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I. L’élection présidentielle
Document 1 : Extraits de la Constitution de 1958
Document 2 : Les présidents de la Ve République
Document 3 : Historique de la publication des parrainages à l’élection présidentielle.
Document 4 : Conseil constitutionnel, décision n° 2022-197 PDR du 27 avril 2022.
Proclamation des résultats de l’élection du Président de la République
Document 16 : Un ancien Président peut-il de nouveau être candidat à un mandat électif ? Conseil
constitutionnel, Décision, n° 84-983, AN du 7 novembre 1984.
Article 5
Le Président de la République veille au respect de la Constitution. Il assure, par son arbitrage, le
fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’État.
Il est le garant de l'indépendance nationale, de l'intégrité du territoire et du respect des traités.
Article 7
Le Président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages exprimés. Si celle-ci n'est pas
obtenue au premier tour de scrutin, il est procédé, le quatorzième jour suivant, à un second tour. Seuls
peuvent s'y présenter les deux candidats qui, le cas échéant après retrait de candidats plus favorisés, se
trouvent avoir recueilli le plus grand nombre de suffrages au premier tour.
L'élection du nouveau Président a lieu vingt jours au moins et trente-cinq jours au plus avant l'expiration
des pouvoirs du président en exercice.
En cas de vacance de la Présidence de la République pour quelque cause que ce soit, ou d'empêchement
constaté par le Conseil constitutionnel saisi par le Gouvernement et statuant à la majorité absolue de ses
membres, les fonctions du Président de la République, à l'exception de celles prévues aux articles 11 et 12
ci-dessous, sont provisoirement exercées par le président du Sénat et, si celui-ci est à son tour empêché
d'exercer ces fonctions, par le Gouvernement.
En cas de vacance ou lorsque l'empêchement est déclaré définitif par le Conseil constitutionnel, le scrutin
pour l'élection du nouveau Président a lieu, sauf cas de force majeure constaté par le Conseil constitutionnel,
vingt jours au moins et trente-cinq jours au plus après l'ouverture de la vacance ou la déclaration du caractère
définitif de l'empêchement.
Si, dans les sept jours précédant la date limite du dépôt des présentations de candidatures, une des personnes
ayant, moins de trente jours avant cette date, annoncé publiquement sa décision d'être candidate décède ou
se trouve empêchée, le Conseil constitutionnel peut décider de reporter l'élection.
Si, avant le premier tour, un des candidats décède ou se trouve empêché, le Conseil constitutionnel prononce
le report de l'élection.
En cas de décès ou d'empêchement de l'un des deux candidats les plus favorisés au premier tour avant les
retraits éventuels, le Conseil constitutionnel déclare qu'il doit être procédé de nouveau à l'ensemble des
opérations électorales ; il en est de même en cas de décès ou d'empêchement de l'un des deux candidats
restés en présence en vue du second tour.
Dans tous les cas, le Conseil constitutionnel est saisi dans les conditions fixées au deuxième alinéa de
l'article 61 ci-dessous ou dans celles déterminées pour la présentation d'un candidat par la loi organique
prévue à l'article 6 ci-dessus.
Le Conseil constitutionnel peut proroger les délais prévus aux troisième et cinquième alinéas sans que le
scrutin puisse avoir lieu plus de trente-cinq jours après la date de la décision du Conseil constitutionnel. Si
l'application des dispositions du présent alinéa a eu pour effet de reporter l'élection à une date postérieure à
l'expiration des pouvoirs du Président en exercice, celui-ci demeure en fonction jusqu'à la proclamation de
son successeur.
Il ne peut être fait application ni des articles 49 et 50 ni de l'article 89 de la Constitution durant la vacance
de la Présidence de la République ou durant la période qui s'écoule entre la déclaration du caractère définitif
de l'empêchement du Président de la République et l'élection de son successeur.
Article 8
Le Président de la République nomme le Premier Ministre. Il met fin à ses fonctions sur la
présentation par celui-ci de la démission du Gouvernement.
Sur la proposition du Premier ministre, il nomme les autres membres du Gouvernement et met fin à leurs
fonctions.
