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Culture générale et expression

Les mythes et la société moderne

Qu’est-ce que le mythe ?

« Personnellement, la définition qui me semble la moins imparfaite, parce que la plus large, est
la suivante le mythe raconte une histoire sacrée; il relate un événement qui a eu lieu dans le temps
primordial, le temps fabuleux des « commencements». Autrement dit, le mythe raconte comment,
grâce aux exploits des Êtres Surnaturels, une réalité est venue à l'existence, que ce soit la réalité totale,
le Cosmos, ou seulement un fragment une île, une espèce végétale, un comportement humain, une
institution. C'est donc toujours le récit d'une « création » on rapporte comment quelque chose a été
produit, a commencé à être. Le mythe ne parle que de ce qui est arrivé réellement, de ce qui s'est
pleinement manifesté. Les personnages des mythes
sont des Êtres Surnaturels. Ils sont connus surtout par ce qu'ils ont fait dans le temps prestigieux des «
commencements ». Les mythes révèlent donc leur activité créatrice et dévoilent la sacralité (ou
simplement la « sur-naturalité ») de leurs œuvres. En somme, les mythes décrivent les diverses, et
parfois dramatiques, irruptions du sacré (ou du « sur-naturel ») dans le Monde. C’est cette irruption du
sacré qui fonde réellement le Monde et qui le fait tel qu'il est aujourd'hui. Plus encore c'est à la suite
des interventions des Êtres Surnaturels que l'homme est ce qu'il est aujourd'hui, un être mortel, sexué
et culturel. »

Aspects du mythe, Mircea Eliade, 1963

Questions
1. Quelles sont les caractéristiques du mythe ?
2. Pourquoi les mythes sont-ils importants encore aujourd’hui ?
3. Avons-nous encore besoin d’avoir des mythes ?

Le mythe de Sisyphe
Lecture : Le mythe de Sisyphe, Albert Camus, 1942 (extrait)
- Selon, Albert Camus, pourquoi Sisyphe est-il heureux ? Et vous, qu’en pensez-vous ?
- Définissez « valeur symbolique » ? En quoi Sisyphe a-t-il une valeur symbolique dans la
société ?

Quels sont les éléments du mythe qui permettent d’identifier son rôle aujourd’hui ? Quel rapport y-a-t-
il avec la société moderne ? Pourquoi est-il important ?

Le mythe de Prométhée
Lecture : Frankenstein ou le Prométhée moderne, Mary Shelley, 1818
Résumé : Un jeune savant suisse, Victor Frankenstein, parvient à créer un être vivant assemblé avec
des parties de chairs mortes. Horrifié par l'aspect hideux de l'être auquel il a donné la vie, Frankenstein
abandonne son « monstre ». Ce dernier, doué d'intelligence, se venge par la suite d'avoir été rejeté par
son créateur en s’attaquant à sa famille. Persécuté par la société, il n’aura de cesse de chercher sa place
dans une société qui ne peut l’accepter.

Extrait 1
Chapitre IV

Lorsque je m'aperçus que je possédais un pouvoir aussi étonnant, j'hésitai longtemps sur la
manière dont je l'utiliserais. J'étais donc capable d'animer la matière mais créer un organisme avec
l'entrelacement de ses fibres, de ses muscles et de ses veines, voilà qui représentait un travail d'une
incroyable difficulté. Et d'abord je ne savais pas si je tenterais de créer un être qui me ressemblerait ou
un organisme plus, simple. Mon premier succès avait à ce point exalté mon imagination que je ne
doutais pas de ma capacité d'animer un animal aussi complexe et aussi merveilleux que l'homme. Les
matériaux dont je disposais ne semblaient guère convenir à une entreprise aussi délicate et aussi ardue
mais cela ne devait pas handicaper mon succès. J'étais préparé à affronter une multitude de revers, mes
essais pouvaient sans cesse être infructueux et, en définitive, mon œuvre pouvait se révéler
imparfaite. » (p.55)

Question
1. Expliquez le titre de l’ouvrage de Mary Shelley ?
2. Comment définir ce pouvoir dont parle Victor Frankenstein ?

