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Tribunal judiciaire de Nanterre

Affaire : Consorts SANCHEZ - MALAPRADE c/PICHEYRE


Dossier n° : 20230066
N° RG: 23/00664
Signifiées le 8 mars 2024

CONCLUSIONS D’INCIDENT N°2


DEVANT MADAME, MONSIEUR LE JUGE DE LA MISE EN ETAT
DEVANT LE TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTERRE

POUR :

1. Madame Maria Joséfa HERRERA-FERNANDEZ veuve SANCHEZ (veuve du défunt), née le 21


février 1948 à CACERES (Espagne), de nationalité espagnole, demeurant 42 rue du Buisson
Fleuri à LA QUEUE EN BRIE (94510)
2. Monsieur Olivier, Michaël SANCHEZ (fils du défunt), né le 31 mai 1973 à CHAMPIGNY SUR
MARNE (94500), de nationalité française, demeurant 6, rue Lequesne à NOGENT SUR MARNE
(94130)
3. Mademoiselle Inès, Maria SANCHEZ (fille du défunt), née le 21 février 1971 à CHAMPIGNY
SUR MARNE (94500), de nationalité française, demeurant 56, rue d’Alesia à PARIS (75014)
4. Madame Nelly, Thérèsa SANCHEZ épouse MALAPRADE (fille du défunt), née le 28 avril 1974
à CHAMPIGNY SUR MARNE (94500), de nationalité française, demeurant 14 B, rue Guy Moquet
à NOGENT SUR MARNE (94130)
5. Monsieur Julien, Alexandre MALAPRADE (gendre du défunt), né le 1er mai 1977 à MONT
SAINT AIGNAN (76130), de nationalité française, demeurant 14 B, rue Guy Moquet à NOGENT
SUR MARNE (94130)
6. Mademoiselle Manon, Marie SANCHEZ (petite-fille du défunt), née le 19 mai 2009 à NOGENT
SUR MARNE (94130), de nationalité française, représentée par son représentant légal,
Monsieur Olivier SANCHEZ, demeurant 6, rue Lequesne à NOGENT SUR MARNE (94130)
7. Monsieur Victor, Vincent, Jean SANCHEZ (petit-fils du défunt), né le 4 juillet 2011 à NOGENT
SUR MARNE (94130), de nationalité française, représenté par son représentant légal,
Monsieur Olivier SANCHEZ, demeurant 6, rue Lequesne à NOGENT SUR MARNE (94130)
8. Monsieur Jean, Pierre MALAPRADE (petit-fils du défunt), né le 15 avril 2007 à PARIS
(75014), de nationalité française, représenté par ses représentants légaux, Monsieur Julien
MALAPRADE et Madame Nelly SANCHEZ épouse MALAPRADE, demeurant 14 B, rue Guy Moquet
à NOGENT SUR MARNE (94130)
9. Monsieur Pierre, Joseph MALAPRADE (petit-fils du défunt), né le 13 juin 2009 à PARIS
(75014), de nationalité française, représenté par ses représentants légaux, Monsieur Julien
MALAPRADE et Madame Nelly SANCHEZ épouse MALAPRADE, demeurant 14 B, rue Guy Moquet
à NOGENT SUR MARNE (94130)
10. Mademoiselle Juliette, Marie, Blanche MALAPRADE (petite-fille du défunt), née le 29
octobre à PARIS (75012), de nationalité française, représentée par ses représentants légaux
Monsieur Julien MALAPRADE et Madame Nelly SANCHEZ épouse MALAPRADE, demeurant 14 B,
rue Guy Moquet à NOGENT SUR MARNE (94130)

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Ayant pour avocat constitué : Maître Jennifer VILLARD
Avocat au Barreau des Hauts-de-Seine
122 avenue Charles de Gaulle 92200 Neuilly-sur-Seine
Tel : 01 46 37 11 11
jennifer.villard@pichard.com; Toque : 521

Et pour avocat plaidant : Maître Pierre BICHOT


Avocat au Barreau de Paris
222 BLVD Saint-Germain - 75007 Paris
Tél : 01 58 05 38 05 ; Palais : P334

