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Le deuxième chapitre évoque la notion de système ouvert.

En effet, « le simple n’est plus le fondement de toute


chose, mais un passage, un moment entre des complexités » (27). Il mentionne à ce propos la théorie des systèmes
de Bertalanffy, rappelant que la théorie systémique « a mis au centre de la théorie non une unité élémentaire discrète,
mais un tout qui ne se réduit pas à la somme de ses parties constitutives ». (29). Or, Morin constate deux choses :
d’un part, la permanence des structures malgré la modification des parties constitutives (observation évidente dans
les cas des êtes vivants) « les structures restent les mêmes bien que les constituants soient changeants » (31) ; et le
lien permanent entre un système et son environnement : un système ne peut s’en abstraire, il a une relation
constitutive avec son entour, même si « dans un sens, le système doit se fermer au monde extérieur afin de maintenir
ses structures et son milieu intérieur qui, sinon, se désintégreraient. Mais c’est son ouverture qui permet cette
fermeture » (31). Cela va à l’encontre de la « métaphysique occidentale/cartésienne, pour qui toutes choses vivantes
sont considérées comme closes, et non comme des systèmes organisant leur clôture (c’est-à-dire leur autonomie)
dans et par leur ouverture ». En effet, « les lois d’organisation du vivant ne sont pas d’équilibre, mais de déséquilibre,
rattrapé ou compensé, de dynamisme stabilisé » (31).

E. Morin en déduit alors cette relation : « la réalité est dès lors autant dans le lien que dans la distinction entre le
système ouvert et son environnement » (32). Il s’interroge ensuite sur l’information, qui n’est pas un ingrédient
mais une théorie, et qui est constitutive de l’organisation. Le développement de l’information entraîne le
développement de l’organisation et donc le développement de la complexité. « L’information est un concept
problématique, non un concept solution » (37). S’ensuivent des considérations sur Gödel, sur l’entropie, sur l’auto-
organisation. Il se moque au passage des « prétentieuses études quantitatives sur bulldozers statistiques, guidées par
des pilotes à petite cervelle : relier, relier toujours était une méthode plus riche, au niveau théorique même, que les
théories blindées, bardées épistémologiquement et logiquement, méthodologiquement aptes à tout affronter, sauf
évidemment le réel » (48). Il s’ensuit cette conclusion lumineuse : « la complexité dans un sens a toujours affaire
avec le hasard » (49) qui renvoie à nos considérations sur le risque.

Car au fond, la théorie de la complexité « permet l’émergence, dans son propre champ, de ce qui avait été jusqu’alors
rejeté hors de la science : le monde et le sujet » (52). « La science occidentale s’est fondée sur l’élimination positiviste
du sujet à partir de l’idée que les objets pouvaient être observés et expliqués en tant que tel » (54). « Le sujet est
renvoyé, comme perturbation ou bruit, précisément parce qu’il est indescriptible selon les critères de l’objectivisme
» (55). Mais le sujet « prend sa revanche dans la morale, la métaphysique, l’idéologie ». Et plus loin, « l’objet, à la
limite le monde, devient bruit » (56). « Ainsi apparaît le grand paradoxe : sujet et objet sont indissociables, mais
notre mode de pensée exclut l’un par l’autre » (57). Ce rapport du sujet et de l’objet peut être réconcilié : « ainsi le
monde est à l’intérieur de notre esprit, lequel est à l’intérieur du monde » (60). Cela permet le dépassement si l’effort
porte sur la « relation entre le chercheur et l’objet de sa connaissance, en portant consubstantiellement un principe
d’incertitude et d’autoréférence » (61) ; cela nous permet « de nous distancier à nous même, de nous regarder de
l’extérieur, de nos objectiver » (62), ce qui, d’une certaine façon, renvoie à l’indécidabilité de Gödel.

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