acte sous seing privé dressé à l’étranger, une hypothèque
sur un bien situé en France, même si l’acte est ensuite déposé au rang des minutes d’un
notaire français. Les auteurs font en effet remarquer que la règle de l’article 2128 du Code
Civil n’est pas une règle de conflit donnant compétence à la loi française. C’est une règle
matérielle de droit international qui refuse l’efficacité à des contrats passés en pays
étrangers 242.

Le champ d’application de l’article 2128 du Code Civil se trouve ainsi limité.

L’application de cet article est même écartée lorsque des conventions admettent la validité de
la constitution d’hypothèque à l’étranger sous réserve d’être revêtue de l’exequatur (Belgique,
Maroc, Italie, Monaco) 243.

C- Le cautionnement

L’engagement pris par la caution de s’exécuter à la place du débiteur principal est à la fois
autonome et accessoire à l’obligation principale. Il dépend étroitement du contrat principal
conclu entre le créancier et le débiteur principal. Deux lois étaient susceptibles de s’appliquer,
la loi qui régissait l’obligation principale et une loi propre distincte de celle-ci. En l’absence

240
Cf DERRUPPE in Juris-Classeur de DIP, Fasc. 555, n° 74, BATIFFOL et LAGARDE, T 2, n° 518
241
BAMC n° 465, p. 22 A
242
J. DERRUPPE précité
243
Cf E.D. Hypothèques, n° 18

226
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

de désignation de la loi applicable par les parties, le cautionnement, comme tout contrat, était
régi par la loi d’autonomie, la loi choisie était le plus souvent la loi de la banque.

La convention de Rome du 19 juin 1980 sur les obligations intellectuelles a fait prévaloir la
loi de la prestation caractéristique (cf supra). Or dans le cautionnement, le débiteur de la
prestation caractéristique c’est la caution. C’est donc la loi de la résidence de la caution qui
sera compétente à défaut de choix

Néanmoins, cette présomption est également écartée aux termes de l'article 4-5° de la
convention « lorsqu’il résulte de l’ensemble des circonstances que le contrat présente les
liens les plus étroits avec un autre pays ». Toutefois, les auteurs estiment que cette clause
d’exception ne doit pas être invoquée de façon intempestive.

La loi déclarée applicable régira les conditions de mise en œuvre du cautionnement, sa


validité et ses effets.

SECTION V – LA PUBLICITE FONCIERE DES ACTES JURIDIQUES

Toutes les règles afférentes à la publicité foncière des actes juridiques translatifs, constitutifs
ou déclaratifs de droits réels immobiliers relèvent de la loi du lieu de situation de l'immeuble.

Les dispositions du décret du 4 janvier 1955 et du décret du 14 octobre 1955 relatifs à la


publicité foncière s’appliquent ainsi à tous les immeubles situés en France 244. Il en est de
même de la publicité des privilèges et hypothèques et tous actes relatifs aux sûretés
immobilières.

Le décret du 4 janvier 1955 comporte par ailleurs une disposition particulière concernant la
publicité des actes passés à l’étranger (cf supra). L’alinéa 3 de l'article 4 du Décret dispose en
effet « les actes reçus par les officiers publics ou ministériels étrangers et les décisions
rendues par les juridictions étrangères ne peuvent être publiés ou constituer le titre d’une
inscription de privilège ou d’hypothèque que s’ils ont été légalisés par un fonctionnaire
qualifié du ministère français des affaires étrangères et déposés au rang des minutes d’un
notaire français ou s’ils ont été rendus exécutoires en France.
Ils doivent être accompagnés, s’ils sont rédigés en langue étrangère, d’une traduction en
français, certifiée soit par le fonctionnaire susvisé, soit par un interprète habituellement
commis par les tribunaux (Décret n° 59-89 du 7 janvier 1959). Les expéditions, copies,
extraits ou bordereaux déposés pour être conservés au bureau des hypothèques doivent, en
outre, porter toutes les mentions exigées par les articles 5 à 7 du présent décret et les articles
2148 et 2154 nouveaux du Code civil. »

244
E.D. DI Anc. éd. v° Publicité des actes

227
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Il a été vu précédemment que par exception à ces principes généraux, l’article 2128 du Code
Civil rend impossible la publication en France des contrats constitutifs d’hypothèques reçus à
l’étranger.

Exemple : Un acte de vente reçu par un notaire à Berlin selon les formes du droit
allemand pourra être publié en France. Mais il devra être préalablement traduit et
déposé au rang des minutes d’un notaire français (il y a dispense de légalisation des actes
entre la France et l’Allemagne).

SECTION VI – LES ACQUISITIONS PAR LES FRANÇAIS A L’ETRANGER

La suppression de la réglementation des changes a facilité les acquisitions réalisées par les
français à l’étranger.

A l’occasion de celles-ci se posent deux questions : l’acquisition envisagée est-elle possible


au regard de la législation du lieu de situation de l’immeuble, et l’acte peut-il être reçu par un
notaire français ?

En effet, certains pays tiennent pour nuls et non avenus les actes d’aliénation conclus à
l’étranger sur des biens mobiliers ou immobiliers situés sur leur territoire national (l’Algérie
par exemple – article 4 du Décret du 23 octobre 1962).

D’autres Etats ne sont pas favorables à des acquisitions par des étrangers. Il en est ainsi de
certains Etats américains, de l’Autriche, du Danemark, de la Suisse…

Enfin certaines législations étrangères réservent aux autorités compétentes du pays où se


trouvent situés les immeubles la rédaction des actes de vente (Suisse, Monaco, Espagne) 245.

La publicité à l’étranger de l’acte reçu en France devrait également dissuader le notaire


français de recevoir l’acte. Sans doute une telle publicité ne souffre-t-elle aucune difficulté sur
le plan des principes puisqu’il suffira d’adresser à l’autorité étrangère compétente une copie
de l’acte traduit et légalisé (si nécessaire), mais l’autorité locale sera généralement réticente
lorsqu’il s’agira de publier un acte qu’elle n’a pas reçu.

Enfin, et c’est surtout pour des raisons fiscales (cf infra), qu’il est déconseillé à un notaire de
recevoir un acte de vente portant sur un immeuble situé à l’étranger : en effet, outre les droits
de mutation qui seront dus dans le pays de la situation du bien, un droit de 4,80 % sera perçu
en France sur le fondement de l’article 714 du Code Général des Impôts qui édicte que les

245
Cf « L’accession à la propriété immobilière à l’étranger » GP 1978, I, Doct. p. 67

228
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

actes translatifs de propriété ou d’usufruit de biens immeubles situés en pays étrangers… sont
assujettis à un droit de 4,80 %, sauf conventions internationales contraires relativement rares
(Maroc).

229
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

CHAPITRE IV – LES INCIDENCES FISCALES DES ACQUISITIONS


REALISEES PAR DES ETRANGERS EN FRANCE

SECTION I – LA TAXATION DES BIENS ACQUIS

§ 1- LES ACQUISITIONS REALISEES PAR DES PERSONNES PHYSIQUES ETRANGERES

A- Taxation lors de l’acquisition

Les acquisitions réalisées en France par des personnes physiques de nationalité étrangère sont
taxées dans les mêmes conditions que celles réalisées par des nationaux.

L’acte authentique de vente étranger n’a en France que la valeur d’un acte sous seing privé. Il
n’acquiert date certaine qu’à compter de son enregistrement ou de son dépôt au rang des
minutes d’un notaire ou par l’une des causes énoncée à l’article 1328 du Code civil. Il ne peut
être publié.

Toutefois, la mutation qu’il constate doit être déclarée dans le mois de l’entrée en possession
à la Recette des Impôts de la situation des biens (article 638 du Code Général des Impôts). La
mutation donne ouverture au droit d’enregistrement perçu au même tarif que la taxe de
publicité foncière prévue pour des mutations de même nature (article 662 du Code Général des
Impôts). Les actes dressés ultérieurement en vue de la publication sont dispensés de taxe de
publicité foncière 246.

B- Taxation au titre de l’impôt sur le revenu 247

Les personnes de nationalité française ou étrangère dont le domicile fiscal est situé hors de
France, qui disposent en France d’une ou plusieurs habitations, sont soumises à une taxation
forfaitaire minimale basée sur trois fois la valeur locative annuelle de cette ou de ces
habitations (article 1646 du Code Général des Impôts).

Cette taxation forfaitaire s’applique lorsque l’intéressé ne dispose pas de revenus de source
française ou encore lorsque ses revenus de source française sont inférieurs à la base
d’imposition forfaitaire.

Le calcul de l’impôt correspondant à la base forfaitaire est effectué en utilisant le barème


progressif et le système du quotient familial.

246
D. adm. 7C 1214, n° 3, 20 décembre 1996
247
Mémento fiscal Lefebvre 2005, n° 448

230
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Il n’est pas fait application du taux minimum prévu en cas d’imposition d’après les revenus de
source française 248.

Ce système de taxation forfaitaire comporte des exceptions importantes qui en réduisent la


portée.

Il en est ainsi notamment au cas de convention internationale relative aux seules impositions
conclues entre la France et le pays dont le contribuable est ressortissant.

Il en est de même lorsque les revenus de source française sont supérieurs à la base
d’imposition forfaitaire. Le montant de ces revenus doit alors être retenu pour le calcul de
l’impôt.

§ 2- LES ACQUISITIONS REALISEES PAR LES PERSONNES MORALES (ARTICLE 990 D DU CODE
GENERAL DES IMPOTS)

Taxation lors de l’acquisition : en cas d’acquisition en France de biens immobiliers par des
personnes morales étrangères, les droits exigibles sont identiques à ceux dus par des
personnes morales françaises.

Taxation annuelle : les personnes morales françaises ou étrangères quelle que soit leur forme
(sociétés de personnes ou de capitaux, association) qui directement ou par personnes interposées
possèdent un ou plusieurs immeubles en France ou sont titulaires de droits réels dans ces
immeubles sont redevables d’une taxation annuelle égale à 3 % de la valeur de ces immeubles
ou droits 249.

Certaines personnes morales sont exonérées de cette taxe annuelle de 3 % (article 990 I du
Code Général des Impôts) :

- Les personnes morales dont les immeubles situés en France représentent moins de 50 %
des actifs français. Pour l’application de cette disposition on ne tient pas compte dans les
actifs immobiliers des actifs que les personnes morales (les sociétés) ou les personnes
interposées affectent à leur propre activité professionnelle autre qu’immobilière.

- Les sociétés et toutes personnes morales ayant leur siège dans un pays ou un territoire
ayant conclu avec la France une convention fiscale d’assistance en vue de lutter contre la
fraude et l’évasion fiscale (la Suisse par exemple) dés lors qu’elles souscrivent une
déclaration 2746 chaque année au plus tard le 15 mai. Cette déclaration doit préciser le

248
Mémento fiscal Lefebvre 2005, n° 452
249
Inst. du 22 octobre 1993, BOI, 7G-393, Feuillets Lefebvre Enregistrement X 9000 ; B. GOUTHIERE « Les
impôts dans les affaires internationales » n° 2237-1 et s ; Mémento fiscal Lefebvre 2005 n° 6890 et s.

231
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

lieu de situation de leurs immeubles, leur consistance et leur valeur vénale au 1er janvier
ainsi que l’identité de leurs associés actionnaires ou autres membres ainsi que le nombre
des actions ou parts détenues par chacun d’eux.

- Les personnes morales qui ont leur siège de direction effective en France et les autres
personnes morales qui, en vertu d’un traité, ne doivent pas être assujetties à une
imposition plus lourde lorsqu’elles communiquent chaque année (déclaration 2746), ou
prennent et respectent l’engagement de communiquer, à l’administration fiscale sur sa
demande des informations concernant les immeubles ou les associés :

 les sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé ;

 les organisations internationales, l’Etat souverain et les institutions publiques ;

 les caisses de retraite et autres organismes à but non lucratif qui exercent une activité
désintéressée de caractère social, philanthropique, éducatif ou culturel et qui
établissent que cette activité justifie la propriété des immeubles ou droit immobilier.

La taxe est due à raison, des immeubles ou droits immobiliers au 1er janvier de l’année
d’imposition. Elle est assise sur la valeur vénale des biens immobiliers à cette date à
l’exception des biens régulièrement inscrits dans les stocks des personnes morales exerçant la
profession de marchand de biens ou de promoteurs constructeurs.

Toute personne morale interposée entre le ou les débiteurs de la taxe et les immeubles ou
droits immobiliers est solidairement imposable au paiement de cette taxe.

Les personnes morales imposables doivent souscrire une déclaration 2746 qui doit parvenir à
l’administration avant le 16 mai de chaque année à la Recette des impôts du lieu de situation
des immeubles ou à la recette des non résidents rue d’Uzès à Paris

En cas de cession du ou des immeubles, le représentant accrédité désigné à cette occasion et


qui est responsable de l’impôt sur la plus-value réalisée, est également redevable du paiement
de la taxe de 3 % restant dû à cette date au titre exclusivement de l’année de cession.

La taxe de 3 % n’est libératoire ni de l’impôt sur les sociétés, ni de l’impôt sur le revenu
provenant de la location des immeubles situés en France ; ces impôts demeurent exigibles
dans les conditions du droit commun 250.

250
Mémento fiscal 2005, n° 6890

232
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

SECTION II – LA TAXATION LORS DE LA VENTE DES BIENS ACQUIS (REGIME DES


PLUS-VALUES IMMOBILIERES DES NON-RESIDENTS

Les profits immobiliers réalisés à titre occasionnel par des non résidents supportent un
prélèvement forfaitaire libératoire de l’impôt sur le revenu (article 244 bis A du Code Général
des Impôts). Il en est de même des profits immobiliers réalisés à titre habituel par des non
résidents.

§ 1- LE PRELEVEMENT LIBERATOIRE SUR LES PROFITS IMMOBILIERS REALISES A TITRE


OCCASIONNEL PAR DES NON RESIDENTS (ARTICLE 244 BIS A DU CODE GENERAL DES
IMPOTS)

L’article 244 bis A du Code Général des Impôts n’est applicable qu’à défaut de conventions
internationales contraires. Celles-ci sont rares pour ne pas dire inexistantes.

A- Les personnes concernées

1- Les personnes physiques

Les personnes physiques imposables sont celles qui ont un domicile fiscal hors de France,
qu’elles soient de nationalité française ou étrangère. L’article 244 bis A du Code Général des
Impôts se réfère à l’article 4 B du même code.

2- Les personnes morales

Les personnes morales imposables sont celles dont le siège social est situé hors de France. Le
prélèvement s’applique aux sociétés de personnes, aux sociétés de capitaux et aux organismes
de toute nature (trust, associations, caisses de retraites, fonds de pensions) même si dans ce dernier
cas elles ne sont pas dotées de la personnalité morale 251.

Sont également soumis au prélèvement les sociétés ou groupements dont le siège est situé en
France et qui relèvent des articles 8 à 8 ter du Code Général des Impôts au prorata des droits
sociaux détenus par des associés résidant à l’étranger 252.

251
Instruction 7 septembre 1994, 8M-5-94
252
Article 244 bis A du Code Général des Impôts mod. art. 50 de la loi du 30 décembre 2004

233
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

B- Les opérations visées

Le prélèvement libératoire est dû à l’occasion de la cession à titre onéreux d’immeubles ou de


droits assimilés, mais également en cas d’échange, de partage de société, d’apport en société
et de dissolution de sociétés, d’expropriation…

C- Les biens assujettis

Le prélèvement libératoire s’applique aux plus-values réalisées lors de la cession, d’un


immeuble bâti ou non bâti, de droits immobiliers, d’actions ou parts de société à
prépondérance immobilière.

D- Les obligations des personnes soumises au prélèvement

Les personnes non résidentes passibles du prélèvement libératoire doivent souscrire une
déclaration de plus-value et désigner un représentant accrédité.

1- Souscription de la déclaration de plus-value

La déclaration de plus-value est obligatoire même en l’absence de plus-value taxable. Elle est
effectuée au moyen d’un imprimé 2048 IMM-SD. Elle doit être déposée à la conservation des
hypothèques du lieu de situation du bien aliéné dans les deux mois de la date de l’acte.
Toutefois, la règle a son exception lorsque la cession porte sur un bien détenu depuis plus de
15 ans.

N.B. : A défaut de dépôt d’une déclaration 2048 IMM SD comportant la désignation d’un
représentant accrédité, le conservateur des hypothèques ou la recette des impôts refuse
l’accomplissement de la formalité fusionnée ou de la formalité de l’enregistrement.

2- La désignation d’un représentant accrédité

Elle est obligatoire pour les personnes morales. Les personnes physiques peuvent en être
dispensées. Mais même lorsqu’elles en seront dispensées dans certains cas (cf infra), les
particuliers doivent déposer une déclaration 2048 IMM-SD sauf si la cession porte sur un bien
détenu depuis plus de 15 ans.

234
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Les personnes pouvant être désignées :

 l’acheteur du bien ;
 les banques exerçant leur activité en France ;
 les personnes agréées (société accréditée de représentation fiscale, la Financière accréditée,
la SARF Azur, la Chambre syndicale des généalogistes).

 Plus-values réalisées par les personnes physiques :

La désignation d’un représentant accrédité est obligatoire même en l’absence de plus-value


taxable.

Toutefois, dans l’instruction du 19 février 2004 (8M-2-04), l’administration précise que les
particuliers bénéficient d’une dispense automatique de désignation d’un représentant accrédité
sans demande préalable auprès de l’administration fiscale dans deux cas :

- lorsque le prix de cession est inférieur à 150.000 € quelque soit le nombre des cédants ; ce
seuil s’apprécie par cédant.

En cas d’indivision, il y a donc lieu d’apprécier ce seuil par rapport à la part de chaque
indivisaire concerné pour savoir s’il entre dans le cadre de la dispense automatique. En
effet, la plus-value est un impôt personnel déterminé pour chaque indivisaire et à partir de
sa déclaration n° 2048 ainsi qu’en fonction de ses propres droits et de son origine de
propriété.

En cas de démembrement de propriété, il convient également d’apprécier ce seuil pour


chacun des titulaires de droits réels (nu-propriétaire, usufruitier).

Pour un couple marié, quel que soit son régime matrimonial, le seuil de 150.000 €
s’apprécie par rapport à la totalité du prix de la cession, de sorte que le couple est
considéré comme un seul cédant. Il en est de même pour des personnes ayant conclu un
pacte civil de solidarité (PACS) soumises à une imposition commune.

- lorsque la cession est relative à un bien acquis depuis plus de 15 ans.

La dispense automatique s’applique sans demande préalable du contribuable dès lors que l’un
ou l’autre des critères indiqués précédemment sont remplis.

Le notaire n’a donc plus à soumettre aux services fiscaux le projet d’acte de cession ainsi que
le projet de déclaration de plus-value pour obtenir la dispense.

235
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Il lui appartient d’apprécier si les critères ouvrant droit à la dispense sont réunis.

 Plus-values réalisées par des personnes morales

La dispense de désignation d’un professionnel accrédité prévue par l’Instruction du 9 février


2004 ne concerne que les particuliers. Elle ne profite pas aux personnes morales.

Les personnes morales sont tenues de désigner un représentant accrédité systématiquement.


Elles ne peuvent plus comme auparavant être dispensées de désignation d’un représentant
accrédité.