DEMANDEURS

CONTRE

1. Monsieur Pierre PICHEYRE, domicilié 2 rue Edgar Quinet 66650 Banyuls-sur-Mer

Ayant pour Avocat constitué :


Maître Delphine PLAT,
Avocat au Barreau de Paris
25 rue Jean-Pierre Timbaud
75011 PARIS

Ayant pour Avocat plaidant :


Maître Mathieu PONS-SERRADEIL
Avocat au Barreau des Pyrénées-Orientales
2 Place Jean Payra 66000 PERPIGNAN

2. La Sarl GEMS AFRICA, Immatriculée au RCS de Laval sous le n°B 490 880 721, dont le siège
social est situé au 16 Rue Ambroise Paré à Laval (53000), prise en la personne de M. Pascal
GERARD en qualité de gérant,

Ayant pour Avocat :


la SCP C.G.N.T
Maître Grégoire Noël,
Avocat au Barreau des Hauts-de-Seine,
42 rue Horace Vernet
ISSY LES MOULINEAUX (92130)

3. Monsieur Pascal GERARD, né le 4 mars 1958 à Paris (75016) demeurant 16 Rue Ambroise
Paré, 53000, Laval

Ayant pour Avocat :


la SCP C.G.N.T.
Maître Grégoire Noël,
Avocat au Barreau des Hauts-de-Seine
42 rue Horace Vernet ISSY LES MOULINEAUX (92130)

4. GTA venant aux droits de la SAS Groupe Proassur, Société par actions simplifiée à
associé unique, inscrite au RCS de Nanterre s sous le n° B 384 946 109 dont le siège social
est situé 74-78 rue Anatole France 92300 Levallois Perret prise en la personne de son
président en exercice

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Avocat postulant :
Monsieur Kazim KAYA
Avocat au Barreau des Hauts-de-Seine

Avocat plaidant :
Maître Lionel Jung-Allégret
Vendôme SELARL d’avocat Avocat au barreau de Paris
37 avenue Franklin D. Roosevelt
75008 Paris
Toque P350

5. La SA NELO & Co, société de droit luxembourgeois, dont le siège est sis au 283 Route
d'Arlon Strassen - 8011 Luxembourg,

N’ayant pas constitué avocat

6. Le Syndicat AML 2001, 122 Leadenhall Street, Londres (London EC3V 4AG), Angleterre,
souscripteur auprès des Lloyd’s de Londres participant à la police n°IF12F304 pour
Messieurs Picheyre et Gerard et prise en la personne de son mandataire général pour les
opérations en France, la société Lloyd’s France SAS inscrite au RCS de Paris sous le numéro
422 066 613, dont le siège social est situé 8/10 Rue Lamenais à Paris (75008), elle-même
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N’ayant pas constitué avocat

7. Le Syndicat ARK 4020, 30 Fenchurch Avenue, Londres (London, EC3M 5AD), Angleterre,
souscripteur auprès des Lloyd’s de Londres participant à la police n°IF12F304 spour
Messieurs Picheyre et Gerard et prise en la personne de son mandataire général pour les
opérations en France, la société Lloyd’s France SAS inscrite au RCS de Paris sous le numéro
422 066 613, dont le siège social est situé 8/10 Rue Lamenais à Paris (75008), elle-même
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N’ayant pas constitué avocat

8. Le Syndicat BRIT 2987 du Lloyd’s de Londres, participant à la police IF12F304 souscrite


pour Monsieur Pascal Gérard et prise en la personne de son mandataire général pour les
opérations en France, la société Lloyd’s France SAS inscrite au RCS de Paris sous le numéro
422 066 613, dont le siège social est situé 8/10 Rue Lamenais à Paris (75008), elle-même
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Ayant pour Avocat :


Kennedys AARPI,
Maître Nicolas Bouckaert,
Avocat au Barreau de Paris
31 rue de Lisbonne à PARIS (75008)

