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La période Yamato, qui s'étend de 250 à 710, voit l'émergence de la première forme
d'État structuré. Lors de sa première partie, de grands tertres funéraires, ou
kofun, sont bâtis, et, progressivement, la région du Kansai s'impose en tant que
centre politique. Au VIe siècle, le bouddhisme, arrivé au Japon via la Chine et la
Corée, bouleverse profondément la vie politique du pays ; une constitution en
17 articles d'inspiration bouddhique est rédigée en 604 pour encadrer le
fonctionnement de l'État. De nombreux immigrés originaires des royaumes coréens
façonnent la vie politique et les arts de l'archipel japonais.
Du VIIIe siècle au XIIe siècle, une culture classique portée par une cour impériale
se développe. Très influencée par des modèles continentaux dont elle s'émancipe dès
le Xe siècle, elle est à l'origine d'œuvres comme le Tōdai-ji ou Le Dit du Genji.
C'est aussi à cette époque que la scène politique se divise entre le pouvoir
impérial, et celui de chefs de clans. Les clans Fujiwara, Taira, et Minamoto vont
tour à tour accaparer la plupart des rouages de l'administration. Des famines
sévissent régulièrement dans le pays, et l'insécurité qui s'installe entraîne la
création d'une classe sociale de combattants, ou bushi.
Le Moyen Âge japonais s'étend du XIIe siècle à la fin du XVIe siècle. Après la
guerre de Genpei, qui s'achève en 1185, le pays est dirigé pour la première fois
par un gouvernement extérieur à la cour impériale : le bakufu, basé dans la région
du Kantō. Ce gouvernement guerrier, dirigé par le clan Hōjō marque l’époque de
Kamakura (鎌倉時代, Kamakura jidai?, 1185–1333), l'une des 14 subdivisions
traditionnelles de l'histoire du Japon. Cette période, qui commence en 1185 et
s'achève en 1333, est placée sous l'autorité politique du shogunat de Kamakura et
constitue la première partie du « Moyen Âge » de l'histoire japonaise. Le
gouvernement guerrier en place est ensuite dirigé par les Ashikaga, qui structurent
le pays à partir de 1336. L'époque Sengoku, ou époque des provinces en guerre, clôt
ce Moyen Âge, marqué par de grandes turbulences sociales et politiques et un
morcellement du pays en plusieurs provinces et potentats. La réunification
politique du pays est cependant réalisée sous l'impulsion successive des chefs
militaires Oda Nobunaga, Toyotomi Hideyoshi, puis Tokugawa Ieyasu.
Sommaire
Préhistoire
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Âge de pierre
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Le Paléolithique
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Les premiers vestiges d'industrie humaine, des pierres polies, remontent à environ
32 000 ans, et constituent les traces du début du paléolithique postérieur au
Japon. Cette période s'étend jusqu'à 10 000 ans avant notre ère. Découverts
initialement à Iwajuku, mais se retrouvant dans la totalité du territoire japonais,
ces artéfacts se présentent sous la forme de haches, des pointes de lances, et des
couteaux. Il y a 22 000 ans, la population est estimée à environ 10 000 habitants,
et vit principalement de la chasse. La période suivante s'étale de 12 000 à
10 000 ans avant notre ère et se démarque par l'apparition de lames de pierre plus
fines dans deux foyers distincts. Au nord-est de Honshū et à Hokkaido, leurs formes
de coin s'apparentent à celles retrouvées autour du lac Baïkal, alors qu'à l'ouest
leurs formes arrondies s'apparentent à celles retrouvées dans le sud de la Chine.
Les changements climatiques ainsi que la disparition de certains gibiers entraînent
un glissement du régime alimentaire de ces premiers habitants vers une alimentation
plus riche en végétaux.
Période Jōmon
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Depuis la fin du XIXe siècle les débats, qui touchent aussi parfois les manuels
scolaires, sur les origines ethniques et culturelles des actuels habitants de
l'archipel se polarisent sur la question de l'identité culturelle japonaise. Depuis
la fin de la Seconde Guerre mondiale la référence aux textes anciens, comme le
Kojiki et le Nihon shoki, s'est atténuée tandis que la population manifestait un
véritable engouement pour les découvertes archéologiques concernant les périodes
Jōmon et Yayoi. Les fouilles du site Yayoi de Toro (Shizuoka), à la fin des années
1940, puis l'article de Tarō Okamoto en 1952 et ses tours de l'Exposition
universelle d'Osaka en 1970 qui faisaient l'éloge de la culture Jōmon, opposaient
deux modèles de société : le modèle Yayoi d'une communauté agricole et pacifique,
le modèle Jōmon d'une société non-hiérarchique à l'esthétique « moderne ». Les
chantiers de fouille se sont, depuis, multipliés comme nulle part au monde. Les
objets ont alimenté des musées locaux et de nombreux sites ont fait l'objet d'une
présentation pédagogique immersive, en particulier les parcs archéologiques de
Sannai Maruyama et Yoshinogari.
Protohistoire
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Période Yayoi
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La culture Yayoi, du nom d'un type de poterie propre à cette époque, se développe à
partir de 800 avant notre ère dans l'ouest de l'archipel, et coexiste dans un
premier temps avec la culture Jōmon, jusque vers environ 400 AEC, date initiale
retenue traditionnellement. Initialement centrée sur le nord de Kyūshū, elle se
caractérise par l'usage d'une riziculture inondée, technique importée de Chine via
la Corée, et s'étend jusqu'au IIIe siècle. L'usage de greniers surélevés pour
stocker les récoltes apparaît. Contrairement à d'autres régions du monde, l'essor
de l'agriculture ne s'est pas accompagné au Japon d'un développement de l'élevage.
Des objets en bronze et en fer apparaissent simultanément. La matière première
n'est pas extraite sur place, mais est importée sous forme de lingot et est fondue
dans des moules. De grandes cloches de bronze, des épées et des pointes de lances,
ou encore des tama sont façonnées et ensevelies dans un but cérémoniel.
La région est pour la première fois citée dans des sources écrites du IVe siècle
venant de Chine. Le peuple habitant l'archipel est désigné sous le nom de Wa, et
décrit comme étant réparti en une centaine de principautés, certaines entretenant
des relations commerciales avec les Hans. Selon la chronique des Wei, ces
principautés se seraient fédérées sous l'autorité de la reine Himiko, dans la
région du Yamatai.
Période Kofun
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Les relations politiques avec les royaumes coréens s'intensifient. Les chefs Wa
dépendant de la péninsule pour leurs approvisionnements en métaux, il est probable
que ceux-ci aient ainsi cherché à sécuriser les circuits d'échanges. Dès le
Ve siècle, des alliances militaires se forgent avec Baekje et des troupes Wa
interviennent dans la péninsule pour combattre contre les royaumes de Silla et du
Koguryo. C'est via ces alliances que des artisans qualifiés entrent dans
l'archipel, et apportent avec eux des technologies comme le tissage de la soie, la
fabrication de papier, la fonte de métaux... Des lettrés du continent maîtrisant
l'écriture chinoise émigrent également. Des relations avec les pouvoirs chinois
sont aussi entretenues par des ambassades, et des sources de l'empire du Milieu
témoignent de l'existence de cinq rois de Wa au cours du Ve siècle.
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Période d'Asuka
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Le bouddhisme fait son entrée au Japon vers le VIe siècle. En 538 ou 552,
l'empereur Kinmei reçoit une statue de Bouddha ainsi que des sutras de la part du
roi coréen de Baekje, alors que des moines bouddhistes venant de la péninsule
convertissent déjà depuis quelques années des habitants de l'archipel. Bien
qu'étant en contradiction avec les systèmes de croyances locaux, cette nouvelle
spiritualité religieuse est bien accueillie, tout comme le taoïsme et le
confucianisme. Elle touche dans un premier temps l'aristocratie, et certains chefs
se convertissent à titre personnel ou entraînent avec eux l'ensemble de leur clan.
