Vous êtes sur la page 1sur 30

UE 5.

BASE DE LA VISION: ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE OCCULAIRE

Plan

INTRODUCTION

Chapitre 1. ANATOMIE DE L’ŒIL ET STRUCTURE ANNEXES

Chapitre 2. NEUROANATOMIE DE LA RETINE ET DU CORTEX

Chapitre 3. PHYSIOLOGIE OCCULAIRE

Chapitre 5. PERFORMANCE ET EVOLUTION DU SYSTEM VISUEL

Chapitre 4. LES VOIES VISUELLES

1
INTRODUCTION

L’œil est l’un des cinq organes de sens du corps humain. Sa fonction est la réception des stimuli visuels et
la transformation de ces informations lumineuses en influx nerveux transmis au cerveau (la vision).

La vision est le sens le plus développé chez L'être humain : on estime que 70 % des récepteurs sensoriels
de l'organisme sont situés dans les yeux et que près de la moitié du cortex cérébral participe à un aspect
ou à autres du traitement de l'information visuelle.

Le globe oculaire est une structure creuse logé dans une cavité osseuse appelée l’orbite (orbitaire du
crâne). Globalement de forme sphérique elle constitue une enveloppe sous tension comprenant
différentes structures transparentes dédiées à la transmission et la focalisation de l’information visuelle
sur la rétine, qui la réceptionne et la convertit en un signal interprétable par le système nerveux central.
L’œil humain mesure 24 mm diamètre sagittal, 23 mm diamètre transversal, 23 mm diamètre vertical et
pèse 7 grammes en moyenne. Il est composé généralement de tuniques, d'un cristallin et de liquides.

La tunique externe est la sclérotique, tissu conjonctif dense et peu vascularisé. Elle a un rôle de protection
de l'œil. C'est le blanc de l'œil, elle est entourée d'une membrane très fine et transparente,
appelée conjonctive. Du côté antérieur, cette sclérotique est remplacée par la cornée, transparente qui
permet l'entrée des rayons lumineux dans le globe oculaire. Elle est de plus riche en fibres nociceptives :
le contact avec un objet induit le clignement et la sécrétion lacrymale, deux fonctions de protection.

Le cristallin est une lentille biconvexe transparente, élastique avasculaire, situé en arrière de l’iris en-avant
du corps vitré entouré d’une capsule d’où il peut être extrait chirurgicalement. Sa plasticité permet de
modifier ses courbures et son indice de réfraction (l’accommodation).

Les liquides représentent la dernière partie constituée de l’humeur aqueuse (liquide incolore et limpide
constamment renouvelé, responsable du maintien de la pression intraoculaire, remplit l’espace compris
entre le cristallin et la cornée) et le corps vitré (substance transparente semi-liquide/visqueux qui remplit
la cavité oculaire en arrière du cristallin).

2
Chapitre 1. ANATOMIE DE L’ŒIL

Introduction

L'œil (bulbe de l'œil) est une sphère creuse légèrement irrégulière. Comme sa forme ressemble à celle du
globe terrestre on dit qu'il présente deux pôles ; le pôle antérieur (le point situé le plus à l'avant) et le pôle
postérieur (le point situé le plus à l'arrière). L’œil adulte est une sphère d’un diamètre d’environ 2,5cm.
Seul le sixième antérieur de la surface de l’œil est visible; le reste est entouré et protège par un coussin de
graisse et par les parois osseuses de l’orbite.

L’œil humain présente une anatomie complexe comprenant diverses structures. Celles-ci ont chacune un
rôle à jouer, tel que la protection du globe oculaire, la réception et la transmission de l’influx nerveux.
L’œil peut être divise en 3 parties : l’orbite oculaire, les structures composant la partie externe de l’œil
et enfin les structures composant la partie interne de l’œil.

La paroi de l’œil est composée de trois tuniques : d’une tunique fibreuse (sclérotique et cornée), d'une
tunique vasculaire uvée (choroïde + corps ciliaire + l’iris) et d'une tunique interne (rétine) qui est remplie
de liquide qui lui donne sa forme.

1. L’orbite oculaire

L’orbite oculaire a notamment pour rôle d’assurer la protection de l’œil. Elle se compose d’une cavité
osseuse, de muscles oculomoteurs, de nerfs (moteurs, sensitifs et végétatifs), de graisse ainsi que d’un
réseau de tissu conjonctif.

1.1. Structure osseuse

L’orbite est une structure pyramidale composée de parois osseuses d’une épaisseur de 1mm avec :

- l’os frontal ;

- l’os zygomatique ;

- l’os maxillaire ;

- l’os lacrymal ;

- l’os ethmoïde ;

- l’os sphénoïde.

3
Parmi cette structure se trouve des fissures permettant le passage de nerfs et de veines, des foramens,
mais également une ouverture appelée le canal optique permettant le passage du nerf optique (figure 1).

Figure 1. Anatomie de l’orbite de l’œil

1.2. Muscles oculomoteurs

L’orbite comprend 4 muscles droits oculomoteurs (supérieur, inferieur, médial, latéral) et 2 muscles
obliques (supérieur, inferieur). Situes dans le tissu adipeux de l’orbite, ces muscles permettent à l’œil de
se maintenir au-dessus du plancher orbitaire mais aussi de régler les mouvements des globes oculaires.

Un muscle traverse également l’orbite : le muscle releveur de la paupière. Celui-ci s’insère sur le bord
supérieur de la paupière supérieure.

L’orbite ainsi que les parties externes de l’œil constituent les éléments de protection du globe oculaire.

