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Questions nouvelles

L'allaitement maternel en A'frique .


l'évolution favorable
sera-t-elle rem ise en question
par l'épidémie de sida 7*
Marie-Claude Dop

D
ans les années 80, J'allaitement recul que l'on redourait, mais il se trouve SOnt réalisées dans les pays africains. Ces
marernel semblait menacé par les maintenant placé devant une nouvelle enquêtes évaluent les pratiques d'allaite-
pratiques de commercialisation menace, d'ampleur sans précédent: l'épidé- ment au niveau national, à partir
agressives des firmes fabriquant mie de sida. d'échantillons représentatifs de la popu-
des substituts du lait marernel 1• En 1981, Dans les pays où la prévalence de l'infec- lation, avec une méthodologie standardi-
l'Assemblée mondiale de la santé adoprait le tion par le virus de l'immunodéficience sée [2]. Dans les 34 pays d'Afrique où
Code de commercialisation des substiturs humaine (VIH-l) est élevée, le sida des enquêtes DHS ont été réalisées, plus
du lait maternel, dont l'objecTif était de pourrait bouleverser les pratiques d'allai- de 95 % des nourrissons sont allaités.
soustraire les mères aux pressions des fabri- tement puisque le virus peut être trans- Cette apparente universalité de l'allaire-
cants. En 1989, la déclaration Innocenti mis à l'enfant par le lait de la mère. Le ment cache routefois d'imporrantes diffé-
pour la protection, l'encouragement et le coût financier et sanitaire du remplace- rences, en particulier suivant les régions
soutien de l'allairement marernel définissait ment de l'allaitement maternel par (tableau 1) [3].
les « dix conditions pour allaiter avec d'autres aliments serait considérable, car L'initiation précoce de l'allaitement
succès» [1] et, en 1992, l'Assemblée mon- il comporrerait non seulement celui des maternel à la naissance est peu fréquente
diale adoptait l'initiative des « Hôpitaux produits de substitution mais aussi les en Afrique de l'Ouest, car le colostrum
amis des bébés ». Depuis lors, sous l'impul- coûts induits par la perre des bénéfices n'y est pas traditionnellement donné au
sion de J'Organisation mondiale de la santé, de l'aJiaitement maternel tels que la pro- nouveau-né [4, 5]. Le taux d'initiation
du Fonds des Nations unies pour l'enfance tection contre la malnutrition, la morbi- pendant les premières 24 heures y est
(UniceO et d'organisations non gouverne- dité infectieuse et la morralité. beaucoup plus bas (51 %) que dans les
mentales, de nombreuses campagnes de Cet arricle fait le point sur les pratiques autres tégions (86 % en Afrique de l'Est
promotion de l'alJairement marernel Ont été actuelles d'allaitement des jeunes enfants et 83 % en l'Afrique Centrale et du Sud)
menées. Les personnels de santé Ont été for- en Afrique ainsi que sur les données [2]. Dans de nombreux pays, on donne
més. La promorion de l'allairement a été récentes sur la transmission du VIH par des liquides aux nouveau-nés avant de
intégrée aux actions de santé publique, aux le lait maternel, et fournit des éléments commencer à les allaiter, or cette pratique
soins de santé primaires et à de nombreuses pour orienter les stratégies de santé augmente la morralité néo-natale [6].
aaions de développement au niveau com- publique face aux coûtS et aux risques L'allaitement maternel exclusif, sans
munautaire. L'allaitement n'a pas subi le d'un bouleversement des pratiques aucun autre liquide ni aliment [7], qui
d'allaitement maternel. est le mode d'alimentation optimal des
• Cet article est Inspiré d'une communica- nourrissons jusqu'à 6 mois [8], est peu
tion présentée au Colloque « Le Lait - Ali- pratiqué en Afrique de l'Ouest, alors qu'il
ment Santé », Vandœuvre-lès-Nancy, le
est plus fréquent en Afrique du Nord et,
16 novembre 2000. Pratiques actuelles dans une moindre mesure, en Afrique de
J'Est (figure 1). Des liquides SOnt souvent
d'al aitement maternel donnés aux nourrissons en plus du lait
M.-C. Dop: Institut de recherche pour le maternel, de l'eau, des liquides à base
développement UR 106 « Nutrition, Ali- Depuis les années 70, un grand nombre d'eau ou de lait animal. La pratique de
mentation, Sociétés », Centre collabora-
teur de l'OMS pour la nutrition, IRD, BP d'enquêtes démographiques et de santé 2 l'alimentation au biberon est pratique-
64501, 64394 Montpellier Cedex 5, France. ment absente de cerrains pays (moins de
<dop@mpl.ird.fr> 1 % des nourrissons de moins de 4 mois
1 Aliments pour enfant visant à remplacer,
partiellement ou totalement. le lait maternel,
au Burkina Faso, au Mozambique et au
Tirés à part: M.-C. Dop
improprement dits « laits maternisés ». Burundi), alors qu'elle est fréquente dans
Thèmes: Allaitement; Sida; Afrique . 2 Demographie and Health Surveys (DHS) d'autres (plus de 30 % en Tunisie, au