9. La société CGPA, société d’assurance mutuelle, dont le numéro de SIREN est le


78470236700045, 125 Rue de la Faisanderie 75115 Paris,

Ayant pour Avocat :


la SELARL KL2A – KNAFOU & LOUPPE Avocats associés
Maître Béatrice Louppe,
Avocat au Barreau de PARIS

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5 rue de Suresnes à PARIS (75008)

10. La compagnie d’assurance AXA France Iard, immatriculée au RCS de Nanterre sous le
numéro B 722 057 460, dont le siège social est situé 313 Terrasses de l’Arche, 92000
Nanterre

Ayant pour Avocat :


Maître Jérôme Charpentier
Avocat au Barreau de Paris
37 rue Davioud à PARIS (75116)

DEFENDEURS

TITRE I. RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

I. RAPPEL DES FAITS

Le 26 décembre 2012, Juan SANCHEZ recevait une proposition commerciale de la société GEMS
AFRICA pour un safari de chasse au lion du 21 janvier au 3 février 2013, à Tcholliré au
Cameroun (Pièce 1).

Le 27 novembre 2012, Juan SANCHEZ adressait le règlement demandé, correspondant à


l’intégralité de la prestation, soit 16.920 euros (Pièce n°2).

Deux factures étaient établies correspondant aux règlements respectifs de 5.920 euros (Pièce
n°3) et 11.000 euros (Pièce n°4).

Il convient de noter que ces factures sont datées mais ne sont pas numérotées. Elles ne
comportent pas de numéro de TVA intracommunautaire.

Deux attestations d’assurance de responsabilité civile de Juan SANCHEZ en tant que chasseur lui
étaient adressées par la société GEMS AFRICA, émanant du groupe PROASSUR, le 13 décembre
2012 :
- La 1ère auprès de la GMF (Pièce n°5/1)
- La 2ème auprès d’un assureur camerounais, la société ACTIVA Assurances (Pièce n°5/2)

Le groupe PROASSUR adressait, par envoi mail du jeudi 13 décembre 2012, les attestations
d’assurance de Juan SANCHEZ à GEMS AFRICA. Cette dernière les adressait par mail du 14
décembre 2012 à Juan SANCHEZ (Pièce n°5).

Un 2ème participant devant se joindre au voyage, un nouveau règlement de 5.420 euros était
adressé en janvier 2013 (Pièces n°6 et 7).

La société GEMS AFRICA affirmait détenir l’autorisation pour chasser un lion.

Le séjour se déroulait sans incident jusqu’au 30 janvier 2013.

Ce jour-là, le groupe formé par Juan SANCHEZ et Monsieur Pierre PICHEYRE, son guide, était
effectivement sur la piste d’un lion.

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S’étant placé à une distance suffisante de l’animal, Monsieur SANCHEZ tirait sur le lion.

N’étant pas certain que le coup de fusil était mortel, Juan SANCHEZ s’apprêtait à tirer aussitôt le
2ème coup de fusil.

Monsieur PICHEYRE était placé en retrait et était armé afin d’assurer, si nécessaire, la sécurité
de ses clients.

C’est alors que, sans la moindre nécessité, sans même que le lion tombé dans les fourrés ne soit
visible, Monsieur PICHEYRE a tiré pour abattre le lion.

Juan SANCHEZ se trouvant entre Monsieur PICHEYRE et le lion, c’est lui qui était mortellement
touché par le coup de feu tiré par son propre guide (Pièce n°8 et 9 – acte de décès-).

Le 30 janvier 2013, Juan SANCHEZ a été tué sur le coup.

Sa famille était prévenue et devait rapatrier sa dépouille mortelle, le 6 février 2013 (Pièce
n°10).

D’après les déclarations de la société GEMS Africa, Monsieur PICHEYRE était son préposé. Elle
est donc civilement responsable de ce dernier.

La mère, l’épouse, les enfants, gendre et petits-enfants de Juan SANCHEZ sont recevables et bien
fondés à solliciter la réparation de leur préjudice subi du fait de ce décès aussi brutal
qu’incompréhensible, en dehors de toute situation de danger ou d’attaque contre Juan SANCHEZ.