Article 9
Le Président de la République préside le conseil des ministres.
Article 15.
Le Président de la République est le chef des armées. Il préside les conseils et les comités supérieurs de la
défense nationale.
Article 20
Le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation.
Il dispose de l'administration et de la force armée.
Il est responsable devant le Parlement dans les conditions et suivant les procédures prévues aux
articles 49 et 50.
Article 21
Le Premier ministre dirige l'action du Gouvernement. Il est responsable de la Défense nationale. Il assure
l'exécution des lois. Sous réserve des dispositions de l'article 13, il exerce le pouvoir réglementaire et nomme
aux emplois civils et militaires.
Il peut déléguer certains de ses pouvoirs aux ministres.
Il supplée, le cas échéant, le Président de la République dans la présidence des conseils et comités prévus à
l'article 15.
Il peut, à titre exceptionnel, le suppléer pour la présidence d'un Conseil des ministres en vertu d'une
délégation expresse et pour un ordre du jour déterminé.
Document 2 : Les présidents de la Ve République
1958 : Conformément à l’ordonnance n° 58-1064 du 7 novembre 1958, la liste des candidats et des
candidates est établie par le Conseil constitutionnel au vu des parrainages qui lui sont adressés par au moins
cinquante membres du collège électoral. Les noms et les qualités des membres du collège qui ont
parrainé les candidats ne sont pas rendus publics.
1962 : Dans la loi du 6 novembre 1962, le nombre des parrainages passe à cent, parmi lesquels doivent
figurer des élus d’au moins dix départements ou territoires d’outre-mer différents. Les noms et les qualités
des membres du collège qui ont proposé les candidats ne sont pas rendus publics.
1974 : Après l’élection présidentielle où douze candidats étaient présents au premier tour, le Conseil
constitutionnel, par sa décision n° 74-33 PDR du 24 mai 1974, a émis deux recommandations :
• les parrainages devraient être établis sur des formulaires officiels mis à disposition des citoyens
habilités ;
• la liste des parrains devrait être rendue publique pour chaque candidat ou candidate.
1976 : La loi organique n° 76-528 du 18 juin 1976 fait passer le nombre des parrainages à cinq cents, parmi
lesquels doivent figurer des élus d’au moins trente départements ou territoires d’outre-mer différents. Une
publicité des noms et qualités des parrains est pour la première fois prévue mais : « dans la limite du nombre
requis pour la validité de la candidature », c’est-à-dire de 500 par candidat ou candidate.
En vue de l’élection présidentielle de 1981, le Conseil constitutionnel par sa décision n° 81-30 ORGA du
24 février 1981, précise que l’ordre de présentation de ces 500 noms rendus publics pour chaque candidat
ou candidate résultera d’un tirage au sort.
L’article 3 de loi organique n° 2016-506 du 25 avril 2016 donne une suite favorable aux propositions du
Conseil constitutionnel dans les termes suivants : « Au fur et à mesure de la réception des présentations, le
Conseil constitutionnel rend publics, au moins deux fois par semaine, le nom et la qualité des citoyens qui
ont valablement présenté des candidats à l’élection présidentielle. (…) Huit jours au moins avant le premier
tour de scrutin, le Conseil constitutionnel rend publics le nom et la qualité des citoyens qui ont valablement
proposé les candidats ».
Pour l'élection présidentielle de 2017, le Conseil constitutionnel a fixé les modalités de publication du nom
et de la qualité des citoyens qui présentent des candidats et des candidates à l’élection du Président de la
République dans sa décision n° 2016-135 ORGA du 8 septembre 2016.
C'est par sa décision 2021-150 ORGA du 21 octobre 2021, qui a abrogé la précédente, que le Conseil
constitutionnel a précisé la périodicité et les modalités de publication de la liste des citoyens ayant
présenté des candidats et des candidates à l’élection du Président de la République pour l’élection
présidentielle de 2022.
Document 4 : Conseil constitutionnel, décision n° 2022-197 PDR du 27 avril 2022.
