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ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES

AFFILIÉE À L’UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL

Conflits potentiels entre les générations au travail

par

Mélodie Desrosiers

Sciences de la gestion

Mémoire présenté en vue de l’obtention


du grade des maîtres ès sciences
(M.Sc.)

Janvier 2011
© Mélodie Desrosiers, 2011
Sommaire

Lorsqu’il est question de conflits dans une même équipe de travail, nous
ne considérons pas systématiquement la dimension générationnelle.
D’ailleurs, pour les auteurs Zemke et al. (2000 :3), notre tendance est de
se concentrer d’emblée sur les aspects les plus manifestes, tels que la
personnalité, la culture, le statut d’équipe, la race, le sexe et la religion. À
la suite du travail de recension, nous réalisons qu’il manque un
approfondissement au niveau des études explorant la dynamique
intergénérationnelle et les conflits potentiels générés entre les
générations (Saba 2009). Les objectifs de notre recherche sont
essentiellement de proposer et de valider l’existence d’un certain nombre
de conflits basés sur cinq points d’opposition qui ressortent
systématiquement de la littérature. Ensuite, nous étudions comment ces
conflits pourraient se manifester dans les relations d’emploi et pourraient
modifier les comportements et les attitudes au travail, selon les
perceptions des membres des générations différentes. Finalement, nous
nous penchons brièvement sur la question de la gestion des équipes
intergénérationnelles, à savoir quelles seraient les pratiques à préconiser
pour un meilleur management de ces équipes.

Les résultats de notre étude nous conduisent à un certain nombre de


conclusions. D’abord, lors de notre collecte de données sur le terrain,
nous avons pu constater une correspondance entre les personnalités
générationnelles et les conflits potentiels dans les équipes. Or, les
résultats nous ont permis de constater que chacune des trois
générations à l’étude a des exigences, des valeurs et des attentes
différentes, ce qui peut conduire à des malentendus voire des conflits
d’ordre partiellement générationnel.

En ce qui a trait aux solutions apportées par les gestionnaires de notre


échantillon, nous avons trouvé que les gestionnaires ne parlent pas en
termes de gestion des équipes intergénérationnelles, mais plutôt à partir
d’une perspective générationnelle.
ii

Remerciements

En un mot, l’aboutissement de ce projet marque la fin d’une aventure et

le commencement d’un nouveau chapitre de ma vie. Ceci étant dit, je ne

pourrais poursuivre ma route sans remercier de tout mon cœur ma

directrice, Veronika Kisfalvi, qui a su me guider par sa compétence, sa

gentillesse, sa compréhension, sa collaboration et sa très grande

disponibilité. Veronika m’a été d’une grande aide, inspiration et surtout

de motivation dans les temps les plus difficiles.

La rédaction de ce projet n’aurait pas été possible sans l’aide de mes

répondants, que je veux remercier pour leur générosité dans la qualité

de leur réponse, mais surtout pour le temps qu’ils m’ont accordé malgré

leur agenda extrêmement chargé.

Mais par-dessus tout, le dénouement de ce parcours n’aurait pas été

réalisable sans l’appui de mon conjoint, que je remercie

chaleureusement pour m’avoir accordé sa confiance et sans qui je ne

serais pas ici aujourd’hui en train de rédiger cette lettre de

remerciements. Et finalement, je remercie ma petite fille, qui est encore

trop petite pour comprendre, mais qui m’a été une source d’inspiration et

qui m’a donné la force de continuer dans les moments les plus difficiles.
iii

TABLE DES MATIÈRES

Sommaire ...........................................................................................................i
Remerciements ................................................................................................. ii
Liste des tableaux........................................................................................... vii
Liste des illustrations ..................................................................................... vii
CHAPITRE 1. Introduction ................................................................................ 1
1.1. Objectif de la recherche ............................................................................................... 1
1.2. Structure du mémoire................................................................................................... 3
CHAPITRE 2.Revue de littérature..................................................................... 4
2.1. Réalités démographiques au Québec ........................................................................ 4
2.1.1. Le vieillissement de la population ......................................................................... 5
2.1.1.1. Pénurie de main-d’œuvre ........................................................................ 7
2.1.1.2. La gestion des talents .............................................................................. 7
2.1.1.3. Le transfert de connaissances d’une génération à l’autre ..................... 8

2.2. La réalité des entreprises............................................................................................. 9


2.2.1. La nature changeante des métiers ....................................................................... 9
2.2.2. L’aplatissement des échelons dans les entreprises ............................................ 9
2.3. Concept d’une génération et différences intergénérationnelles.......................... 10
2.4. Conflits intergénérationnels ...................................................................................... 12
2.5. Typologie des générations ........................................................................................ 13
2.5.1. La génération du baby boom .............................................................................. 15
2.5.2. La génération X ................................................................................................... 16
2.5.3. La génération Y ................................................................................................... 17
2.6. Les défis de gestion face au phénomène des équipes intergénérationnelles... 18
2.7. Les implications pour la gestion............................................................................... 18
2.7.1. La communication ............................................................................................... 20
2.7.2. Le mentorat et le coaching.................................................................................. 21
2.7.3. La flexibilité .......................................................................................................... 22
2.8. La dynamique intergénérationnelle.......................................................................... 22
2.9. Objectifs de la recherche et conclusion .................................................................. 23
CHAPITRE 3.Cadre conceptuel ...................................................................... 25
3.1. Présentation du cadre conceptuel............................................................................ 25
3.2. Question générale de recherche............................................................................... 26
3.3. Les influences, les caractéristiques et les attentes des trois générations ........ 27
3.4. Les points d’opposition et conflits intergénérationnels potentiels..................... 29
3.5. Le sens au travail ........................................................................................................ 30
3.5.1. Le sens au travail pour la génération du baby boom......................................... 30
3.5.2. Le sens au travail pour la génération X.............................................................. 32
3.5.3. Le sens au travail pour la génération Y.............................................................. 33
3.6. Le rapport à l’institution............................................................................................. 34
3.6.1. Le rapport à l’institut pour la génération du baby boom .................................... 35
3.6.2. Le rapport à l’institut pour la génération X ......................................................... 36
iv

3.6.3. Le rapport à l’institut pour la génération Y ......................................................... 37


3.7. La place du travail d’équipe....................................................................................... 37
3.7.1. La place du travail d’équipe pour la génération du baby boom......................... 38
3.7.2. La place du travail d’équipe pour la génération X.............................................. 39
3.7.3. La place du travail d’équipe pour la génération Y.............................................. 39
3.8. La loyauté ..................................................................................................................... 40
3.8.1. La loyauté pour la génération du baby boom..................................................... 41
3.8.2. La loyauté pour la génération X.......................................................................... 41
3.8.3. La loyauté pour la génération Y.......................................................................... 42
3.9. La communication....................................................................................................... 42
3.9.1. La communication pour la génération du baby boom........................................ 43
3.9.2. La communication pour la génération X............................................................. 44
3.9.3. La communication pour la génération Y............................................................. 44
3.10. Les conflits intergénérationnels ............................................................................. 46
CHAPITRE 4. Méthodologie de recherche ..................................................... 48
4.1. Approche et méthode de cueillette des données................................................... 48
4.1.1. L’approche qualitative ......................................................................................... 48
4.1.2. Étude de cas par l’entretien semi-directif ........................................................... 49
4.2. Structure de la recherche........................................................................................... 50
4.2.1. Les répondants .................................................................................................... 51
4.2.2. Les organisations participantes .......................................................................... 51
4.2.3. L’outil de recherche ............................................................................................. 52
4.3. La collecte de données............................................................................................... 52
4.3.1. Échantillon de la recherche................................................................................. 52
4.3.2. Contacts préliminaires et déroulement de l’entretien ........................................ 52
4.4 Méthode d’analyse des données ............................................................................... 53
4.5. Méthode de présentation des données.................................................................... 54
CHAPITRE 5. Résultats et analyses des générations face
aux cinq dimensions ..................................................................................... 56
5.1. Description de l’échantillon....................................................................................... 57
5.1.1. Portrait sommaire des répondants ..................................................................... 57
5.2. Résultats et analyse de la dimension du sens au travail ...................................... 58
5.2.1. Résultats par génération en regard de la dimension du sens au travail........... 59
5.2.2. Analyse des générations par rapport au sens au travail ................................... 62
5.2.2.1. Les baby boomers et le sens au travail ................................................ 62
5.2.2.2. Les X et le sens au travail...................................................................... 64
5.2.2.3. Les Y et le sens au travail...................................................................... 65

5.3. Résultats et analyse de la dimension le rapport à l’institution ............................ 66


5.3.1. Résultats des générations quant à la dimension le rapport à l’institution......... 66
5.3.2. Analyse des générations et leur rapport à l’institution ....................................... 67
5.3.2.1. Les baby boomers et le rapport à l’institution ....................................... 67
5.3.2.2. Les X et le rapport à l’institution ............................................................ 69
5.3.2.3. Les Y et le rapport à l’institution ............................................................ 70

5.4. Résultats et analyse pour la dimension du travail d’équipe................................. 71


5.4.1. Résultats par génération sur la dimension du travail d’équipe.......................... 71
5.4.2. Analyse des générations et la place du travail d’équipe.................................... 73
5.4.2.1. Les baby boomers et le travail d’équipe ............................................... 73
5.4.2.2. Les X et le travail d’équipe..................................................................... 74
v

5.4.2.3. Les Y et le travail d’équipe..................................................................... 75

5.5. Résultats et analyse de la dimension la loyauté .................................................... 75


5.5.1. Résultats des générations selon la dimension de la loyauté ............................ 76
5.5.2. Analyse des générations et la loyauté................................................................ 77
5.5.2.1. Les baby boomers et la loyauté ............................................................ 77
5.5.2.2. Les X et la loyauté.................................................................................. 79
5.5.2.3. Les Y et la loyauté.................................................................................. 79

5.6. Résultats et analyses de la dimension de la communication .............................. 80


5.6.1. Résultats des générations par rapport à la dimension de la communication ... 80
5.6.2. Analyse des générations par rapport à la communication ................................ 83
5.6.2.1. Les baby boomers et la communication ............................................... 83
5.6.2.2. Les X et la communication..................................................................... 84
5.6.2.3. Les Y et la communication..................................................................... 85

5.7. Les comportements clés, valeurs et attitudes des trois générations ................. 86
CHAPITRE 6. Présentation des conflits potentiels et discussion................. 90
6.1. Discussion en regard avec les terrains de confrontations possibles dans une
équipe intergénérationnelle .............................................................................................. 90
6.1.1. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec la variable « sens au
travail » ........................................................................................................................... 90
6.1.1.1. Conflits potentiels entre les générations baby boom et X
en regard avec la variable du sens au travail ................................................... 90
6.1.1.2. Conflits potentiels entre les générations baby boom et Y
en regard avec la variable le sens au travail .................................................... 91
6.1.1.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y
en regard de la variable le sens au travail ........................................... 92
6.1.2. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec la variable « rapport à
l’institution » ................................................................................................................... 93
6.1.2.1. Conflits potentiels entre les générations baby boom et X en regard
avec la variable rapport à l’institution................................................................ 93
6.1.2.2. Conflit potentiel entre les générations baby boom et Y en regard
avec la variable le rapport à l’institution............................................................ 95
6.1.2.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y en regard avec la
variable le rapport à l’institution......................................................................... 95
6.1.3. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec la variable
« travail d’équipe »......................................................................................................... 96
6.1.3.1. Conflit potentiel entre les générations baby boom et X en regard
avec la variable le travail d’équipe .................................................................... 96
6.1.3.2. Conflit potentiel entre les générations baby boom et Y en regard
avec la variable le travail d’équipe .................................................................... 96
6.1.3.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y en regard avec la
variable le travail d’équipe ................................................................................. 97
6.1.4. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec la variable « loyauté » 98
6.1.4.1. Conflit potentiel entre les générations baby boom et X en regard
avec la variable la loyauté................................................................................... 98
vi

6.1.4.2. Conflit potentiel entre les générations baby boom et Y en regard


avec la variable la loyauté................................................................................... 98
6.1.4.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y en regard
avec la variable la loyauté................................................................................... 99
6.1.5. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec
la variable « communication »..................................................................................... 100
6.1.5.1 Conflit potentiel entre les générations baby boom et X
en regard avec la variable la communication................................................... 100
6.1.5.2. Conflit potentiel entre les générations baby boom et Y
en regard avec la variable la communication................................................... 101
6.1.5.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y
en regard avec la variable de la communication.............................................. 102

6.2. Confrontations générationnelles possibles dans une équipe


intergénérationnelle ......................................................................................................... 103
6.3. Les gestionnaires et les différences intergénérationnelles................................ 106
6.4. Portrait sommaire des gestionnaires ..................................................................... 107
6.5. Solutions potentielles apportées par les gestionnaires face aux conflits
intergénérationnels .......................................................................................................... 108
6.6. Les défis de gestion face au phénomène des équipes intergénérationnelles. 110
CHAPITRE 7. Conclusion ............................................................................. 112
Bibliographie................................................................................................. 116
Annexe A - Guide de l’entrevue.................................................................... 121
Annexe B -Formulaire de consentement à une entrevue ............................ 122
vii

Liste des tableaux

Tableau 2.1 : Comparaison des caractéristiques des milieux de travail


traditionnels et modernes 13

Tableau 2.2 : Profil des générations actives sur le marché du travail 14

Tableau 3.1 : Événements clés et valeurs propres à chacune des générations 27

Tableau 3.2 : Manifestation des conflits potentiels intergénérationnels


dans une équipe 46

Tableau 4.1 : Conflits intergénérationnels basés sur les cinq points d’opposition 54

Tableau 5.1 : Caractéristiques des répondants 58

Tableau 5.2 : Classement par génération des citations significatives


par rapport à la dimension du sens au travail 59

Tableau 5.3 : Citations significatives des générations en regard avec


la dimension le rapport à l’institution 66

Tableau 5.4 : Citations significatives des générations en regard avec


la dimension du travail d’équipe 72

Tableau 5.5 : Citations significatives des générations en regard avec


la dimension de la loyauté 76

Tableau 5.6 : Citations significatives des générations en regard avec


la dimension de la communication 81

Tableau 5.7: Comportements clés, valeurs et attitudes générationnels 87

Tableau 6.1 : Confrontations générationnelles possibles dans une équipe


intergénérationnelle 104

Tableau 6.2 : Caractéristiques des gestionnaires rencontrés 107

Liste des illustrations

Figure 3.1 : Conflits intergénérationnels basés sur les cinq points d’opposition 28
CHAPITRE 1. Introduction

1.1. Objectif de la recherche


Aujourd’hui on peut considérer le marché du travail, autant au Canada
que dans le monde, comme étant en constante évolution (Petit, 2008 et
Audet, 2004). En effet, la mondialisation des marchés (Levitt, 1983),
l’évolution démographique (Audet, 2004), l’intensification de la
concurrence (Petit, 2008), la progression technologique « ont des
répercussions importantes sur le taux d’activité ainsi que sur la nature
des emplois (BIT, 2008; Bourhis, 2007; Fournier et Bourassa, 2000) et
transforment le profil de la main-d’œuvre. » (Bourhis, 2007; cité dans
Petit, 2008 : 3).

À l’intérieur même des entreprises, « les personnes sont devenues des


ressources, les temps de travail sont réduits à des urgences, les rythmes
de travail s’accélèrent, les frontières entre les sphères de l’existence se
fondent et se confondent, le travail lui-même devient incertain et, quant à
l’avenir, encore plus incertain » (Morin et Forêt, 2006 : 31). En matière
de composition de la main-d’œuvre, on a vu une grande augmentation
des femmes, des personnes âgées, des personnes nées à l’extérieur du
pays sans mentionner d’individus plus scolarisés (Petit, 2008). Les
équipes sont plus diversifiées, variées et sont de moins en moins
uniformes. D’ailleurs, lorsqu’on se penche sur le sujet de la diversité en
entreprise, il n’est pas rare de constater que les études sur les
différences reliées au genre, à la race, à l’ethnicité, à la culture ou même
à la religion (Zemke et al., 2000) abondent dans la littérature. Ce n’est
que tout récemment qu’on a commencé à se pencher sur le phénomène
de la mixité intergénérationnelle.

C’est sur cette question que portera ce mémoire. Notre intérêt pour la
recherche portant sur la cohabitation des générations dans les équipes
de travail et leurs différences n’est pas le fruit du hasard. En effet, le
2

choix de ce sujet a pris naissance durant nos diverses expériences


professionnelles, au cours desquelles nous avons été amenée à réaliser
que ce type de conflit est inévitable. Ainsi, nous nous interrogeons sur
les fondements des confrontations entre collègues de travail et les
raisons qui peuvent pousser une telle manifestation. Essentiellement,
sachant que le travail constitue une activité primordiale pour la
préservation de la santé des personnes (Morin et Forêt, 2006), il est
primordial, pour le bon fonctionnement des entreprises, de maintenir un
climat sain dans les équipes professionnelles (Harvey 2004). De plus, en
2009, une équipe peut se composer de quatre générations ayant toutes
des idéaux, cheminements, perspectives et requêtes personnelles et
professionnelles distincts (Zemke et al., 2000). D’un point de vue
historique, on parle même d’une grande première (Johnson et Lopes,
2008). Certes, ces différences générationnelles, pour ainsi dire, vont
bien au-delà de la simple date de naissance. Or, les experts s’entendent
pour dire qu’une génération est généralement formée à partir
d’événements historiques, sociaux et culturels (Zemke et al., 2000).
C’est d’ailleurs ce qui nous pousse à creuser davantage le sujet de la
mixité intergénérationnelle.

Selon la littérature, ce sont ces différentes valeurs et opinions


intergénérationnelles qui se confrontent et peuvent créer des
malentendus, ce qui se reflète sur la productivité de l’entreprise et, en
bout de ligne, sur les résultats finaux de l’organisation. De plus, certains
auteurs croient que les attentes varient d’une génération à l’autre, ce qui
peut causer de la friction entre les générations. Par exemple, Zemke et
al. (2002) disent que les boomers accordent beaucoup d’importance au
travail d’équipe, aux longues heures au bureau, au travail acharné et à la
reconnaissance des faits. Par contre, les personnes de la génération X
considèrent les compétences plus que l’expérience, l’informalité dans les
communications et l’apprentissage continu. Les Y, quant à eux, orientent
leur pensée sur la réalisation dans un esprit de collaboration. Ces
conceptions différentes peuvent sans doute provoquer des conflits.
D’ailleurs, un des intérêts qui nous pousse à défendre la supposition que
3

les conflits peuvent avoir une forte composante générationnelle est de


valider dans quelle mesure les répondants, nous feront sentir le poids
générationnel lorsqu’ils nous parleront de leurs exigences, valeurs et
attentes professionnelles.

1.2. Structure du mémoire


Le prochain chapitre couvre le plus largement possible le thème de la
dynamique intergénérationnelle. Le troisième chapitre, celui du cadre
conceptuel, vise à présenter les conflits possibles à travers cinq points
d’opposition qui semblent ressortir systématiquement de la littérature.
C’est à travers le quatrième chapitre que nous nous attardons à
certaines considérations méthodologiques qui nous permettront de
mener à terme la présente recherche en science de la gestion.

Ensuite, dans les cinquième et sixième chapitres, nous présenterons les


constats tirés de notre collecte données, que nous discuterons par la
suite dans le chapitre 7.
CHAPITRE 2. Revue de littérature
Dans ce chapitre, nous aborderons le sujet de la cohabitation des
générations qui composent la main-d’œuvre aujourd’hui, particulièrement
au Québec. Présentement, nous retrouvons quatre générations sur le
marché du travail. La plus vieille des générations, les silencieux
(représentant 16,9 % de la population active selon Statistique Canada,
2007, cité dans Petit 2008), étant appelée à se retirer dans les
prochaines années, nous avons décidé d’étudier les trois autres
générations, c’est-à-dire les baby boomers, les X et les Y. Ainsi, pour
mieux comprendre en quoi consiste l’ampleur de la situation, nous
passerons en revue l’évolution des enjeux démographiques qui
contribuent de manière directe et indirecte au phénomène des équipes
intergénérationnelles. Notons que parmi les différents angles
caractérisant une démographie, on retrouve les origines, l’aspect
ethnique et culturel et l’état physique (Audet, 2004). Pour cette étude,
nous avons choisi de nous concentrer sur la caractéristique de l’âge de
la population.

L’âge, tout au long du cycle de la vie, est la variable démographique la


plus déterminante du comportement économique des gens. L’âge
explique presque tout quand vient le temps d’analyser, dans une
perspective démographique, les comportements économiques de la
population. (Foot et al., 1998 : 3 cité dans Harvey 2004 : 18).

2.1. Réalités démographiques au Québec


Selon la littérature, le Québec est la province canadienne la plus
menacée par les tendances démographiques. Pour Audet (2004 :20),
ces changements s’expliquent principalement par « un affaiblissement
au niveau de la performance du Québec en matière de croissance
démographique, faisant chuter le poids démographique de la province
par rapport à la population canadienne ». Or, les facteurs contribuant à
ce phénomène sont un faible taux de natalité (Foot et al., 2000 ; Audet,
2004) et un faible taux d’immigration (Audet 2004). Certains chercheurs
vont jusqu’à prédire un déficit démographique en 2031 si le mouvement
5

observé ces dernières années ne s’inverse pas (Audet, 2004 et Carrette,


1994).

2.1.1. Le vieillissement de la population


Or, le phénomène du vieillissement de la population touche l’ensemble
de la structure du travail. Selon Audet (2004), la proportion des
personnes de 45 ans à 64 ans, qui représentaient à peine le quart de la
population dans les années 1980, est passée à plus du tiers en 2006
pour atteindre les 40 % en 2008 (Grenier, 1999 cité dans Audet 2004).
Selon le chercheur Lesemann (2007, de 1998 à 2005, au Québec, le
pourcentage d’hommes de 65 à 74 ans occupant un emploi rémunéré et
déclaré est passé de 14 % à 23 %. Durant la même période, chez les
femmes âgées entre 65 et 74 ans, ce pourcentage est passé de 7 % à
10 %.

Selon Foot et al., (1999), ce n’est pas la majorité des travailleurs qui
peuvent se permettre un départ à la retraite à partir de la soixantaine.
Des études confirment que la majorité des personnes éligibles à la
retraite resteront sur le marché du travail plus longtemps afin d’amasser
une somme suffisante pour une rente jugée vivable (Crumpacker et
Crumpacker, 2007). D’après Foot et al., (1999 : 131), « pour s’assurer un
revenu annuel de 30K pendant 25 ans à partir de 60 ans, il faut compter
sur un pécule de 500 000 $ ».

Selon Saba (2009) et Audet (2004), ce sont les gouvernements et les


entreprises qui comptent ajuster les régimes de retraite visant à retarder
et à échelonner les départs anticipés. Pour Foot et al., (1999) et pour
Carrette (1994), les progrès de la médecine, en augmentant l’espérance
de vie, poussent aussi les futurs retraités à demeurer au sein de la
population active après 65 ans. « Compte tenu de ces nouvelles
tendances (Gauthier et al., 2007), il n’est pas surprenant de constater
que le taux d’activité, autant des femmes que des hommes de 55 ans et
plus, connaît une nette augmentation. » (Saba 2009 : 29)
6

Dès lors, en dépit de toutes ces observations, les organisations ne


doivent pas négliger le fait que la population canadienne continue de
vieillir. Même si la proportion des personnes de 55 à 64 ans n’a jamais
été aussi importante, représentant 16,9 % de la population active, les
prévisions montrent que dans la prochaine décennie, moins d’une
personne entrera sur le marché du travail pour chaque personne qui se
retirera (Statistique Canada, 2007d cité dans Petit 2008 : 8). La figure
2.1 présente la pyramide des âges de la population canadienne et la
distribution des quatre générations présentement actives sur le marché
professionnel. D’ailleurs, on observe très bien l’importance du poids
démographique des baby boomers, qui se rapprochent de leur retraite
(Petit 2008 : 8).

Figure 2.1 : Distribution des différentes générations


au sein de la pyramide des âges de la population canadienne en 2006

Source : Statistique Canada (2007d) dans Petit (2008 : 8)

Nécessairement, la situation oblige les entreprises à se pencher sur trois


défis qui en découlent : 1) la prévision d’une pénurie de main-d’œuvre
d’ici 2031; 2) la gestion des talents; et 3) le transfert des connaissances
tacites de l’entreprise d’une génération à l’autre.
7

2.1.1.1. Pénurie de main-d’œuvre


En épluchant la littérature, il n’est pas rare de tomber sur des articles à
penchant journalistique présentant des données très pessimistes. En
effet, plusieurs sonnent l’alarme face au problème de pénurie de main-
d’œuvre et ce, pour l’ensemble des métiers surtout « depuis qu’il est
question des départs massifs à la retraite de la plus grande génération;
les Baby Boomers » (Harvey 2004 : 16). Même si de fortes spéculations
se répandent à l’échelle nationale, certaines études démontrent que ce
ne sont pas tous les secteurs professionnels qui seront touchés de la
même façon (Audet, 2004; Emploi-Québec, 2007). De même que, selon
Wannell et Gravel (2002), malgré la forte médiatisation au sujet du
vieillissement de la population, encore très peu d’études crédibles sur
son impact ont été réalisées à ce jour (cité dans Harvey, 2004 :16).

2.1.1.2. La gestion des talents


La perspective d’une main-d’œuvre formée et prête à prendre la relève
ne correspond qu'à un faible pourcentage de la population québécoise.
En tenant compte des décrocheurs, d’immigrants dont l’éducation n'est
pas reconnue ici, et de ceux qui ne détiennent pas les diplômes requis
pour les postes plus spécialisés, certaines entreprises en viennent à
modifier leurs critères de sélection.

Au Québec, on prévoit une pénurie de talents dans certains domaines


professionnels (Emploi-Québec, 2007). Cette réalité au sein de nos
organisations oblige les gestionnaires à revoir la question de la gestion
de la relève (Audet, 2004). Dans la littérature à ce sujet, on retrouve
surtout des articles illustrant les répercussions du manque de talents en
entreprises et leur impact sur les pratiques actuelles des gestionnaires.
Bélair, Deloitte et Touche (2005) rapportent que 50 % des entreprises
ayant répondu à un sondage canadien disent avoir été dans l’obligation
d’embaucher des personnes moins qualifiées pour des postes à combler
et 30 % ont déclaré avoir perdu des occasions d’affaires faute de main-
d’œuvre qualifiée.
8

Pour sa part, Morin (2007) avance que le phénomène de la gestion des


talents pousse les entreprises du Québec à se concentrer d’emblée sur
le bien-être de l’employé, ce qui n’était pas le cas auparavant. Barette et
al. (2002), quant à eux, soulignent que les organisations devront non
seulement développer des moyens pour attirer ces talents, mais qu’elles
devront également trouver des façons de les motiver et de les retenir
(Harvey, 2004). Lancaster et al. (2002) dénombrent deux facteurs qui
expliquent pourquoi la gestion des talents est devenue une priorité pour
les organisations (Audet, 2004) :
1- L’accessibilité à l’information. La venue d’Internet donne
l’accès à une multitude d’informations sur les entreprises,
notamment sur leurs postes vacants et l’entreprise dans son
ensemble. Les travailleurs sont plus enclins à chercher les
opportunités d’emplois.
2- Une baisse générale de la fidélité envers l’entreprise. « The
sense of decreased faith and trust in institutions is felt not just
among Xers » (Lancaster et al., 2002 : 241)

2.1.1.3. Le transfert de connaissances d’une génération à l’autre


Lefebvre (2000) souligne que : « l’un des enjeux capitaux des rapports
de générations est la transmission des savoir-faire, le partage de
connaissances, le développement des compétences et le processus de
construction des savoirs à l’œuvre dans les divers milieux » (cité dans
Harvey, 2004 : 23).

Lorsqu’un employé prend sa retraite, il emporte avec lui une partie de la


mémoire de l’entreprise (Saba, 2009 ; Tulgan, 2006 ; Audet, 2004). Or,
cette expérience tacite, pour ainsi dire, doit être transférée afin d'assurer
la continuité des affaires. Dans cette optique, pour sauvegarder ce
bagage de connaissances, les entreprises doivent recruter de nouveaux
talents pendant que le transfert de ce savoir est encore possible (Audet,
2004). De plus, les gestionnaires devront s'assurer que ces nouveaux-
venus soient en mesure de maîtriser rapidement les responsabilités que
9

leurs aînés n’assumaient qu’après maintes années d’expérience (Zemke


et al., 2000). Audet (2004 : 24) ajoute :

Quand on sait que ce sont principalement les connaissances tacites qui


constituent le capital de compétences d’un travailleur expérimenté, il est
évident que la gestion de la transition entre la vieille garde et la nouvelle
garde sur le marché du travail devient un enjeu stratégique important
pour la société et pour les organisations qui la composent.

2.2. La réalité des entreprises


Dans les organisations, on retrouve principalement deux éléments qui se
répercutent sur l’ensemble du fonctionnement de l’entreprise et qui
expliquent en partie le phénomène des équipes intergénérationnelles :
1) la nature changeante des métiers et 2) le changement de la structure
de l’entreprise.