Une troisième crise politique s'ouvre en 672 lorsque la guerre de Jinshin éclate,
opposant le fils de l'empereur Tenji, le prince Ōtomo, à son oncle, Ōama. Ce
dernier, s'appuyant sur des chefs régionaux mécontents des dépenses somptuaires du
régime et des échecs militaires en Corée, s'impose lors de la bataille décisive de
Setabashi. Contrairement à ses prédécesseurs, il prend immédiatement le titre
d'empereur sous le nom de Tenmu et adopte la dénomination de Tennō en remplacement
de celle d'Ōkimi, dirigeant non plus Yamato mais Nihon. Il entame une série de
réformes institutionnelles afin de renforcer le pouvoir impérial. L'empereur est
associé aux divinités locales et son ascendance divine affirmée — au sanctuaire
d'Ise, le culte de la déesse tutélaire du pays, Amaterasu, est instrumentalisé.
Dans le même temps, la propagation du bouddhisme est encouragée et son organisation
est placée sous le contrôle de l'État.
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Sur le continent, la Chine des Sui et la Corée du Koguryo sont en conflit au début
du VIIe siècle. Le pouvoir Wa, se voulant l'égal du pouvoir chinois, tente de faire
reconnaître ses prétentions sur la péninsule, diplomatiquement en envoyant des
ambassades en 600 et en 607 à la cour chinoise — les premières depuis 478 —, et
militairement en 600 et en 623 en envoyant des troupes en Corée, mais celles-ci
sont défaites. En 630 une nouvelle expédition militaire est envisagée, mais les
partisans du statu quo l'emportent, et les relations s'apaisent momentanément avec
Silla.
La Chine des Tang entreprend au milieu du VIIe siècle de conquérir la péninsule
coréenne, avec le soutien militaire de Silla. Sortant de sa position de neutralité,
le pouvoir japonais s'allie au royaume coréen de Baekje et organise une
intervention militaire afin de reprendre pied dans la péninsule. La coalition
chinoise met fin à ses ambitions en 663 lors de la bataille navale de Hakusukinoe.
Vaincu, le gouvernement japonais cherche par la suite à apaiser la situation en
envoyant deux ambassades aux Tang en 665 et 669. Les conflits dans la péninsule ont
cependant pour effet d'inciter de nombreux immigrés qualifiés à émigrer, ce qui
favorise le transfert de techniques et de modes de pensées et d'organisation.
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Lors d'une phase allant d'environ 750 à 850, la maison impériale reste dominante
dans les affaires du pays. L'ascension au pouvoir de l'empereur Kanmu en 781 puis
celle de son fils Saga en 809 marquent l'apogée de cette période. Sous l'impulsion
de ceux-ci, la décision est prise de déplacer la capitale vers Nagaoka-kyō (784),
puis vers Heian-kyō (794) afin d'échapper à l'influence des moines bouddhistes de
Heijō-kyō. Ils favorisent par ailleurs la construction de nouveaux temples, ainsi
que l'émergence de nouvelles écoles de pensée bouddhistes, dont les écoles Tendai
(et son Enryaku-ji) et Shingon (et son Tō-ji), de manière à concurrencer celles
restées à Heijō-kyō. Ils réforment l'administration de façon à la rendre plus
efficace et à faciliter son contrôle, et repoussent les populations non soumises
d'Emishi vers le nord, au-delà de l'actuel Morioka.
D'environ 850 à 1050, le clan des Fujiwara domine la conduite du pays en assurant
une forme de régence héréditaire. Déjà très liée à la famille impériale depuis le
renversement du clan Soga de 643, cette association se renforce lorsque Fujiwara no
Yoshifusa devient en 858 le régent, ou sesshō, du futur empereur Seiwa, assurant
ainsi la réalité du pouvoir. Son fils Fujiwara no Mototsune hérite de cette charge
en 873. L'empereur devenu majeur en 887, il est promu Kanpaku. Les Fujiwara
s'assurent par des mariages du maintien des liens tissés avec la famille impériale,
et parviennent à modifier le Ritsuryō pour capter un nombre grandissant de
richesses. La puissance de la famille culmine lors du XIe siècle sous la direction
de Fujiwara no Michinaga puis de son fils Fujiwara no Yorimichi entre 1016 et
1078 ; elle s'affaiblit par la suite en raison de dissensions familiales et de la
montée en puissance des empereurs retirés.
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Le climat du Japon connaît entre le milieu du VIIe siècle et 1100 une hausse
significative des températures, dont les conséquences se font sentir sur
l'agriculture. Entre le VIIe siècle et le IXe siècle, un nombre important de
famines est enregistré, frappant en moyenne tous les trois ans (au niveau local ou
national), et ayant la plupart du temps été causées par des épisodes de sécheresse.
Des recherches archéologiques mettent en évidence des phénomènes de stérilisation
des sols de terres cultivées entre la fin du Xe siècle et le premier quart du
XIe siècle ; des domaines agricoles sont abandonnés autant dans l'est que dans
l'ouest du pays.
Lors des périodes Nara et Heian, la riziculture se développe sur les flancs de
montagne et les fonds de vallée ; l'eau de ruissellement et de pluie de mousson y
est plus simple à capter. Dans certaines régions comme le Kinai, l'érosion des sols
engendrée par l'exploitation forestière fragilise ce type de culture ; les bassins
rizicoles sont alors moins souvent irrigués, et plus souvent encombrés par des
débris minéraux et végétaux. La cour impériale publie des décrets (11 entre 693 et
840) pour obliger les agriculteurs à planter des céréales sèches, une alternative
au riz en cas de mauvaise récolte lors d'épisodes de sécheresse.
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L'État continue d'étendre son contrôle sur l'archipel. L'ouest du Tōhoku est
soumis, et en 712 la province de Dewa y est créée. Le sud de Kyūshū est conquis au
début du VIIIe siècle. Des colons s'installent dans ces régions et y introduisent
la riziculture. Dans l'ensemble des provinces, l'administration centrale impose la
rédaction de Fudoki, rapports portant sur divers aspects de la vie locale. Les
recensements de populations, et les cadastrages s'y développent aussi.
Dans le domaine géopolitique, le pays entretient des relations avec la Chine des
Tang, et y envoie une ambassade importante environ tous les 20 ans. Celle-ci peut
compter jusqu'à 600 personnes, et le retour au Japon de ces envoyés permet au pays
de connaître les dernières évolutions culturelles chinoises. Certains de ces
Japonais s'implantent durablement en Chine ; un lettré comme Abe no Nakamaro
devient un proche de l'empereur Tang Daizong. Les relations avec la Corée des Silla
sont plus tendues, mais des ambassades sont cependant échangées. La Corée agit
comme un intermédiaire entre le Japon et la Chine. Des relations sont aussi
entretenues avec le royaume de Parhae qui succède au royaume de Koguryo, et une
première ambassade arrive à Heijō-kyō en 727. Trente suivent jusqu'en 926 ; le
Japon en envoie treize lors de la même période.
La culture connaît lors de l'ère Tenpyō de 729 à 767 un dynamisme important. Elle
est façonnée par les goûts de la cour et les grands chantiers liés au bouddhisme
comme ceux du Tōshōdai-ji ou du Tōdai-ji. Des sculptures gigantesques sont
construites pour décorer ces temples. Dans le domaine littéraire, le Kaifūsō
compilé en 751 et le Man'yōshū compilé vers 760 rassemblent des poèmes composés
pour certains dans la première moitié du VIIe siècle. Les auteurs sont avant tout
des gens de la cour, mais des œuvres de soldats ou de paysans sont aussi présentes.