Proclamation des résultats de l’élection du Président de la République
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,
22. Les résultats du second tour pour l’élection du Président de la République, auquel il a été procédé
les 23 et 24 avril 2022, sont les suivants :
Ont obtenu :
M. Emmanuel MACRON : 18 768 639
Mme Marine LE PEN : 13 288 686
Ainsi, M. Emmanuel MACRON a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés requise pour être
proclamé élu.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans ses séances des 25, 26 et 27 avril 2022, où siégeaient : M.
Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS,
Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.
« Pour l’élection présidentielle comme pour les autres, le législateur s’est efforcé d’assurer une
plus grande transparence et d’atténuer l’inégalité entre les candidats résultant de la disparité des
moyens financiers dont ils disposent.
Dès l’origine, l’Etat a pris directement en charge certaines dépenses limitativement énumérées […]
qui concernent la fourniture des bulletins de vote, l’affichage sur les panneaux officiels,
l’expédition d’une profession de foi à chaque électeur, ainsi que la diffusion d’émissions de
propagande sur les ondes nationales. Mais jusqu’en 1988, il ne contribuait aux autres dépenses de
la campagne que d’une manière presque symbolique. Une somme de 250 000 francs était
remboursée, à titre forfaitaire, à chaque candidat ayant obtenu au premier tour au moins 5 % des
suffrages exprimés. Cette contribution était dérisoire par rapport au montant des dépenses auquel
se chiffre habituellement le budget d’une campagne présidentielle. Aucun plafond n’avait
d’ailleurs été fixé pour ces dépenses.
Les nouvelles dispositions concernant le financement de la campagne fixées en 1988, puisrévisées
en 1995, 2001 et 2006 figurent dans la loi organique relative à l’élection présidentielle. Sur de
nombreux points, celle-ci renvoie à des règles fixées par le Code électoral […] : l’obligation de
tenir un compte de campagne retraçant l’ensemble des recettes perçues et des dépenses effectuées
en vue de l’élection ; l’interdiction des dons ou contributions consentis par une personne morale
autre qu’un parti politique ; la limitation du montant des dons ou contributions susceptibles d’être
consentis par une personne physique ; la limitation des dons en espèces ; le plafonnement des
dépenses électorales effectuées au cours de l’année précédant le scrutin ; le principe d’une aide
forfaitaire de l’Etat. […]
A l’origine, les comptes de campagne des candidats à l’élection présidentielle devaient être
adressés au Conseil constitutionnel au plus tard le neuvième vendredi suivant le tour de scrutinoù
l’élection a été acquise. Depuis la loi organique du 6 avril 2006, c’est désormais la Commission
nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) qui est compétente
pour recevoir et examiner ces comptes. Mais les décisions de la CNCCFP peuvent être contestées
par les candidats devant le Conseil constitutionnel. […]
La CNCCFP approuve, rejet ou réforme, après examen contradictoire les comptes de chaque
candidat et arrête le montant du remboursement forfaitaire auquel celui-ci peut prétendre. […] Si
la CNCCFP constate des irrégularités très graves, elle peut rejeter le compte, ce qui entraîne la
perte du droit au remboursement forfaitaire. […]
Le 19 décembre 2012, la CNCCFP a rejeté le compte de campagne du candidat sortant, Nicolas
Sarkozy. Ce dernier a formé un recours contre cette décision devant le Conseil constitutionnel.
Celui-ci a confirmé pour l’essentiel la décision de la CNCCFP. Cette décision a eu trois
conséquences : en premier lieu, Nicolas Sarkozy n’a pas pu bénéficier du remboursement
forfaitaire, dont le montant se serait élevé à 11 millions d’euros ; en deuxième lieu, il a dû
rembourser l’avance forfaitaire de 153 000 euros qu’il avait perçue ; enfin, à titre de pénalité, il a
dû verser au Trésor public une somme égale au montant du dépassement soit 466 000 euros. […]
Contrairement aux décisions rendues après les élections législatives, celles qui sont rendues sur
les comptes de campagne des candidats à l’élection présidentielle ne sont jamais assorties d’une
sanction d’inéligibilité. Elles ne peuvent donc pas entraîner la démission d’office du candidat, si
celui-ci a été élu. »
Document 7 : « Faire avaler un bifteck à un ruminant. A propos de l’institutionnalisation des
primaires en France », N. DUCLOS, Revue française de droit constitutionnel, 2016/4, n°108,
p. 851-864 [Extraits]
« […]
B – Une inscription dans la constitution envisageable ?
