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GYOBFE-2211; No. of Pages 3

Gynécologie Obstétrique & Fertilité xxx (2012) xxx–xxx

CAS CLINIQUE
Une complication rare mais grave des avortements
provoqués clandestins : l’évisceration iléale per
vaginum
An uncommon complication of unsafe induced
abortion: Bowel prolapse through uterine perforation
R. Lebeau a,*, P. Guié b, É. Bohoussou b, É.S.A. Akpa-Bédi a, Y. Loukou a,
J.-C. Kouassi a, S. Anongba b
a
Service de chirurgie viscérale et digestive, CHU de Cocody, Abidjan, Côte d’Ivoire
b
Service de gynécologie et obstétrique, CHU de Treichville, Abidjan, Côte d’Ivoire
Reçu le 21 août 2010 ; accepté le 3 novembre 2011

Résumé
Les auteurs rapportent une observation d’éviscération iléale per vaginum survenue au cours d’un avortement clandestin
par manœuvre endo-utérine. L’iléon était étranglé dans une brèche du fond utérin et le segment éviscéré était dépourvu de
son méso et nécrosé. Le traitement chirurgical a été, réalisé par voie abdominale et, consistait en une résection-
anastomose de l’iléon et un curage digital endo-utérin, puis un parage de la plaie utérine et une hystérorraphie. Le pronostic
vital a été préservé ; cependant, le pronostic obstétrical est réservé à cause des séquelles des avortements provoqués. La
prévention de telles complications pourrait se faire, non pas tant par la légalisation de l’avortement actuellement interdit en
Côte d’Ivoire en dehors de raisons médicales, mais par une intensification de l’information sur la contraception et par
l’éducation en matière de santé de la reproduction.
ß 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Abstract
The authors report one case of bowel prolapse through uterus following induced abortion. The eviscerated bowel was
completely gangrenous, devoided from its mesentery and entrapped in the uterus wall. The treatment was a bowel
resection and ileo-ileum anastomosis; the uterus was evacuated of retained products of conception and then sutured. The
patient recovered uneventfully; fertility prognosis is expected to be poor because of abortion sequelae. If the abortion law
still remains in Ivory Coast, more effort should be directed at reducing the incidence of unwanted pregnancy. This could be
best archived by a better information on contraception and better health education programs.
ß 2011 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Mots clés : Avortement clandestin provoqué ; Perforation utérine ; Éviscération vaginale

Keywords: Unsafe induced abortion; Uterine perforation; Bowel prolapse; Vaginal evisceration

* Auteur correspondant.
Adresse e-mail : lebeauroger@yahoo.fr (R. Lebeau).

