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EL GUEDDARI BAGGAR RAVANAS LYCEE LA NATIVITE

Chapitre 5 : Comment se construisent et évoluent les liens


sociaux ?

Problématiques :
✓ Quels sont les liens qui relient les individus au sein d’une même société ?
✓ Pourquoi et comment les individus sont-ils interdépendants ?
✓ Les liens qui relient les individus ont-ils changé de forme au fil du temps ?
✓ Quelles sontles raisons qui expliquent que ces liens aient changé de forme au cours du temps ?
✓ Les outils numériques favorisent-ils ces liens ? Ou au contraire les affaiblissent-ils ?
✓ Tous les individus sont-ils intégrés = attachés à la société de la même manière ?
✓ Qu’est-ce qui peut fragiliser les liens sociaux ?

Table des matières


Chapitre 5 : Comment se construisent et évoluent les liens sociaux ?...................................... 1
I. Quels sont les différents liens qui relient les individus au sein de différents groupes sociaux ? ................................................ 2
A. Qu’est-ce qu’un groupe social en sociologie ? .................................................................................................................... 2
B. Quels sont les différents types de liens sociaux ? ............................................................................................................... 3
C. Quels sont les critères de constructions des Professions et Catégories Socioprofessionnelle (PCS) ? ............................... 3
II. Comment évoluent les liens sociaux au cours du temps ?....................................................................................................... 3
A. Qu’est-ce que le processus d’individualisation ? ................................................................................................................ 3
B. Qu’est-ce qui accentue selon E. Durkheim le processus d’individualisation ? ................................................................... 4
C. Quelles sont les conséquences du processus d’individualisation sur les liens sociaux ? .................................................... 6
III. Comment les nouvelles sociabilités numériques contribuent-elles au lien social ? ................................................................ 7
A. Préalable à l’épreuve de recrutement .................................................................................................................................. 7
B. La sociabilité réelle est-elle menacée par la sociabilité numérique ? .................................................................................. 7
IV. Les facteurs cause de l’affaiblissement du lien social ............................................................................................................. 8
A. La ségrégation spatiale. ....................................................................................................................................................... 8
B. La fragilisation du lien politique. ........................................................................................................................................ 9
C. Une fragilisation du lien salarial. ...................................................................................................................................... 10
D. La désaffiliation sociale. ................................................................................................................................................... 10

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Chapitre 5 : Comment se construisent et évoluent les liens sociaux [Tapez ici]

I. Quels sont les différents liens qui relient les individus au


sein de différents groupes sociaux ?

Objectifs :
- Savoir illustrer la diversité des liens qui relient les individus au sein de différents groupes
sociaux (familles, groupes de pairs, univers professionnel, associations, réseaux).
- Connaître les critères de construction des PCS.
Objectifs complémentaires :
- Savoir distinguer « intégration de l’individu à la société » et « intégration de la société »
Notions : groupe social ; groupes de pairs ; réseau social; lien social ; PCS.
Notions complémentaires : groupes primaires/groupes secondaire

A. Qu’est-ce qu’un groupe social en sociologie ?

1) Sur quels critères


repose la définition d’un
groupe social ?

2) Préciser pour chacun


des ensembles suivants s’il
s’agit ou non d’un groupe
social : une famille, la file
d’attente à un guichet de
poste, la file d’attente à un
guichet de poste où les
individus commencent à
discuter de leur conception du
service public et engagent une action pour demander l’ouverture de guichets
supplémentaires, les fans de Soprano, les 15-19 ans, les ouvriers d’une même usine, les
membres d’un club de football, les individus d’une même société, un parti politique.
3) Quelle est la différence entre « une famille » et « les membres d’un parti politique » ou « les
ouvriers d’une même usine » ? Le tableau ci-dessous vous donne des indices ! Complétez le !