En Colombie, les primaires sont inscrites à l’article 107 de la Constitution du 4 juillet 1991 qui
consacre leur existence, sans toutefois les rendre obligatoires, et renvoie aux règles applicables aux
autres élections pour en encadrer les modalités. Théoriquement, l’inscription des primaires dans la
Constitution du 4 octobre 1958 ne devrait pas soulever de difficulté juridique majeure, dès lors
que le Conseil constitutionnel ne contrôle pas les lois constitutionnelles, considérant qu'il« ne tient
ni de l’article 61, ni de l’article 89, ni d’aucune autre disposition de la Constitution le pouvoir de
statuer sur une révision constitutionnelle ». Elle reste pourtant difficilement envisageable au sein
d’un régime parlementaire comme la Ve République, aussi particulier soit-il,sans que ne se pose la
question d’une réforme plus globale des institutions.
Cette révision constitutionnelle pourrait prendre deux formes : soit l’ajout d’un quatrième alinéa
à l’article 4 de la Constitution relatif, notamment, au rôle des partis politiques dans l’expression du
suffrage et au principe de liberté qui les gouverne ; soit une précision insérée à l’article 7
relatif aux modalités d’élection du président de la République. Dans le premier cas, sans remettre
en cause le principe constitutionnel de liberté des partis politiques, il pourrait être précisé que « les
partis politiques peuvent organiser la sélection de leurs candidats aux élections dans le cadre de
primaires dont les conditions sont prévues par la loi ». Ce choix aurait le mérite d’institutionnaliser
les primaires tant à l’élection présidentielle qu’aux autres élections puisque, comme en témoignent
les élections municipales de 2014, elles tendent à se systématiser. À l’inverse, dans l’hypothèse
d’une révision de l’article 7 de la Constitution venant compléter le troisième alinéa qui prévoit
actuellement que « l’élection du nouveau Président a lieu vingt jours au moins et trente-cinq jours
au plus avant l’expiration des pouvoirs du président en exercice » pour préciser que « les élections
primaires organisées par les partis politiques pour sélectionner leur candidat ont lieu au moins six
mois au plus douze mois avant l’élection du nouveau Président dans les conditions prévues par la
loi », seules les primaires à l’élection présidentielle seraient constitutionnalisées, abstraction faite
de leur généralisation. En dépit de cette nuance, l’inscription des primaires dans la Constitution
devrait nécessairement s’accompagner d’unrenvoi à la loi pour en préciser les modalités
d’organisation. Dès lors, on pourrait arguer de l’inutilité de constitutionnaliser les primaires et
de la valeur uniquement symbolique d’une telle révision puisque si une intervention législative est
nécessaire, pourquoi ne pas s’en contenter ? Mais n’est-ce pas le propre de chaque Constitution
d’osciller constamment entre norme etsymbole ? La force du symbole serait d’autant plus forte
qu’il marquerait l’acceptation constitutionnelle d’une pratique présidentialiste du régime de la Ve
République qui n’a de cesse de se renforcer depuis 1962.
En effet, malgré la diversité des modèles d’institutionnalisation des primaires à l’élection
présidentielle sur le continent américain, l’étude du droit comparé révèle que le pari de
l’institutionnalisation des primaires, et a fortiori de leur constitutionnalisation, n’a été remporté
qu’au sein de régimes présidentiels dans lesquels, en raison d’une séparation stricte des pouvoirs,
le président est, en principe, un président contraint. Il faut cependant distinguer le régime
présidentiel des États-Unis, où le président étant élu au suffrage universel indirect, les primaires
sont un moyen pour les électeurs à la fois de se réapproprier l’élection présidentielle dans un régime
qui fait une grande place à la théorie de la représentation, et de donner au président élu une
légitimité populaire, certes indirecte, des régimes présidentiels latino- américains, où le président
est élu au suffrage universel direct. Dans ces derniers, les primaires s’avèrent être un outil au
service de la prépondérance présidentielle qui leur est inhérente du fait de la transpositionimparfaite
du modèle états-unien et de la recherche d’un exécutif fort. Malgré leurs vertus démocratiques, en
renforçant la centralité de l’élection présidentielle et la légitimité du candidat qui en est issu, les
primaires institutionnalisées participent à la dérive présidentialiste de ces régimes en accentuant
tant la mythification de la fonction présidentielle que l’hypertrophie des pouvoirs d’un président
élu, seul chef de l’exécutif.