2. Partie externe de l’œil

2.1. Paupières

Les paupières supérieures et inferieures délimitent la fente palpébrale large de 30 mm. Elles assurent la
protection du globe oculaire et permettent également la répartition et le drainage des larmes. C’est le
clignement palpébral qui est responsable de l’élimination des débris cellulaires et d’une répartition
homogène des larmes sur la cornée. Le clignement palpébral peut également être un réflexe participant
alors à la protection de l’œil. Les cils sont également impliqués dans la protection du globe oculaire. La
fermeture des paupières est assurée par la contraction du muscle orbitaire qui est compose de fibres

4
musculaires annulaires. L’ouverture des paupières dépend principalement de la contraction du muscle
releveur de la paupière supérieure. Les paupières sont recouvertes d’un tissu conjonctif comprenant un
épithélium de 2 a plusieurs couches de cellules prismatiques sur leur face interne dont l’ensemble forme
la conjonctive palpébrale.

2.2 L’appareil lacrymal

Les larmes sont composées de plusieurs éléments :

- d’eau, secrétée par les glandes lacrymales et les glandes conjonctivales ;

- de mucus, secrété par les cellules caliciformes conjonctivales, qui permet l’adhésion du liquide lachrymal
a épithélium cornéen ;

- d’une couche lipidique, secrétée par les glandes de Meibomus (retrouvées dans les paupières), qui réduit
l’évaporation des larmes ;

- de protéines en faible quantité.

Les glandes lacrymales, de la taille de petites amandes, se situent au niveau de la partie super temporale
des orbites dans la fosse lacrymale. Elles sont responsables de la sécrétion reflexe des larmes.

Les larmes sont excrétées au niveau du fornix supérieur-temporal, un cul-de-sac formé par la conjonctive
est localisé entre la paupière et le globe oculaire. Comme précisé précédemment, elles sont reparties de
manière homogène sur l’œil par les clignements palpébraux. Elles sont ensuite évacuées au niveau des
méats ou points lacrymaux supérieurs et inférieurs situes à l’extrémité nasale des paupières. Elles
transitent ensuite dans les canalicules supérieur et inferieur qui débouchent sur le sac lacrymal ou 80%
des larmes seront réabsorbées. De là, les larmes restantes rejoignent la cavité pharyngonasale via le canal
lacrymo-nasal (figure 2).

5
Figure 2. Schéma du système lacrymal et du trajet des larmes

2.3. Conjonctive

La conjonctive est la muqueuse transparente vascularisée qui recouvre la partie antérieure du globe
oculaire jusqu’a la cornée et la partie postérieure des paupières (figure 3). Elle participe à la sécrétion des
larmes. En effet, elle contient les cellules caliciformes nécessaires à la sécrétion de la composante
mucineuse des larmes mais aussi des glandes conjonctivales nécessaires à la composante aqueuse. La
conjonctive permet de faciliter le frottement des paupières sur la cornée ainsi que le mouvement même
des globes oculaires. Elle joue également un rôle de protection contre les micro-organismes.

6
Figure 3. Schéma d’une coupe sagittale de l’œil humain

2.4. La sclère

La sclère, appelée également sclérotique est une coque blanche rigide composée essentiellement de
lamelles de collagène une protéine qui lui confère la résistance et la rigidité. Elle recouvre la partie
postérieure du globe oculaire et est en continuité avec la cornée via une zone de jonction appelée le limbe.
Au niveau de cette zone, la sclère se transforme pour donner le stroma (structure interne de la cornée).
Elle permet l’insertion des muscles oculomoteurs. Malgré sa faible épaisseur allant de 1 mm au pôle
postérieur à 0,3 mm au niveau des tendons, la sclère est résistante.

2.5. La cornée

La cornée est un disque transparent d’un diamètre moyen de 12 mm et d’une épaisseur allant de 500 μm
en son centre a 700 μm en périphérie (figure 4). Elle n’est pas vascularisée mais présente une forte
sensibilité liée a une innervation provenant du nerf trijumeau. Sa nutrition est assurée par l’humeur
aqueuse, par le film lacrymal et par la diffusion à partir des vaisseaux limbiques.

Sa structure anatomique est particulière. Il est retrouvé (de l’extérieur vers l’intérieur) (figure 4):

- un épithélium non kératinise aplati pluristratifié comprenant 7 a 8 couches ;

- la membrane de Bowman acellulaire ;

7
- le stroma (qui représente 90% de l’épaisseur cornéenne avec 200 à 300 lamelles) composé d’une
substance fondamentale, de fibres de collagène et de kératocèles ;

- la membrane de Descemet acellulaire ;

- un endothelium unistratifié.

Figure 4. Schéma de la structure anatomique cornéenne

La transparence de la cornée est assurée par le maintien des fibres de collagène stromales dans un état
de déshydratation relative grâce a une pompe ionique endothéliale (flux allant du stroma vers la chambre
antérieure). La cornée a pour but principal la transmission et la réfraction de la lumière avec une puissance
de réfraction de 43,25 dioptries. Elle est également impliquée dans la protection de l’œil contre les micro-
organismes. La slère et la cornée représentent l'enveloppe externe de l'œil, (tunique fibreuse du bulbe),
et sont essentiellement composées d'un tissu conjonctif dense et peu vascularisé.

NB. La cornée est le seul tissu qu'on peut transplanter sans risque de rejet (où avec des risques minimes).
En effet, elle ne contient aucun vaisseau sanguin et se trouve donc hors de portée du système immunitaire.

3. Partie interne de l’œil

3.1. Le globe oculaire

Le globe oculaire présente une forme sphérique et un diamètre d’environ 23 mm. L’intérieur de l’œil
comprend 2 tuniques ;

- la tunique vasculaire (ou couche médiane) qui comprend l’uvée c’est a dire la choroïde, les corps ciliaire
et l’iris ;

8
- la tunique interne qui comprend la rétine ainsi que l’épithélium pigmentaire.

Le globe oculaire se compose de différentes structures (figure 3). La chambre antérieure (entre la cornée
et l’iris) et la chambre postérieure (entre l’iris et le cristallin) contenant l’humeur aqueuse a raison de 0,2
à 0,3 mL. En arrière du cristallin se situe le corps vitre (ou l’humeur vitrée), qui est une masse gélatineuse
composée d’environ 95% d’eau, de dépôts d’acide hyaluronique, de fibrilles de collagène et de
muccopolysaccharides lui conférant sa consistance.