E- Le prélèvement

1- L’assiette et le taux

a) L’assiette de prélèvement diffère selon que le cédant est ou non un contribuable


assujetti à l’impôt sur le revenu

 Contribuables cédants assujettis à l’impôt sur le revenu

Les plus-values taxables sont déterminées dans les mêmes conditions que pour le contribuable
domicilié en France assujetti à l’impôt sur le revenu (articles 150 A, 150 Q du Code Général des
Impôts).

 Contribuables cédants non soumis à l’impôt sur le revenu

Lorsque le cédant n’est pas assujetti à l’impôt sur le revenu (personnes morales et organismes
soumis à l’IS) les plus-values taxables sont déterminées par différence entre le prix de cession
du bien et son prix d’acquisition diminué, sous certaines conditions, d’une somme égale à 2 %
de son montant par année de détention 253.

b) Le taux du prélèvement

Le taux du prélèvement est fixé en principe à 33 1/3 %.

Mais il est fixé à 16 % pour les plus-values réalisées par des personnes physiques (ou les
associés personnes physiques de société dont les bénéfices sont imposés au nom des associés),

253
Inst. 7 septembre 1994, BOI 8M-5-94 ; D. adm. 8M-52, n° 2, 1er décembre 1995

236
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

résidentes d’un Etat membre de l’Union européenne, qu’ils soient ou non ressortissants de
celle-ci.

Le taux de prélèvement reste donc fixé à 1/3 pour :

- les personnes physiques résidentes d’un Etat autre que ceux membres de l’Union
européenne, quand bien même elles seraient ressortissantes de France ou d’un Etat
membre de l’Union européenne.

Exemple : Un anglais résident à Jersey sera assujetti au prélèvement libératoire du tiers


en cas de vente de sa résidence en France. De même, un français résidant fiscalement
en Nouvelle Calédonie en Polynésie française (T.O) sera assujetti dans la même
situation au prélèvement du tiers.

- les sociétés de personnes associées d’une autre société de personnes détenant un


immeuble en France.

- les sociétés soumises à l’IS détenant directement ou par l’intermédiaire d’une société de
personnes un immeuble en France même si leur siège est situé dans un Etat membre de
l’Union européenne.

2- Les exonérations

a) Exonérations applicables aux résidents

Les diverses exonérations prévues par l’article 150 U du Code Général des Impôts (cessions
par des résidents de France) sont applicables aux cessions réalisées par les non résidents sous
réserve qu’ils puissent satisfaire aux conditions requises 254.

b) Exonération particulière en faveur de l’habitation en France des non résidents

Une exonération particulière est prévue pour les plus-values réalisées lors de la cession
d’immeuble, parties d’immeubles ou des droits relatifs à ces biens qui constituent l’habitation
en France des personnes physiques non résidentes en France, ressortissants d’un Etat membre
de l’Union européenne ou de l’Espace Économique Européen dans la limite d’une résidence
par contribuable et à condition que le cédant ait été fiscalement domicilié en France de
manière continue pendant au moins deux ans à un moment quelconque antérieurement à la
cession (article 150 U II-2° du Code Général des Impôts).

254
Inst. 30 décembre 1976, BOI 8M-1-76

237
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Le cédant doit avoir la libre disposition du bien au moins depuis le 1er janvier de l’année
précédant celle de la cession.

L’exonération ne peut s’appliquer qu’une seule fois, c’est à dire lors de la première cession
intervenue à compter du 1er janvier 2004.

Exemple : L’exonération peut jouer pour un belge résident en Australie mais non pour
un australien demeurant en Belgique.

3- Caractère libératoire du prélèvement

Le prélèvement du tiers ou du 16 % est libératoire de l’impôt sur le revenu dû en raison des


sommes qui ont supporté ce prélèvement.

§ 2- LE PRELEVEMENT DE 50 % SUR LES PROFITS IMMOBILIERS REALISES A TITRE HABITUEL


255
PAR DES PERSONNES NON RESIDENTES (ARTICLE 244 BIS)

L’article 244 bis du Code Général des Impôts édicte que les personnes physiques ou les
sociétés, quelle qu’en soit la forme, n’ayant pas d’établissement en France qui réalisent des
profits immobiliers déterminés à l’article 35 du Code Général des Impôts sont soumises à un
prélèvement de 50 %.

A- Domaine d’application

1- Quant aux personnes

Sont soumises au prélèvement de 50 % :

 Les personnes physiques non résidentes qui n’ont pas leur domicile réel en France (article
4 B du Code Général des Impôts) ;

 Les sociétés qui n’ont pas leur siège en France et qui n’exercent pas une activité
industrielle ou commerciale dans un établissement stable.

2- Les profits imposables

Le prélèvement de 50 % vise les bénéfices réalisés par le marchand de biens à raison des
opérations d’achat revente ou de construction, ou d’opérations réalisées par les intermédiaires

255
Feuillets Lefebvre Immo. III, n° 172250

238
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

pour le négoce des biens, de cession de terrains divisés ou lots, de revente par fractions ou par
lots d’immeubles faisant l’objet d’une promesse unilatérale de vente 256.

B- Détermination et recouvrement du prélèvement

Le bénéfice soumis au prélèvement est déterminé dans les conditions de droit commun
prévues en matière de BIC.

Le bénéfice imposable est égal au prix de cession diminué de toutes les sommes déductibles
de ce prix à titre de loyers (frais de vente supportés par le cédant, frais d’acquisition…).

Le prélèvement dont le taux est fixé à 50 % est établi et recouvré suivant les mêmes règles
que les droits d’enregistrement.

C- Les obligations des redevables

Les personnes physiques et les sociétés soumises en prélèvement de 50 % sont tenues de


souscrire une déclaration spéciale sur une formule délivrée par l’administration (imprimé 3005
souscrit en double exemplaire).

Le prélèvement de 50 % est opéré lors de la présentation à la formalité de l’enregistrement si


la cession dont résulte la plus-value fait l’objet d’un acte ou d’une déclaration soumis à cette
formalité.

Lorsque la plus-value résulte d’opérations constatées par des actes soumis à la formalité
fusionnée le prélèvement est acquitté dans le délai de deux mois prévu pour
l’accomplissement de cette formalité en vu d’une déclaration déposée dans le même délai à la
Recette des Impôts 257.

Le prélèvement de 50 % est libératoire de l’impôt sur le revenu à raison de sommes qui ont
supporté ce prélèvement.

Pour les sociétés passibles de l’impôt sur les sociétés, le prélèvement s’impute sur le montant
de l’impôt sur les sociétés dû par le cédant au titre de l’année de réalisation des profits. Il ne
peut pas être restitué 258.

256
D. adm. 8D-151, n° 4
257
D. adm. 8D-153, n° 3, 30 juin 1998
258
Mémento Lefebvre fiscal, n° 2606

239
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

§ 3- LA TAXATION DES ACQUISITIONS IMMOBILIERES REALISEES PAR LES FRANÇAIS A


L’ETRANGER

A- Les acquisitions des français à l’étranger par acte passé à l’étranger

De telles acquisitions ne sont soumises à aucune formalité en France, même si l’acte reçu à
l’étranger devait ultérieurement être produit en France.

B- Les acquisitions des français à l’étranger par acte reçu en France

Les actes sous seing privé constatant une mutation d’immeuble situé à l’étranger établis en
France ne sont pas soumis à enregistrement et le droit de 4,80 % ne peut être perçu qu’en cas
de présentation volontaire à la formalité.

En revanche, les actes notariés constatant une mutation d’immeuble à l’étranger établi en
France sont soumis à la formalité de l’enregistrement et donnent ouverture au droit de 4,80 %
prévu à l’article 714 du Code Général des Impôts.

Aussi est-il déconseillé à un notaire français de recevoir un acte de vente portant sur un
immeuble situé à l’étranger puisque, outre les droits de mutation dus à l’étranger l’acquéreur
aura payé un droit de 4,80 % sur le prix de vente, sauf conventions internationales contraires,
lesquelles sont relativement rares (Maroc et certains pays d’Afrique noire).

240
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

CHAPITRE V – L’IMPOT SUR LE REVENU 259

§1- LES CONTRIBUABLES FRANÇAIS OU ETRANGERS NON DOMICILIES EN FRANCE

Les personnes domiciliées fiscalement hors de France sont imposables en France quelles que
soit leur nationalité pour leurs revenus de source française (revenus d’immeubles de valeurs
mobilières et de tous autre capitaux mobiliers, d’exploitations agricoles, industrielles, commerciales
ou artisanales, d’activité professionnelle, pensions et rentes viagères, de droits d’auteurs) ou
prestations de toute nature matériellement fournies ou utilisées en France (commissions
d’agence,…).

Ces revenus de source française sont imposables dans les mêmes conditions que ceux perçus
par des personnes domiciliées en France.

Il y a lieu toutefois d’exclure de la base d’imposition, les revenus soumis à des prélèvements
libératoires.

L’impôt dû par les non résidents (français ou étrangers) est calculé en appliquant le barème
progressif et le système du quotient familial.

L’impôt ainsi calculé ne peut être inférieur à 25 % du revenu net imposable.

Nous rappellerons ici que les ressortissants français ou étrangers qui ne sont pas fiscalement
domiciliés en France et qui n’ont aucun revenu de source française, mais qui disposent dans
notre pays d’une ou plusieurs habitations, sont soumis à une taxation forfaitaire minimale
basée sur trois fois la valeur locative de cette ou de ces habitations (cf supra).

La déclaration d’impôt est à effectuer au Centre des impôts des non résidents, 9 rue d’Uzès,
75084 Paris Cedex 02.

Enfin, les contribuables non domiciliés fiscalement en France, mais qui y exercent des
activités et qui y détiennent des biens doivent à la demande de l’administration désigner un
représentant accrédité pour tout ce qui concerne l’impôt dont ils sont redevables en France.

La désignation du représentant doit être faite dans les 10 jours de la demande.

259
Mémento fiscal 2005, n° 432 et s.

241
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

§ 2- LES CONTRIBUABLES ETRANGERS DOMICILIES EN FRANCE

Les personnes dont le domicile fiscal est situé en France qu’elles soient de nationalité
française ou étrangère sont passibles de l’impôt en France sur l’ensemble de leurs revenus,
qu’ils soient de source française ou étrangère.

Toutefois, cette règle ne trouve à s’appliquer qu’en l’absence de convention internationale


tendant à éviter les doubles impositions.

C’est ainsi, par exemple, que ne seront pas imposables en France au titre de l’impôt sur le
revenu, les revenus des immeubles situés à l’étranger d’un contribuable domicilié fiscalement
en France si la convention internationale réserve leur imposition exclusive à l’Etat où est situé
l’immeuble.

242
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

CHAPITRE VI – LES RELATIONS FINANCIERES AVEC L’ETRANGER

Les règles régissant les relations financières avec l’étranger tendent à assurer l’équilibre de la
balance de nos paiements et la défense de nos intérêts nationaux. Aussi varient-elles au gré de
la conjoncture économique.

Inexistante jusqu’en 1940, la réglementation des changes fut instaurée pour résoudre, en
mobilisant les richesses nationales, les problèmes économiques et financiers nés de l’état de
guerre.

Après celui-ci, la réglementation n’a cessé de s’assouplir jusqu’en 1966 où elle disparut. Elle
fut rétablie après les évènements de 1968 pour relever l’économie nationale ; elle s’assouplit à
nouveau jusqu’à l’élection présidentielle de 1981 qui entraîna une fuite des capitaux vers
l’étranger. Elle est alors rétablie.

Mais dès 1984, pour tenir compte des directives européennes, elle est allégée.

C’est en fait le décret n° 89154 du 9 mars 1989 qui constitue le premier pas décisif vers sa
disparition puisque trois secteurs seulement resteront réglementés, les investissements directs,
les obligations statistiques imposées à tous les résidents pour leurs opérations à l’étranger et
les transferts de fonds à l’étranger. De nouvelles mesures sont prises quelques temps plus tard
pour simplifier la réglementation des investissements étrangers en France 260.

Une loi, un décret et un arrêté du Ministère de l’économie et des finances datés du 14 février
1996 261 devaient simplifier encore la réglementation française des investissements directs.
Désormais, les relations financières entre la France et l’étranger sont libres (article 1er alinéa 1er
de la loi du 28 décembre 1966 relative aux relations financières avec l’étranger) même si l’article 3
1-c du même texte précise toujours que « le gouvernement peut, pour assurer la défense des
intérêts nationaux, … soumettre à déclaration, autorisation préalable, ou contrôle, la
constitution et la liquidation des investissements étrangers en France ».

Un décret du 7 mars 2003 262 et un arrêté de même date réforment partiellement les
dispositions prises dans la loi du 14 décembre 1996 et abrogent le décret du 29 décembre
1989.

Le principe de base est maintenu : les relations financières entre la France et l’étranger sont
libres comme l’énonce l’article L 151-1 alinéa 1er du Code monétaire et financier, mais
260
D. 29 décembre 1989, n° 8993
261
JCP 96 N III 67846 ; D. 14 février 1996, JCP 96 N n° 12, III 67851 ; A. 14 février 1996, JCP 96 N n° 12,
67852 ; « La réglementation des investissements directs après la réforme du 14 février 1996 » par D.
BOULANGER, JCP 1996 E I 551
262
n° 2003-196, JO 9 mars 1996, p. 4140 « La réglementation des investissements étrangers après la réforme du
7 mars 2003 » par D. BOULANGER, JCP E 2003 I, p. 663

243
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

comme le précise l’article L 152-2 du même code le gouvernement peut, pour la défense des
intérêts nationaux, soumettre à déclaration, autorisation préalable ou contrôle, les
mouvements de capitaux, ainsi que la constitution et la liquidation d’investissements directs.

Ce décret et l’arrêté qui l’accompagne sont aujourd’hui le siège de la matière.

Cette étude des relations financières avec l’étranger sera divisée en deux parties : l’une sera
consacrée aux principes généraux qui animent la réglementation des changes, l’autre aux
mouvements de capitaux et aux investissements directs.

SECTION I – LES PRINCIPES GENERAUX QUI ANIMENT LES RELATIONS FINANCIERES


AVEC L’ETRANGER

§ 1- APPLICATION TERRITORIALE DE LA REGLEMENTATION DES CHANGES

Aux termes de l’article 1er du décret du 7 mars 2003, il faut entendre par :

A- France

La France métropolitaine, les départements d’Outre-Mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La


Réunion) et les collectivités de Mayotte, St Pierre et Miquelon, Wallis et Futuna ainsi que la
Principauté de Monaco. Toutefois, pour les besoins statistiques liés à l’établissement de la
balance des paiements, Wallis et Futuna sont considérées comme l’étranger.

B- Étranger

Les pays autres que la France et ceux indiqués ci-dessus et par conséquent Madagascar, les
anciens départements d’Afrique du Nord (Algérie, Tunisie, Maroc), l’Andorre, etc…

§ 2- LA RESIDENCE

L’article 1er 2° du décret du 7 mars 2003 précise quelles sont les personnes qui ont la qualité
de résident et de non résident.

244
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

→ Résidents :

- Les personnes physiques ayant leur principal centre d’intérêt en France, c’est à dire où
elles exercent leurs activités professionnelles et économiques et où elles habitent en fait
réellement.

- Les fonctionnaires et autres agents publics français en poste à l’étranger (par fonctionnaire
il faut entendre le fonctionnaire d’Etat). Le conjoint d’un fonctionnaire n’acquiert pas la
qualité de non résident dès lors qu’il n’a pas son principal centre d’intérêt à l’étranger.

- Les personnes morales françaises ou étrangères pour leur établissement en France. La


succursale d’une société étrangère en France sera considérée comme résident.

→ Non résidents : article 1er 3° du décret du 7 mars 2003

- Les personnes physiques ayant leur principal centre d’intérêt à l’étranger.

- Les fonctionnaires et autres agents publics étrangers en poste à l’étranger.

- Les personnes morales françaises ou étrangères pour leur établissement à l’étranger, c'est-
à-dire des personnes travaillant pour le compte de collectivités publiques territoriales
françaises ou étrangères (Etat central, Etat fédéré, région, département, commune, etc.).

Les personnes physiques françaises ou étrangères acquièrent la qualité de résident ou de non


résident dès leur installation effective en France ou à l’étranger ; les personnes morales dès
leur établissement en France ou à l’étranger.

§ 3- LES INVESTISSEMENTS DIRECTS

Le décret du 7 mars 2003 distingue deux sortes d’investissements :

A- Les investissements donnant lieu seulement à déclarations statistiques

Dans le souci d’établir la balance des paiements et la position extérieure de la France, sont
considérées comme des investissements directs étrangers en France ou français à l’étranger,
les opérations par lesquelles des résidents ou des non résidents acquièrent au moins 10 % du
capital ou des droits de vote en franchissant le seuil de 10 % d’une entreprise non résidente ou
résidente respectivement.

245
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Relèvent ainsi de la définition statistique des investissements directs toutes les opérations
entre entreprises apparentées de quelque nature qu’elles soient (prêts, emprunts, dépôt…) ainsi
que les investissements directs mais sans avoir à en subir le régime.

B- Les investissements directs étrangers soumis à autorisation préalable ou


à déclaration administrative

 La création d’une entreprise nouvelle par une entreprise de droit étranger ou une personne
physique non résidente ;

 L’acquisition de tout ou partie d’une branche d’activité d’une entreprise de droit français
par une entreprise de droit étranger ou une personne physique non résidente ;

 Toutes opérations effectuées dans le capital d’une entreprise de droit français par une
entreprise de droit étranger ou une personne physique non résidente dès lors que, après
l’opération, la somme cumulée du capital ou des droits de vote détenus par des entreprises
étrangères ou des personnes physiques non résidentes excède 33,33 % du capital ou des
droits de vote de l’entreprise française ;

 Les mêmes opérations effectuées par une entreprise de droit français dont le capital ou les
droits de vote sont détenus à plus de 33,33 % par une ou des entreprises de droit étranger
ou une ou des personnes physiques non résidentes.

La réglementation concerne également des opérations telles que l’octroi de prêts ou de


garanties substantielles ou l’achat de brevets ou de licences, l’acquisition de contrats
commerciaux ou l’apport d’assistance technique qui entraînent la prise de contrôle de fait
d’une entreprise de droit français par une entreprise de droit étranger ou une personne
physique non résidente.

Sont aussi qualifiés d’investissements directs les opérations effectuées à l’étranger ayant pour
effet de modifier le contrôle d’une entreprise non résidente, elle-même détentrice d’une
participation ou de droits de vote dans une entreprise de droit français dont le capital ou les
droits de vote sont détenus à plus de 33,33 % par une ou des entreprises de droit étranger ou
des personnes physiques non résidentes.

§ 4- LES OPERATIONS NE CONSTITUANT PAS DES INVESTISSEMENTS DIRECTS

Les opérations ne constituant pas des investissements directs sont considérées comme des
opérations de placement qui sont totalement libres. Seuls les transferts de fonds consécutifs à
ces opérations peuvent être soumis à déclaration.

246
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Ainsi, sont des opérations ne nécessitant aujourd’hui aucune autorisation les ventes et
acquisitions immobilières et assimilées, que le prix soit stipulé payable comptant ou à terme,
ou moyennant rente viagère. Tous les moyens de paiement sont acceptés, qu’ils aient lieu en
France ou à l’étranger.

Les transferts de fonds consécutifs au règlement d’une succession ouverte en France recueillie
par des non résidents sont possibles sans aucune restriction (cf infra).

Sont encore libres, les prêts consentis en France par des résidents à des non résidents et vice
versa.