2.2.1. La nature changeante des métiers


Autrefois, on considérait la plupart des métiers comme étant plus
physiques qu’intellectuels. Conséquemment, les employés s’épuisaient
au point de devoir se retirer du marché du travail avant 65 ans (Carrette,
1994 et Foot et Stoffman, 1998). Aujourd’hui, les métiers (pour la
plupart) sont beaucoup plus cérébraux. Foot et al. (1999 : 131)
définissent ainsi ce phénomène : « Dans une économie du savoir, les
employés se fatiguent moins vite et les plus vieux sont parmi les plus
productifs grâce à leur expérience ».

Le cycle de carrière des individus est beaucoup plus varié qu’avant, ce


qui entraîne une cohabitation plus longue, comme l’explique Saba :

Ainsi, la séquence formée par les études, le travail et la retraite est


remise en cause et les individus quittent le marché du travail pendant
certaines périodes, recyclent leurs compétences, reviennent sur le
marché du travail, changent de carrière, prennent leur retraite et
certains retournent aussitôt travailler. (Saba, 2009 : 25)

2.2.2. L’aplatissement des échelons dans les entreprises


Dans l’ancien modèle de l’entreprise, il existait une forte relation entre
l’âge des employés et leur rang hiérarchique. Autrement dit, plus un
10

employé vieillissait, plus il gravissait les échelons de l’entreprise pendant


que les plus jeunes se trouvaient majoritairement au bas de l’échelle,
voire dans des postes d’entrée (Journal des affaires, 2005; Foot et al.,
1999; Zemke et al., 2000). Ces derniers racontent :

Senior employees, who were mostly white and male, worked in the head
office or were in command positions in the manufacturing chain. Middle-
aged employees tended to be in the middle management (…) The
youngest, greenest, and physically strongest were on the factory floor.
(Zemke et al., 2000 : 10)

Foot et al. analysent ainsi le changement survenu dans les structures :

Cette façon d’attribuer les postes présentait un avantage certain : les


gens travaillaient la plupart du temps avec des personnes de leur âge,
qui partageaient leur bagage culturel et leurs valeurs. Les risques de
conflits étaient assez faibles. Avec les années, les structures
organisationnelles se sont aplaties. Ce qui fait qu’aujourd’hui dans les
organisations où autrefois il y avait 10 échelons, aujourd’hui on en
retrouve 2 au maximum. (Foot et al., 1999 : 103)

2.3. Concept d’une génération et différences intergénérationnelles


Comme nous l’avons souligné précédemment, en 2009, une équipe
professionnelle peut comporter jusqu’à quatre générations. Or, celles-ci
ont des idéaux, cheminements, perspectives personnelles et/ou
professionnelles qui leur sont propres et qui les distinguent (Zemke et
al., 2000). Pour Johnson et Lopes (2008), ce fait constitue un
phénomène historique. Or, dans la littérature, on réfère souvent au
concept de génération, dont la définition ne fait toutefois pas l’unanimité
(Petit, 2008; Tulgan et Martin, 2006; Audet, 2004; Harvey, 2004;
Boudreault, 2002; Zemke et al., 2000). En sciences sociales, le concept
de génération est défini selon trois approches (Petit, 2008 et Harvey,
2004).

La première, l’approche démographique, renvoie au concept de cohorte


(Petit, 2008 et Harvey, 2004). Selon les tenants de cette théorie, une
génération se définit principalement à partir de caractéristiques
quantifiables telles que le nombre d’individus et/ou leur durée de vie
(Harvey, 2004).
11

La deuxième, l’approche ethnologique, est liée à l’aspect généalogique.


Selon ce concept, une génération se détermine d’après sa descendance
provenant du même groupe ethnique (Harvey, 2004). Par exemple, pour
Petit (2008 : 19), « un individu est classé à un même niveau dans la
lignée de la parentèle ou d’un groupe plus large ».

Dans cette recherche, nous utiliserons la troisième perspective, soit


l’approche sociologique. Pour les défenseurs de cette approche, une
génération est segmentée par rapport à son époque (Lancaster et al.,
2002 ; Zemke et al., 2000 ), résultant ainsi en une « mémoire historique
collective » (Harvey, 2004) construite à partir d’événements historiques,
sociaux, politiques et culturels (Lancaster et al., 2002; Zemke et al.,
2000; Woodruff et Birren, 1972). Or, ce phénomène, créant des
représentations sociales semblables, influence en quelque sorte les
comportements subséquents (Mannheim, 1990; Scott, 2000 cité dans
Petit, 2008 :19).

En un mot, les personnalités générationnelles se forment par des


événements majeurs qui marqueront émotionnellement plusieurs millions
de gens encore à une étape très formatrice de leur vie (Crumpacker et
Crumpacker 2007 ; Zemke et al., 2000), voire durant leur jeunesse
(Howe et Strauss, 2007).

The three generations that occupy today’s workplace and the fourth
generation that is entering it are clearly distinguishable by all these
criteria– their demographics, their early life experiences, the headlines
that define their times, their heroes, music, and sociology, and their
early days in the workplace. (Zemke et al., 2000 : 17).

Par exemple, en suivant cette logique, on peut supposer que la


récession de 2009-2010 pourrait être considérée comme un événement
économique majeur qui formera une partie de la personnalité
générationnelle de la génération suivant les Y. D’ailleurs, plusieurs
auteurs ont des raisons de croire que les événements comme celui du
11 septembre 2001 ou encore les tueries dans les écoles (Petit, 2008)
12

auront un effet sur les perspectives de vie de la génération Y


(Crumpacker et Crumpacker, 2007; Patterson, 2007; Howe et Strauss,
2000; Zemke et al., 2000). Saba (2009 : 25) cite McManus qui, en 1997,
s’inquiétait du fait que les différences générationnelles de plus en plus
marquées risquaient d’engendrer des conflits intergénérationnels.

2.4. Conflits intergénérationnels


Dans la littérature ressort surtout le sentiment d’urgence quant à la
gestion des différences intergénérationnelles. On soulève même que la
disparité entre les générations en entreprise pourrait représenter une
menace encore plus importante que les contrastes reliés à la culture, à
la différence des sexes, à l’ethnicité et à la religion (Zemke et al., 2000 ;
Lancaster et al., 2002). En outre, on soutient que le refus de reconnaître
ces différences pourrait aller jusqu’à affecter la productivité globale d’une
organisation (Zemke et al., 2000).

Bien que les générations cohabitent depuis longtemps dans les lieux de
travail (Saba, 2009), il y aurait toujours existé une rivalité (parfois
évidente, parfois intériorisée) entre les différentes générations
(Patterson, 2007; Zemke et al., 2000). Pour certains auteurs, compte
tenu de leurs expériences communes, les membres d’une même
génération ont souvent des visions, des idées et des valeurs similaires
face au travail (Saba 2009; Nicholas, 2009; Dulin 2008; Martin et Tulgan,
2001; Howe et Straus, 2000 et Zemke et al., 2000). Zemke et al.,
(2000 :11) quant à eux, expliquent ainsi les bases des conflits
intergénérationnels :

An unfortunate outcome, one that mitigates against positive creative


synergy, is intergenerational conflicts: differences in values, in views,
and ways of working, talking, and thinking that set people in opposition
to one another and challenge organizational best interest.

Gravett et Throckmorton, en 2007, ont mené une étude aux États-unis


auprès de différentes organisations de 500 employés et plus. Parmi les
professionnels en gestion des resources humaines ayant participé à
l’étude, 58 % ont reconnu l’existence de conflits entre les plus vieux et
13

les plus jeunes et étaient d’avis que ceux-ci étaient souvent liés aux
valeurs de travail et aux exigences quant à l’équilibre travail-vie privée.

Dans le tableau suivant, Smith (2008 cité dans Nicholas 2009 : 49)
dresse un portrait comparatif entre les caractéristiques des milieux de
travail traditionnel (appréciées par les boomers) et les milieux de travail
moderne (désirées par les X et les Y).

Tableau 2.1 : Comparaison des caractéristiques des milieux de travail


traditionnels et modernes
Milieu de travail traditionnel Milieu de travail moderne

• Sécurité provenant de l’institution • Sécurité provenant de l’intérieur

• Promotions basées sur l’ancienneté • Promotions basées sur la performance

• Loyauté envers l’organisation • Loyauté envers l’équipe

• Attendre les ordres • Défier l’autorité

• Respect basé sur le poste/titre • Le respect se mérite

Source : Smith (2008) dans Nicholas, 2009 : 49 (traduction libre)

2.5. Typologie des générations


À ce jour, la littérature confirme l’existence de quatre générations
distinctes composant le marché du travail (Saba, 2009; Petit, 2008;
Allain, 2005; Eisner 2005; Harvey, 2004 et Zemke et al., 2000). En
revanche, nombreux sont les désaccords en matière de leur répartition
typologique. Ainsi, pour garder une constance, nous nous appuierons
principalement sur les travaux de Zemke et al. (2000), qui nous
apparaissent les plus complets en termes de classification des
générations. Dans une étude menée auprès des générations, ces
chercheurs concluent que certaines caractéristiques attribuées à un
groupe générationnel peut aussi correspondre à un autre, surtout
lorsque les membres du groupe se situent au début ou à la fin d’une
génération : «If we wouldn’t utterly confuse everyone, we would overlap
them by three or four years (…) » (Zemke et al., 2000 : 3).
14

Par exemple, pour ces auteurs, il est clair que la génération du baby
boom comprend les individus nés entre 1943 et 1960, tandis que la
majorité des chercheurs situent leur naissance entre 1946 et 1964.
Zemke et al. (2000 : 3) justifient ainsi cette différence :

We have factored in the feel as well as the face of a generational cohort


in our definition. For instance, our research finds that people born
between 1943 and 1946 have similar values and views as the true
demographically defined Baby Boomers, those born between 1946 and
1964.
Il en est de même pour la génération X. Les conclusions tirées de leurs
recherches démontrent que les personnes nées entre 1960 et 1964
s’identifiaient davantage à la génération X (qui est démographiquement
segmentée de 1964 à 1977), contrairement aux plus jeunes des X qui
s’identifient plutôt à la génération Y.

Notons également que pour le bien de cette recherche, nous écarterons


une des quatre cohortes, celle de la génération silencieuse, soit les
personnes nées avant 1943 (Zemke et al., 2000). En effet, rappelons
que, bien que ce groupe représente 16,9 % de la population active
(Statistique Canada, 2007d, cité dans Petit 2008), on prévoit qu’une forte
proportion de ces personnes quittera le marché du travail à plus ou
moins court terme. Nous tiendrons donc compte des trois générations
suivantes : les baby boomers, les X et les Y.
Pour les fins de cette recherche, nous avons utilisé le critère de l’année
de naissance pour déterminer la génération des personnes rencontrées.
Le tableau 2.2 établit la délimitation que nous avons adoptée.

Tableau 2.2 : Profil des générations actives sur le marché du travail


Les générations Années de naissance
La génération du baby boom 1943 - 1960

La génération X 1961 - 1979

La génération Y 1980 - 2000


15

Il importe, avant de dresser les portraits des trois générations, d’apporter


quelques précisions et commentaires.
• Les descriptions de chacune des cohortes représentent une vue
d’ensemble générale. Il peut y avoir des exceptions. À noter
également que les profils seront analysés davantage dans le cadre
conceptuel.
• Ainsi que le fait remarquer Samson (2005), les événements ne
touchent pas tout le monde de la même manière.
• Les frontières entre deux générations ne sont pas rigides, de sorte
que nombre de personnes se retrouvent à cheval entre deux
générations.

2.5.1. La génération du baby boom


Les baby boomers sont nés entre 1943 et 1960 et rappellent le grand
nombre de naissances qui ont suivi la fin de la Seconde Guerre
mondiale (Ricard, 1996 et Grand'Maison, 1993). Au Canada, avec plus
de 9,8 millions d’individus, cette génération compte pour près du tiers de
la population totale (Foot et al., 1998, dans Harvey 2004 : 39). Or, cette
génération arrive sur le marché du travail à l’époque des « Trente
Glorieuses » (1945-1975) (Ricard, 1996), période caractérisée par une
forte croissance économique (McMullin et al., 2007 et Boudreault, 2002)
et des changements sociaux majeurs. Or, les boomers marqueront cette
période en réorientant les tendances de l'État québécois. Par exemple,
cette génération fera chuter le taux de naissance, augmentera le taux de
femmes sur le marché du travail et contribuera à l’accroissement du taux
de divorces.

D’ailleurs, devant ces mouvements sociaux majeurs, Grand'Maison


(1993) attribue à cette génération le trait de la contestation. On dit qu’au
Québec, la génération du baby boom a eu un poids social tellement
important que son influence sur la vie collective du Québec a été plus
imposante que celle que les boomers américains ont exercé sur la vie
aux États-Unis (Foot et al.,1999). De plus, contrairement à leurs parents
(traditionalistes pour la plupart), qui étaient fidèles aux principes de
16

l’entreprise, les boomers veulent changer les règles de l’emploi (Marconi,


2001 cité dans Nicholas, 2009 : 48). En ce sens, Harvey (2004) affirme
que c’est aux boomers que l’on doit les transformations du travail dans
les organisations. Il va sans dire qu’une partie des membres de la
génération boom intériorisera une forme de tension envers l’autorité,
découlant de cette période, et que celle-ci se répercutera à travers
certains comportements types au travail (Tulgan et al., 2006 et
Boudreault, 2002).

2.5.2. La génération X
Située juste après les boomers, la génération X englobe les personnes
nées entre les années 1961 et 1979 (Zemke et al. 2000). Certains les
nomment « post-boomers » ou « slackers » (Boudreault, 2002), et
d’autres les appellent « baby busters » (Foot, 1996, 1999). Selon la
littérature, cette génération évolue à l’époque où le fait d’avoir des
enfants est démodé (Tulgan et Martin, 2006; Samson, 2005 et Zemke et
al., 2000). Les X ont grandi parmi les MTV et les jeux vidéos (Smola et
Sutton, 2002) et forment la première génération à travailler avec la
technologie (Losyk, 1997 cité dans Nicholas, 2009 : 48).

Selon ces auteurs, les X furent exposés à l'ambition professionnelle de


leurs parents, mais aussi à leur congédiement après beaucoup d’années
de service. Les contextes économiques instables, dont les récessions
des années 1980 et 1990, créent la désillusion chez cette cohorte et les
rendent sceptiques envers l’entreprise (MucMullin, 2008). C’est d’ailleurs
ce qui explique en partie pourquoi les X sont connus comme étant
indépendants, trait qui prend naissance dès leur tendre enfance
(Tapscott, 2009; Eisner, 2005).

Leur pénétration sur le marché du travail professionnel se fait pendant


un important creux de vague (Samson, 2005). Conséquemment, les X
auront beaucoup de difficulté à trouver la stabilité d’emploi, sans
mentionner une bonne rémunération. C’est pourquoi ces X, pour la
plupart, sont hautement scolarisés. Ne voyant pas d’avenir sur le marché
17

professionnel, une grande partie d’entre eux choisissent de se recycler


en poursuivant leurs études. Les plus débrouillards montent rapidement
vers des postes de haute responsabilité, ce qui pourrait expliquer, selon
Samson (2005) et Eisner (2005), une première source de conflits
générationnels potentielle. En effet, dû à leur haut niveau d’éducation, ils
sont prêts à assumer des postes de responsabilités importantes
auxquels leurs collègues boomers n’accédaient qu’après de longues
années en entreprise. D’ailleurs, pour les auteurs Howe et Strauss
(2007), il est évident qu’au Québec, une partie des membres de la
génération X aurait intériorisé une forme de frustration envers les deux
autres générations qui seraient arrivées sur le marché du travail dans
des conditions économiques plus enviables.

2.5.3. La génération Y
Cette génération voit le jour entre 1980 et 2000 et se voit attribuer
plusieurs appellations telles que : génération Internet, Millenials, Echo-
Boomers, Nexters, Generation Why (Tulgan, 2009; Petit 2008, Zemke et
al., 2000), Generation 9–11 (Gravett et Throckmorton, 2007), N-geners
(Boudreault, 2002) et génération Net (Tapscott, 1998).

Comme le souligne Harvey (2004 : 44) :

Plusieurs chercheurs ont reconnu les limites des connaissances


actuelles liées aux jeunes travailleurs de la génération Y. Les données
disponibles à leur sujet sont souvent issues de diverses spéculations et
de premières analyses. Pour certains, il apparaîtra donc nécessaire de
procéder, au cours des prochaines années, à de nouvelles recherches.

D’ailleurs, Dulin (2008 : 43) abonde dans le même sens et supporte que
peu d’études ont été faites sur les besoins au travail de cette cohorte.
Or, dans la littérature, on définit les Y comme une génération
recherchant la flexibilité, une meilleure qualité de vie au travail et des
relations professionnelles transparentes, unilatérales et franches
(Nicholas, 2009). Parmi leurs influences, on retient surtout leur arrivée
dans une société du savoir et le phénomène du multiculturalisme des
sociétés (Harvey, 2004).
18

Les auteurs s’entendent pour dire que cette génération, compte tenu
qu’elle sera majoritaire sur le marché du travail d’ici une dizaine
d’années (Petit, 2008; Allain, 2005 et Harvey, 2004), se fera courtiser
plus que jamais par les employeurs (Petit, 2008, Allain, 2005; Eisner,
2005; Harvey, 2004; Paré, 2002; Zemke et al., 2000).

2.6. Les défis de gestion face au phénomène des équipes


intergénérationnelles
Il se dégage de la littérature que l’arrimage de ces trois générations
apporte son lot de défis au monde de la gestion. Dans la littérature, on
insiste surtout sur le fait que les entreprises auront comme défi de
développer une culture qui mise sur les forces individuelles des trois
générations (Zemke et al., 2000), faisant en sorte qu’elles se sentent
parties prenantes du succès et de la pérennité de l’entreprise. Pour
Nicholas (2009) et pour Audet (2004), le défi reviendra aux gestionnaires
de réviser leurs stratégies de mobilisation, car « ce n’est qu’une question
de temps avant que le clivage s’installe entre ces générations » (Audet,
2004 : 25). Alors que pour d’autres chercheurs, le plus gros défi de
gestion sera de concilier ces différences intergénérationnelles (Saba,
2009) et d’arriver à les faire fonctionner ensemble (Zemke et al. 2000).
Un autre défi consistera à mettre à profit les connaissances acquises sur
les différences intergénérationnelles afin d’éviter, voire de prédire, des
conflits entre ces générations (Zemke et al. 2000). Ainsi, Harvey (2004 :
57) reprend les propos de Turgeon qui, en 1997, affirmait qu’« une saine
gestion des conflits ne tentera pas d’éliminer la présence de ces
derniers, ce qui serait impossible, mais bien d’en réduire les
conséquences négatives ».

2.7. Les implications pour la gestion


Les résultats de cette première lecture nous permettent de constater que
les mutations du marché du travail ont des effets considérables sur les
activités de gestion (Petit, 2008) et posent des défis à l’ensemble des
gestionnaires qui joueront un rôle déterminant dans l’agencement des
19

équipes intergénérationnelles. Or, deux écoles de pensée existent


actuellement en matière de gestion des équipes intergénérationnelles.

La première école nie la nécessité de gérer les générations différemment


(Saba, 2009 et Deal, 2009). Ainsi, Deal (2009) est d’avis qu’il y a au
moins autant de similarités qu’il y a de dissemblances entre les valeurs
des générations. Saba (2009 : 35), quant à elle, croit que :

[…] tenir pour acquis que des employés exprimeront certaines attentes
seulement parce qu’ils appartiennent à une catégorie d’âge semble
donc recevoir peu d’appuis dans les études et manquer quelque peu de
fondement pour plusieurs raisons.

Toujours selon cette auteure, les implications pour la pratique résident


plutôt dans la gestion du cycle de carrière de l’individu (Finegold et al.,
2002, cité dans Saba, 2009). La littérature souligne, entre autres, le
respect des conditions du travail (Saba, 2009), le maintien d’une stabilité
dans les méthodes de gestion en entreprise (Saba, 2009 et Audet, 2004)
et finalement, la gestion des attentes selon les catégories et/ou les
secteurs d’emplois propres à chacun des individus (peu importe l’âge) et
non à la génération (Saba, 2009).

La deuxième école croit plutôt qu’il faut tenir compte des différences
générationnelles et qu’il est vital pour le gestionnaire de mettre à profit
les forces propres à chaque génération (Tulgan, 2006; Zemke et al.,
2006 et Lancaster et al., 2002).

Pour Smola et Sutton (2002), bien que les valeurs d’un individu puissent
se modifier en cours de sa maturation, l’expérience générationnelle tend
à avoir plus d’influence sur les valeurs au travail que l’âge ou la
maturation, ce qui laisse entendre qu’il existe une différence qualitative
entre les générations (Sirias et al., 2007 et Woodruff et Birren, 1972).
20

Dans la même ligne de pensée, Tulgan (20061) s’exprime ainsi à propos


des grandes tendances des cohortes générationnelles.

Certainly we believe that stereotyping people according to age is as


misguided and counterproductive as stereotyping them according to
gender, race, culture, or religion. Still, our research since the early
1990s, backed by our extensive work with people in hundreds of
organizations, tells us that it is highly instructive to look at the trends in
attitudes and behavior that define generational identities. These trends,
we know, are directly tied to growing up and coming of age during the
same historical period amidst the same key historical influences. That's
what it means to be part of a generational cohort.

Après avoir exposé les deux courants de pensée, pour cette étude, nous
nous rangerons du côté de la deuxième école de pensée en posant
l’hypothèse qu’une certaine différence générationnelle existe entre les
cohortes. Dans ce même ordre d’idées, la littérature abonde d’articles
praxéologiques exposant des pratiques de gestion permettant aux
gestionnaires de mieux gérer leurs équipes intergénérationnelles. Trois
approches semblent ressortir systématiquement de la littérature, soit la
communication, le mentorat ou le coaching et la flexibilité.

2.7.1. La communication
Par communication, nous entendons l’ensemble des pratiques visant à
diffuser ou à recevoir de l’information. Les gestionnaires devront être
transparents, crédibles et confiants (Dulin, 2008). Ainsi, il est
recommandé aux gestionnaires d’établir une relation de confiance et de
personnaliser la relation en tentant de mieux connaître l’employé (Eisner,
2005; Simard, 2007; Zemke et al., 2000 cités dans Petit, 2008 : 56). Les
chercheurs, pour la plupart, affirment qu’il sera déterminant que le
gestionnaire soit efficace au niveau de sa communication. Tulgan
(20062) remarque : « In an increasingly hectic environment, managers
are communicating less with their peers and more with direct reports.
This poses a challenge to successfully getting one's job accomplished. »

1
Carolyn A. Martin and Bruce Tulgan (2006) Managing the generation mix from
urgency to opportunity, second edition [ressource électronique], (visionné le 4 mai
2009)
2
Ibid.
21

Soulignons enfin que dans la littérature, on retrouve souvent des


suggestions de pratiques visant à aider le gestionnaire à mieux
communiquer avec son équipe intergénérationnelle; par exemple, celle
de Zemke et al. (20003 :

There are two keys to creating a successful intergenerational workplace.


The first is aggressive communication. Companies shouldn’t ignore
generational differences. Instead, they should take the time to
communicate with the different groups, uncover their needs and
preferences.

2.7.2. Le mentorat et le coaching


Tulgan (2006) préconise le recours au mentorat et au coaching en
gestion et ce, avec toutes les générations actives sur le plan
professionnel. Gravett et Throckmorton (2007) abondent dans le même
sens : « Organizations that understand how to tailor training and
development to incorporate the unique needs of different age groups will
find their investment leveraged to the fullest extent. »

Pour Morin et Aubé (2007 : 234), le coaching et le mentorat sont des


relations qui se différencient de plusieurs façons. D’abord, le mentor joue
principalement deux rôles : un rôle de soutien dans la carrière et un rôle
de soutien psychosocial (écouter, conseiller, servir de modèle). Selon la
mythologie grecque, le mentor était à l’origine considéré comme un ami
de longue date4. Ensuite, contrairement au coaching, qui vise l’atteinte
d’objectifs clairement définis, le mentorat vise plutôt le développement
personnel, social et professionnel de l’individu. Pour sa part, Tulgan
(2006) parle de clarifier les attentes en termes de travail et de donner de
la rétroaction à ses employés : « Offer coaching-style feedback on a
consistent basis so your Boomers know what they're doing well and what
they need to fix or improve upon, and provide guidelines for improvement
with specific goals and deadlines. » (Tulgan, 20065)

3
Ron Zemke, Claire Raines, Bob Filipczak. Generations at work. Managing the clash of veterans,
boomers, xers, and nexters in your workplace, [ressource électronique] (visionné le 4 mai 2009)
4
Wikipedia, «Mentor (mythologie) » [en ligne].
[http://fr.wikipedia.org/wiki/Mentor_%28mythologie%29] (consulté le 18 février 2010)
5
Carolyn A. Martin and Bruce Tulgan. (2006) Managing the generation mix from urgency to
opportunity, second edition [ressource électronique] (visionné le 4 mai 2009)
22

2.7.3. La flexibilité
Afin de pouvoir concilier les différences entre les générations, les
gestionnaires devront s’armer de flexibilité (Tulgan, 2006). Gravett et
Throckmorton (2007) racontent :

Across the generations a pattern emerged during our interviews: All age
groups want respect. All age groups desire flexibility in work
arrangements. However, this desire for respect and flexibility manifests
itself in different ways from generation to generation.

Sur le thème de la flexibilité émergent les exigences face à une meilleure


qualité de vie au travail (Morin, 2007). On dit à ce sujet que les
gestionnaires devront revoir toute la question de l’autorité et du contrôle
en entreprise (Tulgan, 2006). Ceci inclut une flexibilité face aux horaires,
aux tâches, au lieu où l’on travaille et aux équipes, pour ne nommer que
ces quelques aspects (Morin, 2007; Tulgan, 2006). « Managers will have
to discard traditional notions of authority, rules, and red tape, and
become more highly engaged in one-on-one coaching and negotiating
with employees. » (Tulgan, 20066)

2.8. La dynamique intergénérationnelle


Le travail de recension effectué nous a fait prendre conscience du
manque de profondeur des études qui explorent la dynamique
intergénérationnelle (Saba, 2009) et les conflits potentiels générés entre
deux, voire trois générations (Petit, 2008; Johnson et Lopes, 2008).
D’ailleurs, Crumpacker et Crumpacker (2007 : 363) en témoignent : « A
third challenge to the generational perspective is the assertion of a lack
of empirical and or peer-reviewed research supporting the existence of a
generation gap among today’s worker. ».

Les études qui analysent le comportement des générations en


interaction les unes avec les autres sont plutôt rares. Saba (2009 : 25)
déplore la rareté des recherches sur la manière dont la dynamique

6
Ibid.
23

intergénérationnelle se manifeste dans les relations d’emploi et modifie


les comportements et les attitudes au travail : « Dans un article publié en
2002, Finegold et al. ont fait état de cette situation et décrié le manque
d’études sur le phénomène. En 2009 la situation n’a malheureusement
guère évolué. » Dans la littérature, on trouve des études qui proposent
une série de prédictions de conflits possibles; généralement ces
hypothèses sont construites à partir de traits dominants d’une
personnalité générationnelle voire de stéréotypes (Petit, 2008) qui
semblent vouloir entrer en confrontation (Johnson et Lopes, 2008 : 33).

D’ailleurs, Johnson et Lopes (2008) et Petit (2008) émettent des


réserves quant à la crédibilité des informations recueillies auprès des
générations. « Much of the information on the current workforce,
particularly the age or generational characteristics and subsequent
management advice, is based on surveys performed by consulting and
marketing companies. » (Wolburg et Pokrywczynski, 2001; Wellner,
2003 cité dans Johnson et Lopes, 2008 : 33)

2.9. Objectifs de la recherche et conclusion


L’objectif de cette recherche sera d’une part d’examiner la potentialité
d’un certain nombre de conflits basés sur cinq points d’opposition qui
semblent ressortir systématiquement dans la littérature. D’autre part,
nous souhaitons étudier comment ces conflits pourraient se manifester
dans les relations au travail et modifier les comportements dans les
équipes de travail. Pour ce faire, nous tenterons d’éclairer certaines
perceptions et croyances envers les générations identifiées dans la
littérature, et de voir jusqu’à quel point les incompréhensions et les griefs
entre les générations reposent sur celles-ci. Dans cette optique, nous
avons défini une question de recherche permettant de traduire cet
objectif : « Quelles sont les différences intergénérationnelles qui
existent dans un contexte de travail et quels sont les conflits
potentiels générés par ces différences? »
24

La recension des écrits étant faite, le prochain chapitre consistera à


présenter notre cadre conceptuel de même que les axes de recherche
que nous utiliserons pour étudier notre question de recherche.
CHAPITRE 3. Cadre conceptuel
Dans la première partie de ce chapitre, nous présentons notre cadre
conceptuel, issu de la revue de littérature, présentée au chapitre
précédent. Dans la deuxième partie de ce chapitre, nous développerons
nos cinq points d’opposition par génération, en posant un regard sur ce
que nous proposons comme conflits potentiels, en raison de ces
oppositions.