Par jugement du 2 mai 2013 (Pièce n°11), le Tribunal de 1ère instance de Tcholliré a déclaré
Monsieur Pierre PICHEYRE : coupable d’homicide involontaire sur la personne de Juan SANCHEZ
et l’a condamné à une peine de 6 mois d’emprisonnement avec sursis, outre confiscation de
l’arme.

Le jugement du Tribunal de 1ère instance de Tcholliré du 2 mai opposant M. Picheyre et le


Ministère Camerounais des Forêts et de la Faune, cité par le Défendeur a été frappé d’appel.

L’arrêt rendu par Cour d’appel de Garoua le 6 mars 2015 (Pièce n°12) a infirmé le jugement de
1ère instance et déclaré Monsieur Pierre PICHEYRE non coupable « du chef d’homicide
involontaire »

Toutefois, l’absence de condamnation au pénal n’exonère pas Monsieur Pierre PICHEYRE de sa


faute civile.

Il est précisé que Messieurs PICHEYRE et SANCHEZ avaient échangé leurs armes juste avant les
faits. Par conséquent, c’est l’arme de Juan SANCHEZ qui a été confisquée.

II. RAPPEL DE LA PROCEDURE

Par assignations des 10 décembre, 11 décembre et 13 décembre 2013, les Consorts SANCHEZ ET
MALAPRADE, ayants droits du défunt, Juan SANCHEZ, ont assigné Messieurs PICHEYRE et
GERARD ainsi que les sociétés GEMS AFRICA et GROUPE PROASSUR devant le Tribunal de
grande instance de Nanterre aux fins de voir :

- Dire et juger que Monsieur Pierre PICHEYRE est entièrement responsable du décès de

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Monsieur Juan SANCHEZ survenu le 30 janvier 2013 à Tcholliré au Cameroun,
- Déclarer ce dernier entièrement responsable des préjudices subis par les ayants droit du
défunt,
- Dire et juger que la SARL GEMS AFRICA est civilement responsable des fautes commises
par son préposé, Monsieur Pierre PICHEYRE,
En conséquence,
- Condamner la société GEMS AFRICA in solidum à indemniser les ayant droits de
Monsieur Juan SANCHEZ RAMOS,
- Dire et juger que Monsieur Pascal GERARD a délibérément et gravement manqué à ses
obligations, en qualité de gérant de la SARL GEMS AFRICA, en s’abstenant de contracter
au profit de celle-ci et de Monsieur PICHEYRE, une assurance auprès d’un assureur
solvable ayant son siège social en France causant ainsi un préjudice aux ayants droits de
Monsieur Juan SANCHEZ,
En conséquence,
- Le condamner in solidum avec Monsieur PICHEYRE, la SARL GEMS AFRICA et la société
GROUPE PROASSUR à indemniser les ayant droits de Monsieur Juan SANCHEZ,
- Condamner in solidum avec les défendeurs, la société GROUPE PROASSUR courtier et
assureur de la société GEMS AFRICA, à indemniser les ayants droit de Monsieur Juan
SANCHEZ,
- Les condamner in solidum à indemniser le préjudice moral des ayants droit de Monsieur
Juan SANCHEZ à hauteur de 245.000,00 euros outre la somme de 42.081,86 euros au
titre du préjudice matériel et celle de 10.000,00 euros au titre de l’article 700 du Code
procédure civile.

Par conclusions, les Consorts SANCHEZ et MALAPRADE sollicitaient la condamnation in solidum


des autres défendeurs et de la société GROUPE PROASSUR à indemniser les ayant droits de
Monsieur Juan SANCHEZ RAMOS au motif que la société GROUPE PROASSUR aurait commis une
faute quasi-délictuelle à l’égard des ayants droit SANCHEZ, en s’abstenant de fournir à Monsieur
PICHEYRE et à la société GEMS AFRICA, des contrats d’assurance responsabilité civile auprès
d’un assureur solvable dont le siège social serait sur le territoire français.

