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Classiques & Cie lycée • Les Fleurs du mal • guide pédagogique
L’ÉDITION
Classiques & Cie Lycée
À l’occasion de la réforme du lycée et de la mise en place du nouveau Bac français, la collection
Classiques & Cie a été entièrement repensée de manière que chaque ouvrage offre aux
enseignants une séquence complète sur l’œuvre et le parcours associé, tels que définis dans
les nouveaux programmes.
La nouvelle édition des Fleurs du mal comprend ainsi l’ensemble des poèmes du recueil,
associé à une proposition de parcours sur le thème « Alchimie poétique : la boue et l’or », ainsi
qu’à de nombreux autres enrichissements pédagogiques.
➢ L’avant-texte
Composé des rubriques « Qui est l’auteur ? », « Quel est le contexte ? » et de « La fiche
d’identité », l’avant-texte amène l’élève progressivement à la lecture du texte.
➢ Le texte annoté
Le texte suit l’ordre de l’édition de 1857, et propose donc les cent poèmes composés et
ordonnés par Baudelaire, incluant ainsi les six poèmes condamnés lors du procès des Fleurs
du mal.
À ces cent poèmes d’origine, sont bien évidemment ajoutés les poèmes écrits par Baudelaire
ultérieurement, lorsque la condamnation du recueil l’a conduit à proposer, en 1861, une
nouvelle édition – à la fois expurgée et augmentée – des Fleurs du mal. Ces poèmes sont placés
à la suite du recueil initial, et classés dans la section qui les accueille alors dans la nouvelle
édition.
Aux poèmes ajoutés par l’édition de 1861 succèdent ceux regroupés par Baudelaire sous
l’intitulé Les Épaves, un ensemble de quelques nouveaux poèmes publiés en Belgique en 1866
en même temps que six poèmes condamnés et réédités hors de France.
Enfin, en 1868, après la mort de Baudelaire, Théophile Gautier entreprend une nouvelle
édition des Fleurs du mal : les nouveaux poèmes de cette édition ont été ajoutés, mais sans
préciser la section dans laquelle ils prenaient place : l’ordre n’y doit en effet rien à Baudelaire
et se trouve bien souvent incongru, voire aberrant.
L’orthographe, la ponctuation et les corrections apportées aux poèmes des premières éditions
par Baudelaire lui-même ont été respectées. Le texte s’accompagne d’un grand nombre de
notes visant à le rendre accessible à des lycéens : elles éclairent telle allusion au contexte de
l’époque, tel mot à la signification complexe, tel glissement de sens qui, du XIXe au XXIe siècle,
pourrait rendre la lecture des Fleurs difficile.
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transforme la pauvresse en princesse digne d’hommage, ou nous indique que cette mendiante
est en fait une courtisane de luxe (voir son « poignard d’or », v. 19, strophe 5).
• Ce poème apparaît ainsi sous le signe du contraste : du point de vue métrique et de celui de
l’agencement des strophes (poème hétérométrique qui permet à Baudelaire de jouer de la
disproportion entre vers longs et vers courts, pairs et impairs) ; au niveau sémantique et au
niveau de la construction du poème (les trois premières strophes sont à l’indicatif présent, les
quatre suivantes au subjonctif présent, les quatre autres suivantes au conditionnel : le poème
assure la transformation de la pauvresse en princesse ; avant le retour à la réalité dans les
dernières strophes (« – Cependant tu vas gueusant… », strophe 12). On notera finalement que
tout le poème s’oppose en fait à la dernière strophe : « Parfum, perles, diamant » résume tous
les gestes d’hommage précédents. On s’aperçoit qu’au début du poème, la nudité était un
manque, et que le retour final à la nudité en fait le principal apparat de la femme. La première
apostrophe s’adressait donc à la mendiante, la dernière à la princesse.
• L’ensemble de ces contrastes soutient la dimension ludique du poème. On notera une
certaine désinvolture stylistique (par le passage incessant d’un registre à l’autre, par les
transgressions ludiques de la métrique, et notamment de la règle de la rime pour l’œil comme,
par exemple : galamment/roman (strophe 3), court/cour (strophe 4) ; par la pratique de
l’allusion érotique, et par le jeu sur le langage poétique lui-même (emploi exclusif de rimes
masculines pour évoquer une femme, emploi de rimes équivoquées : « la plus belle
eau »/« maître Belleau », strophe 8).
• Dans ce poème d’hommage à une mendiante, la provocation est donc d’abord visible par le
mélange des tons. Les effets de contraste sont à mettre en relation avec le sujet lui-même qui
est atypique par rapport aux grands modèles esthétiques. Enfin, le jeu stylistique est en même
temps un art poétique : Baudelaire, encore une fois, y affirme que le beau est le marginal et
le bizarre. On pourra rapprocher cet art poétique de celui qui a été défini dans « L’Idéal » 18.