GROUPE PRIMAIRE GROUPE SECONDAIRE

TAILLE

TYPE DE RELATION

MODE D’ORGANISATION

EXEMPLE
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Chapitre 5 : Comment se construisent et évoluent les liens sociaux [Tapez ici]
4) Compléter la dernière ligne du tableau avec les exemples donnés dans la question 2 et
chercher d’autres exemples.
5) Les individus appartient-ils forcément à un seul groupe social ?
Si les groupes sociaux sont multiples, cela signifie que les liens sociaux vont l’être aussi. Quels
sont ces liens ? Qu’est-ce qui attache les individus entre eux ?
Comment rendent-ils les individus interdépendants ?

B. Quels sont les différents types de liens sociaux ?


Document 1 page 150
Document 2 page 150

C. Quels sont les critères de constructions des Professions et Catégories


Socioprofessionnelle (PCS) ?
https://www.google.com/search?q=la+nomenclature+des+pcs&oq=la+nomencla&gs_lcrp=EgZjaHJvbWUqBwgEEAAYgAQyB
wgAEAAYgAQyBggBEEUYOTIHCAIQABiABDIHCAMQABiABDIHCAQQABiABDIGCAUQRRg8MgYIBhBFGD0yBggH
EEUYPNIBCTEwNzg1ajBqN6gCALACAA&sourceid=chrome&ie=UTF-
8#fpstate=ive&vld=cid:7470d782,vid:PV6C36ZGG3E,st:0

II. Comment évoluent les liens sociaux au cours du temps ?

Objectifs :
- comprendre et savoir illustrer le processus d’individualisation ;
- comprendre et savoir illustrer l’évolution des formes de solidarité avec les notions de «
solidarité mécanique » et de « solidarité organique » ;
- distinguer « solidarité mécanique » et « solidarité organique ».
Objectifs complémentaires :
- comprendre que le processus d’individualisation est le résultat d’une construction sociale ;
- comprendre que le processus d’individualisation ne signifie pas affaiblissement mais
recomposition des liens sociaux ;
- comprendre que la solidarité mécanique n’a pas disparu dans les sociétés modernes.
Notions : individualisation ; solidarité mécanique/solidarité organique ; solidarité.
Notions complémentaires : groupe d’appartenance ; individualisme ; conscience
collective/conscience individuelle ; division du travail ; droit restitutif/droit répressif.

A. Qu’est-ce que le processus d’individualisation ?

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Chapitre 5 : Comment se construisent et évoluent les liens sociaux [Tapez ici]
=> Vidéo : Les évolutions des modalités d’attribution du prénom de l’enfant/Baptiste Coulmont.
http://www.laviedesidees.fr/Le-prenom-support-personnel-de-l.html
Questions :
1) L’attribution du prénom a-t-elle toujours relevé́ du libre choix des parents?
2) Quels sont les éléments qui prouvent que le choix du prénom atteste du processus
d’individualisation ?

B. Qu’est-ce qui accentue selon E. Durkheim le processus


d’individualisation ?
Eléments concernant les travaux d’E. Durkheim :

La naissance, à la fin du 19ème siècle, de la sociologie comme discipline visant une connaissance
scientifique du social, résulte fondamentalement des inquiétudes provoquées par la montée de
l’individualisme dans les sociétés occidentales.

On observe simultanément :
• un affaiblissement de l’emprise de la religion sur les représentations (sécularisation et
laïcisation) ;
• une baisse de l’influence de la famille sur les destinées (égalité des chances et idéal
méritocratique) ;
• un recul du pouvoir des autorités traditionnelles sur les individus (démocratisation).
E. Durkheim construit un cadre théorique permettant à la fois d’expliquer les mécanismes sur
lesquels reposent les phénomènes à l’œuvre et d’analyser les problèmes qu’ils posent.
Son projet peut se résumer à l’élucidation d’un paradoxe :
• « comment se fait-il que tout en devenant plus autonome, l’individu dépende plus étroitement
de la société ?
• Comment peut-il être à la fois plus personnel et plus solidaire ? »
Un livre majeur pour répondre à ces questions : De la division du travail social = 1893.
Essayons de répondre à ce paradoxe = cette énigme !