1297-9589/$ see front matter ß 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.gyobfe.2011.11.001
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2 R. Lebeau et al. / Gynécologie Obstétrique & Fertilité xxx (2012) xxx–xxx
1. INTRODUCTION
L’éviscération per vaginum est l’issue de viscères par le vagin.
Dans les pays occidentaux elle survient surtout chez les femmes
ménopausées ayant des antécédents de chirurgie vaginale et/ou
d’hystérectomie ; dans ce cas l’éviscération survient spontané-
ment et le facteur déclenchant semble être une élévation de la
pression intra-abdominale. [1]. En Afrique l’éviscération per
vaginum s’observe plus fréquemment dans un contexte
traumatique notamment de complication d’avortement pro-
voqué clandestin (APC) par manœuvre abortive intra-utérine
[2]. Nous rapportons un cas d’éviscération per vaginum dans
les suites d’APC en raison de la rareté et de la gravité de la
complication.
2. CAS CLINIQUE
Une patiente de 25 ans primigeste nullipare a consulté le
24 novembre 2005 aux urgences de gynécologie et obstétrique pour
une issue d’anses grêles par le vagin. Douze heures plutôt, la patiente
avait subi une tentative d’interruption de grossesse par manœuvre
instrumentale endo-utérine sur une grossesse de 13 semaines. Des
métrorragies abondantes et une issue d’anses grêles par le vagin
avaient entraîné l’arrêt de l’acte et la consultation aux urgences de
gynécologie et obstétrique. À l’admission, la patiente était en état de
choc avec une tension artérielle à 90 mm/60 mm, un pouls à
115 pulsations par minute et des conjonctives pâles. La palpation de
l’abdomen mettait en évidence une défense sous-ombilicale avec des
pelvialgies vives. L’examen gynécologique montrait une issue par le
vagin de 2,20 m d’anses grêles noirâtres dépourvues de méso
(Fig. 1). Un hémogramme révélait un taux d’hémoglobine et de
globules blancs respectivement à 8,6 g/100 ml et 9500 GB/ml. À la
laparotomie, on découvrait une perforation du fond utérin de 3 cm
de large dans laquelle s’était engagé l’iléon. On notait aussi un
étranglement de l’iléon dans la brèche utérine. La cavité abdominale
contenait 200 cc d’un liquide noirâtre hémorragique et quelques
débris ovulaires. Il n’y avait pas de selles dans la cavité abdominale.
L’utérus n’était pas nécrosé, était de taille dix semaines et contenait
des débris ovulaires. On réalisait une résection de 2,50 m d’iléon à
partir de 20 cm de la jonction iléo-cæcale suivie d’une anastomose
iléo-iléale ; le grêle réséqué était extrait par simple traction sur le
segment éviscéré. Sur l’utérus on pratiquait un curage digital par
l’orifice de la perforation utérine pour extraire des débris ovulaires
puis un avivement–suture de la perforation utérine. L’intervention se
terminait par une toilette abdominale et la cavité abdominale n’était
pas drainée. Une transfusion de 1000 ml de sang avait été réalisée
en peropératoire. Les suites de l’intervention étaient simples et la
patiente sortait à j12 postopératoire.
3. DISCUSSION
Les lésions intestinales au cours des avortements provoqués
clandestins sont relativement fréquentes et de plus en plus
rapportés [3,4]. Dans la majorité des cas, le segment intestinal
lésé est découvert au cours d’une laparotomie pour péritonite
post-abortum [5,6]. L’éviscération iléale per vaginum per
abortum est une hernie de l’iléon à travers le vagin survenant au
Fig. 1. Éviscération transvaginale de l’iléon compliquant un avortement
clandestin provoqué : l’iléon éviscéré est nécrosé, dépourvu de son méso et
attaché avec une corde à la jambe gauche de la patiente ; notez aussi la
longueur de l’iléon éviscéré.
cours d’un avortement provoqué. Il s’agit d’une forme clinique
rarement décrite de lésions intestinales au cours des
avortements provoqués [2,7] et la série la plus importante
semble être celle de N’Tia et Ekélé [7]. Ces auteurs ont
observé neuf cas en huit ans ce qui confirme cette rareté. Cette
rareté pourrait être due au fait que de nombreux cas décèdent
en dehors de l’hôpital et ne sont donc pas rapportés [8]. La
complication nécessite pour se produire une perforation
utérine ou plus rarement une perforation du vagin principa-
lement le cul-de-sac de Douglas [5,8]. En Europe, l’éviscération
per vaginum est une complication exceptionnelle des inter-
ruptions volontaires de grossesse en raison de la médicalisation
de l’avortement [9]. Dans un article déjà ancien, Shenoi et al.
avaient décrit un cas d’éviscération per vaginum compliquant un
avortement criminel [10]. Les formes actuellement décrites en
Occident sont celles où le grêle éviscéré reste dans l’utérus ;
ceci pourrait être dû au caractère peu agressif des méthodes
abortives utilisées [11,12]. Le diagnostic de ces formes est fait
par l’examen échographique [11,12]. En Afrique, les méthodes
abortives utilisées sont souvent grossières et traumatisantes
[13,14] et, en cas de perforation utérine, elles peuvent
entraîner non seulement des lésions des anses digestives mais
parfois leur éviscération par le vagin [2,8]. Dans notre
observation, le grêle éviscéré était nécrosé comme dans le
cas rapporté par Oladopo et Coker [8]. Ceci survient en cas de
désinsertion du mésentère ou d’étranglement de l’anse dans la
brèche utérine ou alors par association des deux mécanismes
comme dans notre observation. Au plan thérapeutique, l’abord
par voie vaginale est possible si le segment intestinal éviscéré
peut être entièrement exposé pour être traité [1]. La présence
de l’utérus chez notre patiente ne permettait pas un abord
vaginal du grêle. La laparotomie a permis de traiter l’ensemble
des lésions digestives et utérines. La longueur du segment
intestinal réséqué était importante (2,50 m). Cette longueur est
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cependant inférieure aux 3,60 m d’anses réséquées dans le cas
rapporté par Shenoi et al. [10]. Ces résections massives
peuvent exposer à un syndrome de grêle court [8]. Dans notre
cas, le pronostic vital a été préservé en raison de la rapidité de la
prise en charge chirurgicale. Le pronostic obstétrical est en
revanche réservé à cause des séquelles des APC [8].
La légalisation de l’avortement provoqué en dehors de
raison médicale comme en Europe pourrait contribuer à
sécuriser l’acte et éviter de telle complication. Mais les
pesanteurs socioculturelles et religieuses rendent actuellement
inimaginable une telle démarche en Côte d’Ivoire. Il faut alors
s’orienter vers la prévention des grossesses non désirées. Ceci
est possible par l’intensification des campagnes d’éducation
sexuelle, la promotion de l’alphabétisation et des méthodes de
contraception ainsi qu’une meilleure accessibilité aux services
de planning familial.
4. CONCLUSION
L’éviscération per vaginum est une complication rare mais
grave des avortements clandestins provoqués. Son traitement
est chirurgical et doit être réalisé par laparotomie pour traiter
l’ensemble des lésions digestives et utérines. La prévention de
cette complication qui est celle des avortements provoqués
clandestins passe par la vulgarisation des méthodes de
contraception.
DÉCLARATION D’INTÉRÊTS
Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en
relation avec cet article.
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