§ 5- L’ADMINISTRATION CONCERNEE

- Le Ministère de l’économie et des finances : les demandes d’autorisation, les


déclarations administratives, les déclarations au sens de l’article 5 du décret du 7 mars
2003 ou toute correspondance relative aux investissements étrangers en France doivent
leur être adressées.

- La Banque de France : les déclarations visées à l’article 4 du décret du 7 mars 2003


(déclaration à des fins statistiques) sont adressées à la Banque de France (direction générale
des études et des relations internationales, direction de la balance des paiements).

- La Direction Générale des Douanes est chargée de la répression des infractions.

SECTION II – LES MOUVEMENTS DE CAPITAUX ET LES INVESTISSEMENTS DIRECTS

§ 1- LES TRANSFERTS DE FONDS ET COMPTES OUVERTS A L’ETRANGER

La suppression du contrôle des changes depuis le 1er janvier 1990 a permis de transférer
librement des capitaux à l’étranger et d’y ouvrir des comptes.

Pour faire échec à l’évasion fiscale, des obligations déclaratives ont été imposées relatives
l’une au transfert des fonds, l’autre à la détention de comptes à l’étranger 263.

A- Les transferts de fonds

En application de l’article 1649 quater A du Code Général des Impôts, les personnes
physiques sont tenues de déclarer auprès de l’administration des douanes le transfert de fonds

263
Cf Feuillets Lefebvre, CF IX, 18600 et s.

247
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

vers l’étranger (mouvement physique) ou en provenance de l’étranger dès lors que leur montant
unitaire est au moins égal à 7 600 €.

Cette obligation déclarative incombe à toute personne physique résidente ou non résidente qui
transporte à destination ou en provenance de l’étranger des sommes, titres ou valeurs (billets
de banque, pièces de monnaie, chèques avec ou sans indication du bénéficiaire, au porteur, de
voyage…), valeurs mobilières et autres titres de créances, lingots d’or, etc.

Ces déclarations doivent être souscrites lors du passage à la frontière au bureau des douanes,
pour les transferts à destination ou en provenance des territoires d’Outre-Mer et des
collectivités territoriales de Mayotte et de St Pierre et Miquelon, à l’entrée ou à la sortie du
territoire Métropolitain.

Pour les transferts entre la France et Monaco, la déclaration doit être faite au premier ou au
dernier bureau de douane rencontré sur le territoire français.

Pour les transferts qui ont comme première destination ou dernière provenance un Etat de la
communauté européenne, la déclaration de transfert de capitaux est établie préalablement au
transfert.

Déclaration des envois postaux :

La déclaration des sommes, titres ou valeurs transférés par voie postale doit être déposée lors
de l’envoi de la lettre ou du colis contenant les sommes titres ou valeurs dans les bureaux de
poste ou dans les gares 264.

En cas de défaut de production de la déclaration des sommes, titres ou valeurs transférés vers
l’étranger ou en provenance de l’étranger, des sanctions telles que la confiscation du corps du
délit et une présomption de revenus imposables ont été prévues.

B- Comptes ouverts à l’étranger (article 1649 A du Code Général des Impôts)

Depuis les mesures d’assouplissement de la réglementation des changes prises par les
législations, les personnes physiques résidant en France peuvent avoir des comptes à
l’étranger et y transférer des sommes en provenance de la France.

Mais ces comptes doivent être déclarés à l’administration des impôts. Les personnes
physiques joignent la déclaration de compte à la déclaration de revenus. La déclaration doit
mentionner la désignation et l’adresse du titulaire du compte, la désignation du compte, etc.

264
Inst. 5 novembre 1991, 13-K-2-91 ; D. adm. 13 K 334, n° 16, 10 juillet 1989

248
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

En cas de défaut de production de la déclaration, le contrevenant est sanctionné par une


amende fixe et une présomption simple de revenu imposable.

§ 2- LES INVESTISSEMENTS DIRECTS (DECRET DU 7 MARS 2003 ET ARRETE DU 7 MARS 2003)

A- Les opérations et les personnes tenues à des déclarations statistiques

1- Les personnes tenues à des déclarations statistiques

- Les établissements de crédit, les entreprises d’investissement, les organismes de placement


collectif… sont tenus de faire des déclarations statistiques mensuelles relatives aux
règlements entre résidents et non résidents effectuées en France et qui dépassent 12 500 €.

- Les entreprises ou groupements d’entreprises dont le montant des opérations excède, au


cours d’une année civile, pour au moins une rubrique de services ou de revenus de la balance
des paiements, un montant de 30 millions d’euros.

- Les résidents qui réalisent directement des opérations à l’étranger, notamment à partir de
comptes ouverts à l’étranger ou par compensation de créances et de dettes, doivent déclarer
chaque mois à la banque de France les opérations de cette nature lorsque leur montant dépasse
un million d’euros.

- Les résidents doivent encore déclarer à la Banque de France des éléments statistiques
nécessaires à la connaissance de la position extérieure de la France lorsque l’encours de leurs
biens et créances à l’étranger ou de leurs dettes envers l’étranger excède un montant de dix
millions d’euros.

2- Les opérations donnant lieu à déclaration à des fins statistiques

Doivent faire l’objet auprès de la Banque de France d’informations complémentaires à des


fins statistiques, lorsque leur montant dépasse 15 millions d’euros :

 les investissements directs étrangers en France et leur liquidation ;

 l’acquisition ou la cession d’entreprises non résidentes par des résidents ;

 l’acquisition ou la cession de biens immobiliers à l’étranger par des résidents et en France


par des non-résidents.

Les créations d’entreprise et les achats de biens immobiliers par des investisseurs étrangers en
France et la liquidation d’investissements étrangers en France donnent lieu à déclaration.

249
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

En conséquence, donnent encore lieu à déclaration à des fins statistiques (article 5 arrêté du 7
mars 2003) :

 les opérations de création et d’extension d’activité d’une entreprise de droit français


existante détenue directement ou indirectement par des entreprises de droit étranger ou des
personnes physiques non résidentes lorsque leur montant est supérieur à 1 500 000 €.

 les opérations d’acquisition immobilière dont le montant est supérieur à 1 500 000 €.

 les acquisitions de terres agricoles donnant lieu à une exploitation vitivinicole.

 la liquidation d’investissements directs étrangers en France.

 la réalisation d’opérations ayant fait l’objet d’une autorisation par le Ministre chargé de
l’économie ; dans le cas où une opération d’investissement direct ayant fait l’objet d’une
décision n’est pas réalisée ou n’est réalisée que partiellement, l’administration doit en être
informée.

D’autre part, les entreprises de droit français détenues directement ou indirectement par des
étrangers, ou le cas échéant leur liquidateur, doivent aussi informer l’administration de la
diminution de la participation étrangère dans leur capital, de toute modification importante
concernant leur exercice ou leur activité, des opérations effectuées à l’étranger modifiant
indirectement le capital d’une entreprise de droit français.

B- Les investissements étrangers en France donnant lieu à déclaration


administrative voire à une autorisation préalable

Tout investissement étranger énuméré au II, III et IV du 4° de l’article 1er du Décret du 7 mars
2003 fait l’objet lors de sa réalisation d’une déclaration administrative.

Toutefois, des cas de dispense de déclaration préalable sont prévus :

 la création ou l’extension d’activité d’une entreprise de droit français existante, détenue


directement ou indirectement par des entreprises de droit étranger ou des personnes
physiques non résidentes ;

 les accroissements de participation dans une entreprise de droit français détenue


directement ou indirectement par des entreprises de droit étranger ou des personnes
physiques non résidentes lorsqu’ils sont effectués par un investisseur détenant déjà plus de
50 % du capital ou des droits de vote de la société (antérieurement le seuil était ici fixé à
66,66 %) ;

250
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

 la souscription à une augmentation de capital d’une entreprise de droit français détenue


directement ou indirectement par des entreprises de droit étranger ou des personnes
physiques non résidentes, sous réserve qu’elles n’accroissent pas à cette occasion leur
participation ;

 les opérations d’investissements directs réalisées entre des sociétés appartenant toutes au
même groupe, c’est-à-dire étant détenues à plus de 50 % directement ou indirectement,
par les mêmes actionnaires ;

 les opérations relatives à des prêts, avances, garanties, consolidations ou abandons de


créances, subventions ou dotations de succursales, accordés à une entreprise de droit
français détenue directement ou indirectement par des entreprises de droit étranger ou des
personnes physiques non résidentes qui la détiennent ;

 les opérations d’investissements directs réalisées dans des entreprises de droit français
exerçant une activité immobilière autre que la construction d’immeubles destinés à la
vente ou à la location ;

 les opérations d’investissements directs réalisées, dans la limite de 1 500 000 €, dans des
entreprises de droit français artisanales, de commerce de détail, d’hôtellerie, de
restauration, de services de proximité ou ayant pour objet exclusif l’exploitation de
carrières ou gravières ;

 les acquisitions de terres agricoles.

En revanche, une autorisation préalable du Ministre de l’Économie est requise pour les
investissements réalisés en France et mentionnés au I de l’article L 151-3 du Code monétaire
et financier.

 les investissements directs étrangers en France de nature à mettre en cause l’ordre public
ou la sécurité publique (investissement dans les casinos, cercles de jeux…) ;

 les investissements directs ou indirects étrangers en France relatifs à la défense nationale,


aux armes et aux explosifs ;

 les investissements directs étrangers en France de nature à créer des risques sérieux
mettant en cause la santé publique.

N.B. : Les obligations de compte rendu relatives aux constitutions et aux liquidations
d’investissements directs prévues depuis le Décret du 29 décembre 1989 ont disparu.

251
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

L’arrêté du 7 mars 2003 (articles 4 et 5) précise les modalités d’établissement des déclarations
administratives et des demandes d’autorisation préalable et leur contenu.

Des sanctions en cas de non respect de la réglementation des changes accompagnent ces
dispositions (amendes, emprisonnement, confiscation du corps du délit, des moyens de transport
utilisés pour la fraude, etc.).

252
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

TABLE DES MATIERES

Principes généraux de Droit International Privé ..................................................................... 3

I- La méthode des conflits de lois ............................................................................. 4


A- Le problème des qualifications ........................................................................ 6
B- Le problème du renvoi ..................................................................................... 7
C- Les conflits mobiles ......................................................................................... 8

II- Les incidences de la règle de conflit .................................................................... 8


A- La connaissance de la loi étrangère.................................................................. 9
B- L’application d’office de la loi étrangère ......................................................... 9
C- L’opportunité de l’application de la loi étrangère .......................................... 10

TITRE I : L'ETAT DES PERSONNES .............................................................................................. 13

Section I – La nationalité ................................................................................................ 15

§ 1- L’attribution de la nationalité française dès la naissance ................................. 16


A- Attribution de la nationalité française en raison de la filiation ...................... 16
B- Attribution de la nationalité française en raison de la naissance en France ... 17
§ 2 – Attribution de la nationalité française après la naissance .............................. 18
A- Acquisition automatique ................................................................................ 18
B- Acquisition par déclaration (article 21-12 du Code civil) .............................. 20
C- Acquisition par décision de l’autorité publique ............................................. 20
§ 3- La perte de la nationalité française .................................................................. 22
A- La perte changement (articles 23 et 23-4 du Code civil) ............................... 22
B- La perte abdication ......................................................................................... 23
C- Perte déchéance (article 25 du Code civil) ..................................................... 23
§ 4- La preuve de la nationalité ............................................................................... 23

Section II – L’état civil en Droit International Privé ...................................................... 24

§ 1- L’efficacité en France des actes de l’état civil reçus à l’étranger .................... 24


A- Les autorités locales compétentes pour dresser un acte de l’état civil ........... 25
B- Les agents diplomatiques et consulaires ........................................................ 26
§ 2- Les actes de l’état civil des étrangers en France .............................................. 26
A- L’intervention des officiers d’état civil français ............................................ 26
B- Les agents diplomatiques ou consulaires étrangers en France ....................... 26
§ 3- L’état civil des réfugiés et des apatrides .......................................................... 27
A- Le statut de réfugié ......................................................................................... 27
B- La délivrance de certificats et pièces d’état civil aux réfugiés et apatrides ... 28

Section III – Le statut des étrangers en France .............................................................. 29

§ 1- L’admission des étrangers en France ............................................................... 29


A- L’entrée et le séjour des étrangers en France sont réglementés ..................... 29

253
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

B- L’entrée et le séjour des ressortissants des Etats membres de l’Union


Européenne et de l’Espace Économique Européen (EEE) et la Suisse .............. 31
§ 2- L’activité des étrangers en France ................................................................... 32
A- Les étrangers exerçant une activité salariée ................................................... 32
B- Les étrangers exerçant une activité non salariée ............................................ 33
C- Les droits reconnus aux étrangers en France ................................................. 35

Section IV – Le statut des mineurs et les majeurs incapables en Droit international


privé ................................................................................................................................. 41

§ 1- La représentation et la capacité des majeurs en Droit international privé ....... 42


A- En droit commun ............................................................................................ 42
B- La convention de la Haye du 13 janvier 2000 sur la protection internationale
des adultes (non ratifiée par la France) .............................................................. 43
§ 2- La capacité et la représentation des mineurs .................................................... 44
A- La capacité et la représentation des mineurs en droit commun ..................... 45
B- La capacité et la représentation des mineurs depuis l’entrée en vigueur de la
convention de la Haye du 5 octobre 1961 et du règlement (CE) du 27
novembre 2003 dit Bruxelles II bis ..................................................................... 46
C- La capacité et la représentation des mineurs depuis l’entrée en vigueur du
règlement (CE) du 27 novembre 2003 dit Bruxelles II bis ................................. 48
D- Exemples ........................................................................................................ 49

TITRE II : DROIT DE LA FAMILLE, DES SUCCESSIONS ET DES LIBERALITES .............................. 55

CHAPITRE I – MARIAGE, DIVORCE, UNION LIBRE .................................................................. 59

Section I – Le mariage en Droit international privé ...................................................... 59

§ 1- La formation du mariage en Droit international privé ..................................... 59


A- Les conditions de fond ................................................................................... 59
B- Les conditions de forme ................................................................................. 61
§ 2- Les effets du mariage ....................................................................................... 64
A- Effets sur les personnes .................................................................................. 64
B- Effets sur les biens des époux ........................................................................ 65

Section II – Le divorce en Droit international privé ....................................................... 67

§ 1- Le tribunal compétent pour prononcer le divorce ............................................ 67


§ 2- La loi applicable au divorce ............................................................................. 68
A- Détermination de la loi applicable au divorce ............................................... 68
B- Le domaine de la loi applicable...................................................................... 69
§ 3- La reconnaissance des jugements étrangers de divorce et de séparation de
corps ........................................................................................................................ 69
A- Le jugement étranger de divorce est rendu dans un pays tiers ....................... 70
B- Le jugement de divorce est rendu dans un Etat de l’Union européenne ........ 70
C- L’exécution en France d’une décision étrangère de divorce et l’exécution à
l’étranger d’une décision française de divorce .................................................... 72
D- La transcription du jugement de divorce........................................................ 73

254
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Section III – L’union libre .............................................................................................. 73

§ 1- Les conditions de formation du pacs ............................................................... 74


§ 2- Les effets de la conclusion d’un pacs .............................................................. 76
A- Les effets en France de la conclusion d’un PACS ........................................... 76
B- Des effets inattendus ...................................................................................... 76

Section IV – La filiation en Droit international privé ..................................................... 77

§ 1- Les conflits de lois en matière de filiation ....................................................... 78


A- Les principes relatifs à l’établissement de la filiation en Droit international
privé ..................................................................................................................... 78
B- Les exceptions au principe du rattachement de la filiation à la loi de la
mère ..................................................................................................................... 79
§ 2- L’adoption internationale ................................................................................. 80
A- Les conditions de l’adoption en Droit international privé ............................. 80
B- Les effets de l’adoption internationale ........................................................... 83
C- Les conventions internationales en matière d’adoption ................................. 84

CHAPITRE II – LES REGIMES MATRIMONIAUX ....................................................................... 86

SOUS-CHAPITRE I – LA DETERMINATION DE LA LOI APPLICABLE .......................................... 88

Section I – Le mariage des époux a été célébré avant le 1er septembre 1992, date
d’entrée en vigueur de la Convention de la Haye ........................................................... 90

Sous-section I – Les époux ont adopté un contrat de mariage .................................... 90

Sous-section II – Les époux se sont mariés sans contrat avant le 1er septembre
1992 ............................................................................................................................. 91

§ 1- La règle de conflit ou de rattachement ............................................................. 91


A- Un indice prépondérant : le premier domicile matrimonial ........................... 92
B- Les indices subsidiaires .................................................................................. 93
§ 2- Les problèmes pratiques de mise en œuvre de la règle de conflit ................... 96
A- Les actions déclaratoires ................................................................................ 96
B- Le renvoi ........................................................................................................ 97
C- La permanence de la loi applicable ................................................................ 98

Section II – Le mariage des époux est postérieur à l’entrée en vigueur de la


convention de la Haye du 14 mars 1978 ....................................................................... 100

Sous-section I – La détermination de la loi applicable au régime matrimonial lors du


mariage ...................................................................................................................... 101

§ 1- Le choix de la loi régissant le régime matrimonial des époux au moment du


mariage .................................................................................................................. 102
§ 2- Le formalisme de la désignation de la loi applicable ..................................... 103

255
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

A- L’établissement d’un contrat de mariage ..................................................... 103


B- La stipulation expresse ................................................................................. 104
§ 3- La publicité du régime matrimonial des époux lors du mariage .................... 105
A- Les futurs époux ont établi un contrat de mariage ....................................... 106
B- Les futurs époux ont désigné la loi applicable à leur régime matrimonial .. 107

Sous-section II – La détermination de la loi applicable et du régime matrimonial de


deux époux mariés sans contrat postérieurement au 1er septembre 1992 .................. 108

§ 1- Compétence de principe de la loi de la résidence habituelle ......................... 108


§ 2- Compétence exceptionnelle de la loi nationale commune ............................. 109
A- Défaut de résidence habituelle commune .................................................... 110
B- Déclaration en faveur de la loi nationale commune ..................................... 110
C- Les règles de conflit en présence donnant compétence à la loi nationale
commune ........................................................................................................... 110
§ 3- Le défaut de nationalité et de résidence commune ........................................ 114

SOUS-CHAPITRE II – LE CHANGEMENT DE REGIME MATRIMONIAL ET/OU DE LA LOI


APPLICABLE ........................................................................................................................ 115

Section I – Le changement de régime matrimonial avant le 1er septembre 1992 ......... 116

§ 1- Les conditions de fond du changement de régime ......................................... 116


§ 2- Les conditions de forme ................................................................................. 116

Section II – Le changement de loi et de régime matrimonial depuis le 1er septembre


1992 .............................................................................................................................. 117

§ 1- Le changement volontaire de loi applicable au régime matrimonial ............. 117


A- Le changement de loi applicable proprement dit ......................................... 118
B- Le changement de régime matrimonial consécutif à un changement de loi 123
§ 2- Le changement automatique de loi applicable (article 7 de la convention). .. 132

SOUS-CHAPITRE III – LE DOMAINE DE LA LOI APPLICABLE AU REGIME MATRIMONIAL ...... 135

Section I – Le domaine d’application de la loi régissant le régime matrimonial lors de


son adoption .................................................................................................................. 135

§ 1- La capacité des époux .................................................................................... 135


§ 2- Le consentement des époux ........................................................................... 136
§ 3- La forme du contrat de mariage ..................................................................... 136

Section II – Le domaine d’application de la loi régissant le régime matrimonial


pendant la durée du régime ........................................................................................... 137