3.1. Présentation du cadre conceptuel


La recension des écrits présentée au chapitre précédent nous a permis
de mieux saisir le phénomène de la mixité intergénérationnelle en milieu
de travail ainsi que les tendances générationnelles de la population
canadienne. Alors que très peu d’études se sont intéressées à la
manière dont la dynamique intergénérationnelle se manifeste dans les
relations d’emploi et modifie les comportements et les attitudes au travail
(Saba 2009), les travaux analysant les conflits intergénérationnels nous
laissent quelque peu sur notre appétit. Présentement, deux types de
canevas d’études semblent exister sur le sujet des conflits
intergénérationnels.

Le premier courant de recherche se rapprochant de notre sujet d’étude


s’intéresse surtout à démystifier les différences intergénérationnelles
relatives aux attentes et/ou aux besoins des générations sur le plan
professionnel, mais sans chercher à savoir si ces différences sont
sources de conflits intergénérationnels. Par exemple, dans les plus
récentes recherches, nous avons retrouvé ce modèle chez Saba (2009),
qui analyse huit variables chez les quatre générations actives dans trois
domaines professionnels, tandis que Busch et al. (2008) analysent
quatre variables dans le domaine des technologies de l’information.

À l’inverse, nous avons trouvé beaucoup de modèles de recherche qui


anticipent des conflits intergénérationnels, mais souvent, ces prédictions
26

sont conceptualisées à partir des traits dominants des personnalités


générationnelles et ne sont pas fondées sur des variables telles que
celles définies dans les recherches mentionnées plus haut (Johnson et
Lopes, 2008; Petit, 2008). Ainsi, on retrouve ce modèle dans les
recherches de Tulgan, (2006), Lancaster et Stillman, (2002); Zemke et
al., (2000) ; Howe et Strauss, (2000).

La présente étude s’intéressera donc à proposer des conflits potentiels


basés sur cinq variables que nous aurons déterminées à partir de la
littérature. Dans un premier temps, nous tenterons d’explorer les
perceptions et croyances envers les générations retrouvées de la
littérature, et de voir jusqu’à quel point les incompréhensions et les griefs
entre les générations reposent sur celles-ci. Pour ce faire, nous
reviendrons sur les événements que nous appellerons les influences
ayant marqué chacune des générations à l’étude, contribuant ainsi aux
valeurs et aux comportements adoptés par ces générations. Cet élément
de notre cadre de recherche nous permettra par la suite de catégoriser
ces comportements et valeurs clés par point d’opposition et d’expliciter la
raison de nos choix de thèmes pour cette étude.

Dans un deuxième temps, ce chapitre s’intéressera à définir les conflits


intergénérationnels possibles par point d’opposition, mettant l’emphase
sur les caractéristiques et les attentes qui semblent vouloir provoquer
des confrontations. Finalement, nous conclurons ce chapitre avec un
tableau-synthèse démontrant les conflits potentiels par la plus petite
unité d’équipe intergénérationnelle possible, soit les couples de deux
générations.

3.2. Question générale de recherche


Nous ne pouvons affirmer que les conflits d’équipe au travail sont
uniquement liés aux différences générationnelles (Saba, 2009 et Tulgan,
2006). En nous basant sur l’hypothèse que ce sont les événements qui
ont forgé les valeurs et comportements d’une cohorte (Lancaster et
Stillman, 2002 et Zemke et al., 2000 ), dans cette recherche, nous
27

supposerons que ces dissemblances peuvent jouer un rôle dans les


incompréhensions, les ambiguïtés, voire même les conflits qui sont
d’ordre partiellement générationnel (Sirias et al,. 2007). L’intérêt de
travailler à partir de l’idée que les conflits sont partiellement
générationnels sera d’explorer dans quelle mesure le poids de la
génération est perceptible lorsque les gens nous parlent de leurs
attitudes, valeurs, comportements, préférences ou réticences
personnelles face aux points d’opposition que nous avons déterminés.
Nous rejoindrons ainsi les propos de Sirias et al (2007 : 3) :

Although a worker’s values do change as the individual matures, the


generational experiences tend to influence work values more than age
or maturation (Smola and Sutton, 2002), which suggests that a
qualitative difference exists between generations.

Dans cette optique, nous avons défini une question de recherche


permettant de traduire cet objectif : « Quelles sont les différences
intergénérationnelles qui existent dans un contexte de travail et
quels sont les conflits potentiels générés par ces différences? »

3.3. Les influences, les caractéristiques et les attentes des trois


générations
Depuis les années 1990, il se dégage de la littérature de nombreux
travaux s’intéressant aux valeurs, aux attitudes et aux comportements
des générations composant la main-d’œuvre aujourd’hui (Petit, 2008;
Harvey, 2004). Ceci étant dit, nous avons dénombré cinq points
d’opposition rejoignant les trois générations à l’étude (baby boom, X et
Y). Pour avoir une meilleure compréhension du choix des cinq points
d’opposition, nous proposons de rassembler dans un tableau synthèse
inspiré des écrits de Petit (2008 : 33) et de Harvey (2004 : 37), les trois
éléments descriptifs d’une génération (les influences, les caractéristiques
et les attentes).

D’abord, dans la première partie du tableau 3.1, nous mettons


sommairement en relief les influences qui relèvent des événements
historiques marquants et qui ont forgé les personnalités générationnelles
28

des cohortes à l’étude (Petit, 2008; Harvey, 2004; Zemke et al., 2000).
Ensuite, dans le deuxième volet de ce tableau, nous classerons les
caractéristiques (comportements clés et attitudes) et les attentes
(valeurs, préférences et réticences) envers le monde du travail,
s’expliquant en partie par les influences (Petit, 2008; Harvey, 2004)
selon les cinq points d’opposition où nous proposons des confrontations.

Tableau 3.1 : Événements clés et valeurs propres


à chacune des générations
Baby boomers Génération X Génération Y
1943-1960 1961-1979 1980-2000
• Prospérité économique
• Le premier grand choc
pétrolier • Récession économique
• Personnalisation de • La vie avec un seul
• Les ordinateurs
l’individu parent
• La violence dans les
• Télévision • Musique plus
Les écoles
• L’éclatement des banlieues • Le sida
influences • L’ouverture sur le
• La guerre du Vietnam • Les ordinateurs
monde
• Le droit civil • Le Challenger
• Le multiculturalisme
• La Guerre froide • Le mur de Berlin
• L’émancipation de la • Les divorces
femme
• L’Homme sur la lune
• Dévoués à la tâche
• Ambitieux
• Reconnaissance de leur
Le sens au • Opportunistes • Équilibre travail-vie
titre
travail • Équilibre travail-vie privée privée
• Promotion
• Gratification personnelle
• Relation amour/haine
Le rapport à • Pragmatisme envers • Confiance envers
envers l’institution
l’institution l’institution l’entreprise
• Obsession pour leur travail
• L’équipe avant tout
La place du • Recherchent la satisfaction
• Individu dans l’équipe • Collectivisme
travail d’équipe de leurs besoins
personnels
• Loyaux à l’entreprise
• Loyaux aux personnes • Expérience
• Avancement dans une
La loyauté mais pas à l’entreprise transactionnelle
même entreprise
• “Direct”
• E-Mail / Voice-mail
• Face time • “As needed”
• Instant messaging
La • One-on-One • Relation hiérarchique
• Lots of cc’s
communication • In-person informelle
• Relations égalitaires
• Formalité • Communication ouverte
• Rétroaction
et transparente
29

3.4. Les points d’opposition et conflits intergénérationnels


potentiels
Dans cette deuxième partie, il conviendra de décrire plus concrètement
ce que l’on entend par points d’opposition et comment, selon la
littérature, ces points diffèrent d’une génération à l’autre. Ainsi, c’est sur
la base des cinq concepts suivants que nous représenterons les écarts
entre les générations et que nous identifierons et caractériserons les
conflits intergénérationnels potentiels pour cette recherche. : 1) le sens
au travail, 2) le rapport à l’institution, 3) la place du travail d’équipe,
4) la loyauté et 5) la communication. Tout d’abord, pour supporter
l’idée que les conflits peuvent avoir une forte composante
générationnelle, notre étude consistera à reprendre de façon très
synthétique le portrait des générations au travail qui ressort de la
littérature afin de tenter de proposer certains conflits intergénérationnels
potentiels (Zemke et al., 2000). Ensuite, nous examinerons les couples
de deux, puisqu’ils représentent la plus petite unité d’équipe
intergénérationnelle qui soit. La figure 3.1 résume notre approche

Figure 3.1 : Conflits intergénérationnels basés sur


les cinq points d’opposition.
30

3.5. Le sens au travail


Il ressort de la littérature que les changements sociaux, en progression
depuis les dix dernières années, révolutionnent nos perceptions du
travail (Morin, 2006). Selon une étude menée par les membres de la
Meaning of Work International Research Team en 1987, le travail se
classe au deuxième rang en importance après la famille dans la plupart
des pays; cependant, il joue un rôle important dans le développement de
la personne. Pour Limoges (1987), travailler est un besoin presque aussi
fondamental que se nourrir. Morin (2006 : 9) décrit le sens au travail à
travers trois définitions : le sensus, le sumo et la phénoménologie.

Le sensus renvoie à la signification du travail, la valeur aux yeux du


sujet et la définition ou la représentation qu’il en a. Le sumo parle plutôt
de la direction, l’orientation du sujet dans son travail, ce qu’on recherche
dans le travail et les desseins qui guident ses actions. Et la
phénoménologie est l’effet de cohérence entre le sujet et le travail qu’il
accomplit, entre ses attentes, ses valeurs et les gestes qu’il pose
quotidiennement dans son milieu de travail.

Pour Petit (2008) et Smola et Sutton (2002), les valeurs au travail sont
davantage influencées par les expériences générationnelles que par
l’âge et l’évolution de la personne. Morin (2007) affirme que la manière
dont un individu perçoit son travail influence le sens qu’il lui donne. Ainsi,
ceux qui perçoivent leur travail comme une vocation, plutôt que comme
un emploi ou une carrière, seront plus engagés envers leur travail (Foret
et al. 2004).

3.5.1. Le sens au travail pour la génération du baby boom


3.5.1.1. Dévoués
Il se dégage de la littérature que beaucoup de baby boomers sont perçus
comme des bourreaux de travail (Lancaster et al., 2002). En raison des
événements qui forgèrent leur nature compétitive, les baby boomers
entrèrent sur le marché du travail en se consacrant à la tâche. Il semble
même qu’une grande majorité de boomers ont priorisé le travail au
détriment de la famille pour se bâtir une « solide réputation » dans une
même entreprise (Saba, 2009). Selon la littérature, nombreux sont les
31

boomers à croire que la productivité et la réussite se mesurent par le


nombre d’heures passées au bureau (Samson, 2005) contrairement aux Y
qui croient qu’il est important de travailler intelligemment, pas
nécessairement plus fort (Gravett et Throckmorton, 2007). Cette
philosophie a été alimentée par les patrons traditionnalistes, qui croyaient
que « le temps que chacun passait à son bureau lui valait une meilleure
évaluation que la qualité accomplie » (Samson, 2005 : 49).

3.5.1.2. Avancement de carrière


D’ailleurs, conscients de la hiérarchie (Tapscott, 2009), ils aspirent à y
grimper (Busch et al., 2008; Lancaster et Stillman, 2002) et cette ambition
pourrait constituer une priorité (Saba, 2009) dans leur carrière, même si
cela implique de prolonger les heures du bureau et/ou d’apporter du travail
à la maison (Boudreault, 2002).

Ils sont nombreux à rêver d’une position enviable dans une grande
entreprise privée, si possible une multinationale, qui offre des
possibilités de mobilité tant géographique que professionnelle. Ils sont
disposés à donner toute leur énergie et le meilleur d’eux-mêmes pour
atteindre les échelons supérieurs. (Boudreault, 2002 : 65)

Or, les boomers croient qu’un employé doit acquérir de l’expérience et


« faire ses preuves » afin d’avancer (Zemke et al., 2000), ce qui pourrait
constituer une source de conflits envers les Y, qui perçoivent les
possibilités d’avancement et les défis comme des caractéristiques
importantes de l’emploi (Petit, 2008; Audet, 2004; Tulgan et Martin,
2001; Zemke et al., 2000). De plus, selon la littérature, les boomers
perçoivent les autres générations comme étant impatientes (Zemke et
al., 2000). Pour O’Bannon (2001 : 99), c’est une question d’ajustement :
« Older workers have not had an easy time adjusting to the influx of
young talent. » Busch et al. (2008 : 54), quant à eux, démontrent à
travers une étude que les baby boomers restent réticents à la simple
pensée de devoir se départir de certaines responsabilités : « Boomers
felt more negatively about passing on responsibility to someone else in
the organization. »
32

3.5.2. Le sens au travail pour la génération X


3.5.2.1. Opportunistes
Dans la littérature, on dit surtout que les X sont attirés par les
opportunités de carrière (Crumpaker et Crumpacker, 2007; Patterson,
2007; O’Bannon, 2002; Smola et Sutton, 2002). MacLaughlin (2009)
précise que les X recherchent avant tout une sécurité de carrière plutôt
qu’une sécurité d’emploi : « They changed the career ladder to a career
lattice, and want to know, what’s in it for me? When dissatisfied with
things at work, a gen Xer will simply leave and find another job. »
(MacLaughlin, 2009 : 35).

Gravett et Throckmorton, (2007) et Samson (2005) disent que les X se


bâtissent une expérience afin de rester flexibles mais surtout,
employables. Pour Smola et Sutton (2002 : 23), c’est une question de
vouloir travailler selon leurs propres objectifs. Patterson (2007 : 19)
l’explique ainsi :

Because they do not have the same expectations for permanence in the
world that characterized the work habits and employment loyalties of
earlier generations, they have built portable careers and appear ready to
change employers as attractive opportunities and challenges arise.

Lancaster et Stillman (2002); Karp et al. (1999) et Gravett et


Throckmorton (2007), quant à eux, avancent que la raison qui motive un
X à rester dans l’entreprise est la même que celle qui le pousse à partir,
c’est-à-dire les opportunités de carrière qui lui donneront la possibilité
d’ajouter une corde à son arc contrairement aux boomers qui préféreront
rester longtemps dans une même entreprise afin d’honorer leur
réputation (Saba, 2009; Crumpaker et Crumpacker, 2007).

3.5.2.2. Équilibre travail-vie privée


MacLaughlin (2009), Patterson, (2007), Gravett et Throckmorton, (2007),
Samson (2005) et Ricard (1993) précisent que contrairement à leurs
parents (boomers pour la plupart) et à certains collègues boomers, les
membres de la génération X accordent davantage priorité à la famille, la
carrière venant en second lieu. D’ailleurs, contrairement aux boomers, les
33

X ne seront pas prêts à sacrifier leurs besoins personnels au détriment de


leur emploi (Gravett et Throckmorton, 2007 ; Karp, et al., 2002).

Toujours selon la littérature, les X prônent les horaires flexibles (Nicholas,


2009) et l’autonomie au travail (Samson, 2005). Lancaster et Stillman,
2002 : 114) les dépeignent ainsi : « Accordingly, Gen Xers, struggle to
understand why it’s so important for someone to see if they are getting the
work done satisfactorily. »

Il semble évident, comme Busch et al., (2008) et Howe et Strauss (2007)


le soutiennent, que cette philosophie ne fait pas l’unanimité chez les
boomers et peut générer des frustrations et de l’incompréhension entre
eux et les X.

3.5.3. Le sens au travail pour la génération Y


3.5.3.1. Ambitieux
Saba (2009) dit que même si les Y sont conscients qu’ils travaillent au
profit de quelqu’un d’autre, il leur importe tout de même que leur travail
ait un sens. Selon Samson (2005), le membre de la génération Y
envisage son emploi comme une vocation. Parce que les Y participaient
au processus décisionnel familial (Petit, 2008; Dulin, 2008; Samson
2005; Lancaster et Stillman, 2002), ils veulent ressentir qu’ils contribuent
au succès de l’entreprise (Saba, 2009 ; Tapscott, 2009 ; Samson, 2005).
Or, pour Tulgan (2009) et Dulin (2008), les Y se sentent prêts à relever
le défi du monde organisationnel et, à l’inverse des boomers qui ont dû
faire leurs preuves avant de se tailler une place de choix au soleil
(Gravett et Throckmorton, 2007; Samson, 2005), les Y demandent à
avoir des défis de taille à relever dès leur entrée en entreprise (Petit,
2008). Karp et al. (2002 7) expriment ainsi le contraste entre les Y et les
boomers : « In the midst of this change, Boomers, who sacrificed so
much, feel annoyed by a new generation that seems to sacrifice so little
yet wants the same things, or more, in return. »

7
Hank Karp, Connie Fuller, Danilo Sirias. Bridging the Boomer Xer gap [ressource électronique]
(visionné le 4 mai 2009).
34

3.5.3.2. Éthique de travail.


Tapscott (2009), Dulin (2008) et Samson (2005) disent qu’à l’opposé des
autres générations, les Y auront beaucoup de difficultés à sacrifier leurs
besoins personnels à leur travail. « This cohort does not live to work, this
generation seeks a healthier work-life balance than their parents
experience. » (Dulin, 2008 : 55). Pour Tapscott (2009 : 160), ces attitudes
peuvent être perçues comme un manque d’engagement, surtout par les
boomers qui, eux, ont toujours priorisé le travail : « One out of every two
Net Generation worker values family time more than work, compared with
41 percent of boomers. ».

De plus, pour Tapscott (2009), Tulgan (2009) et Lancaster et Stillman,


(2004), un peu comme les X, les Y ne voient pas la nécessité de
travailler sur les lieux de l’organisation pour être productifs. Gravett et
Throckmorton (2007)8 affirment que pour les Y, la productivité compte
avant tout :

Their work ethic cannot be measured by when they come to work, how
many hours they work, and how many breaks they take. Rather, these
generations would like companies to measure their work ethic in terms
of the results they produce—not how they do it, where they do it, or
when they do it, as long as (necessary) deadlines are met.

3.6. Le rapport à l’institution


Dans la littérature, on dit que les générations baby boomers, X et Y
entretiennent des rapports très différents envers l’institution. Pour mieux
comprendre cette variable, certains théoriciens font une corrélation avec
le moment où ces générations entrèrent sur le marché du travail et la
santé économique de leur époque (Samson, 2005). Pour Gravett et
Throckmorton (2007), tout s’explique par les changements sociaux,
notamment ceux qui sont survenus dans les domaines de l’éducation, de
la technologie et de l’économie. Pour Samson (2005), le mouvement
économique d’une société explique en partie les perceptions de sa

8
Linda Gravett and Robin Throckmorton (2007). Bridging the generation gap how to get radio
babies, boomers, Gen Xers, and Gen Yers to work together and achieve more,, Franklin Lakes,
NJ : Career Press, 224 p. [ressource électronique] (visionné le 4 mai 2009).
35

population face au travail. Par exemple, selon les tenants de cette


théorie, il y aurait une forte corrélation entre le degré de bonheur
qu’éprouvent les citoyens et la croissance du produit intérieur brut (PIB)
de l’État. D’ailleurs, Petit (2008) et Johnson et Lopes (2008) avancent
que les attitudes des personnes peuvent se forger par les circonstances
ou les événements marquant un espace de temps. Par exemple, en
période d’incertitude économique, tous les individus, indépendamment
de leur appartenance à une génération, tendent à valoriser un emploi
stable. Un exemple qui démontre ce postulat serait les nombreux
changements économiques et démographiques enclenchés dans les
années 1980 (entrée des jeunes du baby boom et des femmes sur le
marché du travail, tertiarisation de l’économie et émergence des
technologies de l’information et des communications). Petit analyse ainsi
les effets de ces changements :

Ces changements ont eu pour conséquences de polariser le marché de


l’emploi et de créer un écart important entre les «bons» et les
«mauvais» emplois. Ces derniers sont devenus des emplois moins
qualifiés, instables, mal rémunérés et souvent caractérisés par des
statuts d’emplois atypiques, comme des emplois à temps partiel et
temporaires, le travail indépendant et le cumul d’emplois. (Bédard et
Grignon, 2000; Fournier et Bourassa, 2000 cités dans Petit, 2008 : 20).

3.6.1. Le rapport à l’institut pour la génération du baby boom


3.6.1.1. Relation amour ou haine
Les boomers arrivent sur le marché du travail pendant une période de
grande prospérité économique (Crumpaker et Crumpacker, 2007 et
Ricard, 1993). Compte tenu du poids démographique imposant qu’ils ont
toujours connu, les boomers, contestataires dans l’âme, ont besoin de
faire une différence, notamment dans leur milieu de travail, qui a été
modelé par les générations précédentes (Wesner et Miller, 2008;
Lancaster et al., 2002; Cordeniz, 2002). Cordeniz (2002 : 239) les décrit
ainsi : « Having grown up with the sense that they were special and
capable of changing the world, they equate work with self-worth,
contribution, and personal fulfillment. »
36

Par ailleurs, pour Tapscott (2009), le fait que les boomers aient évolué
dans une société très hiérarchisée (à la maison, à l’école et au travail)
explique pourquoi ils entretiennent une relation amour/haine à l’égard de
l’autorité, voire de l’institution (Tulgan et al., 2006 et Boudreault, 2002)
contrairement aux Y, qui voient leur supérieur comme un guide et qui
valorisent l’égalité plutôt que la hiérarchie (Nicholas 2009; Howe et
Strauss, 2007). Dans la littérature, on écrit que compte tenu de cet
aspect, les boomers auront été moins flexibles, plus compétitifs et très
indépendants (Howe et Stauss, 2007). Boudreault (2002 : 65) va dans le
même sens et précise que « le marché de l’emploi est l’un des rares
secteurs où le poids démographique joue contre eux ». Il poursuit en
citant Dunn :

As Boom climbed the corporate ladder, the steps seemed steeper, not
only because of the inherent competitiveness of upper-management
jobs, but also because of the sheer numbers of capable boomer
applicants. (Dunn, 1993 : 11 cité dans Boudreault, 2002 : 66).

Bien entendu, pour grimper les échelons de l’organisation, les boomers


voient l’entreprise comme un lieu où l’on doit faire ses preuves, à
l’opposé des X et des Y qui croient aux compétences et aux réalisations
et non au nombre d’années passées dans une même entreprise.

3.6.2. Le rapport à l’institut pour la génération X


3.6.2.1. Relation de pragmatisme
Dans la littérature, on dit que les membres de la génération X se
montreront pragmatiques envers l’institution (Sirias et al., 2007;
Patterson, 2007, Boudreault, 2002 et Ricard, 1993). Sirias et al. (2007 :
751) analysent cette relation en reprenant les propos de Carbo
(1997 : 59) : « Generation X is a group without a clear identity, with
members who generally have diminished expectations, and feelings of
alienation, pragmatism, cynicism, conservatism and detachment. »

Sceptiques face à l’autorité (Boudreault, 2002), ils le sont encore plus


envers l’institution. Nicholas, (2009) ajoute même que cette génération
ne sera pas impressionnée par la hiérarchie, contrairement aux boomers
37

qui ont appris à respecter les différents échelons de l’entreprise. Pour


Zemke et al., (2000) et pour Samson (2005), cette attitude qu’adoptent
les X donne l’impression aux autres générations qu’ils ne veulent pas
vraiment s’engager.

3.6.3. Le rapport à l’institut pour la génération Y


3.6.3.1. Relation de confiance
Selon la littérature, les Y arrivent avec plein de confiance (Howe et
Strauss, 2007), mais surtout avec des attentes envers l’institution
(Tapscott, 2009). D'abord, ils s’attendent à ce que les entreprises leur
montrent leur métier (Tulgan, 2009). Pour Dulin (2008), le chef d’équipe
jouera un rôle majeur dans cet accomplissement puisqu’il sera perçu
comme un guide plutôt que comme un supérieur immédiat. D’ailleurs,
Howe et Stauss (2007 : 50) affirment que les Y seront plus faciles à
former que leurs collègues boomers, qui étaient plus compétitifs et
indépendants.

Dans la littérature, on affirme aussi que les Y s’attendent à créer des


liens de confiance avec leurs employeurs (Saba, 2009, Dulin, 2008;
Samson 2005 et Lancaster et Stillman, 2002 ). Howe et Stauss
(2007 : 50), quant à eux, expliquent que les Y seront plus ouverts envers
l’autorité que leurs collègues boomers, qui se méfiaient beaucoup lors de
leur entrée sur le marché du travail (Tulgan et Martin 2006 :10).
L’attitude des Y tranche également avec celle des X, qui sont demeurés
sceptiques face à l’organisation dans son ensemble (Zemke et al.,
2000). Pour Saba (2009) de même que pour Samson (2005), cette
relation devra se baser sur des rapports d’égalité et non de hiérarchie,
car contrairement aux boomers, qui ont toujours évolué dans des
structures très hiérarchisées, les Y ont été éduqués dans l’égalité
(Tapscott, 2009; Petit, 2008; Alch, 2008).

3.7. La place du travail d’équipe


Les chercheurs qui se sont penchés sur le travail d’équipe affirment qu’il
est essentiel pour le bon fonctionnement d’une entreprise (Sirias et al.,
38

2007). Pour Morin et Aubé (2007 : 364), « dans un contexte


organisationnel, le groupe représente une ressource, tant pour l’individu
qui en fait partie que pour l’entreprise ». Crumpaker et Crumpaker,
(2007) voient une corrélation positive entre le degré d’attachement qu’a
un individu envers son équipe et la manière dont celui-ci perçoit ses
propres réalisations. Bien que plusieurs formes d’équipes existent à ce
jour (Lafortune et al., 2004), pour certains chercheurs, la perception
qu’on se fait à l’égard de ce concept est lourde et dépassée (Tulgan,
2009; Patterson, 2007) et doit être revue afin de coïncider avec les
besoins de notre société actuelle (Petit, 2008; Morin 2006).

3.7.1. La place du travail d’équipe pour la génération du baby boom


3.7.1.1. L’équipe est un tout
Tout comme d’autres chercheurs, Sirias et al. (2007) affirment que les
boomers prônent le travail d’équipe parce qu’ils accordent de la valeur à
la participation de chacun :

As the Baby Boomers have become more influential in their


organizations, they have also begun to implement team-based
structures. Many of today’s key decisions-makers were in either
universities or colleges or were up-and-coming young managers when
participative, team-oriented styles of management began to gain
dominance in the 1970s and early 1980s. The values of
interdependence, consensus decision-making and collaboration became
the watchwords for group development. In this setting, teams truly
became the wave of the future. (Sirias et al., 2007 : 751)

D’un autre côté, on soutient aussi que l’individualisme est au centre de


l’existence de la génération du baby boom : « They were raised to be
independent and to believe that they could control their own destinies »
(Mitchell, 1995 : xxi cité dans Boudreault, 2002 : 46). Ceci étant dit, selon
Tulgan (2006), le boomer qui se retrouve dans un poste d’autorité aura
tendance à faire de la micro-gestion dû à son besoin d’être en contrôle
de son environnement (Eisner 2005). D’autant plus que, lorsqu’ils sont
entrés sur le marché du travail, comme le souligne Tulgan (2006 : 10) :
« command-and-control leadership was the norm ». Samson (2005 : 43)
abonde en ce sens et ajoute que les boomers sont des adeptes d’un
consensus forcé, c’est-à-dire que tous les membres de l’équipe doivent
39

être d’accord, « sinon le membre est tout de suite rabaissé au rang de


ceux qui n’ont pas l’esprit d’équipe ». Cette caractéristique les oppose
aux deux autres générations, qui ne recherchent pas le consensus à tout
prix.

3.7.2. La place du travail d’équipe pour la génération X


3.7.2.1. Individu dans l’équipe
Une abondance de textes souligne l’individualisme des X. Citons entre
autres Sirias et al. (2007 : 751) :

A common thread in the literature is that members of generation X are


to be considered to be highly individualistic more so than the Baby
Boomers (…) Kennedy, (1996) states that Baby Boomers feel invincible
as part of a team but baby busters work best alone

D’un autre côté, Gravett et Throckmorton (2007) et Boudreault (2002)


ont trouvé que les X voulaient travailler en équipe à condition que les
entreprises reconnaissent l’apport individuel de chacun des membres. À
ce propos, Tolgan affirme : « The Xers need to feel included in the
process of shaping team goals, and they do need to have a concrete role
in implementing those goals. Without those features, it doesn’t look like a
team to Xers. » (Tulgan, 2000 : 65, cité dans Boudreault, 2002 : 89).
C’est, selon l’auteur, ce qui explique, en partie du moins, pourquoi les X
sont perçus comme ayant peu ou pas d’esprit d’équipe.

Samson (2005) abonde en ce sens et précise que les X ne cherchent


pas nécessairement le consensus : ils veulent simplement que chacun
respecte les opinions de l’autre. «Les autres ont le droit de penser
autrement qu’eux, pour autant que leur propre point de vue soit
respecté. » (Samson, 2005 : 51)

3.7.3. La place du travail d’équipe pour la génération Y


3.7.3.1. Équipe flexible
Dans la littérature, on affirme que les Y sont plus enthousiastes à
travailler en équipe que les générations précédentes (Petit, 2008). Ce
serait, selon plusieurs chercheurs (Saba, 2009; Subjansky, 2009; Alch,
40

2008; Sirias et al., 2007; Gravett et Throckmorton, 2007; Tulgan et


Martin, 2006), parce qu’ils sont habitués à fonctionner en groupe
contrairement aux X qui furent laissés à eux-mêmes et aux boomers
« qui offrent un véritable culte du moi tout au long de leur existence »
(Boudreault, 2002 : 46). Sujansky (2009 : 24) explique :

Millennials are used to doing things in groups, whether in team sports,


school projects or group dates. Some have likened this trend to a type
of “herding” behavior unique to Millennials, but is certainly indicative of
team mentality that’s important to this generation.