Les thèmes portent sur l'amour, la nature, ou encore le travail et la misère de
l'époque, dans la capitale ou dans les provinces.
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Les relations avec les pays étrangers fluctuent selon les secteurs. Si les échanges
politiques se font plus rares du Xe siècle au XIe siècle, les commerçants venant de
Chine ou de Corée continuent à développer leurs activités dans l'archipel. La
dernière ambassade est envoyée en 838 en Chine alors que la dynastie Tang commence
à péricliter. La situation est comparable en Corée jusqu'à l'unification de la
péninsule par le Goryeo au début du Xe siècle.
Le pays connaît une période de paix relative, bien que des agitations puissent
perdurer dans les provinces. Si la guerre de Trente-huit ans (三十八年戦争?), qui
s'achève en 802, permet de pacifier le Tōhoku, certaines zones comme l'actuelle
préfecture d'Aomori restent hors du contrôle impérial, et des révoltes ont lieu
(prise d'Akita en 878). Plus largement, les provinces commencent à jouer un rôle
plus important dans l'histoire nationale. Une élite s'y développe à partir du
Xe siècle, et devient de plus en plus autonome vis-à-vis du pouvoir central. Ses
revenus grandissants lui permettent de lever des forces armées pour mater les
émeutes. Une nouvelle classe de combattants, les Bushi, fait alors son apparition
vers 900 et est utilisée pour faire face à l'insécurité qui se généralise dans les
provinces comme dans la capitale.
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En 1150 la population japonaise compte environ sept millions d'individus (avec une
densité moyenne de 24 habitants au kilomètre carré), dont 40% vivent dans le Kinai
(environ 1,4 million d'habitants, soit 60 habitants au kilomètre carré) ou dans le
Kantō (environ 1,6 million d'habitants, soit 50 habitants au kilomètre carré).
Le siècle de Kamakura
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À partir de la fin du XIIe siècle, une série de chefs guerriers exercent le pouvoir
au nom de l'empereur depuis leur capitale de Kamakura dans le Kantō. Pour la
première fois dans l'histoire du Japon, le pouvoir est exercé par un groupe
extérieur à la cour impériale et localisé hors du Kansai. Minamoto no Yoritomo, qui
sort victorieux de la guerre de Genpei en 1185, reçoit de la cour le titre de
seiitai shōgun et prend la tête du bakufu, ou « gouvernement de la tente ». Faute
d'héritier mâle en âge de régner, c'est le clan de sa femme, Hōjō Masako, le clan
Hōjō, qui s'approprie le pouvoir à sa mort en 1199 et le conserve pendant plus d'un
siècle.
Hōjō Masako dirige les affaires de l'État de 1199 jusqu'à sa mort en 1225, alors
que le nouveau régime doit faire face à des tentatives de déstabilisation venant de
la cour impériale restée à Kyoto. Elle fait éliminer son propre fils Minamoto no
Yoriie en 1203, ainsi que des membres du clan Hiki duquel il était proche, et fait
nommer shogun son second fils Minamoto no Sanetomo. En 1213, elle écarte du pouvoir
Wada Yoshimori qui occupait un poste clef dans l'administration et qui est accusé
de comploter. Ceci permet aux Hōjō de confisquer des domaines appartenant aux clans
écartés du pouvoir, consolidant ainsi leurs bases économiques et sécurisant les
zones situées autour de Kamakura, celles-ci devenant contrôlées par des Hōjō et par
leurs alliés. Minamoto no Sanetomo meurt assassiné, sans héritier, en 1219. Étant
donné qu'il était proche de l'empereur retiré Go-Toba avec qui il entretenait une
correspondance épistolaire, son assassinat devient prétexte à une intervention de
la cour. Go-Toba tente de renverser le pouvoir sans succès lors de la révolte de
Jōkyū en 1221. En réaction, l'empereur et sa descendance sont exilés loin de Kyoto,
et les terres des nobles ayant appuyé la révolte sont confisquées par le shogunat.
Dès lors, et jusqu'à la chute du régime un siècle plus tard, l'équilibre du pouvoir
bascule du côté de Kamakura.
Les Hōjō mettent en place à partir de 1221 plusieurs institutions pour consolider
leur pouvoir dans tout le pays. Un poste de contrôleur militaire, ou Tandai, de la
capitale Kyoto est créé en 1221 et son titulaire siège au palais de Rokuhara. Un
« conseil des treize » est créé en 1225 pour encadrer les décisions importantes du
régime. Le shogunat devient plus pacifié et plus stable avec les successeurs de
Hōjō Masako. Cependant, la branche aînée des Hōjō écarte du pouvoir les branches
cadettes de la famille, ce qui n'est pas sans entraîner quelques rébellions,
notamment en 1246. Le régime prend efficacement appui sur des hommes-liges ou
gokenin, auxquels il redistribue des domaines confisqués à des opposants ; en
contrepartie, ils doivent se soumettre à une série d'obligations envers le
shogunat. Ce début de système féodal perdure lors des époques suivantes. Les
institutions judiciaires sont aussi modernisées en plusieurs étapes (1221 voit la
création d'une cour d'appel ; en 1249, des postes de magistrats instructeurs sont
créés. En 1232, est publié le recueil juridique Goseibai Shikimoku).
À partir des dernières années du XIIIe siècle, le régime des Hōjō doit faire face à
plusieurs difficultés. La centralisation des pouvoirs dans les mains de cette
famille au détriment des hommes-liges entraîne un coup d'État à Kamakura en 1285.
Le clan Adachi, soutien du régime, est éliminé, et plusieurs centaines de vassaux
se voient confisquer leurs terres. Cette répression coupe la famille Hōjō de
plusieurs de ses appuis les plus puissants dans le Kantō, parmi lesquels plusieurs
se retournent contre eux lors de la chute du régime. Dans le même temps, la
situation sociale des guerriers tend à se dégrader dans le pays, ce qui provoque
des troubles de plus en plus importants. Malgré un édit en 1291 qui tente sans
succès de sécuriser les revenus des guerriers, le régime se coupe progressivement
de sa base sociale, alors que le pays traverse des vagues de violences. Dans ce
contexte défavorable au régime des Hōjō, l'accession au pouvoir de l'empereur Go-
Daigo en 1318 permet d'unifier plusieurs opposants au bakufu. Après deux complots
infructueux en 1324 et 1331, la guerre de Genkō, qui commence en 1331, porte au
pouvoir l'empereur Go-Daigo en 1333 et marque la fin du régime de Kamakura.
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Cette hausse des productions agricoles permet l'essor d'une économie d'échanges, et
favorise le développement des métiers de l'artisanat et du commerce. Dans les
grandes villes, aux abords des temples ou des lieux de passages comme les ponts,
les marchés deviennent plus fréquents et se développent. Les guildes, qui ont
commencé à exister depuis la période précédente, sont à présent assez structurées
pour demander des exemptions de taxes ou des monopoles de vente, et bénéficient de
la protection des administrations provinciales, des propriétaires de domaines ou de
sanctuaires. À l'échelle du pays, les voies de commerces maritimes comme terrestres
(Tōkaidō) prennent de l'importance, et des agglomérations apparaissent à leurs
abords (Tsuruga, Onomichi, etc.). Dans les villes plus importantes comme Kyoto, des
quartiers spécialisés se constituent (quartiers dédiés aux poissonniers, aux
artisans du cuivre, aux brasseurs de saké...). La condition féminine s'améliore,
les femmes participant activement aux activités économiques, mais une population de
hinins (« non humains ») constituée d'artisans dits exposés à la souillure
(tanneurs, équarrisseurs...), victimes de discriminations et de tabous, apparaît
aussi, surtout dans l'Ouest du pays.