Le corps vitre assure une protection lors de traumatisme oculaire en jouant le rôle d’amortisseur.

L’iris est constitué de fibres musculaires, de vaisseaux et de cellules pigmentées sur sa face postérieure.
La quantité de pigment détermine la couleur des yeux : les yeux clairs ont moins de pigments que les yeux
foncés. La pupille correspond à la partie centrale ouverte de l’iris. La dilatation de la pupille dépend d’un
muscle lisse radiaire tandis que la contraction dépend d’un muscle lisse annulaire. Cette structure permet
de limiter la dispersion lumineuse intraoculaire et de contrôler la quantité de lumière atteignant la rétine.
L’iris est en continuité avec la choroïde via les corps ciliaires impliques dans la sécrétion de l’humeur
aqueuse. La choroïde se situe entre la rétine et la sclère. C’est un tissu vascularise qui fournit l’oxygène et
les nutriments nécessaires au fonctionnement de la rétine.

3.2. L’humeur aqueuse

3.2.1. Rôle et composition

L’humeur aqueuse assure le bon fonctionnement de la cornée mais aussi la nutrition du cristallin en leur
apportant l’oxygène, le glucose ainsi que les acides aminés qu’elle contient. C’est un liquide transparent,
acellulaire, qui ne comprend pas de grosses protéines. L’humeur aqueuse maintient également une
pression intraoculaire (PIO) normale au sein de la chambre antérieure du globe oculaire. Cette PIO est
normalement comprise entre 10 et 20 mmHg. Au-dela de 21 mmHg on parle d’hypertonie oculaire.

3.2.2 Fabrication

L’humeur aqueuse est secrétée au niveau des corps ciliaires, structures réunissant la choroïde et l’iris. Ce
sont les procès ciliaires, qui ne sont autre que des plis au niveau de la face interne des corps ciliaires, qui
sont responsables de la formation de l’humeur aqueuse.

3.2.3 Elimination

L’humeur aqueuse, qui circule de la chambre postérieure vers la chambre antérieure, est évacuée a 80%
au niveau du trabeculum situe dans l’angle iridocornéen (angle situe au niveau de la chambre antérieure,

9
entre la cornée et l’iris). Plus précisément, elle est éliminée à travers le canal de Schlemm avant de
rejoindre la circulation veineuse. Les 20 % d’humeur aqueuse restantes sont évacuées par la voie
uvéosclérale au niveau de l’espace supraciliaire et suprachoroïdien (figure 5).

Il existe un équilibre entre la formation et l’élimination de l’humeur aqueuse. Une perturbation de cet
équilibre peut entrainer des pathologies oculaires.

Figure 5. Schéma représentant l’angle iridocornéen ainsi que la circulation de l’humeur aqueuse

3.3. Le cristallin

Le cristallin, situé en arrière de la chambre postérieure (figure 5), présente la forme d’un disque compose
de cellules allongées pouvant être assimilables à des fibres riches en protéines et pauvres en organites
intra cytoplasmiques. Ces fibres se trouvent regroupées de manière plus dense au centre du cristallin
formant un noyau dur entouré de fibres moins denses qui constituent le cortex. L’ensemble de ces fibres
formant le cristallin est contenu dans une capsule élastique et déformable permettant l’accommodation.
Le cristallin se caractérise par sa transparence liée aux protéines particulières contenues dans ses fibres,
son absence de vascularisation et son implication dans l’accommodation.

En effet, des fibres zonulaires relient les corps ciliaires au cristallin. C’est la tension exercée au niveau de
ces fibres via les muscles ciliaires qui permet de faire l’accommodation au niveau du cristallin. Le cristallin
fait donc office de lentille biconvexe aplatie sur sa face antérieure d’un diamètre de 9 à 10 mm et dont
l’épaisseur en son centre atteint 3 à 4 mm.

10
3.4 La rétine

La rétine a pour rôle la transformation des images reçues en signaux électriques. Sur la rétine se situe une
région centrale comprenant la macula (ou tache jaune) assurant la vision centrale et la vision des couleurs.
En son centre se trouve la fovéa ou l’acuité visuelle est la plus importante. La région périphérique de la
rétine donne la vision périphérique, la vision nocturne et permet l’élaboration du champ visuel (figure 6).

La rétine est vascularisée par l’artère et la veine centrale de la rétine ainsi que par la choroïde.

L’artère centrale de la rétine se divise de manière dichotomique et terminale. Les capillaires rétiniens ne
sont pas retrouvés au niveau de la macula.

La rétine est une structure transparente composée de 2 feuillets :

- le feuillet pigmentaire ou épithélium pigmentaire de la rétine (EPR) (stratrum pigmenti) ;

- le feuillet photo-sensoriel (stratum cérébrale).

Figure 6. Schéma de la rétine

3.4.1 Le feuillet neuro-sensoriel ou retine neuro-sensorielle

Ce feuillet (la rétine comprend 10 couches (figure 6) :

1) Epithélium. Pigmentaire ;

2) Portion interne et externe des cônes et bâtonnets ;

3) Membrane limitente externe ;

4) Couche Granulaire externe ;

11
5) Couche plexi forme externe ;

6) Couche granulaire interne ;

7) Couche plexi forme interne ;

8) Couche des cellules ganglionnaires ;

9) Couche des fibres nerveuses (axones des cellules ganglionnaires) ;

10) Membrane limitante interne.