§ 1- L’hypothèque légale....................................................................................... 137


§ 2- Le régime primaire ........................................................................................ 138

256
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Section III – Le champ d’application de la loi applicable au régime matrimonial à la


fin du régime.................................................................................................................. 140

§ 1 – La dissolution et la liquidation du régime matrimonial ............................... 140


A- Les causes de la dissolution ......................................................................... 140
B- La liquidation du régime .............................................................................. 141
§ 2- L’application de la loi successorale ............................................................... 141

CHAPITRE III - LES SUCCESSIONS ET LES LIBERALITES EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE . 143

Section I – Les successions............................................................................................ 143

Sous-Section I – La détermination de la loi applicable à la succession .................... 143

§ 1- La règle de conflit français en matière de succession .................................... 144


A- Une règle toujours actuelle .......................................................................... 144
B- Les critiques portées à l’encontre de la règle ............................................... 145
C- Le projet de convention de la Haye du 1er août 1989 sur la loi applicable
aux successions ................................................................................................. 146
§ 2- Les dérogations à l’application de la règle de conflit française ..................... 147
A- L’ordre public .............................................................................................. 147
B- La fraude à la loi........................................................................................... 148
C- Le droit de prélèvement................................................................................ 149
D- Droit conventionnel...................................................................................... 150

Sous-Section II – Le champ d’application de la loi successorale ............................. 151

§ 1- Les testaments en Droit international privé ................................................... 152


A- Les conditions de validité d’un testament en droit international privé ........ 152
B- La mise en œuvre du testament en Droit International Privé ....................... 157
§ 2- La dévolution des successions testamentaires et ab intestat .......................... 160
A- L’ouverture de la succession ........................................................................ 160
B- Les personnes appelées à la succession........................................................ 160
C- La transmission des biens héréditaires ......................................................... 163
§ 3- Le partage de la succession ............................................................................ 174
A- La loi applicable au partage et son domaine d’application .......................... 174
B- La publicité de l’acte de partage .................................................................. 175
C- La fiscalité du partage .................................................................................. 177

Section II – Les libéralités en Droit International Privé .............................................. 177

Sous-Section I – Les donations entre vifs ................................................................. 177

§ 1- Les règles de fond .......................................................................................... 177


§ 2- Les règles de forme ........................................................................................ 178

Sous-Section II – Les donations entre époux ............................................................ 179

257
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

§1- Les donations entre époux de biens présents .................................................. 179


§2- Les donations entre époux de biens à venir .................................................... 180
A- Les donations immobilières de biens à venir entre époux ........................... 180
B- Les donations mobilières de biens à venir entre époux ................................ 180

Sous-Section III – La donation partage ..................................................................... 182

Section III – La fiscalité des mutations à titre gratuit en Droit International Privé .... 184

Sous-Section I – Les principes généraux d’imposition des mutations à titre gratuit 184

§1- Les règles d’imposition en l’absence de conventions internationales (article


750 ter du Code Général des Impôts) .................................................................... 184
A- La masse imposable ..................................................................................... 184
B- Tarif et liquidation des droits ....................................................................... 185
§ 2- Les conventions internationales en matière d’imposition des mutations à titre
gratuit .................................................................................................................... 187

Sous-Section II – Les problèmes fiscaux liés aux déclarations de succession .......... 188

§ 1- Le lieu de dépôt de la déclaration de succession ........................................... 188


§ 2- Délai de souscription de la déclaration de succession ................................... 188
§ 3- L’assiette des droits........................................................................................ 188
§ 4- Le calcul de l’impôt : le taux effectif ............................................................. 189
§ 5- Les obligations des acquéreurs d’immeubles et de fonds de commerce ....... 192

TITRE III : LES ACQUISITIONS PAR LES ETRANGERS ............................................................... 195

CHAPITRE I - LA LOI APPLICABLE AUX CONTRATS EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE ......... 199

Section I – La détermination de la loi applicable aux contrats .................................... 200

§ 1- Les parties ont désigné la loi applicable au contrat (article 3) ....................... 200
§ 2-Les parties n’ont pas désigné la loi applicable au contrat (article 4) .............. 200
§ 3- Le champ d’application de la convention (article 10) ................................... 201

Section II – La loi applicable à la forme du contrat (article 9) .................................... 201

§ 1- Le contrat est conclu entre des personnes qui se trouvent dans un même
pays........................................................................................................................ 202
§ 2- Le contrat est conclu entre des personnes qui se trouvent dans des pays
différents................................................................................................................ 202

CHAPITRE II - LES DIFFICULTES PRATIQUES D'APPLICATION DE LA CONVENTION DE ROME


AUX CONTRATS DE VENTE D’IMMEUBLES
(LES ACQUISITIONS PAR LES ETRANGERS) ........................................................................... 203

Section I – La loi applicable au contrat de vente .......................................................... 203

258
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

§ 1- La loi applicable quant au fond ...................................................................... 203


§ 2- La loi applicable quant à la forme.................................................................. 203

Section II – Le champ d’application de la loi ............................................................... 204

CHAPITRE III - LES DIFFICULTES RENCONTREES LORS DE LA REDACTION DE L’ACTE


D’ACQUISITION ................................................................................................................... 205

Section I – Les parties à l’acte ...................................................................................... 205

§ 1- Les parties comparaissent à l’acte .................................................................. 205


A- L’identification des parties........................................................................... 205
B- La capacité des parties.................................................................................. 208
§ 2- Les parties sont représentées à la signature de l’acte ..................................... 211
A- Le régime des procurations en droit international privé .............................. 211
B- La légalisation .............................................................................................. 214

Section II – La langue utilisée dans les actes juridiques .............................................. 218

Section III – Le recours à l’emprunt ............................................................................. 220

§ 1- La loi applicable au contrat de prêt ................................................................ 220


§ 2- L’application des articles L 312-1 et s. du Code de la Consommation
(ex : Loi Scrivener du 13 juillet 1979) .................................................................. 220
§ 3- La loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU) ...................................... 222
A- L’immeuble est situé en France ................................................................... 223
B- L’immeuble est situé à l’étranger ................................................................. 223

Section IV – Le prix et les garanties de paiement ......................................................... 224

§ 1- Le paiement du prix ....................................................................................... 224


§ 2- Les garanties de paiement .............................................................................. 225
A- Le privilège de prêteur de deniers ................................................................ 225
B- L’acte constitutif d’hypothèque ................................................................... 225
C- Le cautionnement ......................................................................................... 226

Section V – La publicité foncière des actes juridiques.................................................. 227

Section VI – Les acquisitions par les français à l’étranger .......................................... 228

CHAPITRE IV - LES INCIDENCES FISCALES DES ACQUISITIONS REALISEES PAR DES


ETRANGERS EN FRANCE ..................................................................................................... 230

Section I – La taxation des biens acquis ....................................................................... 230

§ 1- Les acquisitions réalisées par des personnes physiques étrangères ............... 230
A- Taxation lors de l’acquisition ....................................................................... 230
B- Taxation au titre de l’impôt sur le revenu ................................................... 230

259
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

§ 2- Les acquisitions réalisées par les personnes morales (article 990 D du Code
Général des Impôts) .............................................................................................. 231

Section II – La taxation lors de la vente des biens acquis (régime des plus-values
immobilières des non-résidents ..................................................................................... 233

§ 1- Le prélèvement libératoire sur les profits immobiliers réalisés à titre


occasionnel par des non résidents (article 244 bis A du Code Général des
Impôts) .................................................................................................................. 233
A- Les personnes concernées ............................................................................ 233
B- Les opérations visées .................................................................................... 234
C- Les biens assujettis ....................................................................................... 234
D- Les obligations des personnes soumises au prélèvement ............................. 234
E- Le prélèvement ............................................................................................. 236
§ 2- Le prélèvement de 50 % sur les profits immobiliers réalisés à titre habituel
par des personnes non résidentes (article 244 bis) ............................................... 238
A- Domaine d’application ................................................................................. 238
B- Détermination et recouvrement du prélèvement .......................................... 239
C- Les obligations des redevables ..................................................................... 239
§ 3- La taxation des acquisitions immobilières réalisées par les français à
l’étranger ............................................................................................................... 240
A- Les acquisitions des français à l’étranger par acte passé à l’étranger .......... 240
B- Les acquisitions des français à l’étranger par acte reçu en France ............... 240

CHAPITRE V – L’IMPOT SUR LE REVENU ............................................................................ 241

§1- Les contribuables français ou étrangers non domiciliés en France ................. 241
§ 2- Les contribuables étrangers domiciliés en France ......................................... 242

CHAPITRE VI – LES RELATIONS FINANCIERES AVEC L’ETRANGER ...................................... 243

Section I – Les principes généraux qui animent les relations financières avec
l’étranger ....................................................................................................................... 244

§ 1- Application territoriale de la réglementation des changes ............................. 244


A- France ........................................................................................................... 244
B- Étranger ........................................................................................................ 244
§ 2- La résidence ................................................................................................... 244
§ 3- Les investissements directs ............................................................................ 245
A- Les investissements donnant lieu seulement à déclarations statistiques ...... 245
B- Les investissements directs étrangers soumis à autorisation préalable ou à
déclaration administrative ................................................................................. 246
§ 4- Les opérations ne constituant pas des investissements directs ...................... 246
§ 5- L’administration concernée ........................................................................... 247

Section II – Les mouvements de capitaux et les investissements directs ....................... 247

260
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

§ 1- Les transferts de fonds et comptes ouverts à l’étranger ................................. 247


A- Les transferts de fonds ................................................................................. 247
B- Comptes ouverts à l’étranger (article 1649 A du Code Général des Impôts)248
§ 2- Les investissements directs (Décret du 7 mars 2003 et arrêté du
7 mars 2003) .......................................................................................................... 249
A- Les opérations et les personnes tenues à des déclarations statistiques ........ 249
B- Les investissements étrangers en France donnant lieu à déclaration
administrative voire à une autorisation préalable .............................................. 250

261
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

262
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ANNEXES

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264
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Annexes

 Convention de la Haye du 14 mars 1978 sur la loi applicable p. 267


aux régimes matrimoniaux

 Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable p. 271


aux obligations contractuelles

 Formule de déclaration de la loi applicable au régime matrimonial p. 277


au cours du mariage (époux britanniques désirant soumettre leurs
immeubles français à la loi française)

 Régime matrimonial légal de la plupart des pays P. 279

 Règle de conflit en matière de succession p. 286

 Légalisation des actes notariés p. 287

 Autorités chargées de délivrer l’apostille en Europe p. 291

 Age de la majorité légale p. 292

265
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

266
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Décret n° 92-1024 du 21 septembre 1992 portant Le régime matrimonial est soumis à la loi interne
publication de la convention sur la loi applicable désignée par les époux avant le mariage.
aux régimes matrimoniaux, faite à La Haye le 14 Les époux ne peuvent désigner que l'une des lois
suivantes :
mars 1978 (1)
1. La loi d'un État dont l'un des époux a la nationalité
au moment de cette désignation ;
NOR : MAEJ9230050D 2. La loi de l'État sur le territoire duquel l'un des époux
a sa résidence habituelle au moment de cette
Le Président de la République, désignation ;
Sur le rapport du Premier ministre et du ministre d’Etat, 3. La loi du premier État sur le territoire duquel l'un des
ministre des affaires étrangères, époux établira une nouvelle résidence habituelle après
Vu les articles 52 à 55 de la Constitution; le mariage.
Vu la loi n° 79-550 du 5 juillet 1979 autorisant la La loi ainsi désignée s'applique à l'ensemble de leurs
ratification de la convention de la Haye du 14 mars 1978 biens.
sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux ; Toutefois, que les époux aient ou non procédé à la
Vu le décret n° 53-192 du 14 mars 1953 modifié relatif à désignation prévue par les alinéas précédents, ils peuvent
la ratification et à la publication des engagements désigner, en ce qui concerne les immeubles ou certains
internationaux souscrits par la France, d'entre eux, la loi du lieu où ces immeubles sont situés.
Ils peuvent également prévoir que les immeubles qui
Décrète : seront acquis par la suite seront soumis à la loi du lieu de
Art. 1er. - La convention sur la loi applicable aux régimes leur situation.
matrimoniaux, faite à La Haye le 14 mars 1978, sera
publiée au Journal officiel de la République française. Article 4
Art. 2. - Le Premier ministre et le ministre d’Etat,
ministre des affaires étrangères, sont chargés, chacun en Si les époux n'ont pas, avant le mariage, désigné la loi
ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret, qui applicable à leur régime matrimonial, celui-ci est soumis
sera publié au Journal officiel de la République française. à la loi interne de l'État sur le territoire duquel ils
établissent leur première résidence habituelle après le
Fait à Paris, le 21 septembre 1992 mariage.
François MITTERRAND Toutefois, dans les cas suivants, le régime matrimonial
Par le Président de la République : est soumis à la loi interne de l'État de la nationalité
Le Premier Ministre, commune des époux :
Pierre BÉRÉGOVOY 1. Lorsque la déclaration prévue par l'article 5 a été
Le ministre d’Etat, ministre des affaires faite par cet État et que son effet n'est pas exclu par
étrangères, l'alinéa 2 de cet article ;
Roland DUMAS 2. Lorsque cet État n'est pas partie à la Convention, que
__________________ sa loi interne est applicable selon son droit international
privé et que les époux établissent leur première
CONVENTION DU 14 MARS 1978 SUR LA LOI résidence habituelle après le mariage :
APPLICABLE AUX REGIMES MATRIMONIAUX a) Dans un État ayant fait la déclaration prévue par
l'article 5, ou
CHAPITRE 1er b) Dans un État qui n'est pas partie à la Convention et
Champ d'application de la Convention dont le droit international privé prescrit également
l'application de leur loi nationale ;
Article 1er 3. Lorsque les époux n'établissent pas sur le territoire
du même État leur première résidence habituelle après
La présente Convention détermine la loi applicable aux le mariage.
régimes matrimoniaux. À défaut de résidence habituelle des époux sur le
Elle ne s'applique pas : territoire du même État et à défaut de nationalité
1. Aux obligations alimentaires entre époux ; commune, leur régime matrimonial est soumis à la loi
2. Aux droits successoraux du conjoint survivant ; interne de l'État avec lequel, compte tenu de toutes les
3. À la capacité des époux. circonstances, il présente les liens les plus étroits.

Article 2 Article 5

La Convention s'applique même si la nationalité ou la Tout État pourra, au plus tard au moment de la
résidence habituelle des époux ou la loi applicable en ratification, de l'acceptation, de l'approbation ou de
vertu des articles ci-dessous ne sont pas celles d'un État l'adhésion, faire une déclaration entraînant l'application
contractant. de sa loi interne, selon l'article 4, alinéa 2, chiffre 1.
Cette déclaration n'aura pas d'effet pour des époux qui
CHAPITRE II conservent tous deux leur résidence habituelle sur le
Loi applicable territoire de l'État où, au moment du mariage, l'un et
l'autre avaient leur résidence habituelle depuis cinq ans au
Article 3 moins, sauf si cet État est un État contractant ayant fait la
déclaration prévue par l'alinéa premier du présent article,
ou un État non partie à la Convention et dont le droit

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CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

international privé prescrit l'application de la loi Toutefois, le droit d'un État contractant peut prévoir que
nationale. la loi applicable au régime matrimonial ne peut être
opposée par un époux à un tiers lorsque l'un ou l'autre a
Article 6 sa résidence habituelle sur son territoire, à moins :
1. Que des conditions de publicité ou d'enregistrement
Les époux peuvent, au cours du mariage, soumettre leur prévues par ce droit aient été remplies, ou
régime matrimonial à une loi interne autre que celle 2. Que le rapport juridique entre cet époux et le tiers ait
jusqu'alors applicable. pris naissance alors que le tiers connaissait ou devait
Les époux ne peuvent désigner que l'une des lois connaître la loi applicable au régime matrimonial.
suivantes : Le droit de l'État contractant où un immeuble est situé
1. La loi d'un État dont l'un des époux a la nationalité peut prévoir une règle analogue pour les rapports
au moment de cette désignation ; juridiques entre un époux et un tiers concernant cet
2. La loi de l'État sur le territoire duquel l'un des époux immeuble.
a sa résidence habituelle au moment de cette Tout État contractant a la possibilité de spécifier au
désignation. moyen d'une déclaration la portée des alinéas 2 et 3 du
La loi ainsi désignée s'applique à l'ensemble de leurs présent article.
biens.
Toutefois, que les époux aient ou non procédé à la Article 10
désignation prévue par les alinéas précédents ou par
l'article 3, ils peuvent désigner, en ce qui concerne les Les conditions relatives au consentement des époux quant
immeubles ou certains d'entre eux, la loi du lieu où ces à la loi déclarée applicable sont déterminées par cette loi.
immeubles sont situés. Ils peuvent également prévoir
que les immeubles qui seront acquis par la suite seront Article 11
soumis à la loi du lieu de leur situation.
La désignation de la loi applicable doit faire l'objet d'une
Article 7 stipulation expresse ou résulter indubitablement des
dispositions d'un contrat de mariage.
La loi compétente en vertu des dispositions de la
Convention demeure applicable aussi longtemps que les Article 12
époux n'en ont désigné aucune autre et même s'ils
changent de nationalité ou de résidence habituelle. Le contrat de mariage est valable quant à la forme si
Toutefois, si les époux n'ont ni désigné la loi applicable celle-ci répond soit à la loi interne applicable au régime
ni fait de contrat de mariage, la loi interne de l'État où ils matrimonial, soit à la loi interne en vigueur au lieu où le
ont tous deux leur résidence habituelle devient applicable, contrat a été passé. Il doit toujours faire l'objet d'un écrit
au lieu et place de celle à laquelle leur régime daté et signé des deux époux.
matrimonial était antérieurement soumis.
1. À partir du moment où ils y fixent leur résidence Article 13
habituelle, si la nationalité de cet État est leur
nationalité commune, ou dès qu'ils acquièrent cette La désignation par stipulation expresse de la loi
nationalité, ou applicable doit revêtir la forme prescrite pour les contrats
2. Lorsque, après le mariage, cette résidence habituelle de mariage soit par la loi interne désignée, soit par la loi
a duré plus de dix ans, ou interne du lieu où intervient cette désignation. Elle doit
3. À partir du moment où ils fixent leur résidence toujours faire l'objet d'un écrit daté et signé des deux
habituelle, si le régime matrimonial était soumis à la loi époux.
de l'État de la nationalité commune uniquement en
vertu de l'article 4, alinéa 2, chiffre 3. Article 14

Article 8 L'application de la loi déterminée par la Convention ne


peut être écartée que si elle est manifestement
Le changement de la loi applicable en vertu de l'article 7, incompatible avec l'ordre public.
alinéa 2, n'a d'effet que pour l'avenir, et les biens
appartenant aux époux antérieurement à ce changement Chapitre III
ne sont pas soumis à la loi désormais applicable. Dispositions diverses
Toutefois, les époux peuvent à tout moment et dans les
formes prévues à l'article 13, soumettre l'ensemble de Article 15
leurs biens à la nouvelle loi, sans préjudice, en ce qui
concerne les immeubles, des dispositions de l'article 3, Aux fins de la Convention, une nationalité n'est
alinéa 4, et de l'article 6, alinéa 4. L'exercice de cette considérée comme nationalité commune des époux que
faculté ne porte pas atteinte aux droits des tiers. dans les cas suivants :
1. Les deux époux avaient cette nationalité avant le
Article 9 mariage ;
2. Un époux a volontairement acquis la nationalité de
Les effets du régime matrimonial sur un rapport juridique l'autre au moment du mariage ou ultérieurement soit
entre un époux et un tiers sont soumis à la loi applicable par une déclaration prévue à cet effet, soit en ne
au régime matrimonial en vertu de la Convention. déclinant pas cette acquisition alors qu'il savait que ce
droit lui était ouvert ;

268
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

3. Les deux époux ont volontairement acquis cette Partie et qui contiennent des dispositions sur les matières
nationalité après le mariage. réglées par la présente Convention.
Sauf dans les cas visés par l'article 7, alinéa 2, chiffre 1,
les dispositions se référant à la nationalité commune ne Article 21
sont pas applicables lorsque les époux ont plus d'une
nationalité commune. La Convention ne s'applique, dans chaque État
contractant, qu'aux époux qui se sont mariés ou qui
Article 16 désignent la loi applicable à leur régime matrimonial
après son entrée en vigueur pour cet État.
Aux fins de la Convention, lorsqu'un État comprend deux
ou plusieurs unités territoriales dans lesquelles des Tout État contractant pourra, par déclaration, étendre
systèmes de droit différents s'appliquent en matière de l'application de la Convention à d'autres époux.
régimes matrimoniaux, toute référence à la loi nationale
d'un tel État est entendue comme visant le système
déterminé par les règles en vigueur dans cet État.
CHAPITRE IV
À défaut de telles règles, on entend par État dont un Clauses finales
époux a la nationalité, au sens des articles 3, alinéa 2,
chiffre 1, et 6, alinéa 2, chiffre 1, l'unité territoriale où cet Article 22
époux a eu en dernier lieu sa résidence habituelle ; de
même, pour l'application de l'article 4, alinéa 2, on entend La Convention est ouverte à la signature des États qui
par État de la nationalité commune des époux l'unité étaient membres de la Conférence de La Haye de droit
territoriale où l'un et l'autre a eu, en dernier lieu, une international privé lors de sa treizième section.
résidence habituelle. Elle sera ratifiée, acceptée ou approuvée et les
instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation
Article 17 seront déposés auprès du Ministère des Affaires
étrangères du Royaume des Pays-Bas.
Aux fins de la Convention, lorsqu'un État comprend deux
ou plusieurs unités territoriales dans lesquelles des Article 23
systèmes de droit différents s'appliquent en matière de
régimes matrimoniaux, toute référence à la résidence Tout autre État pourra adhérer à la Convention.
habituelle dans un tel État est interprétée comme visant la L'instrument d'adhésion sera déposé auprès du Ministère
résidence habituelle dans une unité territoriale de cet État. des Affaires étrangères du Royaume des Pays-Bas.

