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Science des Matériaux ENIB - 2023/2024

Science des Matériaux

Chapitre 5 – Modification des propriétés mécaniques


des matériaux

Les propriétés des matériaux peuvent être classées sous forme de deux catégories :

- Les propriétés intrinsèques : Ce sont des propriétés qui ne dépendent que de la microstructure,
c.-à-d. du type de liaison et de l’architecture atomique. Elles sont quasiment insensibles à la
présence des défauts dans la structure cristallographique. Elles difficilement modifiable, mais
varient de façon continue en fonction de la composition du mélange. Exemples: module d’Young
E, température de fusion, coefficient de dilatation linéiqueα, …

- Les propriétés extrinsèques : Ce sont des propriétés qui dépendent des défauts cristallographiques
inclus dans le matériau. Elles varient considérablement en fonction de la composition et des
traitements qu’on applique aux matériaux (thermiques ou mécaniques). Exemples: la
conductivité, limite d’élasticité, résistance à la traction, allongement à la rupture, ténacité,
dureté, etc.

Toutes ces propriétés (intrinsèques ou extrinsèques) sont modifiables suite à une variation de la
composition, une modification de la microstructure des traitements mécaniques, des traitements
thermiques ou par renforcement de matériau par des fibres plus rigides (les matériaux composites).

I. Amélioration des propriétés mécaniques des matériaux par durcissement


Une dislocation est un défaut linéaire correspondant à une discontinuité dans l'organisation de la
structure cristalline. Le mouvement des dislocations dans la microstructure induit une déformation
plastique du matériau. Le durcissement est définit ainsi par la réduction ou l’empêchement du
mouvement des dislocations dans le réseau cristallin.

Etant donné que les céramiques sont fragiles et les polymères ont des structures amorphes ou semi
cristallines, le durcissement ne concerne que les métaux et alliages métalliques.

1. Ecrouissage
L’écrouissage est un traitement mécanique permettant de modifier les propriétés mécaniques des
matériaux métallique.

La manière la plus simple de durcir un métal est de profiter de l’augmentation de la contrainte


d’écoulement plastique en fonction de la grandeur de la déformation plastique. Lorsque la

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température est inférieure à 0,3 Tf où Tf est la température de fusion, ce phénomène de consolidation,
ou d’écrouissage, correspond à une augmentation irréversible de la limite d’élasticité.

Lors de la déformation du matériau, on supprime la contrainte avant la rupture au point A, il en


résulte une déformation permanente en B. Puis, on remet l'alliage sous contrainte et on procède de la
même manière, on supprime la contrainte au point C, il en résulte une déformation permanente. On
réitère plusieurs fois cette manoeuvre. Par conséquent, l'écrouissage d'un métal est l’augmentation de
sa limite d’élasticité, sous l'effet d’une déformation plastique, à la suite d’une pré-déformation
permanente. Il permet d'augmenter la dureté du matériau et sa résistance mécanique (limite élastique
et résistance maximale à la traction), avec en contre partie une diminution de sa ductilité (allongement
à la rupture, aptitude à la déformation).

L’augmentation de Re et de Rm est dûe à une diminution de la section du matériau après


déformation plastique permanente.

Explication du phénomène d’écrouissage :

La déformation plastique est associée au mouvement des dislocations. Plus la déformation augmente,
plus la densité des dislocations augmente. La multitude des dislocations, dans la structure, vont former
des obstacles les uns aux autres et vont gêner leurs déplacements respectifs et leurs mouvements
deviennent de plus en plus difficile. Il est donc nécessaire d’augmenter la contraintepour que la
déformation se poursuive.
Ainsi, la perte de mobilité des dislocations entraîne une augmentation de R e et Rm, donc de la dureté,
ce qui constitue l'écrouissage. Par contre, la ductilité et l’allongement maximal à la rupture %A
diminuent.
On définit un taux d’écrouissage :

ou S0 : aire initiale de la section transversale et Sd : aire après déformation

Les propriétés d’un matériau dépendent de taux d’écrouissage. Le taux d’écrouissage optimal est un
compromis, une conciliation entre les propriétés selon l’application prévue pour le matériau.

