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La Déclaration de Nations-unies sur les droits des peuples autochtones, se lit à ses

articles 20 et 26, que les peuples autochtones ont le droit aux terres, territoires et ressources
qu’ils possèdent et occupent traditionnellement ou qu'ils ont utilisé ou acquis et que lorsqu’ils
sont privés de leurs moyens de subsistance et de développement ont droit à une indemnisation
juste et équitable. Par ailleurs son article 32 déclare qu’avant l'approbation de tout projet ayant
d'incidence sur les terres ou territoires des peuples autochtones, les Etats doivent leur consulter
et coopérer avec eux de bonne foi en vue d'obtenir leur consentement donné librement et en
toute connaissance de cause.

Ils doivent en outre mettre en place des mécanismes efficaces pour une réparation juste
et équitable pour toute activité liée au projet approuvé et d’autres mécanismes doivent être pris
pour atténuer les effets néfastes de ces genres d’activité notamment sur le plan environnemental,
économique, social, culturel ou spirituel des peuples concernés. Il leur est reconnu par l'article
40, le droit d’avoir accès à des procédures justes et équitables, à une décision rapide ainsi qu’à
des voies de recours efficaces lorsqu'ils sont victimes de toute violation de leurs droits
individuels et collectifs.

Au niveau régional, l'article 20 de la Charte africaine des droits de l’homme et des


peuples, garantie à tout peuple son droit à l’autodétermination. L'article 21 surenchérit en lui
garantissant dans son intérêt exclusif, le droit de disposer de ses richesses et de ses ressources
naturelles. Cela étant, en cas de spoliation, celui-ci a droit à la légitime récupération de ses biens
ainsi qu’à une indemnisation adéquate.

Ces dispositions sont renforcées par la jurisprudence notamment la Commission


africaine dans l'affaire des Endorois contre le Kenya et la Cour africaine dans l'affaire des Ogiek
contre le Kenya. En effet, la commission africaine dans l’affaire sus évoquée a précisé qu'en
envisageant un projet ayant un impact sur les terres des peuples autochtones, l’État doit
consulter et obtenir leur consentement libre, préalable et en tout connaissance de cause sur le
projet. L’État doit s’assurer non seulement de l'indemnisation de ceux-ci mais encore des
avantages dont ils tireraient du projet.

La commission a néanmoins précisé que le droit garanti par l'article 21 de la Charte et


dont les autochtones dans un État doivent se prévaloir, n'exclut pas des restrictions que peut
faire l’État en vertu du principe de la souveraineté permanente de l’État sur ses ressources
naturelles. Au niveau interne, ce principe constitutionnel ne souffre d’aucune limite. Toutefois,
la Commission a eu a préciser que les restrictions faites par l’État doivent s’opérer en vertu des

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lois en vigueur, et doivent être décidées dans l’intérêt général de la communauté concernée,
c'est-à-dire nécessaires pour assurer sa survie. Ces restrictions ne doivent donc pas affecter les
autres ressources naturelles nécessaires à la survie de la communauté concernées. Donc le fait
d’expulser un peuple dans sa forêt ancestrale pour en ériger par exemple un Parc national,
constitue une violation de l'article 21 de la Charte tel que constaté par la Commission et
confirmé par la Cour africaine dans les affaires sus mentionnées.

Il sied de signaler qu'en RDC , les Pygmées sont des peuples autochtones qui bénéficient
de tous les droits consacrés dans les instruments évoqués ci-haut notamment, le droit au
développement, à l’autodétermination et de la disposition de leur terres ancestrales. Par ailleurs,
suivant la proposition de loi de 2020 portant principes fondamentaux relatifs à la protection et
promotion des droits de peuples autochtones Pygmées en RDC en son article 42, aucune
délocalisation, ni réinstallation des peuples Pygmées ne peut se faire sans leur consentement
libre, préalable et informé et sans leur indemnisation juste et équitable. Il en est de même pour
la création d’un Parc national ou réserve naturelle intégrale conformément à l'article 45 dudit
projet de loi.

L'article 44 du même projet de loi prévoit que les peuples autochtones pygmées ont droit
de jouir pleinement de toutes les ressources naturelles, ligneuses et non ligneuses ainsi que des
bénéfices issus des services environnementaux sur les terres qu'ils possèdent, occupent ou
utilisent traditionnellement. Un effet rétroactif consistant à prendre des mesures correctives
concernant les spoliations contre les Pygmées à partir de 1970 jusqu’à ce jour est aussi envisagé
par l’article 57 du projet dont question. Les articles 42 et 57 permettent donc une indemnisation
aux Pygmées expulsés dans des aires protégées ainsi que la restitution de leurs forêts le cas
échéant.

Cependant, nonobstant les droits reconnus aux Pygmées, la RDC avait notamment par
l'Ordonnance nº 75-238 du 22 juillet 1975 portant modification des limites du PNKB intégré
les forêts occupées par des communautés Pygmées dans le PNKB. Ces dernières en ont été
expulsé sans avoir donné ni leur consentement libre, préalable et informé ni bénéficié d’une
indemnisation juste et équitable. Cette décision qui produit des effets jusqu’aujourd’hui, laisse
les Pygmées dans des conditions précaires, de pauvreté et de vulnérabilité. Par ailleurs, les
Pygmées sont également privés de leur droit d'accès au juge et d'obtenir une décision rapide,
juste et équitable dans les affaires tendant à obtenir leur réparation. Cela est justifié par le fait
que les juridictions interne qui étaient saisies des litiges dans ce sens, se sont déclarées
incompétentes.

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Les actions n'ayant pas abouti à une décision finale favorable, toutes les violations dont
les Pygmées sont victimes ne sont pas encore réparées par l’État congolais. Pourtant pour se
conformer à la Charte africaine dont elle est partie, la RDC doit obtenir le consentement libre
préalable et informé des Pygmées avant la création des aires protégées, elle doit leur reconnaître
le droit de propriété sur leur terres ancestrales en leur permettant d'en exploiter pour leur survie.
Elle doit par ailleurs dédommager les Pygmées d'une manière adéquate pour toutes les pertes
subies et leur payer des redevances provenant des activités économiques existantes dans leurs
forêts converties en réserve naturelle.

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