Document :
Selon Émile Durkheim, il existe, dans la conscience de chaque membre d’une société, une
conscience individuelle (propre à chacun, qui « constitue notre personnalité individuelle ») et
une conscience collective, constituée de l’ « ensemble des croyances et des sentiments communs
à la moyenne des membres d’une société ». Dans la société « primitive » ou « traditionnelle », la
conscience collective recouvre presque entièrement la conscience de chacun des membres. Ces
derniers sont liés les uns aux autres par le partage des mêmes tâches, l’adhésion aux mêmes
valeurs et croyances, qui s’actualise dans des rituels collectifs visant à réaffirmer l’unité et la
cohésion du groupe. La solidarité, alors dite « mécanique », dérive de cette similitude. Le droit
(essentiellement répressif) sanctionne les écarts individuels à la règle en causant à celui qui
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Chapitre 5 : Comment se construisent et évoluent les liens sociaux [Tapez ici]
commet l’infraction un tort jugé équivalent à celui dont il est l’auteur, et manifeste ainsi la
toute-puissance du collectif. Mais cet état primitif va être confronté à la conjonction de
plusieurs phénomènes interdépendants : le « volume de la société » augmente ainsi que la «
densité matérielle » ; cela accroît la « densité morale ». Ces mutations de la morphologie sociale
accentuent la pression sur les ressources et conduisent à un raidissement de la lutte pour
l’existence. La division du travail est la réponse fonctionnelle de la société à la nécessité de
maintenir son unité menacée quand « tous les liens sociaux qui résultent de la similitude se
détendent progressivement » : « il faut ou que la vie proprement sociale diminue ou qu’une autre
solidarité vienne peu à peu se substituer à celle qui s’en va ». La division du travail instaure en
effet une complémentarité entre les membres de la société : ce qui les lie est alors moins ce par
quoi ils se ressemblent (la conscience collective) que ce par quoi ils se différencient et qui les
rend du même coup interdépendants. La différenciation des fonctions sociales permet en effet
d’éviter la concurrence généralisée entre tous, elle est « un résultat de la lutte pour la vie : mais
elle en est un dénouement adouci. Grâce à elle, en effet, les rivaux ne sont pas obligés de
s’éliminer mutuellement, mais peuvent coexister les uns à côté des autres ». Elle est ainsi au
principe d’une nouvelle forme de solidarité dite « organique », qui s’objective dans le
développement d’un droit restitutif qui donne à la sanction la fonction est de « réparer » les torts
commis et d’un droit visant à assurer la coopération entre les individus.
Source : Eduscol

Questions :
1) Qu’est-ce qui crée la solidarité mécanique ?
2) Sur quoi repose alors la solidarité entre les individus dans les sociétés modernes ?
3) Pourquoi Durkheim qualifie-t-il cette solidarité d’organique ?
4) Pourquoi selon E. Durkheim la division du travail a-t-elle été nécessaire ?
5) Pourquoi la division du travail accentue-t-elle le processus d’individualisation ?
6) Pourquoi la solidarité mécanique s'exprime-t-elle dans le droit répressif ?
7) Pourquoi la solidarité organique s'exprime-t-elle dans le droit restitutif ?

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Chapitre 5 : Comment se construisent et évoluent les liens sociaux [Tapez ici]

Exercice p. 153

=> Synthèse : Complétez le tableau suivant

Société traditionnelle (agricole) Société moderne (industrielle)