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Tableau 1 Les pratiques d'allaitement sont sous
l'influence de nombreux déterminants
Pratiques d'allaitement en Afrique pour les enfants de moins de 4 mois culturels, sociaux et économiques.
(d'après les enquêtes démographiques et de santé 1986-1999 [2]) Grummer-Strawn a analysé les facteurs
d'évolution de l'allaitement à partir de
Région Enfants allaités' Allaitement exclusif2 Allaitement et eau Utilisation
données d'enquêtes DHS de 1975 à
d'Afrique (%) (0/0) (0/0) du biberon 3
1990 [10]. Le tableau 2 présente les
(0/0)
résultats de son analyse portant sur six
Nord 97,7 61,3 5,7 17,1
pays africains. L'urbanisation et, dans
une moindre mesure, l'éducation des
Ouest 98,6 7,2 51,6 20,1
mères tendent à réduire la durée d'allai-
Est 99,1 38,7 21,2 13,2
tement. Dans cinq pays, ces facteurs
Centre et Sud 98,3 24,9 36,1 8A
entraînent un recul de l'allaitement mais,
1 Tous types d'allaitement maternel. 2 Sans autre liquide ni aliment. 3 Quel que soit le contenu du biberon. au Ghana, au Sénégal et au Kenya, cette
réducrion est annulée ou dépassée par
Current breastfeeding practices in Africa (infants under 4 months)
l'effet de changements de comportement
favorables à l'allaitement.
Con trairement au déclin annoncé par
Nigeria, au Soudan et en Namibie) [2]. production de lait chez la mère, ce qUi Walker et Adam [Il], l'analyse des don-
Ces différentes pratiques ont un impact favorise l'apparition de la malnutrition nées d'enquêtes récentes (réalisées depuis
important en termes de santé publique. [9]. Si le type d'allaitement n'est souvent 1990) confirme la progression de la
L'allaitement non exclusif des nourrissons pas optimal, en revanche sa durée esr durée d'allaitement, puisque celle-ci aug-
de moins de 4 mois esr une cause impor- longue, avec une médiane de 16 à mente dans deux tiers des 15 pays afri-
tante de diarrhée et tend à diminuer la 28 mois suivant les pays [2]. cains où les données sont disponibles
(tableau 3). La prévalence de l'allaite-
ment exclusif progresse également dans
II pays, mais cette progression est
modérée, de 0,2 à 6 % par an selon les
pays [2].

L'évolution favorable
est-elle liée
aux actions
de promotion 7

L'impact des actions de promotion sur


les pratigues d'allaitement est difficile à
évaluer. A l'échelle pilote, des études ont
montré une efficacité des actions en
oL' 1 000 km
----ll
termes d'amélioration des pratiques
d'allaitement et de diminution de la
morbidité ou de la mortalité, mais il n'y
a pas eu de tentative d'évaluation au
niveau national en Afrique [12, 13].
L'influence de la promotion prise au
sens large, incluant le code de commer-
• Moins de 15 % cialisation des substituts, les actions inté-
15 % à 49,9 % grées au système de soins, les actions au
o 50 % et plus niveau communautaire et les campagnes
médiatiques, est difficile à distinguer des
D Pas de données
effets de la dégradation du contexte éco-
nomique. En effet, en réduisant les
achats de substituts, la crise économique
pourrait favoriser le choix et/ou la pour-
Figure 1. Taux d'allaitement maternel exclusif en Afrique (enfants de moins de 4 mois). suire de l'allaitement et augmenterait sa
durée. En pratique, les effets sont plus
Figure 1. Exclusive breastfeeding rate (infants under 4 months). nuancés et dépendenr des contextes

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Tableau 2 L'impacr de la promotion de l'allaite-
ment peur être plus clairement appré-
Évolution de la durée d'allaitement maternel en Afrique avant 1990 hendé à travers deux pratiques qui
(d'après Grummer-Strawn [10ll échappent en grande partie à l'effet du
contexte économique: l'initiation préco-
Pays Enquêtes Durée médiane Évolution Effet des changements
ce de l'allaitement et l'allaitement exclu-
(mois) globale sociodémographiques de comportement
sif. L'évolution du taux d'initiation pen-
Enquête 1 Enquête 2 (mois) (mois) (mois)
dant les premières 24 heures suggère que
Égypte 1980-1988 18,2 18,2 - 0,5 + 0,5 la promotion a eu un impact significatif.
Maroc 1980-1987 16,2 15,1 °
- 1,1 - 0,8 - 0,3
En effet, ce taux a progressé dans huit
des neuf pays où des données récentes
Tunisie 1978-1988 16,8 15,7 - 1,1 - 2,0 + 0,9
existent [2]. D'ailleurs, la progression est
Ghana 1979-1988 19,6 22,5 + 2,9 + 2,9
Sénégal 1977-1986 19,9 20,2 + 0,3 °
-0,4 + 0,7
plus forte en milieu urbain où les mères,
plus nombreuses à accoucher en mater-
Kenya 1977-1989 17,9 20,9 + 3,0 - 1,0 + 4,0
nité, sont plus exposées aux messages de
promotion, en particulier à l'initiative
Trends ln duration of breastfeeding in Africa before 1990
des « Hôpitaux amis des bébés", qu'en
milieu rural [15]. Au Cameroun et à
Madagascar, par exemple, l'augmenta-
locaux. À Brazzaville, par exemple, à la naie sur la durée de l'allaitement est tion a été importante, de l'ordre de 300/0
suite de la dévaluation du Franc CFA, moins clair puisque la proportion de en 5 à 7 ans [2]. En revanche, la pra-
Marrin-Prével et al. [14] constatent que jeunes enfants encore allaités à 1 an est tique de l'allaitement exclusif a progressé
la pratique de l'alimentarion au biberon inchangée, alors qu'elle est augmentée à moins nettemen t. Parmi les raisons, sans
n'a pas diminué, que la prévalence de 2 ans. Cependant, les aureurs interprè- doute multiples, de cet échec de la pro-
l'allaitement presque exclusif (c'est-à-dire rent cette augmentation à 2 ans non motion, une certaine ambiguïté du mes-
avec eau) n'a pas changé. En revanche, la comme un effet direct de la dévaluation, sage [16], un manque d'adhésion du pet-
qualité des aliments complémentaires mais comme un choix des mères de sonnel de santé au bien-fondé de cette
s'est nertement dégradée et l'ajout de lait maintenir l'allairement pour faire face à pratique et un investissement financier
animal dans les bouillies a diminué [14]. la dégradation de l'érat nutritionnel de très insuffisant ont joué un rôle impor-
L'impacr de la dévaluation de la mon- leurs enfants. tant [17].