Article 18 Article 24

Un État contractant qui comprend deux ou plusieurs Tout État, au moment de la signature, de la ratification,
unités territoriales dans lesquelles des systèmes de droit de l'acceptation, de l'approbation ou de l'adhésion, pourra
différents s'appliquent en matière de régimes déclarer que la Convention s'étendra à l'ensemble des
matrimoniaux n'est pas tenu d'appliquer les règles de la territoires qu'il représente sur le plan international ou à
Convention aux conflits entre les lois de ces unités, l'un ou plusieurs d'entre eux. Cette déclaration aura effet
lorsque la loi d'aucun autre État n'est applicable en vertu au moment où la Convention entre en vigueur pour cet
de la Convention. État.
Cette déclaration ainsi que toute extension ultérieure
Article 19 seront notifiées au Ministère des Affaires étrangères du
Royaume des Pays-Bas.
Aux fins de la Convention, lorsqu'un État connaît, en
matière de régimes matrimoniaux, deux ou plusieurs Article 25
systèmes de droit applicables à des catégories différentes
de personnes, toute référence à la loi d'un tel État est Un État contractant qui comprend deux ou plusieurs
entendue comme visant le système de droit déterminé par unités territoriales dans lesquelles des systèmes de droit
les règles en vigueur dans cet État. différents s'appliquent en matière de régimes
matrimoniaux pourra, au moment de la signature, de la
À défaut de telles règles, la loi interne de l'État de la ratification, de l'acceptation, de l'approbation ou de
nationalité commune des époux s'applique dans le cas l'adhésion, déclarer que la Convention s'appliquera à
prévu à l'article 4, alinéa premier, et la loi interne de l'État toutes les unités territoriales ou seulement à l'une ou à
dans lequel ils avaient tous deux leur résidence habituelle plusieurs d'entre elles et pourra à tout moment étendre
reste applicable dans le cas prévu à l'article 7, alinéa 2, cette déclaration.
chiffre 2. À défaut de nationalité commune des époux, Ces déclarations seront notifiées au Ministère des
l'article 4, alinéa 3, s'applique. Affaires étrangères du Royaume des Pays-Bas et
indiqueront expressément l'unité territoriale à laquelle la
Article 20 Convention s'applique.

La Convention ne déroge pas aux instruments


internationaux auxquels un État contractant est ou sera

269
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Article 26 La Convention sera renouvelée tacitement de cinq ans en


cinq ans sauf dénonciation.
Un État contractant qui connaît, à la date de l'entrée en La dénonciation sera, au moins six mois avant
vigueur de la Convention pour cet État, un système l'expiration du délai de cinq ans, notifiée au Ministère des
complexe d'allégeance nationale peut spécifier à tout Affaires étrangères du Royaume des Pays-Bas. Elle
moment, par déclaration, comment une référence à sa loi pourra se limiter à certains territoires ou unités
nationale doit être entendue aux fins de la Convention. territoriales auxquels s'applique la Convention.
La dénonciation n'aura d'effet qu'à l'égard de l'État qui
Article 27 l'aura notifiée. La Convention restera en vigueur pour les
autres États contractants.
Aucune réserve à la Convention n'est admise.
Article 31
Article 28
Le Ministère des Affaires étrangères du Royaume des
Tout État contractant qui désire faire l'une des Pays-Bas notifiera aux États membres de la Conférence
déclarations prévues aux articles 5, 9, alinéa 4, 21 et 26 la ainsi qu'aux États qui auront adhéré conformément aux
notifiera au Ministère des Affaires étrangères du dispositions de l'article 23 :
Royaume des Pays-Bas. 1. Les signatures, ratifications, acceptations et
Toute modification ou retrait d'une déclaration seront approbations visées à l'article 22 ;
notifiés de la même manière. 2. Les adhésions visées à l'article 23 ;
3. La date à laquelle la Convention entrera en vigueur
Article 29 conformément aux dispositions de l'article 29 ;
4. Les extensions visées à l'article 24 ;
La Convention entrera en vigueur le premier jour du 5. Les dénonciations visées à l'article 30 ;
troisième mois du calendrier après le dépôt du troisième 6. Les déclarations mentionnées aux articles 25, 26 et
instrument de ratification, d'acceptation, d'approbation ou 28.
d'adhésion prévu par les articles 22 et 23.
Par la suite, la Convention entrera en vigueur : En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés, ont
1. Pour chaque État ratifiant, acceptant, approuvant ou signé la présente Convention.
adhérant postérieurement, le premier jour du troisième
mois du calendrier après le dépôt de son instrument de Fait à La Haye, le 14 mars 1978, en français et en anglais,
ratification, d'acceptation, d'approbation ou d'adhésion ; les deux textes faisant également foi, en un seul
2. Pour les territoires auxquels la Convention a été exemplaire, qui sera déposé dans les archives du
étendue conformément à l'article 24, le premier jour du Gouvernement du Royaume des Pays-Bas et dont une
troisième mois du calendrier après la notification visée copie certifiée conforme sera remise, par la voie
dans cet article. diplomatique, à chacun des États membres de la
Conférence de La Haye de droit international privé lors
Article 30 de sa treizième session.

La Convention aura une durée de cinq ans à partir de la


date de son entrée en vigueur, conformément à l'article Note de la Rédaction
20, alinéa 1er, même pour les États qui l'auront
postérieurement ratifiée, acceptée ou approuvée ou qui y (1) La présente convention est entrée en vigueur pour la
auront adhéré. France le 1er septembre 1992.

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CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Décret n° 91-242 du 28 février 1991 portant c) Aux obligations nées de lettres de change, chèques,
publication de la convention sur la loi applicable billets à ordre ainsi que d’autres instruments négociables,
aux obligations contractuelles (ensemble un dans la mesure où les obligations nées de ces autres
instruments dérivent de leur caractère négociable;
protocole et deux déclarations communes),
d) Aux conventions d’arbitrage et d’élection de for;
signée à Rome le 19 juin 1980 (1) e) Aux questions relevant du droit des sociétés,
associations et personnes morales, telles que la
NOR: MAEJ9130005D
constitution, la capacité juridique, le fonctionnement
interne et la dissolution des sociétés, associations et
Le Président de la République,
personnes morales ainsi que la responsabilité personnelle
Sur le rapport du Premier ministre et du ministre d’Etat,
légale des associés et des organes pour les dettes de la
ministre des affaires étrangères,
société, association ou personne morale;
Vu les articles 52 à 55 de la Constitution;
f) A la question de savoir si un intermédiaire peut
Vu la loi n° 82-523 du 21 juin 1982 autorisant la
engager envers les tiers la personne pour le compte de
ratification de la convention sur la loi applicable aux
laquelle il prétend agir ou si un organe d’une société,
obligations contractuelles;
d’une association ou d’une personne morale peut engager
Vu le décret n° 53-192 du 14 mars 1953 modifié relatif à
envers les tiers cette société, association ou personne
la ratification et à la publication des engagements
morale;
internationaux souscrits par la France,
g) A la constitution des <<trusts>>, aux relations qu’ils
Décrète : créent entre les constituants, les <<trustees>> et les
bénéficiaires;
Art. 1er. - La convention sur la loi applicable aux
h) A la preuve et à la procédure, sous réserve de l’article
obligations contractuelles (ensemble un protocole et deux
14.
déclarations communes), signée à Rome le 19 juin 1980,
3. Les dispositions de la présente convention ne
sera publiée au Journal officiel de la République
s’appliquent pas aux contrats d’assurance qui couvrent
française.
des risques situés dans les territoires des Etats membres
Art. 2. - Le Premier ministre et le ministre d’Etat,
de la Communauté économique européenne. Pour
ministre des affaires étrangères, sont chargés, chacun en
déterminer si un risque est situé dans ces territoires, le
ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret, qui
juge applique sa loi interne.
sera publié au Journal officiel de la République française.
4. Le paragraphe précédent ne concerne pas les contrats
______________ de réassurance.
CONVENTION SUR LA LOI APPLICABLE AUX
Article 2
OBLIGATIONS CONTRACTUELLES (ENSEMBLE
Caractère universel
UN PROTOCOLE ET DEUX DECLARATIONS
COMMUNES)
La loi désignée par la présente Convention s’applique
PREAMBULE même si cette loi est celle d’un Etat non contractant.
Les Hautes Parties contractantes au traité instituant la TITRE II
Communauté économique européenne, REGLES UNIFORMES
Soucieuses de poursuivre, dans le domaine du droit
international privé, l’oeuvre d’unification juridique déjà Article 3
entreprise dans la Communauté, notamment en matière Liberté de choix
de compétence judiciaire et d’exécution des jugements,
Désirant établir des règles uniformes concernant la loi 1. Le contrat est régi par la loi choisie par les parties. Ce
applicable aux obligations contractuelles, choix doit être exprès ou résulter de façon certaine des
sont convenues des dispositions qui suivent: dispositions du contrat ou des circonstances de la cause.
Par ce choix, les parties peuvent désigner la loi applicable
TITRE Ier à la totalité ou à une partie seulement de leur contrat.
CHAMP D’APPLICATION 2. Les parties peuvent convenir, à tout moment, de faire
régir le contrat par une loi autre que celle qui le régissait
Article 1er auparavant soit en vertu d’un choix antérieur selon le
Champ d’application présent article, soit en vertu d’autres dispositions de la
présente Convention. Toute modification quant à la
1. Les dispositions de la présente Convention sont détermination de la loi applicable, intervenue
applicables, dans les situations comportant un conflit de postérieurement à la conclusion du contrat, n’affecte pas
lois, aux obligations contractuelles. la validité formelle du contrat au sens de l’article 9 et ne
2. Elles ne s’appliquent pas: porte pas atteinte aux droits des tiers.
a) A l’état et à la capacité des personnes physiques, sous 3. Le choix par les parties d’une loi étrangère, assorti ou
réserve de l’article 11; non de celui d’un tribunal étranger, ne peut, lorsque tous
b) Aux obligations contractuelles concernant: les autres éléments de la situation sont localisés au
- les testaments et successions; moment de ce choix dans un seul pays, porter atteinte aux
- les régimes matrimoniaux; dispositions auxquelles la loi de ce pays ne permet pas de
- les droits et devoirs découlant des relations de famille, déroger par contrat, ci-après dénommées « Dispositions
de parenté, de mariage ou d’alliance, y compris les impératives ».
obligations alimentaires envers les enfants non 4. L’existence et la validité du consentement des parties
légitimes;

271
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

quant au choix de la loi applicable sont régies par les publicité, et si le consommateur a accompli dans ce
dispositions établies aux articles 8, 9 et 11. pays les actes nécessaires à la conclusion du contrat, ou
- si le cocontractant du consommateur ou son
Article 4 représentant a reçu la commande du consommateur
Loi applicable à défaut de choix dans ce pays, ou
- si le contrat est une vente de marchandises et que le
1. Dans la mesure où la loi applicable au contrat n’a pas consommateur se soit rendu de ce pays dans un pays
été choisie conformément aux dispositions de l’article 3, étranger et y ait passé la commande, à la condition que
le contrat est régi par la loi du pays avec lequel il présente le voyage ait été organisé par le vendeur dans le but
les liens les plus étroits. Toutefois, si une partie du d’inciter le consommateur à conclure une vente.
contrat est séparable du reste du contrat et présente un 3. Nonobstant les dispositions de l’article 4 et à défaut de
lien plus étroit avec un autre pays, il pourra être fait choix exercé conformément à l’article 3, ces contrats sont
application, à titre exceptionnel, à cette partie du contrat régis par la loi du pays dans lequel le consommateur a sa
de la loi de cet autre pays. résidence habituelle, s’ils sont intervenus dans les
2. Sous réserve du paragraphe 5, il est présumé que le circonstances décrites au paragraphe 2 du présent article.
contrat présente les liens les plus étroits avec le pays où 4. Le présent article ne s’applique pas:
la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a, au a) Au contrat de transport;
moment de la conclusion du contrat, sa résidence b) Au contrat de fourniture de services lorsque les
habituelle ou, s’il s’agit d’une société, association ou services dus au consommateur doivent être fournis
personne morale, son administration centrale. Toutefois, exclusivement dans un pays autre que celui dans lequel
si le contrat est conclu dans l’exercice de l’activité il a sa résidence habituelle.
professionnelle de cette partie, ce pays est celui où est 5. Nonobstant les dispositions du paragraphe 4, le présent
situé son principal établissement ou, si, selon le contrat, article s’applique au contrat offrant pour un prix global
la prestation doit être fournie par un établissement autre des prestations combinées de transport et de logement.
que l’établissement principal, celui où est situé cet autre
établissement. Article 6
3. Nonobstant les dispositions du paragraphe 2, dans la Contrat individuel de travail
mesure où le contrat a pour objet un droit réel immobilier
ou un droit d’utilisation d’un immeuble, il est présumé 1. Nonobstant les dispositions de l’article 3, dans le
que le contrat présente les liens les plus étroits avec le contrat de travail, le choix par les parties de la loi
pays où est situé l’immeuble. applicable ne peut avoir pour résultat de priver le
4. Le contrat de transport de marchandises n’est pas travailleur de la protection que lui assurent les
soumis à la présomption du paragraphe 2. Dans ce dispositions impératives de la loi qui serait applicable, à
contrat, si le pays dans lequel le transporteur a son défaut de choix, en vertu du paragraphe 2 du présent
établissement principal au moment de la conclusion du article.
contrat est aussi celui dans lequel est situé le lieu de 2. Nonobstant les dispositions de l’article 4 et à défaut de
chargement ou de déchargement ou l’établissement choix exercé conformément à l’article 3, le contrat de
principal de l’expéditeur, il est présumé que le contrat a travail est régi:
les liens les plus étroits avec ce pays. Pour l’application a) Par la loi du pays où le travailleur, en exécution du
du présent paragraphe, sont considérés comme contrats contrat, accomplit habituellement son travail, même
de transport de marchandises les contrats d’affrètement s’il est détaché à titre temporaire dans un autre pays,
pour un seul voyage ou d’autres contrats lorsqu’ils ont ou
principalement pour objet de réaliser un transport de b) Si le travailleur n’accomplit pas habituellement son
marchandises. travail dans un même pays, par la loi du pays où se
5. L’application du paragraphe 2 est écartée lorsque la trouve l’établissement qui a embauché le travailleur, à
prestation caractéristique ne peut être déterminée. Les moins qu’il ne résulte de l’ensemble des circonstances
présomptions des paragraphes 2, 3 et 4 sont écartées que le contrat de travail présente des liens plus étroits
lorsqu’il résulte de l’ensemble des circonstances que le avec un autre pays, auquel cas la loi de cet autre pays
contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays. est applicable.