Figure 7 : Coupe schématique de la structure rétinienne

La lumière parvient au niveau des photorécepteurs qui peuvent être de 2 types : cônes ou
bâtonnets. Ceux-ci n’ont pas la même répartition ni le même rôle au sein de la rétine (tableau 1
et figure 7). Ces photorécepteurs contiennent des pigments visuels qui sont composes d’une
structure non protéique (le rétinal) et d’une structure protéique (l’opsine). Ces pigments

12
subissent des modifications structurelles et biochimiques lors de l’exposition lumineuse
entrainant l’hyperpolarisation des photorécepteurs.
L’influx électrique est ensuite transmis à des interneurones faisant la liaison entre les
photorécepteurs et les cellules ganglionnaires appelées les cellules bipolaires. Les influx peuvent
être modulés par les cellules horizontales au niveau de la couche plexi forme externe et par les
cellules amacrines au niveau de la couche plexiforme interne. Ces cellules horizontales et
amacrines forment l’appareil associatif de la rétine. L’influx sensoriel transite ensuite par les fibres
nerveuses non myélinisées des cellules ganglionnaires pour rejoindre la papille du nerf optique.

3.4.2. L’épithélium pigmentaire de la rétine


Ce feuillet correspond à la couche externe de la rétine. Il se compose d’une seule couche de
cellules isoprismatiques et repose sur une membrane basale d’une épaisseur de 2 μm appelée la
membrane de Bruch. Cette dernière sépare la choroïde de la rétine (figure 8).
Ces cellules ont plusieurs rôles :
- drainage de l’eau et des métabolites ;

13
- recyclage du rétinol nécessaire a la synthèse des pigments visuels ;
- renouvellement des photorécepteurs ;
- atténuation des dommages potentiels de la dispersion lumineuse.

3.4.3. La macula
La macula est une zone centrale de la rétine mesurant entre 5 et 6 mm de diamètre qui assure
la vision centrale. La fovéa, en son centre, se démarque par la seule présence de
photorécepteurs à type de cône. Aucunes des autres couches de la rétine neurosensorielle ne
sont retrouvées sur son site (figure 8).

Figure 8 : Schéma de la structure rétinienne au niveau de la fovéa

3.5 Nerf et papille optique


La papille optique est un disque de 1,5 mm de diamètre qui présente une excavation centrale
appelée la cupule optique reconnaissable à sa couleur pale. C’est le lieu de convergence des fibres
optiques. Elle correspond physiologiquement à la tache aveugle car elle ne contient aucun
photorécepteur. Le nerf optique correspond au prolongement des axones des cellules
ganglionnaires rétiniennes au niveau du pôle postérieur du globe oculaire. C’est une extension

14
cérébrale d’environ 45 mm de longueur et de 3 à 4 mm de diamètre. Il se compose d’environ un
million d’axones qui se retrouvent myélinisés en arrière du globe oculaire. Le nerf optique est
protège par les méninges (notamment la pie-mère, l’arachnoïde, la dure-mère) ainsi que par des
oligodendrocytes.
3.6. Les autres annexes
Les annexes sont des structures situées autour de l’œil qui contribuent à son fonctionnement
efficace. Dans les parties précédentes, nous avons étudié les paupières, la conjonctive, l’appareil
lacrymal.

3.6.1. Les muscles


3.6.1.1. Muscles extra-oculaires/oculomoteurs
Ce sont des muscles qui amarrent le globe oculaire aux parois orbitaires facilitant ainsi sa
mobilité. Ces muscles sont constitués de :

- Quatre muscles qui prennent origine au sommet de l’orbite par un tendon commun appelé
tendon de Zinn qui s’insère sur le corps du sphénoïde, au niveau du tubercule :
 Le droit supérieur est élévateur, il agit en synergie avec le muscle releveur de la paupière
supérieure ;
 Le muscle droit inférieur est abaisseur, il est antagoniste du droit supérieur ;
 Le muscle droit latéral qui est abducteur (porte la cornée en dehors) ;
 Le muscle droit médial qui est adducteur (porte la cornée en dedans) et antagoniste du
muscle droit latéral.
- Deux muscles obliques inférieur et supérieur :
 Le muscle oblique supérieur (abaisseur lorsque l’œil est en adduction, rotateur interne
lorsque l’œil est en abduction ;
 Le muscle oblique inférieur (élévateur lorsque l’œil est en adduction, rotateur
externe lorsque l’œil est en abduction).

Ces muscles sont innervés par les paires de nerfs crâniens numéro 3,4 et 6 qui synchronisent les
mouvements conjugués des yeux.

15
Figure 9. Schéma du globe oculaire avec les muscles oculomoteurs

3.6.1.2. Muscles palpébraux


Quatre muscles interviennent dans la mécanique palpébrale :
- Le muscle releveur de la paupière supérieur (élève la paupière supérieure) ;
- Les muscles tarsaux supérieur (sa contraction élargit la fente palpébrale) ;
- Les muscles rétracteurs de la paupière inférieure (leur contraction élargit la fente palpébrale) ;
- Le muscle orbiculaire de l’œil (la fermeture de la paupière).

Figure 10. Schéma des muscles palpébraux

16
Chapitre 2. NEUROANATOMIE DE LA RETINE

La rétine des vertébrés est située entre la choroïde et le vitré. En général elle comprend la rétine
neurosensorielle et l’épithélium pigmentaire rétinien. Elle est organisée en couches stratifiées
comprenant les cellules responsables de propager le signal visuel au niveau des aires cérébrales
via le nerf optique.

2.1. La rétine neurosensorielle

C’est au sein de la rétine neurosensorielle que le message lumineux, véhiculé par les photons, est
transformé en message nerveux interprétable par le cerveau. De par son origine embryonnaire,
la rétine neurosensorielle appartient au système nerveux central. Comme tous les tissus nerveux,
elle est composée de cellules nerveuses et de cellules gliales.

2.1.1 Les cellules nerveuses

La rétine contient 5 types de cellules nerveuses qui sont les photorécepteurs, les cellules
horizontales, les cellules bipolaires, les cellules amacrines et les cellules ganglionnaires (« retinal
ganglion cell », RGC) (Figure 11).