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4. GRAMMAIRE. Dans les vers 1 à 4, relevez les expansions du nom et identifiez leur
fonction respective.
Vers 1 : « vivants piliers » : épithète.
Vers 2 : « confuses paroles » : épithète.
Vers 3 : « forêts de symboles » : complément du nom.
Vers 4 : « regards familiers » : épithète.
5. POUR ALLER PLUS LOIN.
Lisez « Ma Bohème » d’Arthur Rimbaud dans Les Cahiers de
Douai (1872). Comparez la manière dont Baudelaire et Rimbaud évoquent la nature.
Écrit en 1871, ce poème d’Arthur Rimbaud est l’un de ses premiers. Le poète est encore
largement inspiré par Baudelaire qu’il a découvert quelques mois plus tôt avec enthousiasme.
La nature n’est cependant pas exactement perçue de la même manière que chez Baudelaire :
pour Rimbaud, elle devient non un temple mais un refuge contre la ville et l’horreur de la
société.
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laissent entrevoir un espoir : le poète va écrire dans un dernier sursaut d’inspiration. La boue
du temps, celle du jardin, va permettre de découvrir un nouvel or poétique.
4. GRAMMAIRE. Vers 1 : analysez la forme de la négation.
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• L’ensemble de ces indices élégiaques prennent tout leur sens au dernier vers qui correspond
à ce que l’on nomme « une pointe » dans un sonnet, à savoir une surprise finale qui remet en
cause tout ce qui a pu être précédemment dit. Ici la peine et la douleur du poète s’expriment
par antithèse et en contraste violent avec le paysage idyllique qu’il a pu déployer auparavant.
4. GRAMMAIRE. Analysez les propositions subordonnées du premier quatrain.
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Ensuite, la Beauté est non seulement froide mais absolument méprisante. Elle dénigre ses
adorateurs en marquant une distance infranchissable entre elle et eux qu’elle dédaigne. Le
vers 5 synthétise cette attitude arrogante et fière : « Je trône dans l’Azur ».
4. GRAMMAIRE. Au vers 8, analysez le sens de la répétition de la conjonction de
coordination « et ».
« Et… et » au vers 8 est un latinisme, c’est-à-dire un emploi hérité de la langue latine et dont
la fonction stylistique est la même que dans les expressions antiques. Ce procédé d’emphase
permet ici d’insister ici sur la personnalité froide et sans cœur de la Beauté.
5. POUR ALLER PLUS LOIN.
Lisez « Mignonne, allons voir si la rose » de Ronsard, puis
comparez la manière dont les deux poètes évoquent la beauté.
Chez Ronsard, la beauté est distante et difficile à conquérir pour le poète mais elle est
néanmoins promise à la possibilité d’un amour et d’une possession physique.
Chez Baudelaire, si la Beauté est l’idéal, elle n’en provoque pas moins le spleen du poète en
dépit de ses efforts d’élévation.
Il conviendra alors de souligner les contrastes entre les deux poètes.
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rapprochements positifs qui trahissent l’admiration voire même le désir du poète. Que soient
considérées ici les deux comparaisons suivantes : « comme une femme lubrique » (v. 5) ou
encore « comme une fleur s’épanouir » (v. 14).
2. Comment Baudelaire joue-t-il ici des codes de la poésie amoureuse ?
Il faut tout examiner les expressions qui renvoient à la femme qui accompagne Baudelaire.
• Baudelaire s’adresse à elle au tout début du poème : « mon âme » (v. 1). Puis la figure
s’efface devant la vision de la charogne.
• Le désir érotique et amoureux, qui transparaît notamment à travers la mention de la
« femme lubrique » (v. 5), ne concerne plus alors que le cadavre en décomposition, comme si
femme aimée et charogne échangeaient leurs places respectives. Les codes de la poésie
amoureuse sont subvertis puisque la mort s’empare ironiquement de l’amour.
• La femme est de nouveau évoquée dans les trois dernières strophes. Les rimes procèdent
par antithèses et associent le positif au négatif : l’ordure à la nature ; l’infection à la passion ;
les sacrements aux ossements ; etc. L’ironie cinglante domine.
3. Relevez le champ lexical de l’art. Quel rôle le poète attribue-t-il à l’artiste ?
La huitième strophe du poème dévoile la vision de l’art suggérée par cette charogne. C’est ici
que se développe, des vers 29 à 32, l’essentiel du champ lexical de l’art, annoncé notamment
par la mention de la « musique » (v. 25) et qui sera repris ensuite aux derniers vers (v. 47-48).