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Exemple industriel: le laminage

L’écrouissage, en laminage a froid, est l’écrasement du matériau entre 2 rouleaux à T° ambiante ou


tiède.

Les conséquences du laminage est la réduction de la section et la modification des propriétés


mécaniques, comme le montre la figure ci-dessus pour le cas de Laiton (Cu-Zn)

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2. Durcissement par solution solide


Le durcissement par solution solide est l’amélioration des propriétés par la variation de la
composition du matériau. Ce phénomène consiste en l'ajout de soluté d ans une matrice métallique

pure pour le rendre hétérogène et impure. La présence d’atomes étrangers en solution solide introduit,
de façon générale, des discontinuités ponctuelles dans le réseau cristallin qui freinent le déplacement
des dislocations par glissement.

Les atomes (de soluté) en solution solide, qu’ils soient en position d’insertion ou de substitution,
créent des distorsions élastiq ues dans le réseau cristallin, engendrant ainsi un champ de contraintes
due a la différence de tailles entre les atomes du soluté et les atomes du solvant. L’augmentation de la
concentration d’impuretés, et donc des contraintes, entrave le mouvem ent des dislocations et par

conséquent, améliorer les propriétés mécaniques du matériau, précisément sa résistance.

D’autre part, les atomes en solution


o tendent à diffuser vers les dislocations et à se regrouper autour
d’elles de façon à abaisser l’énergie
n de déformation globale.

Effet de différents éléments d’alliage dans le cuivre

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Dans le cas des aciers, les éléments d’addition Mn, Si, Cr, Ni, Mo et Ti, par exemple, sont des solutés
substitutionnels tandis que le carbone et l’azote sont des solutés d’insertion. Par

3. Durcissement structural
Le durcissement structural est aussi l’amélioration des propriétés par la variation de la composition
du matériau. Le durcissement structural est un excellent processus qui permet d'obtenir des niveaux
élevés de résistance mécanique. Il fait appel à des procédures de traitement thermique dont les détails
seront développés dans la partie suivante III.

Le durcissement structural nécessite un alliage métastable, hors de point d’équilibre, dont la forme
stable à température ambiante est un intermétallique constitué de deux phases différentes.

Soit un alliage Al-4,5%Cu. Les trois phases nécessaires pour le durcissement structural, qui sont
illustrées par le diagramme de phases Al – Cu.

 La première étape : la mise en solution

Il faut maintenir la solution solide α (Aluminium avec quelques éléments de cuivre) à une température
suffisamment élevée afin que le cuivre se trouve alors totalement dissout dans la matrice α
d’aluminium. Il faut porter et maintenir l’alliage a une température voisine de 550 °C.

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 La deuxième étape : la trempe

Il s’agit d’un refroidissement suffisamment rapide pour obtenir une solution solide métastable
d’aluminium α sursaturée en atomes de cuivre qui s’y retrouvent piégés par la trempe.

Quand on refroidit lentement un métal, les précipités se reforment dans la solution solide. Par contre,
si l'on refroidit rapidement, les atomes n'ont pas le temps de bouger pour reformer les précipités, ils
restent figés en solution. La trempe est ainsi définie comme le refroidissent rapide d’un matériau pour
obtenir des structures, sursaturées, hors d’équilibre.
Le traitement de trempe comporte d’abord un chauffage, à une température généralement déterminée
grâce aux diagrammes d’équilibre, pour atteindre une structure d’équilibre. Cette exigence nécessite
un maintien suffisant à la température de trempe afin d’obtenir une structure homogène, à température
uniforme. Le refroidissement depuis la température de trempe s’effectue alors avec une vitesse
supérieure à une vitesse importante par immersion dans un milieu convenablement choisi pour assurer
le refroidissement désiré (air, gaz neutre, eau, huile, bains de sels).

La trempe donne une meilleure résistance au matériau. Les caractéristiques de résistance ou de dureté
sont améliorées au détriment de la ductilité du métal (l’allongement (A%) et la résilience diminuent).

