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TSTMG2- EMC : Colloque de philosophes- Doit-on toujours obéir à la loi en démocratie ?

Principe du colloque de philosophes : présenter tour à tour la pensée d’un philosophe sur une
question donnée. Répondre à la question à partir du texte en défendant (qu’on soit d’accord avec lui
ou non) la position du philosophe.

Travail en groupe :

Groupe 1 Alban, Samuel, Mael, Adrien : « les présentateurs et organisateurs du colloque » :


analysent et présentent la question. En dégagent le problème. Le mettent en perspective par des
exemples ou des analyses de l’actualité ou de l’histoire.
Groupe 2 Lisa, Feysa, Melisa : Rawls, Théorie de la justice, 1971
« Pour justifier la désobéissance civile, on ne fait pas appel aux principes de la moralité personnelle
ou à des doctrines religieuses, même s'ils peuvent coïncider avec les revendications et les
soutenir ; et il va sans dire que la désobéissance civile ne peut être fondée seulement sur des
intérêts de groupe ou sur ceux d'un individu. Au contraire, on recourt à la conception commune de
la justice qui sous-tend l'ordre politique. Nous avons fait l'hypothèse que, dans un régime
démocratique relativement juste, il y a une conception publique de la justice qui permet aux citoyens
de régler leurs affaires politiques et d'interpréter la constitution. La violation persistante et délibérée
des principes de base de cette conception, pendant une certaine période, et en particulier l'atteinte
aux libertés fondamentales égales pour tous invitent soit à la soumission soit à la résistance. En se
livrant à la désobéissance civile, une minorité force la majorité à se demander si elle souhaite que
ses actions soient ainsi interprétées ou si, se basant sur le sentiment commun de justice, elle
souhaite reconnaître les revendications légitimes de la minorité. »
Groupe 3 Mansour, Mamadou, Yigit : Ogien et Laugier, Pourquoi désobéir en démocratie,
2010
« L’idée de la résistance en démocratie n’est pas un refus de la démocratie, au contraire. Elle est
liée à la définition même d’une démocratie, d’un gouvernement du peuple c’est-à-dire par le peuple,
comme le disait très clairement la déclaration d’Indépendance américaine : un bon gouvernement
démocratique est le gouvernement qui est le nôtre, le mien – qui m’exprime. La question de la
démocratie (…) c’est celle de la voix. Je dois avoir une voix dans mon histoire, et me reconnaître
dans ce qui est dit ou montré par ma société, et ainsi, en quelque sorte, lui donner ma voix,
accepter qu’elle parle en mon nom. C’est cette possibilité de l’harmonie des voix (…) qui définit
l’accord social. La désobéissance est la solution qui s’impose lorsqu’il y a dissonance : je ne
m’entends plus, dans un discours qui sonne faux. (…) La désobéissance est une forme de
résistance en ce qu’elle considère que non, je n’ai pas donné mon consentement : pas à tout. »
Groupe 4 Wail, Baver, Yoann, Teoman : Pascal, Pensées, 1657 :
« Il est dangereux de dire au peuple que les lois ne sont pas justes, car il n’y obéit qu’à cause qu’il
les croit justes. C’est pourquoi il lui faut dire en même temps qu’il y faut obéir parce qu’elles sont
lois comme il faut obéir aux supérieurs non pas parce qu’ils sont justes, mais parce qu’ils sont
supérieurs. Par là, voilà toute sédition prévenue si on peut faire entendre cela, et ce que c’est
proprement que la définition de la justice. »
Groupe 5 Aylin D., Yann, Ilyana, Inès : Saint Thomas d’Aquin (texte du BB 2023) :
« Nous avons dit, à propos de l'étude des lois, que les actes humains soumis aux lois portent sur
des situations singulières qui peuvent varier à l'infini. Il est donc impossible d'instituer une loi qui ne
serait jamais dans aucun cas en défaut. Pour établir une loi, les législateurs considèrent les
conditions générales ; mais l'observance de cette loi serait dans certaines situations contraire à la
justice et au bien commun que la loi entend sauvegarder. Par exemple, la loi déclare qu'il faut
rendre un dépôt, ce qui est juste dans la généralité des cas, mais peut devenir dangereux dans des
cas particuliers, tel le fou qui réclame l'épée qu'il a déposée, ou l'individu qui demande son dépôt
pour trahir sa patrie. En pareilles circonstances et en d'autres semblables, il serait mal d'obéir à la
loi, et le bien consiste alors à transgresser la lettre de la loi pour rester fidèle à l'esprit de justice et à
l'exigence du bien commun. »