En contrepartie, les Y tendent à valoriser le respect de l’opinion d’autrui


et demandent en retour qu’on fasse de même à leur égard (Samson,
2005). D’ailleurs, selon une étude présentée par Gravett et
Throckmorton en 2007, les Y considèrent les boomers comme étant trop
autoritaires, voire même contrôlants.

3.8. La loyauté
Il semble tenu pour acquis, parmi les chercheurs, que l’engagement
organisationnel soit un très bon indicateur de la qualité de vie au travail
(Ketchum et Trist, 1992), donnant un sens aux employés (Morin, 2007).
Tandis que les entreprises sont prêtes à tout pour fidéliser les employés
à leur organisation (Morin, 2006, 2007), la question qui se pose à
présent est de savoir si effectivement, la loyauté en entreprise est une
question de bon-vouloir des employés ou si elle est plutôt une
caractéristique propre à la personne en tant qu’individu appartenant à
une génération spécifique.

Deux courants de pensée circulent parmi les chercheurs. En effet, une


étude de Saba (2009) conclut que les générations ne présentent aucune
différence au niveau de la loyauté envers l’organisation. Tulgan (2009) et
Patterson (2007), quant à eux, appuient cette théorie et ajoutent que le
concept de la loyauté doit être redéfini. Par ailleurs, pour d’autres
chercheurs, il est clair que les baby boomers, à l’inverse des X et Y, ne
sont pas conduits par le même type de loyauté en entreprise (Petit,
2008; Harvey 2004; Boudreault, 2002).
41

3.8.1. La loyauté pour la génération du baby boom


Les chercheurs dépeignent les boomers comme étant très loyaux à
l’entreprise. On dit que durant sa carrière, un boomer aura sacrifié
beaucoup de sa vie personnelle afin de prouver sa loyauté et son
engagement envers l’entreprise (Karp et al., 2002). Crumpaker et
Crumpacker (2007 : 594) dressent le portrait suivant : « Growing up in an
era of economics prosperity, this generation became great believers in
lifetime employment, company loyalty and paying one’s dues in order to
gain respect and receive seniority. »

Certains boomers voient même cette forme de sacrifice comme une


valeur à véhiculer parmi leurs pairs et subalternes (Karp et al., 2002).
Pour Lancaster et al., (2002), les boomers sont fidèles à l’entreprise
parce qu’ils ont une propension à viser la stabilité d’emploi. Saba (2009)
quant à elle, avance que c’est parce qu’ils préfèrent se construire une
bonne réputation au sein d’une même organisation. Karp et al., (2002)
ajoutent que certains boomers (surtout ceux approchant leur retraite)
s’interrogent à savoir s’ils auront assez de temps pour inculquer à la
relève ce type loyauté qui ne semble pas convenir aux deux autres
générations, les X et les Y.

3.8.2. La loyauté pour la génération X


3.8.2.1. Loyauté?
Pour la génération X, la loyauté prend un tout autre sens (MacLaughlin,
2009 et Patterson, 2007). Selon Boudreault (2002), les X manquent de
loyauté parce qu’ils furent aux premières loges des restructurations
organisationnelles et des licenciements de leurs parents dans les
années 1980 et 1990. Gravett et Throckmorton (2007) croient que c’est
parce qu’ils revivent un schéma qui ressemble étrangement à celui de
leurs parents. Un jour, par exemple, ils peuvent travailler avec quelqu'un,
et le lendemain, apprendre que cette personne a été congédiée (Zemke
et al., 2000). Pour MacLaughlin (2009), les X sont plus enclins à être
42

loyaux aux individus qu’aux leaders et/ou à l’entreprise. Cordeniz (2002 :


243) décrit une étude confirmant cette tendance :

In a study where approximately 250 telephone interviews were


conducted generation X respondents described themselves as hard
workers who view jobs and work as a means to an end and claimed to
have little confidence in loyalty to leaders and institutions.

3.8.3. La loyauté pour la génération Y


3.8.3.1. Échange transactionnel
Selon la littérature, les jeunes de la génération Y ont des opinions très
différentes en matière de loyauté au travail. Tulgan (2009 : 12) observe :

They can be very loyal, but they don’t exhibit the kind of loyalty you find
in a kingdom, blind loyalty to hierarchy, tight observance of rites of
passage, patience for recognition and rewards. Instead, they offer the
kind of loyalty you get in a free market—that is, transactional loyalty
(whatever you can negotiate). This is the same kind of loyalty you
extend to your customers and clients. We call it “just-in-time loyalty”.

Pour Tapscott (2009), les Y ne veulent pas se commettre à un seul


emploi. Selon Ach, « ils peuvent réorienter leur carrière de cinq à huit
fois » (Alch, 2000 cité dans Saba 2009 :27) et acquérir de nouvelles
compétences pour augmenter leur bagage de connaissances plus d’une
fois durant leur vie (Saba, 2009 et Tulgan, 2009). Or, selon Tapscott
(2009), les plus performants en seront déjà à leur cinquième emploi dès
leur 27e anniversaire et conserveront un même emploi en moyenne 2,6
ans.

3.9. La communication
Dans la littérature, on dit que la communication peut être la source de
certains conflits intergénérationnels (Smola et Sutton, 2002) et que si
négligée, elle pourrait aller jusqu’à affecter la productivité des
organisations (Gravett et Throckmorton, 2007). Pour Smola et Sutton
(2002 : 363), les générations poursuivent les mêmes objectifs mais
n’arrivent simplement pas à exprimer leurs besoins dans le même
langage : « Companies need to realize that different parts of the
population communicate in different ways. »
43

Gravett et Throckmorton (2007)9, quant à eux, suite à une série


d’entrevues avec les générations, découvrent une tendance émergente :
« All age groups want respect. All age groups desire flexibility in work
arrangements. However, this desire for respect and flexibility manifests
itself in different ways from generation to generation. »

3.9.1. La communication pour la génération du baby boom


On dit dans la littérature que les boomers préconisent le formalisme
(Lancaster et al., 2002), contrairement aux X et Y qui sont à l’opposé de
cette philosophie (Eisner, 2005 et Boudreault, 2002). Gravett et
Throckmorton, 2007)10 confirment : « Y likes to take a more casual,
relaxed approach to the workplace. »

Cette préférence des boomers ressort également dans leur tendance à


vouloir officialiser et documenter : discussions (en rapport avec le
travail), rencontres et/ou réunions d’équipe (Lancaster et al., 2002). Ces
manières procédurales semblent déranger les X et les Y compte tenu de
leur attitude un peu plus relâchée. Boudreault (2002) de même que
Gravett et Throckmorton (2007) abondent en ce sens et affirment que
selon leurs recherches, les boomers sont perçus comme étant
autoritaires. En position d’autorité, on dit que les boomers aiment avoir le
contrôle sur leur environnement (Tulgan, 2009; Eisner, 2005 et
Boudreault, 2002), ce qui se reflète dans leur manière de concevoir le
« consensus » plus souvent qu’autrement avec une unanimité obligée
(Samson, 2005 et Zemke et al., 2000) : « When they are in leadership
roles, their tendency is toward a collegial, consensual, sometimes
benignly despotic style » (Zemke et al., 2000 :79). Une étude de Gravett
et Throckmorton (2007) confirme cet état de fait en révélant que les
générations X et Y affirmaient en entrevue que leurs opinions n’étaient

9
Linda Gravett and Robin Throckmorton (2007). Bridging the generation gap how to get radio
babies, boomers, Gen Xers, and Gen Yers to work together and achieve more, Franklin Lakes,
NJ : Career Press, 224 p. [ressource électronique] (visionné le 4 mai 2009).
10
Ibid.
44

pas toujours respectées et que les choses devaient toujours marcher à


la manière des boomers.

3.9.2. La communication pour la génération X


Selon la littérature, les X aiment communiquer lorsque nécessaire
contrairement aux Y, qui demandent à recevoir constamment de la
reconnaissance, de la rétroaction et des indications claires quant à la
définition de leur rôle en entreprise et à la précision des tâches qu’ils
doivent accomplir (Sujansky 2009; Tulgan, 2009; Petit, 2008; Dunlin,
2007). Lancaster et al. (2002) ajoutent que les X veulent recevoir de la
rétroaction à condition qu’elle soit franche et directe, et seulement au
besoin.

De plus, Boudreault (2002 : 86) note que :

[Contrairement aux boomers], ils ont en horreur les règles formelles, les
réunions vides de sens et qui traînent en longueur ainsi que les
nombreux paliers hiérarchiques qui nuisent à une communication
efficace entre les employés. Idéalement, les X aimeraient pouvoir
s’exprimer directement à la haute direction.

3.9.3. La communication pour la génération Y


Simard croit que les Y ont une plus grande ouverture face à la
communication : « En général, les jeunes de la génération Y préfèrent
une communication ouverte et informelle à une communication
structurée et dirigée » (Simard, 2007 cité dans Petit 2008 :56). En
entreprise, on dit que les Y veulent créer des liens avec leurs
employeurs (Saba 2009; Petit, 2008), mais qu’ils demandent surtout
beaucoup de rétroaction (Sujansky, 2009; Gravett et Throckmorton
(2007 et Samson, 2005). Pour Tulgan (2009) et Patterson (2007), ce
besoin peut créer des tensions auprès des autres générations, qui les
perçoivent comme dépendants et incapables de prendre des initiatives
(Howe et Strauss 2007; Patterson, 2007). Howe et Strauss (2007 : 50)
expliquent : « Millenials will be viewed as more pampered, risk averse,
and dependent. »
45

Tapscott (2009) les surnomme « the relationship generation ». Quant à


Alch (2008 : 18), il soutient que : « More than any previous generation,
they are becoming conversant with a communication revolution ».
Plusieurs auteurs soulignent que cette génération a initié plus d’un
moyen de communication via les nouvelles technologies de l’information
et des communications (NTIC) dans le but de rassembler le plus grand
nombre de gens possible (Nicholas, 2009; Gravett et Throckmorton,
2007; Lancaster et al., 2002). Ainsi, Boudreault (2002 : 95) constate :
« Aujourd’hui le réseau permet aux individus de communiquer, d’entrer
en relation avec les gens de tous âges et de toutes origines. »

Tulgan (2009 :12) souligne : « they think, learn, and communicate in


sync with today’s information environment », contrairement aux boomers
qui sont moins à l’aise avec cette façon de communiquer (Nicholas,
2009; Crumpacker et Crumpacker, 2007 et Boudreault, 2002). Déjà en
2005, Lenhart observait l’attitude suivante : « In focus group discussions
during this study, the teens revealed that they use e-mail as a means to
talk to "old people"; otherwise, instant messaging is the mode of
communication. » (Lenhart, 2005 cité dans Gravett et Throckmorton,
200711).

D’un autre côté, Gravett et Throckmorton (2007) ont trouvé que les Y
avaient moins d’aisance à effectuer des confrontations de personne à
personne, contrairement aux boomers qui en ont une grande habitude :
« Millennials may not have confrontational skills for effective interactions
with coworkers and customers. Baby Boomers are more likely to respond
to potential conflict by saying: Let's bring the team together and we'll
resolve this. » (Gravett et Throckmorton, 200712).

11
Linda Gravett and Robin Throckmorton (2007). Bridging the generation gap how to get radio
babies, boomers, Gen Xers, and Gen Yers to work together and achieve more, Franklin Lakes,
NJ : Career Press, 224 p. [ressource électronique] (visionné le 4 mai 2009).
12
Ibid.
46

3.10. Les conflits intergénérationnels


À la suite des informations recueillies lors de notre revue de littérature et
à la lumière de notre cadre conceptuel, voyons maintenant les conflits
potentiels que nous anticipons entre les trois générations à l’étude, soit
les baby boomers, les X et les Y. Notons que comme cette étude se veut
uniquement exploratoire, suite aux données que nous recueillerons sur
le terrain, l’objectif de cette recherche sera de confirmer ou d’infirmer si
effectivement ces concepts issus de la littérature font l’objet d’un conflit
intergénérationnel pour nos répondants. Dans le tableau croisé ci-
dessous, nous avons pris soin de mettre en rapport chacun des
concepts choisis avec la plus petite unité d’équipe intergénérationnelle
possible, afin d’y détailler les confrontations potentielles. Ce tableau-
synthèse constituera la base de la méthodologie que nous décrivons au
prochain chapitre.
47

Tableau 3.2 : Manifestation des conflits potentiels


intergénérationnels dans une équipe

Rappelons que dans le cadre de cette recherche, nous avons posé la question
suivante : Quelles sont les différences intergénérationnelles qui existent dans
un contexte de travail et quels sont les conflits potentiels générés par ces
différences? Notre cadre conceptuel et la présentation de conflits potentiels
ayant été présentés, nous élaborons dans les prochaines pages la description
de la méthodologie utilisée pour la réalisation de notre étude.
CHAPITRE 4. Méthodologie de recherche

4.1. Approche et méthode de cueillette des données


4.1.1. L’approche qualitative
Comme il a été souligné dans notre revue de littérature, l’étude des
conflits intergénérationnels est un sujet relativement récent et encore à
l’état fragmentaire (Crumpacker et Crumpacker, 2007). Notre
méthodologie sera donc constituée d’une stratégie de type exploratoire.
D’ailleurs, Bordeleau (1982 :12 cité dans Harvey 2004 : 59) opine dans
le même sens et affirme que cette méthode est particulièrement indiquée
lorsque le sujet de recherche est encore inconnu, voire nébuleux :

La recherche exploratoire est appropriée en milieu organisationnel


lorsqu’un problème est nouveau, vague, mal défini dans l’état actuel des
connaissances ou pour tenir compte des caractéristiques tout à fait
particulières du milieu où surgit le problème.

Dès lors, la méthode qualitative s’avère être l’approche la plus


convenable pour cette recherche. Baumard et Ibert (2003 : 97)
confirment d’ailleurs qu’« il est classique de lier l’exploration à une
approche qualitative ».

Par qualitatif, D’Astous (2005 : 69) entend : « une étude davantage


fondée sur la qualité ou la nature des phénomènes étudiés que sur leur
description à l’aide de nombres ». Pour Paillé (1996c cité dans Paillé et
Mucchielli, 2003 : 5), « son résultat n’est, dans son essence, ni une
proportion ni une quantité, c’est une qualité, une dimension, une
extension, une conceptualisation de l’objet ». À l’inverse, l’approche
quantitative favorise plutôt l’utilisation de méthodes rigides de collecte
d’informations et conduit à des interprétations relativement objectives
des résultats (D’Astous, 2005). Dulin (2009 : 45) établit la distinction
suivante : « Most quantitative research is confirmatory and involves
theory verification, whereas much qualitative research is exploratory and
involves theory generation. »
49

Or, Harvey (2004), Beaumard et Ibert (2003), et Paillé et Mucchielli


(2003) ont trouvé qu’une limite importante de la méthode qualitative était
qu’elle pouvait seulement servir au contexte particulier de la recherche,
ce qui veut dire que les données sont difficilement transférables à moins
qu’elles soient complémentaires à une étude qui se prête au même sujet
(D’Astous, 2005). Petit (2008 : 103) émet la mise en garde suivante :

Miles et Huberman (2003) expliquent qu’avec l’approche qualitative, le


chercheur travaille avec des mots et non des chiffres. Comme les mots
peuvent avoir un sens différent en fonction des mots qui les précèdent
et de ceux qui les suivent, le chercheur doit prendre certaines
précautions afin de bien replacer les mots dans leur contexte. Les
données qualitatives peuvent donc plus facilement être interprétées de
façon erronée que les chiffres.

D’ailleurs, Kisfalvi (2006) souligne que même dans un contexte où le


chercheur tâche d’être objectif, il se peut que celui-ci introduise divers
biais dans son étude, principalement durant la cueillette et le traitement
des données.

4.1.2. Étude de cas par l’entretien semi-directif


Bédard et al. (1993 : 12) indiquent que « le relevé des données
pertinentes correspond au premier grand volet de l’analyse de cas, c’est-
à-dire la recherche de l’information ». Pour cette recherche, nous avons
opté pour la méthode de l’étude de cas par l’entretien semi-directif
comme outil de cueillette de données et comme instrument d’analyse.
En effet, comme en témoignent Miller et Friesen (1982 cités dans Hlady-
Rispal 2003 : 86), « l’avantage premier de ce type d’étude réside dans la
capacité d’identification des variables cruciales et la possibilité de mieux
appréhender les processus de changement et de développement qui ont
cours dans une organisation ». Yin (1994 : 1) quant à lui, privilégie ce
type d’approche dans les situations suivantes :

In general, case studies are the preferred strategy when “how” or “why”
questions are being posed, when the investigator has little control over
events, and when the focus is on a contemporary phenomenon within
some real life context.
50

Notre choix de l’entretien semi-directif se base, entre autres, sur l’opinion


de Quivy et Campenhoudt (2006 : 173), qui le considèrent comme une
méthode qui « se distingue par la mise en œuvre des processus
fondamentaux de communication et d’interaction humaine ». Autrement
dit, la méthode de l’entretien semi-directif est intéressante puisqu’elle
« laisse autant que faire se peut la personne interviewée s’exprimer
librement, avec les mots qu’elle choisit et en ordonnant les sujets comme
elle le souhaite » (Morlec, 2006 : 57). D’ailleurs, Harvey (2004), Baumard
et Ibert (2003) et Yin (1994), abondent tous dans le même sens et
affirment que l’entrevue individuelle est la meilleure façon de récolter des
données. En effet, elle permet à l’enquêteur de « retirer des informations
très riches et nuancées » (Quivy et Campenhoudt, 2006 : 173).

En revanche, certains auteurs ont trouvé que l’étude de cas comporte


des risques de subjectivité (Choquet-Girard, 2008; Quivy et
Campenhoudt, 2006; Kisfalvi, 2006; Morlec, 2006). À ce propos, Kisfalvi
(2006 : 111) évoque ainsi les travaux de Devereux (1967) : « Devereux
concludes that any effective behavioural science methodology must use
the subjectivity inherent in all observation as the royal road to an
authentic, rather than fictitious, objectivity ». Finalement, Petit
(2008 : 104) soulève cet argument :

Comme les répondants ont plus de liberté dans l’élaboration de leurs


réponses et que le chercheur peut approfondir certaines idées ainsi que
préciser ou reformuler les questions, il risque d’y avoir un manque de
standardisation d’un répondant à l’autre.

4.2. Structure de la recherche


La structure de la recherche a été construite et élaborée de manière à
pouvoir répondre à notre question de recherche, celle-ci étant :
« Quelles sont les différences intergénérationnelles qui existent
dans un contexte de travail et quels sont les conflits potentiels
générés par ces différences? »
51

4.2.1. Les répondants


Afin de répondre aux objectifs de la recherche dans le meilleur des cas,
nous avons sélectionné neuf sujets, soit trois membres de la génération
du baby boom, dont un gestionnaire; trois membres de la génération X,
dont un gestionnaire, et trois membres de la génération Y, dont un
gestionnaire. Pour être éligibles, les profils des participants devaient
répondre aux critères de l’étude. Ces critères sont décrits dans les
paragraphes qui suivent.

Pour répondre à l’objectif de la recherche qui est de proposer et de


valider ou réfuter l’existence d’un certain nombre de conflits
intergénérationnels basés sur cinq dimensions issues de la littérature,
notre échantillon sera composé de neuf membres provenant de neuf
entreprises différentes. L’objectif d’étudier un cas par entreprise sera de
valider si effectivement, notre question de recherche s’applique à
l’ensemble des membres des générations à l’étude, et non à une seule
niche professionnelle.

4.2.2. Les organisations participantes


Pour les fins de cette étude, nous nous sommes orientée dans plusieurs
domaines professionnels. Plusieurs raisons ont influencé notre décision
d’opter pour une variété de domaines plutôt que de limiter notre étude à
un seul. D’abord, le fait d’élargir le champ nous permet d’une part de voir
si les cinq composantes étudiées sont ressenties sur l’ensemble des
générations et ce, dans plusieurs types d’emplois et/ou domaines
professionnels. Ensuite, comme nous procédons à des études de cas, le
fait que ces participants travaillent tous dans des entreprises distinctes
permet d’assurer un plus grand degré de confidentialité. En effet, il y a
très peu de risques que leur identité soit découverte par leur entreprise
ou par leurs collègues de travail. Nous croyons que cette garantie
favorise par le fait même une plus grande franchise. Finalement, la
dimension temporelle étant une composante importante lors de la
rédaction d’un mémoire de Maîtrise, nous avons opté pour un échantillon
réaliste dans de telles circonstances.
52

4.2.3. L’outil de recherche


Or, les résultats recherchés étant par définition qualitatifs, dans un guide
d’entrevue qui nous servira de support (Quivy et Campenhoudt 2006),
une série de questions-guides, pouvant être posées dans le désordre
(Morlec, 2006), furent développées et catégorisées selon les cinq
dimensions que nous tenterons d’étudier : 1- le sens au travail, 2- le
rapport à l’institut, 3-la place du travail d’équipe, 4- la loyauté et 5- le
style de communication. Ces questions, sous forme de guide d’entrevue,
se retrouvent à l’annexe A.

4.3. La collecte de données


4.3.1. Échantillon de la recherche
Comme le recommandent Miles et Huberman (2007 : 58), « les
chercheurs qualitatifs travaillent habituellement avec des petits
échantillons de personnes, nichés dans leur contexte et étudiés en
profondeur ». Afin d’obtenir une bonne diversité de répondants, nous
avons décidé d’étendre notre échantillon à plusieurs domaines
professionnels. Nous avons entre autres des sujets en provenance des
domaines des télécommunications, de la publicité, du commerce au
détail, de l’ingénierie, de la santé, de l’éducation et finalement,
d’organismes à but non lucratif (OBNL).

4.3.2. Contacts préliminaires et déroulement de l’entretien


La collecte de données a eu lieu du 20 mars au 23 avril 2010. Toutes les
entrevues ont été menées par l’auteure de ce mémoire. Ayant travaillé
dans différentes entreprises, nous d’abord pris soin de scruter notre
base de données personnelle afin de voir si certains de nos contacts
pouvaient être éligibles pour notre étude. Ainsi, un premier contact fut
établi avec ces candidats potentiels soit par le biais d’un courriel ou par
un appel téléphonique afin de les solliciter pour participer à notre étude.
Ensuite, une fois leur éligibilité validée et leur accord obtenu, nous les
rencontrions dans le lieu de leur choix afin qu’ils se sentent à l’aise
d’élaborer davantage sur le sujet des conflits intergénérationnels.
53

Chaque fois, avant de débuter l’entretien, nous prenions le temps de


bien expliquer le projet au répondant et aussi de répondre à ses
questions, le cas échéant. Finalement, chacun des répondants devait
signer un formulaire qui confirmait son accord pour participer à cet
entretien. Nous avons pris soin de les joindre à cette recherche à
l’annexe B. Également, nous nous sommes assurée d’obtenir leur
permission pour enregistrer ces entrevues. Nous étions ensuite prêts à
débuter l’entrevue. Au total, nous avons effectué 9 entrevues d’une
durée d’environ 45 minutes.

4.4 Méthode d’analyse des données


Ainsi que le mentionnent Miles et Huberman (2009 : 19), « la recherche
qualitative peut-être conduite de mille et une manières ». Pour Paillé et
Mucchielli (2003 : 13), « l’analyse qualitative s’enracine dans le courant
épistémologique de l’approche compréhensive ». Miles et Huberman
(2003 : 28), quant à eux, avancent que « les forces des données
qualitatives reposent essentiellement sur la compétence du chercheur
exercée lors de leur analyse ». D’ailleurs, Wolcott (2001 : 32) confirme
qu’il existe une grande différence entre l’analyse et l’interprétation des
données. Selon Erikson (1986, cité dans Beaumard et Ibert 2003 : 52),
« la caractéristique la plus distinctive de l’enquête qualitative réside dans
la mise en exergue de l’interprétation ». Dulin (2009), Hlady-Rispal
(2003), D’Astous (2005) et Wolcott (2001) abondent dans ce sens et
disent que la recherche qualitative est caractérisée par une grande
souplesse dans la façon d’obtenir les informations désirées et par une
participation importante du chercheur dans l’interprétation des données.
Pour D’Astous (2005 : 65), c’est parce qu’il faut tenir compte des
subtilités psychologiques que « seule une interprétation humaine serait
en mesure de détecter ». Ce qui, à l’inverse, peut devenir une limite
dans la mesure où le chercheur se montre incompétent lors de ses
analyses (Choquet-Girard 2009).

Ainsi, pour nous assurer de la qualité de notre méthodologie, nous nous


sommes appuyée principalement sur les travaux de Miles et Huberman
54

(2007). Tout d’abord, toutes les entrevues ont été entièrement


retranscrites de façon à conserver l’authenticité des répondants.
Proposée par de nombreux scientifiques (Harvey 2004), cette manière
de procéder nous a beaucoup aidée à analyser le verbatim une fois
retranscrit. Par la suite, nous avons modifié les noms et autres détails
susceptibles d’identifier les répondants de façon à assurer la
confidentialité de leurs témoignages. Ensuite, nous avons procédé à une
analyse de contenu, cette méthode s’avérant l’une des plus utilisées en
management (selon les chercheurs Thiétart et al. 2003 : 450, cités dans
Harvey 2004 : 69). Cette façon particulière de faire les choses est
conseillée par Miles et Huberman (2007 : 438) et vise à « repérer les
patterns et les thèmes, rechercher la plausibilité et regrouper les
tactiques ce qui nous aidera à retrouver des relations entre les
données ».

4.5. Méthode de présentation des données


Miles et Huberman (2007 : 29 et 174) décrivent ainsi la méthode qu’ils
préconisent :

Un format de présentation signifie un assemblage organisé


d’informations qui permet de tirer des conclusions et passer à l’action
[…] La forme la plus fréquente de présentation pour les données
qualitatives est traditionnellement le texte narratif.

Atkinson (1998 : 7-8) estime ainsi la valeur de l’histoire de cas :

It is through story that we gain context and recognize meaning […] A life
story gives us the vantage point of seeing how one person experiences
and understands life, his or her own especially, over time.

Or, selon la littérature, le texte narratif peut se présenter autant sous


forme de notes de terrain, de citations, de phrases courtes, d’estimations
que de petits paragraphes. Pour ce faire, en nous basant sur notre cadre
conceptuel comme trame d’analyse, nous présentons nos données sous
formes de citations pertinentes, catégorisées sous chacune des
dimensions analysées.
55

Plus concrètement, nous avons d’abord procédé, comme le


recommandent Miles et Huberman (2007), à une présentation intra-cas
de nos sujets sélectionnés. Pour ce faire, nous avons exposé, dans un
premier temps, des petits paragraphes issus de leur verbatim. Ensuite,
nous avons tenté de dégager des similitudes, des différences et des
comparaisons et/ou contrastes apparaissant entre les cas. Par la suite,
nous avons fait une analyse inter-cas tel que détaillé dans notre
structure de recherche au point 4.2.1 (baby boomer–X, baby boomer–Y
et X–Y). Cette méthode nous a permis de tirer certaines conclusions.
Une fois nos analyses livrées, nous avons présenté les citations
significatives par sujet dans un tableau synthèse afin que les conclusions
tirées de nos données soient reflétées et rendues via les cinq
dimensions étudiées.

Tableau 4.1 : Conflits intergénérationnels basés sur


les cinq points d’opposition

Dans les prochains chapitres, nous ferons état des résultats et analyses
issus de notre collecte de données.
CHAPITRE 5. Résultats et analyses des générations face aux
cinq dimensions

Ce chapitre présente l’ensemble des résultats obtenus lors de notre


collecte de données. Dans cette optique, nous prenons soin de remettre
le lecteur en contexte en lui rappelant que notre sujet vise à étudier les
conflits générationnels potentiels pouvant se dégager de cinq concepts
ressortant systématiquement de la littérature : 1) le sens au travail, 2) le
rapport à l’institution, 3) le travail d’équipe, 4) la loyauté et finalement, 5)
la communication. Dans ce contexte, nous ne tiendrons pas compte des
similitudes générationnelles. S’il y a lieu, celles-ci seront revues dans le
chapitre de discussion et pourront faire l’objet d’une nouvelle proposition
d’étude.