 La troisième étape : le viellissement ou revenu

Après trempe, l'alliage durcit plus ou moins rapidement suivant sa composition par simple séjour à la
température ambiante: c'est la maturation ou vieillissement naturel. On peut accélérer le retour à
l’équilibre par chauffage et maintien à une température supérieure à la température ambiante. Le
viellissement entraîne la germination de précipités de différentes nouvelles phases plus ou moins
stables. Ces précipités, précipités de CuAl2, qu'ils soient cohérents ou incohérents avec la phase

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principale constituent des obstacles sur le chemin des dislocations ce qui augmente la dureté du
matériau.

Un revenu a pour rôle essentiel de faire évoluer une structure hors d’équilibre, obtenue par trempe, vers
un état proche de l’équilibre. Le revenu s’effectue à température modérée inférieure à latempérature
de trempe et à celle de recuit, pendant des durées limitées.

Le revenu ne permet pas d’atteindre l’état d’équilibre obtenu par recuit, mais la nature des phases
obtenues et leur composition sont en général voisines de celles obtenues par recuit, mais la structure
microscopique est considérablement plus fine, ce qui, associé au mécanisme particulier d’évolution des
phases pendant le revenu, confère aux alliages revenus une résistance mécanique considérablement
plus élevée que celle des mêmes alliages recuits.

Suivant l’évolution structurale qui en découle, les revenus ont les buts suivants :
 le durcissement par précipitation dans une phase sursaturée (alliages d’aluminium, par
exemple) ou par décomposition d’une phase métastable obtenue par trempe (austénite des
aciers, par exemple)
 l’adoucissement d’une phase trop fragile obtenue par trempe (cas de la martensite des aciers
au carbone)
 la relaxation des contraintes résiduelles après trempe, sans évolution structurale.

Après trempe, certaines évolutions structurales peuvent s’effectuer spontanément vers l’état d’équilibre
à la température ambiante : c’est le cas de la maturation des alliages d’aluminium ou du vieillissement
de certains aciers doux. Une accélération de ces phénomènes peut être obtenue par une légère
augmentation de température au cours d’un vieillissement accéléré. C’est le durcissement structural.

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Le revenu est le traitement qui suit généralement la trempe. En effet, une pièce trempée est très dure
et cassante. Le revenu permet alors de diminuer la fragilité de la pièce, tout en lui conservant sa
dureté, et de réduire les tensions internes provoquées par le refroidissement rapide lors de la trempe.
Le revenu permet donc de maintenir la dureté et d'augmenter la résistance aux chocs de la pièce qui a
été trempée.

Par conséquent, le durcissement structural est la formation de fins précipités qui vont gêner le
mouvement des dislocations grâce à une série de chauffages et de refroidissements contrôlés
(traitement thermiques). Le contrôle de ces traitements thermiques assure une répartition optimale et
uniforme des précipités de tailles fines et améliore ainsi des propriétés mécaniques (Rm, Re et dureté),
puisqu’elles dépendent de la répartition des précipités, de leur taille et de leur distance moyenne. Plus
les Précipités sont petits et nombreux, plus les obstacles aux déplacements desdislocations sont élevés,
plus la résistance du matériau est importante.

Application :

Grâce à leurs propriétés mécaniques intéressantes et modulables par un traitement de durcissement


structural, les alliages cuivre – béryllium (Cu - Be) sont souvent utilisés en mécanique de précision et
en horlogerie (ressorts) ainsi que pour des applications électriques (lames et ressorts de contact
électrique).

Considérez un alliage Cu + 1,9 %m. Be.

À l’équilibre et à la T° ambiante (20°C),

- la phase α: 0,05 %m. de Be


- la phase (composé définie CuBe): 11,8 %m Be

a) À quelle température (°C) doit-on porter l’alliage


considéré pour faire le traitement de mise en
solution solide du béryllium avant la trempe ?

Mise en solution solide: Il faut que tout le Be soit entièrement dissous à l’état solide dans la
phase α.

