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Chapitre 7 : Comment se construisent et évoluent les liens sociaux ?

I. Quels sont les divers liens sociaux qui relient les individus ?

Les liens sociaux sont l’ensemble des relations qui relient et unissent les individus
les uns aux autres. Ces liens se déploient entre individus au sein des groupes
sociaux qui sont des instances de socialisation : la famille, l’école, les groupes de
pairs; les associations, l’univers professionnel et les réseaux numériques.

Def un groupe social : Ensemble d’individus entretenant des relations qui se


définissent eux-mêmes et qui sont définis par les autres comme membres du groupe

Ex : Supporters d’une équipe de football : Individus ayant des interactions (ils


sifflent, applaudissent,…) et portant des signes de reconnaissance (maillots,
écharpes,…aux couleurs de l’équipe et se définissent eux-mêmes et sont
définis par les autres comme membres du groupe de supporters

Individus sur quai de métro Individus se trouvant au même endroit sans relations
particulières entre eux et sans sentiment d’appartenance constituent un agrégat
physique et non groupe social

Groupe social ≠ attroupement d’individus

Toutes ces instances produisent du lien social, c'est-à-dire qu’elles permettent, d’une
part, à chaque individu, de pouvoir “ compter sur” autrui et d’autre part , “de
compter pour” c’est à dire de pouvoir bénéficier de la reconnaissance d’autrui.
Tous ces liens s’entrecroisent et sont interdépendants. Chaque individu est ainsi
inséré dans une multitude de liens sociaux : des liens de filiation ( entre parents et
enfants), des liens de participation élective avec des personnes qu’on choisit par
affinités ( amis, conjoints ….), des liens de participation organique dans des lieux
où on doit tenir un rôle et interagir avec les autres comme dans le milieu
professionnel, et des liens de citoyenneté en tant que membre d’une communauté
politique ( reconnaissance de l’individu par la nation). Serge Paugam a montré la
multitude des liens sociaux.
Pour les adultes, l'univers professionnel est central car il permet à la fois de
construire des liens de participation organique ( participer à la production tout en
étant protégé par son emploi) et des liens de participation élective ( des collègues
peuvent devenir des amis). La profession est donc le critère principal utilisé pour
définir les PCS ( professions et catégories socioprofessionnelles), un classement de
la population en groupe de personnes qui partagent des caractéristiques proches

Cependant la construction des pcs connaît des limites :

La grille ne montre pas la dualisation du marché du travail, en effet on a de plus en


plus d’un côté des salariés bien protégés et de l’autre des salariés précaires. On va
classer ensemble une secrétaire qui travaille depuis 20 ans dans la même société et
une autre qui a un contrat de 3 mois.
De plus, les catégories sont peu homogènes. En effet, il y a de plus en plus de
différences entre les ouvriers qualifiés et non qualifiés du secondaire qui sont
menacés par les délocalisations et fermetures d’usines. Certains ouvriers se
rapprochent de la catégorie moyenne en se mariant avec des employées.

II. Comment les nouvelles sociabilités numériques contribuent-elles au lien


social ?

def sociabilité : ensemble des relations qu’entretient un individu avec


les autres ( c’est la capacité d’un individu à être sociable)

Sociabilité numérique : sociabilité à travers les outils numériques (


messagerie instantanée, sms, mail, …)

Ce n’est qu’en 2004 que Facebook, le premier réseau social numérique, voit
le jour aux Etats-Unis. Le développement rapide de ces nouvelles modalités
numériques de communication, associé à la diffusion planétaire des
smartphones, fait désormais des réseaux sociaux numériques des outils
omniprésents dans la sociabilité de nombreux individus. S’ils peuvent être
perçus comme des liens sociaux concurrents, qui se substitueraient aux liens
sociaux traditionnels, cette crainte résiste mal à l’analyse car les liens sociaux
numériques sont le plus souvent le reflet des liens sociaux amicaux,
professionnels ou familiaux. S’ils permettent de créer de nouveaux liens
sociaux, ils permettent d’entretenir les liens déjà existants.
Là encore, les liens sont interdépendants : les individus qui utilisent le plus les
réseaux sociaux numériques sont aussi fréquemment ceux qui sont les plus
intégrés, ceux qui ont de nombreux liens sociaux familiaux, professionnels,
amicaux, associatifs… Ainsi, les sociabilités numériques contribuent à créer
des liens de participation organique (entre collègues), des liens de
participation élective ( les liens avec les amis, proches …),mais aussi
nourrissent les liens de filiation ( entre frères et sœurs…). Ainsi, le rôle des
réseaux sociaux est devenu majeur dans l’information politique, au point qu’ils
soient accusés d’avoir influencé des élections aux Etat-Unis en 2016
La sociabilité numérique peut affaiblir les liens sociaux à travers l’isolement
des individus ( moins de relations réelles entre amis/famille), réduction des
frontières vie privée/ vie publique ( tyrannie de l’image)

III. L’individualisation a-t-elle fait disparaître la solidarité ?

Dans les sociétés modernes, c’est la solidarité organique qui domine c’est à
dire une solidarité d’interdépendance ( le lien social est lié à la
complémentarité des individus ex le boucher a besoin du médecin et
inversement). Elle trouve son origine dans la complémentarité entre les
individus, qui sont solidaires car dépendants des uns des autres, parce qu’
étant différent, chacun a besoin des autres. Ainsi, la solidarité organique est
concomitante du développement de l’individualisation c’est à dire le
processus moderne d'autonomisation des individus de leurs groupes
d’appartenance comme la famille, le voisinage, la communauté villageoise (
l’individu s’émancipe de son groupe d’appartenance au lieu de dire “nous”, il
dit “je”)