Quand l’amante sera morte, le poète fera de sa charogne le lieu même du poème et ne pourra
conserver d’elle à son tour qu’une carcasse de souvenirs. La mémoire ne pourra sauver que
ce squelette d’un temps qui ravage tout.
4. GRAMMAIRE. Analysez, dans les vers 33 à 36, la fonction des adjectifs.
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L’usage de la phrase simple qui ne comporte qu’un verbe conjugué permet à Baudelaire
d’affirmer avec simplicité une position trouble et complexe : il est tout et son contraire.
L’affirmation du « Je suis » devient pour lui comme une devise que la formulation de la phrase
simple suggère au lecteur à la manière d’une définition.
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5. POUR ALLER PLUS LOIN. Lisez « J’aime l’araignée » de Victor Hugo dans Les
Contemplations (1856). Comparez ensuite la manière dont Hugo et Baudelaire
suggèrent combien la laideur peut être source de beauté.
Pour Victor Hugo, la laideur doit être source d’égalité : il ne faut pas mal la traiter ni la rejeter.
Il faut que tout le monde ait le droit de cité : il en va d’une vigilance politique et démocratique
devant la société et le vivant. L’araignée n’est pas moins laide que la colombe : elle vit et
mérite d’être respectée.
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5. POUR ALLER PLUS LOIN. Faites une recherche de l’ivresse dans la modernité poétique.
On pourra lire ici avec profit les poèmes en prose de Baudelaire mais aussi « Matinée
d’ivresse » de Rimbaud, « Vendanges » de Verlaine et Alcools d’Apollinaire (1913).
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5. POUR ALLER PLUS LOIN. Lisez Le Paysan de Paris de Louis Aragon pour mesurer combien,
à un demi-siècle de distance, l’évocation de la capitale française a pu évoluer en
poésie.
On relira avec attention dans le roman d’Aragon les pages qui décrivent les magasins du
passage de l’Opéra. Elles fournissent, par la fascination de la vie urbaine et de sa magie, un
contrepoint au dégoût de Paris qu’éprouve Baudelaire.
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➢ Les Trois Parques par Pietro della Vecchia, la mort et son grotesque (p. 350)
→ image p. I du cahier couleurs
• Le tableau se focalise sur les doigts des Parques qui, tout en se rapprochant, laissent un léger
espace suggérant l’interruption de la vie. Les mains protègent le crâne que les regards des
Parques entourent et désignent.
• Le crâne est un memento mori, qui rappelle aux hommes leur condition de mortel. Il souligne
le rôle des Parques qui, en coupant le fil des vies, décident de l’heure de la mort.
• Les couleurs vives et peu harmonieuses des vêtements, les visages vieillis, presque
grimaçants des Parques qui couvent un crâne comme on couverait un enfant, concourent à
l’impression de grotesque de cette scène, accentuée par le clair-obscur menaçant.
➢ Dante et Virgile aux Enfers par Delacroix, aux origines du romantisme (p. 351)
→ image p. III du cahier couleurs
• Au centre du tableau, Dante et Virgile, unis dans la tourmente de l’Enfer, résistent aux forces
adverses. Au premier plan à gauche, un homme retient la barque avec ses dents. À bout de
force, un autre se laisse engloutir par le Styx, tandis qu’un troisième tente de grimper à bord
en s’appuyant sur une femme qui s’agrippe désespérément à la barque. L’arrière-plan,
sommaire, s’efface dans la brume.
• La palette est sombre, dominée par le rouge et le brun, évoquant les tourments de l’Enfer.
• La tête couverte de Dante et celle couronnée de Virgile reflètent la force d’âme des poètes.
Virgile saisit la main gauche de Dante qui, effrayé, lève le bras droit pour se protéger. Les
poètes unis dans la tourmente de l’Enfer représentent les artistes contaminés par le mal du
siècle et unis dans le même combat. La vie paraît une traversée effroyable et seul l’art peut
offrir une voie heureuse, une forme de résistance.
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Introduction
« Tout est matière à poésie » déclare la romancière Jeanne Bourin en considérant la poésie
moderne depuis Baudelaire. De fait, la poésie, avec Baudelaire, change profondément. Elle
délaisse les sentiments nobles et les chants d’une nature immuable pour plonger dans la boue
du spleen quotidien et des rues industrielles mal famées. Dire que tout peut devenir poésie,
c’est comprendre que la laideur a désormais sa place, que la vie urbaine n’est plus niée mais
peut être l’objet à part entière d’un poème. Puisque la vie moderne transforme l’homme et
sa manière de s’exprimer, des changements poétiques formels sont indispensables.
1. La laideur, nouveau sujet poétique
C’est avec Baudelaire que le laid accède à une nouvelle dignité poétique, inédite jusqu’alors.