Le 3 octobre 2017, en raison de pourparlers, le Tribunal a ordonné « la radiation du rôle des


affaires en cours de l’instance sus référencée, sous réserve des diligences qui seraient accomplies
pour procéder à son rétablissement, notamment pour éviter la péremption. » (Pièce n° 13).

Le 17 janvier 2023, les consorts SANCHEZ et MALAPRADE régularisaient des écritures aux fins
de rétablissement de l’affaire.

Mais le 25 avril 2023, le Juge de la mise en état du Tribunal judicaire de Nanterre a rendu une
ordonnance de péremption de l’instance.

Par exploits d’huissier en date des 6 et 10 janvier 2023, les consorts SANCHEZ et MALAPRADE
faisaient délivrer une nouvelle assignation à l’ensemble des défendeurs aux termes de laquelle
ils formulent les mêmes demandes que celles précédemment formulées dans le cadre l’instance
périmée.

Par conclusions d’incident en vue de l’audience du 19 mars 2024 devant M. le Juge de la mise en
état :
- le conseil de Pierre PICHEYRE demande de :
o constater l’extinction de l’instance à la suite du décès de M. Picheyre
o et dire que les dépens resteront à la charge respective de chacune des parties.
- La société GTA (venant aux droits de PROASSUR) demande de :
o Déclarer l’action des consorts SANCHEZ à l’encontre de la société GTA venant aux
droits de la société PROASSUR irrecevable car étant prescrite ;

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o Mettre la société GTA venant aux droits de la société PROASSUR hors de cause
o Condamner les consorts SANCHEZ à verser à la société GTA venant aux droits de
la société PROASSUR la somme de 5.000,00 euros au titre de l’article 700 du Code
de procédure civile.
- la société CGPA, assureur de la société GTA demande de :
o déclarer l’action des consorts SANCHEZ et MALAPRADE irrecevable car prescrite
o débouter les consorts SANCHEZ et MALAPRADE et toute partie de toute
demande formulée à l’encontre de CGPA ;
o condamner les consorts SANCHEZ et MALAPRADE à payer à CGPA la somme de
5.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
o condamner les consorts SANCHEZ et MALAPRADE aux entiers dépens.

DISCUSSION

I. SUR L’IRRECEVABILITE DE LA DEMANDE D’EXTINCTION D’INSTANCE FONDEE SUR


L’ABSENCE DE CAPACITE A AGIR DU CONSEIL DE FEU PIERRE PICHEYRE

Monsieur Pierre PICHEYRE est décédé le 31 juillet 2023.

Le conseil de feu Pierre PECHEYRE n’a donc plus la capacité pour agir pour le compte du précité.

Seuls les héritiers de Pierre PICHEYRE peuvent désormais décider de reprendre l’instance et de
conclure.

En effet, la notification du décès d’une partie en cours d’instance, au sens de l’article 379 et 392
du Code de procédure civile, ne peut entrainer l’interruption de l’instance que si elle émane des
héritiers de la partie décédée qui entendent se prévaloir de cette interruption (Cass 3° civ., 6
juill. 2023, n°20-16.230, F-D : JurisData n°2023-011351).

Il est donc demandé au Juge de la mise en état de rejeter purement et simplement la demande
d’extinction de l’instance formulée pour le compte de M. PICHEYRE.

II. SUR L’IRRECEVABILITE DE LA DEMANDE D’EXTINCTION D’INSTANCE FONDEE SUR LE


CARACTERE TRANSMISSIBLE DE L’ACTION EN RESPONSABILITE

Par Conclusions d’incident, le conseil de Pierre PICHEYRE d’une part et de M. Pascal GERARD /
la société GEMS Africa d’autre part soutiennent que l’action en responsabilité pendante devant le
Tribunal judiciaire de Nanterre est personnelle et ne peut être transmise aux héritiers de Pierre
PICHEYRE.

2.1. A titre principal, l’action en responsabilité litigieuse est une action propre aux demandeurs

L’action en réparation pendante devant le Tribunal judiciaire de Nanterre vise à obtenir la


condamnation des défendeurs à l’instance à la réparation des préjudices matériels et moraux
subis par les demandeurs à la suite du décès de Juan Sanchez.