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La seconde partie du Moyen Âge est marquée par de nombreuses luttes de pouvoir, et
le recours à la violence se banalise. Le délitement de l'État central est le
résultat d'une grande instabilité des couches dirigeantes. Économiquement, les
dynamiques mises en place au cours de l'époque Kamakura se maintiennent et
s'amplifient : le niveau de vie continue d'augmenter, une hausse portée par un
accroissement du commerce international et des productions artisanales.
Morcellement politique
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Second shogunat
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Durant la seconde moitié du XVe siècle, l'autorité des shoguns vacille dans les
provinces. Les Ashikaga concentrent leur contrôle sur le Kinai, alors que les
grands vassaux exercent librement leur pouvoir sur leurs propres domaines. Lorsque
la période médiévale s'achève, les Ashikaga ne jouent plus qu'un rôle secondaire,
le pouvoir réel tombant entre les mains des seigneurs locaux.
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Culture et société
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Sur le plan architectural, le style shinden, utilisé pour les palais des grandes
familles des époques précédentes, est supplanté par le style shoin d'inspiration
bouddhique zen. Les jardins d'agrément évoluent ; ils deviennent plus petits, et
combinent pierres, sable, végétation et eau agencés de manières symboliques,
établissant ainsi un lien entre esthétique et religion. Des éléments comme des
pavillons de thé font aussi leur apparition. Le Ginkaku-ji (1482) et le Daisen-in
(1509) de Kyoto sont représentatifs de ce style nouveau. Cette architecture permet
de dynamiser la sociabilisation des élites, favorisant ainsi l'essor de certaines
expressions artistiques comme la poésie, la peinture, le théâtre ou le cérémoniel
lié au thé. Ce dernier accède au rang d'art, et une pratique particulière, le wabi-
cha, voit le jour au XVIe siècle.
Le style Sumi-e fait son apparition dans le domaine de la peinture, alors que se
perpétue le style yamato-e apparu dès l'Antiquité japonaise, modernisé par l'école
Tosa dès le XVe siècle puis par l'école Kanō.
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L'unification du pays
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Tokugawa Ieyasu, un des généraux de Toyotomi Hideyoshi, prend la tête d'une faction
militaire. Il s'assure la maîtrise du pays après la bataille de Sekigahara en 1600,
et obtient de l'empereur le titre de shogun en 1603. Le titre est transmis à son
fils dès 1605 pour assurer la mise en place d'une dynastie, mais il conserve la
réalité du pouvoir jusqu'à sa mort en 1616. Par le contrôle des mines et des ports,
il s'assure de la maîtrise du système monétaire. Il force ses vassaux à détruire
leurs fortifications. Son petit-fils Tokugawa Iemitsu impose en 1635 le système du
sankin-kōtai qui oblige tous les grands seigneurs féodaux à vivre un an dans la
ville d'Edo où siège le shogun. Les ressources financières de ces seigneurs,
contraints à mener un train de vie luxueux, et les velléités de révolte sont ainsi
réduites. Ceux-ci ont par ailleurs interdiction de se rendre à Kyoto et de
rencontrer l'empereur.
Arrivée du christianisme
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L'État s'efforce de renforcer son contrôle sur les différents courants religieux.
Une tentative d'instauration d'un culte à Tokugawa Ieyasu, divinisé, est entreprise
par ses successeurs. Un sanctuaire, le Tōshō-gu, est construit à Nikkō en 1617,
mais la lignée impériale étant toujours bien présente, l'initiative ne suscite pas
le moindre intérêt dans la population. Les tensions grandissantes entre bouddhistes
et chrétiens entraînent l'interdiction de cette dernière religion en 1613, et, en
un quart de siècle, elle disparaît presque totalement du pays. Les dirigeants
japonais redoutent que les divisions religieuses n'entraînent à terme des divisions
politiques dans le pays.
Dans le domaine commercial, les relations avec l'étranger sont plutôt encouragées
par le nouveau régime. Le début du régime des Tokugawa correspond à l'arrivée de
nouveaux commerçants européens, qui concurrencent les Portugais dans la région. Le
premier navire hollandais, dirigé par un Anglais, arrive en 1600. Des licences sont
octroyées à ces bateaux pour pouvoir commercer. Si la Chine de la dynastie Ming
refuse d'accorder aux commerçants japonais des autorisations commerciales, des
négociations avec les autorités coréennes sont entamées avec plus de succès. Les
Tokugawa ont refusé de prendre part à la guerre d'Imjin, ce qui met les Coréens
dans de bonnes dispositions. Une délégation coréenne arrive dans le pays en 1607,
mais elle est comprise par le pouvoir Tokugawa comme un signe de soumission, et les
négociations tournent court. Le shogun ouvre certains ports aux marchands
européens, chinois et coréens, mais, devant la concurrence grandissante, des
mesures protectionnistes sont prises. Dès 1604, le commerce de la soie est
réglementé. Vers 1612-1614, la dynamique s'inverse, et les Tokugawa cherchent à
limiter au maximum les échanges avec les commerçants étrangers. Le nombre de ports
ouverts au commerce est réduit progressivement, et en 1635 un édit interdit aux
Japonais de se rendre à l'étranger. En 1639, l'accès au pays est interdit aux
Portugais, laissant aux seuls Hollandais la possibilité de commercer avec le Japon.
Pour les autres commerçants asiatiques, seuls quatre ports restent ouverts :
Nagasaki (pour la Chine), Tsushima (pour la Corée), Satsuma (pour les Ryūkyū), et
Matsumae (pour les Aïnous).
La « Pax Tokugawa »
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La victoire des Tokugawa permet au Japon de connaître une longue période de paix
intérieure, avec une pacification progressive de la société, ainsi qu'un
développement économique important. Ces éléments, favorables au nouveau régime,
inscrivirent son action dans la durée. Le pays connaît une phase d'essor
démographique et économique allant de la fin du XVIe siècle au début du
XVIIIe siècle. Les progrès techniques permettent la mise en culture de nouvelles
terres ainsi que la canalisation de plusieurs fleuves, entraînant une hausse des
rendements agricoles.
Stratification de la société
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Une structuration de la société en trois groupes est mise en place sous les
Tokugawa, divisant celle-ci entre les guerriers, les roturiers vivant dans les
villages et dont l'activité est tournée vers l'agriculture, et les roturiers vivant
en ville. Inspirée du taoïsme, cette division sociale est liée à la naissance, et
fixe les professions et lieux d'habitation accessibles à chacun. Une souplesse
d'application du modèle théorique existe à l'époque. À ces différents groupes
sociaux s'ajoutent les nobles de la cour, les moines et les parias qui ne rentrent
pas dans le schéma théorique. Les guerriers forment une classe dirigeante qui
compte environ 2 millions de personnes en 1700, soit 6 à 7 % de la population
nationale, et sont au cœur d'un réseau d'obligations vassaliques envers leurs
seigneurs. Les roturiers de campagne représentent entre 70 et 80 % de la
population, la plupart agriculteurs, les roturiers de ville représentant entre 10
et 15 % de la population. Dans ces deux dernières classes existe un rang de riches
notables propriétaires de leurs terres ou de leurs habitations, qui représentent
une minorité de la population. Les hinins (artistes de foire, comédiens,
prostituées) et les etas (« souillés ») représentent entre 1 et 2 % de la
population, auxquels s'ajoutent les mendiants et les Aïnous. Ces différents statuts
sociaux peuvent se manifester dans les costumes, les coiffures, ou la forme des
toits des habitations.