Extrait 2

[…]Ce fut par une lugubre nuit de novembre que je contemplai mon œuvre terminée. Dans
une anxiété proche de l’agonie, je rassemblai autour de moi les instruments qui devaient me permettre
de faire passer l’étincelle de la vie dans la créature inerte étendue à mes pieds. Il était déjà une heure
du matin ; une pluie funèbre martelait les vitres et ma bougie était presque consumée, lorsque à la
lueur de cette lumière à demi éteinte, je vis s’ouvrir l’œil jaune et terne de cet être ; sa respiration
pénible commença, et un mouvement convulsif agita ses membres. Comment décrire mes émotions en
présence de cette catastrophe, ou dessiner le malheureux qu’avec un labeur et des soins si infinis je
m’étais forcé de former ? Ses membres étaient proportionnés entre eux, et j’avais choisi ses traits pour
leur beauté. Pour leur beauté ! Grand Dieu ! Sa peau jaune couvrait à peine le tissu des muscles et des
artères ; ses cheveux étaient d’un noir brillant, et abondants ; ses dents d’une blancheur de nacre ; mais
ces merveilles ne produisaient qu’un contraste plus horrible avec les yeux transparents, qui semblaient
presque de la même couleur que les orbites d’un blanc terne qui les encadraient, que son teint
parcheminé et ses lèvres droites et noires.
Les accidents variés de la vie ne sont pas aussi sujets au changement que les sentiments
humains. Depuis près de deux ans, j’avais travaillé sans relâche dans le seul but de communiquer la
vie à un corps inanimé. Je m’étais privé de repos et d’hygiène. Mon désir avait été d’une ardeur
immodérée, et maintenant qu’il se trouvait réalisé, la beauté du rêve s’évanouissait, une horreur et un
dégoût sans bornes m’emplissaient l’âme. Incapable de supporter la vue de l’être que j’avais créé, je
me précipitai hors de la pièce, et restai longtemps dans le même état d’esprit dans ma chambre, sans
pouvoir goûter de sommeil. La lassitude finit par succéder à l’agitation dont j’avais auparavant
souffert, et je me précipitai tout habillé sur mon lit, essayant de trouver un instant d’oubli. Mais ce fut
en vain : je dormis, il est vrai, mais d’un sommeil troublé par les rêves les plus terribles. Je croyais
voir Elizabeth, dans la fleur de sa santé, passer dans les rues d’Ingolstadt. Délicieusement surpris, je
l’embrassais ; mais à mon premier baiser sur ses lèvres, elles revêtaient la lividité de la mort ; ses traits
paraissaient changer, et il me semblait tenir en mes bras le corps de ma mère morte ; un linceul
l’enveloppait, et je vis les vers du tombeau ramper dans les plis du linceul. Je tressaillis et m’éveillai
dans l’horreur ; une sueur froide me couvrait le front, mes dents claquaient, tous mes membres étaient
convulsés : c’est alors qu’à la lumière incertaine et jaunâtre de la lune traversant les persiennes de ma
fenêtre, j’aperçus le malheureux, le misérable monstre que j’avais créé. Il soulevait le rideau du lit ; et
ses yeux, s’il est permis de les appeler ainsi, étaient fixés sur moi. Ses mâchoires s’ouvraient, et il
marmottait des sons inarticulés, en même temps qu’une grimace ridait ses joues. Peut-être parla-t-il,
mais je n’entendis rien ; l’une de ses mains était tendue, apparemment pour me retenir, mais je
m’échappai et me précipitai en bas. Je me réfugiai dans la cour de la maison que j’habitais, et j’y restai
tout le reste de la nuit, faisant les cent pas dans l’agitation la plus grande, écoutant attentivement,
guettant et craignant chaque son, comme s’il devait m’annoncer l’approche du cadavre démoniaque à
qui j’avais donné la vie de façon si misérable. […]

Questions
1. Comment est décrite la créature ?
2. Comment expliquer les états d’âme et la réaction du créateur ?
3. En quoi la morale du mythe de Prométhée diverge de celle de Frankenstein ?

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