Cette action n’est donc pas susceptible d’être transmise à quiconque puisque les demandeurs
agissent en réparation de leur propre préjudice.

L’exception d’irrecevabilité fondée sur le caractère intransmissible de cette action en


responsabilité devra donc être rejetée.

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2.2. A titre subsidiaire, sur le caractère transmissible d’une action en responsabilité fondée sur
l’obligation de réparer un dommage

Dans le cas où votre Tribunal devait considérer que l’action en responsabilité intentée par les
demandeurs en réparation de leur propre préjudice résulterait d’une action transmise aux
ayants droits de Juan Sanchez à la suite du décès de celui-ci, votre Tribunal devrait constater que
cette action en responsabilité serait bien transmissible aux ayant droits de Juan Sanchez.

Le conseil de Pierre PICHEYRE, M. Pascal GERARD et la société GEMS Africa soutiennent que
l’action en responsabilité intentée par les demandeurs n’est pas transmissible à ses ayants droit.

Pour ce faire, il rappelle les termes de l’article 384 du code de procédure civile :
« En dehors des cas où cet effet résulte du jugement, l'instance s'éteint accessoirement à l'action
par l'effet de la transaction, de l'acquiescement, du désistement d'action ou, dans les actions non
transmissibles, par le décès d'une partie. »

Or, le principe de la transmissibilité à l'héritier du droit à réparation pour les différents


préjudices, tant matériel que physique ou moral subis par le défunt, est depuis longtemps acquis
en jurisprudence lorsque le de cujus a engagé l'action de son vivant (Cass. crim., 30 octobre
1957, Bull. crim., n° 681 ; Cass. crim., 4 décembre 1963, n° 63-90.310 N° Lexbase : A1053CG4,
Bull. crim., n° 348 ; Cass. crim., 30 janvier 1964, n° 63-91.758 N° Lexbase : A5144CKQ, Bull. crim.,
n° 39).

La Cour de cassation fonde sa solution sur la nature du droit à réparation, lequel "est un droit
patrimonial, né dans le patrimoine de la victime à la date du dommage et transmis à l'ayant cause
universel, héritier ou légataire, qui continue la personne de son auteur".
A ce titre et contrairement à ce qu’affirment GEMS Africa et M. Gérard, il n’y a pas ici à distinguer
selon la nature contractuelle ou délictuelle de la responsabilité.

Il en est de même de l’obligation de réparer, née dans le patrimoine de l’auteur du dommage,


pour les différents préjudices, tant matériel que physique ou moral causés par le défunt, lorsque
le de cujus a été engagé dans une action de son vivant. Contesté par GEMS Africa.

L’action à son encontre est transmissible à ses ayants droit qui ne justifient pas avoir renoncé à
la succession de leur auteur.

Il est en conséquence demandé au Juge de la mise en état de rejeter la demande d’irrecevabilité


formulée par le conseil de Pierre PICHEYRE, GEMS Africa et M. Gérard.

III. SUR L’IRRECEVABILITE DE LA DEMANDE D’EXTINCTION D’INSTANCE FONDÉE SUR


LA PRESCRIPTION

Par Conclusions d’incident, la société GTA (qui vient aux droits de la société PROASSUR) d’une
part et son assureur de responsabilité la société CGPA d’autre part affirment que l’action des
consorts SANCHEZ et MALAPRADE à leur encontre - initiée par leur acte introductif d’instance
signifiée les 6 et 10 janvier 2023 est prescrite, « plus de neuf ans s’étant écoulé depuis le décès de
Monsieur Juan SANCHEZ » (Conclusions d’incident GTA).

Toutefois, Juan SANCHEZ est décédé le 30 janvier 2013 et par exploits d’huissier en date des 6 et
10 janvier 2023, les consorts SANCHEZ et MALAPRADE – ayant droits de Juan SANCHEZ - ont
introduit la présente instance destinée à mettre en cause la responsabilité civile de la société

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GTA et de son assureur de responsabilité CGPA afin d’obtenir réparation des préjudices moraux
et matériels causés par la faute de GTA.