D’un point de vue histologique, les cellules sont organisées en plusieurs couches (Figure
7). De l’extérieur de l’œil vers l’intérieur, on distingue:

- la couche des photorécepteurs (segments externes et internes des photorécepteurs), en contact


avec l’épithélium pigmentaire rétinien (‘’retinal pigmentary epithelium’’, RPE) ;

- la couche nucléaire externe (corps cellulaires des photorécepteurs) ;

- la couche plexiforme externe (synapses photorécepteurs/cellules bipolaires) ;

- la couche nucléaire interne (corps cellulaires des cellules horizontales, bipolaires et amacrines,
ainsi que les corps cellulaires des cellules gliales de Müller) ;

- la couche plexiforme interne (synapses cellules bipolaires/RGC)

- la couche des RGC (corps cellulaires des RGC)

17
- la couche des fibres nerveuses (axones des RGC en amont du nerf optique), en contact avec le
vitré.
Cette organisation permet aux populations neuronales de communiquer successivement entre
elles afin d’acheminer l’information visuelle des photorécepteurs, du point de détection de la
lumière et de genèse du signal nerveux, jusqu’au cerveau. Les photorécepteurs, les cellules
bipolaires et les RGC relaient l’information visuelle via la libération d’un neurotransmetteur
excitateur : le glutamate. Les cellules horizontales et les cellules amacrines relarguent des
neurotransmetteurs inhibiteurs, GABA pour les premières et GABA ou glycine pour les secondes.

Figure 11. Anatomie de la rétine. (A) Schéma simplifié de l’organisation cellulaire de la rétine.
(B) Coupe histologique de rétine de rat colorée à l’hématoxyline/éosine.
ILM : Membrane limitante interne, NFL : couche des fibres nerveuses, GCL : couche des cellules
ganglionnaires, IPL : couche plexiforme interne, INL : couche nucléaire interne, OPL : couche
plexiforme externe, ONL : couche nucléaire externe, OML : membrane limitante externe, IS :
18
segments internes des photorécepteurs, OS : segment externe des photorécepteurs, RPE :
épithélium pigmentaire rétinien, BrM : membrane de Bruch.

2.1.1. Les photorécepteurs


Les photorécepteurs sont les cellules rétiniennes qui assurent la transduction visuelle, c’est-à-
dire la conversion des photons lumineux détectés en un signal électrique. Ce mécanisme est
permis par la présence de photopigments enchâssés dans la membrane des disques, organites
contenus dans les segments externes des photorécepteurs (Figure 12). Chez tous les vertébrés,
les photopigments visuels appartiennent à la famille des opsines, qui sont l’association d’un
récepteur couplé aux protéines G et d’un chromophore, le 11-cis-rétinal.

Figure 12. Structure simplifiée des photorécepteurs et d’un photopigment, la rhodopsine

19
* La transduction visuelle
L’excitation d’un photopigment par un photon entraîne l’isomérisation du 11-cis-rétinal en all-
trans-rétinal, ce qui modifie la conformation de l’opsine. Sous cette nouvelle conformation,
l’opsine est dite active car capable de lier une protéine G, la transducine, et de l’activer à son tour.
La cascade de signalisation qui suit, dont le second messager est le GMP cyclique, aboutit à
l’hyperpolarisation de la membrane du photorécepteur. L’hyperpolarisation membranaire se
traduit par une réduction de la libération de glutamate par le photorécepteur qui, en absence de
stimulation lumineuse, relargue ce neurotransmetteur en continu et à un taux constant. La
réduction de libération de glutamate est détectée par les neurones qui font synapse avec le
photorécepteur (cellules horizontales et bipolaires) et représente le codage de l’information
visuelle sous forme de message neuronal. Afin de pouvoir assurer un nouveau cycle, le système
de transduction visuelle doit au final revenir à son état basal. Pour cela, la transducine et ses
effecteurs sont inactivés, le taux de GMPc cytoplasmique est restauré et les photopigments sont
recyclés.
*Les bâtonnets et les cônes
Chez la plupart des vertébrés, on distingue 2 types de photorécepteurs : les bâtonnets et les
cônes. Ils contiennent un panel spécifique de molécules de phototransduction (opsines,
transducine, phosphodiestérases, canaux, …) qui leur confèrent des propriétés différentes de
détection de la lumière. La spécificité cône/bâtonnet est encore amplifiée par un circuit neuronal
rétinien propre à chaque type de photorécepteur.
- Les bâtonnets sont responsables de la vision crépusculaire, c’est-à-dire qu’ils sont mis en jeu
uniquement pour des intensités lumineuses faibles car ils sont très sensibles à la lumière. Les
bâtonnets contiennent un seul type d’opsine, la rhodopsine. Ils ne permettent donc pas de
discriminer les couleurs.
- Les cônes sont responsables de la vision diurne. Ils ont une sensibilité 100 fois inférieure à celle
des bâtonnets. Les opsines des cônes sont de 4 types: les opsines « Long Wavelength (L) sensibles
au rouge, les « Middle Wavelengh » (M) sensibles au vert et les « Short Wavelengh » (S) sensibles
aux UV (S1, absentes chez les mammifères) et au bleu (S2). Les cônes permettent ainsi une vision