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Sur le plan de la politique intérieure, le régime Tokugawa connaît son apogée entre
1651 et 1709 sous les shoguns Ietsuna et Tsunayoshi. L'État est basé sur une
idéologie néo-confucianiste, ce courant de pensée atteignant son âge d'or. À ce
titre, Hayashi Razan, maître confucianiste chargé de la formation de trois shoguns
successifs, joue un rôle clef dans la diffusion des idées de Confucius et de Zhu
Xi, et est à l'origine d'une école de pensée orthodoxe dominante. D'autres courants
hétérodoxes coexistent, menés par Kumazawa Banzan (critique de la montée en
puissance des marchands), par Yamaga Sokō (prônant l'accès aux études pour tous),
ou par Ogyū Sorai (prônant un retour à la pensée chinoise). Toutes ces écoles ont
en commun la paix comme élément moteur de la prospérité, et une vision agraire de
la société.
Hoshina Masayuki, l'homme fort sous Ietsuna, insuffle une série de réformes pour
« civiliser » le régime, en introduisant des règles concernant les procédures de
décision dans les institutions ou pour les nominations, limitant ainsi l'arbitraire
qui prévalait sous les pouvoirs précédents. Cette politique rencontre des soutiens
dans les grands fiefs du pays, comme à Mito, à Kanazawa, ou à Okayama. Le junshi,
suicide rituel, est interdit en 1663, ainsi que les échanges d'otages entre
familles en 1665. Les guerriers doivent être avant tout de bons gestionnaires de
fiefs, plutôt que de bons combattants. Cette évolution ne se fait pas sans
critiques, comme le montre la parution en 1701 du Hagakure, un guide pratique et
spirituel destiné aux samouraïs. Tsunayoshi organise la bureaucratie
gouvernementale, mise au service non plus d'un clan mais de l'État. Il renforce la
discipline en limogeant les administrateurs incompétents et en pénalisant les
familles seigneuriales désobéissantes ; ces mesures, parfois prises de façon
brutale, peuvent être jugées despotiques par ses contemporains, ce qui ternit le
prestige du gouvernement. La fin de son règne est marquée par les difficultés. Une
réforme monétaire ratée en 1695 entraîne un phénomène inflationniste. Une série de
tremblements de terre et l'éruption du Mont Fuji en 1701 sont vues comme de mauvais
présages par la population ; l'affaire des 47 rōnin en 1703 contribue à saper le
prestige du shogun, et à remettre en cause les évolutions du système.
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La croissance urbaine est un des phénomènes majeurs du XVIIe siècle. À côté des
trois grandes villes que sont Edo (1 million d'habitants au début du
XVIIIe siècle), Kyoto (600 000 habitants), et Osaka (500 000 habitants), de
nouvelles villes émergent près des châteaux seigneuriaux, des ports, des villes
étapes, minières, ou proches des grands temples, mais elles dépassent rarement les
50 000 habitants. Dans ces centres urbains, la culture bourgeoise est à son apogée
dans la dernière décennie du XVIIe siècle ; elle est tournée vers le récréatif et
fondée sur la production et la circulation de beaux objets, la poésie et le
théâtre. Les artisans de Kyoto sont à l'origine de différentes modes et sont actifs
dans l'architecture, les aménagements intérieurs et l'art des jardins. C'est à
cette époque que la céramique de Bizen se répand. L'enrichissement des marchands
fait qu'Osaka commence à détrôner Kyoto en tant que capitale culturelle. Des
auteurs comme Ihara Saikaku, Bashō et Chikamatsu Monzaemon sont les principaux
représentants des lettres japonaises du XVIIe siècle ; l'existence d'une importante
population lettrée et l'essor des techniques de gravure et de lithographie
permettent une plus grande diffusion de leurs œuvres. La fermeture du pays aux
influences étrangères se fait sentir et entraîne le développement d'un art de vivre
à la japonaise. Les maisons de familles aisées adoptent plus massivement le style
shoin-zukuri, datant du XVe siècle et destiné à l'origine à quelques grands
personnages. Les quartiers de plaisirs se développent, comme celui de Yoshiwara à
Edo, dont les contours sont limités par des palissades et les accès contrôlés ;
25 lieux de ce type existent dans le pays au XVIIe siècle.
Le « siècle d'Edo »
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La situation dans les villes est comparable à celle des campagnes. L'expansion de
l'économie marchande a enrichi une population d'artisans et de négociants, qui
spéculent en achetant des terrains en ville. Ils les louent à des populations plus
pauvres, anciens paysans émigrés en ville, exposés aux hausses de prix de
l'alimentaire, aux incendies et aux épidémies. Cette hausse des dépenses de
consommation touche aussi les samouraïs, dont le niveau de vie baisse, et pousse
dans la misère les couches économiquement les plus fragiles ; certains samouraïs
« revendent » leurs titres à des marchands, en adoptant la famille de ces derniers,
leur faisant acquérir ainsi un rang social plus élevé. Dans les premières décennies
du XIXe siècle, une proto-industrialisation se met en place au cœur de ce tissu
urbain. Des ton'ya, ou industries domestiques, se développent et réunissent dans
des fabriques des employés salariés. Ce système est inauguré dans les années 1820-
1830 dans des brasseries de saké de la région d'Osaka, puis dans celle de Kyoto
dans des soieries, ensuite dans celle de Nagoya, dans des ateliers de tissage du
coton. Les femmes, puis les paysans expulsés de leurs terres. constituent le gros
de ces employés d'une économie pré-industrielle.
Trois vagues de réformes sont engagées pour faire face à ces difficultés
économiques. La première à partir de 1720, les réformes Kyōhō, par le shogun
Yoshimune, vise à relancer de grands travaux, comme le défrichement de nouvelles
rizières, et à réduire le train de vie de l'État. Malgré une stabilisation des
finances du shogun, portée par des hausses d'impôts, la situation des couches
rurales populaires continue à se dégrader. La seconde vague de réformes, portée par
le ministre Tanuma Okitsugu, intervient en 1770. Il renforce le monopole de
certains grands marchands et permet le développement de sociétés par actions, tout
en continuant la politique de grands travaux de son prédécesseur. Malgré des
progrès dans le domaine commercial, il rencontre l'opposition des conservateurs,
mais aussi celle des classes les plus populaires, victimes d'une inflation non
maîtrisée. En 1783, l'explosion du volcan Asama provoque des crises de subsistance,
et, en 1787, une trentaine de provinces sont proches de l'insurrection. La
troisième vague de réformes, les réformes Kansei, est lancée en 1790 par le daimyo
Matsudaira Sadanobu, en réaction à la réforme précédente : Sadanobu en revient à
une vision agrarienne de la société et voit dans la croissance de l'économie
marchande l'origine des troubles que connaît le pays. Il fait renvoyer dans les
campagnes les paysans émigrés en ville, fait interdire les dépenses de luxe, ainsi
que les productions artistiques jugées contraires aux bonnes mœurs. Bien qu'il ne
reste au pouvoir que jusqu'en 1794, ses réformes marquent profondément la fin du
règne des Tokugawa.
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Certains produits comme le thé, cultivés en plus grande quantité et donc meilleur
marché, font leur entrée dans les classes moyennes, et, par la même occasion, la
culture qui leur est associée pénètre aussi cette couche sociale. Le théâtre exerce
une influence considérable sur la culture ; jusqu'en 1765, le théâtre de poupées
d'Osaka jouit d'une grande popularité, avant que le Kabuki ne prenne le relais. Ses
acteurs sont adulés, et les grands du pays cherchent à s'attacher leur amitié. De
grands matsuri religieux, comme celui de Gion à Kyoto, de Kanda à Edo et le Sannō
matsuri d'Edo, deviennent des événements populaires, drainant dans les temples de
grandes foules. Le tourisme populaire prospère ; les stations thermales sont
bondées et des cohortes de pèlerins visitent les temples et les sanctuaires.