Tableau 3
Évolution de la durée d'allaitement en Afrique après 1990 Id'après Demographie and Health Surveys [2ll
Pays Enquêtes Durée médiane (mois) Évolution
Enquête 1 Enquête 2 globale par année

Afrique du Nord
Égypte 1992-1995 19,1 18,9 - 0,2 - 0,1
Maroc 1987-1992 15,0 15,5 + 0,5 + 0,1
Afrique de l'Ouest
Burkina Faso 1992-1999 25,2 25,8 + 0,6 + 0,1
Ghana 1993-1998 21,4 21,5 + 0,1
Mali 1987-1996 18,3 21,6 + 3,3 °
+ 0,4
Niger 1992-1998 20,9 20,6 - 0,3 - 0,1
Sénégal 1993-1997 20,2 20,9 + 0,7 + 0,2
Togo 1988-1998 22,4 24,4 + 2,0 + 0,2
Afrique de l'Est
Kenya 1993-1998 21,1 20,9 - 0,2
Madagascar 1992-1997 19,7 20,7 + 1,0 °
+ 0,2
Ouganda 1988-1995 19,0 19,5 + 0,5 + 0,1
Tanzanie 1992-1996 21,5 21,5
Afrique centrale et du Sud ° °
Cameroun 1991-1998 17,4 18,1 + 0,7 + 0,1
Zambie 1992-1996 18,6 20,0 +1,4 + 0,4
Zimbabwe 1988-1994 18,8 18,5 - 0,3 - 0,1

Trends in duration of breastfeeding in Africa alter 1990

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Le lait maternel . remenr exclusif er non exclusif er par la
popularion d'enfanrs. Ces esrimarions
Pratiques
une ressource onr pu êrre faires pour 31 pays, regrou- d'allaitement
pés par régions (tableau 5).
méconnue Les quanrirés consommées exprimées par mises en question
habiranr sonr plus imporranres en
Afrique subsaharienne qu'en Afrique du par le sida
Bien qu'i! soir le premier alimenr de Nord, en raison de différences de durée
l'enfanr, le lair marerneJ n'esr pas consi- d'allairemenr (plus longue) er de srrucru- On découvrair en 1985 la présence du
déré comme un produir alimenraire er sa re par âge de la popularion (plus jeune VIH dans le lair des mères séroposirives,
consommarion ne fair pas l'objer de sra- au sud du Sahara). er de nombreuses enquêres prouvaienr la
risriques comme les aurres alimenrs. Har- Les quanrirés de lair marernel consom- nansmission du virus à l'enfanr par le
loyer Oshaug sonr les seuls aureurs qui mées sonr considérables, proches de lair marerneL Le conrinenr africain esr
onr renré d'esrimer la consommarion de 3,5 millions de ronnes par an pour les rrès forremenr rouché par l'épidémie,
lair marernel au niveau des pays [18]. pays donr la prévalence d'allairemenr esr puisque 90 % environ de raures les
En urilisanr les données de consomma- connue er qUI ne représenrenr que rrois- infecrions nouvelles par le VIH chez
rion moyenne par âge publiées par quarrs des Erars du conrinenr africain. l'enfanr y surviennenr [20].
l'OMS (tableau 4) [9] er les données de Dans cerrains pays comme la Zambie, la
prévalence d'allairemenr par rype (allaire- producrion de lair humain (7,5 kg/habi-
Risque de transmission du
menr ou non, exclusif ou non) de la ranr/an) dépasse la disponibiliré en lair
naissance à 35 mois [2], nous avons cal- animal (7,1 kg/habiranr/an) [19]. Pour virus du sida
culé la consommarion de lair marernel ces pays, la perre de cerre ressource par l'allaitement maternel
dans chaque pays. Les quanrirés consom- abondanre er peu onéreuse er son rem-
mées par an sonr obrenues en muJri- placemenr par du lair animal ou d'aunes Le risque global de rransmission de la
plianr les quanrirés de lair par enfanr alimenrs auraienr de graves conséquences mère à l'enfanr pendanr la grossesse,
(tableau 4) par les prévalences de l'allai- économiques. l'accouchemenr er l'allairemenr esr esri-
mé à 25-45 %. Environ un riers des cas
d'infecrion du nourrisson seraienr liés à
l'allairemenr [20]. Une méra-analyse
monrre que le raux de rransmission par
l'allairemenr marernel esr de 14 %
Tableau 4 lorsque la mère a conrracré le VIH avanr
l'accouchemenr 3 er de 29 % lorsque
Consommation moyenne de lait maternel suivant l'âge dans les pays en l'infecrion de la mère esr survenue pen-
développement (d'après Brown et al. [91 et Hatloy et Oshaug [1811 danr le posr-parrum [2I].
Âge (mois) Allaitement exclusif Allaitement non exclusif Le niveau de rransmission posr-narale
(g/j) (g/jl précoce (premiers mois) par l'allairemenr
n'esr pas connu avec précision car il esr
0-2 714 617 difficile de le séparer du risque périnaral
3-5 784 663 (fin de la grossesse er accouchemenr).
6-8 776 660 Selon cerrains aureurs, elle serait rrès
9-11 616 imporranre: Nduari et al observenr
12-23 549
qu'environ deux riers des infections dues
24-35 254
à l'allairemenr sonr survenues avanr
4 mois [22]. Tourefois, la durée de
Mean intake of breastmilk in developing cou nt ries by age l'allairemenr semble jouer un rôle
majeur. Une méra-analyse des érudes
porranr sur la rransmission posr-narale
rardive (après 2,5 mois de vie) monrre
Tableau 5 une augmen rarion quasi 1inéaire du
risque avec la durée d'allairemenr
Estimation de la consommation de lait maternel en Afrique (figure 2). Pour les enfanrs de ces érudes,
qui n'éraienr pas infecrés à 2,5 mois, la
Région Nombre Quantité totale Quantité par habitant
probabiliré de conrracrer le VIH à cause
d'Afrique de pays (tonnes/an) (kg/an)
de l'allairemenr, érair globalemenr de
Nord 3 450567 4,23 9% à 36 mois [23].
Ouest 12 1 529559 6,99
Le rôle de plusieurs aurres facreurs esr
Est 1065306 6,96
suspecré. La carence en viramine A de la
9
mère semble favoriser la rransmission,
Centre et Sud 7 413076 6,60