20
en couleur. Enfin, les cônes ont une meilleure résolution spatiale que les bâtonnets et assurent
donc la vision de précision.
La proportion, la répartition et la densité des cônes et des bâtonnets sont différentes selon les
espèces et les régions de la rétine. Chez la plupart des mammifères, le nombre de bâtonnets est
supérieur au nombre de cônes. La dominance des bâtonnets est d’autant plus marquée chez les
espèces nocturnes. A titre d’exemple, chez la souris de laboratoire la rétine contient seulement 3
% de cônes, en moyenne. La proportion de cônes est plus élevée chez les animaux diurnes,
comme le porc (15 % de cônes en moyenne) et le cochon d’inde (autour de 12 %). Chez certaines
rares espèces purement diurnes, comme l’écureuil terrestre, la rétine contient plus de cônes que
de bâtonnets. Le cas des primates diurnes, dont l’Homme fait partie, est particulier. Dans ces
espèces, les cônes représentent seulement 5 à 7% des photorécepteurs, mais ils sont concentrés
dans une zone spécialisée de la rétine, la macula. Au centre de la macula, une petite dépression
nommée fovéa ne contient que des cônes. Il s’agit donc de la zone où l’acuité visuelle est la plus
forte.
2.1.2. Les cellules bipolaires
Les cellules bipolaires sont les neurones qui relaient l’influx nerveux, issu des photorécepteurs,
aux RGC (Figure 11). Chaque cellule bipolaire reçoit des informations de plusieurs
photorécepteurs, mais d’un seul type, cônes ou bâtonnets. La fovéa fait exception, puisque dans
cette zone de la rétine chaque bipolaire est connectée à un seul photorécepteur, cône en
l’occurrence.
Le codage de l’information visuelle par les cellules bipolaires est complexe. Il dépend notamment
de la quantité de lumière reçue par les photorécepteurs et met en jeu des cellules bipolaires ON,
qui sont dépolarisées lors d’une exposition à la lumière, et des cellules bipolaires OFF, qui sont
au contraire activées dans l’obscurité.
2.1.3. Les cellules horizontales et les cellules amacrines
Les cellules horizontales et les cellules amacrines sont deux types cellulaires qui modulent le
signal nerveux transmis aux cellules bipolaires et aux RGC, afin d’augmenter l’acuité de
l’information visuelle qui sera acheminée vers le cerveau. Plus précisément, les cellules
horizontales agissent au niveau des synapses entre les photorécepteurs et les cellules bipolaires

21
alors que les cellules amacrines agissent au niveau des contacts entre les cellules bipolaires et les
RGC (Figure 11). Les cellules horizontales procèdent notamment au phénomène d’inhibition
latérale, c’est-à-dire qu’elles suppriment l’influx nerveux issu des photorécepteurs localisés en
périphérie de la cellule bipolaire dont elles sont en charge. Le principe est similaire pour les
cellules amacrines.
2.1.4. Les cellules ganglionnaires (RGC)
Les RGC sont les neurones qui relaient l’information visuelle de la rétine au cerveau. Dans la
rétine, ils sont en connexion avec les cellules bipolaires et les cellules amacrines. Leurs axones
circulent dans la couche des fibres nerveuses et se regroupent à l’arrière du globe, au niveau de
la papille, pour former le nerf optique (Figure 11 et 13).
*Une multitude de types de RGC aux fonctions spécifiques
On distingue plusieurs types de RGC selon leurs caractéristiques morphologiques (arborisation
dendritique), électrophysiologiques et moléculaires (expression de marqueurs spécifiques). Ces
caractéristiques confèrent aux populations de RGC une sensibilité différente aux stimuli visuels,
ce qui augmente encore la précision du message transmis au cerveau.
Chez l’Homme les recherches sont récentes et l’identification des types de RGC encore à ses
débuts.
Parmi les RGC en nombre plus minoritaire, nous pouvons citer les RGCip (60 cellules/mm2) et les
RGCα (40 cellules/mm2). Grâce à l’expression d’un photopigment, la mélanopsine, les RGCip sont
intrinsèquement photosensibles, c’est-à-dire qu’elles sont directement stimulées par la lumière.
La plupart de ces cellules projettent dans des aires cérébrales qui n’assurent pas la formation
d’image et sont impliquées dans la régulation du rythme circadien et la mise en place du réflexe
photomoteur de la pupille.
* Distribution topographique et marqueurs des RGC
La distribution topographique des RGC sur la rétine est généralement étudiée par marquage des
cellules sur rétine mise à plat, ou flatmount. Chez l’Homme, la densité de RGC est plus élevée
au centre de la rétine qu’en périphérie. Le maximum est atteint dans une ellipse entourant la
fovéa (35000 RGC/ mm2), où chaque RGC reçoit les informations issues d’un seul cône : on parle
de convergence minimum du signal visuel.

22
*La papille optique et la lame criblée
Les axones des RGC forment la couche des fibres nerveuses. Ils convergent vers la papille optique,
ou tête du nerf optique, qui correspond à la zone de liaison intraoculaire avec le nerf optique. A
cet endroit, la sclère est interrompue et remplacée par une structure poreuse traversée par les
fibres nerveuses, la lame criblée. Elle correspond à un tissu conjonctif élastique contenant des
cellules gliales (astrocytes) et des microvaisseaux. La lame criblée a un rôle de soutien mécanique
et fonctionnel pour les axones en transit vers le nerf optique. Des orifices centraux plus larges
assurent le passage de l’artère et de la veine centrale de la rétine.

Figure 13. Anatomie simplifiée de la tête du nerf optique et de la lame criblée.


La pie-mère, couche protectrice du nerf optique en contact avec les fibres nerveuses n’est pas
représentée.
* Le nerf optique et les connexions cérébrales
Le nerf optique est composé de l'ensemble des axones des RGC, myélinisés pour augmenter la
vitesse de conduction de l’information visuelle, et est enveloppé dans une gaine protectrice, les
méninges. La dure-mère est l’enveloppe la plus externe des méninges, en continuité avec la
sclère. La pie-mère est la couche la plus interne et l’arachnoïde la couche médiane. L’espace entre
la pie-mère et l’arachnoïde est rempli de liquide céphalorachidien, qui joue notamment le rôle
d’amortisseur des chocs.