Plusieurs centaines de milliers de personnes se rendent ainsi dans le sanctuaire
d'Ise en 1770 et en 1830.
Dans les élites, des mouvements de pensée nouveaux commencent à s'ériger contre
l'orthodoxie confucianiste portée par le pouvoir en place. Le mouvement nativiste
fondé par l'érudit Motoori Norinaga repousse la culture d'origine chinoise et prône
un retour à la pureté d'une culture strictement japonaise. Le lettré Hirata
Atsutane affirme la centralité du shintō. Les études hollandaises, ou rangaku,
profitent de l'introduction légale de livres occidentaux à Nagasaki dès la première
moitié du XVIIIe siècle, à condition que ceux-ci ne traitent pas de la foi
chrétienne. Des livres consacrés à la dissection en 1774 et aux maladies internes
en 1793 sont traduits du hollandais vers le japonais. En 1764, le médecin Hiraga
Gennai met au point une tenue ignifugée en amiante pour pompiers.
Shogunat en crise
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De 1864 à 1882,, les puissances occidentales ne sont concernées que par des enjeux
européens, ce qui évite au Japon de devenir un de leurs champs d'affrontements.
Cependant, la Russie, qui cherche à étendre son influence en Asie centrale et dans
les Balkans, provoque une réaction du Royaume-Uni. Paris doit faire face à l'échec
de sa diplomatie au Mexique, puis à un affrontement militaire avec la Prusse. De
leur côté, les États-Unis sont pris dans la guerre de Sécession.
Sur le plan économique, l'arrivée de marchands étrangers engendre des résultats
contrastés. Le port de Yokohama, créé en 1879, détrône rapidement celui de
Nagasaki, et capte les deux tiers du commerce extérieur. Le pays exporte du thé,
des produits de la pêche, ainsi que de la soie. La très forte demande pour ce
dernier produit entraîne une augmentation des prix. Le prix du riz augmente de 50 %
par an entre 1858 et 1867. Les échanges commerciaux avec l'Occident provoquent
aussi une fuite des monnaies d'or en dehors de l'archipel, à l'origine, là aussi,
d'un phénomène d'inflation. La très forte demande en soie pour l'exportation permet
de soutenir la croissance dans ce domaine. A contrario, le coton importé
d'Occident, meilleur marché que celui produit localement, provoque la ruine des
producteurs japonais.
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Sur le plan intérieur, des aléas climatiques provoquent plusieurs famines de 1833
jusqu'au début des années 1840. En 1836, on dénombre ainsi 20 000 morts dans la
province de Tottori, et 100 000 dans le Tōhoku. D'importants mouvements de
population désorganisent les cités ; les citadins gagnent la campagne en quête de
nourriture, tandis que les habitants des campagnes affluent dans les villes,
espérant bénéficier de distributions de vivres. La flambée des prix alimentaires
grève le budget des couches moyennes. Sur la période 1831-1836, on recense par
ailleurs plus d'un millier de soulèvements, émeutes ou disputes violentes dans la
population, prenant pour cible les classes dirigeantes. En 1836, on dénombre près
de 10 000 paysans en armes dans la région de Mikawa, et 30 000 autour du mont Fuji.
Mizuno Tadakuni, haut fonctionnaire gouvernemental chargé par le shogun de mener
des réformes, entreprend, entre autres initiatives, de favoriser le retour à des
cultures vivrières et à réduire les déficits budgétaires. Il se heurte aux intérêts
des grands daimyos, et, pour la première fois, le régime plie face à ceux-ci en le
renvoyant. Certains fiefs, comme Satsuma et Chōshū, mettent en place avec succès
leurs propres réformes, et en profitent pour se doter d'une petite armée équipée
d'armes à feu et d'artillerie.
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La poussée coloniale des puissances européennes reprend dans les années 1880 : les
Britanniques colonisent la Birmanie en 1886, les Français l'Indochine de 1884 à
1893, les Américains Hawaï en 1898. La Corée devient un enjeu stratégique pour
certains hommes politiques japonais à partir de 1890, et est l'objet d'une guerre
contre la Chine en 1894-1895, puis d'une guerre contre la Russie en 1904-1905
— cette dernière concerne aussi le contrôle de la Mandchourie. Victorieux dans les
deux cas, le Japon impérial renforce sa position sur l'échiquier international et
agrandit son territoire : Taïwan est transformée en colonie en 1905, le Liaodong et
la moitié sud de Sakhaline sont acquis en 1905, et en 1910 la Corée devient une
colonie japonaise. La superficie du pays s’accroît ainsi de 77 % entre 1894 et
1910. En 1902, pour la première fois, un traité défensif est signé entre le Japon
et une puissance occidentale (les Britanniques), et, en 1905, le Japon bat
militairement une puissance occidentale (la Russie lors de la bataille de
Tsushima). La modernisation du Japon devient un exemple à suivre en Asie ; le pays
attire des étudiants chinois et coréens. La situation se retourne cependant dès
1905, avec l'essor de l'impérialisme japonais en Corée. Les relations entre les
deux pays se tendent jusqu'à la colonisation de ce dernier.
Dans les années qui suivent, le Japon, qui a participé à la coalition militaire
contre les Boxers et obtenu diverses concessions en Chine, continue d'y accroître
son influence : pendant la Première Guerre mondiale, le pays se range au côté des
Alliés dans le but d'affirmer son rôle international et envahit la concession
allemande dans le Shandong. En janvier 1915, le gouvernement de l'empire du Japon
présente à celui de la république de Chine la liste dite des Vingt et une demandes
qui vise rien moins qu'à mettre sous tutelle une partie de l'économie chinoise,
notamment en confirmant les droits du Japon sur le Shandong qu'il occupe depuis
quelques mois. Lors de la conférence de paix de 1919, le Japon obtient que le
traité de Versailles satisfasse ses revendications sur le Shandong, ce qui conduit
le gouvernement chinois à refuser de signer le texte et provoque en Chine un regain
d'agitation nationaliste anti-japonaise.
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La condition féminine évolue, et les femmes sont de plus en plus nombreuses dans
des postes de cols blancs (le tiers des enseignants du primaire dans les années
1920 sont des enseignantes). En 1922, elles sont autorisées à s'organiser
politiquement et à assister à des meetings politiques. Plusieurs initiatives
législatives sont prises, la dernière en 1931, pour tenter, sans succès, d'élargir
le suffrage aux femmes. Dans les années 1920, quelques femmes obtiennent dans le
monde du spectacle une visibilité importante associée à une image de modernité, ce
qui aboutit à la promotion de la figure de la modan gaaru. D'autres parties de la
population sont en quête d'une reconnaissance sociale : Burakumin, Aïnous, migrants
Coréens... et tendent à se regrouper en associations pour défendre leurs intérêts.
Ces derniers, venus chercher du travail dans l'archipel, passent de 1 000 en 1910,
à 300 000 en 1930, puis à environ 1 million en 1940. L'enseignement supérieur
accueille de plus en plus d'étudiants : de 9 695 en 1915, leur nombre passe à
81 999 en 1940. Cette hausse s'accompagne de créations d'associations politiques
étudiantes radicales, de gauche comme de droite.
Alors que les gouvernants passent d'une politique de soutien du prix du riz à une
politique visant à le faire baisser, L'espace politique se réduit en milieu rural.