Estimated breastmilk consumption in Africa 3 En plus du risque lié à la grossesse et à


l'accouchement.

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Figure 2. Probabili- VIH par le lait maternel, les organisa-
té cumulée d'acqui-
Probabilité d'infection (%) sition postnatale tar- tions internationales, OMS, Unicef et
10,5
dive du VIH par les Onusida, Ont élaboré des recommanda-
enfants allaités non
9 infectés à 2,5 mois
tions d'aJimentation des nourrissons afin
de vie Id'après Leroy de limiter ce risque. En 1992, elles
et al. [2311. recommandaient aux mères séropositives
7,5
de ne pas aJlaiter si les conditions per-
Figure 2. Cumulative
6 probability of late mettaient de le faire sans risque pour
postnatal acquisition l'enfant. À panir de 1997, elles Ont pré-
of HIV by breastfed conisé d'informer les mères séropositives
4,5 children.
des risques er des bénéfices de l'aJlaite-
3 ment afin qu'elles prennent elles-mêmes
la décision d'allaiter ou d'utiliser un
1,5 autre mode d'alimentation du nourrisson
[27]. Les résultats de l'étude de Cout-
0 soudis et al. ont amené ces organisations
6 9 12 18 24 36
à mettre l'accent sur l'avantage potentiel
Âge (mois)
de l'aJlaitement maternel exclusif. Depuis
2001, elles recom mandent d' em ployer
l'allaitement artificiel si cela est accep-
mais la supplémentation eSt sans effet elles décidaient d'aJlaiter, on leur recom- table et faisable sans risque pour l'enfant
[24]. Les atteintes de la peau et des mandait un aJlaitement exclusif. PI us des et, si ce n'est pas le cas, d'aJlaiter exclusi-
muqueuses de la mère ou du nourrisson deux tiers des mères Ont choisi d'aJlaiter. vement pendant les premiers mois et
faciliteraient le passage du VIH dans À 6 mois, la probabilité d'infection était d'interrompre l'allaitement aussi tôt que
l'organisme de l'enfant: chez la mère, les la même chez les nourrissons allaités possible [28]. Pour les mères séronéga-
fissures des mamelons et les mastites; exclusivement pendant au moins trois tives ou de statut inconnu, il est toujours
chez le nourrisson, le muguet buccaJ et mois et chez ceux qui n'avaient jamais recommandé d'allaiter exclusivement
les gamo-entérites [25]. reçu de lait maternel (19 %), alors jusqu'à 6 mois, et de poursuivre l'allaite-
Certaines prariques d'alimentation qu'elle était plus élevée cbez ceux qui ment jusqu'à 2 ans ou plus.
constituent des sources importantes de avaient reçu un allaitement maternel
germes pathogènes, dans des contextes d'un autre type, non exclusif ou exclusif
Options d'alimentation
où l'hygiène est insuffisante, et peuvent pendant moins de trois mois (26 %) 4.
entraîner des aJtérations de la muqueuse Cette observation suggère qu'il n'y a pas des nourrissons de mères
intestinale du nourrisson favorables au d'excès de risque de transmission par séropositives
passage du VIH: l'habitude de donner l'allaitement, à condition que celui-ci
aux enfants allaités de l'eau, des liquides soit exclusif pendant au moins trois Pour éviter tOtalement la transmISSIon
à base d'eau et/ou du lait animal, ainsi mois. L'allaitement maternel non exclusif du VIH par le lait maternel, plusieurs
que j'utilisation du biberon et l'introduc- serait la pratique la plus risquée en aJternatives à l'aJlaitement maternel Ont
tion trop précoce d'aliments com plé- termes de transmission du VIH à été proposées, fondées sur le ttaitement
mentaires (avant 6 mois). Comme on l'a l'enfant. Cette conclusion ne doit cepen- du lait maternel, l'aJlaitement par nourri-
déjà indiqué, ces prariques SOnt souvent dant pas être considérée comme définiti- ce ou l'utilisation de lait animaJ sous ses
associées à l'allaitement maternel. Or, ve, puisqu'elle n'est étayée que par une diverses fotmes, lait frais, en poudre,
dans les rares travaux publiés qui pren- seule étude, et il est urgent de la confir- concentré non sucré et substituts du lait
nent en compte le type d'allaitement, les mer dans d'autres contextes. Elle pour- maternel [29].
auteurs ne distinguent pas l'allaitement rait avoir des implications majeures sur Le virus est détruit par chauffage. Le lait
maternel exclusif des pratiques associant le plan de la diffusion de l'épidémie, maternel exprimé manuellement, paSteuri-
lait maternel er eau ou liquides à base puisque la pratique de l'allaitement non sé ou boui1J.i, peut être donné au nourris-
d'eau (cités dans [20]). Donc, les estima- exclusif est courante en Afrique. son. Cependant, cette alternative est
tions actuelles du risque de transmission contraignante, et sa faisabilité sur une
du VIH à l'enfant ne reflètent pas le rôle Recommandations durée de plusieurs mois est douteuse.
de l'allaitement maternel per se, c'est-à- L'aJlaitemenr par nourrice est une option
dire exclusif, mais plutôt celui de l'allai- d'alimentation si celle-ci est séronégative et se protège de
rement généralement associé à d'autres des nourrissons de mères l'infecrion pendanr j'aJlaitement, mais il
liquides. peut se heurter à des barrières culrurelles.
L'étude de Coutsoudis et al. est, à notre
séropositives Les différenres formes de lait animal
connaissance, la seule qui mesure le peuvent être urilisées mais il est préfé-
risque en cas d'allaitement maternel Au fur et à mesure de la publication de rable d'employer les substituts du lait
exclusif [26]. Dans cette étude, les mères données confirmant la transmission du marernel car leur composition nutrition-
choisissaient le mode d'alimentation de nelle esr la plus proche du lait maternel.
leur enfant après avoir été informées du cl Alors qu'a la naissance, la proportion de Leur COÛt est très élevé: pour alimenter
risque de transmission du VIH et des nouveau-nés infectés était similaire dans les un nourrisson pendant six mois, il faut
bénéfices potentiels de l'allaitement. Si trois groupes, de l'ordre de 7 à 8 %. 20 kg de substituts, qui COÛtent de 100 à