De fait, les romantiques proposaient une poésie qui visait, pour l’essentiel, à valoriser des
sentiments nobles et n’étaient nullement préoccupés par le quotidien. La beauté était leur
sujet privilégié. Baudelaire choisit paradoxalement d’explorer ce que chacun repousse, ce qui
n’est pas digne d’attention et ne peut que dégoûter les uns et les autres. Il n’y a plus ici de
sujet noble : à la suite de Victor Hugo qui chantait l’araignée et l’ortie, Baudelaire décide de
valoriser ce qui est laid pour montrer que tout est matière à poésie.
L’idéal n’est pas de ce monde et le poète, qui, comme l’albatros a chu à terre, est condamné
au spleen et à la boue. Il va s’offrir alors comme un alchimiste qui, grâce à ses vers, fera de la
boue un or incomparable. C’est le cas dans « À une passante » où l’apparition fugitive d’une
femme suscite le regard émerveillé de l’homme. C’est aussi le cas dans « Une charogne » où
un cadavre en décomposition fascine le poète. On pourra également considérer « Le Peigne »
de Germain Nouveau qui fait l’éloge de l’objet le plus quotidien et le plus insignifiant.
[Transition] La laideur devient un sujet poétique à part entière avec Baudelaire mais ce mot
d’ordre du « tout est poétique » concerne aussi les bouleversements sociaux et économiques :
le paysage urbain en porte la marque la plus nette.
2. La vie urbaine, nouvel eldorado poétique
L’édition de 1861 des Fleurs du mal installe les conditions d’une révolution poétique sans
précédent : si en 1857, la première édition du recueil offrait la laideur comme sujet à part
entière et digne d’attention, l’ajout en 1861 des « Tableaux parisiens » vient achever la
possibilité de transformer tout ce qui entoure le poète en matière précisément poétique. Paris
est une ville honnie de Baudelaire mais il y consacre une large part de ses nouveaux poèmes
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pour montrer que la condition du poète moderne a changé : il est peintre d’une vie nouvelle,
faite de boue.
Baudelaire ouvre alors la voie à une modernité poétique qui va s’occuper de décrire les réalités
urbaines nouvelles et de promouvoir la place que le poète peut y occuper. Sans doute revient-
il à Émile Verhaeren d’en chanter, dans Les Villes tentaculaires, toutes les mutations,
notamment industrielles.
[Transition] Tout est matière à poésie : la laideur et la ville industrielle deviennent donc des
sujets à part entière. Mais il ne faut pas oublier que la poésie modifie aussi formellement son
chant pour jouer de cette même modernité.
3. Tout langage est matière à poésie
La poésie de Baudelaire va chercher à proposer une nouvelle manière de saisir la réalité sans
cesse mouvante de la vie moderne. À ce titre, le poète porte une attention particulière aux
formes qu’il va choisir. C’est par goût du paradoxe et de la provocation qu’il se concentre
d’abord sur la forme classique du sonnet popularisée par Pierre de Ronsard. Prendre une
forme classique comme le sonnet pour faire l’éloge de la vie urbaine devient pour lui un jeu
qui prouve aussi la valeur digne de son propos : une manière de prendre l’or du sonnet pour
chanter la boue urbaine.
Mais c’est le langage courant, la prose notamment, qui va concentrer les efforts du « tout est
matière à poésie ». Dans Le Spleen de Paris, Baudelaire va libérer la poésie des contraintes de
la versification pour qu’elle épouse au mieux les changements de la vie quotidienne : la prose
devient la « sorcellerie évocatoire » du monde moderne. En examinant la poésie de Tristan
Corbière, en particulier « Le Crapaud », l’on constate que le langage courant, voire familier,
s’empare du poème pour révéler la beauté et la puissance poétique de la langue quotidienne.
Conclusion
La boue et l’or sont les deux termes inséparables de l’alchimie poétique moderne. La boue du
monde moderne, sans dignité ni noblesse, trouve dans les inventions formelles de Baudelaire
et de ses successeurs l’occasion de devenir l’or même de l’histoire littéraire.
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Le poète perçoit que cette charogne peut devenir une vérité poétique : celle de ce qui reste
d’un amour une fois que le poète a essayé de le retranscrire dans un texte.
• Conclusion : « Une Charogne » offre à Baudelaire l’occasion d’un véritable questionnement
sur la notion d’art poétique.
◼ GRAMMAIRE. Analysez dans les vers 33 à 36 la fonction des adjectifs.
Derrière les rochers une chienne inquiète
Nous regardait d'un œil fâché,
Épiant le moment de reprendre au squelette
Le morceau qu'elle avait lâché.
Les deux adjectifs « inquiète » et « fâché » sont épithètes (à valeur descriptive).
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