Type de solidarité

Conscience collective

Autonomie individuelle

Niveau de la division du travail

Type de droit

Cause du changement

C. Quelles sont les conséquences du processus d’individualisation sur les


liens sociaux ?
Document : Individualisation et pluralité des cercles sociaux
« Alors que dans les sociétés à solidarité mécanique, les individus tirent de leur appartenance au
groupe à la fois leur protection face aux menaces extérieures et la reconnaissance1 immédiate de
leur statut social, dans les sociétés à solidarité organique (...) la reconnaissance devient pour les
individus un enjeu autonome. Elle naît de la participation aux échanges de la vie sociale. (...)
Dans la société moderne, l’individu diversifie ses appartenances. Alors qu’il est toujours comme
le rappelait Durkheim, défini par sa complémentarité aux autres et donc par une relation
d’interdépendance vis-à-vis d’eux, la conscience de son individualité2 ne cesse de se développer.
La situation se caractérise alors par la juxtaposition de cercles sociaux différents qui se croisent à
l’intérieur d’une même personne. (...)
Ce qui frappe les sociologues c’est la diversification des appartenances. « Si l’homme moderne
appartient d’abord à la famille de ses parents, puis à celle qu’il a fondé lui- même et donc aussi à
celle de sa femme, ensuite à son métier, qui l’intègre déjà à plusieurs cercles d’intérêts, (...) et a
des fréquentations sociales dans des cercles les plus divers : alors on a déjà une grande variété de
groupes auxquels l’individu appartient. »3 Si l’individu se caractérise par une pluralité de liens
sociaux, les groupes auxquels il appartient peuvent être ordonnés de façon concentrique, ou au
contraire simplement juxtaposés. Dans le modèle concentrique (...) le plus étroit des cercles
implique que l’individu qui en est membre fait également parti des autres. Cet empilage des liens
détermine les fonctions successives qu’exerce l’individu. Il s’agit d’une organisation sociale qui
ne lui assigne en définitive qu’une autonomie restreinte. Les individus restent définis de la
même façon. Lorsque les cercles sont juxtaposés et par conséquent indépendants, ils garantissent

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Chapitre 5 : Comment se construisent et évoluent les liens sociaux [Tapez ici]
à l’individus une liberté plus grande. Son identité devient singulière. C’est sur lui que reposent
les connexions entre les différents groupes auxquels il participe. Puisque les cercles sont « situés
côte à côte, ils ne se rencontrent que dans une seule et même personnes ». »

Source : D’après « Le lien social », S. Paugam, QSJ, PUF, 2ème éd, 2010, pp 50-54
1Reconnaissance : Processus par lequel un individu est reconnu comme possédant des
compétences et des qualités. Sous sa forme juridique, elle consiste en l’attribution d’un droit. La
reconnaissance est étroitement liée à la socialisation dans la mesure où elle comporte toujours
une part de réciprocité.
2Individualité : Singularité d’un individu
3 G. Simmel « Sociologie et épistémologie »

Questions :
1) Dans le document, que signifie l’expression « cercles sociaux concentriques » ?
2) Dans les sociétés traditionnelles, que peut-on dire des cercles sociaux auxquels les individus
appartiennent ?
3) Dans les sociétés modernes, que peut-on dire des cercles sociaux auxquels les individus
appartiennent ? Illustrez vos propos par une phrase du texte.
4) Pourquoi dit-on que dans les sociétés modernes, l’identité des individus est « singulière » ?

III. Comment les nouvelles sociabilités numériques contribuent-


elles au lien social ?
Objectif :
- comprendre comment les nouvelles sociabilités numériques contribuent au lien social.
Objectif complémentaire :
- distinguer outils numériques et sociabilité numérique.
Notions : sociabilité ; sociabilité numérique : moyenne simple ; moyenne pondérée.

A. Préalable à l’épreuve de recrutement


Sujet du débat: La sociabilité réelle est-elle menacée par la sociabilité numérique ?

Vous participez à une épreuve de recrutement pour être journaliste sur la forme d’un débat ouvert à plusieurs aucours duquel vous
serez observer et jauger par des recruteurs. Ces personnes en charge de la sélection 2 sur 6 personnes par exemple seront aussi vos
futurs collègues journalistes au sein de la rédaction. Vous devez donc montrez que votre finesse et pertinence sans faire peur en
écrasant autrui...enfin bref adopter la meilleure stratégie pour sortir du lot et devenir journaliste !

Document 1 page 148


Document 2 page 148

B. La sociabilité réelle est-elle menacée par la sociabilité numérique ?


Recherche personnelle en particulier à l’aide de :

https://eduscol.education.fr/document/23194/download

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Chapitre 5 : Comment se construisent et évoluent les liens sociaux [Tapez ici]
https://www.college-de-france.fr/media/campus-innovation-
lycees/UPL1531111677858227964_Classe_de_premiere___Chapitre_7.pdf

IV. Les facteurs cause de l’affaiblissement du lien social

Objectifs :
- comprendre comment différents facteurs (précarités, isolements, ségrégations, ruptures
familiales) exposent les individus à l’affaiblissement ou à la rupture de liens sociaux.
Objectifs complémentaires :
- pourquoi l’affaiblissement ou la rupture des liens sociaux résultent d’un processus.
Notions : précarités ; isolements, ségrégations.
Notions complémentaires : disqualification ; désaffiliation ; exclusion.