Dès lors, dans la première partie de ce chapitre, nous mettons en relief


un aperçu sommaire des sujets composant notre échantillon de
recherche. Dans la deuxième partie, nous présentons les résultats et
analyses des cinq concepts déterminés. Par résultats, on entend une
présentation de certains extraits du verbatim de chacun de nos
participants qui nous semblent pertinents pour notre recherche. Afin de
comparer ce qui se dit dans la littérature avec nos résultats empiriques,
nous avons eu recours au tableau 3.1, dans lequel nous avions classé
les caractéristiques (comportements clés et attitudes) et les attentes
(valeurs, préférences et réticences) dominantes des générations envers
le monde du travail, (Petit, 2008 et Harvey, 2004) selon les cinq points
d’opposition pour lesquels nous proposons des confrontations.
57

5.1. Description de l’échantillon


5.1.1. Portrait sommaire des répondants
Au total, notre échantillon est composé de neuf participants d’origine
québécoise, dont cinq hommes et quatre femmes, œuvrant tous dans
des entreprises et domaines professionnels différents. Tel que proposé
dans notre chapitre de la méthodologie, parmi ces neuf répondants, trois
sont membres de la génération du baby boom, trois appartiennent à la
génération X et trois représentent la génération Y. À noter qu’afin de
préserver leur anonymat, nous ne mentionnerons aucun détail de nature
personnelle ou professionnelle risquant de les identifier. Dans cette
optique, l’information les décrivant sera donc sommaire et très générale.
Le tableau ci-dessous présente une synthèse des profils des participants
de notre échantillon.
58

Tableau 5.1 : Caractéristiques des répondants

Répondants Date de Âge Sexe Fonction Domaine


naissance

BB1 20 mai 1953 57 FEMME Gestionnaire OSBL

BB2 11 mars 1961 49 HOMME Gestionnaire d’équipe Commerce au détail

BB3 7 avril 1952 58 FEMME Infirmière Santé

X1 19 novembre 1975 34 HOMME Gestionnaire d’équipe Publicitaire

Enseignante et
X2 23 février 1970 40 FEMME gestionnaire de Universitaire
laboratoire

X3 11 avril 1978 32 HOMME Informatique Bancaire

Gestionnaire de projet
Y1 14 mars 1981 29 FEMME Télécommunications
événementiel et d’équipe

Étudiant et stagiaire en
Y2 6 mars 1985 25 HOMME Cosmétique
ingénierie

Étudiant et stagiaire en
Y3 16 mars 1983 27 HOMME Gouvernemental
consultation

5.2. Résultats et analyse de la dimension du sens au travail


Dans la prochaine partie de ce chapitre, nous faisons état des résultats
de notre recherche et de nos analyses par rapport à la dimension sens
au travail. Tout d’abord, les réponses de nos participants seront
partiellement retranscrites par citations pertinentes et ensuite analysées
par génération.
59

5.2.1. Résultats par génération en regard de la dimension du sens


au travail
Dans le tableau ci-dessous, nous avons regroupé quelques extraits des
témoignages des générations qui nous paraissaient dominants par
rapport à la variable sens au travail.

Tableau 5.2 : Classement par génération des citations significatives par


rapport à la dimension du sens au travail
Citations significatives
« Je voulais faire des choses pour être au service du peuple, de
l’humanité […] Je savais que je voulais m’impliquer dans une cause,
dans quelque chose qui pouvait assurer une transformation
sociale. »
« […] J’avais 20 ans. C’est difficile de sentir que je pouvais avoir
quelque chose à contribuer. »
« L’horaire, la qualité de vie, le salaire, l’avancement n’étaient pas
BB1 quelque chose que je regardais au début parce que j’ai fait
beaucoup d’années sans salaire à plusieurs reprises, alors ce n’est
pas tellement ça qui a motivé ma présence ou l’avancement de ma
carrière. »
«Je sais que je suis salariée mais on dirait que je me sens plus que
ça en dedans et d’ailleurs, on fait beaucoup d’heures comme
bénévole. Je ne dirais pas que je suis payée pour le nombre
d’heures que je travaille à toutes les semaines. »

« Ce n’est pas l’argent qui m’attirait, c’est tout le reste […] Moi je ne
viens pas travailler le matin. Je me sens un peu comme un chanteur
ou un comédien, un chanteur ou un comédien ne dira jamais qu’il
travaille […] C’est vraiment une motivation à chaque jour. Oui il y a
des problèmes, mais ce ne sont pas des problèmes : ce sont des
défis. »
BB2
« Comment je peux faire avancer les gens, comment je peux faire
en sorte que les gens soient heureux de venir travailler […] J’aime
venir travailler le matin parce je sais qu’il y aura plein de monde pis
je vais avoir du fun. »
« J’avais un cours d’électricien, et quelqu’un m’a offert un poste de
gestionnaire parce qu’il voyait mon leadership. »
60

« L’amour de cette fonction-là […] C’était de satisfaire la clientèle,


créer des choses, organiser pour que ça fonctionne bien […] Le
contact avec les malades et les rendre le plus confortables possible
aux niveaux physique et psychologique, pour arriver à soulager
leurs problèmes […] Ma motivation première, c’était vraiment les
gens. »
« Les dernières années j’ai beaucoup pensé à ce qui me motivait au
travail pis c’est quoi qui est plaisant dans ma journée d’ouvrage, pis
BB3
ce n’était pas juste le salaire. […] Les bonnes conditions de travail
auraient aidé, mais elles étaient quand même difficiles […].
Physiquement, l’horaire, je trouvais ça difficile. J’avais des séries, je
travaillais la fin de semaine et je travaillais 5 jours de suite, je pense
que j‘ai fait ça 15 ans de temps. »
«J’avais un patron qui m’aurait fait faire toutes sortes d’affaires. Il a
comme découvert mon potentiel […] je me suis beaucoup réalisée
cette année-là. »

« J’aime beaucoup les défis associés à mon domaine ou à la


stratégie […] Ma motivation, le matin, c’est vraiment de dire
aujourd’hui, je vais avoir des problèmes à résoudre, des défis à
relever […] Le train-train quotidien ne m’emballe pas outre
mesure. »
« Je suis d’avis qu’on prouve par nos gestes ce dont on est capable.
X1
Moi, j’aime démontrer ce dont je suis capable et après ça, ça t’ouvre
beaucoup de portes […] Je vais travailler le nombre d’heures à
travailler pour faire la job pas par plaisir, loin de là, mais je vais le
faire. »
« […] je n’accepterai pas une job si ça demande à ce que je fasse
75 heures semaine. »

« Moi, ce que j’aime, c’est de voir les résultats. J’aime ça quand ça


avance. Une expérience qui avance, des résultats qui rentrent […]
j’aime ça voir l’avancement des travaux c’est quelque chose que je
trouve motivant […] j’aime ça avancer. Cocher des affaires (tac, tac,
tac, tac, tac. »
« Une autre chose que je trouve motivante, c’est lorsque j‘ai
X2
commencé, j’étais professeure adjointe, ensuite agrégée, après ça
titulaire… Adjointe, je devais avoir un certain rendement pour
devenir agrégée et là, je viens de passer agrégée »
« Une entreprise se doit de se forcer à avoir les employés les plus
heureux possible. C’est là qu’ils seront le plus rentables possible.
Exemple : que les entreprises aient toutes des garderies. »
61

«Ce que je regarde en premier, lorsque je regarde pour un emploi,


ce sont les perspectives d’avancement, de défis, les responsabilités
pis le salaire. »
« Le fait d’apprendre encore plus de jour en jour et de toujours
évoluer professionnellement et intellectuellement, mon niveau de
connaissances. Je ne pourrais pas être dans un travail qui est
X3
constamment routinier. »
« L’horaire ne me dérange pas parce que je suis vraiment appelé à
faire du support 24/7, donc je peux me lever à 2 heures du matin le
samedi soir. Par contre, si j’étais obligé de me déplacer au bureau
pour le faire, ça me dérangerait un peu plus. Mais là, je le fais de la
maison, alors c’est de joindre l’utile à l’agréable. »

« […] Je ne suis pas un bourreau de travail qui va faire 60 heures


semaine pendant 20 ans et laisser tomber mon chum et puis mes
enfants! Ça ne me dérange pas pendant une période donnée ou
pour les besoins de la cause, que ça soit pour un projet ou un
avancement de travailler 50 heures semaine. Je vais faire ça un,
deux, trois mois s’il le faut, mais j’ai besoin d’un équilibre. »
Y1 « Une job insignifiante avec une équipe stimulante ce n’est pas
assez et puis une job enrichissante avec une équipe moyenne, tu ne
voudras pas rester à moins d’être vraiment motivée. »
« Si mon VP passe et me dit " Hey!, good job ", bien je vais être
bien contente. C’est de la reconnaissance! C’est bien bon de la
reconnaissance, parce que quand tu sais que ta boss t’as écrit un
" good job " et elle est vraiment contente, c’est motivant. »

« Le travail d’équipe, c’est vraiment important pour moi. »


«J’aime avoir un bon feedback (positif ou négatif) de la part des
Y2 superviseurs. C’est agréable de savoir qu’on se dirige dans la bonne
voie. Quand on n’a pas de feedback, c’est plus difficile. J’aime être
encadré par mes supérieurs. »

« Ce qui me motive, c’est le plaisir au travail, l’équipe, l’ambiance, la


convivialité, l’absence de hiérarchie trop rigide entre le
personnel […] les conditions de travail et la flexibilité. »
« Le feedback, j’adore ça. C’est un privilège lorsque tu réussis à en
avoir dans un contexte de travail parce que généralement, on n’a
Y3
pas le temps. »
« Qu’on attende de moi les résultats, mais qu’on ne me dise pas par
quel moyen les faire, qu’on me laisse de l’autonomie […] Je ne
m’attends pas à ce que l’on me dise comment atteindre mes
résultats. »
62

5.2.2. Analyse des générations par rapport au sens au travail

5.2.2.1. Les baby boomers et le sens au travail


Nous n’avons pas été surprise de constater que les boomers accordent
beaucoup d’importance à leur travail. En effet, la littérature les décrit
comme une génération se consacrant presque entièrement à son emploi
(Lancaster et al., 2002; Cordeniz, 2002), mue par des motivations
intrinsèques allant bien au-delà des conditions de travail et du salaire. À
preuve, ces quelques déclarations : « Moi, je ne viens pas travailler le
matin. Je me sens un peu comme un chanteur ou un comédien, un
chanteur ou un comédien ne dira jamais qu’il travaille. Ils vont faire un
spectacle et ils vont être contents » (BB2) et « J’aime vraiment ce que je
fais […] Je sais que je suis salariée mais on dirait que je me sens plus
que ça en dedans » (BB1). Ces commentaires appuient en quelque sorte
l’opinion de Cordeniz, (2002 : 239) : « Having grown up with the sense
that they were special and capable of changing the world, they equate
work with self-worth, contribution, and personal fulfillment ».

Or, les boomers sont reconnus pour leur trait contestataire


(Grand'Maison, 1993). En raison de leur poids démographique imposant,
nous avons déterminé que les boomers ressentent le besoin de faire une
différence dans leur milieu de travail modelé à la mesure des
générations précédentes (Wesner et Miller, 2008; Cordeniz, 2002 et
Lancaster et al., 2002). Ceci explique pourquoi ils choisissent des
métiers qui leur permettent d’opérer une transformation sociale (Wesner
et Miller, 2008; Cordeniz, 2002 et Lancaster et al., 2002). Ces quelques
témoignages nous le confirment : « Je voulais faire des choses pour être
au service du peuple, de l’humanité (…) je voulais m’impliquer dans une
cause qui pouvait assurer une transformation sociale » (BB1). « C’était
de satisfaire la clientèle (…) Le contact avec les malades et les rendre le
plus confortable possible au niveau physique et psychologique pour
arriver à soulager leurs problèmes. » (BB3)
63

Les boomers sont conscients de la hiérarchie (Tapscott, 2009). D’un


autre côté, nos résultats empiriques nous permettent de constater que
nos répondants n’aspirent pas nécessairement à gravir les échelons
dans l’entreprise. Autrement dit, l’avancement de carrière, pour eux, ne
semble pas constituer une priorité, ce qui ne correspond pas au portrait
présenté dans la littérature (Saba 2009; Busch et al., 2008; et Lancaster
et Stillman, 2002). De plus, Boudreault (2002) rapporte que les boomers
prolongent les heures passées au bureau; dans le cas de nos
répondants, ce n’est clairement pas par ambition. En ce sens, la citation
suivante nous semble particulièrement importante : « As Boom climbed
the corporate ladder, the steps seemed steeper, not only because of the
inherent competitiveness of upper-management jobs, but also because
of the sheer numbers of capable boomer applicants. » (Dunn, 1993 : 11
cité dans Boudreault, 2002 : 66). En s’appuyant sur cette théorie, on
peut supposer que les boomers furent découragés face à l’avancement
qui, à leurs yeux, devenait difficile, voire impossible (Boudreault 2002).
Ceci nous donne à penser que pour se tailler une place au soleil, les
boomers devaient rester compétitifs, en acceptant les conditions de
travail imposées par l’entreprise. Ainsi en témoigne BB3 : « Des fois, il y
avait des conflits et c’est parce qu’il y en a qui étaient écœurés. Ces
gens-là auraient dû partir pour aller ailleurs, mais ils n’étaient pas
capables parce qu’il n’y avait pas d’ouvertures ». Par exemple, une de
nos répondantes avoue avoir eu des horaires chargés tandis qu’un autre
nous mentionne avoir travaillé sans salaire à plusieurs reprises. Force
est de constater que ces boomers devaient trouver une source de
motivation en dehors des conditions de travail et c’est pour cette raison
qu’ils nous disent ne pas avoir tenu compte de cet aspect dans leur
choix de travail. Revoyons ce qu’ils en disent : « Les dernières années,
j’ai beaucoup pensé à ce qui me motivait au travail pis c’est quoi qui est
plaisant dans ma journée d’ouvrage, pis ce n’était pas juste le salaire »
(BB3) « Ce n’est pas l’argent qui m’attirait, c’est tout le reste » (BB2).
64

5.2.2.2. Les X et le sens au travail


Nos résultats empiriques montrent que les X de notre échantillon sont
attirés par les opportunités de carrière (Crumpaker et Crumpacker, 2007;
Patterson, 2007; O’Bannon, 2002; Smola et Sutton, 2002). De plus, ils
n’abordent pas le côté humain comme les membres de la génération du
baby boom. D’abord, nous avons observé que les X étaient très attirés
par la performance : « Moi ce que j’aime, c’est de voir les résultats […]
Une expérience qui avance, des résultats qui rentrent […] j’aime ça voir
l’avancement des travaux. C’est quelque chose que je trouve motivant. »
(X2). Ensuite, les trois répondants sont unanimes pour dire que les défis,
les responsabilités et l’avancement professionnel sont des aspects qui
les motivent dans leur carrière. D’ailleurs, les X travaillent selon leurs
propres objectifs (Smola et Sutton, 2002 : 23). X1 le confirme lorsqu’il
dit : « Je travaille à un endroit pour des raisons spécifiques. » Il semble
donc que les X travaillent avec l’optique de se bâtir une expérience qui
pourra les rendre plus employables (Gravett et Throckmorton, 2007;
Lancaster et Stillman, 2002; Karp et al.; 1999; Saba, 2009; Crumpaker et
Crumpacker, 2007; Gravett et Throckmorton, 2007; MacLaughlin, 2009).
Les propos de X3 appuient cette idée :

Je dois toujours apprendre des nouvelles choses, des nouveaux défis


[…] Le fait d’apprendre encore plus de jour en jour et de toujours
évoluer professionnellement et intellectuellement, mon niveau de
connaissance […]. Je dois toujours apprendre des nouvelles choses.

On observe chez les X une volonté constante de progresser, ce qui


témoigne de leur grande ambition et qui explique, en quelque sorte,
pourquoi l’avancement professionnel est un facteur recherché. Ceci
étant dit, ils préfèrent des quotidiens moins traditionnels et détestent la
routine. Ce trait de caractère explique aussi pourquoi ils peuvent choisir
un travail en fonction de l’horaire (Nicholas, 2009) et des conditions de
travail. Or, deux de nos trois X mentionnent qu’ils accepteraient de
travailler plus de 40 heures semaine à condition que l’horaire soit flexible
et qu’il convienne à leur train de vie. En ce sens, X2 va jusqu’à dire que
c’est à l’entreprise de rendre ses employés heureux : « Une entreprise
65

se doit de se forcer à avoir les employés le plus heureux possible. C’est


là qu’ils seront le plus rentables possible. Exemple : que les entreprises
aient toutes des garderies », nous dit-elle.

5.2.2.3. Les Y et le sens au travail


Les Y ont des exigences envers l’organisation, contrairement aux
boomers de notre échantillon qui nous semblaient plutôt passifs en début
de carrière. Rappelons en effet la réflexion de BB1 : « J’avais 20 ans.
C’est difficile de sentir que je pouvais avoir quelque chose à contribuer. »
D’abord, tout comme ceux de la génération X, les Y recherchent un
emploi offrant des conditions de travail intéressantes, des défis et une
possibilité d’avancement (Petit, 2008; Audet, 2004; Tulgan et Martin,
2001; Zemke et al., 2000). Par ailleurs, au travail, les Y cherchent à
créer des liens (Petit, 2008). Nos résultats empiriques nous permettent
de valider l’importance du travail d’équipe pour les Y. En effet, nos Y
rapportent que le sens au travail est autant dans les tâches accomplies
et les responsabilités assumées au quotidien que dans l’ambiance qui
règne dans l’équipe et la composition de celle-ci : « L’équipe, c’est tout
aussi important que les tâches que tu fais » (Y1). Selon eux, le fait de
travailler avec des gens sur lesquels ils peuvent compter fera toute la
différence. À ce propos, Y2 déclare : « […] une équipe qui va essayer de
t’aider, qui est souriante […] une équipe qui est avec toi dépendamment
de si ça va bien ou si ça va mal qui n’est pas toujours là à te critiquer et
à chercher c’est à qui la faute […] ». D’ailleurs, cette ouverture à la
sociabilité (Petit, 2008) soulève leur propension à vouloir faire confiance,
ce qui explique en partie pourquoi ils sont tellement ouverts à la
rétroaction. En ce sens, ces Y perçoivent cette dernière comme un
encadrement, une direction claire qui permet de réduire les pertes de
temps puisque que le travail est bien exécuté dès la première fois.

Par contre, les Y sont plus réticents que les autres générations à
sacrifier leurs besoins personnels pour le travail (Tapscott, 2009; Dulin,
2008 et Samson, 2005). Y1 en témoigne clairement : « J’aime travailler,
66

mais ça ne sera pas à tout prix ». Selon ce que nos Y rapportent, c’est
un facteur qui pèse lourd au moment de choisir un emploi. Un surplus
d’efforts pourra être investi de façon temporaire, soit dans le but
d’avancer dans leur carrière ou de se faire reconnaître par leur
« patron », mais si ces conditions se prolongeaient indûment, ils seraient
enclins à regarder ailleurs. Ainsi, force est de constater que parce que
ces Y arrivent dans des conditions économiques différentes de celles
qu’ont connues les deux générations précédentes, ils ont une plus
grande aisance à contester ou même à exiger des conditions de travail.

5.3. Résultats et analyse de la dimension le rapport à l’institution


Dans la prochaine partie de ce chapitre, nous relatons les résultats et
analyses de notre recherche par rapport à la dimension rapport à
l’institution. Au préalable, en les classant par génération, nous
transcrivons quelques extraits des témoignages de nos participants qui
nous ont paru révélateurs.

5.3.1. Résultats des générations quant à la dimension le rapport à


l’institution
Dans le tableau ci-dessous, nous avons regroupé les points dominants
des générations relativement à la variable du rapport à l’institution.

Tableau 5.3 : Citations significatives des générations en regard avec la


dimension le rapport à l’institution

Citations significatives

« […] Non, je ne fais pas du tout confiance à l’État comme ça, sans
voir ce qui est derrière. »
BB1
« J’ai besoin de voir l’action […] »
« Je vais juger lorsque je vais voir les résultats. »

« Je me sens très privilégié parce qu’en sortant de l’école, j’avais un


BB2 cours d’électricien, et quelqu’un m’a offert un poste de gestionnaire
parce qu’il voyait mon leadership. »
67

« Je n’avais pas une confiance aveugle dans l’organisation parce


que ça fait 35 ans que tu les vois aller. Tu te fais dire qu’au mois de
BB3
septembre, ils vont faire telle affaire et tu sais que ça va juste
commencer au mois de février […] C’était tout le temps les délais. »

« Je ne pense pas qu’il y a un endroit parfait. Je choisis donc le


X1 moins pire des endroits […] Mais aussi, c’est parce que je travaille à
un endroit pour des raisons spécifiques. »

« Je pense que le travail, c’est très important puisque nous passons


une bonne partie de notre vie au travail. C’est le fun quand on est
capable d’avoir un sentiment d’appartenance envers une entité et
X2
être fière des valeurs qui sont propagées par l’entreprise où tu
aimes ça arriver le matin, parce que tu aimes la façon que c’est
géré. ».

« Tu offres un service. Pour moi, toute la culture, ça ne veut pas dire


X3 grand-chose. Toutes les valeurs que l’entreprise donne, ça ne
m’affecte pas vraiment. »

« Je suis positive envers l’entreprise dans la plupart des cas. Je


pense qu’ils sont dans un tournant où ils n’ont pas vraiment le choix.
Y1
Quand tu arrives quelque part, les entreprises savent maintenant
qu’il faut qu’ils t’aident parce que sinon tu ne resteras pas. »

« Ce sont des boîtes à faire de l’argent, qui vont souvent donner


Y2
l’image d’une place où tu peux grandir ».

« Par expérience, je suis devenu sceptique parce que de plus en


plus, les entreprises se désengagent. Ce n’est plus comme dans le
temps de nos parents, quand comme en guise de loyauté envers toi,
même si les affaires ralentissaient, ils t’assuraient, te donnaient des
avantages sociaux et te gardaient quand même. »
Y3
« J’ai vu beaucoup d’abus dans les relations de travail. Les
employeurs qui respectent vraiment l’éthique sont rares. Je n’ai pas
tant confiance parce que les gens sont de plus en plus occupés,
c’est l’argent, l’argent, l’argent, c’est normal c’est le cœur de
l’entreprise. »

5.3.2. Analyse des générations et leur rapport à l’institution

5.3.2.1. Les baby boomers et le rapport à l’institution


D’après nos résultats empiriques, la majorité de nos répondants
boomers (deux sur trois) disent ne pas faire confiance à l’institution.
68

Rappelons leurs déclarations : « Non, je ne fais pas du tout confiance à


l’État […] J’ai besoin de voir l’action (…) Je vais juger lorsque je vais voir
les résultats » (BB1). « Je n’avais pas une confiance aveugle dans
l’organisation […] C’était tout le temps les délais, les dates » (BB3). Pour
Tapscott, (2009), le fait que les boomers aient évolué dans une société
très hiérarchisée (à la maison, à l’école et au travail), explique pourquoi
ils entretiennent une relation plutôt méfiante à l’égard de l’autorité, voire
l’institution (Tulgan et al.,2006 et Boudreault, 2002) Or, pour Petit (2008 :
20), le rapport qu’entretiennent les générations avec l’institution est aussi
« imputable à l’époque et peut être influencé par les circonstances ou les
événements marquant un espace de temps ». Par exemple, la récession
des années 80, qui se prolonge dans les années 90, affectera gravement
les conditions de travail des boomers qui se trouvent déjà sur le marché
du travail. Boudreaut (2002 : 67) souligne justement : « Pour plusieurs,
c’est la rupture du contrat social entre l’employé et l’organisation. ». En
ce sens, ils rapportent majoritairement que le marché du travail de leur
époque était saturé. Ainsi, BB3 parle d’« une période où il y n’avait
quasiment pas d’affichage de postes ». On suppose donc que les
boomers, affectés par cette récession, mettent de côté leur désir de
grimper les échelons de l’entreprise, l’avancement étant maintenant
devenu difficile et que, par le fait même, ils se sont tournés contre
l’organisation (Boudreault (2002). Par ailleurs, contrairement aux deux
autres répondants, BB2 ayant été encouragé dès le début de sa carrière,
entretient un rapport de grande confiance avec l’institution :

Il y a quelqu’un qui a reconnu mon leadership il y a 32 ans et


honnêtement, je suis reconnaissant envers la compagnie parce que j’ai
une maudite belle situation. Je regardais le budget et je fais
présentement partie des hauts salariés avec un secondaire 5.

Sur ce point, nous avons été surprise de découvrir que nos boomers
sont plutôt passifs face à leur carrière professionnelle contrairement à
ceux des deux autres générations, qui sont davantage proactifs pour leur
cheminement de carrière. En effet, nos baby boomers semblent avoir
simplement attendu les occasions plutôt que de les provoquer ou de les
69

rechercher : « J’avais un patron qui m’aurait fait faire toutes sortes


d’affaires. Il a comme découvert mon potentiel » (BB3). « J’avais un
cours d’électricien, et quelqu’un m’a offert un poste de gestionnaire
parce qu’il voyait mon leadership » (BB1). Deux des trois boomers
composant notre échantillon semblent être entrés sur le marché du
travail sans trop d’attentes particulières, contrairement à nos participants
des deux autres générations qui exigent beaucoup de l’organisation,
comme nous le verrons maintenant.

5.3.2.2. Les X et le rapport à l’institution


Selon nos résultats empiriques, les X veulent avoir le contrôle sur leur
carrière professionnelle. Ce point majeur qui détermine une partie de
leur personnalité générationnelle au travail les oppose déjà à la
génération précédente (les boomers) : « Un jour, j’ai eu l’opportunité
pour un poste et bien j’ai appliqué et puis de fil en aiguille et bien ça a
continué comme ça » (BB1). En effet, les X savent où ils vont et
prennent les moyens pour assurer leur progression et leur ascension
professionnelle. Durant leur témoignage, ils mettent d’ailleurs l’emphase
sur le fait qu’ils choisissent d’être à un endroit plutôt que d’être choisis.
Rappelons les propos de X1, qui « travaille à un endroit pour des raisons
spécifiques ». Dès lors, ils ne sont pas particulièrement confiants envers
l’organisation, mais ne s’en soucient pas puisque pour eux, l’institution
représente essentiellement un lieu « d’épanouissement professionnel »
réalisé par l’échange d’un service contre rémunération. Par ses propos,
X3 montre qu’il n’a pas de sentiment d’appartenance face à l’entreprise :
« Pour moi, toute la culture, ça ne veut pas dire grand-chose. Toutes les
valeurs que l’entreprise donne, ça ne m’affecte pas vraiment. » Il semble
que le rapport des X avec l’institution se fasse donc sur une base
transactionnelle : « Tu offres un service et c’est ça je veux dire » (X3).
Quant à lui, X1 déclare : « En travaillant ici, je sais que je vais apprendre
à chercher X, Y, Z bagage ». Par contre, même si ces X affichent un
scepticisme envers l’institution, nous avons été étonnée de constater
que deux de nos répondants disent qu’ils aimeraient éprouver un
70

sentiment d’appartenance face à l’entreprise. Voyons ce qu’ils disent à


ce sujet : « Je considère l’entreprise comme ma famille » (X1). « C’est le
fun quand on est capable d’avoir un sentiment d’appartenance envers
une entité et d’être fière des valeurs qui sont propagées par l’entreprise
où tu aimes ça arriver le matin parce que tu aimes la façon que c’est
géré » (X2). Ainsi, même si ce facteur ne fait pas l’unanimité chez nos
répondants, cette tendance révèle que les X de notre échantillon ne sont
pas aussi détachés que la littérature l’affirme.

5.3.2.3. Les Y et le rapport à l’institution


Dans le cas des Y, seule une minorité (une personne sur trois) est
confiante envers l’institution, et ce, de manière partielle : « Je suis
positive envers l’entreprise dans la plupart des cas » (Y1). Les deux
autres sont entièrement sceptiques et entretiennent un rapport de
méfiance envers l’organisation. Pour ces Y, l’entreprise ne se préoccupe
pas vraiment de la main-d’œuvre et n’est intéressée que par le profit.
Voici comment Y2 voit les choses : «Ce sont des boîtes à faire de
l’argent, qui vont souvent donner l’image d’une place où tu peux
grandir ». D’ailleurs, Y3 est convaincu que c’est par la faute des
entreprises que les individus en sont venus à travailler pour leurs
objectifs personnels :

J’ai vu beaucoup d’abus dans les relations de travail. Les employeurs


qui respectent vraiment l’éthique sont rares. Je n’ai pas tant confiance
parce que les gens sont de plus en plus occupés, c’est l’argent, l’argent,
l’argent, c’est normal : c’est le cœur de l’entreprise.