Article 5 Article 7
Contrats conclus par les consommateurs Lois de police

1. Le présent article s’applique aux contrats ayant pour 1. Lors de l’application, en vertu de la présente
objet la fourniture d’objets mobiliers corporels ou de Convention, de la loi d’un pays déterminé, il pourra être
services à une personne, le consommateur, pour un usage donné effet aux dispositions impératives de la loi d’un
pouvant être considéré comme étranger à son activité autre pays avec lequel la situation présente un lien étroit,
professionnelle, ainsi qu’aux contrats destinés au si et dans la mesure où, selon le droit de ce dernier pays,
financement d’une telle fourniture. ces dispositions sont applicables quelle que soit la loi
2. Nonobstant les dispositions de l’article 3, le choix par régissant le contrat. Pour décider si effet doit être donné à
les parties de la loi applicable ne peut avoir pour résultat ces dispositions impératives, il sera tenu compte de leur
de priver le consommateur de la protection que lui nature et de leur objet ainsi que des conséquences qui
assurent les dispositions impératives de la loi du pays découleraient de leur application ou de leur non-
dans lequel il a sa résidence habituelle: application.
- si la conclusion du contrat a été précédée dans ce pays 2. Les dispositions de la présente Convention ne pourront
d’une proposition spécialement faite ou d’une porter atteinte à l’application des règles de la loi du pays

272
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

du juge qui régissent impérativement la situation quelle d) Les divers modes d’extinction des obligations ainsi
que soit la loi applicable au contrat. que les prescriptions et déchéances fondées sur
l’expiration d’un délai;
Article 8 e) Les conséquences de la nullité du contrat.
Consentement et validité au fond 2. En ce qui concerne les modalités d’exécution et les
mesures à prendre par le créancier en cas de défaut dans
1. L’existence et la validité du contrat ou d’une l’exécution, on aura égard à la loi du pays où l’exécution
disposition de celui-ci sont soumises à la loi qui serait a lieu.
applicable en vertu de la présente Convention si le contrat
ou la disposition étaient valables. Article 11
2. Toutefois, pour établir qu’elle n’a pas consenti, une Incapacité
partie peut se référer à la loi du pays dans lequel elle a sa
résidence habituelle s’il résulte des circonstances qu’il ne Dans un contrat conclu entre personnes se trouvant dans
serait pas raisonnable de déterminer l’effet du un même pays, une personne physique qui serait capable
comportement de cette partie d’après la loi prévue au selon la loi de ce pays ne peut invoquer son incapacité
paragraphe précédent. résultant d’une autre loi que si, au moment de la
Article 9 conclusion du contrat, le cocontractant a connu cette
Forme incapacité ou ne l’a ignorée qu’en raison d’une
imprudence de sa part.
1. Un contrat conclu entre des personnes qui se trouvent
dans un même pays est valable quant à la forme s’il Article 12
satisfait aux conditions de forme de la loi qui le régit au Cession de créance
fond en vertu de la présente Convention ou de la loi du
pays dans lequel il a été conclu. 1. Les obligations entre le cédant et le cessionnaire d’une
2. Un contrat conclu entre des personnes qui se trouvent créance sont régies par la loi qui, en vertu de la présente
dans des pays différents est valable quant à la forme s’il Convention, s’applique au contrat qui les lie.
satisfait aux conditions de forme de la loi qui le régit au 2. La loi qui régit la créance cédée détermine le caractère
fond en vertu de la présente Convention ou de la loi de cessible de celle-ci, les rapports entre cessionnaire et
l’un de ces pays. débiteur, les conditions d’opposabilité de la cession au
3. Lorsque le contrat est conclu par un représentant, le débiteur et le caractère libératoire de la prestation faite
pays où le représentant se trouve au moment où il agit est par le débiteur.
celui qui doit être pris en considération pour l’application
des paragraphes 1 et 2. Article 13
4. Un acte juridique unilatéral relatif à un contrat conclu Subrogation
ou à conclure est valable quant à la forme s’il satisfait
aux conditions de forme de la loi qui régit ou régirait au 1. Lorsqu’en vertu d’un contrat, une personne, le
fond le contrat en vertu de la présente Convention ou de créancier, a des droits à l’égard d’une autre personne, le
la loi du pays dans lequel cet acte est intervenu. débiteur, et qu’un tiers a l’obligation de désintéresser le
5. Les dispositions des paragraphes précédents ne créancier ou encore que le tiers a désintéressé le créancier
s’appliquent pas aux contrats qui entrent dans le champ en exécution de cette obligation, la loi applicable à cette
d’application de l’article 5, conclus dans les circonstances obligation du tiers détermine si celui-ci peut exercer en
qui y sont décrites au paragraphe 2. La forme de ces tout ou en partie les droits détenus par le créancier contre
contrats est régie par la loi du pays dans lequel le le débiteur selon la loi régissant leurs relations.
consommateur a sa résidence habituelle. 2. La même règle s’applique lorsque plusieurs personnes
6. Nonobstant les dispositions des quatre premiers sont tenues de la même obligation contractuelle et que le
paragraphes du présent article, tout contrat ayant pour créancier a été désintéressé par l’une d’elles.
objet un droit réel immobilier ou un droit d’utilisation
d’un immeuble est soumis aux règles de forme Article 14
impératives de la loi du pays où l’immeuble est situé, Preuve
pour autant que selon cette loi elles s’appliquent
indépendamment du lieu de conclusion du contrat et de la 1. La loi régissant le contrat en vertu de la présente
loi le régissant au fond. Convention s’applique dans la mesure où, en matière
d’obligations contractuelles, elle établit des présomptions
Article 10 légales ou répartit la charge de la preuve.
Domaine de la loi du contrat 2. Les actes juridiques peuvent être prouvés par tout
mode de preuve admis soit par la loi du for, soit par l’une
1. La loi applicable au contrat en vertu des articles 3 à 6 des lois visées à l’article 9, selon laquelle l’acte est
et de l’article 12 de la présente Convention régit valable quant à la forme, pour autant que la preuve puisse
notamment: être administrée selon ce mode devant le tribunal saisi.
a) Son interprétation;
b) L’exécution des obligations qu’il engendre; Article 15
c) Dans les limites des pouvoirs attribués au tribunal Exclusion du renvoi
par sa loi de procédure, les conséquences de
l’inexécution totale ou partielle de ces obligations, y Lorsque la présente Convention prescrit l’application de
compris l’évaluation du dommage dans la mesure où la loi d’un pays, elle entend les règles de droit en vigueur
des règles de droit la gouvernent; dans ce pays à l’exclusion des règles de droit

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CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

international privé. 2. Tout Etat contractant pourra également, en notifiant


une extension de la Convention conformément à l’article
Article 16 27, paragraphe 2, faire une ou plusieurs de ces réserves
Ordre public avec effet limité aux territoires ou à certains des
territoires visés par l’extension.
L’application d’une disposition de la loi désignée par la 3. Tout Etat contractant pourra à tout moment retirer une
présente convention ne peut être écartée que si cette réserve qu’il aura faite; l’effet de la réserve cessera le
application est manifestement incompatible avec l’ordre premier jour du troisième mois du calendrier après la
public du for. notification du retrait.

Article 17 TITRE III


Application dans le temps CLAUSES FINALES

La Convention s’applique dans un Etat contractant aux Article 23


contrats conclus après son entrée en vigueur pour cet
Etat. 1. Si, après la date d’entrée en vigueur de la présente
Convention à son égard, un Etat contractant désire
Article 18 adopter une nouvelle règle de conflit de lois pour une
Interprétation uniforme catégorie particulière de contrats entrant dans le champ
d’application de la Convention, il communique son
Aux fins de l’interprétation et de l’application des règles intention aux autres Etats signataires par l’intermédiaire
uniformes qui précèdent, il sera tenu compte de leur du Secrétaire général du Conseil des Communautés
caractère international et de l’opportunité de parvenir à européennes.
l’uniformité dans la façon dont elle sont interprétées et 2. Dans un délai de six mois à partir de la communication
appliquées. faite au Secrétaire général, tout Etat signataire peut
demander à celui-ci d’organiser des consultations entre
Article 19 Etats signataires en vue d’arriver à un accord.
Systèmes non unifiés 3. Si, dans ce délai, aucun Etat signataire n’a demandé la
consultation ou si, dans les deux ans qui suivront la
1. Lorsqu’un Etat comprend plusieurs unités territoriales communication faite au Secrétaire général, aucun accord
dont chacune a ses propres règles en matière n’est intervenu à la suite des consultations, l’Etat
d’obligations contractuelles, chaque unité territoriale est contractant peut modifier son droit. La mesure prise par
considérée comme un pays aux fins de la détermination cet Etat est portée à la connaissance des autres Etats signa
de la loi applicable selon la présente Convention. taires par l’intermédiaire du Secrétaire général du Conseil
2. Un Etat dans lequel différentes unités territoriales ont des Communautés européennes.
leurs propres règles de droit en matière d’obligations
contractuelles ne sera pas tenu d’appliquer la présente Article 24
Convention aux conflits de lois intéressant uniquement
ces unités territoriales. 1. Si, après la date d’entrée en vigueur de la présente
Convention à son égard, un Etat contractant désire
Article 20 devenir partie à une convention multilatérale dont l’objet
Priorité du droit communautaire principal ou l’un des objets principaux est un règlement
de droit international privé dans l’une des matières régies
La présente Convention ne préjuge pas l’application des par la présente Convention, il est fait application de la
dispositions qui, dans des matières particulières, règlent procédure prévue à l’article 23. Toutefois, le délai de
les conflits de lois en matière d’obligations contractuelles deux ans, prévu au paragraphe 3 de l’article 23, est
et qui sont ou seront contenues dans les actes émanant ramené à un an.
des institutions des Communautés européennes ou dans 2. La procédure prévue au paragraphe précédent n’est pas
les législations nationales harmonisées en exécution de suivie si un Etat contractant ou l’une des Communautés
ces actes. européennes sont déjà parties à la convention
multilatérale ou si l’objet de celle-ci est de réviser une
Article 21 convention à laquelle l’Etat intéressé est partie ou s’il
Relations avec d’autres conventions s’agit d’une convention conclue dans le cadre des traités
instituant les Communautés européennes.
La présente Convention ne porte pas atteinte à
l’application des conventions internationales auxquelles Article 25
un Etat contractant est ou sera partie.
Lorsqu’un Etat contractant considère que l’unification
Article 22 réalisée par la présente Convention est compromise par la
Réserves conclusion d’accords non prévus à l’article 24,
paragraphe 1, cet Etat peut demander au Secrétaire
1. Tout Etat contractant, au moment de la signature, de la général du Conseil des Communautés européennes
ratification, de l’acceptation ou de l’approbation, pourra d’organiser une consultation entre les Etats signataires de
se réserver le droit de ne pas appliquer: la présente Convention.
a) L’article 7, paragraphe 1;
b) L’article 10, paragraphe 1, lettre e. Article 26

274
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

européennes. Elle pourra se limiter à l’un des territoires


Chaque Etat contractant peut demander la révision de la auxquels la Convention aurait été étendue par application
présente Convention. Dans ce cas, une conférence de de l’article 27, paragraphe 2.
révision est convoquée par le Président du Conseil des 4. La dénonciation n’aura d’effet qu’à l’égard de l’Etat
Communautés européennes. qui l’aura notifiée. La Convention restera en vigueur pour
les autres Etats contractants.
Article 27
Article 31
1. La présente Convention s’applique au territoire
européen des Etats contractants, y compris le Groenland, Le Secrétaire général du Conseil des Communautés
et à l’ensemble du territoire de la République française. européennes notifiera aux Etats parties au traité instituant
2. Par dérogation au paragraphe 1: la Communauté économique européenne:
a) La présente Convention ne s’applique pas aux îles a) Les signatures;
Féroé, sauf déclaration contraire du Royaume du b) Le dépôt de tout instrument de ratification,
Danemark; d’acceptation ou d’approbation;
b) La présente Convention ne s’applique pas aux c) La date d’entrée en vigueur de la présente
territoires européens situés hors du Royaume-Uni et Convention;
dont celui-ci assume les relations internationales, sauf d) Les communications faites en application des
déclaration contraire du Royaume-Uni pour un tel articles 23, 24, 25, 26, 27 et 30;
territoire; e) Les réserves et le retrait des réserves mentionnées à
c) La présente Convention s’applique aux Antilles l’article 22.
néerlandaises, si le Royaume des Pays-Bas fait une
déclaration à cet effet. Article 32
3. Ces déclarations peuvent être faites à tout moment, par
voie de notification au Secrétaire général du Conseil des Le protocole annexé à la présente Convention en fait
Communautés européennes. partie intégrante.
4. Les procédures d’appel introduites au Royaume-Uni
contre des décisions rendues par les tribunaux situés dans Article 33
un des territoires visés au paragraphe 2, lettre b, sont
considérées comme des procédures se déroulant devant La présente Convention, rédigée en un exemplaire unique
ces tribunaux. en langues allemande, anglaise, danoise, française,
irlandaise, italienne et néerlandaise, ces textes faisant
Article 28 également foi, sera déposée dans les archives du
Secrétariat général du Conseil des Communautés
1. La présente Convention est ouverte à compter du 19 européennes. Le Secrétaire général en remettra une copie
juin 1980 à la signature des Etats parties au traité certifiée conforme à chacun des Gouvernements des Etats
instituant la Communauté économique européenne. signataires.
2. La présente Convention sera ratifiée, acceptée ou
approuvée par les Etats signataires. Les instruments de En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet
ratification, d’acceptation ou d’approbation seront effet, ont signé la présente Convention.
déposés auprès du Secrétaire général du Conseil des Fait à Rome, le 19 juin 1980.
Communautés européennes. Pour le Royaume de Belgique.
Pour le Royaume du Danemark.
Article 29 Pour la République fédérale d’Allemagne.
Pour la République française.
1. La présente Convention entrera en vigueur le premier Pour la République d’Irlande.
jour du troisième mois suivant le dépôt du septième Pour la République italienne.
instrument de ratification, d’acceptation ou Pour le Grand-Duché de Luxembourg.
d’approbation. Pour le Royaume des Pays-Bas.
2. La Convention entrera en vigueur pour chaque Etat Pour le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et
signataire ratifiant, acceptant ou approuvant d’Irlande du Nord.
postérieurement le premier jour du troisième mois suivant
le dépôt de son instrument de ratification, d’acceptation PROTOCOLE
ou d’approbation.
Les hautes Parties contractantes sont convenues de la
Article 30 disposition ci-après qui est annexée à la Convention:
Nonobstant les dispositions de la Convention, le
1. La Convention aura une durée de dix ans à partir de la Danemark peut conserver la disposition figurant à
date de son entrée en vigueur conformément à l’article l’article 169 de la <<Solov>> (législation maritime)
29, paragraphe 1, même pour les Etats pour qui elle concernant la loi applicable aux questions relatives au
entrerait en vigueur postérieurement. transport de marchandises par mer et peut modifier cette
2. La Convention sera renouvelée tacitement de cinq ans disposition sans suivre la procédure prévue à l’article 23
en cinq ans sauf dénonciation. de la Convention.
3. La dénonciation sera notifiée, au moins six mois avant
l’expiration du délai de dix ans ou de cinq ans selon le En foi de quoi les soussignés, dûment autorisés à cet
cas, au Secrétaire général du Conseil des Communautés effet, ont signé le présent protocole.

275
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

Fait à Rome, le 19 juin 1980. Déclaration commune


Pour le Royaume de Belgique.
Pour le Royaume du Danemark. Les Gouvernements du Royaume de Belgique, du
Pour la République fédérale d’Allemagne. Royaume du Danemark, de la République fédérale
Pour la République française. d’Allemagne, de la République française, de l’Irlande, de
Pour la République d’Irlande. la République italienne, du Grand-Duché de
Pour la République italienne. Luxembourg, du Royaume des Pays-Bas et du Royaume-
Pour le Grand-Duché de Luxembourg. Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord,
Pour le Royaume des Pays-Bas. Au moment de la signature de la Convention sur la loi
Pour le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et applicable aux obligations contractuelles;
d’Irlande du Nord. Désirant assurer une application aussi efficace que
possible de ses dispositions;
Déclaration commune Soucieux d’éviter que les divergences d’interprétation de
la Convention ne nuisent à son caractère unitaire,
Au moment de procéder à la signature de la Convention se déclarent prêts:
sur la loi applicable aux obligations contractuelles, les 1. A examiner la possibilité d’attribuer certaines
Gouvernements du Royaume de Belgique, du Royaume compétences à la Cour de justice des Communautés
du Danemark, de la République fédérale d’Allemagne, de européennes, et à négocier, le cas échéant, un accord à cet
la République française, de l’Irlande, de la République effet;
italienne, du Grand-Duché de Luxembourg, du Royaume 2. A instituer des contacts périodiques entre leurs
des Pays-Bas et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et représentants.
d’Irlande du Nord.
En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet
I. - Soucieux d’éviter dans toute la mesure du possible la
effet, ont signé la présente déclaration commune.
dispersion des règles de conflit de lois entre de multiples
Fait à Rome, le 19 juin 1980.
instruments et les divergences entre ces règles, souhaitent
Pour le Gouvernement du Royaume de Belgique.
que les institutions des Communautés européennes, dans
Pour le Royaume du Danemark.
l’exercice de leurs compétences sur la base des traités qui
Pour la République fédérale d’Allemagne.
les ont instituées, s’efforcent, lorsqu’il y a lieu, d’adopter
Pour le Gouvernement de la République française.
des règles de conflit qui, autant que possible, soient en
Pour la République d’Irlande.
harmonie avec celles de la Convention;
Pour la République italienne.
II. - Déclarent leur intention de procéder, dès la signature Pour le Gouvernement du Grand-Duché de
de la Convention et en attendant d’être liés par l’article Luxembourg.
24 de la Convention, à des consultations réciproques dans Pour le Royaume des Pays-Bas.
le cas où l’un des Etats signataires désirerait devenir Pour le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et
partie à une convention à laquelle s’appliquerait la d’Irlande du Nord.
procédure prévue audit article;
III. - Considérant la contribution de la Convention sur la Fait à Paris, le 28 février 1991.
loi applicable aux obligations contractuelles à
l’unification des règles de conflits au sein des
Communautés européennes, expriment l’opinion que tout
Etat qui deviendrait membre des Communautés
européennes devrait adhérer à cette Convention. FRANCOIS MITTERRAND
Par le Président de la République:
En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet
effet, ont signé la présente déclaration commune. Le Premier ministre,
Fait à Rome, le 19 juin 1980. MICHEL ROCARD
Pour le Gouvernement du Royaume de Belgique.
Pour le Royaume du Danemark. Le ministre d’Etat, ministre des affaires étrangères,
Pour la République fédérale d’Allemagne. ROLAND DUMAS
Pour le Gouvernement de la République française.
Pour la République d’Irlande. (1) La présente convention entrera en vigueur le 1er avril
Pour la République italienne. 1991.
Pour le Gouvernement du Grand-Duché de
Luxembourg.
Pour le Royaume des Pays-Bas.
Pour le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et
d’Irlande du Nord.

276
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

FORMULE 265
DECLARATION AU COURS DU MARIAGE
DE LA LOI APPLICABLE AU REGIME MATRIMONIAL

Époux britanniques désirant soumettre


leurs immeubles présents et futurs à la loi française.

L’an …………… le ………………..

Maître ……………….., Notaire à ………………..

A reçu le présent acte authentique à la requête de

Monsieur John SMITH et de Madame Pamela BIRD son épouse demeurant à Londres,
rue ………………..

Nés :

- le mari à …………………
- l’épouse à ………………..

Les époux sont de nationalité britannique.

EXPOSE

Monsieur et Madame SMITH se sont mariés à Londres le 8 avril 1998 sans avoir fait précéder
leur union d’un contrat de mariage. Les époux s’étant fixés dans cette ville après leur mariage,
se trouvent mariés en vertu de l’article 4 de la Convention de la Haye du 14 mars 1978 sur la
loi applicable aux régimes matrimoniaux, sous le régime matrimonial britannique de la
séparation des biens, régime légal de leur première résidence habituelle après leur mariage.

Ceux-ci ayant déjà acquis un immeuble en France et envisageant de se porter acquéreur d’un
autre dans ce pays souhaitent soumettre leurs immeubles présents et futurs à la loi française.

CHOIX D’UN NOUVEAU REGIME


(MISE EN COMMUNAUTE DES IMMEUBLES SITUES EN FRANCE)

En vertu de l’article 6 alinéa 3 de la Convention de la Haye du 14 mars 1978, les époux


entendent soumettre leurs immeubles présents et futurs situés en France à la loi française tout
en demeurant soumis au régime légal britannique de la séparation des biens.

265
Juris-Classeur Formulaire Notarial, v° Contrats de mariage, Fasc. 95 ; Rep. Not. Defrénois 1999, art. 36951

277
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

- ADOPTION D’UN REGIME MATRIMONIAL

Les époux adoptent la communauté universelle telle qu’elle résulte des articles 1526 et
suivants du Code civil français pour leurs immeubles situés en France.

- ATTRIBUTION DE LA COMMUNAUTE AU SURVIVANT

Le époux déclarent en outre que tous les immeubles entrés dans la communauté universelle
seront recueillis par le survivant d’eux en cas de dissolution de la communauté par décès à
charge d’acquitter toutes les dettes conformément à l’article 1524 du Code civil et ce, sans
que les héritiers du conjoint prédécédé aient le droit de faire la reprise des apports et capitaux
tombés dans la communauté du chef de leur auteur. L’époux bénéficiera de cette stipulation
qu’il existe ou non des enfants du mariage.

