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Avis départemental sur le projet de révision du Schéma Régional de l’Habitat

Séance du Conseil départemental


Lundi 11 mars 2024
Discours de Samuel Besnard pour le Groupe Socialiste

Monsieur le Président,
Mes cher. e. s collègues,

Dans le cadre du Schéma régional de l’habitat et de l’hébergement, nous


sommes de nouveau amenés, après un débat autour du Sdrif-E, à rendre un avis
sur un document stratégique.

Ce rapport intervient dans un contexte de crise du logement sans précédent


depuis 70 ans du logement en Ile-de-France. La production de HLM s’effondre et
chaque année les rapports de la Fondation Abbé Pierre se font de plus en plus
alarmant sur la situation du mal-logement en France.

Dans ce contexte, reconnaissons que le comité régional de l’habitat et de


l’hébergement fourni un document ambitieux.

Le groupe socialiste partage certaines des orientations, en particulier au regard


des objectifs qui peuvent être fixés.

Ce rapport insiste ainsi fortement sur la nécessité de construction de logements


sociaux et sur la nécessité pour les départements de contribuer au respect des
objectifs fixés par le précédent schéma régional de l’habitat et de l’hébergement.

Le rapport rappelle également l’engagement de l’État à faire respecter la loi SRU


aux villes carencées.

Cependant, j’y reviendrai, nous sommes réservés sur l’engagement réel de l’Etat
lui-même, en particulier au regard des politiques ou plutôt du renoncement voir
de l’absence d’une véritable politique sociale du Gouvernement en matière de
logement.

Si nous avons donc également des réserves sur ce schéma ce ne sont pas pour
les mêmes raisons que vous. Nos objections portent sur les moyens réels donnés
aux collectivités et aux acteurs du logement et non sur les objectifs importants
fixé par ce schéma.
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En effet l’État n’est pas au rendez-vous en matière de crédits budgétaires, d’aide
au logement social ou d’encadrement des loyers.

Nous pouvons donc vous rejoindre sur votre avis favorable relatif aux
orientations visant à pérenniser le financement des logements étudiants au
niveau des loyers PLAI, ainsi que les financements nécessaires aux rénovations
énergétiques des logements et au développement d’équipements d’accueil des
personnes âgées et des personnes handicapées tant ces sujets sont importants.

En revanche, nous ne partageons pas les arguments auxquels vous avez recours
dans l’avis que vous proposez à notre assemblée sur les autres sujets.

Vous exprimez ainsi le souhait que soient revus à la baisse les objectifs de
construction de logements et de places en hébergement. Comment peut-on
exprimer une telle position au moment où tous les maires et les bailleurs sociaux
sont confrontés à l’effondrement de la production HLM en Ile-de-France ? Alors
qu’il y a 836 000 demandes de logements sociaux sur la région Ile-de-France et
près de 100 000 sur notre seul département dans nos 47 villes ? Alors que dans
notre pays si développé, chaque nuit 3 000 enfants dorment dans la rue ?…

Nous rencontrons quotidiennement dans nos permanences ces situations de


personnes et de famille en détresse qui se retrouvent parfois sans aucun
hébergement possible.

L’engagement auprès des toutes les communes et leur accompagnement en


matière de logement social est plus que jamais indispensable ! Nécessaire !
Vital !

Hélas, à nouveau aujourd’hui l’accès au logement, ce « droit premier », est loin


d’être une réalité devant le pusillanime politique de beaucoup de décideurs en
France au niveau national, comme dans sur notre région ou notre département.

Oui il faut construire ! Oui il faut rénover ! Oui il faut encore plus de logements
sociaux ! Partout ! Même dans les villes dont les élu(e)s dans notre département
dans les années 50 et 60, en particulier suite à l’appel de l’abbé Pierre, avaient
largement accueilli les programmes de logements, en particulier de logements
sociaux, sur leurs territoires.

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Aujourd’hui, alors que de nouveaux bidonvilles se développent aux franges de
nos villes, alors que des personnes dorment dans des voitures, nous devons
relever à nouveau ce défi.

Pour cela, nous y reviendrons à chaque fois, ne pas accompagner les villes qui
ont largement ouvert leurs bras à l’accueil de la population dans des politiques
ambitieuses de logements sociaux au cours des dernières décennies, n’est
qu’une posture idéologique qui ne répond pas aux nécessités sociales ! C’est nier
la réalité ! C’est nier l’engagement puissant du service public dans ces villes pour
accompagner toutes les populations.