Or, le délai de prescription des actions en responsabilité nées d’un événement ayant
entrainé un dommage corporel, est de 10 ans (C. civ., art. 2226, al. 1er).

« L'action en responsabilité née à raison d'un événement ayant entraîné un dommage corporel,
engagée par la victime directe ou indirecte des préjudices qui en résultent, se prescrit par dix ans à
compter de la date de la consolidation du dommage initial ou aggravé ».

Cette prescription décennale est applicable quelle que soit la nature de l'action (action
contractuelle, comme extracontractuelle) et quelle que soit la qualité de la victime (victime
directe, comme victime par ricochet).

A ce titre :
- « il est notable que ce délai, désormais plus long que celui de droit commun, ne s'applique pas
seulement à la réparation du dommage corporel, mais plus généralement à la réparation de
tout préjudice (y compris un préjudice matériel ou un préjudice moral) dès lors qu'il est né d'un
événement ayant entraîné un dommage corporel …. »,
- « Tous les préjudices qui découlent d'un même fait générateur ayant causé un dommage
corporel sont donc ainsi soumis au même délai de prescription, qu'il s'agisse des préjudices de
toute nature découlant pour la victime directe de ce dommage corporel (frais médicaux, perte
de revenus, pretium doloris...), comme du préjudice afférent à un dommage purement matériel
causé par le même fait générateur (vêtements ou véhicule de la victime endommagés dans
l'accident au cours duquel elle a été blessée) ou des préjudices matériels ou moraux subis par les
victimes par ricochet » (souligné par les Concluants) (Fasc. 800-35 : Péremption /
JurisClasseur Procédure civile / Date du fascicule : 26 Octobre 2018).

Enfin, la CGPA soutient :


- que l’action directe du tiers lésé contre l’assureur de responsabilité de l’assuré responsable
se prescrit dans le même temps que l’action contre l’assuré, en l’espèce GTA (courtier de
GEMS Africa)
- qu’en l’espèce, les fautes reprochées à GTA auraient été commises dans son activité de
courtage et non par un « événement ayant entrainé le dommage corporel »,
- et qu’en conséquence l’action des demandeurs contre CGPA serait prescrite.

Or, les préjudices subis par les demandeurs à la présente action résultent d’un seul et même fait
dommageable, le décès de Juan Sanchez. En effet, en l’absence de décès, cette action en
responsabilité intentée à l’encontre du courtier de GEMS Africa et de son assureur n’aurait
aucun fondement juridique.

En conséquence, l'action des consorts Sanchez et Malaprade, se prescrivant par 10 ans, n'était
donc pas prescrite au jour où l'acte introductif de la présente instance a été notifié les 6 et 10
janvier 2023

La prescription n’est donc pas acquise et il est en conséquence demandé au Juge de la mise en
état de rejeter la demande d’irrecevabilité formulée par les sociétés GTA et CGPA (assureur de
responsabilité de GTA).

III. Article 700 CPC et dépens

L’équité commande que les sociétés GTA et CGPA soit condamnées in solidum à payer aux
Consorts SANCHEZ et MALAPRADE la somme de 5 000 €, sur le fondement de l'article 700 du
Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’instance.

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PAR CES MOTIFS

Il est demandé au Juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Nanterre de :

Vu les articles 2226 du C. civ. et 384 et 370 C. proc. civ. :

• Déclarer le conseil de feu Pierre PICHEYRE irrecevable en sa demande tendant à voir


constater l'extinction de l'instance, faute de qualité, laquelle appartient aux seuls ayants-droit
du défunt,

• Subsidiairement juger que l'action en responsabilité dirigée à l'encontre de Pierre


PICHEYRE, est à titre principal une action propre aux demandeurs et à titre subsidiaire
transmissible aux ayants-droit de Juan Sanchez,

• Juger Pascal GERARD et la société GEMS Africa irrecevables en leur demande tendant à voir
constater l'extinction de l'instance car l'action en responsabilité dirigée à l'encontre de Pascal
GERARD et de la société GEMS Africa est à titre principal une action propre aux demandeurs
et à titre subsidiaire transmissible aux ayants-droit de Juan Sanchez,