La présente attribution intégrale de la communauté au survivant ne produira pas d’effet dès


lors qu’au jour du décès du prémourant des époux, une requête initiale en divorce ou en
séparation de corps aura été présentée au juge aux affaires familiales par l’un ou l’autre des
époux.

- ABSENCE D’HOMOLOGATION JUDICIAIRE

Les articles 11 et 13 de la convention de la Haye du 4 mars 1978 ne prévoyant pas la nécessité


d’un contrôle judiciaire lors de la désignation ou du changement de la loi applicable, les
époux seront, à compter des présentes, soumis au régime français de la communauté
universelle des biens avec clause d’attribution intégrale de la communauté au survivant,
uniquement en ce qui concerne les biens et droits immobiliers situés en France.

- PUBLICITE FONCIERE

La mutation de droits réels immobiliers pouvant résulter de cet acte sera publiée au Bureau
des hypothèques.

- MENTION

Conformément aux dispositions de l’article 1397-3 alinéa 2 du Code civil et de l’article 1303-
1 alinéa 2 du Nouveau Code de procédure civile, les époux feront mentionner au Répertoire
civil annexe tenu au Service central du Ministère des Affaires Étrangères à Nantes, leur
déclaration au moyen d’un certificat qui leur sera délivré par le notaire.

L’acte a été reçu par le notaire et passé en la présence réelle et simultanée des parties (remise
par le notaire du certificat aux parties).

278
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

REGIME MATRIMONIAL 1

AFRIQUE

AFRIQUE DU SUD Communauté de biens, profits et pertes


ALGERIE Séparation de biens
ANGOLA Choix au jour du mariage entre séparation de biens et
communauté d’acquêts
BENIN Séparation de biens
BOTSWANA Séparation de biens
BURKINA FASO Communauté d’acquêts. Si option pour polygamie : séparation de
biens
BURUNDI Communauté d’acquêts
CAMEROUN Communauté sous condition de participation, mais séparation de
biens en droit coutumier
CAP VERT Communauté réduite aux acquêts
CENTRAFRIQUE En attente
COMORES Séparation de biens
CONGO (DEM. REP.) Communauté réduite aux acquêts
CONGO BRAZZA VILLE Communauté d’acquêts
COTE D’IVOIRE Communauté d’acquêts
DJIBOUTI Séparation de biens
ÉGYPTE Séparation de biens
ÉRYTHREE Hauts plateaux : communauté de biens
Basses terres musulmanes : séparation de biens
ÉTHIOPIE Communauté d’acquêts
GABON Séparation de biens
GAMBIE Séparation de biens
GHANA Séparation de biens
GUINEE Séparation de biens
GUINEE BISSAU En attente
GUINEE ÉQUATORIALE Soit la société d’acquêts du Code civil portugais en sa teneur au
12/10/1968 (date de l’Indépendance), soit Droits coutumiers
(séparatistes)
KENYA Séparation de biens
LESOTHO Séparation de biens
LIBERIA Séparation de biens
LIBYE Séparation de biens
MADAGASCAR Communauté d’acquêts avec partage par tiers
MALAWI Séparation de biens
MALI Séparation de biens
MAROC Droit musulman : Séparation de biens
Droit israélite : Régime séparatiste prévu dans la Kétouba
MAURICE (ILE) Communauté hormis choix de la séparation de biens par
déclaration de l’épouse dans l’acte de mariage
MAURITANIE Séparation de biens
MOZAMBIQUE Communauté réduite aux acquêts
NAMIBIE En attente
NIGER Communauté meubles et acquêts, hormis application de la
séparation de biens en droit coutumier
NIGERIA Séparation de biens
1
Avec l’aimable autorisation du Président d’Intranot,
communiqué par ww.intranot.fr
279
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

OUGANDA Séparation de biens


RWANDA Communauté universelle
SENEGAL Séparation de biens
SEYCHELLES Communauté de biens
SIERRA LEONE Séparation de biens
SOMALIE Séparation de biens
SOUDAN Séparation de biens
ST THOMAS ET PRINCE Communauté d’acquêts
(SAO TOME E PRINCIPE)
SWAZILAND Séparation de biens
TANZANIE Séparation de biens
TOGO Séparation de biens
TUNISIE Séparation de biens
ZAMBIE Séparation de biens
ZIMBABWE Séparation de biens

ÉTATS-UNIS – USA

ALABAMA Séparation de biens


ALASKA Séparation de biens
ARIZONA Communauté d’acquêts
ARKANSAS Séparation de biens
CALIFORNIE Communauté d’acquêts
CAROLINE DU NORD Séparation de biens
CAROLINE DU SUD Séparation de biens
COLORADO Séparation de biens
CONNECTICUT Séparation de biens
DAKOTA DU NORD Séparation de biens
DAKOTA DU SUD Séparation de biens
DELAWARE Séparation de biens
DISTRICT OF COLUMBIA Séparation de biens
FLORIDE Séparation de biens
GEORGIE USA Séparation de biens
HAWAII Séparation de biens
IDAHO Communauté de biens
ÎLES VIERGES Séparation de biens
ILLINOIS Séparation de biens
INDIANA Séparation de biens
IOWA Séparation de biens
KANSAS Séparation de biens
KENTUCKY Séparation de biens
LOUISIANE Communauté d’acquêts
MAINE Séparation de biens
MARYLAND Séparation de biens
MASSACHUSETTS Séparation de biens
MICHIGAN Séparation de biens
MINNESOTA Séparation de biens
MISSISSIPPI Séparation de biens
MISSOURI Séparation de biens
MONTANA Séparation de biens
NEBRASKA Séparation de biens
NEVADA Communauté d’acquêts

280
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

NEW HAMPSHIRE Séparation de biens


NEW JERSEY Séparation de biens
NEW YORK Séparation de biens
NOUVEAU MEXIQUE Communauté d’acquêts
OHIO Séparation de biens
OKLAHOMA Séparation de biens
OREGON Séparation de biens
PENNSYLVANIA Séparation de biens
RHODE ISLAND Séparation de biens
TENNESSEE Séparation de biens
TEXAS Communauté d’acquêts
UTAH Séparation de biens
VERMONT Séparation de biens
VIRGINIE Séparation de biens
VIRGINIE OUEST Séparation de biens
WASHINGTON Communauté d’acquêts
WISCONSIN Communauté d’acquêts depuis le 1er janvier 1986
WYOMING Séparation de biens

CANADA (PROVINCES ET TERRITOIRES)

ALBERTA Séparation de biens avec partage des biens familiaux


COLOMBIE BRITANNIQUE Séparation de biens avec partage des biens familiaux
ÎLE DU PRINCE ÉDOUARD Séparation de biens avec partage des biens familiaux et
commerciaux
MANITOBA Séparation de biens avec partage des biens familiaux et
commerciaux
NOUVEAU BRUNSWICK Séparation de biens avec partage des biens familiaux
NOUVELLE ÉCOSSE Séparation de biens avec partage des biens familiaux
NUNAVUT Séparation de biens avec partage des biens familiaux
ONTARIO Séparation de biens avec partage des biens familiaux
QUEBEC Société d’acquêts
SAS KATCHEWAN Séparation de biens avec partage des biens familiaux
TERRE NEUVE Séparation de biens avec partage des biens familiaux
TERRITOIRE DU NORD OUEST Séparation de biens avec partage des biens familiaux
YUKON Séparation de biens avec partage des biens familiaux

CAUCASE ET ASIE CENTRALE

ARMENIE Communauté d’acquêts


AZERBAÏDJAN En attente
GEORGIE En attente
KAZAKHSTAN Communauté d’acquêts
KIRGHIZISTAN En attente
OUZBEKISTAN En attente
TADJIKISTAN Séparation de biens
TURKMENISTAN Communauté d’acquêts

281
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Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

MOYEN ORIENT

ARABIE SAOUDITE Séparation de biens


BAHREÏN Séparation de biens
ÉMIRATS ARABES UNIS Séparation de biens
IRAK Séparation de biens
IRAN Séparation de biens
ISRAËL Participation aux acquêts
JORDANIE Séparation de biens
KOWEÏT Séparation de biens
LIBAN Séparation de biens
OMAN Séparation de biens
PALESTINE Séparation de biens
QATAR Séparation de biens
SYRIE Séparation de biens
YEMEN Séparation de biens

ESPAGNE

ARAGON Communauté d’acquêts


BALEARES Séparation de biens
BISCAVE ET ALAVA Communauté d’acquêts
CATALOGNE Séparation de biens
CERTAINES COMMUNES DE Communauté quasi-universelle (Fuero de Beylio)
BADAJOZ
NAVARRE Communauté d’acquêts

AMERIQUE

ARGENTINE Société d’acquêts


BOLIVIE Communauté d’acquêts
BRESIL Communauté partielle
CANADA Voir tableau
CHILI Société d’acquêts
COLOMBIE Société d’acquêts
COSTA RICA Séparation de biens
ÉQUATEUR Société d’acquêts
ÉTATS-UNIS Voir tableau
GUATEMALA Communauté d’acquêts
HONDURAS Séparation de biens
MEXIQUE Voir tableau
NICARAGUA Communauté profits et pertes
PANAMA Séparation de biens
PARAGUAY Communauté d’acquêts
PEROU Société d’acquêts
SAN SALVADOR Séparation de biens
URUGUAY Société d’acquêts
VENEZUELA Société d’acquêts

282
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

CARAÏBES

ANGUILLA En attente
ANTIGUA ET BARBUDA Séparation de biens
ANTILLES NEERLANDAISES Communauté universelle différée
ARUBA Communauté universelle différée
BAHAMAS Séparation de biens
BARBADE Séparation de biens
BELIZE Séparation de biens
BERMUDES Séparation de biens
CUBA Communauté d’acquêts
DOMINIQUE (LA) Séparation de biens
GRENADE Séparation de biens
GUYANA Séparation de biens
HAÏTI Communauté meubles et acquêts
ÎLES CAYMAN Séparation de biens
ÎLES TURKS ET CAICOS Séparation de biens
ÎLES VIERGES BRITANNIQUES Séparation de biens
JAMAÏQUE Séparation de biens
MONTSERRAT En attente
PUERTO RICO Communauté d’acquêts
REPUBLIQUE DOMINICAINE Communauté meubles et acquêts
SAINTE LUCIE En attente
ST KITTS ET NEVIS Séparation de biens
ST VINCENT ET GRENADINE Séparation de biens
SURINAM Communauté universelle différée
TRINITE ET TOBAGO Séparation de biens

EUROPE

ALBANIE Communauté d’acquêts


ALLEMAGNE Participation aux acquêts
ANDORRE En attente
AUTRICHE Séparation de biens
BELGIQUE Communauté d’acquêts
BIELORUSSIE Communauté d’acquêts
BOSNIE HERZEGOVINE Communauté d’acquêts
BULGARIE Communauté d’acquêts
CHYPRE Séparation de biens
CROATIE Communauté d’acquêts
DANEMARK Communauté universelle différée
ESPAGNE Voir tableau
ESTONIE Communauté d’acquêts
FINLANDE Participation aux acquêts
FRANCE Communauté réduite aux acquêts
GRECE Séparation de biens
HONGRIE Communauté de biens
IRLANDE Séparation de biens
ISLANDE Communauté universelle différée
ITALIE Communauté d’acquêts

283
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

LETTONIE Communauté d’acquêts


LIECHTENSTEIN Séparation de biens
LITUANIE Communauté d’acquêts
LUXEMBOURG Communauté d’acquêts
MACEDOINE Communauté d’acquêts
MALTE Communauté d’acquêts
MOLDAVIE Communauté réduite aux acquêts
MONACO Séparation de biens
NORVEGE Séparation de biens avec participation aux augments
PAYS-BAS Communauté universelle différée
POLOGNE Communauté d’acquêts
PORTUGAL Communauté d’acquêts
REPUBLIQUE TCHEQUE Communauté d’acquêts
ROUMANIE Communauté d’acquêts
ROYAUME UNI Séparation de biens
RUSSIE Communauté d’acquêts
SAN MARIN Communauté d’acquêts
SLOVAQUIE Communauté d’acquêts
SLOVENIE Communauté d’acquêts
SUEDE Communauté universelle différée
SUISSE Participation aux acquêts
TURQUIE Séparation de biens
UKRAINE Communauté d’acquêts
VATICAN Séparation de biens
YOUGOSLAVIE Communauté d’acquêts

ASIE ET PACIFIQUE

AFGHANISTAN Séparation de biens


AUSTRALIE Séparation de biens (toute province)
BANGLADESH Séparation de biens
BHOUTAN En attente
BIRMANIE Époux bouddhistes : communauté universelle à parts inégales
BRUNEI Séparation de biens
CAMBODGE Communauté
CHINE Communauté d’acquêts
COOK ÎLES Séparation de biens
COREE NORD En attente
COREE SUD Séparation de biens
FIDJI ÎLES Séparation de biens
GUAM Séparation de biens
HONG-KONG Séparation de biens
INDE Séparation de biens
INDONESIE Variable :
- époux européens et étrangers orientaux chinois : communauté
universelle différée ;
- indonésiens chrétiens : communauté d’acquêts,
- indonésiens musulmans : séparation de biens,
- indonésiens indigènes : séparation de biens du droit coutumier
avec, en certains cas, société d’acquêts.
JAPON Séparation de biens
KIRIBATI Séparation de biens

284
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

LAOS Communauté d’acquêts


MALAISIE Séparation de biens
MALDIVES Séparation de biens
MARIANNE ÎLES Séparation de biens
MARSHALL ÎLES Séparation de biens
MAYOTTE Droit français, hormis droit coutumier
MICRONESIE Séparation de biens
MONGOLIE Communauté
NAURU Séparation de biens
NEPAL Séparation de biens
NIUE Séparation de biens
NOUVELLE CALEDONIE Droit français, hormis droit coutumier
NOUVELLE ZELANDE Séparation de biens
PAKISTAN Séparation de biens
PAPOUASIE NOUVELLE GUINEE Séparation de biens
PHILIPPINES Communauté d’acquêts
SALOMON ÎLES Séparation de biens
SAMOA AMERICAN OUEST Séparation de biens
SINGAPOUR Séparation de biens
SRI LANKA Séparation de biens
TAHITI Droit français
TAIWAN Union des biens (régimes séparatiste)
THAÏLANDE Communauté d’acquêts
TONGA Séparation de biens
TUVALU Séparation de biens
VANUATU Communauté
VIETNAM Communauté quasi-universelle
WALLIS ET FUTUNA Droit français, hormis droit coutumier

285
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

REGLE DE CONFLIT EN MATIERE DE SUCCESSION 1

PAYS CONNAISSANT LE PRINCIPE DE LA PLURALITE DES SUCCESSIONS :

- Loi du domicile pour les meubles, loi de la situation des biens pour les immeubles :

Afrique du Sud, Australie, Bahamas, Belgique, Biélorussie, Canada, Centrafrique, Chine,


Chypre, République du Congo, Costa Rica, Côte d’Ivoire, Estonie, États-unis, France, Gabon,
Haïti, Inde, Israël, Kenya, Islande, Lituanie, Luxembourg, Madagascar, Malte, Île Maurice,
Moldavie, Nouvelle Zélande, Paraguay, Royaume Uni, Russie, Soudan, Uruguay.

- Loi nationale pour les meubles, loi de la situation des biens pour les immeubles :

Bénin, Bulgarie, Cameroun, Erie Moldavie, Monaco, Roumanie, Thaïlande.

PAYS CONNAISSANT LE PRINCIPE DE L’UNITE DE LA SUCCESSION :

- Loi nationale :

Algérie, Allemagne, Andorre, Autriche, Bulgarie, Burkina Faso, Croatie, Cuba, Danemark 2,
Égypte, Espagne, Finlande 2, Ghana, Grèce, Hongrie, Indonésie, Iran, Italie, Japon, Jordanie,
Liban, Liechtenstein, Mali, Maroc, Mauritanie, Niger, Pays-Bas (application de la convention de la
Haye) Philippine, Pologne Portugal, Sénégal, Serbie, Slovénie, Slovaquie, Suède 2, Surinam,
Tchèque, Tunisie, Turquie, Vatican.

- Loi du domicile :

Argentine, Brésil, Chili, Colombie, Danemark, Équateur, El Salvador, Finlande 2, Islande,


Norvège 2, Suisse, Ukraine.

- Loi de situation des biens pour les meubles et les immeubles :

Mexique, Panama, Uruguay, Venezuela.

___________________
1
Avec l’aimable autorisation du Président d’Intranot, communiqué par www.intranot.fr
2
Convention nordique

286
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

LA LEGALISATION DES ACTES NOTARIES 1


(Légalisation des actes notariés ou de la seule signature du notaire)

AFRIQUE

AFRIQUE DU SUD Apostille LIBYE Légalisation


ALGERIE Dispense MADAGASCAR Dispense
ANGOLA Légalisation MALAWI Apostille
BENIN Dispense MALI Dispense
BOTSWANA Apostille MAROC Dispense
BURKINA FASO Dispense MAURICE (ILE) Apostille
BURUNDI Légalisation MAURITANIE Dispense
CAMEROUN Dispense MOZAMBIQUE Légalisation
CAP VERT Légalisation NAMIBIE Apostille
CENTRAFRIQUE Dispense NIGER Dispense
COMORES Légalisation NIGERIA Légalisation
CONGO (DEM. REP.) Légalisation OUGANDA Légalisation
CONGO BRAZZAVILLE Dispense RWANDA Légalisation
COTE D’IVOIRE Dispense SAINT HELENE Apostille
DJIBOUTI Dispense SAO TOME E PRINCIPE Légalisation
ÉGYPTE Dispense SENEGAL Dispense
ÉRYTHREE Légalisation SEYCHELLES Apostille
ÉTHIOPIE Légalisation SIERRA LEONE Légalisation
GABON Dispense SOMALIE Légalisation
GAMBIE Légalisation SOUDAN Légalisation
GHANA Légalisation SWAZILAND Apostille
GUINEE Légalisation TANZANIE Légalisation
GUINEE BISSAU Légalisation TCHAD Dispense
GUINEE ÉQUATORIALE Légalisation TOGO Dispense
KENYA Légalisation TUNISIE Dispense
LESOTHO Apostille ZAMBIE Légalisation
LIBERIA Apostille ZIMBABWE Légalisation

USA

ALABAMA Apostille HAWAII Apostille


ALASKA Apostille IDAHO Apostille
ARIZONA Apostille ILLINOIS Apostille
ARKANSAS Apostille INDIANA Apostille
CALIFORNIE Apostille IOWA Apostille
CAROLINE DU NORT Apostille KANSAS Apostille
CAROLINE DU SUD Apostille KENTUCKY Apostille
COLORADO Apostille LOUISIANE Apostille
CONNECTICUT Apostille MAINE Apostille
DAKOTA DU NORD Apostille MARYLAND Apostille
DAKOTA DU SUD Apostille MASSACHUSETTS Apostille
DELAWARE Apostille MICHIGAN Apostille
DISTRICT OF COLUMBIA Apostille MINNESOTA Apostille
FLORIDE Apostille MISSISSIPPI Apostille
GEORGIE Apostille MISSOURI Apostille

1
Avec l’aimable autorisation du Président d’Intranot, 287
communiqué par www.intranot.fr
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