23
En plus de conduire le message visuel, les axones des RGC (et donc le nerf optique) sont un lieu
d’échange d’organites et de macromolécules entre le corps cellulaire, les bourgeons synaptiques
et l’aire cérébrale dans laquelle ils projettent. Les macromolécules concernées sont notamment
des facteurs neurotrophiques essentiels à la survie des RGC. Les flux sont bidirectionnels : ils sont
antérogrades (depuis le corps cellulaire) et rétrogrades (vers le corps cellulaire).
Le nerf optique, après un trajet intra-orbitaire, pénètre dans le secteur crânien par le canal
optique. Il rejoint ensuite le chiasma optique situé sur la face ventrale du cerveau. Le chiasma
optique est le lieu de rencontre des fibres nerveuses du nerf optique de l’œil droit et de celles du
nerf optique de l’œil gauche. Certains axones se croisent et projettent dans l’aire cérébrale
opposée (projections controlatérales) et d’autres projettent dans l’aire située du même côté que
l’œil dont elles sont issues (projections ipsilatérales).
Au final, les axones des RGC se terminent dans le corps genouillé latéral du thalamus et/ou dans
le colliculus supérieur du tronc cérébral. L’information est ensuite transmise à d’autres régions
du cerveau, comme les cortex visuels primaire et secondaire. Les RGCip, qui ne sont pas
responsables de la transmission d’une information nécessitant la formation d’images, projettent
principalement dans le noyau suprachiasmatique de l’hypothalamus (régulation du rythme
circadien) et dans les noyaux de l’aire prétectale du tronc cérébral (réflexe pupillaire).

2.2. Les cellules gliales


La glie rétinienne comprend des cellules macrogliales, cellules de Müller et astrocytes, ainsi que
des cellules microgliales. Ces cellules communiquent entre elles de façon coordonnée, afin de
soutenir la fonction neuronale et de maintenir l’homéostasie de la rétine en condition
physiologique et pathologique.
2.2.1. Les cellules de Müller
Les cellules de Müller constituent 90% de la macroglie rétinienne, le reste étant représenté par
les astrocytes.
* Morphologie des cellules de Müller
Les cellules de Müller traversent entièrement la neurorétine, en s’étendant de la couche des
fibres nerveuses (axones des RGC) à la couche nucléaire externe (corps cellulaires des
photorécepteurs) (Figure 11A). La morphologie des cellules de Müller est similaire chez tous les

24
vertébrés. Elle présente néanmoins quelques variations, de taille notamment, entre les espèces
mais aussi entre les zones topographiques de la rétine (rétine centrale ou périphérique).
Au sein des couches rétiniennes, les cellules de Müller émettent de petits prolongements, les
procès lamellaires, qui entourent les corps cellulaires des neurones et les vaisseaux. Côté vitré,
elles développent une structure nommée pied qui assure les échanges avec ce milieu. D’une
cellule à une autre, les pieds sont contigus et constituent la membrane limitante interne de la
rétine. Face à l’espace sous rétinien, les prolongements apicaux des cellules de Müller sont
attachés aux segments internes des photorécepteurs, formant ainsi la membrane limitante
externe. En plus des jonctions d’adhérence, la membrane limitante externe posséderait des
jonctions serrées, faisant de cette structure une barrière sélective. Sur leur pole apical, les cellules
de Müller arborent un ensemble de microvillosités propices aux échanges avec les segments
externes des photorécepteurs et l’épithélium pigmentaire rétinien (RPE), qui fait face aux
vaisseaux choroïdiens.
Ainsi, d’une part les cellules de Müller établissent des relations très étroites, presque
symbiotiques, avec les neurones des différentes couches rétiniennes et, d’autre part, elles sont
en contact avec les milieux d’échange qui sont les capillaires sanguins de la rétine, le vitré et
l’espace sous-rétinien.
*Des cellules au service des neurones
Chaque cellule de Müller constitue, avec les neurones auxquels elle est associée, une unité
fonctionnelle (Figure 14) : les neurones assurent la transduction visuelle et la cellule de Müller
permet que toutes les conditions soient réunies pour le bon fonctionnement des neurones. Dans
ce but, les cellules de Müller exercent des rôles nombreux et variés.
Une des principales fonctions des cellules de Müller est d’assurer et réguler des échanges entre
la rétine et les milieux environnants, c’est-à-dire la circulation sanguine et le vitré. Ainsi, les
cellules de Müller servent de support métabolique aux neurones, en leur apportant des substrats
énergétiques (glucose, lactate) et en éliminant leurs déchets. Elles contribuent également à
l’homéostasie du milieu extracellulaire, notamment par le maintien de l’équilibre hydrique (via
l’Aquaporine 4) et potassique (via les canaux Kir 4.1), ainsi que par le recyclage du glutamate (via
les transporteurs EAAT1/2 et l’enzyme Glutamine synthétase). Les cellules de Müller sont

25
également impliquées dans la modulation du tonus des capillaires rétiniens, via le relargage de
molécules vasoactives. Ceci permet d’adapter le flux sanguin qui parvient à la rétine interne en
fonction de l’activité neuronale.
En plus de recapter le glutamate, neurotoxique en excès, et de fournir aux neurones les
précurseurs des neurotransmetteurs, les cellules de Müller sont capables de libérer des
gliotransmetteurs, modulant ainsi la transmission synaptique.
En outre, les cellules de Müller synthétisent des facteurs neurotrophiques, des facteurs de
croissance ainsi que des cytokines essentielles à la survie des neurones et à la croissance axonale.
Il s’agit par exemple du ‘’brain-derived neurotrophic factor’’ (BDNF), du ‘’ciliary neurotrophic
factor’’ (CNTF) et du ‘’basic fibroblast growth factor’’(BFGF).
La rétine est un tissu très exposé à l’oxydation, notamment de par sa forte consommation en
dioxygène et la peroxydation lipidique causée par l’exposition lumineuse. Les cellules de Müller
participent à la lutte contre le stress oxydatif, via notamment la synthèse d’antioxydants comme
la glutathionne. Elles sont également en charge du recyclage des photopigments, mécanisme
indispensable pour que la transduction visuelle puisse avoir lieu, grâce à l’enzyme ‘’cellular
retinaldehyde-binding protein’’ (CRALBP). Par ailleurs, les cellules de Müller sont un soutien
physique de l’architecture tissulaire de la rétine. Il est également connu qu’elles guident les
rayons lumineux de la surface de la rétine jusqu’aux photorécepteurs, jouant ainsi le rôle de fibres
optiques vivantes.