Ceci nous amène à conclure que les Y aimeraient avoir confiance, mais
que les entreprises, pour la plupart, ne leur ont pas encore donné
l’occasion de croire en elles. Nous appuyons cette supposition sur le
constat suivant. Contrairement aux X, qui semblent assumer le côté noir
de l’entreprise, on sent une déception chez les Y : « Il ne faut pas être
naïf : les employeurs ne sont pas tant intéressés par toi. » (Y3) « Où je
travaillais avant, ils voyaient leurs employés vraiment comme des
outils » (Y1). En ce sens, « C’est d’avoir confiance en l’entreprise où tu
71

es. Parce que si tu as confiance, c’est qu’elle représente plus tes


valeurs, ce qui veut dire qu’elle te ressemble, donc tu vas rester plus
longtemps. »Ceci nous laisse croire que les Y n’ont pas tout à fait trouvé
ce qu’ils cherchaient au point de vue professionnel, puisque deux des Y
nous mentionnent que la seule motivation financière ne leur suffit pas :
« Ce sont des motivations internes. Ce n’est pas seulement pour
l’argent. C’est-à-dire que ce n’est pas juste dans le but de vivre ou de
travailler : il faut que je tripe sur ce que je fais. » (Y1) Nos trois
répondants sont d’ailleurs unanimes pour dire que s’ils étaient riches, ils
travailleraient quand même. Par contre, ils nous avouent tous que
présentement, ils travaillent principalement pour des raisons financières :
« Je travaille pour gagner ma vie » (Y1); « parce que j’ai besoin
d’argent » (Y2); « c’est certain que je travaille à cause de l’argent qui
rentre afin de pouvoir profiter de la vie et payer les comptes, ça va en
premier » (Y3). Cependant, contrairement aux boomers, qui mettaient le
travail au centre de leur existence, ils ne seront pas entièrement
dévoués à leur travail (Boudreault, 2002).

5.4. Résultats et analyse pour la dimension du travail d’équipe


Dans la prochaine partie de ce chapitre, nous faisons état des résultats
et analyses de notre recherche par rapport à la dimension travail
d’équipe. Au préalable, en les classant par génération, nous
transcrivons quelques extraits des témoignages de nos participants qui
nous sont apparu particulièrement pertinents pour l’analyse de cette
dimension.

5.4.1. Résultats par génération sur la dimension du travail d’équipe


Dans le tableau ci-dessous nous reproduisons les commentaires qui
résument les points dominants des générations par rapport à la variable
du travail d’équipe.
72

Tableau 5.4 : Citations significatives des générations en regard


avec la dimension du travail d’équipe

Citations significatives

« Mon travail, ce n’est pas quelque chose qui se fait


individuellement, sinon ça serait infaisable. »
BB1
« Il faut travailler en équipe parce que c’est le seul moyen d’y
arriver. »

« Le travail d’équipe, c’est comme le corps humain, c’est-à-dire il y a


BB2 un cœur, des organes, le système digestif et un ne fonctionne pas
sans l’autre. »

« (…) Avec les malades, ça te prend une équipe, mais même si


j’aime travailler en solitaire, je choisirais de travailler en équipe, tu as
BB3 comme besoin d’une équipe. ».
« Pendant certaines périodes, c’était comme si mon équipe faisait
partie de notre famille. »

« J’ai absolument besoin de travailler seul, mais après ça, j’ai besoin
X1 de voir mon équipe pour échanger sur ce à quoi j’ai réfléchi et
bonifier ce que j’ai essayé de développer sur papier. »

« Pour moi, le travail d’équipe c’est un travail individuel que les gens
réunissent pour en faire un projet final. Un travail d’équipe, c’est
quand tu pars un projet et tu t’assoies ensemble dès le départ pour
X2 établir les règles du comment ça va fonctionner, qu’est-ce qu’on fait
avec ça, comment on fait le travail. »
« Moi, j’aime mieux travailler seule parce que j’ai tendance à être
plus intravertie pis solitaire au travail. »

« C’est d’être capable de se partager les tâches efficacement entre


les membres d’une équipe. C’est quand les parties sont autonomes
X3 dans leurs tâches, mais complémentaires. »
« Moi, j’aime mieux travailler seul. Parce que j’ai toujours trouvé plus
efficace lorsque j’étais tout seul. »

« L’équipe, c’est tout aussi important que les tâches que tu fais. »
Y1 « Même si on travaille différemment, je crois beaucoup au travail
d’équipe… structuré! C’est-à-dire que tout le monde sache qui fait
quoi et quand. »
73

« Le travail d’équipe, c’est vraiment important pour moi. »


«C’est un apport individuel au départ, pis après ça, l’équipe doit
travailler ensemble, pour retravailler ces apports individuels là et
ensuite, il y a des décisions qui se prennent, chacun retourne à sa
place pour retravailler les choses selon les décisions de l’équipe. »
Y2
« Ce sont aussi des gens qui t’écoutent et qui sont capables de te
dire quand ça va bien ou quand ça va mal […] L’équipe, c’est super
important puisqu’en général tu peux avoir du feedback des membres
que tu n’avais pas pensé au départ, ce qui peut être super
intéressant. »

« Une bonne équipe, c’est où est-ce que chacun contribue


concrètement au travail selon ses forces, qui sont complémentaires,
qui a le goût d’apprendre de l’autre, l’ouverture, par exemple nous
sommes là pour atteindre un résultat, un objectif et quand chacun
apporte quelque chose qui fait qu’on avance ou qu’on y arrive, c’est
Y3 gratifiant. »
« C’est la façon que ça se passe entre le groupe pour atteindre les
objectifs. »
« Tu fais souvent une partie seule, ta recherche, rédiger tes
rapports, mais il y a un travail qui se fait beaucoup en équipe, alors
j’aime beaucoup le partage entre les deux. »

5.4.2. Analyse des générations et la place du travail d’équipe

5.4.2.1. Les baby boomers et le travail d’équipe


Les boomers sont reconnus pour accorder une très grande importance
au travail d’équipe (Sirias et al., 2007). Pour eux, l’équipe, c’est
essentiellement une unité où doit exister une interdépendance entre les
membres qui s’y rattachent et par conséquent, le consensus et la
participation de chacun est nécessaire pour son bon fonctionnement
(Sirias et al., 2007). « Il faut travailler en équipe parce que c’est le seul
moyen d’y arriver», nous dit BB1 en résumant l’opinion de nos trois
répondants. Ceci étant dit, un projet doit se faire en équipe. De plus, tous
les membres de l’équipe doivent être en accord avec le plan, « sinon le
membre est tout de suite rabaissé au rang de ceux qui n’ont pas l’esprit
74

d’équipe » (Samson 2005 : 43). Les propos de l’un de nos répondants


boomer illustrent bien ce que représente l’esprit d’équipe :

Il y a un capitaine de bateau et puis ce capitaine a une équipe […] tout


le monde s’en va à Gaspé. On ne va pas à Matane, on va à Gaspé.
Tout le monde est convaincu qu’on s’en va à Gaspé, pis s’il y a
quelqu’un de l’équipe qui n’est pas convaincu qu’on s’en va à Gaspé,
bien qu’il lève la main pis qu’il nous le dise pis on va se rasseoir pour en
parler, parce qu’on doit aller à Gaspé. (BB2).

5.4.2.2. Les X et le travail d’équipe


Les X, quant à eux, sont connus pour leur cynisme, voire leur
individualisme dans une équipe de travail, comme en témoignent leurs
réflexions : « Moi, j’aime mieux travailler seul. Parce que j’ai toujours
trouvé plus efficace lorsque j’étais tout seul. » (X3) « Moi j’aime mieux
travailler seule parce que j’ai tendance à être plus intravertie pis solitaire
au travail. ». (X2) Par contre, nos résultats empiriques démontrent qu’ils
apprécient le travail en groupe mais que la définition qu’en font les
boomers n’est pas de tout intérêt pour eux. D’abord, ces X veulent
travailler dans un groupe où les individus à part entière contribuent
individuellement au succès d’un projet par l’exécution des tâches
rattachées à leur rôle. De plus, les X ne recherchent pas
l’interdépendance des membres ou le consensus à tout prix (Samson,
2005) et veulent êtres reconnus pour leur apport individuel (Gravett et
Throckmorton, 2007 et Boudreault, 2002). Sur cette question, X2
confirme le point de vue des auteurs: « D’un autre côté, une fois sur le
tapis rouge, on le présente comme un travail d’équipe mais la
découverte appartient à la personne qui l’a découvert. » Dans cette
optique, pour les X, l’équipe représente plutôt le rassemblement de
plusieurs spécialistes qui forment, par leur profession unique, un groupe,
afin de réaliser un objectif commun : « Pour moi, le travail d’équipe, c’est
un travail individuel que les gens réunissent pour en faire un projet final »
(X2). « C’est quand les parties sont autonomes dans leurs tâches mais
complémentaires. » (X3) Ceci étant dit, ce n’est pas surprenant de
constater que ces X soient beaucoup moins enclins au développement
des relations interpersonnelles dans une équipe de travail,
75

caractéristique considérée comme essentielle pour les boomers et


importante pour les Y.

5.4.2.3. Les Y et le travail d’équipe


Pour les Y, le travail d’équipe, c’est le juste équilibre entre le rationnel (la
structure et la méthode) et le relationnel (la concordance des membres).
Du côté relationnel, les Y tendent à valoriser le respect de l’opinion
d’autrui et demandent en retour qu’on fasse de même envers la leur
(Samson, 2005), contrairement aux boomers qui recherchent un
consensus. « L’équipe, c’est super important puisqu’en général tu peux
avoir du feedback des membres que tu n’avais pas pensé au départ ce
qui peut être super intéressant. » (Y2) Toutefois, bien que les Y
accordent un peu plus d’importance à la variable relationnelle, ils ne
misent pas uniquement sur elle. En effet, les membres de l’équipe
doivent aussi contribuer au groupe de façon individuelle. C’est ce que Y2
exprime ici : « Je crois que certaines parties doivent se faire en équipe et
d’autres seul […] c’est un apport individuel au départ, pis après ça
l’équipe doit travailler ensemble, pour retravailler ces apports individuels
là. »

Ceci étant dit, pour les Y, l’équipe est un groupe de personnes


remplissant un rôle distinct où les membres sont appelés à consentir par
la négociation du plan commun et d’une structure de projet qui sera
respectée par tous les membres afin d’atteindre le même objectif. Ainsi,
Y1 déclare : « On ne peut pas travailler de la même façon et l’on ne peut
pas faire tous le même travail non plus. C’est juste qu’il faut se structurer
pour se rendre au même objectif. »

5.5. Résultats et analyse de la dimension la loyauté


Dans cette section, nous présentons les résultats de notre recherche et
l’analyse que nous en avons faite par rapport à la dimension de la
loyauté. Au préalable, en les classant par génération, nous transcrivons
76

quelques extraits des témoignages de nos participants qui nous


paraissent révélateurs en regard de la loyauté.

5.5.1. Résultats des générations selon la dimension de la loyauté


Dans le tableau ci-dessous, nous résumons les points dominants des
générations face à la variable la loyauté.

Tableau 5.5 : Citations significatives des générations en regard avec la


dimension de la loyauté

Citations significatives

« Je sais que je suis salariée, mais on dirait que je me sens plus que
ça en dedans. »
BB1
« Il est clair pour moi que lorsque nous parlons de loyauté envers
l’entreprise, je ne vais pas penser, je vais faire ce qu’il faut. »

« C’est quasiment trop important […] Tout ce que la compagnie m’a


offert, le fun que j’ai quand il est venu le temps de penser j’y vais-tu,
j’y vais-tu pas, je me suis dit; je ne suis pas pour lâcher ma gang
BB2 moi, là. »
« La loyauté pour moi c’est important. […] Le respect fait partie de
mon éducation. La loyauté envers les institutions, je pense que c’est
une forme de respect. Mais c’est vraiment important. »

« La loyauté pour moi, c’est de donner les bonnes choses, les bons
traitements, les bonnes affaires, être vraie. C’est d’être loyale envers
le client aussi, d’être honnête. »
BB3 « Pour moi, rester 35 ans à la même place, je ne considère pas ça
comme être loyale, c’est une question que tu n’as pas le choix y a
un seul hôpital dans le coin où tu habites. Ta vie est là ! Et ce n’est
pas par loyauté que tu restes, c’est par obligation. ».

« La loyauté, c’est définitivement à sens unique. Même cette


X1 entreprise ne fait pas exception à la règle. Le jour où ils n’ont plus
besoin de toi, ils te mettent à la porte, merci bonsoir. »

« Ma philosophie maintenant, c’est que mon travail, ma loyauté est


X2 envers moi-même en premier. Faire ma job au travail du mieux que
je peux pour moi, c’est la loyauté. »

« C’est de faire les tâches demandées. Je suis une ressource,


l’entreprise n’a pas de sentiments et moi, je n’ai pas de sentiments
X3
envers l’entreprise. Je n’hésiterai pas à quitter si on m’offrait des
meilleurs défis ailleurs avec une augmentation de salaire. »
77

« La loyauté, à la base, c’est de respecter l’entreprise pendant le


temps que tu es là. La loyauté telle qu’on la connaît depuis 1930
Y1 c’est-à-dire de rester 50 ans pour la même entreprise ça n’existe
plus. Être loyale à l’entreprise pour moi, c’est de l’être le temps que
je suis là. »

« Je suis loyal quand je travaille pour eux oui. Mais je n’ai pas
l’impression que je leur dois plus que les services pour lesquels ils
m’ont engagé. Je n’ai pas l’impression que je dois rester 6 ans pour
Y2
eux justement. […] Je considère que lorsque je travaille pour une
entreprise, j’échange un service contre de l’argent. Pis si j’ai envie
d’aller ailleurs, je vais aller ailleurs. »

« Moi, je suis prêt à servir l’entreprise, mais je vais être plus pour
regarder ce qu’ils ont à m’offrir dans un présent immédiat. C’est
combien que maintenant vous me donnez en argent et ensuite je
vais me donner. »
Y3
« Je ne crois pas que les employeurs sont loyaux. Quand on
regarde les nouvelles, on voit des mises à pied au moindre petit
problème. Juste l’idée des contrats de trois mois dit que l’employeur
ne veut pas s’engager ».

5.5.2. Analyse des générations et la loyauté


5.5.2.1. Les baby boomers et la loyauté
Selon la littérature, durant sa carrière, un boomer aura sacrifié beaucoup
de sa vie personnelle afin de prouver sa loyauté et son engagement
envers l’entreprise (Karp et al., 2002). Ceci nous amène à questionner la
théorie de l’engagement organisationnel avancée par Ketchum et Trist,
(1992), selon laquelle l’engagement est un très bon indicateur de la
qualité de vie au travail. Voyons ce que nos boomers en disent : « Les
conditions de travail étaient quand même difficiles. On travaillait les fins
de semaine, aux Fêtes et des fois, on avait des grandes séries de cinq,
six jours en ligne » (BB3). « J’ai fait beaucoup d’années sans salaire à
plusieurs reprises, alors ce n’est pas tellement ça qui a motivé ma
présence » (BB1). Ces témoignages nous permettent de confirmer que
l’engagement des boomers va bien au-delà des conditions de vie au
travail. « Je sais que je suis salariée, mais on dirait que je me sens plus
que ça en dedans » (BB1). « Le respect fait partie de mon éducation. La
78

loyauté envers les institutions, je pense que c’est une forme de respect.
Mais c’est vraiment important. » (BB2). Ainsi, on comprend que les
boomers sont fiers d’exercer un travail qui concorde avec leurs valeurs
et que par conséquent, lorsqu’ils s’engagent, ils le font « pour le meilleur
et pour le pire » (Foret et al., 2004). D’ailleurs, ce mariage entre eux et
l’entreprise est un engagement sincère, une fidélité qui se manifeste par
la bonne conduite et le respect des règles. Ce point démontre que chez
les boomers, la loyauté ne se mesure pas uniquement par le nombre
d’années travaillées ou par la préoccupation de se bâtir une solide
réputation dans une même entreprise (Saba 2009), tel que véhiculé dans
la littérature. C’est ce qu’exprime BB3 :

Pour moi, rester 35 ans à la même place, je ne considère pas ça


comme être loyale, c’est une question que tu n’as pas le choix y a un
seul hôpital dans le coin où tu habites. Ta vie est là ! Et ce n’est pas par
loyauté que tu restes, c’est par obligation.

La tendance des témoignages livrés par nos boomers nous conduit à


constater que ceux-ci sont loyaux envers leurs valeurs personnelles et
leurs convictions ou motivations intrinsèques. « Il est clair pour moi que
lorsque nous parlons de loyauté envers l’entreprise, je ne vais pas
penser, je vais faire ce qu’il faut. » (BB1) « La loyauté, pour moi, c’est de
donner les bonnes choses, les bons traitements, les bonnes affaires,
être vraie. C’est d’être loyale envers le client aussi, d’être honnête. »
(BB3)

On sait que le contexte économique marqué par la récession des


années 80-90, au début de leur carrière, crée une incertitude au niveau
des ouvertures d’emplois (Boudreault, 2002). Cependant, malgré cela et
en dépit de leur poids démographique imposant qui accentue la
compétition pour des postes de plus haut niveau (Boudreault, 2002), on
observe que les boomers ne sont pas restés loyaux par simple
obligation : « Si j’avais eu la possibilité de déménager d’hôpital, je ne
l’aurais pas fait parce que j’ai toujours été du type assez loyale » (BB3);
79

« Quand il est venu le temps de penser j’y vais-tu, j’y vais-tu pas, je me
suis dit; je ne suis pas pour lâcher ma gang, moi là. » (BB2) »

5.5.2.2. Les X et la loyauté


Nos résultats empiriques démontrent que les membres de la génération
X se disent loyaux envers l’entreprise, mais pas de la même façon que
les boomers (MacLaughlin, 2009 et Patterson, 2007). D’ailleurs, notre
étude montre que les X se considèrent comme de forts travailleurs mais
perçoivent le travail comme un moyen pour parvenir à une fin (Cordeniz,
2002). Autrement dit, les X saisissent les opportunités qui se présentent,
et sont loyaux le temps qu’ils séjournent dans l’entreprise. C’est une
loyauté momentanée, que Tulgan (2009 : 12) baptise « just-in-time
loyalty ». Autrement dit, un peu comme les boomers, la loyauté des X se
manifeste par l’honnêteté des gestes posés dans le cadre de leur
fonction. Par contre, les X ne souhaitent pas s’engager à long terme
mais se voient davantage comme étant de passage dans une entreprise.
Pour eux, cette façon de faire est très légitime, et même honnête,
puisque pendant la durée de leur emploi, ils ont démontré de la loyauté à
l’entreprise, par l’exécution consciencieuse des tâches pour lesquelles ils
étaient engagés. D’ailleurs, le fait que les trois répondants nous avouent
qu’ils pourraient regarder ailleurs dans le cas où l’entreprise ne
répondrait plus à leurs besoins professionnels sous-entend que les X
sont davantage loyaux envers eux-mêmes, ce qui soulève une première
différence entre eux et la génération précédente, qui serait restée malgré
tout.

5.5.2.3. Les Y et la loyauté


Les Y, un peu à l’image des X, ne ressentent pas le besoin de se
dévouer corps et âme durant une vie entière à une même entreprise :
« Être loyale à l’entreprise pour moi, c’est de l’être le temps que je suis
là » (Y1). Par contre, même si les Y veulent « aussi » ajouter une corde
à leur arc de connaissances professionnelles, on ressent un plus grand
désir d’engagement envers l’entreprise. C’est ce qui pourrait expliquer
80

pourquoi ils demandent à ce que la loyauté vienne aussi de l’entreprise.


D’ailleurs, deux de nos trois répondants Y croient que cette distance
manifestée auprès des institutions est causée par le fait qu’aucune
entreprise ne leur a démontré la loyauté qu’ils attendent. Y3 nous fait
part de sa désillusion quant à la loyauté de l’entreprise :

Je ne crois pas que les employeurs sont loyaux […] Juste l’idée des
contrats de trois mois dit que l’employeur ne veut pas s’engager […]
C’est de dire; je vais m’investir dans votre compagnie, je m’engage à
me dévouer… mais à chaque expérience où est-ce qu’on m’a promis de
m’engager, je me suis rendu compte que c’était pour te faire performer,
pour que tu fasses tes preuves, pour que tu te donnes et ils avaient rien
à offrir en bout de ligne.

Ce qui nous amène à conclure que les Y seront plus loyaux envers une
entreprise à condition que celle-ci respecte ses engagements envers ses
employés. D’ailleurs, un des Y mentionne que pour être loyal, il faut faire
confiance à l’entreprise : « La loyauté envers l’entreprise passe par la
confiance envers celle-ci (…) si tu as confiance en l’entreprise, tu risques
de rester plus longtemps » (Y1). Ce qui révèle en quelque part que les Y
seraient plus loyaux si les entreprises démontraient plus d’engagement.

5.6. Résultats et analyses de la dimension de la communication


Dans la prochaine partie de ce chapitre, nous faisons état des résultats
et analyses de notre recherche par rapport à la dimension
c o m m u n i c a t i o n . Nous transcrivons d’abord les extraits des
témoignages qui nous paraissent particulièrement pertinents quant à
cette dimension.

5.6.1. Résultats des générations par rapport à la dimension de la


communication
Dans le tableau ci-dessous nous relevons les points dominants des
témoignages exprimés par les générations de nos répondants face à la
variable communication.
81

Tableau 5.6 : Citations significatives des générations en regard avec la


dimension de la communication

Citations significatives

« On essaie d’avoir une communication respectueuse de l’autre


personne […] Ça veut dire aussi que tout peut se dire et se
communiquer, s’il y a quelque chose qui ne va pas, c’est important
la communication. C’est aussi important pour l’avancement de nos
dossiers. C’est-à-dire, s’il me manque de l’information pour
BB1 compléter mon travail […]. »
« J’ai tendance à vouvoyer les gens de préférence. Je vouvoie tout
le monde, peu importe leur âge ou d’où ils viennent. Je considère
que c’est poli et j’ai été élevé comme ça […] Ça peut offusquer les
gens qui sont rendus à une certaine place quand tu dis « tu » et leur
prénom tout de suite. »

« La communication, c’est bien important parce que 1) je


communique beaucoup et 2) j’aime mieux me faire dire quelque
chose lorsque ça ne fonctionne pas, que de l’entendre par en
arrière. »
« La communication, surtout dans un poste de gestionnaire, parce
BB2
que lorsqu’il arrive un coup dur, tu ne peux pas aller voir tes
employés, donc tu vas voir tes collègues.
« J’aime bien mieux me faire tutoyer par quelqu’un de sincère que
de me faire vouvoyer par quelqu’un qui m’envoie promener par
derrière. »

« C’est de dire ce que l’on a à dire et de la bonne façon tout en


respectant l’autre. Admettons qu’avec mon patron, j‘étais assez
directe. Quand j’avais quelque chose à dire, je le disais. »
BB3
« Parfois, avec les confrères et consœurs, je refoulais ou je
nuançais plus. Il faut que tu parles parfois avec plus de fleurs, des
fois, avec des gants blancs et d’autres fois avec des gants stériles. »
82

« Le moins possible de tabous, de choses cachées, une


communication efficace dans le temps, c’est-à-dire au moment
opportun et de façon continue. Que la communication circule bien
de façon claire, précise et concise accessible à tous et en tout
temps. »
« Je pense que dans les entreprises, il y a beaucoup de
manipulation et l’information, c’est une manipulation assez
puissante. »
X1 « La personne qui passe le balai est aussi importante que les
autres. Il n’y a aucune raison de changer le ton en fonction de la
personne à qui tu parles. »
« Lorsque j’étais jeune et je soumettais un beau document à ma
patronne, j’aimais ça qu’elle me le retourne avec des beaux
commentaires. Maintenant je vais faire quelque chose, si j’en
n’entends pas parler, c’est parce que c’est bon ou c’est correct. Si
j’en entends parler, c’est parce qu’il n’est pas d’accord et il a
retrouvé des choses. »

« Des fois, dans les réunions de département, tu ne peux pas


toujours dire ce que tu voudrais dire ou le dire comme tu aimerais le
dire. La communication n’est pas aussi honnête, parce que tu ne
X2 veux pas que ça nuise à ton dossier. […] Si tu es en opposition avec
quelque chose, tu dois réfléchir à comment tu vas dire les choses.
Des fois, tu ne peux pas te permettre d’avoir une opinion sur
quelque chose. »

« C’est d’avoir une vision d’équipe claire et une vision de groupe.


Être au courant de ce qui s’en vient, des projets etc. Il faut que notre
supérieur s’informe de ce qu’on fait. Il faut qu’on s’informe à notre
supérieur de ce qui s’en vient. »
« Même si mon supérieur ne me dit pas " good job ", tu marches ou
X3
tu crèves. Si tu es encore là après un certain temps, c’est parce que
tu fais une bonne job […] Je n’ai pas besoin d’avoir cette
reconnaissance-là. Je connais ma valeur. »
« Pour moi, la communication informelle n’est pas gage d’une bonne
communication. »

« Si tu ne peux jamais savoir ce que tu dois savoir, ça ne marche


pas. Et si ton boss ne te donne jamais l’information que tu as de
besoin, parce qu’il la retient, ça ne marche pas non plus. Si je ne lui
Y1
donne pas l’information pour me supporter ou pour me faire
avancer, ça ne marche pas. Mais une communication trop
abondante, ça peut ralentir le processus aussi. »
83

« C’est une bonne écoute et un bon feedback parce que ça donne


un bon encadrement et ça te dit si tu es dans la bonne direction. […]
Peut-être plus au départ lorsque tu rentres dans un nouvel
Y2
emploi […] Sinon, tu peux travailler super fort sur quelque chose qui
n’a pas rapport et ça ne sera pas bon et tu vas devoir
recommencer… Autant poser plus de questions au départ. »

« C’est d’avoir une relation informelle reliée au travail, ça permet


Y3 d’établir de la proximité et de la confiance pour ne pas que ça se
limite juste à des rapports formels. »

5.6.2. Analyse des générations par rapport à la communication

5.6.2.1. Les baby boomers et la communication


Les résultats empiriques nous démontrent que les boomers accordent
beaucoup d’importance à la communication. Or, pour nos répondants,
une saine communication réside dans la transparence c’est-à-dire que
« tout peut se dire et se communiquer », nous dit un boomer en
résumant la pensée du groupe. D’ailleurs, même si pour eux, la bonne
communication peut aider à l’avancement des dossiers professionnels,
leurs propos nous ont laissé sentir qu’ils accordaient encore plus
d’importance à la communication interpersonnelle :

On essaie d’avoir une communication respectueuse de l’autre


personne […] C’est de dire ce que l’on a à dire et de la bonne façon tout
en respectant l’autre. Ça veut dire que je dois avoir un certain contrôle
sur mes émotions, qui ne me permettrait pas de faire une petite crise de
colère ou de larmes. (BB1).

Contre toute attente, nos répondants boomers disent ne pas croire à la


communication hiérarchique, caractéristique qui leur est attribuée dans
la littérature. D’un autre côté, BB2 nous laisse supposer le contraire :
« La communication, surtout dans un poste de gestionnaire, parce que
lorsqu’il arrive un coup dur, tu ne peux pas aller voir tes employés, donc
tu vas voir tes collègues.
84

Ce point nous amène à ouvrir la voie sur le prochain. Selon nos


observations, les boomers semblent accorder beaucoup d’importance
aux règles implicites de la communication, ce qui confirme les
conclusions du mémoire de maîtrise de Boudreault (2002), à savoir que
les boomers sont très politiques. En effet, leurs commentaires sont
éloquents : « Ça m’a pris beaucoup d’années pour comprendre comment
ça marche […] pour comprendre quel genre d’informations étaient
importantes à transmettre […] de bien clarifier mes demandes et de
quelle façon. » (BB1). « Parfois, avec les confrères et consœurs, je
refoulais ou je nuançais plus. Il faut que tu parles parfois avec plus de
fleurs, des fois, avec des gants blancs et d’autres fois avec des gants
stériles. » (BB3)

5.6.2.2. Les X et la communication


Dans le même sens que les boomers, les X semblent soucieux du
dommage que peut créer le « pouvoir de l’information » à leur carrière.
Par exemple, ils doivent choisir de dire ou ne pas dire certaines choses
en raison de l’impact qui pourrait en résulter sur leur avancement
professionnel : « Tu ne peux pas toujours dire ce que tu voudrais dire ou
le dire comme tu aimerais le dire. La communication n’est pas aussi
honnête parce que tu ne veux pas que ça nuise à ton dossier » (X2).
« Je pense que dans les entreprises, il y a beaucoup de manipulation et
l’information, c’est une manipulation assez puissante » (X1). Ainsi, la
communication semble faire l’objet d’une lutte entre le politiquement
correct ou incorrect. D’ailleurs, selon Lawler (1986, cité dans Petit
2008 : 72), « l’information est une source de pouvoir et permet une
meilleure collaboration et coordination au sein de l’organisation », à
condition que celle-ci soit bien utilisée. Par ailleurs, nous n’avons pas été
étonnée de constater que les X n’étaient pas préoccupés par le
développement des relations informelles, mais étaient plutôt sensibles à
la communication tactique : « Être au courant de ce qui s’en vient, des
projets, etc. Il faut que notre supérieur s’informe de ce qu’on fait. Il faut
qu’on s’informe à notre supérieur de ce qui s’en vient » (X3). Selon la
85

littérature, les X aiment communiquer lorsque nécessaire (Lancaster et


al., 2002). Boudreault (2002 : 86) est aussi d’avis qu’« idéalement, les X
aimeraient pouvoir s’exprimer directement à la haute direction ». Pour
eux, c’est une question de franchise et d’efficacité. « Le moins possible
de tabous, de choses cachées, une communication efficace dans le
temps, c’est-à-dire au moment opportun et de façon continue. », déclare
X1.