Groupe 6 Anaïs, Ereza, Cécilia, Lilian : Kant, Sur l’expression courante : il se peut que cela
soit vrai en théorie mais en pratique cela ne vaut rien, 1793 :
« Toute opposition au pouvoir législatif suprême, toute révolte destinée à traduire en actes le
mécontentement des sujets, tout soulèvement qui éclate en rébellion est, dans une république, le
crime le plus grave et le plus condamnable, car il en ruine le fondement même. Et cette interdiction
est inconditionnelle, au point que, quand bien même ce pouvoir ou son agent, le chef de l’Etat, ont
violé jusqu’au contrat originaire et se sont par là destitués, aux yeux du sujet, de leur droit à être
législateurs, puisqu’ils ont donné licence au gouvernement de procéder de manière tout à fait
violente (tyrannique), il n’en demeure pas moins qu’il n’est absolument pas permis au sujet de
résister en opposant la violence à la violence. En voici la raison : c’est que dans une constitution
civile déjà existante le peuple n’a plus le droit de continuer à statuer sur la façon dont cette
constitution doit être gouvernée. Car, supposé qu’il en ait le droit, et justement le droit de s’opposer
à la décision du chef réel de l’Etat, qui doit décider de quel côté est le droit ? Ce ne peut être aucun
des deux, car il serait juge dans sa propre cause. Il faudrait donc qu’il y eût un chef au-dessus du
chef pour trancher entre ce dernier et le peuple, ce qui se contredit. »
Groupe 7 Elise, Elodie, Fanny: Platon, Criton
"Une fois que tu as été mis au monde, que tu as été élevé et que tu as été éduqué, tu aurais le
culot de prétendre que vous n'êtes pas toi, aussi bien que tes parents, à la fois nos rejetons et nos
esclaves ! Et s'il en va bien ainsi, t'imagines-tu qu'il y ait entre toi et nous égalité de droits,
t'imagines-tu que ce que nous pouvons entreprendre de te faire, tu puisses, toi en toute justice
entreprendre de nous le faire en retour ? Quoi, tu serais égal en droit à ton père et à ton maître, si
par hasard tu en avais un, et cela te permettrait de lui faire subir en retour ce qu'il t'aurait fait subir,
de lui rendre injure pour injure, coup pour coup... A l'égard de la cité et à l'égard de la loi, en
revanche cela te serait permis, de sorte que, si nous entreprenons de te faire périr parce que nous
estimons que cela est juste, tu pourrais, toi, entreprendre, dans la mesure de tes moyens, de nous
taire périr, nous, les lois, et ta cité, et, en agissant de la sorte tu pourrais dire que ce que tu fais est
juste, toi qui as de la vertu un souci véritable ! Posséderais-tu un savoir qui te ferait oublier que, en
regard d'une mère et d'un père et de la totalité des ancêtres, la patrie est chose plus honorable,
plus vénérable [, plus digne d'une sainte crainte et placée à un rang plus élevé, tant aux yeux des
dieux qu'à ceux des hommes sensés ; qu'il faut donc vénérer sa patrie, lui obéir et lui donner des
marques de soumission plus qu'à un père, en l'amenant à changer d'idée ou en faisant ce qu'elle
ordonne et en supportant sans se révolter le traitement qu'elle prescrit de subir, que ce soit d'être
frappé, d'être enchaîné, d'aller au combat pour y être blessé ou pour y trouver la mort ; oui, cela, il
faut le dire, car c'est en cela que réside la justice ; et on ne doit ni se dérober, ni reculer, ni
abandonner son poste, mais il faut, au combat, au tribunal, partout, ou bien faire ce qu'ordonne la
cité, c'est-à-dire la patrie, ou bien l'amener à changer d'idée en lui montrant en quoi consiste la
justice. N'est-ce pas au contraire une chose impie que de faire violence à une mère, à un père et
l'impiété serait-elle moindre lorsqu'il s'agit de la patrie ?"
Groupe 8 Rose, Oriane, Emma: Thomas Jefferson, Lettre à John B. Colvin du 20 septembre
1810
"Vous me demandez s'il ne se présente pas quelquefois des circonstances qui font un devoir aux
titulaires des grandes charges publiques d'assumer des pouvoirs dépassant ceux que leur donne la
loi ; la réponse est facile à donner en principe, mais la question est quelquefois embarrassante en
pratique. La stricte obéissance aux lois écrites est sans contredit l'un des plus hauts devoirs d'un
bon citoyen, mais ce n'est pas le plus haut de tous. Il y a des obligations supérieures : la force
majeure, l'instinct de conservation, le salut de notre pays quand il est en danger. Perdre notre patrie
par un attachement scrupuleux à la loi écrite, ce serait perdre cette loi même, avec la vie, la liberté,
les biens et tous ceux qui en jouissent avec nous par un sacrifice absurde de la fin aux moyens. Au