La température située au milieu de l’intervalle de température où l’alliage est en phase α sera donc
la température optimale de mise en solution. On doit s’éloigner au max des domaines biphasés.

Pour l’alliage à 1,9 %m Be, cette température est donc voisine de 800 °C.

b) En se basant sur les courbes de vieillissement de l’alliage après sa trempe, Quelle Température
sera adéquate pour obtenir les propriétés mécaniques suivantes de l’alliage(Re0,2 > 900 MPa ,
Rm >1050 Mpa , A > 15%)? sachant que le temps maximal de vieillissement ne doit pas excéder
1 heure pour des raisons pratiques

Selon les courbes données:

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- en éliminant tous les temps de vieillissement > 1 h.

- en tenant compte des valeurs minimales requises des propriétés mécaniques

 On obtient les Températures: 370 °C ou 315°C

Conclusion : Une modification de la microstructure, qui permet d’augmenter sa résistance mécanique,


conduit à une modification d’autres caractéristiques, en particulier de la ductilité et de la ténacité.

- Une amélioration de la résistance, dans la plupart des cas, engendre une diminution de l’aptitude
à la déformation plastique car, en général, ces deux propriétés sont liées et évoluent en sens
inverse de la mobilité des dislocations (cas d’écrouissage). Toutefois, la déformation par
transformation de phase constitue une exception à cette règle (durcissement structural,
durcissement par affinement des grains, …).

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- Une augmentation de la résistance mécanique est le plus souvent accompagnée par une
diminution de la résistance à la rupture brutale. En effet, l’énergie à fournir pour propager une
fissure est d’autant plus grande que la déformation plastique en tête de fissure est plus élevée.

- Une augmentation de la limite d’élasticité diminue l’aptitude à la déformation plastique locale


et, par conséquent, l’énergie locale de propagation de la fissure. Mais, dans le cas de rupture
par clivage à basse température, le durcissement par affinement de grain augmente la résistance
à la rupture par clivage. Le réamorçage de la fissure à chaque joint de grain consomme de
l’énergie et plus la taille de grain est petite, plus le nombre de joints sur le chemin de
propagation de la fissure est grand et plus l’énergie globale de propagation de la fissure est
élevée.

II. Amélioration des propriétés mécaniques des matériaux par traitement


thermique
Les traitements thermiques ont pour but d’améliorer les propriétés du matériau aux différents stades de
conceptions et d’utilisation. La plupart des matériaux sont susceptibles de subir des traitements
thermiques. C’est ainsi que l’on peut modifier les structures des matières plastiques, des verres, des
céramiques, mais ce sont les matériaux métalliques, métaux et alliages, qui offrent les plus grandes
possibilités de traitements thermiques.

Les traitements thermiques permettent une modification de toutes les propriétés des matériaux, car
celles-ci sont toutes étroitement liées à leur structure : propriétés mécaniques, propriétés chimiques et
de résistance à la corrosion, propriétés physiques diverses (électriques, magnétiques, etc.). Mais,
souvent, l’amélioration de l’une d’elles va généralement de paire avec la dégradation d’autres
propriétés. Ainsi, une augmentation de dureté ou de résistance mécanique est toujours associée à un
accroissement de la fragilité ou à une diminution de la ductilité. La bonne connaissance des relations
entre la microstructure et les propriétés permet donc une bonne maîtriser des évolutions structurales
par traitement thermique et d’obtenir les propriétés voulues.

Les traitements thermiques sont des opérations de chauffage suivies de refroidissements qui consistent
à mettre en application les nombreux changements microstructuraux qui peuvent découler des
transformations de phase ainsi que des phénomènes de recristallisation et de diffusion. Les traitements
thermiques se divisent en deux grandes catégories principales :
-les traitements thermiques de base nécessaires pour améliorer l'homogénéisation de la structure et
rechercher l'état d'équilibre; appelés les recuits.
- les traitements thermiques permettant de créer des structures le plus souvent hors d'équilibre et qui
permettent d'améliorer la résistance à la déformation, au choc, à l'usure, à la corrosion (trempes et
revenus).

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