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250 dollars US suivant les pays. Pour d'allairement impliquera, elle aussi, des n'esr que de 3,2 au Brésil er 1,9 aux Phi-
diminuer ce coûr, les mères peuvent êrre coûrs imporrants en rermes de dépenses lippines. De 12 à 23 mois, le risque esr
amenées à rrop diluer les substirurs, ce de soins de santé primaires, d'hospiralisa- plus faible er inconsrant suivanr les pays.
qui peur entraîner une malnurririon du rion er de médicaments, coûrs qui sonr De nombreaux pays africains ont un
nourrisson. Dans ce contexre, l'OMS er difficiles à évaluer. niveau de pauvreré er de morraliré infan-
Onusida suggèrent que les Érars négo- rile comparable à celui du Pakisran [33].
cient avec les fabricants de subsrirurs Risque de mortalité On peur donc penser que le risque de
pour obrenir des prix leur permerrant de morraJiré par maladies infectieuses en
les fournir graruirement ou à bas prix en l'absence d'allaitement l'absence d'allairement esr, dans ces pays,
aux mères séroposirives [30]. L'urilisarion maternel plus proche de celui du Pakisran que de
du lair de vache liquide esr moins cOû- ceux du Brésil ou des Philippines. Dans
reuse. Il doir êrre dilué er addirionné de Bien que les avanrages de l'allairement les pays les plus pauvres d'Afrique, la
sucre. Un peu moins de 100 lirres sont en rermes de prorecrion conrre les infec- morraliré due à l'absence d'allairement
nécessaires pour alimenrer un nourrisson rions couranres aient fair l'objer d'une pourrair être égale ou supérieure au
pendant six mois. abondanre lirrérarure, le niveau de mor- risque de nansmission du VlH par le lair
Pour roures ces alrernarives, à l'exceprion raliré en l'absence d'allairemenr esr mal marernel [34].
de l'allairement par nourrice, il faur précisé. L'OMS a ré-analysé les données
choisir le mode d'adminisrrarion au d'enquêres, peu nombreuses, qui permer-
Mortalité
nourrisson, à la cuillère er à la rasse - renr d'évaluer ce risque dans les pays en
qui esr le plus sûr - ou bien au biberon développement [32]. Dans les rrois pays des nourrissons
si son hygiène esr rigoureuse. Il faur faire africains de cerre analyse, le nombre de mères séropositives
bouillir l'eau ou le lair, éventuellement le d'enfants non allai rés pendant la premiè-
biberon, pour limirer le risque infectieux, re année érair rrop faible pour que l'ana- L'essai clinique randomisé de Nduari et
ce qui enrraîne une consommarion lyse de la morraliré soir possible. À panir al. a mis en évidence une monaliré rrès
imporrante de bois de chauffe. des données d'aurres pays (Brésil, Pakis- élevée chez les nourrissons de mères séro-
ran, Philippines), les aureurs esrimenr posirives qui n'ont pas éré allai rés [22].
que le risque de mortaliré de causes Cerre mortaliré, de 20 % à 24 mois,
Impact
infeerieuses en l'absence d'allairement n'érair pas srarisriquement inférieure à
des recommandations esr, avant l'âge de 2 mois, 5,8 fois plus celle des enfanrs allairés (24 %) malgré
sur la production élevé que celui des enfanrs allai rés une transmission plus imporrante du
(figure 3). Le risque esr décroissanr avec VIH chez ces derniers. Pourtant, les
de lait maternel l'âge, mais paniculièremenr élevé pen- aureurs s'éraient entourés de mulriples
dam les G premiers mois. Enrre G mois er précaurions pour minimiser la monaliré
Dans les pays de forte prévalence de 1 an, il esr d'environ 2 fois celui des en l'absence d'allairement. Les mères
l'infecrion par le VlH, l'applicarion des enfants allai rés. Il esr plus élevé quand le incluses dans l'essai avaient un niveau
recommandarions d'alimentarion des niveau d'éducarion de la mère esr faible. d'éducarion élevé, disposaient d'un accès
nourrissons de mères séroposirives entraî- Mais les données sont hérérogènes, à l'eau porable, éraienr formées à
nera la perte d'une parr imporranre de la puisque celles provenanr du Pakisran l'emploi des subsrirurs du lair marernel
production de lair marernel. En Zambie montrent un risque beaucoup plus élevé, qui leur éraient fournis graruirement, er
par exemple, où 20 % des femmes en de 21,3 avant 2 mois er 11 ,S à 2-3 mois. leur enfanr bénéficiair d'un suivi médical
âge de procréer sont séroposirives [31], le Pour l'ensemble de la première année, le graruir. Le mauvais érar de santé de la
choix de l'allairement arrificiel entraîne- risque esr de 7,9 au Pal<isran, alors qu'il mère séroposirive pourrair l'empêcher de
rair chaque année une réducrion de
13 700 ronnes de la producrion de lair
marernel, er celui de l'allaitement exclu- Figure 3. Mortalité
7 Risque de décès par rapport aux enfants allaités infantile par mala-
sif pendant six mois suivi du sevrage, dies infectieuses en
une réducrion de S SOO ronnes. l'absence d'allaite-
ment (d'après WHO
6 5.8 [321).

5 Figure 3. Mortality from


Coûts et risques 4.1
infectious diseases in
non-breastfed infants.
4
de J'absence
d'allaitement 3
2.5

2 1.8
1,4
Le prix des subsrirurs du lair marernel er
du bois de chauffe ne reflère cependant
qu'une partie des coûrs qu'induirair
O+-----........"'---,--..L..........-,-----"---,----"--"---,--II---'''---,
l'absence d'allairement marernel ou un 0-1 2-3 4-5 6-8 9-11
allairement de rrès courre durée. La mor- Âge (mois)
bidiré infecrieuse accrue liée à l'absence