cours de la bataille de Germantown, le général Washington, voyant que l'ennemi installé dans la
maison de Chew harcelait son armée, n'hésita pas à pointer ses canons contre cette demeure, bien
qu'elle appartînt à l'un de ses concitoyens. Quand il assiégea Yorktown, il rasa les faubourgs,
estimant que les droits à la propriété devaient passer après la sécurité de la nation...
Vous pouvez conclure, de ces exemples et de ces principes, ce que je pense de la question que
vous m'avez posée. Ces principes ne s'appliquent pas aux personnes qui occupent des charges
subalternes, dont les actions sont de peu de conséquence et qui ont tout le temps de recourir aux
procédures légales, et ils ne les autorisent pas, pour traiter des cas de ce genre, à faire exception
aux lois écrites. Pour ces personnes, l'exemple qu'elles donneraient en transgressant la loi ferait
plus de mal que l'observation scrupuleuse de ses prescriptions imparfaites. C'est uniquement à
ceux qui acceptent de hautes charges qu'il appartient de courir un risque dans les grandes
occasions où la sécurité de la nation ou l'un de ses plus précieux intérêts est en jeu."
Groupe 9 Léo, Arthur : Benjamin Constant, Principes de politique applicables à tous les
gouvernements représentatifs et particulièrement à la Constitution actuelle de la France,
Annexe 1, 1815, in Écrits politiques, 2004, Folio essais, p. 520-521
"Un devoir positif, général, sans restriction, toutes les fois qu'une loi paraît injuste, c'est de ne pas
s'en rendre l'exécuteur. Cette force d’inertie n'entraîne ni bouleversement, ni révolution, ni
désordre ; et c’eût été certes un beau spectacle, si, quand l'iniquité gouvernait, on eût vu des
autorités coupables rédiger en vain des lois sanguinaires, des proscriptions en masse, des arrêtés
de déportation, et ne trouvant dans le peuple immense et silencieux qui gémissait sous leur
puissance, nul exécuteur de leurs injustices, nul complice de leurs forfaits. Rien n'excuse l’homme
qui prête son assistance à la loi qu'il croit inique ; le juge qui siège dans une cour qu'il croit illégale,
ou qui prononce une sentence qu'il désapprouve ; le ministre qui fait exécuter un décret contre sa
conscience ; le satellite qui arrête l'homme qu'il sait innocent, pour le livrer à ses bourreaux. La
terreur n'est pas une excuse plus valable que les autres passions infâmes. Malheur à ces hommes
éternellement comprimés, à ce qu'ils nous disent, agents infatigables de toutes les tyrannies
existantes, dénonciateurs posthumes de toutes les tyrannies renversées ! On nous alléguait, à une
époque affreuse, qu'on ne se faisait l'agent des lois injustes, que pour en affaiblir la rigueur, et que
le pouvoir, dont on consentait à se rendre le dépositaire, aurait causé plus de mal encore s'il eût été
remis à des mains moins pures. Transaction mensongère, qui ouvrait à tous les crimes une carrière
sans bornes ! Chacun marchandait avec sa conscience, et chaque degré d'injustice trouvait de
dignes exécuteurs. Je ne vois pas pourquoi, dans ce système, on ne serait pas le bourreau de
l'innocence, sous le prétexte qu'on l'étranglerait plus doucement."
Groupe 10 Siham, Elena, Dilem, Aylin K. : Locke, Traité sur la tolérance, 1667, tr. fr. Jean-
Fabien Spitz, GF, p. 115
"Que si le magistrat tente, dans ce genre d'actions et d'opinions, de contraindre les hommes, par la
loi et par la force, à aller à l'encontre des convictions sincères de leur conscience, ils doivent faire
ce que leur conscience exige d'eux, dans la mesure où ils le peuvent sans recourir à la violence.
Mais, en même temps, ils sont tenus de se soumettre de leur plein gré aux peines que la loi inflige
pour une telle désobéissance. Par ce moyen, ils se garantissent dans leur grande affaire, qui relève
de l'autre monde, sans pour autant troubler la paix de ce monde-ci ; ils n'enfreignent ni le devoir
d'allégeance qu'ils ont envers Dieu, ni celui qu'ils ont envers le roi, mais ils rendent à chacun de ce
qui lui est dû ; l'intérêt du magistrat demeure sauf, et le leur également. Sans doute, quiconque
refuse d'obéir à sa conscience tout en obéissant à la loi, quiconque refuse de s'assurer le ciel pour
lui-même en même temps que la paix à son pays — fût-ce au prix de ses biens, de sa liberté et de
sa vie elle-même — un tel homme est un hypocrite qui, sous couvert de conscience, vise en réalité
tout à fait autre chose dans ce monde-ci."

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