26
Figure 14. Principales fonctions assurées par les cellules de Müller.
Glu : glutamate, Gln : glutamine, GSH : glutathionne réduite, GSSG : glutathionne oxydée, NADPH
: nicotinamide adenine dinucleotide phosphate.

2.2.2. Les astrocytes


Les astrocytes sont le second type de cellules macrogliales de la rétine. Ils résident principalement
dans la couche des fibres nerveuses et la couche nucléaire interne, où ils co-localisent avec les
vaisseaux. Ils sont également présents tout le long du nerf optique. Comme les cellules de Müller,
les astrocytes constituent une interface entre les vaisseaux et les neurones. Le réseau astrocytaire
forme une trame indispensable au développement du réseau vasculaire rétinien. Les astrocytes
sont également essentiels pour la formation et le maintien des barrières hémato-rétiniennes. Ils
possèdent de nombreux autres rôles en commun avec les cellules de Müller, tels que la
production de facteurs neurotrophiques et la régulation de l’équilibre hydrique.

27
2.2.3. Les cellules microgliales
Les cellules microgliales sont les cellules immunitaires résidentes de la rétine. Ce sont des cellules
très ramifiées, de petite taille comme leur nom l’indique. Les cellules microgliales jouent un rôle
crucial dans la lutte contre les pathogènes, elles surveillent en permanence l’intégrité de leur
micro-environnement rétinien. Ces cellules présentent à la fois des caractéristiques de
macrophages, comme la phagocytose, et de cellules présentatrices d’antigènes. A l’instar des
cellules macrogliales, la microglie synthétise des facteurs neurotrophiques et anti-
inflammatoires. Enfin, les cellules microgliales sont essentielles au maintien de la structure et de
la fonctionnalité des synapses.
2.2.4. La gliose rétinienne
Tout dommage de la rétine est suivi de l’activation des cellules gliales, ou gliose. Le but est de
préserver au maximum l’intégrité rétinienne en favorisant la survie neuronale, la restauration des
homéostasies et la réparation tissulaire.
D’un point de vue morphologique, la gliose se traduit par une hypertrophie des cellules de Müller
et des astrocytes. Les cellules microgliales perdent leurs ramifications et prennent une forme dite
amiboïde. Elles sont également capables de migrer dans les couches rétiniennes endommagées.
D’un point de vue fonctionnel, la gliose se traduit par une intensification des rôles déjà assurés
par les cellules gliales, comme par exemple une augmentation de la sécrétion des facteurs
neuroprotecteurs. Dans plusieurs modèles de lésions rétiniennes dommageables pour les RGC
(glaucome, pincement du nerf optique) il a été montré que l’activation de la macroglie est
favorable à la régénération axonale, sans doute via l’expression de divers facteurs trophiques. La
gliose permet également l’expression de nouvelles fonctions par les cellules gliales. Par exemple,
certaines cellules de Müller sont capables de se dédifférencier en cellules souches rétiniennes, de
migrer sur le site de l’agression et de régénérer une partie des neurones perdus (très limitée chez
les mammifères).
Certaines des réponses mises en place au cours de la gliose sont dites spécifiques car elles
dépendent du stress subi. Selon les cas, la glutamine synthétase est ainsi sur ou sous-exprimée
dans les cellules de Müller. En cas de perte rapide des photorécepteurs, qui représentent la
majorité des neurones glutamatergiques, l’expression de la glutamine synthétase est diminuée.

28
Elle est au contraire augmentée au cours de pathologies entraînant l’accumulation
d’ammoniaque dans la rétine.
La gliose n’est pas toujours positive pour la survie des neurones. Si à court terme elle est
neuroprotectrice, elle est au contraire délétère lorsque maintenue dans le temps, comme au
cours de pathologies neurodégénératives chroniques (glaucome, dégénérescence maculaire liée
à l’âge,…). Prenons l’exemple des cellules de Müller. La dé-différentiation d’un petit nombre de
cellules en progéniteurs neuronaux est positive pour la régénération tissulaire. En revanche, si la
gliose persiste et qu’un nombre important de cellules de Müller n’assure plus ses fonctions,
l’homéostasie rétinienne est compromise.
2.3. L’épithélium pigmentaire rétinien
Le RPE est un épithélium monostratifié composé de cellules cuboïdes pigmentées. Le pôle apical
des cellules fait face à l’espace sous-rétinien et à la membrane limitante externe de la
neurorétine. Il présente un ensemble de microvillosités entourant les segments externes des
photorécepteurs. Côté basal, les cellules reposent sur la membrane de Bruch, elle-même en
contact avec les capillaires choroïdiens. Latéralement, les cellules du RPE sont jointives grâce aux
jonctions serrées qui assurent la cohésion entre leurs membranes.
Le RPE exerce des rôles essentiels au fonctionnement de la rétine (Figure 15). Tout d’abord, il
s’agit d’une zone d’échange entre la neurorétine et les capillaires choroïdiens, hautement
sélective de par l’étanchéité des jonctions serrées qui existent entre les cellules. Le RPE constitue
de ce fait la barrière hémato-rétinienne externe. Il est également impliqué dans la protection de
la rétine contre la photooxydation via l’absorption de la lumière grâce aux pigments qu’il contient,
via la synthèse d’antioxydants comme la superoxide dismutase et via sa participation au
renouvellement des segments externes des photorécepteurs. Une autre fonction du RPE est
d’assurer le recyclage du ‘’all trans-retinal en 11-cis-retinal’’, processus essentiel au cycle visuel
des photorécepteurs. Enfin, les cellules épithéliales synthétisent des facteurs de croissance,
comme le ‘’pigment epithelium-derived growth factor’’ (PEDF), indispensables à la survie des
photorécepteurs.

29
Figure 15. Principaux rôles de l’épithélium pigmentaire rétinien

30

Vous aimerez peut-être aussi