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AJ Pénal

AJ Pénal 2020 p.269

Droit pénal de la famille

Maud Léna, Rédactrice en chef

L'essentiel
Alors qu'un décret d'application de la loi n° 2019-1480 du 28 déc. 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille (adoptée juste après le
Grenelle contre les violences conjugales) déclenche la colère des défenseurs des victimes, une nouvelle proposition de loi visant à protéger les victimes
de violences conjugales est en passe d'être adoptée par le parlement.

La procédure accélérée avait été engagée par le gouvernement en décembre de l'année dernière, mais la crise sanitaire a naturellement
retardé les débats autour du texte. La proposition de loi visant à protéger les victimes de violences conjugales fait néanmoins partie des
premiers travaux à revenir au Parlement, notamment en raison de l'augmentation constatée de ce type de violences, aggravées par le
confinement. Adoptée par l'Assemblée nationale le 29 janvier, elle a été examinée et partiellement modifiée par le Sénat le 9 juin et fera donc
l'objet d'une commission mixte paritaire prochainement. La proposition de loi issue du Grenelle contre les violences conjugales vient
compléter la loi du 28 décembre 2019, en prévoyant notamment :

- une modification de l'article 138 du code de procédure pénale pour permettre au juge d'instruction ou au juge des libertés et de la
détention, dans le cadre d'un contrôle judiciaire, de suspendre le droit de visite et d'hébergement de l'enfant mineur dont la personne mise
en examen est titulaire ;

- l'interdiction des médiations familiales (mesures provisoires, C. civ., article 255) et pénales (alternatives aux poursuites, C. pr. pén., art. 41-
1) en cas de violences conjugales ou d'emprise d'un des époux sur l'autre ;

- l'obligation pour les juridictions de se prononcer sur la décharge de la victime de son obligation alimentaire à l'égard de l'auteur en cas de
violences physiques ou sexuelles dans le cadre conjugale ou lorsqu'elles revêtent un caractère incestueux ;

- l'autorisation pour le médecin ou le professionnel de santé d'informer le procureur de la République de faits soupçonnés de violences
conjugales même en l'absence d'accord de la victime, notamment lorsque celle-ci semble sous emprise (C. pén., art. 226-14).

Plus immédiatement, un décret (n° 2020-636 du 27 mai 2020 portant application des art. 2 et 4 de la loi n° 2019-1480 du 28 déc. 2019 visant à
agir contre les violences au sein de la famille) publié au journal officiel du 28 mai déclenche la colère des praticiens de la matière. Modifiant
en particulier l'article 1136-3 du code de procédure civile, le décret contraint le demandeur (souvent, la demanderesse) d'une ordonnance de
protection à signifier (c'est-à-dire par voie d'huissier) au défendeur la requête, les pièces et l'ordonnance fixant la date d'audience. Ce qui se
révèle quasiment impossible dans les faits. Or, l'obligation est prévue à peine de caducité. L'ensemble des professionnels montre leur
incrédulité face à ce texte « que l'on veut croire rédigée par des amateurs » (Par ex., J.-M. Garry et A. Boyard, D. actu. 5 juin 2020) et en
appelle à une correction rapide au moment où la ministre de la Justice annonce justement son intention d'encourager l'augmentation du
nombre d'ordonnances de protection prononcées par les juges aux affaires familiales. Se saisissant de la problématique, le Sénat a profité
de l'examen de la proposition de loi visant à protéger les victimes de violences conjugales pour suggérer de corriger la disposition en
prévoyant que la notification de la date d'audience d'ordonnance de protection soit faite par le ministère public.

Mots clés :
VIOLENCE VOLONTAIRE * Violence familiale * Protection des victimes * Ordonnance de protection * Secret professionnel * Grenelle
contre les violences conjugales

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