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faire face convenablement aux début de l'essai, ces dernières présentam Seule ]'absence d'allaitement maternel
contraintes importantes de l'allaitement avant la randomisation une charge virale peut empêcher totalement la transmis-
artificiel et aux besoins supplémentaires plasmatique plus élevée, signe d'un stade sion par cette voie. Mais il est très diffi-
de soins de l'enfant dus à l'absence plus avancé de la maladie [37]. Cerre cile, voire impossible, de fournir aux
d'allaitement maternel. Il est possible surmortalité des allaitantes n'est heureu- nourrissons de milieu pauvre un allaite-
qu'il y ait une surmortalité spécifique du sement pas retrouvée par Coutsoudis et ment artificiel sans risque. Même dans
nourrisson non allaité, due à la séroposi- al. qui observem une mortalité maternel- les milieux plus privilégiés, lorsque les
tivité de sa mère. le beaucoup plus faible qui ne diffère pas mères som éduquées, om accès à l'eau
entre aJiaitantes et non-alJaitames [38]. pOtable, bénéficient de substituts du lait
Effet sur la fécondité Dans les pays où l'allai temem artificiel est maternel et d'un suivi médical gratuits,
rare, la crainte de la stigmatisation est une le risque de mortalité des nourrissons
L'absence d'allaitement ou son interrup- barrière à l'utilisation des substituts du reste important. C'est sur la base de ce
tion précoce a comme corollaire la dispa- lait maternel par les mères, leur urilisation constat et à partir des résultats d'une
rition ou la diminurion de son rôle étant susceptible de désigner automati- étude montrant que le risque n'est pas
modérateur de la fécondité, encore très quement les mères comme séropositives augmenté en cas d'allaitement maternel
important en Afrique. Thapa et al. esti- aux yeux de la communauté. La désaffec- exclusif, que les organisations internatio-
ment qu'une diminution de moitié de la tion de l'allaitement ne touchera pas ces nales recommandent, dans tous les cas
durée d'allaitement augmenterait l'indice pays. Elle pourrait en revanche atteindre où l'allaitement artificiel n'est pas sans
syntnétique de fécondité de plus de 25 % les pays à niveau de revenu intermédiaire risque pour J'enfant, un allaitement
[35]. Dans les pays où la fécondité est où la pratique de l'alimentation au bibe- exclusif pendant quelques mois suivi
forte, avec un indice de plus de 5 enfants ron est déjà courante - Botswana et d'un sevrage précoce et rapide.
par femme, cela représeme un enfam de Namibie par exemple, où plus de 20 % La pratique de l'allaitement maternel
plus par femme. La pratique contracepti- des nourrissons de moins de 4 mois reçoi- exclusif n'est pas courante en Afrique et
ve moderne est encore peu répandue en vent le biberon - car les substituts y sont sa promotion n'a pas été très efficace
Afrique subsanarienne 5 et il n'est pas plus accessibles financièrement que dans jusqu'alors. Les obstacles à ce type
cerrain qu'elle puisse compenser cet les pays pauvres. La désaffection de l'allai- d'allaitement SOnt mal connus et il fau-
accroissement de la fécondité. tement aura dans ces pays des consé- drait les érudier pour améliorer les mes-
quences importantes en termes de morbi- sages de promotion. Il faut augmenter
Perte de confiance dité et de mortalité des nourrissons [39]. les moyens humains et financiers de la