Les pouvoirs publics veulent mettre un terme à l'agitation ouvrière en ville en
faisant baisser le prix des produits de consommation courante, comme lors des
émeutes du riz de 1918. La crise de 1929 touche elle le prix de la soie et du coton
et contribue à aggraver la situation. Le nombre de conflits entre propriétaires
terriens et ouvriers agricoles passe de 87 en 1917, à 2 751 en 1926, et 6 824 en
1935. La situation des ouvriers en ville s'améliore légèrement, principalement pour
les ouvriers qualifiés, à l'heure où les progrès de l'industrialisation en
réclament un nombre important. Les conditions de vie restent difficiles pour les
ouvriers non qualifiés, et le nombre de syndiqués passe de 3 000 vers 1910 à 30 000
en 1919, ce qui pousse les gouvernements successifs à prendre des mesures en faveur
des ouvriers dans les années 1920.
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Après la crise politique Taishō de 1913 commence une période d'une quinzaine
d'années pendant laquelle se renouvelle la culture parlementaire, avec à la clef
une ouverture démocratique. La montée en puissance des classes moyennes et du
milieu ouvrier favorise l'éclosion de discours critiques sur l'autoritarisme de
l'État. Une presse libérale s'épanouit et exprime une certaine sympathie envers les
revendications chinoises et coréennes lorsque ces pays subissent la répression de
l'armée japonaise. Le suffrage universel masculin est élargi en 1925 à tout homme
de plus de 25 ans. Cependant la même année est votée une loi visant à stopper la
montée de l'extrême gauche qui compte huit élus au parlement en 1928, à l'issue de
la première élection au suffrage universel. Une police politique est mise en place
dans chaque préfecture, et certaines activités politiques deviennent passibles de
la peine de mort. Ceci n'empêche pas le mouvement ouvrier d'organiser plusieurs
milliers de grèves dans l'industrie en 1931.
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Le Japon, qui n'a cessé de pousser ses pions en Chine en y soutenant notamment des
seigneurs de la guerre, prend pied en Mandchourie en 1931 à la faveur d'un sabotage
de ligne de chemin de fer provoquée par des militaires japonais. Le but est alors
de former une « zone de sécurité intérieure » pour protéger ses possessions
coréennes tout en ayant accès à des terres agraires, et à des ressources comme le
fer et le charbon. Un État fantoche, le Mandchoukouo, est créé en 1932 et dirigé de
facto par les Japonais. En janvier de la même année, les troupes japonaises
s'installent à Shanghai à la suite d'un incident planifié par l'armée. Le
gouvernement nippon offre par ailleurs des facilités financières aux fermiers
japonais voulant s'établir dans la région, et environ un million d'entre eux
viennent s'y installer dans les années 1930.
Une nouvelle phase d'expansion en Chine commence en juillet 1937 lorsque la guerre
sino-japonaise éclate. Attaquant au nord, et à partir de Shanghai, les troupes
nippones se heurtent à celles de Tchang Kaï-chek. Nankin, la capitale du régime
nationaliste chinois, est prise le 13 décembre 1937, ce qui donne lieu à des
massacres de populations pendant lesquels environ 200 000 personnes sont tuées. Au
Japon, le conflit n'est pas soutenu par la population, et la censure dissimule au
public la violence des combats. Le régime accentue sa répression contre les
opposants (socialistes, syndicalistes...), notamment de décembre 1937 à février
1938. Le conflit s'enlise dès le printemps 1938, alors que les Chinois continuent
de résister.
L'occupation américaine
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Démocratisation du pays
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Dans le domaine économique, le pays est miné par des problèmes de ravitaillement,
les infrastructures étant en ruine. Une situation de pénurie perdure jusqu'en 1948.
Le crime organisé prospère, tandis que se développe une économie souterraine.
Jusqu'à un million de Japonais périssent de sous-alimentation, et l'inflation est
endémique jusqu'à la fin de la décennie. Les grands conglomérats que sont les
Zaibatsu comme Mitsui ou Sumitomo sont dissous en novembre 1945, et fin 1946, une
réforme agraire permet à 80 % des paysans d'accéder à la propriété.
Fin de l'occupation
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Les débuts de la guerre froide en 1946 obligent les États-Unis à revoir leur
relation avec le Japon : en Extrême-Orient, la Corée du Nord communiste est créée
en 1948, et l'année suivante les communistes achèvent leur conquête de la Chine
continentale. La priorité est alors donnée au redressement économique de
l'archipel. Après un intermède socialiste assuré par Tetsu Katayama, les libéraux
arrivent au pouvoir en 1948 avec Yoshida. En octobre de la même année, l'occupant
instaure une nouvelle politique économique dirigée par Joseph Dodge : une politique
déflationniste est mise en place, et les libertés publiques sont réduites. En 1950
des purges politiques visant les communistes touchent plus de 10 000 personnes. Les
nationalistes et militaristes ayant exercer des fonctions de pouvoir jusqu'en 1945
font aussi l'objet de purges importantes pendant l'occupation américaine, mais les
autorités japonaises reviennent sur ces dernières progressivement entre 1952 et
1955. L'occupant décide de réarmer en partie le pays, alors que la guerre de Corée
vient d'éclater, ce qui relance l'activité de pans entiers de son économie : dès
1951, la production industrielle bondit de 12 %.
C'est dans ce climat international tendu, que s'ouvrent les négociations du traité
de paix. Malgré l'opposition de gauche qui tente d'obtenir la neutralité du pays,
et la droite conservatrice de Hatoyama et Kishi qui envisage de reconstituer une
armée sitôt l'indépendance recouvrée, le premier ministre Yoshida accepte les
conditions américaines qui prévoient l'instauration de bases militaires permanentes
dans le pays. Le 28 avril 1952, 49 États ratifient par écrit le traité de paix avec
le Japon.
Le Japon contemporain
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Modernisation économique
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Dans les années 1950, l'économie reste en partie tournée vers les besoins de la
reconstruction, et la balance commerciale du pays reste déficitaire jusqu'en 1965,
puis devient excédentaire, permettant au pays de stocker des réserves de monnaies
étrangères. De 1955 à 1973, la croissance économique est soutenue : le produit
national brut est multiplié par 5 grâce à des améliorations technologiques et des
disponibilités importantes en capital pour financer les investissements de
modernisation.
L'industrie crée 28 millions d'emplois entre 1947 et 1990, et le pays accède au
rang de grande puissance économique. Le PNB du pays dépasse celui du Royaume-Uni en
1967, et celui de l'Allemagne de l'Ouest en 1969.
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Hatoyama est élu au poste de Premier ministre en 1954, porteur d'un discours
nationaliste réclamant plus d'indépendance vis-à-vis des Américains. Le succès que
remporte le parti socialiste aux élections législatives de 1955 pousse les
conservateurs, divisés entre plusieurs partis, à se regrouper au sein du Parti
libéral-démocrate. Hatoyama réussit à unir au sein d'un même parti des tendances
allant du centre gauche à la droite nationaliste, ce qui permet au parti de régner
sans partage pendant plusieurs décennies. Les années 1950 sont par ailleurs
marquées par de grands mouvements sociaux, et les étudiants regroupés dans le
Zengakuren émergent comme une des grandes forces politiques du moment. Lorsqu'en
1960, le premier ministre Nobusuke Kishi tente de faire passer en force la
signature d'un traité de coopération militaire avec les États-Unis, près de
3 000 000 personnes se rassemblent pour protester autour du bâtiment de la Diète,.
Dans les années 1960, s'enchaînent les mandats de Hayato Ikeda de 1960 à 1964 puis
de Eisaku Satō de 1964 à 1972. Le premier engage le Parti libéral-démocrate dans
une politique favorisant l'économie, visant « haute croissance et doublement des
salaires », et remporte assez largement les élections législatives de 1960. Un
calme social s'installe alors que la croissance du PIB se maintient à plus de 10 %
par an. Son successeur et continuateur conserve le pouvoir pendant plus de sept
ans, le record de l'après-guerre.