Dès lors, la question de l’institutionnalisation des primaires en France, pose nécessairement celle
de l’acceptation de la dérive présidentialiste du régime parlementaire de la Ve République, dont
elle constituerait le point d’orgue. Ce n’est rien d’autre que sous-entendait le doyen Vedel en 1995
en utilisant la métaphore du ruminant incapable de digérer un bifteck. Caractérisé par l’équilibre
entre les pouvoirs exécutif et législatif, le régime parlementaire est, par nature, rétif àla sélection
des candidats à l’élection présidentielle par le biais de primaires qui, sous couvert de réintroduire
une part de démocratie directe et de renforcer la légitimité des candidats, contribuentà déséquilibrer
les pouvoirs, au profit du président de la République. Or, depuis 1962, ce déséquilibre est latent
puisque l’avènement de l’élection présidentielle au suffrage universel direct, l’émergence du fait
majoritaire, le passage du septennat au quinquennat ainsi que l’inversion du calendrier électoral ont
favorisé la pratique présidentialiste du régime en renforçant tant la centralité de l’élection
présidentielle que la légitimité du candidat qui en sort vainqueur. Ledéveloppement intempestif des
primaires conforte ce déséquilibre au profit du président de la République puisque s’il est issu de
primaires, il peut désormais se prévaloir d’une double onction populaire pour asseoir définitivement
sa primauté sur les autres pouvoirs. Est-il pourtant aussi souhaitable de l’institutionnaliser en
constitutionnalisant les primaires ? Rien n’est moins sûr. Certes, une modification de la
Constitution ne ferait que prendre acte de la pratique présidentialiste du régime, sans pour autant
l’aggraver et les primaires continueront à se développer qu’elles soient inscrites dans le texte
constitutionnel, ou non. Reste que leur développement devrait surtout être l’occasion d’engager une
réforme en profondeur des institutions de la Ve République pour lever l’ambiguïté qui pèse sur la
nature du régime. S’agit-il d’un véritable régime parlementaire, auquel cas, pour rééquilibrer les
rapports entre les différents pouvoirs et enrayer la dérive présidentialiste, sans pour autant renoncer
aux primaires, pourquoi ne pas envisager de réformer l’élection présidentielle pour instaurer un
scrutin majoritaire à un tour ou renoncer au suffrage universel direct ? Souhaite-t-on au contraire,
entériner la pratique présidentialiste du régime et mettre en conformité le texte constitutionnel avec
la pratique institutionnelle, qui n’a depuis longtemps plus grand-chose du parlementarisme
rationalisé de 1958 ?
Il serait dommageable que les pouvoirs publics ne se saisissent pas de cette opportunité de réflexion,
car, si la Ve République n’est plus à une contradiction près, celle-ci pourrait être celle de trop, celle
responsable de l’indigestion du ruminant qui voulait manger un bifteck. C’est pourquoi, si à l’image
de la métaphore du doyen Georges Vedel les primaires sont un bifteck et que la Ve République est
un ruminant qui ne peut pas les digérer, peut-être est-il aujourd’hui nécessaire d’envisager une
chirurgie de l’estomac pour l’y aider ? Car derrière cette question somme toute assez banale de
l’institutionnalisation des primaires à l’élection présidentielle, c’est, une fois de plus, celle de
l’ambiguïté de la nature du régime de la Ve République qui est en jeu. »
ARTICLE 67.
Le Président de la République n'est pas responsable des actes accomplis en cette qualité, sous réserve des
dispositions des articles 53-2 et 68.