A. La ségrégation spatiale.

Une forte ségrégation urbaine a le plus souvent des conséquences négatives. La forte
ségrégation crée des cultures spécifiques, qui s’éloignent de la culture scolaire. Elle crée
des contextes de criminalité forte. L’expérience de la ville n’est pas la même, à Chicago,
pour les enfants ayant grandi dans le quartier de West Englewood dans le South Side, de
ceux de Lincoln Park ou des banlieues chic du Nord. De même, l’expérience de la ville
n’est pas la même en Seine-Saint-Denis et à Neuilly. Didier Lapeyronnie parle de « contre-
monde », pour désigner ces quartiers à forte ségrégation : c’est une organisation sociale et
un ensemble de représentations sociales spécifiques qui s’opposent au monde social
dominant. Cependant, les espaces bourgeois appliquent également une logique identique
pour Pinçon-Charlot : il s’agit d’un sousculture ayant sa propre cohérence, non partagée
avec les autres membres de la société, dont ces groupes cherchent à se distinguer et à se
tenir à distance. La différence est que la ségrégation de la grande bourgeoisie est choisie,
contrairement à celle des classes populaires et des immigrés pour qui elle est vécue
comme un enfermement, une relégation subie.
La ségrégation urbaine dans les quartiers populaires défavorisés intervient de trois
manières :
- elle renforce durablement le phénomène d’inégalité cumulative : classe, ethnicité, âge,
quartier…
- Elle tend à associer durablement des situations et des comportements à des catégories
sociales et ethniques spécifiques : la présence forte de jeunes issus de l’immigration à
l’école est perçue comme facteur de désordre et de disqualification scolaire → fuite des
catégories blanches et moyennes. La concentration des groupes stigmatisés accentue leur
stigmatisation.
- Elle contribue à favoriser le passage d’une logique de classe et d’inégalités à une logique
de discriminations.

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Chapitre 5 : Comment se construisent et évoluent les liens sociaux [Tapez ici]
- Elle contribue à favoriser des politiques publiques de ciblages de quartiers, qui ont des
effets à terme de stigmatisation. Au lieu de se concentrer sur la réduction des inégalités en
général (dans les quartiers fortement ségrégés comme ailleurs), on se concentre sur les
quartiers ségrégés comme problème social, et on contribue ainsi à les construire comme
problème social.
- Elle contribue à créer une criminalité, qui se nourrit du fait que les jeunes de ces quartiers
sont inemployables (parce que venant de ces quartiers), et qu’ils apportent un réservoir de
main d’œuvre captive. Dans de nombreux ghettos américains, les taux d’homicide sont
très élevés, ce qui constitue une expérience banale pour une majorité de jeunes hommes.
En France, même si le niveau de criminalité n’est pas comparable, la forte ségrégation
favorise des activités illégales et des phénomènes d’appropriation du territoire par les
gangs. L’idée que les groupes sociaux pourraient être spatialement séparés mais égaux
est une illusion qui a servi à légitimer juridiquement la ségrégation raciale aux USA. La
forte ségrégation s’accompagne en effet toujours d’inégalités urbaines et politiques, et elle
perpétue dans le temps la domination, car les groupes dominés sont ainsi maintenus à
l’écart et rendus invisibles par les dominants.
Alain Santino, 2019, d’après Marco Oberti et Edmond Préteceille, La ségrégation urbaine, La
découverte, 2016
1. Quelles sont les conséquences de la ségrégation urbaine sur le lien social ?