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L'économie japonaise subit deux chocs économiques successifs au début des années
1970. Confrontés à une forte inflation, les États-Unis renoncent (en) en 1971 à la
convertibilité du dollar en or. Le yen s'apprécie de 15 %, ce qui pénalise les
exportations et la compétitivité des entreprises japonaises. Le premier choc
pétrolier de 1973-1974 concourt à ralentir la croissance du pays, et l'oblige à
revoir son modèle économique. De nouveaux biens d'équipement (magnétoscopes,
appareils photos, chaînes stéréo, etc.) prennent une importance grandissante à
l'exportation, et assurent une balance commerciale de plus en plus bénéficiaire.
Globalement, la croissance annuelle entre 1973 et la fin des années 1980 atteint 5
à 6 %, soit des taux bien supérieurs à ceux d'autres pays développés.
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Entre 1972 à 1987, le système politique japonais est sous l'influence d'un seul
homme : Kakuei Tanaka. Premier ministre de 1972 à 1974, il s'impose comme « faiseur
de roi » les années suivantes, grâce à ses ressources financières et ses réseaux
politiques. Il commence sa carrière politique dans la région de Niigata dont il est
originaire, et y met en place un système de financement occulte lui permettant de
couvrir les dépenses de ses campagnes électorales, ainsi que celles de ses soutiens
. En 1974, à la suite d'un scandale politico-financier, il est contraint à la
démission. Son influence au sein du PLD reste cependant forte, même après les
révélations publiques de son implication dans l'affaire Lockheed qui éclate en
1976. Le système de factions qu'il a renforcé dans le parti fragilise le pouvoir
des premiers ministres qui ne peuvent plus compter sur de fortes majorités : cinq
Premiers ministres se succèdent jusqu'en 1982, effectuant des mandats d'au plus
deux ans. Le parti lui-même est profondément divisé : en 1979, faute d'un accord
interne, il présente deux candidats au poste de Premier ministre. Il devient en
outre très impopulaire : les effectifs de sa base militante sont divisés par deux
la même année.
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Les nouvelles religions ou Shinshūkyō, qui se sont développées au cours des
décennies précédentes, connaissent leur apogée au début des années 1970, avant
d'être remplacées par d'autres mouvements sectaires plus récents (shin-shinshūkyō),
qui séduisent une population plus jeune et plus urbaine. Les pratiques religieuses
évoluent aussi : en 1984, par exemple, 65 % des Japonais interrogés indiquent ne
pas avoir de croyance, quand dans le même temps 81 % d'entre eux visitent les
temples les premiers jours de l'année.
Au début des années 1970, une nouvelle génération d'écrivains, nés après la Seconde
Guerre mondiale, fait irruption sur la scène littéraire nationale. Elle propose des
approches artistiques plus diverses que celles conçues par les générations
antérieures. Des écrivains comme Kenzaburō Ōe, Kenji Nakagami et Haruki Murakami
deviennent des auteurs-phares. Dans le domaine des mangas, le style gekiga commence
à s'imposer dès la fin des années 1960 et les dessinatrices du Groupe de l'an 24
renouvellent le style des Shōjo.
Bien que les mouvements de concentration urbaine vers les grandes villes
ralentissent, certaines régions comme Hokkaidō ou Kyūshū tirent profit d'un
développement régional. Malgré des initiatives étatiques en leur faveur, les autres
aires géographiques restent en marge. Dans les grandes villes comme Tokyo, des
quartiers de gratte-ciels commencent à être construits. C'est le cas, par exemple,
de Nishi Shinjuku où les premiers immeubles de grandes hauteurs apparaissent dans
les années 1970.
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Ryūtarō Hashimoto forme en 1996 un gouvernement dominé par le PLD, mais doit céder
sa place à un autre cadre du parti en 1998 : Keizō Obuchi, après une défaite
électorale lors des élections sénatoriales de 1998 (en). Yoshirō Mori assure la
succession à la mort de ce dernier en 2000. Le PLD porte de nouveau au pouvoir
Jun'ichirō Koizumi en 2001. Celui-ci effectue le mandat le plus long depuis Satō,
soit cinq ans et cinq mois. Réformateur et bénéficiant d'une certaine popularité,
il doit cependant affronter, au sein de son propre parti, un noyau conservateur
opposé à ses réformes. Ses successeurs, Shinzō Abe, Yasuo Fukuda puis Tarō Asō,
réussissent à maintenir le PLD à la tête de l'État jusqu'à l'élection, en 2009, du
leader du Parti démocrate du Japon : Yukio Hatoyama.
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L'évolution du climat international au début des années 1990 relance le débat sur
le caractère pacifiste de la constitution japonaise. Le déclenchement de la crise
économique, la fin de la guerre froide en Asie, et l'éclatement de la guerre du
Golfe obligent le Japon à repenser sa puissance militaire. Pour la première fois,
en 1991, il envoie des casques bleus à l'étranger, dans le cadre des accords de
Paris sur le Cambodge.
Marasme économique
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L'appréciation du yen face au dollar à partir de la seconde moitié des années 1980
provoque le retour de capitaux au pays, souvent investis dans l'immobilier
commercial. Cependant, la Banque du Japon intervient pour juguler la bulle
spéculative qui se forme, en relevant son taux d'escompte à partir de mai 1989. Dès
janvier 1990 le cours de la bourse de Tokyo commence à s'effondrer, et, au terme de
l'année, la perte s'élève à 39 %. Pour compenser leurs pertes, des entreprises sont
contraintes à vendre leurs actifs immobiliers, ce qui a pour effet de faire baisser
la valeur de ceux-ci. Les banques sont elles aussi acculées à la vente d'actifs, et
l'économie nationale entre en récession. La faillite de deux groupes financiers en
1997, la Hokkaido Takushoku Ginko et Yamaichi Securities (en), force le
gouvernement à injecter 1 800 milliards de yens dans le système bancaire, mais sans
succès jusqu'à ce que des réformes structurelles soient imposées, six ans plus
tard, par le gouvernement Koizumi.
Le taux de chômage double entre 1992 et 2002, passant de 2,2 % à 5,4 %. Il atteint,
et parfois dépasse, 10 % dans les catégories comme celles des hommes de moins de
25 ans ou de plus de 60 ans. La part de l'emploi précaire (intérim, contrats à
durée indéterminée...) augmente et concerne un actif sur quatre au début des années
2000.
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Au début des années 1990, des phénomènes culturels, jusque-là marginaux — celui des
Otaku, par exemple —, deviennent de notoriété publique. Basés sur diverses
expressions de la culture populaire japonaise comme le manga, la japanimation et
l'univers des jeux vidéo, ils influencent des mouvements artistiques comme
Superflat, et portent le Soft power japonais à l'étranger : en 2005, le pays se
classe deuxième exportateur mondial de biens culturels (12,5 milliards de dollars,
en valeur).
Le 11 mars 2011, un séisme de magnitude 9,0, suivi d'un tsunami, frappe l'est du
Tōhoku autour de Sendai, provoquant la mort de plusieurs milliers de personnes,
d'importants dégâts dans toute la partie nord-est de Honshū et l'accident nucléaire
de Fukushima. Cette triple catastrophe, écologique et technologique, instille le
doute dans une opinion publique japonaise déjà accablée par des années de
stagnation économique et inquiète de la montée en puissance de son voisin chinois,.
Sources
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Notes
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Références
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Bibliographie
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Voir aussi
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Articles connexes
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Liens externes
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