Il ne peut, durant son mandat et devant aucune juridiction ou autorité administrative française, être requis
de témoigner non plus que faire l'objet d'une action, d'un acte d'information, d'instruction ou de poursuite.
Tout délai de prescription ou de forclusion est suspendu.
Les instances et procédures auxquelles il est ainsi fait obstacle peuvent être reprises ou engagées contre lui
à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la cessation des fonctions.
ARTICLE 68.
Le Président de la République ne peut être destitué qu'en cas de manquement à ses devoirs manifestement
incompatible avec l'exercice de son mandat. La destitution est prononcée par le Parlement constitué en
Haute Cour.
La proposition de réunion de la Haute Cour adoptée par une des assemblées du Parlement est aussitôt
transmise à l'autre qui se prononce dans les quinze jours.
La Haute Cour est présidée par le président de l'Assemblée nationale. Elle statue dans un délai d'un mois,
à bulletins secrets, sur la destitution. Sa décision est d'effet immédiat.
Les décisions prises en application du présent article le sont à la majorité des deux tiers des membres
composant l'assemblée concernée ou la Haute Cour. Toute délégation de vote est interdite. Seuls sont
recensés les votes favorables à la proposition de réunion de la Haute Cour ou à la destitution.
ARTICLE 68-1.
Les membres du Gouvernement sont pénalement responsables des actes accomplis dans l'exercice de leurs
fonctions et qualifiés crimes ou délits au moment où ils ont été commis.
La Cour de justice de la République est liée par la définition des crimes et délits ainsi que par la
détermination des peines telles qu'elles résultent de la loi.
ARTICLE 68-2.
La Cour de justice de la République comprend quinze juges : douze parlementaires élus, en leur sein et en
nombre égal, par l'Assemblée nationale et par le Sénat après chaque renouvellement général ou partiel de
ces assemblées et trois magistrats du siège à la Cour de cassation, dont l'un préside la Cour de justice de la
République.
[…]
Le caractère semi-présidentiel résulte du fait que le président de la République est élu au suffrage
universel mais que le gouvernement reste responsable devant l'Assemblée nationale. Une telle
combinaison est assez rare. On en connaît trois exemples principaux en dehors du nôtre : celui de
l'Allemagne de Weimar entre 1928 et 1933, celui de l'Autriche depuis 1951 et celui de la Finlande
(encore que l'élection présidentielle y ait lieu par un suffrage indirect qui donne une grandeinfluence
aux états-majors des partis). Les conséquences sont très différentes dans chacun de ces pays. Le
régime semi-présidentiel apparaît ainsi comme très malléable : par lui-même, il ne fonde par un
système politique nettement défini. Il établit certaines règles ; dans ce cadre, plusieurs jeux différents
peuvent être joués.
La détermination précise des règles du jeu semi-présidentiel est toujours difficile à cause ducaractère
ambigu du système. Elle l'est particulièrement dans la Ve République parce qu'il est superposé en
1962 à une structure antérieure déjà complexe, la Constitution de 1958 ayant posé le principe
parlementaire, mais l'ayant fortement atténué. Dans le régime parlementaire classique, le chef de
l'Etat ne joue aucun rôle politique. Il n'est qu'un personnage symbolique. Les pouvoirs que la
Constitution lui attribue sont purement nominaux: ils sont exercés en fait par le premier ministre et le
gouvernement, qui doivent contresigner toutes ses décisions.
La Constitution de 1958 a maintenu ce principe d'une façon générale en établissant un régime
parlementaire. Mais l'a expressément écarté pour certains pouvoirs du chef de l'Etat exercés
désormais sans contreseing: par exemple, la dissolution, le recours à l'article 16, le référendum, la
saisine du Conseil constitutionnel.