Finalement, les X de notre échantillon ne ressentent pas le besoin


d’avoir de rétroaction. Convaincus de leur valeur, ils savent se valoriser
eux-mêmes, comme en témoignent deux de nos répondants : « Même si
mon supérieur ne me dit pas " good job ", tu marches ou tu crèves. Si tu
es encore là après un certain temps, c’est parce que tu fais une bonne
job » (X3). « C’est une chose dont je suis de plus en plus capable, avec
les années d’expérience, de me donner moi-même. Je suis capable de
reconnaître si mon travail est bien ou pas. » (X1).

5.6.2.3. Les Y et la communication


Dans le cas des Y, nous nous rapportons au thème de l’équilibre
puisque pour eux, la communication est une combinaison entre le formel
et l’informel. En effet, on dit que les Y veulent créer des liens avec leurs
employeurs (Saba 2009, Petit, 2008), ce qui pourrait déranger les
boomers qui semblent préférer garder une certaine distance
professionnelle. Cette ouverture aux autres fera en sorte que les Y
seront plus disposés à écouter ce que les supérieurs ont à dire sur leur
travail. En l’occurrence, les Y veulent de la rétroaction, qu’ils considèrent
comme une forme de communication tactique. Pour Tulgan (2009), pour
Patterson (2007), de même que pour Howe et Strauss (2007), ce besoin
peut créer des tensions auprès des membres des autres générations
puisqu’on pourrait les percevoir comme dépendants et incapables de
prendre des initiatives. D’un autre côté, les Y tendent à penser que ce
feedback sert à gagner du temps, comme l’explique Y2 :
86

Sinon, tu peux travailler super fort sur quelque chose qui n’a pas rapport
et ça ne sera pas bon et tu vas devoir recommencer […] Quand tu ne
poses pas assez de questions ou quand ton boss ne te donne pas
assez d’information, tu stagnes.Ceci laisse présager deux choses :
1) les Y sont jeunes et sont moins confiants, donc ils sentent qu’ils
ont besoin d’être encadrés, comme le souligne Y2 : « Peut-être plus
au départ lorsque tu rentres dans un nouvel emploi […] À un moment
donné, c’est sûr que tu prends de l’assurance et que tu n’as plus
besoin. » et 2) les entreprises ne poussent pas les jeunes à user de
leur autonomie de crainte que leur manque d’expérience puisse
nuire au projet. D’ailleurs, sur ce deuxième point, trois répondants ont
mentionné que les boomers étaient fermés à leurs idées, ce qui nous
laisse croire que les Y n’ont pas l’impression d’avoir le feu complètement
vert pour agir dans leurs tâches au travail. « Qu’on attende de moi les
résultats, mais qu’on ne me dise pas par quel moyen les faire, qu’on me
laisse de l’autonomie […] Je ne m’attends pas à ce que l’on me dise
comment atteindre mes résultats », nous dit Y3. De plus, pour confirmer
ce point, BB3 nous déclare ceci :

J’ai trouvé que les jeunes avaient du potentiel, mais qu’il fallait les
développer. L’expertise des plus âgés, tu peux en refiler aux plus
jeunes, mais ils ne sont pas capables de tout absorber ce que tu as
comme connaissances […] Alors tu essaies de leur passer toute
l’information possible pour travailler, mais tu t’aperçois qu’à la longue, ils
ne font pas les choses comme on leur a montré. Ils prennent ce qu’ils
peuvent.

5.7. Les comportements clés, valeurs et attitudes des trois


générations
Suite à notre revue de littérature, nous avons dénombré des
comportements clés, valeurs et attitudes propres aux générations à
l’étude (baby boom, X et Y). Nous avons rassemblé ces traits dans un
tableau synthèse, inspiré des écrits de Petit (2008 : 33) et Harvey
(2004 : 37), au chapitre 3 (voir le tableau 3.1). À la lumière de nos
résultats empiriques, certaines de ces caractéristiques inter-
générationnelles ont été développées spontanément par nos sujets.
87

Or, l’objectif de notre exercice était d’une part de comparer si nos


résultats empiriques concordent avec ce qui se dit dans la littérature et
d’autre part, d’ouvrir la voie sur de nouvelles observations qui pourront
faire l’objet de pistes de réflexion pour des recherches futures. En guise
de conclusion, nous reprenons donc le tableau conceptuel 3.1présenté
au chapitre trois, démontrant les caractéristiques (comportements clés et
attitudes) et les attentes (valeurs, préférences et réticences) envers le
monde du travail, s’expliquant en partie par les influences (Petit, 2008 et
Harvey, 2004) selon les cinq points d’opposition où nous proposons des
confrontations. Les cases grises représentent les caractéristiques qui
furent modifiées ou nuancées suite à l’analyse de nos données
empiriques et les cases blanches sont les caractéristiques qui nous
furent confirmées par nos répondants.

Tableau 5.7: Comportements clés, valeurs et attitudes générationnels


88

Examinons brièvement nos observations générales en rapport avec


chacune des dimensions étudiées.

Le sens au travail
C’est plutôt chez les boomers que nous avons remarqué une différence.
Nos résultats empiriques confirment qu’ils sont dévoués à leur travail,
mais aucun de nos répondants ne nous parle de reconnaissance de son
titre, de promotion ou de gratifications personnelles contrairement à ce
qui est présenté dans la littérature. Nous supposons que ce trait de
personnalité peut aussi être dû au stade de leur carrière, ces personnes,
plus âgées étant près de leur retraite et ayant déjà accompli ce qu’elles
voulaient.

Le rapport à l’institution
Dans la littérature, on soulève que les Y sont confiants envers
l’entreprise. Selon nos résultats empiriques, nous constatons plutôt que
les Y aimeraient être confiants, mais pour l’instant, compte tenu de leur
déception face aux organisations, ils sont très cyniques envers
l’entreprise.

Le travail d’équipe
Tous nos répondants nous ont confirmé spontanément ce qui se dit sur
leurs générations et le travail d’équipe dans la littérature.

La loyauté
Pour cette variable, nos résultats empiriques révèlent une différence
chez les X. Contrairement à leur représentation dans la littérature, la
loyauté envers la personne ne ressort pas comme caractéristique
dominante. Nous avons plutôt ajouté comme trait dominant la « loyauté
momentanée envers l’entreprise », qui semble faire l’unanimité chez nos
répondants.
89

La communication
En ce qui a trait à la variable de la communication, pour les boomers,
seul le formalisme semble être un point qui rejoint la majorité de nos
répondants, soit deux sur trois. Aucun de nos répondants boomers ne
nous parle concrètement de son besoin de parler en personne ou de un
à un tel qu’illustré dans notre tableau. Dans le même sens, les Y ne nous
mentionnent pas non plus leur besoin fondamental de s’exprimer à
travers les nouvelles technologies de l’information.

Les exigences, attentes et valeurs professionnelles des trois générations


maintenant explorées, dans le prochain chapitre, nous en discuterons en
tentant d’une part de les approfondir et d’autre part de déterminer si ces
différences peuvent faire l’objet de conflits intergénérationnels potentiels.
CHAPITRE 6. Présentation des conflits potentiels et discussion

6.1. Discussion en regard avec les terrains de confrontations


possibles dans une équipe intergénérationnelle
Dans le chapitre 5, nous avons présenté les données empiriques ayant
trait aux exigences, attentes et valeurs professionnelles des trois
générations à l’étude relativement à cinq concepts issus de la littérature
qui semblaient présenter des discordances générationnelles. Dans le
présent chapitre, nous aimerions approfondir ces observations et voir
quelle pourrait être la nature des confrontations générationnelles
potentielles dans une équipe de travail

6.1.1. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec la


variable « sens au travail »
6.1.1.1. Conflits potentiels entre les générations baby boom et X en
regard avec la variable du sens au travail
Conflit potentiel n°1 : Les boomers et les X n’ont pas la même
conception de la qualité de vie au travail. Pour les X, les boomers ont
« une vieille mentalité » quant à la flexibilité des horaires et l’équilibre
travail-vie privée. Ainsi, X3 dit : « J’ai des patrons qui veulent que leurs
employés restent travailler au bureau […] c’est une vieille mentalité. Ils
n’ont pas cheminé au niveau du télétravail dans leur tête. » Tel que
démontré dans nos résultats empiriques, dû à la récession des années
80 et 90, les boomers devaient rester compétitifs en acceptant les
conditions de travail imposées par l’entreprise. Rappelons les propos de
BB3 : « Des fois il y avait des conflits et c’est parce que y en a qui
étaient écœurés. Ces gens-là auraient dû partir pour aller ailleurs, mais
ils n’étaient pas capables parce qu’il n’y avait pas d’ouvertures ». Ceci
pourrait expliquer en partie pourquoi les boomers n’acceptent pas que
les autres générations exigent autant de flexibilité des horaires et de
liberté au travail. D’ailleurs, cette différence de perception entre les
boomers et les X se répercute sur le prochain conflit potentiel.
91

Conflit potentiel n°2 : Les boomers et les X ne s’entendent pas sur


les mêmes objectifs : carrière dans une même entreprise versus
opportunités dans plusieurs. D’abord, il est vrai que nos résultats
empiriques nous ont permis d’observer que les X sont motivés par les
opportunités de carrière. Ils se sentent en contrôle, savent où ils vont,
assurent leur avancement professionnel et surtout, ils choisissent de
travailler ou non à un endroit. Ainsi, X1 nous déclare : « Je travaille à un
endroit pour des raisons spécifiques. », chose que ses prédécesseurs
n’ont pas voulu faire. Nous supposons donc que compte tenu de leur
contexte professionnel et social modelé selon la philosophie des
générations précédentes, les boomers n’avaient d’autre choix que de se
soumettre aux règles établies par l’entreprise. Leur nombre rendant la
compétition plus féroce, c’est le seul volet de leur vie où leur poids
démographique a joué contre eux, selon Boudreault (2002). Sur ce point,
nous pensons donc que si les boomers avaient pu bénéficier d’une plus
grande flexibilité au niveau des ouvertures, ils auraient possiblement
utilisé leur position de force pour exiger de meilleures conditions au
travail dès leur entrée sur le marché du travail.

6.1.1.2. Conflits potentiels entre les générations baby boom et Y en


regard avec la variable le sens au travail
Conflit potentiel n°1 : Les boomers et les Y n’ont pas les mêmes
motivations sur le marché du travail. Nos résultats empiriques
dévoilent qu’il pourrait y avoir un terrain de confrontation entre les
boomers et les Y en ce qui a trait à leur motivation au travail. Pour Y1,
« la personne qui est en voie de prendre sa retraite est peut-être moins
motivée de faire fonctionner les choses à 300 % ». De plus, les Y de
notre échantillon nous manifestent leur mécontentement devant
l’approche des boomers à leur égard, comme le confirme Y3 : « On veut
tout de suite en prendre sur nos épaules, pis eux autres veulent nous
garder en bas de l’échelle : " regarde le jeune, nous on a monté les
échelons un à un ". » En contrepartie, les boomers ont trouvé que les Y
92

manquaient d’expérience et voulaient trop rapidement prendre en charge


des responsabilités de grande envergure. En ce sens, BB3 appuie ce
point et avoue que « peut-être les vieux ne tolèrent pas les jeunes qui
n’ont pas d’expérience. Ils deviennent frustrés et ne veulent pas les aider
pis ils ne sont pas ouverts à accueillir les jeunes ».

Conflit potentiel n°2 : Les boomers et les Y n’ont pas la même


conception quant à la qualité de vie au travail. Les différentes valeurs
véhiculées par les boomers et par les Y en matière de qualité de vie au
travail pourraient présenter un terrain de confrontation potentiel entre ces
deux générations. « Oui, j’aime travailler, mais ça ne sera pas à tout
prix », affirme Y1. Nous avons trouvé que ce point pouvait faire l’objet
d’un conflit potentiel puisque les boomers semblaient percevoir les Y
comme n’ayant pas le « cœur à l’ouvrage ». D’ailleurs, BB1 nous avoue
que la qualité de vie au travail fait souvent l’objet de discussion entre les
membres de son équipe étant donné leurs points de vue divergents :

[…] les discussions portent sur celles d’entre nous pour qui les horaires
sont corrects et celles pour qui c’est difficile d’envisager et pour elle
pour qui son horaire c’est de telle heure jusqu’à telle heure et elle quitte
à telle heure.

Ce qui laisse sous-entendre qu’il n’y a pas de terrain d’entente dans


l’équipe. Sur ce point, on suppose qu’il y a matière à conflit
intergénérationnel potentiel puisque selon ce que nous avons trouvé
dans nos résultats, cela semble refléter les valeurs générationnelles
concernant la qualité de vie au travail.

6.1.1.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y en regard de la


variable le sens au travail
Conflit potentiel : Les X et les Y n’arrivent pas avec les mêmes
conditions économiques sur le marché du travail (économie malade
VS économie en santé). Sur ce point, nous avons observé qu’il pourrait
y avoir une forme de rivalité entre la génération X et la génération Y. En
ce sens, nous avons senti que certains de nos répondants X s’estiment
93

plus travaillants que leurs collègues de la génération Y. C’est ce


qu’exprime X 2 :

Quand je regarde les gens de mon âge ou un peu plus vieux qui se
disent « c’est sûr que je vais devoir travailler si je veux avoir un bon
salaire » lorsque je regarde les étudiants du premier cycle
d’aujourd’hui, à comparer à moi quand j’étais au premier cycle, ils
veulent avoir un bon salaire sans travailler le jour et la nuit.

Cette citation ouvre la voie sur le prochain point : les trois répondants de
notre échantillon X nous ont laissé sous-entendre qu’ils consacreraient
plus d’heures au travail si les conditions se pliaient à leur style de vie. En
l’occurrence, même si les X disent prôner une qualité de vie au travail, ils
auront plus de difficulté à fixer leurs limites que les Y, ce qui pourrait
rendre certains membres de la génération X jaloux envers les Y, qui
semblent s’assumer beaucoup plus. En ce sens, Y1 et Y3 semblent
convaincus que les entreprises se doivent d’être plus flexibles en termes
de qualité de vie au travail : « […] Nos valeurs sont tellement différentes
de celles des autres générations et les entreprises ont besoin de se
rendre compte que nos valeurs sont différentes. » (Y1)

6.1.2. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec la


variable « rapport à l’institution »
6.1.2.1. Conflits potentiels entre les générations baby boom et X en
regard avec la variable rapport à l’institution
Conflit potentiel n°1 : Les boomers et les X n’ont pas la même
conception de l’autorité (rigidité VS flexibilité). Les X sont unanimes
pour dire que les boomers travaillent dans un cadre beaucoup trop
rigide. D’ailleurs, X2 nous avoue s’être sentie frustrée en début de
carrière puisque que pour plaire à ses patrons, elle devait assurer une
présence physique constante au bureau afin d’être reconnue auprès de
ses patrons :

Les gens regardaient à quelle heure j’arrivais et à quelle heure je


sortais. […] Moi, j’aurais aimé partir à 16 h et apporter mon dossier à la
maison. Je ne pouvais pas faire ça. Je ne pouvais même pas penser
faire ça […] c’étaient tous des gens plus vieux que moi et c’était
important de mettre beaucoup d’heures au travail.
94

Ce terrain de confrontation doit être nuancé puisque nous avons observé


que cette frustration venait seulement de la génération X envers les baby
boomers, puisqu’aucun des boomers de notre échantillon ne nous a
parlé des X. Une explication possible serait que même si les X sont à la
recherche d’une autorité flexible, ils respecteront les cadres rigides
imposés par les boomers sans pour autant toujours le faire par plaisir :
« Alors je vais travailler le nombre d’heures à travailler pour faire la job
pas par plaisir, loin de là, mais je vais le faire. » (X2)

Conflit potentiel n°2 : Les boomers et les X ne perçoivent pas


l’entreprise de la même façon (faire une différence VS indifférence).
Nos résultats empiriques montrent qu’il pourrait y avoir une nuance dans
ce conflit potentiel. D’abord, les boomers ressentent le besoin de faire
une différence dans leur milieu de travail (Wesner et Miller, 2008;
Cordeniz, 2002 et Lancaster et al., 2002) : « […] je voulais m’impliquer
dans une cause qui pouvait assurer une transformation sociale » (BB1).
En ce sens, nous appuyons ce terrain de confrontation par deux
suppositions. D’abord, mentionnons que les X vivent sous le poids de la
génération des boomers. Leur génération étant moins nombreuse, les X
doivent accepter ce qui est en place contrairement aux boomers qui, en
raison de leur poids générationnel imposant, ont pu défoncer des
barrières, voire changer des tendances sociales (Boudreault, 2002).
Ensuite, nos résultats empiriques montrent que les boomers resteront
plus longtemps dans une entreprise contrairement aux X qui capitalisent
sur les opportunités. En l’occurrence, les X étant souvent « de passage »
dans une organisation, nous supposons que leur implication de courte
durée en entreprise pourrait être perçue comme de l’indifférence par les
boomers.
95

6.1.2.2. Conflit potentiel entre les générations baby boom et Y en regard


avec la variable le rapport à l’institution
Conflit potentiel : Les boomers et les Y n’ont pas la même
perception quant à la hiérarchie (relation hiérarchique VS relation
égalitaire). Nos résultats empiriques vont dans le même sens que la
littérature : les Y veulent avoir des relations égalitaires avec tout le
monde, notamment avec leur supérieur. « Ce qui me motive, c’est la
convivialité, l’absence de hiérarchie trop rigide entre le personnel » (Y3).
En l’occurrence, seulement une des trois boomers (BB1) nous dit
franchement qu’elle n’est pas totalement ouverte à cette convivialité :
« C’est "TU" tout de suite ». Tandis que BB2 nous dit que dans son rôle
de gestionnaire, il ne communique jamais les mauvais coups à son
équipe. Cette attitude pourrait être perçue comme une forme de
hiérarchie par les Y, qui prônent une transparence absolue de la part de
leur gestionnaire.

6.1.2.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y en regard avec la


variable le rapport à l’institution
Conflit potentiel : Les X et les Y n’entrent pas sur le marché du
travail avec la même ouverture d’esprit (scepticisme VS idéalisme).
Sur ce point, nous avons trouvé que les X et les Y se ressemblaient
beaucoup. « Par expérience, je suis devenu sceptique parce que de plus
en plus, les entreprises se désengagent » (Y3) «La loyauté, c’est
définitivement à sens unique. Même cette entreprise ne fait pas
exception à la règle. Le jour où ils n’ont plus besoin de toi, ils te mettent
à la porte, merci bonsoir ». (X1). D’un autre côté, la tendance de nos
résultats empiriques nous amène à conclure que les Y veulent être
confiants mais que les entreprises, pour la plupart, ne leur ont pas
encore donné l’occasion de croire en elles; ils sont donc devenus
cyniques par la force des choses. Nous appuyons cette supposition avec
le constat suivant. Contrairement aux X qui semblent assumer le côté
noir de l’entreprise, on sent une déception chez les Y : « Il ne faut pas
être naïf, les employeurs ne sont pas tant intéressés par toi » (Y3); « Où
96

je travaillais avant, ils voyaient leurs employés vraiment comme des


outils. » (Y1) Ce point nous laisse supposer que les X seront plus
endurants que les Y au travail. Au départ, les Y nous semblent plutôt
avoir été idéalistes. Ensuite, conséquemment à diverses expériences de
travail décevantes, ils sont devenus cyniques dans la perception qu’ils
ont des organisations. Cette attitude se répercutera sur leurs attentes et
exigences.

6.1.3. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec la


variable « travail d’équipe »
6.1.3.1. Conflit potentiel entre les générations baby boom et X en regard
avec la variable le travail d’équipe
Conflit potentiel : Les boomers et les X ne conçoivent pas le travail
d’équipe de la même façon : (l’équipe est un tout VS l’individu fait
l’équipe). Les boomers sont reconnus pour accorder une très grande
importance au travail d’équipe (Sirias et al., 2007), mais pas au même
niveau que les X. En effet, pour les boomers, les membres d’une équipe
doivent d’une part être interdépendants et d’autre part adhérer au
consensus (Sirias et al., 2007). « Il faut travailler en équipe parce que
c’est le seul moyen d’y arriver» (BB1). Or le fait que les X préfèrent
contribuer individuellement et non collectivement au groupe, comme le
voudraient les boomers, pourrait être perçu comme un manque de
volonté de créer une synergie d’équipe (Samson, 2005) ce qui, selon
nos observations, pourrait créer des frictions générationnelles.

6.1.3.2. Conflit potentiel entre les générations baby boom et Y en regard


avec la variable le travail d’équipe
Conflit potentiel : Les boomers et les Y ne conçoivent pas l’équipe
de la même façon : (consensus VS communauté). Un peu comme les
boomers, les Y recherchent la sociabilité entre les membres d’une
équipe. Par contre, nos résultats empiriques révèlent que les Y
valorisent le respect de l’opinion d’autrui et demandent en retour qu’on
respecte la leur (Samson, 2005). « L’équipe, c’est super important
97

puisqu’en général tu peux avoir du feedback des membres que tu


n’avais pas pensé au départ ce qui peut être super intéressant », nous
dit Y2. Les boomers, quant à eux, recherchent plutôt un consensus. Un
peu comme nous le décrit un de nos répondants boomers, c’est le
capitaine qui est en charge, donc c’est lui qui décide. « […] s’il y a
quelqu’un de l’équipe qui n’est pas convaincu, qu’il lève la main pis on va
se rasseoir pour en parler […] » (BB2). D’ailleurs pour appuyer ce
postulat, Y2 et Y3 nous avouent avoir senti à quelques reprises un non-
respect de leurs opinions. Ceci rejoint les travaux de Gravett et
Throckmorton (2007).

6.1.3.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y en regard avec la


variable le travail d’équipe
Conflit potentiel : Les X et les Y ne conçoivent pas l’équipe de la
même façon : (collectif VS individualisme). Nos résultats empiriques
confirment que les X sont moins enclins au développement des relations
interpersonnelles dans une équipe de travail, alors que pour les Y, il est
essentiel de créer un renforcement des liens informels entre les
membres d’une équipe. Nous considérons donc que cette caractéristique
peut indéniablement créer un froid avec les Y, puisque les X seront
perçus comme des gens qui ne veulent pas s’engager. Voyons ce que
nos X en disent : « J’aime mieux travailler seule parce que j’ai tendance
à être plus intravertie pis solitaire au travail. Toute seule je suis bien
j’arrive au travail, je ferme la porte de mon bureau et je me concentre sur
mes projets » (X2). « Pour moi, la communication informelle n’est pas
gage d’une bonne communication » (X3). Ces deux commentaires nous
semblent bien refléter la tendance des X à préférer travailler de façon
plus individualiste.
98

6.1.4. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec la


variable « loyauté »
6.1.4.1. Conflit potentiel entre les générations baby boom et X en regard
avec la variable la loyauté
Conflit potentiel : Les boomers et les X n’ont pas la même
conception de la loyauté (attachement permanent VS attachement
temporaire). Les boomers et les X se rejoignent sur un point : la loyauté
se traduit par l’honnêteté des gestes posés dans le cadre de leurs
fonctions. En contrepartie, à l’inverse des X, les boomers auront une
plus grande propension à rester dans une même entreprise pendant
toute leur carrière (Lancaster, 2002), ce qui est perçu comme une forme
d’attachement à l’organisation. De plus, même si les X affichent un
scepticisme envers l’institution, nous avons été surprise de constater que
deux de nos répondants rapportent avoir un certain sentiment
d’appartenance à l’entreprise : « Je considère l’entreprise comme ma
famille » (X1). « C’est le fun quand on est capable d’avoir un sentiment
d’appartenance envers une entité et d’être fière des valeurs qui sont
propagées par l’entreprise où tu aimes ça arriver le matin parce que tu
aimes la façon que c’est géré » (X2). Cette tendance révèle que les X de
notre échantillon ne sont pas aussi détachés que la littérature le dit. D’un
autre côté, même si les philosophies paraissent se ressembler en termes
de loyauté, l’attachement temporaire des X versus l’engagement à plus
long terme des baby boomers pourrait laisser présager une possibilité de
conflits. Nous appuyons donc les chercheurs qui affirment que le
concept de la loyauté doit être redéfini (Tulgan, 2009; Petit, 2008,
Patterson, 2007; Harvey 2004 et Boudreault, 2002).

6.1.4.2. Conflit potentiel entre les générations baby boom et Y en regard


avec la variable la loyauté
Conflit potentiel : Les boomers et les Y n’ont pas la même
conception de la loyauté : (lifetime employment VS échange
transactionnel). Nos résultats empiriques soulèvent que ce conflit
potentiel doit être nuancé. Un peu comme les X, les Y ne ressentent pas
99

le besoin de se dévouer toute une vie entière à la même entreprise.


« Être loyale à l’entreprise pour moi, c’est de l’être le temps que je suis
là » (Y1). Pour les boomers, c’est tout le contraire. Comme l’a souligné
BB2 dans nos entrevues, rester dans une même entreprise, y être fidèle
pendant des années, fait partie de l’éducation et de la culture des
boomers.

Or, bien que ces Y veulent « aussi » ajouter une corde à leur arc de
connaissances professionnelles, on ressent un plus grand désir
d’engagement à long terme envers l’entreprise. C’est ce qui pourrait
expliquer pourquoi ils demandent à ce que l’entreprise fasse preuve de
loyauté envers eux. Par contre, même si les Y se voient à plus long
terme que les X dans une entreprise, ils envisagent quand même un
départ éventuel vers d’autres entreprises. Cette philosophie les oppose
aux boomers, qui se voyaient toute une vie dans une seule entreprise :
« […] quand il est venu le temps de penser j’y vais-tu, j’y vais-tu pas, je
me suis dit; je ne suis pas pour lâcher ma gang, moi là » (BB2). En ce
sens, les Y seront loyaux le temps de leur passage, mais ne
demeureront pas fidèles à une unique entreprise toute leur vie comme
les boomers. Ce constat nous conduit à nuancer que les deux
générations sont loyales, mais ne conçoivent pas cette loyauté de la
même façon, ce qui pourrait aboutir à des malentendus, voire à des
conflits.

6.1.4.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y en regard avec la


variable la loyauté
Conflit potentiel : Les X et les Y n’ont pas la même conception de la
loyauté : (engagés VS désengagés). Un des points communs entre les
X et les Y est leur façon de se percevoir comme des contractuels dans
l’entreprise. D’un autre côté, nous avons observé que les X, qui
acceptent davantage cet état de fait, seront plus enclins à changer
d’entreprise, ce qui influencera leur comportement une fois en poste. Or,
nous pensons que l’interprétation qu’en feront les Y pourrait aboutir à de
100

l’incompréhension et à des conflits. En ce sens, aux yeux des Y, qui


semblent beaucoup plus ouverts à envisager le long terme dans une
même entreprise, les X étant plus convaincus de leur statut de travailleur
autonome paraîtront plus détachés, voire désengagés. C’est d’ailleurs ce
que reflètent les propos de Y1 lorsqu’elle nous déclare :

[…] par exemple le chum de mon amie est seulement motivé par son
salaire […] il change de job en fonction du salaire qu’il va faire […] C’est
sûr qu’une personne comme ça, je vais être en conflit dans le quotidien
parce que travailler avec un gars qui est juste motivé par son salaire, ça
va paraître et ça va faire en sorte que nos objectifs ne seront pas les
mêmes et je vais le sentir.