B. La fragilisation du lien politique.

« Regardez la liste des élèves de bac pro , nous dit un chef de travaux de LEP (en 1992),
tous ceux qui on un nom ... (arabe), eh bien, ils sont pas pris, ils n’en veulent pas. » Un
autre enseignant nous confie, écœuré : « ils (les employeurs) nous disent « bonne
présentation », en fait, ça veut dire « pas arabe ». [...] Certains commerçants déclarent
même froidement, et en présence des jeunes filles maghrébines candidates à une place
en apprentissage, que « la clientèle n’accepterait pas. » [...] On pourrait parler d’une
résistance passive à l’embauche des étrangers (ou plus exactement des enfants
d’immigrés, « français sur le papier » [...] transformés en socialement étrangers du fait de
leur faciès, de leur « look » d’enfants des cités, de plus en plus suspectés d’être de
potentiels terroristes islamiques [...]. Parce qu’ils sont durablement exclus du marché du
travail peu qualifié, ces « jeunes immigrés » fuient la région [...] ou se replient sur quelques
niches du marché du travail (entreprise « ethnique », mission locale). D’autres « glandent
» ou vivent de petits trafics. [...] En retour, le sentiment de ne pouvoir presque plus rien
espérer en termes de travail, la fermeture dramatique de l’avenir, avivent les ressentiments
et expliquent la radicalisation des attitudes et des comportements de ces jeunes immigrés,
qui se traduira par une spirale incontrôlable transformant la violence subie en permanence
(violence économique, violence de la pauvreté matérielle, violence du racisme) en une
violence retournée, parfois contre soi et souvent contre les autres, ces « Français » voués
aux gémonies1.
Stéphane BEAUD, Michel PIALOUX, Violences urbaines, Violences sociale. Genèse des
nouvelles classes dangereuses, Fayard, 2003
1. Quelles sont les justifications du refus à l’embauche de jeunes d’origine étrangère ?

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Chapitre 5 : Comment se construisent et évoluent les liens sociaux [Tapez ici]
2. En quoi cette situation vécue par ces jeunes peut-elle fragiliser leur lien de citoyenneté ?

C. Une fragilisation du lien salarial.

Les années 1945-75 correspondent à ce que de nombreux auteurs ont désigné comme un
type de société «salariale» (Castel, 1995). Le type d’emploi est un emploi régulier, à plein
temps, à durée indéterminée, souvent le même pour toute la vie, ou alors avec une
mobilité ascendante, c’est-à-dire une progression de carrière permettant d’améliorer son
sort. Il s’agit également d’un emploi qui donne accès à des droits collectifs et à des
mesures de protection sociale. [...] Cette condition salariale hégémonique commence à
s’effriter de manière durable à partir du milieu et même du début des années 1970 [...]. Cet
effritement se manifeste d'abord par la perte d'hégémonie (ou le recul) du type d'emploi
qui constituait l'axe intégrateur de la société salariale, et plus précisément par :
- le recul de la norme de l'emploi salarié typique, c’est-à-dire de l'emploi salarié permanent
et à plein temps. [...] - la progression des formes de travail « atypiques » : emploi à temps
partiel, emploi temporaire, saisonnier ou contractuel, travail indépendant, ou cumul d'une
ou de plusieurs de ces formes [...]
- la multiplication du nombre de personnes exclues du travail rémunéré. Il ne s’agit pas ici
seulement des chômeurs et des chômeuses, mais aussi de tous ceux et celles qui sont
sortis de la population active et qu'on désigne comme inactifs. C'est le cas des retraités,
de la plupart des pré-retraités, des chômeurs découragés qui ne cherchent plus d'emplois.
Martine D'AMOURS, « Diversification et fragmentation du travail. Le passage de l’emploi
salarié typique à des formes de travail atypique », CRISES, 2002
1. En vous appuyant sur le texte et vos connaissances du programme de seconde (Le
diplôme, un passeport pour l’emploi), présentez les caractéristiques de l’emploi typique.
2. Qu'est-ce que le sociologue Robert CASTEL a-t-il appelé la société salariale ?
3. Qu'est-ce qu'un emploi atypique ?
4. Qu'est-ce que l'« effritement de la société salariale » ?