L'épidémie de sida constituant pour les promotion et renouveler ses méthodes.
en l'allaitement fabricams de substituts une opportunité Les mères devront aussi être formées aux
de diffusion de leurs produits, ces États techniques d'allaitement qui permettent
Avant l'épidémie de sida, le lait maternel devront être très vigilants afin d'en éviter de prévenir les pathologies mammaires
était l'aliment idéal. Quelles que fussent la diffusion à des mères qui n'en auraient car celles-ci augmentent le risque de
les circonstances, pauvreté, malnutrition pas besoin. L'OMS, consciente du risque transmission du VIH par le lait maternel
de la mère, il ne com porrai t pas de de désaffection du lait maternel qui pour- [40].
risques pour l'enfant ou pour sa mère. rait toucher les mères séronégatives ou de Ce SOnt les pays où l'allaitement non
Le sida est ven u remerrre en question statur inconnu, a récemment réaffirmé la exclusif est très répandu qui bénéficie-
cerre perception. Le risque de transmis- nécessité de réaliser des recherches sur ront le plus de la progression de
sion du VIH par le lait peut entraîner l'impact des recommandations destinées ]' allai tement exclusif. Bénéfiq ue pour
une méfiance légitime des mères vis-à-vis aux mères séropositives sur les pratiques les nourrissons de mères séropositives,
de l'allaitement maternel. On a pu d'allaitement dans Je reste de la popula- elle le sera également pour la popula-
craindre qu'il augmente la mortalité des tion [28]. tion des nourrissons de mères séroné-
mères séropositives, puisque Nduati et al. gatives, en réduisant la morbidité
Ont mis en évidence, lors de l'essai ran- infectieuse, en particulier par diarrhée
domisé déjà cité [22], une mortalité associée à la pratique de l'allaitement
beaucoup plus élevée chez les allaitantes Conclusion non exclusif [41]. Elle devrait égaie-
(II % à 24 mois post-partum) que chez ment bénéfIcier aux nourrissons des
les non-allaitantes (4 %) [36]. Les En Afrique, depuis deux décennies, les nombreuses mères qui ignorent leur
auteurs pensent que cerre surmortalité pratiques d'allaitement maternel se sont séropositivité, soit parce qu'elles n'ont
est due à l'effort métabolique important améliorées. L'initiation précoce de l'allai- pas accès au dépistage, soit parce
que la production de lait impose aux tement est devenue plus courante et la qu'elles ne prennent pas connaissance
mères, qui accélèrerait l'évolution de leur d urée de l'allai tement s'est allongée. de son résultat [31]. Il est donc crucial
maladie vers le sida. Cependant, elle Dans une moindre mesure, la pratique de renforcer la promotion de l'allaite-
pourrait aussi être liée à une différence de l'allaitement exclusif a également pro- ment exclusif auprès de toutes les
entre non-allaitantes et allaitantes au gressé. Mais l'allaitement tel qu'il était mères, infectées ou non.
pratiqué jusqu'alors - un allaitement de Après quelques mois d'allaitement
longue durée poursuivi jusqu'à la deuxiè- exclusif 6 , le problème le plus difficile
me ou la troisième année de l'enfant -
5 Dans seulement 4 pays sur 29. la propor-
tion de femmes qui utilisent un moyen de
pourrait être remis en question par l'épi- 6 En Zambie et au Zimbabwe, quatre à six
contraception moderne est supérieure à démie de sida, puisque le VIH peut être mois d'allaitement exclusif sont préconisés
20 % 10H31 [2] transmis à l'enfant par le lait maternel. [341