L’individualisation est donc créatrice de liens sociaux parce qu’elle permet à


chacun, du fait de sa différence, d’avoir une fonction au sein d’un ensemble
plus vaste. Cette solidarité s’oppose à celle de la solidarité mécanique. En
effet, cette dernière repose sur le partage de croyances et des valeurs
communes, c’est donc la ressemblance et les similitudes entre individus qui
cimentent les sociétés. La solidarité mécanique est caractéristique des
sociétés traditionnelles (= sociétés agricoles). Notons enfin que si la solidarité
organique domine dans les sociétés modernes, pour autant, des liens de
solidarité mécanique demeurent à travers les cultes religieux, certaines
professions où la conscience collective est forte ex : la police, les cheminots

Durkheim dans son ouvrage “de la division du travail social” 1893 distingue
la solidarité mécanique de la solidarité organique

IV Quels sont les différents facteurs qui participent à l'affaiblissement du lien social ?

Si ces liens sociaux se construisent, ils peuvent aussi se déconstruire. Une rupture
dans un parcours de vie peut fragiliser un des quatre types de liens que sont les
liens de filiation, de participation élective, de participation organique ou de
citoyenneté.

Ce sont différentes formes de précarité qui menacent les liens sociaux : des
situations d’instabilité qui empêchent de se projeter dans l’avenir ( ex
précarité de logement ou d’emploi)
Cette fragilisation peut trouver son origine dans une séparation conjugale qui peut
fragiliser les liens de filiation et de participation élective, ou d’une perte d’emploi qui
peut fragiliser les liens de participation organique, mais aussi électif). En effet, la
montée du chômage entraîne pour un nombre croissant d’individus une rupture
majeure du lien social par l’activité professionnelle. C’est en effet l’exercice de cette
activité qui définit en grande partie le statut social. Il est très fréquent qu’une
conversation démarre par « qu’est-ce que tu fais actuellement ? ». De plus, les
relations avec les collègues de travail sont autant de sources de sociabilité. Par
ailleurs, en privant l’individu d’une grande partie de ses revenus antérieurs. Il le
contraint à réduire ses activités. De même, la culpabilisation souvent ressentie par
les chômeurs les amène à espacer leurs contacts avec leurs amis et leur famille. De
plus, l’allongement de la durée du chômage, réduit l’employabilité c’est-à-dire la
capacité d’un individu à se remettre rapidement au travail (par exemple, il perd
l’habitude de se lever à heure fixe le matin)
Un emploi instable avec des conditions de travail dégradées peut lui aussi
affaiblir les liens sociaux tissés dans l’univers professionnel. En effet, la montée des
emplois atypiques ( CDD, Intérim …) remet en question la nature de l’intégration par
le travail. Les emplois à durée limitée et les emplois à temps partiel font obstacle à
une réelle intégration : pourquoi s’investir dans des relations de travail en sachant
qu’elles ne sont que de courte durée ? De manière symétrique, ces travailleurs sont
victimes d’une moindre reconnaissance par leurs collègues qui ont des emplois
stables. Ces types d’emploi sont souvent peu gratifiants, difficiles et mal payés. Les
droits sociaux qui y sont attachés sont aussi moins importants que ceux liés à un
emploi stable à temps plein. Les salariés ont aussi peur de se syndiquer lorsqu’ils
sont précaires car ils craignent de ne pas retrouver d’emploi dans le futur.
Les sociologues contemporains montrent que l’exclusion est le résultat d’un
processus qui fragilise les individus et amène à des ruptures du lien social plus ou
moins durables

Le sociologue Robert Castel montre ainsi que consécutivement à une rupture


familiale et/ou professionnelle, un individu peut entrer dans une zone de vulnérabilité
qui lui fait courir un risque important de désaffiliation sociale c’est-à-dire une
absence de participation à toute activité productive, sociale et à un isolement
relationnel. Par exemple, à la suite d’un licenciement un individu pourra vivre un
parcours fait de dégradations de sa situation financière (perte de revenus), de
logement (difficultés à payer son loyer), perte de relations sociales (refus d’invitation
si on ne peut recevoir chez soi faute de moyens…).

Pour le sociologue Serge Paugam, certaines populations qui sont contraintes de


recourir à l’aide sociale et entrent dans une relation d’assistance (bénéficiaires de
minima sociaux par exemple), subissent l’épreuve d’un statut social dévalorisé. Elles
sont, en effet, stigmatisées par le reste de la population car elles ne sont plus
autonomes ou sont considérées comme frappées d’indignité. Elles prennent alors
conscience d’être désignées comme « pauvres », « marginaux ». On parle d’une
disqualification sociale car elles ne peuvent plus jouer le jeu attendu par la société
(travail, autonomie, responsabilité…) à partir du moment où leur acceptation sociale
n’existe plus.

De plus, une situation de ségrégation, c'est-à-dire de séparation, de droit ou de fait,


d’un groupe social d’avec les autres ( les formes:
raciale/ethnique,urbaine,religieuse…) peut affaiblir également les liens sociaux

En effet, la ségrégation devient problématique pour le lien social car d’une part, elle
se caractérise par des frontières très étanches qui limitent les relations sociales
entre les différents groupes. D’autre part, les ségrégations se matérialisent aussi par
un certain degré d’éloignement vis -à -vis d’un ensemble de ressources et de droits
nécessaires à la vie sociale : accès au logement, aux services publics, à des
équipements de santé, à des formations scolaires et de qualité

Ces facteurs de fragilisation (rupture familiale, précarité de l’emploi, chômage,


ségrégation) du lien social sont souvent cumulatifs . Les individus vivant dans des
quartiers victimes de ségrégation peuvent aussi être en situation de précarité de
l’emploi. et connaître des ruptures familiales

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