D. La désaffiliation sociale.

Dans vos travaux depuis Les Métamorphoses de la question sociale [1995], vous montrez
bien comment la protection sociale s’est progressivement adossée à la condition de
salarié, elle-même devenue la norme du travail rémunéré. Cependant, vous pointez
également les remises en cause dont celle-ci fait l’objet depuis plus d’une trentaine
d’années, avec une (re)montée des incertitudes. Quelles sont plus précisément, selon
vous, les principales menaces qui pèsent sur la « société salariale » et la protection
sociale aujourd’hui ?
Si on souligne l’importance de la condition salariale telle qu’elle s’était imposée dans la
société salariale, – c’est-à-dire une condition stable, solide, encadrée par le droit du travail
et à laquelle étaient associées des protections fortes, dont le droit à la retraite est peut-être
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Chapitre 5 : Comment se construisent et évoluent les liens sociaux [Tapez ici]
la plus emblématique –, cela veut dire qu’il y a une connexion forte entre le statut du travail
et la protection sociale, surtout en France, en Allemagne et dans un certain nombre de
configurations comme celles-là. Il en découle logiquement qu’un affaiblissement, une
dégradation des conditions de travail, plus exactement même de la condition de travailleur,
ont des implications directes sur les protections. De même que dans un tremblement de
terre, il y a un épicentre et les turbulences se répercutent en cercles concentriques, il me
semble que l’épicentre de la « crise » amorcée au début des années 1970 réside dans
l’effritement, le « détricotage » de ces protections attachées au travail, qui donnaient à la
fois une protection sociale forte et étendue, mais qui se répercutaient jusqu’au statut de
l’individu lui-même, qui se trouve déstabilisé, condamné à nouveau, souvent, à vivre au «
jour la journée » comme on disait autrefois. [...]
Si l’on dit qu’un « jeune de banlieue » est un « exclu », qu’un « SDF » est un « exclu »,
qu’un chômeur de longue durée est un « exclu », qu’est-ce que l’on a dit ? Pas grand-
chose, si ce n’est qu’ils ne sont pas au centre de la vie sociale mais sur ses bords. Mais
personne n’est en réalité totalement en dehors de la vie sociale, et ce qu’il faut essayer de
penser, c’est le rapport différent que certains peuvent avoir vis-à-vis de la structure
sociale. Et ce qui me paraît intéressant du point de vue analytique, plutôt que de se
cantonner à un « mot-valise » confondant différentes situations et leur conférant une
fausse impression de fixité, c’est en réalité de reconstruire des trajectoires qui peuvent
mener à ce que l’on appelle aujourd’hui l’« exclusion », et qui passent par diverses
situations de vulnérabilité. D’où la proposition que j’avais émise de parler de «
désaffiliation » plutôt que d’« exclusion » pour inciter à reconstruire cette dynamique et
essayer de comprendre la relation de la marge au centre qui se constitue au travers de
ces situations de précarité. Il me semble essentiel de la penser en termes de trajectoires
plutôt que d’états.
Et justement, vous avez rappelé ce concept important de « désaffiliation ». Est-ce que
ceux que l’on qualifie couramment de « sans domicile fixe » représentent selon vous
l’aboutissement de ce processus de désaffiliation ? Oui, sans doute.
Mais là aussi, il faut préciser ce dont on parle. Les travaux sur ces questions ouvrent
quelques pistes. Il y a à la fois un rapport au travail et un rapport à ce que l’on peut appeler
l’insertion sociale, qui renvoie à la famille, à l’environnement, etc. Autant il est relativement
facile, ou en tout cas assez objectif, d’élaborer une typologie des rapports au travail, autant
il est plus compliqué d’effectuer le même type d’analyse pour l’intégration dans le
voisinage, dans la famille, etc. On pourrait dire que les relations que l’on qualifie d’«
exclusion » renvoient à un double manque, une perte à la fois par rapport au travail et par
rapport à ce contexte des protections rapprochées – la famille, le voisinage, etc.
Robert CASTEL, « Individus, risques et supports collectifs », Idées économiques et
sociales, n°171, mars 2013.
1. Pourquoi Robert CASTEL préfère-t-il utiliser le concept de désaffiliation plutôt que celui
d’exclusion sociale ?

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Chapitre 5 : Comment se construisent et évoluent les liens sociaux [Tapez ici]

Exercice Bilan:

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