• Juger que l'action introduite par les consorts Sanchez n'est pas prescrite et débouter en
conséquence les sociétés GTA et CGPA de leur incident,

• Débouter Pierre PICHEYRE, Pascal GERARD et les sociétés GEMS Africa, GTA et CGPA de
l’intégralité de leurs autres prétentions, fins et moyens ;

• Condamner les sociétés GEMS Africa, GTA et CGPA à payer in solidum la somme de 5.000 €
au titre de l’article 700 C. proc. civ. à :
o En qualité d’ayants droit de Mme Maria-Joséfa RAMOS y RAMOS, veuve SANCHEZ, mère de
Juan SANCHEZ : Monsieur Olivier, Michaël SANCHEZ (fils du défunt), Mademoiselle
Inès, Maria SANCHEZ (fille du défunt), Madame Nelly, Theresa SANCHEZ épouse
MALAPRADE (fille du défunt)
o Madame Maria-Joséfa HERRERA-FERNANDEZ veuve SANCHEZ (veuve du défunt) :
o Monsieur Olivier, Michaël SANCHEZ (fils du défunt) :
o Mademoiselle Inès, Maria SANCHEZ (fille du défunt) :
o Madame Nelly, Theresa SANCHEZ épouse MALAPRADE (fille du défunt) :
o Monsieur Julien, Alexandre MALAPRADE (gendre du défunt :
o Mademoiselle Manon, Marie SANCHEZ (petite-fille du défunt), représentée par son
représentant légal, Monsieur Olivier, Michaël SANCHEZ :
o Monsieur Victor, Vincent, Jean SANCHEZ (petit-fils du défunt) ;
o Monsieur Jean, Pierre MALAPRADE (petit-fils du défunt), représenté par ses
représentants légaux, Monsieur Julien, Alexandre MALAPRADE, et Madame Nelly, Thérèsa
SANCHEZ épouse MALAPRADE :
o Monsieur Pierre, Joseph MALAPRADE (petit-fils du défunt), représenté par ses
représentants légaux, Monsieur Julien, Alexandre MALAPRADE, et Madame Nelly, Thérèsa
SANCHEZ épouse MALAPRADE :
o Mademoiselle Juliette, Marie, Blanche MALAPRADE (petit-fils du défunt), représenté
par ses représentants légaux, Monsieur Julien, Alexandre MALAPRADE, et Madame Nelly,
Thérèsa SANCHEZ épouse MALAPRADE :

• Condamner les sociétés GTA et CGPA in solidum aux entiers dépens dont distraction au
profit de Maître Jennifer VILLARD, Avocat au barreau des Hauts de Seine, Toque 521, en
application de l’article 699 du CPC.
SOUS TOUTES RESERVES

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BORDEREAU DE PIECES COMMUNIQUEES

Pièce n° 1. Propositions de GEMS Africa


Pièce n° 2. Lettre de J. Sanchez à GEMS Africa du 27/11/2012
Pièce n° 3. Facture GEMS Africa pour un montant de 5.920 euros
Pièce n° 4. Facture GEMS Africa pour un montant de 11.000 euros
Pièce n° 5. 5. 5.1 et 5.2. Mail Proassur du 14/12/12 + 2 attestations
Pièce n° 6. Mail du 11/01/2013 – Bulletin d’inscription de M. Pénet
Pièce n° 7. Lettre de M. Sanchez à GEMS Africa du 15/01/13
Pièce n° 8. Constat et acte de décès de Juan Sanchez
Pièce n° 9. Registre des décès
Pièce n° 10. Autorisation de transfert de la dépouille mortelle de Juan Sanchez
Pièce n° 11. Jugement du Tribunal de 1ère instance de Tcholliré du 2 mai 2013
Pièce n° 12. Arrêt de la Cour d’appel de Garoua du 6 mars 2015
Pièce n° 13. Ordonnance de radiation Tribunal judiciaire de Nanterre du 3 octobre 2017

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