MONTANA Apostille RHODE ISLAND Apostille


NEBRASKA Apostille TENNESSEE Apostille
NEVADA Apostille TEXAS Apostille
NEW HAMPSHIRE Apostille UTAH Apostille
NEW JERSEY Apostille VERMONT Apostille
NEW YORK Apostille VIRGIN ISLANDS Apostille
NOUVEAU MEXIQUE Apostille VIRGINIE Apostille
OHIO Apostille VIRGINIE OUEST Apostille
OKLAHOMA Apostille WASHINGTON Apostille
OREGON Apostille WISCONSIN Apostille
PENNSYLVANIA Apostille WYOMING Apostille
PUERTO RICO Apostille

CANADA (PROVINCES)

ALBERTA Légalisation ONTARIO Légalisation


COLOMBIE BRITANNIQUE Légalisation QUEBEC Légalisation
ÎLE DU PRINCE ÉDOUARD Légalisation SAS KATCHEWAN Légalisation
MANITOBA Légalisation TERRE NEUVE Légalisation
NOUVEAU BRUNSWICK Légalisation TERRITOIRE DU NORD Légalisation
NOUVELLE ÉCOSSE Légalisation OUEST
NUNAVUT Légalisation YUKON Légalisation

CAUCASE ET ASIE CENTRALE

ARMENIE Apostille KIRGHIZISTAN Légalisation


AZERBAÏDJAN Légalisation OUZBEKISTAN Légalisation
GEORGIE Légalisation TADJIKISTAN Légalisation
KAZAKHSTAN Apostille TURKMENISTAN Légalisation

MOYEN ORIENT

ARABIE SAOUDITE Légalisation KOWEÏT Légalisation


BAHREÏN Légalisation LIBAN Légalisation
ÉMIRATS ARABES UNIS Légalisation OMAN Légalisation
IRAK Légalisation PALESTINE Légalisation
IRAN Légalisation QATAR Légalisation
ISRAËL Apostille SYRIE Légalisation
JORDANIE Légalisation YEMEN Légalisation

AMERIQUE

ARGENTINE Apostille ÉQUATEUR Légalisation


BOLIVIE Légalisation ÉTATS-UNIS Légalisation
BRESIL Dispense FALKLAND (ÎLES) Apostille
CANADA Légalisation GUATEMALA Légalisation
CHILI Légalisation GUYANA Légalisation
COLOMBIE Apostille HONDURAS Légalisation
COSTA RICA Légalisation MEXIQUE Apostille

288
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

NICARAGUA Légalisation SAN SALVADOR Apostille


PANAMA Apostille URUGUAY Légalisation
PARAGUAY Légalisation VENEZUELA Apostille
PEROU Légalisation

CARAÏBES

ANGUILLA Apostille ÎLES CAYMAN Apostille


ANTIGUA ET BARBUDA Apostille ÎLES TURKS ET CAICOS Apostille
ANTILLES NEERLANDAISES Apostille ÎLES VIERGES AMERICAINES Apostille
ARUBA Apostille ÎLES VIERGES Apostille
BAHAMAS Apostille BRITANNIQUES
BARBADE Apostille JAMAÏQUE Légalisation
BELIZE Apostille MONTSERRAT Apostille
BERMUDES Apostille REPUBLIQUE DOMINICAINE Légalisation
CUBA Légalisation SAINTE LUCIE Apostille
DOMINIQUE (LA) Légalisation ST KITTS ET NEVIS Apostille
GRENADE Légalisation ST VINCENT ET GRENADINE Apostille
GUYANA Légalisation SURINAM Apostille
HAÏTI Légalisation TRINITE ET TOBAGO Apostille

EUROPE

ALBANIE Apostille LIECHTENSTEIN Apostille


ALLEMAGNE Dispense LITUANIE Apostille
ANDORRE Apostille LUXEMBOURG Apostille
AUTRICHE Dispense MACEDOINE Dispense
BELGIQUE Dispense MALTE Apostille
BIELORUSSIE Apostille MOLDAVIE Légalisation
BOSNIE HERZEGOVINE Apostille MONACO Dispense
BULGARIE Dispense NORVEGE Apostille DA
CHYPRE Apostille PAYS-BAS Apostille
CROATIE Dispense POLOGNE Légalisation
DANEMARK Dispense PORTUGAL Dispense
ESPAGNE Apostille REPUBLIQUE TCHEQUE Dispense
ESTONIE Apostille ROUMANIE Dispense
FINLANDE Apostille ROYAUME UNI Apostille
GIBRALTAR Apostille RUSSIE Apostille
GRECE Apostille SAINT SIEGE Légalisation
GROENLAND Légalisation SAN MARIN Dispense
GUERNESEY Apostille SERBIE MONTENEGRO Apostille
HONGRIE Dispense SLOVAQUIE Dispense
ÎLE DE MAN Apostille SLOVENIE Dispense
ÎLE FEROE Légalisation SUEDE Apostille
IRLANDE Dispense SUISSE Apostille
ISLANDE Légalisation TURQUIE Dispense
ITALIE Dispense UKRAINE Apostille
JERSEY Apostille VATICAN Légalisation
LETTONIE Apostille YOUGOSLAVIE Apostille

289
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

ASIE ET PACIFIQUE

AFGHANISTAN Légalisation MALDIVES Légalisation


AUSTRALIE Apostille MARIANNE ÎLES Apostille
BANGLADESH Légalisation MARSHALL ÎLES Apostille
BELAU Légalisation MICRONESIE Légalisation
BHOUTAN Légalisation MONGOLIE Légalisation
BIRMANIE Légalisation NAURU Légalisation
BRUNEI Apostille NEPAL Légalisation
CAMBODGE Légalisation NIUE Apostille
CHINE Dispense NOUVELLE CALEDONIE Sans objet
CHINE (HONG-KONG) Apostille NOUVELLE ZELANDE Apostille
COOK ÎLES Apostille PAPOUASIE NOUVELLE Légalisation
COREE NORD Légalisation GUINEE
COREE SUD Légalisation PHILIPPINES Légalisation
FIDJI ÎLES Apostille PITCAIRN Légalisation
GEORGIE DU SUD Apostille SALOMON ÎLES Légalisation
GUAM Apostille SAMOA AMERICAN OUEST Apostille
HONG-KONG Apostille SINGAPOUR Légalisation
INDE Légalisation SRI LANKA Légalisation
Apostille à comp- TAHITI Apostille
ter du 14/07/2005 TAIWAN Légalisation
INDONESIE Légalisation THAÏLANDE Légalisation
JAPON Apostille TONGA Apostille
KIRIBATI Légalisation TUVALU Légalisation
LAOS Légalisation VANUATU Légalisation
MACAO Apostille VIETNAM Légalisation
MALAISIE Légalisation WALLIS ET FUTUNA Sans objet

290
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

AUTORITES CHARGEES
DE DELIVRER L’APOSTILLE EN EUROPE

Pays Autorités chargées de délivrer l’apostille


ANDORRE Ministères (affaires extérieures, présidence et tourisme, justice et intérieur)
AUTRICHE Tribunaux civils de première instance
CHYPRE Ministère de la justice, Nicosie
ESPAGNE Doyen du collège notarial de la région
ESTONIE Ministère (affaires étrangères, éducation, justice, intérieur, affaires sociales),
Tallinn
FINLANDE Liste de 35 magistrats locaux
GRANDE-BRETAGNE The legalisation office, ministry of foreign affairs, Londres, et 13 autorités
locales d’outre-mer
GRECE Tribunaux de première instance
IRLANDE Ministère des affaires étrangères, Dublin
ISLANDE Ministère des affaires étrangères, Reyjavik
LETTONIE Ministère des affaires étrangères, Riga
LIECHTENSTEIN Chancellerie gouvernementale de la principauté, Vaduz
LITUANIE Ministère des affaires étrangères, Vilnius
LUXEMBOURG Ministère des affaires étrangères, La Valette
NORVEGE Ministère des affaires étrangères, Oslo, et les gouverneurs des 18 départements
PAYS-BAS Greffiers des tribunaux de première instance (15) et 2 autorités locales d’outre-
mer
SAINT-MARIN Secrétaire d’Etat aux affaires étrangères (17 délégataires de sa signature)
SLOVENIE Ministère de la justice et de l’administration, Ljubjana
SUEDE Tout notaire public
SUISSE Liste de 26 autorités cantonales désignées pour la délivrance de l’apostille

291
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

ÂGE DE LA MAJORITE LEGALE 1

AFRIQUE

AFRIQUE DU SUD 18 LESOTHO 21


ALGERIE 19 LIBERIA 21
ANGOLA 18 LIBYE 18
BENIN 21 MADAGASCAR 21
BOTSWANA 21 MALAWI 21
BURKINA FASO 20 MALI 21
BURUNDI Femme 18 MAROC 18
Homme 21 MAURICE (ILE) 18
CAMEROUN 21 MAURITANIE En attente
CAP VERT 18 MOZAMBIQUE 21
CENTRAFRIQUE En attente NAMIBIE 18
COMORES En attente NIGER 18
CONGO (DEM. REP.) 18 NIGERIA 18
CONGO BRAZZA VILLE 18 OUGANDA 18
COTE D’IVOIRE 21 RWANDA 21
DJIBOUTI 18 SENEGAL 21
ÉGYPTE Sur les personnes 18 SEYCHELLES 18
Sur les biens 21 SIERRA LEONE 21
ÉRYTHREE 18 SOMALIE 18
ÉTHIOPIE 18 SOUDAN 18
GABON 21 SWAZILAND 21
GAMBIE 21 TANZANIE 16
GHANA 18 TOGO 21
GUINEE 21 TUNISIE 20
GUINEE BISSAU En attente ZAMBIE 21
GUINEE ÉQUATORIALE 18 ZIMBABWE 18
KENYA 18

ÉTATS-UNIS – USA

ALABAMA 19 ÎLES VIERGES 18


ALASKA 18 ILLINOIS 18
ARIZONA 18 INDIANA 18
ARKANSAS 18 IOWA 18
CALIFORNIE 18 KANSAS 18
CAROLINE DU NORD 18 KENTUCKY 18
CAROLINE DU SUD 18 LOUISIANE 18
COLORADO 21 MAINE 18
CONNECTICUT 18 MARYLAND 18
DAKOTA DU NORD 18 MASSACHUSETTS 18
DAKOTA DU SUD 18 MICHIGAN 18
DELAWARE 18 MINNESOTA 18
DISTRICT OF COLUMBIA 18 MISSISSIPPI 21
FLORIDE 18 MISSOURI 18
GEORGIE USA 18 MONTANA 18
HAWAII 18 NEBRASKA 19
IDAHO 18 NEVADA 18

1
Avec l’aimable autorisation du Président d’Intranot,
communiqué par ww.intranot.fr 292
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

NEW HAMPSHIRE 18 TENNESSEE 18


NEW JERSEY 18 TEXAS 18
NEW YORK 18 UTAH 18
NOUVEAU MEXIQUE 18 VERMONT 18
OHIO 18 VIRGINIE 18
OKLAHOMA 18 VIRGINIE OUEST 18
OREGON 18 WASHINGTON 18
PENNSYLVANIA 21 WISCONSIN 18
RHODE ISLAND 18 WYOMING 18

CANADA (PROVINCES ET TERRITOIRES)

ALBERTA 18 ONTARIO 18
COLOMBIE BRITANNIQUE 19 QUEBEC 18
ÎLE DU PRINCE ÉDOUARD 18 SAS KATCHEWAN 18
MANITOBA 18 TERRE NEUVE 18
NOUVEAU BRUNSWICK 19 TERRITOIRE DU NORD 19
NOUVELLE ÉCOSSE 19 OUEST
NUNAVUT 19 YUKON 19

CAUCASE ET ASIE CENTRALE

ARMENIE 18 KIRGHIZISTAN 18
AZERBAÏDJAN 18 OUZBEKISTAN 16
GEORGIE 18 TADJIKISTAN 18
KAZAKHSTAN 18 TURKMENISTAN 18

MOYEN ORIENT

ARABIE SAOUDITE 18 KOWEÏT 21


BAHREÏN 21 LIBAN 18
ÉMIRATS ARABES UNIS 21 OMAN 18
IRAK 18 PALESTINE En attente
IRAN 18 QATAR 18
ISRAËL 18 SYRIE 18
JORDANIE 18 YEMEN 18

AMERIQUE

ARGENTINE 21 HONDURAS 21
BOLIVIE 21 MEXIQUE 18
BRESIL 21 NICARAGUA 21
CANADA En attente PANAMA 18
CHILI 18 PARAGUAY 20
COLOMBIE 18 PEROU 18
COSTA RICA 18 PORTO RICO 21
ÉQUATEUR 18 SAN SALVADOR 18
ÉTATS-UNIS En attente URUGUAY 18
GUATEMALA 18 VENEZUELA 18

293
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

CARAÏBES

ANGUILLA En attente ÎLES TURKS ET CAICOS En attente


ANTIGUA ET BARBUDA 21 ÎLES VIERGES 18
ANTILLES 21 AMERICAINES
NEERLANDAISES ÎLES VIERGES En attente
ARUBA 21 BRITANNIQUES
BAHAMAS 18 JAMAÏQUE 18
BARBADE 18 MONTSERRAT En attente
BELIZE 18 PUERTO RICO 18
BERMUDES 21 REPUBLIQUE 18
CUBA 18 DOMINICAINE
DOMINIQUE (LA) 18 SAINTE LUCIE 18
GRENADE 21 ST KITTS ET NEVIS 18
GUYANA 18 ST VINCENT ET 18
HAÏTI 18 GRENADINE
ÎLES CAYMAN 18 SURINAM 21
TRINITE ET TOBAGO 18

EUROPE

ALBANIE 18 LETTONIE 18
ALLEMAGNE 18 LIECHTENSTEIN 18
ANDORRE 18 LITUANIE 18
AUTRICHE 18 (depuis le 1er LUXEMBOURG 18
janvier 2001) MACEDOINE 18
BELGIQUE 18 MALTE 18
BIELORUSSIE 18 MOLDAVIE 18
BOSNIE HERZEGOVINE 18 MONACO 18
BULGARIE 18 NORVEGE 18
CHYPRE 18 PAYS-BAS 18
CROATIE 18 POLOGNE 18
DANEMARK 18 PORTUGAL 18
ÉCOSSE 18 REPUBLIQUE TCHEQUE 18
ESPAGNE 18 ROUMANIE 18
ESTONIE 18 ROYAUME UNI 18
FINLANDE 18 RUSSIE 18
FRANCE 18 SAN MARIN 18
GIBRALTAR 17 SERBIE MONTENEGRO 18
GRECE 18 SLOVAQUIE 18
GUERNESEY 18 SLOVENIE 18
HONGRIE 18 SUEDE 18
ÎLE DE MAN 18 SUISSE 18
IRLANDE 18 TURQUIE 18
IRLANDE DU NORD 18 UKRAINE 18
ISLANDE 18 VATICAN 18
ITALIE 18 YOUGOSLAVIE Voir Serbie
JERSEY 18 Monténégro

294
CRIDON-OUEST
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ASIE ET PACIFIQUE

AFGHANISTAN 18 NAURU 21
AUSTRALIE 18 NEPAL 18
BANGLADESH 18 NIUE En attente
BHOUTAN En attente NOUVELLE CALEDONIE 18
BIRMANIE 18 NOUVELLE ZELANDE 20
BRUNEI 18 PAKISTAN Homme 18
CAMBODGE 18 Femme 16
CHINE 18 PAPOUASIE NOUVELLE 18
COOK ÎLES En attente GUINEE
COREE NORD 18 PHILIPPINES 18
COREE SUD 20 SALOMON ÎLES 21
FIDJI ÎLES 18 SAMOA AMERICAN OUEST 21
GUAM 21 SINGAPOUR 21
HONG-KONG 18 SRI LANKA 18
INDE 18 TAHITI 18
INDONESIE Homme 18 TAIWAN 20
Femme 15 THAÏLANDE 18
JAPON 20 TONGA 21
KIRIBATI En attente TUVALU 18
LAOS 18 VANUATU 18
MALAISIE 21 VIETNAM 18 (sauf mariage 20
MALDIVES 18 ans pour le futur
MARIANNE ÎLES En attente mari)
MARSHALL ÎLES En attente WALLIS ET FUTUNA 18
MICRONESIE En attente
MONGOLIE 18

295
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

296
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

ÉTUDES PUBLIÉES DANS LA MÊME COLLECTION

41 — Les Non-Résidents et la Pratique Notariale mai 1981


par : A. Ardillier

42 — Aspects Notariaux de la Loi Quilliot août 1982


par : G. Le Gall

43 — Les Plus-Values Professionnelles février 1983


par : M. Hérail

44 — Les Conjoints d’Artisans et de Commerçants juin 1983


par : A. Ardillier

45 — Les Aides Sociales novembre 1983


par : A. Ardillier

46 — Les Baux Commerciaux février 1984


par : H. Guégan

47 — La Fiscalité de l’Entreprise Agricole mai 1984


par : M. Hérail

48 — La cession du Fonds de Commerce et la Pratique Notariale octobre 1985


par : H. Guégan

49 — La Répartition du Prix de Vente d’un Immeuble janvier 1986


par : H. Guégan

50 — Le Redressement et la Liquidation Judiciaire des Entreprises février 1986


par : J-P. Garçon

51 — Les Aspects Pratiques de la Réforme des Régimes Matrimoniaux octobre 1986


par : A. Ardillier

52 — Les Nouveaux Rapports Locatifs - Loi Méhaignerie janvier 1987


par : G. Le Gall

53 — L’Union Libre mars 1987


par : A. Ardillier

54 — Le Nouveau Statut des Baux d’Habitation - Loi n° 89-462 du 6-7-1989 octobre 1989
par : A. Ardillier

55 — Le Crédit-Bail Immobilier décembre 1989


par : M. Hérail et J-P. Garçon

56 — Les Droits de Préemption des Collectivités Publiques mars 1990


par : Ph. Benoit-Cattin

57 — Les Acquisitions par les Étrangers avril 1990


par : A. Ardillier

58 — Les Quotas Laitiers septembre 1995


par : M. Hérail

59 — Actualités Juridiques et Fiscales novembre 1995


par : MM. A. Ardillier, R. Brochard, J-P. Garçon, A. Houis, et M. Hérail

60 — Les Incidences Patrimoniales de l’Assurance-Vie juin 1996


par : A. Ardillier

297
CRIDON-OUEST
Pratique notariale du Droit International Privé (février 2006)

.../...

61 — Les Constructions Édifiées par le Locataire – aspects juridiques et fiscaux septembre 1996
par : M. Hérail

62 — Les Aides Sociales – Tome I janvier 1997


par : A. Ardillier

62 bis — Les Aides Sociales – Tome II janvier 1998


par : A. Ardillier

63 — La Loi Carrez janvier 1998


par : P. Benoit-Cattin

64 — Le Renouveau du Régime de Séparation de Biens


avec Société d’Acquêts janvier 1998
par : R. Brochard

65 — Aspects Notariaux de la Loi d’orientation agricole mars 2000


par : M. Hérail

66 — Le Pacte Civil de Solidarité mars 2000


par : A. Ardillier

67 — Les Aides Sociales et la Pratique Notariale décembre 2002


par : A. Ardillier

68 — La Loi du 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques


Dispositions intéressant le notariat septembre 2003
par : O. Pecqueur

69 — La protection du logement de la famille octobre 2003


par : A. Ardillier, J-P. Garçon, C. Lesbats, et X.E. de la Robrie

70 — Amiante, plomb, termites mars 2004


par : C. Blond, N. Loussouarn

71 — Le bail commercial novembre 2004


par : S. du Boislouveau

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