6.1.5. Conflits intergénérationnels potentiels en regard avec la


variable « communication »

6.1.5.1 Conflit potentiel entre les générations baby boom et X en regard


avec la variable la communication
Conflit potentiel : Les boomers et les X ne communiquent pas avec
le même langage : (communication politique VS communication
tactique). Selon nos observations, les boomers semblent accorder
beaucoup d’importance aux règles implicites de la communication
interpersonnelle. Les X, quant à eux, plus directs, nous disent vouloir
une franchise et « le moins possible de tabous, de choses cachées »
(X1). En ce sens, certains X semblaient très soucieux du dommage que
pouvait créer le « pouvoir de l’information » sur leur carrière. « Je pense
que dans les entreprises il y a beaucoup de manipulation et l’information,
c’est une manipulation assez puissante » (X1). Ceci nous laisse
supposer que les X seront dérangés par les règles politiques de la
communication, qui semblent chères aux boomers. Nous croyons
également que les X ne communiqueront que de manière tactique, c’est-
à-dire pour éviter de nuire à l’avancement de leur carrière, entre autres.
À cet égard, X2 avoue franchement : «Tu ne peux pas toujours dire ce
que tu voudrais dire ou le dire comme tu aimerais le dire. La
communication n’est pas aussi honnête parce que tu ne veux pas que ça
nuise à ton dossier. »
101

6.1.5.2. Conflit potentiel entre les générations baby boom et Y en regard


avec la variable la communication
Conflit potentiel : Les boomers et les Y ne communiquent pas avec
le même langage : (hiérarchie VS tout le monde doit être sur le
même pied d’égalité). En ce qui a trait à la communication entre les
boomers et les Y, nous avons observé qu’il y avait matière à
confrontation et ce, à plusieurs niveaux. D’abord, les Y préfèrent
communiquer avec leurs subordonnés et supérieurs sur une base
égalitaire, alors que les boomers semblent vouloir garder une distance.
Pour supporter ce point, un des boomers (BB2) nous dit : « La
communication, surtout dans un poste de gestionnaire, parce que
lorsqu’il arrive un coup dur, tu ne peux pas aller voir tes employés donc
tu vas voir tes collègues. . Y1 nous le confirme d’ailleurs : «C’est de
mettre cartes sur table […] si tu te plantes, tu le sais et tu le sais aussi si
tu t’en vas dans la bonne direction ». De plus, nous supposons que ces
différentes attitudes des boomers dans la relation professionnelle
pourraient être perçues par certains membres de la génération Y comme
un manque de transparence et comme un refus de les aider à
progresser, ce qui pourrait générer de la frustration. Par ailleurs, en
équipe, les Y développeront une idée, ou même un projet, en fonction
des opinions des autres membres de l’équipe, ce qui ne semble pas être
en accord avec les façons de faire de la majorité des boomers de notre
échantillon, pratiquant plutôt un consensus contrôlé (Samson 2005).
« Tout le monde est convaincu qu’on s’en va à Gaspé, pis s’il y a
quelqu’un de l’équipe qui n’est pas convaincu qu’on sen va à Gaspé bien
qu’il lève la main pis qu’il nous le dise pis on va se rasseoir pour en
parler » (BB2). Pour supporter ce point, Y2 et Y3 nous avouent sentir à
quelques reprises un non-respect de leurs opinions, ce qui appuie les
conclusions de Gravett et Throckmorton (2007).
102

6.1.5.3. Conflit potentiel entre les générations X et Y en regard avec la


variable de la communication
Conflit potentiel : Les X et les Y ne communiquent pas avec le
même langage : (rétroaction VS rétraction). Pour les Y, la
communication est une combinaison entre le formel et l’informel. Cette
ouverture à la sociabilité (Petit, 2010) fera en sorte que les Y seront plus
disposés à écouter ce que les autres ont à dire sur leur travail. Or, les Y
veulent de la rétroaction, qu’ils considèrent comme une forme de
communication susceptible d’aider à l’avancement des travaux. Pour
Tulgan (2009) et Patterson (2007), ce besoin peut créer des tensions
auprès des autres générations, puisqu’il en résulte qu’on perçoit les Y
comme dépendants et incapables de prendre des initiatives (Howe et
Strauss 2007; Patterson, 2007). D’ailleurs, en ligne avec ce
commentaire, X1 nous mentionne que, plus jeune, il ressentait le besoin
d’avoir de la rétroaction :

Avant, lorsque j’étais jeune et je soumettais un beau document à ma


patronne, j’aimais ça qu’elle me le retourne avec des beaux
commentaires. Tandis que maintenant si j’en n’entends pas parler, c’est
parce que c’est bon ou c’est correct.Ceci laisse présager deux
choses : 1) les Y sont jeunes et sont moins confiants, donc ils ressentent
le besoin d’être encadrés, ce que Y2 confirme : « Peut-être plus au
départ lorsque tu rentres dans un nouvel emploi […] À un moment
donné, c’est sûr que tu prends de l’assurance et que tu n’as plus
besoin » et 2) les entreprises ne poussent pas les jeunes à user de leur
autonomie parce qu’elles craignent que leur manque d’expérience
puisse nuire au projet. « Qu’on attende de moi les résultats, mais qu’on
ne me dise pas par quel moyen les faire, qu’on me laisse de
l’autonomie […] Je ne m’attends pas à ce que l’on me dise comment
atteindre mes résultats », nous dit Y3. Compte tenu de ces aveux, nous
supposons donc que cette différence pourrait peut-être être reliée à l’âge
et au niveau d’expérience plutôt qu’à la génération.
103

6.2. Confrontations générationnelles possibles dans une équipe


intergénérationnelle
À la lumière de nos résultats empiriques, certaines confrontations
intergénérationnelles furent soulignées spontanément par nos sujets.
Ainsi, il était évident pour tous nos répondants que les différentes
générations n’avaient pas la même vision des choses au travail, ce qui,
selon eux, est à la base des conflits intergénérationnels. « Les
générations sont toutes reliées à certaines valeurs et ça demande une
adaptation » (X2). Pour les boomers :

La génération peut créer des conflits parce que la philosophie des


jeunes n’est pas la même que les plus vieux […] Ils n’ont pas la même
philosophie, la même vision des choses, les mêmes valeurs ou
principes que nous parce que c’est une autre génération. (BB3)

Les propos de Y1 vont dans le même sens : « nous n’avons pas la


même réalité […] on n’est pas au même stade de vie. On ne cherche
pas les mêmes choses.»

Or, l’objectif de notre exercice était d’une part de comparer nos résultats
empiriques avec ce qui se dit dans la littérature et d’autre part, d’ouvrir la
voie sur de nouvelles observations qui pourront faire l’objet de pistes de
réflexion pour des recherches futures. En guise de conclusion, nous
reprenons donc le tableau conceptuel 3.2 présenté au chapitre trois,
démontrant les conflits intergénérationnels les plus représentatifs issus
de la littérature, que nous avons ajustés en fonction de nos résultats
empiriques. Les cases grises représentent les confrontations potentielles
qui furent modifiées ou nuancées suite à l’analyse de nos données
empiriques et les cases blanches sont les terrains de confrontations qui
nous ont été confirmés par nos répondants. Enfin, pour représenter
l’équipe, nous avons effectué notre analyse en fonction de la plus petite
unité de groupe existante, soit le couple de deux générations.
104

Tableau 6.1 : Confrontations générationnelles possibles dans une équipe


intergénérationnelle

Comparons brièvement notre revue de littérature et ce que nous avons


constaté sur le terrain pour chacune des variables à l’étude.

Le sens au travail
Les résultats empiriques ne soulèvent pas de différence avec ce qui fut
rapporté dans la littérature en ce qui a trait à la variable le sens au
travail. Or, les trois générations nous confirment spontanément ce qui se
dit sur elles à propos du sens au travail.
105

Le rapport à l’institution
En ce qui concerne le terrain de confrontation possible entre les
boomers et les X sur le rapport à l’institution, nos résultats empiriques
démontrent que les boomers ne sont pas perçus comme autoritaires tel
que la littérature les décrit. Ils sont plutôt vus par certains X comme étant
rigides. En ce sens, le terrain propose une confrontation entre d’une part,
ce que perçoivent les X par rapport aux boomers, c’est-à-dire qu’ils sont
rigides et d’autre part, la conception que se font les X sur la flexibilité au
travail. Dans la littérature, on soulève également que les Y sont confiants
envers l’entreprise. Selon nos résultats empiriques, nous observons
plutôt un cynisme chez les Y, conséquence de plusieurs déceptions
vécues en entreprise. Nous supposons donc que les Y sont plutôt
idéalistes.

Le travail d’équipe
Les résultats empiriques ne soulèvent pas de différence avec ce qui fut
rapporté dans la littérature en ce qui a trait au travail d’équipe. Or, les
trois générations nous confirment de manière spontanée ce qui se dit sur
eux et le travail d’équipe.

La loyauté
Cette case fut nuancée suite à l’analyse de nos résultats empiriques. Au
départ, nous avons noté de la littérature qu’il y avait un terrain de
confrontation possible entre l’attachement des boomers et le
détachement des X envers l’entreprise. Nos résultats empiriques
soulèvent que les X ne sont pas détachés, mais plutôt attachés
temporairement.

La communication
En ce qui a trait à la variable de la communication, pour les boomers,
seul le formalisme semble être un point qui rejoint la majorité de nos
répondants, soit deux sur trois. Ce point semble se répercuter sur leur
manière de s’exprimer et selon la perception de nos répondants X, cette
106

attitude s’apparenterait à une communication politique. En ce sens, nous


supposons donc que les X communiquent de manière tactique, voire
stratégique, plutôt que librement comme nous l’avions inscrit dans notre
premier tableau, puisqu’ils sont unanimes pour dire qu’ils agissent ou
communiquent d’une certaine façon pour plaire ou ne pas déplaire à la
génération du baby boom.

En ce qui a trait au couple baby boomers et Y, contrairement à ce qui fut


rapporté dans la littérature, nos résultats empiriques ne soulèvent pas de
terrain de confrontation possible entre la communication traditionaliste
des boomers et la propension des Y à utiliser les nouvelles technologies
de l’information pour discuter.

Les confrontations potentielles entre les trois générations maintenant


explorées, la prochaine partie de ce chapitre passera en revue ce que
ces conflits représentent en termes de défis potentiels pour le monde de
la gestion.

6.3. Les gestionnaires et les différences intergénérationnelles


Nos résultats empiriques nous permettent d’affirmer sans l’ombre d’un
doute qu’il existe des différences entre les générations. D’ailleurs, selon
la littérature, la disparité entre les générations en entreprise pourrait
représenter une menace encore plus importante que les contrastes
reliés à la culture, à la différence des sexes, à l’ethnicité et à la religion
(Zemke et al., 2000 ; Lancaster et al., 2002). Il est donc primordial que le
gestionnaire mette à profit chacune des forces générationnelles afin de
bien faire fonctionner une équipe comportant plusieurs générations
(Tulgan 2006; Zemke et al., 2006 et Lancaster et al., 2002). Au départ,
l’objectif de notre recherche n’était pas de valider comment les
gestionnaires réagissaient face aux conflits intergénérationnels dans une
équipe composée de plusieurs générations. Cependant, au fil des
entrevues, nous avons récolté quelques éléments au sujet des stratégies
utilisées par les gestionnaires face à ce genre de situation, car dans
107

notre échantillon, il y avait trois gestionnaires membres des générations


du baby boom, X et Y. La prochaine partie de ce chapitre vous sera
présentée en deux temps. D’abord, nous mettrons de l’avant les profils
de ces gestionnaires; ensuite, nous exposerons les résultats et analyses
des solutions qu’ils adoptent face aux conflits dans les équipes
intergénérationnelles et dont ils nous ont fait part lors des entrevues.

6.4. Portrait sommaire des gestionnaires


Parmi les trois gestionnaires interrogés, deux répondants sont de sexe
masculin. Un des participants est membre de la génération du baby
boom et œuvre comme directeur général dans une succursale de
commerce en gros. Celui-ci a sous sa responsabilité une cinquantaine
d’employés, dont sept gestionnaires appartenant aux trois générations à
l’étude, soit baby boom, X et Y. Le deuxième gestionnaire, membre de la
génération X, œuvre pour sa part dans le domaine publicitaire et a sous
son aile trois personnes, dont deux gestionnaires de la génération Y et
une superviseure issue du baby boom. Enfin, la dernière gestionnaire
interviewée, membre de la génération Y, n’a pas d’équipe fixe à sa
charge. Gestionnaire de projets, elle est appelée à diriger différentes
équipes, souvent composées de ressources professionnelles variées et
ce, selon les exigences du projet.

Tableau 6.2 : Caractéristiques des gestionnaires rencontrés

Répondants Date de Âge Sexe Fonction Domaine


naissance

BB2 11 mars 1961 49 HOMME Directeur général Commerce au détail

19 novembre
X1 34 HOMME Gestionnaire d’équipe Publicitaire
1975

Y1 14 mars 1981 29 FEMME Gestionnaire de projet Télécommunications


108

6.5. Solutions potentielles apportées par les gestionnaires face aux


conflits intergénérationnels
Les différences intergénérationnelles posent des défis aux gestionnaires
qui doivent les affronter. Malgré ça, nous avons été surprise d’observer
que les gestionnaires de notre échantillon ne parlent pas en termes de
gestion intergénérationnelle, mais plutôt dans une perspective
générationnelle. Autrement dit, un peu comme le conclut Boudreault
(2002) dans son mémoire de maîtrise, nos gestionnaires semblent
pratiquer une gestion qui concorde avec leur personnalité
générationnelle. En ce sens, nous ne pouvons supposer que le fait de ne
pas tenir compte des différences intergénérationnelles lorsqu’ils
pratiquent leur gestion est relié au fait qu’ils ne sont pas conscients de
cette problématique. Nous pouvons tout simplement avancer que rien ne
fut rapporté spontanément à ce sujet.

Par ailleurs, le gestionnaire boomer se sent plus à l’aise à faire de la


micro-gestion, pour lui, le conflit c’est plutôt une guerre de pouvoir : « Un
conflit, c’est toujours une personne qui essaie d’en dominer une autre.
C’est toujours un dominant-dominé, un conflit » (BB2). Or, pour ce
gestionnaire, la meilleure façon de gérer ces conflits, c’est d’identifier la
source du problème : « S’il y a un conflit, il faut savoir d’où il vient et c’est
quoi la raison ». Une fois la source du problème trouvée, il s’agit de
donner une ligne directrice claire. « Pour éviter les conflits, il faut avoir
des lignes directrices claires et ça évite beaucoup de conflits à ce
moment-là ». D’ailleurs, il nous mentionne que dans un conflit, les deux
parties ne peuvent gagner : « c’est sûr qu’il va y avoir un gagnant et un
perdant […] C’est d’expliquer à celui qui gagne pourquoi il a gagné et à
celui qui perd, pourquoi il a perdu ». D’ailleurs, il impute ces conflits à un
manque de direction ou de fermeté de la part du gestionnaire. Nous
pouvons relier cette façon de gérer à la personnalité de la génération du
baby boom, puisque dans la littérature, les boomers sont reconnus pour
leur besoin d’exercer un certain contrôle sur ce qui se passe dans leur
109

équipe. Nous pouvons donc relier cette façon de faire à de la micro-


gestion (Samson, 2005).

Sur ce point, le gestionnaire X utilise, quant à lui, une méthode un peu


plus évasive. Il se dit mal à l’aise devant les situations de conflits qui
peuvent se présenter de temps à autre : « Ça me met un peu mal à
l’aise. Dans ma tête à moi, je suis plus un stratège, un motivateur,
quelqu’un qui réunit versus quelqu’un qui règle des conflits. » (X1)
Lorsque la situation se présente, ce gestionnaire optera plutôt pour la
stratégie de l’écoute active. Il tentera de trouver les points positifs de
chaque partie aux prises avec le conflit pour tenter d’en tirer un bénéfice
pour tous. « Bien souvent, j’écoute les deux parties et bien souvent je
trouve que les deux se valent […] Je ne peux pas dire que je suis un
gestionnaire de conflits exceptionnel ». Nous pouvons relier cette façon
de gérer à la personnalité de la génération X puisque la littérature décrit
ces personnes comme étant une génération qui ne cherche pas
nécessairement le consensus : elles veulent simplement que chacun
respecte les opinions de l’autre. « Les autres ont le droit de penser
autrement qu’eux, pour autant que leur propre point de vue soit
respecté. » (Samson, 2005 : 51) Ceci pourrait expliquer le comportement
neutre du gestionnaire X face à la gestion de conflits : il trouve que
chacun a le droit de penser ce qu’il veut. De ce fait, on comprend
pourquoi il ne semble pas vouloir prendre position dans un cas de conflit.

Pour sa part, la gestionnaire Y préfère confronter son équipe et garder


une transparence au niveau de sa communication. « […] si tu te plantes,
tu le sais et tu le sais aussi si tu t’en vas dans la bonne direction », nous
dit-elle. D’ailleurs, elle croit que les conflits découlent d’un manque de
communication entre les gens :

C’est de mettre cartes sur table, valoriser les bons coups… Lorsqu’il a
des fleurs, je leur en donne. […] C’est certain que je vais te dire tes
quatre vérités même si c’est négatif, mais je vais t’aider à trouver des
solutions pour qu’on puisse travailler ensemble et que ça marche (Y1).
110

Elle mentionne également qu’une saine gestion de conflits consiste à


agir en partenaire ou en collaborateur. Ne croyant pas à la distinction
hiérarchique, elle trouve inutile de se distancer de ses employés. « Ils
savent que je les traite plus comme des partenaires qu’autre chose. Je
vais m’asseoir avec eux. Je vais en pelleter de la neige, s’il faut en
pelleter. » Nous pouvons relier cette façon de gérer à la personnalité de
la génération Y puisque dans la littérature, les Y sont reconnus pour
préférer les relations égalitaires et la transparence dans la
communication (Alch, 2008; Dunlin, 2008; Petit, 2008; Tapscott, 2009).

6.6. Les défis de gestion face au phénomène des équipes


intergénérationnelles
Même si de la littérature se dégage le fait que l’arrimage des trois
générations apporte son lot de défis au monde de la gestion, le discours
des gestionnaires de notre échantillon révèlent qu’ils ne semblent pas
être conscients ou sensibilisés au besoin d’adapter leurs approches de
gestion en fonction des générations (Zemke et al., 2000). Cette
constatation est en accord avec ce qui se dit dans la littérature, à savoir
que la diversité en entreprise est plutôt considérée comme étant reliée
aux genres, à la race, à l’ethnicité, à la culture ou même à la religion
(Zemke et al., 2000). Donc, nous ne pouvons que proposer que le défi
reviendra aux gestionnaires de réviser leurs stratégies de mobilisation
car « ce n’est qu’une question de temps avant que le clivage s’installe
entre ces générations » (Audet, 2004 : 25), ce qui pourrait aller jusqu’à
affecter la productivité globale d’une organisation (Zemke et al., 2000).
Cette problématique ne semble pas préoccuper les gestionnaires de
notre échantillon présentement.

Dans la première partie de ce chapitre, basé sur nos résultats


empiriques, nous avons conclu que des conflits potentiels pouvaient
exister entre les générations. Dans la section précédente, nous avons
trouvé que les gestionnaires de notre échantillon ne semblaient pas
préoccupés par la variable générationnelle dans leurs stratégies de
111

gestion, mais qu’ils pratiquaient une gestion plutôt teintée de la


personnalité de leur génération (Boudreault, 2002). Les stratégies de
gestion face aux générations que nous avons identifiées dans les
entrevues avec nos trois gestionnaires maintenant explorées, nous
présenterons nos conclusions sur cette recherche dans le chapitre
suivant.
CHAPITRE 7. Conclusion

L’objectif de cette recherche était d’identifier un certain nombre de


conflits intergénérationnels potentiels basés sur cinq points d’opposition
qui ressortaient systématiquement dans la littérature, soit : 1) le sens au
travail, 2) le rapport à l’institution, 3) la place du travail d’équipe, 4)
la loyauté envers l’entreprise, et 5) le style de communication
désiré. Ensuite, nous voulions étudier comment ces conflits pouvaient se
manifester dans les relations au travail et modifier les comportements
des membres d’une équipe dite intergénérationnelle. Dans cette optique,
nous avons défini une question de recherche permettant de traduire cet
objectif : « Quelles sont les différences intergénérationnelles qui
existent dans un contexte de travail et quels sont les conflits
potentiels générés par ces différences? »

La contribution de notre recherche est multiple. D’abord, nous nous


sommes démarquée du premier scénario de recherche se rapprochant
de notre canevas d’étude, celui-ci étant de démystifier les différences
intergénérationnelles en nous basant sur des variables d’analyse
prédéfinies. Nous avons trouvé ce modèle de recherche incomplet,
puisqu’il ne nous permettait pas de savoir si ces différences étaient
sources de conflits intergénérationnels potentiels. Ensuite, nous nous
sommes distinguée du deuxième modèle de recherche, qui était de
proposer des conflits intergénérationnels basés sur des stéréotypes
générationnels dominants, mais non fondés sur des variables d’analyse
prédéfinies comme dans le cas du premier canevas d’étude mentionné
plus haut. Enfin, l’originalité de notre étude vient du fait que nous l’avons
fondée sur des variables que nous avons approfondies en interrogeant
des sujets répondant à des critères de recherche très précis.
113

À la lumière de nos résultats empiriques, nous avons trouvé qu’il y avait


des différences intergénérationnelles et que ces dissemblances
pouvaient modifier les relations au travail. Notre constat s’apparente aux
conclusions de Boudreault (2002 : 217), dans une étude portée sur les
générations : « ces individus doivent être amenés à comprendre que les
membres d’une même génération partagent un soi générationnel
commun et que celui-ci est unique à chaque génération. » En nous
basant sur nos résultats empiriques, nous observons donc que
l’intergénérationnel est un fait très réel et, selon la littérature, un
phénomène croissant. Mentionnons que nos résultats empiriques
révèlent aussi que des conflits intergénérationnels potentiels existent,
mais que les gestionnaires de notre échantillon ne semblent pas en tenir
compte dans leur stratégie de gestion. Or, selon ces conclusions, nous
croyons que ce phénomène doit être géré activement, afin de profiter
des apports des différentes générations – de profiter des différents
points de vue, au lieu de les laisser dégénérer en conflits
dysfonctionnels. D’ailleurs, selon une étude faite par Dominiguez en
2003, encore une majorité d’organisations ne tiennent pas compte de
ces différences générationnelles, ce qui pourrait entraîner des
conséquences désastreuses sur la productivité d’une entreprise. « The
impact of generational preference does exist in the workplace, whether it
is rooted in empirical data or a product of the popular media. » (cité dans
Crumpacker et Crumpacker, 2007 : 312)

En ce qui concerne la gestion de la diversité générationnelle en


organisation, même si ce n’était pas notre objectif de départ, nous avons
eu l’opportunité de nous pencher sur les pratiques préconisées par trois
gestionnaires, représentant chacun une des trois générations à l’étude,
face aux équipes intergénérationnelles. En termes de gestion des
générations, nos résultats révèlent que les styles de gestion de ces trois
personnes reflètent leur personnalité générationnelle, ce qui rejoint les
conclusions de Boudreault (2002). Dans l’ensemble, nos résultats
empiriques vont dans le même sens que la littérature; le boomer se sent
114

mieux à faire de la micro-gestion (Samson 2005), caractéristique avec


laquelle nous le présentons dans la littérature et dans nos résultats
empiriques. Nous avons également observé que le gestionnaire X, utilise
une méthode plus évasive ce qui, selon nous, semble se rapprocher
d’une forme d’indifférence, trait de caractère avec lequel nous
présentons la génération des X dans la littérature et dans nos résultats
empiriques. Quant à elle, la gestionnaire Y préfère provoquer une
confrontation directe tout en agissant en tant que partenaire et non
comme supérieure hiérarchique. Cette attitude semble être un trait de
personnalité propre à la génération Y, qui se considère sur un pied
d’égalité avec tous les membres de son équipe, y compris son supérieur
(Petit, 2010).

D’ailleurs, dans son mémoire de maîtrise, Boudreault (2002 :217)


abonde dans le même sens que nous en concluant que les gestionnaires
devront assumer que la neutralité générationnelle n’existe pas. Pour elle,
il est primordial de prendre ce facteur en considération en tentant
d’adapter leur mode de gestion en fonction des membres de son
équipe :

Les membres de l’organisation doivent être sensibilisés à la réalité


démographique, ce qui implique une prise de conscience, par l’individu,
de son identité générationnelle et de quelle manière celle-ci peu
influencer le mode de gestion.

Malgré ses apports, notre recherche comporte aussi ses limites. Parmi
celles que nous avons notées, voici les principales. Premièrement,
l’objectif de cette recherche visait à analyser les différences
intergénérationnelles possibles; nous n’avons donc pas pris en compte
les similitudes qui pouvaient exister d’une génération à l’autre. De plus,
Biggs, (2005, cité dans Grenier, 2007) a avancé que l’âge du chercheur
pouvait constituer un problème, surtout lorsqu’il s’avérait être plus jeune
que certains des répondants, ce qui fut notre cas. Ensuite, l’expérience
des gestionnaires d’équipe n’est pas équivalente, ce qui pourrait résulter
en une différence dans leur stratégie de gestion. D’ailleurs, une autre
115

limite est que ces gestionnaires n’ont pas le même nombre de


personnes sous leurs ordres. En l’occurrence, seulement un des trois
gestionnaires dirige une combinaison des trois générations, ce qui peut
avoir un effet sur leur manière de percevoir ou même de gérer les
équipes intergénérationnelles. Une autre limite est liée au fait que nous
n’avons pas cherché explicitement à savoir si les personnes
interviewées faisaient partie d’une équipe comportant plusieurs
générations. Ainsi, les conflits soulevés au chapitre précédent sont donc
basés sur les perceptions rapportées dans nos résultats empiriques.

Finalement, comme nous l’avons mentionné, ceci est une étude


exploratoire; de ce fait, nous ne pouvons donc généraliser nos résultats
de cette recherche. En ce sens, il serait intéressant d’approfondir cette
étude à partir d’un échantillon plus grand, et avec des équipes
comportant un mélange des trois générations, afin de valider si les
résultats empiriques de cette recherche concernant les différences
intergénérationnelles ainsi que les conflits potentiels sont applicables ou
non. De même, il serait intéressant d’étudier plus spécifiquement les
solutions apportées par les gestionnaires pour contrer les conflits
intergénérationnels dans une équipe comportant plusieurs générations.

Or, dans cette présente recherche, nous avons validé des éléments déjà
existants dans la littérature reliée à notre sujet d’étude. La cohabitation
intergénérationnelle dans les équipes, de même que les conflits et les
défis qu’elle apporte, préoccupent les personnes de notre échantillon,
puisqu’elles en ont parlé de façon spontanée et ce, dans toutes les
industries ou organisations représentées dans notre échantillon de
recherche. Par contre, nos résultats empiriques ont pu nuancer une
partie de cette littérature. Par exemple, certains conflits qui nous étaient
présentés dans la littérature n’étaient pas concrètement vécus comme
un conflit intergénérationnel, mais plutôt comme la perception d’une
génération envers une autre.
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électronique] (visionné le 4 mai 2009)
Retrait d’une ou des pages pouvant contenir des renseignements
personnels
Annexe B -Formulaire de consentement à une entrevue

1. Renseignements sur le projet de recherche

Vous avez été approché ou approchée pour participer au projet de recherche suivant :
La gestion des équipes intergénérationnelles.

Ce projet est réalisé par Mélodie Desrosiers qui étudie à la maîtrise à HEC Montréal et
que vous pouvez joindre par courriel à l’adresse suivante : melodiedesrosiers@hec.ca.
Ce projet est réalisé sous la supervision de la professeure Veronika Kisfalvi, que vous
pouvez joindre par téléphone au 514 340-6360 ou par courriel à l’adresse suivante :
veronika.kisfalvi@hec.ca.

Votre participation à ce projet de recherche doit être totalement volontaire. Vous


pouvez refuser de répondre à l’une ou l’autre des questions. Il est aussi entendu que
vous pouvez demander de mettre un terme à la rencontre, ce qui interdira à la
chercheuse d'utiliser l'information recueillie. Un résumé de ce projet de recherche se
trouve à la fin de ce document. Pour toute question en matière d'éthique, vous pouvez
communiquer avec le secrétariat de ce comité au (514) 340-7182 ou par courriel à
cer@hec.ca. N’hésitez pas à poser à la chercheuse toutes les questions que vous
jugerez pertinentes.

2. Confidentialité des renseignements personnels obtenus

Vous devez vous sentir libre de répondre franchement aux questions qui vous seront
posées. La chercheuse, de même que tous les autres membres de l’équipe de
recherche, le cas échéant, s’engagent à protéger les renseignements personnels
obtenus de la manière suivante :

A. En assurant la protection et la sécurité des données recueillies auprès des


participants ou participantes et à conserver leurs enregistrements dans un lieu
sécuritaire;

B. En ne discutant des renseignements confidentiels obtenus auprès des participants


ou participantes qu’avec les membres de l’équipe;

C. En n’utilisant pas les données recueillies dans le cadre de ce projet à d'autres fins
que celles prévues, à moins qu'elles ne soient approuvées par le Comité d'éthique
de recherche de HEC Montréal. Notez que votre approbation à participer à ce
projet de recherche équivaut à votre approbation pour l’utilisation de ces données
pour des projets futurs qui pourraient être approuvés par le Comité d’éthique de
recherche de HEC Montréal;
123

D. En n’utilisant pas, de quelque manière que ce soit, les données ou renseignements


qu’un participant ou une participante aura explicitement demandé d'exclure de
l'ensemble des données recueillies.

Toutes les personnes pouvant avoir accès au contenu de votre entrevue de même que
la personne responsable d’effectuer la transcription de l'entrevue, ont signé un
engagement de confidentialité.

3. Protection des renseignements personnels lors de la publication des


résultats

Les renseignements que vous avez confiés seront utilisés pour la préparation d’un
document qui sera rendu public. Les informations brutes resteront confidentielles, mais
le chercheur utilisera ces informations pour son projet de publication.

® J’accepte de participer à cette recherche sachant que mon nom et ma


fonction n’apparaîtront pas lors de la diffusion des résultats de la recherche.

Si vous cochez cette case, aucune information relative à votre nom ou à votre fonction
ne sera divulguée lors de la diffusion des résultats de la recherche. De plus, les noms
utilisés lors de la retranscription des données seront fictifs. Aucune information
permettant d’identifier les organisations mentionnées durant cette entrevue ne sera
dévoilée. Par conséquent, vous pourrez compter sur la protection de votre anonymat.

_____________________________________________________________________

Le comité d’éthique de la recherche de HEC Montréal a statué que la collecte de


données liée à la présente étude satisfait aux normes éthiques en recherche auprès
des êtres humains.

Signature du participant :

Prénom et nom du participant à l’entrevue :


_________________________________________________

Signature du participant : _______________________________ Date (jj/mm/aaaa) :


_______________

Signature du chercheur :

Prénom et nom de la chercheuse : Mélodie Desrosiers

Signature de la chercheuse : Mélodie Desrosiers 10/02/2010

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