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Dalloz actualité 13 février 2020

Absence de droit au renouvellement d'un bail commercial pour un preneur non immatriculé au RCS

Civ. 3e, 23 janv. 2020, FS-P+B+I, n° 19-11.215

Maxime Ghiglino

Résumé
Le preneur à bail d'un terrain nu sur lequel sont édifiées des constructions ne peut pas revendiquer en justice le statut des baux commerciaux à défaut d'être
inscrit sur le registre du commerce et des sociétés à la date où le congé est donné. L'absence d'immatriculation prive également le preneur de son droit à une
indemnité d'éviction.

L'article L. 145-1, I, alinéa 1er, du code de commerce prévoit que le statut des baux commerciaux s'applique aux baux d'immeubles ou de locaux dans
lesquels un fonds est exploité. Le texte poursuit en précisant que l'application du statut des baux commerciaux nécessite que le fonds appartienne
soit à un commerçant ou à un industriel immatriculé au registre du commerce et des sociétés, soit à un chef d'une entreprise immatriculée au
registre des métiers, accomplissant ou non des actes de commerce. Ainsi, l'application du statut protecteur des baux commerciaux impose la
réunion de quatre conditions. Il faut à la fois un bail, un immeuble ou un local objet du bail, mais également l'exploitation par le preneur d'un fonds
dans les locaux loués et enfin l'immatriculation de ce dernier. À défaut, le statut protecteur des baux commerciaux n'est pas acquis.

Chacune de ces conditions a soulevé son lot d'interrogations. En ce sens, l'immatriculation du preneur n'a pas fait exception. Rapidement, la
jurisprudence a pu préciser que l'immatriculation n'est nécessaire que pour bénéficier du statut des baux commerciaux, notamment pour ce qui est
du droit au renouvellement (Civ. 3e, 1er oct. 1997, n° 95-15.842, Bull. civ. III, n° 179). Dans cette hypothèse, l'immatriculation n'est obligatoire qu'à
la date de délivrance du congé ou de la demande de renouvellement du bail. Si elle est intervenue postérieurement à la délivrance du congé,
l'immatriculation est dépourvue de tout effet rétroactif (Civ. 3e, 4 mars 1998, n° 96-13.556, Bull. civ. III, n° 52 ; AJDI 1998. 620 ; RDI 1998. 305,
obs. F. Collart-Dutilleul et J. Derruppé ). Le présent arrêt est venu préciser le champ d'application de ces principes.

En l'espèce, une société a consenti à une autre société un bail portant sur un terrain nu et l'a autorisée à y édifier des constructions. Le 28 avril
2014, le bailleur a notifié au preneur un refus de renouvellement du bail sans indemnité d'éviction pour défaut d'immatriculation au registre du
commerce et des sociétés de l'établissement secondaire situé dans les lieux. Après avoir régularisé son immatriculation, le preneur a assigné le
bailleur en nullité du congé et en paiement d'une indemnité d'éviction.

Les juges du fond ont considéré que le défaut d'immatriculation de la société au moment de la délivrance du congé fait obstacle à l'application du
statut des baux commerciaux. Le preneur a alors formé un pourvoi en cassation. Selon lui, l'article L. 145-1, 2°, du code de commerce est une
disposition autonome qui étend le bénéfice du statut des baux commerciaux aux baux de terrains nus sur lesquels ont été élevées des
constructions sans en subordonner l'application à la condition que le preneur soit immatriculé au registre du commerce et des sociétés au jour de
la délivrance d'un congé par le bailleur.

Se pose alors la question de savoir si l'article L. 145-1, I alinéa 1er, trouve à s'appliquer aux baux de terrains nus.

La Cour de cassation retient que « le preneur à bail d'un terrain nu sur lequel sont édifiées des constructions ne peut bénéficier du droit au
renouvellement du bail que confère le statut des baux commerciaux que s'il remplit les conditions exigées au premier alinéa de l'article L. 145-1 du
code de commerce tenant à son immatriculation et à l'exploitation d'un fonds ». Cette solution est en adéquation avec l'article L. 145-1, I, 2°, du
code de commerce qui étend l'application du statut de la propriété commerciale aux baux des terrains nus sur lesquels ont été édifiées soit avant,
soit après le bail, des constructions à usage commercial, industriel ou artisanal, à condition que ces constructions aient été élevées avec le
consentement exprès du propriétaire comme c'est le cas en l'espèce. D'ailleurs, les paragraphes II et III de l'article L. 145-1 précisent expressément
les cas dans lesquels la justification de l'inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers n'est pas requise.

Si la validité du bail n'est pas subordonnée à l'immatriculation du preneur au registre du commerce et des sociétés, le renouvellement du bail est
conditionné à cette immatriculation. Le défaut d'immatriculation, au jour où le congé est délivré ou au jour où la demande de renouvellement est
formulée, empêche le preneur de revendiquer une indemnité d'éviction prévue par le statut des baux commerciaux.

Enfin, il est à noter qu'en l'espèce, il s'agit d'un défaut d'immatriculation de l'établissement secondaire. Pour autant, l'absence d'immatriculation
secondaire ou complémentaire emporte la même conséquence pour l'établissement concerné que l'absence d'immatriculation de l'établissement
principal, à savoir l'inapplicabilité du statut protecteur des baux commerciaux et donc l'impossibilité de revendiquer d'une indemnité d'éviction.

Mots clés :

IMMOBILIER * Bail
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