[…]
Document 15 : Extrait de la conférence de presse du général de Gaulle du 31 janvier
1964,
[…]
Tout d'abord, parce que la France est ce qu'elle est, il ne faut pas que le Président soit élu simultanément
avec les députés, ce qui mêlerait sa désignation à la lutte directe des partis, altérerait le caractère et abrégerait
la durée de sa fonction de chef de l'Etat. D'autre part, il est normal chez nous que le Président de la
République et le Premier Ministre ne soient pas un seul et même homme. Certes, on ne saurait accepter
qu'une dyarchie existât au sommet. Mais, justement, il n'en est rien. En effet, le Président, qui, suivant notre
Constitution, est l'homme de la nation, mis en place par elle - même pour répondre de son destin ; le
Président, qui choisit le Premier Ministre, qui le nomme ainsi que les autres membres du gouvernement, qui
a la faculté de le changer, soit parce que se trouve accomplie la tâche qu'il lui destinait et qu'il veuille s'en
faire une réserve en vue d'une phase ultérieure, soit parce qu'il ne l'approuverait plus ; le Président, qui arrête
les décisions prises dans les conseils, promulgue les lois, négocie et signe les traités, décrète, ou non, les
mesures qui lui sont proposées, est le chef des armées, nomme aux emplois publics ; le Président qui, en cas
de péril, doit prendre sur lui de faire tout ce qu'il faut ; le Président est évidemment seul à détenir et à
déléguer l'autorité de l'Etat. Mais, précisément, la nature, l'étendue, la durée de sa tâche, impliquent qu'il ne
soit pas absorbé, sans relâche et sans limite, par la conjoncture politique, parlementaire, économique et
administrative. Au contraire, c'est là le lot, aussi complexe et méritoire qu'essentiel, du Premier Ministre
français.
Certes, il ne saurait y avoir de séparation étanche entre les deux plans, dans lesquels, d'une part le Président,
d'autre part celui qui le seconde, exercent quotidiennement leurs attributions. D'ailleurs, les conseils et les
entretiens sont là pour permettre au chef de l'Etat de définir à mesure l'orientation de la politique nationale
et aux membres du gouvernement, à commencer par le premier, de faire connaître leurs points de vue, de
préciser leur action, de rendre compte de l'exécution. Parfois, les deux plans sont confondus quand il s'agit
d'un sujet dont l'importance engage tout et, dans ce cas, le Président procède à la répartition comme il le
juge nécessaire. Mais, s'il doit être évidemment entendu que l'autorité indivisible de l'Etat est confiée tout
entière au Président par le peuple qui l'a élu, qu'il n'en existe aucune autre, ni ministérielle, ni civile, ni
militaire, ni judiciaire, qui ne soit conférée et maintenue par lui, enfin qu'il lui appartient d'ajuster le domaine
suprême qui lui est propre avec ceux dont il attribue la gestion à d'autres, tout commande, dans les temps
ordinaires, de maintenir la distinction entre la fonction et le champ d'action du chef de l'Etat et ceux du
Premier Ministre.
[…]
Document 16 : Un ancien Président peut-il de nouveau être candidat à un mandat électif ? Conseil
constitutionnel, Décision, n° 84-983, AN du 7 novembre 1984.
« […]
Mais, considérant, d'une part, que la qualité de membre de droit du Conseil constitutionnel d'un
ancien Président de la République ne saurait, en l'absence de disposition expresse en ce sens, priver
celui-ci du droit normalement reconnu à tout citoyen, dans les conditions et sous les réserves
prévues par la loi, d'être candidat à tout mandat électif ; que, d'autre part, les membres de droit du
Conseil constitutionnel sont, sous la seule réserve de la dispense de serment expressément prévue
par l'article 3 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 dans la rédaction que lui a donnée
l'article 1er de l'ordonnance n° 59-223 du 4 février 1959, soumis aux mêmes obligations que les
autres membres du Conseil constitutionnel ; que leur sont notamment applicables les dispositions de
l'article 57 de la Constitution reprises à l'article 4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, desquelles
il résulte que les fonctions de membre du Conseil constitutionnel sont incompatibles avec celles de
membre du Parlement ; qu'il suit de là que l'élection au Parlementd'un membre de droit du Conseil
constitutionnel fait obstacle à ce que celui-ci siège au sein de ce Conseil ; qu'ainsi le grief analysé
ci-dessus, tiré de ce que M. Valéry GISCARD D'ESTAING aurait été inéligible, doit être écarté.
[…]