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est d'assurer aux nourrissons de mères
séropositives un sevrage rapide sans Summary
risque. En effet, les dangers de la pra-
rique du sevrage précoce sur la sanré du
nourrisson ont souvent été soulignés Breastfeeding in A&ica: will positive trends be challenged
[9]. L'arrêt rapide de l'allaitement peut by the AlOS epidemic?
être psychologiquement traumatisant M.-C. Dop
pour ['enfant. Son acceptation des sub-
stituts peut être difficile. Le remplace-
In Africa, more than 95% of infànts are currently breastJed, but feeding practices
ment du lait maternel par des aliments
are often Inadequate: feeding wateT, and other liquids, to breastJed infànts is a
de qualité nutritionnelle ou hygiénique
insuffisante accroît la morbidité infec-
widespread practice. Consequently, the rate ofexclusive breastfeeding is Iow, parti-
tieuse et peut entraîner une malnutri- Cl/Larly in ~st Africa. The rate ofbottlefeeding is high in some countries (exceed-
tion. La mise en œuvre d'une alimenta- ing 30% in Tunisia, Nigeria, Namibia and Sudan). Nevertheless prolonged
tion sans lait maternel de 6 à 12 mois breastJeeding is common, and the median duration of breastJeeding ranges between
se heurte aux mêmes difficultés que 16 and 28 months. Urbanization and mothers' education are the major fàctors
l'allaitement artificiel dès la naissance, that tend to shorten breastJeeding. Nevertheless recent trend)' show an increase in
mais avec moins d'intensité. Il n'existe early initiation and in duration of breastJeeding as a result of promotion efforts
pas pour le moment d'étude scienti- deployed by WHO and Unicef, local governments, and non-governmental organi-
fique ou d'expérience du sevrage préco- zatiom. The importance of breastmilk as a food resource of African countries is
ce, et il est urgent d'en définir les generally not recognized. In 31 countries where data on prevalence of breastJeeding
modalités pratiques. De 6 mois à un an, are avaiLable, comumption of breastmilk by children under three years is estimated
le lait, de préférence sous forme de sub- at 3.5 million tons per year. The AJDS epidemic could threaten breastJeeding
stituts du lait maternel, doit rester l'ali- because the virus can be transmitted through breastmilk, as demonstrated by
ment principal du nourrisson, couvrant numerous studies. A study suggests that feeding breastmilk and other liquids to
au moins la moitié de ses besoins nutri- infànts could be the feeding mode associated with the highest rate of transmission.
tionnels. Des aliments complémentaires To prevent mother-to-child transmission of HW WHO recommends replacement
de bonne qualité doivent être introduits feeding if it is feasible and safe. Otherwise, mothers are encouraged to practice
à partir de 6 mois comme cela est exclusive breastJeeding for the first months of lift followed by early and rapid wea-
recommandé pour ['ensemble des nour-
ning. The feasibility of replacement feeding with breastmilk substitutes, however, is
rissons [42]. Il faudra que les personnels
very uncertain. In a study where free substitutes were given to H !V-positive
de santé soient vigilants afin de limiter
l'application de la recommandation de
mothers, the mortality of the formuLa-fed infànts was the same as that of the
sevrage précoce aux mères séropositives breastJed infànts. HIV-positive mothers may find it difficult to cope with the
et d'éviter qu'elle ne soit reprise par les comtraints of replacement feeding, in terms of cost, workload and time, and with
mères séronégatives ou de statut incon- the additional health care needs of non-breastJed infànts. Exclusive breastJeeding
nu. for a few months could caJry a lower risk of death than replacement feeding. But
Il faut évaluer la faisabilité des recom- success in promoting exclusive breastJeeding has been limited in Africa, and new
mandations d'alimentation des nourris- promotion methods are needed. InJànts of ail mothers, whether H!V-positive or
sons de mères séropositives dans leurs not, will benefit from improving the rate ofexclusive breastJeeding.
dimensions sanitaires, sociales, culturelles The major problem is to ensure that early and rapid weaning, between 4 and
et économiques. D'une part, au niveau 6 months, does not have a negative impact on the child's health. Early weaning is
individuel, chaque mère doit être guidée known to increase susceptibility to infections and can cause malnutrition. The fea-
par le personnel de santé dans le choix sibility and safety ofthis recommendation will have to be monitored carejùlly.
du mode d'alimentation de son nou- A strong determination ofAfrican governments to promote exclusive breastJeeding
veau-né, en tenant compte des condi- among ail mothers and to protect prolonged breastJeeding among non-infected
tions concrètes dans lesquelles elle se mothers will limit the mother-to-child transmission of HJV while preserving the
trouve placée. D'autre part, au niveau benefits of breastJeeding.
des États, les implications économiques
et sanitaires des choix d'alimentation des Cahiers Saml 2002 , J2. 64-72.
nourrissons doivent être examinées avec
réalisme.
Seule une détermination forte de la Références Benoist B. Verster A. Delpeuch F, eds. Comple·
mentary feeding of young children in Africa and
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Note pour la presse 2001 ; 7; 6 p.
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décennie, J'initiation précoce et la durée de l'allaitemenr et, dans une moindre
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