Dans notre région capitale le besoin est énorme. Fin décembre, il y avait
836 000 demandeurs de logements sociaux, deux fois plus qu’en 2010 ! La
région compte 1,3 million de personnes mal logées ou sans domicile !

Pourtant, et pourtant ! La production chute ! Seuls 18 500 logements sociaux y


ont été agréés en 2023 ! Le nombre le plus bas de ces seize dernières années,
Deux fois moins que les 36 000 agréments établis en 2016 ! Une baisse de 15 %
rien que sur la dernière année !

Pour aggraver cette terrible situation aux conséquences sociales déjà


désastreuses, la présidente Les Républicains du conseil régional, Valérie
Pécresse, dans sa grande lucidité, a intégré dans le projet de nouveau schéma
directeur de la région Ile-de-France (SDRIF) qui nous a été soumis une
clause « anti-ghetto ». Elle confirme ainsi une orientation régionale, relayée ici
par la majorité départementale.

C’est oublier que le souci de la « ghettoïsation » en France, tout particulièrement


en Ile-de-France, c’est d’abord celui de la constitution, de la construction, de
ghettos de riches. Ce que soulignent très bien et avec justesse les études
sociologiques sur le « ghetto français ». Dans notre pays, la ghettoïsation se fait
d’abord et essentiellement par le haut ! Par un « séparatisme » souhaité,
organisé, sanctuarisé par la classe dominante concentrant le capital économique
et culturel !

Le dispositif anti-social de la présidente de région qui empêche la construction


de logements sociaux dans les communes qui en comptent déjà plus de 30 % va
en effet conduire, selon les propres calculs de la préfecture d’Ile-de-France, à

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réduire de 21 % la production de logements sociaux dans les années à venir ! Les
Franciliennes et les Franciliens, l’Ile-de-France a-t-elle vraiment besoin de cela ?

Cependant, nous nous alarmons également du double langage de l’État qui dit
vouloir poursuivre les objectifs de 70 000 logements par an en Ile-de-France qui
ont été fixés par la loi du Grand Paris, alors qu’ « en même temps » les ambitions
présentées par le Premier ministre récemment en Val-de-Marne ont déjà été
revues à la baisse et que rien ne nous est indiqué sur la réalité du financement
de ces objectifs.

Et cela risque de grandement s’accentuer puisque l’État a lui-même encore


accentué les choses en diminuant les objectifs de financement de logement
sociaux de presque 20 %.

On le constate amèrement, parmi les mille et une priorité annoncée chaque


matin par le Gouvernement ou le Président de la République, le logement n’y
figure pas, ou plus… Le logement n’est clairement plus depuis plusieurs années
une priorité budgétaire. L’effort public de notre pays pour ce secteur est en effet
passé de 2,2 % du PIB au début de la décennie précédente à 1,6 % en 2022, soit
une diminution d’1/3 des crédits d’État alors que cela représente pour nous
socialistes une véritable et surtout constante priorité.

Nous regrettons également que dans l’avis rendu par le département, aucune
mention ne soit faite sur la question du mal logement, alors que élus locaux sont
confrontés trop régulièrement à des situations d’urgence.

Mais là aussi, si l’État a de belles ambitions en Île-de-France, nous nous


inquiétons quant à son financement. En effet, les coupes budgétaires annoncées
par Bercy avec 1,5 Mds€ de réduction de crédits du budget 2024 pour le
logement impacteront immédiatement les rénovations énergétiques
nécessaires.

Monsieur le Président, mes cher(e)s collègues, notre Assemblée devrait se


retrouver autour d’ambitions communes portant une vraie vision d’avenir pour
le développement du logement dans notre département et pour la qualité de
vie des Val-de-Marnais dans notre région.

Nous aurions donc préféré que notre département rende un avis qui soit
ambitieux en matière de logement, qui aurait traduit une réelle volonté en
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matière de construction de logements, de réhabilitations de logements et de
lutte contre l’habitat indigne.

Pour toutes ces raisons, le groupe Socialiste ne s’associera pas à l’avis du


Département sur ce schéma régional de l’habitat et de l’hébergement et
votera contre l’avis qui est proposé par l’exécutif départemental. Il ne s’agit
pas par ce vote de justifier la totalité des prescriptions fixées par l’État. Mais
nous ne pouvons que constater et souligner que les orientations et les
réponses du département du Val-de-Marne à ce schéma régional ne sont pas
aujourd’hui à la hauteur des enjeux ni des attentes de la population val-de-
marnaise…

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