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En quel sens peut-on dire que la mort est la fin de la vie ?

Exemple d’introduction
4 [NB : de nombreuses bonnes amorces possibles avec En attendant Godot,
Replay et bien d’autres références ; encore faut-il qu’elles soient précises !] Dire
6 que la mort est la fin de la vie pourrait relever de l’évidence, si l’on entend par
« fin » le terme et l’arrêt des fonctions d’un corps organique, humain ou non. En
8 effet, tous les vivants (zôa) sont mortels et la mort constitue bien le terme de la vie
biologique (zoè). Le dire constituerait donc la reconnaissance d’une vérité
10 incontestable. Pourtant, cette vision matérialiste de la mort est contestée par les
nombreuses approches spiritualistes, notamment religieuses, qui voient dans la
12 mort non la fin de la vie mais une étape vers un « au-delà ». S’agit-il toutefois
seulement là d’une illusion rassurante ou d’une croyance légitime ? En quel sens,
14 par conséquent, dire que la mort constitue bien le terme de la vie biologique ?
Cela étant, même d’un point de vue scientifique, les traces laissées par un être ne
16 disparaissent pas à sa mort : ses atomes sont réutilisés par d’autres corps, et
l’héritage des vivants continue à vivre, aussi bien socialement, historiquement,
18 qu’artistiquement, par exemple. La vie, en effet, ne désigne pas seulement
l’existence biologique mais également un vécu plus large, psychique autant que
20 culturel (bios), susceptible de servir de modèle : ainsi les Vies des hommes illustres
de Plutarque [ou La vie de Galilée de Brecht]. Quelles intentions (« sens »)
22 président alors au discours affirmant que la mort constitue l’anéantissement de
toute vie ?
24 Serait-ce avec l’idée qu’elle constituerait la « finalité » de l’existence ? En effet,
certains discours voient dans la vie une « préparation à mourir ». La mort
26 désignerait ici non l’arrêt mais le but de l’existence. Toutefois, cette approche
risque non seulement de négliger « cette vie » mais encore de relever d’une
28 domination théologico-politique. Mais, inversement, dire que nous vivons en
attendant de mourir, comme Vladimir et Estragon dans en attendant Godot, n’est-
30 ce pas profondément désespérant ? Est-il alors souhaitable, à supposer que ce soit
autorisé (« peut-on », en un double sens), de dire que la mort est bien la finalité de
32 la vie ?
En somme, dire que la mort est bien la fin de la vie relève-t-il d’un savoir véritable
34 ou d’une croyance discutable ? Si ce discours est une croyance, qu’est-ce qui le
motive et, surtout, quelle validité lui accorder, pour que la mort constitue non une
36 entrave mais la condition d’une vie pleinement vécue ?
On pourrait certes soutenir que la mort est la fin de la vie au sens de … Cependant,
38 on ne peut complètement le dire, dans la mesure où … En réalité, on peut peut-
être le dire à condition de …
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42 Plan (un exemple parmi d’autres !)

44 Peut-on dire que la mort est la fin de la vie, son terme, car ce serait vrai ?
Le dire semble pourtant paradoxal car la mort semble avant tout la fin d’une
46 vie, non de la vie.
1.les vivants, en mourant, permettent à d’autres vivants de vivre : « cycle » stoïcien
48 de la « palingénésie » (Pensées ou Manuel), dans lequel il s’agit moins d’opposer
vie et mort que naissance et mort, dans le cycle de la vie ; 2. pas seulement
50 croyance religieuse, mais écosystème scientifique contemporain, par exemple
Leopold, Almanach pour la biosphère ; E. Klein pour les planètes et étoiles, etc. Ici,
52 vie = « zoè » [NB : un dévt sur le Président de Simenon aurait également été
pertinent, à condition de ne pas mélanger trop d’idées dans vos §, car il s’agit là de
54 vie humaine et non de vie au sens large] Q : est-ce à dire que ce discours serait
dépourvu de sens ?
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Cela dit, l’affirmer semble vrai puisque la mort constitue bien le terme
58 biologique de chaque vie.
1. Désorganisation des fonctions corporelles, voir atomisme épicurien (Lettre à
60 Hérodote) et désagrégation des corps vivants 2. Mais aussi mort comme fin de la
conscience et de l’identité, donc du sujet (Ménécée ; Noces de Camus, etc.). Donc
62 approche matérialiste. Obj : que faire alors des discours qui soutiennent que la
mort n’est pas la fin absolue de la vie ?
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On peut certes dire que la mort n’est qu’un passage, non une fin absolue,
66 mais ce discours relève d’une croyance, non d’un savoir. [NB : fin absolue # fin en
soi ! NB 2 : marquez un retrait pour chaque §]
68 1.Arguments en faveur de l’existence d’une « âme », distincte du « psychisme »
[=travail conceptuel] sont possibles : miracles, « consensus omnium », indivisibilité
70 de l’âme (Platon, Thomas d’Aquin, Descartes…), EPM, etc. 2. Cependant, ils sont
problématiques [voir prochain cours sur l’âme ; attention cpdt à la cohérence des
72 §]. Cela dit, on peut (à peu près) scientifiquement établir en quoi consiste la mort
biologique, mais pas si ce terme est un absolu, pour une « âme » distincte du
74 « psychisme ». Il s’agit donc d’un discours de croyance… dans tous les cas, même si
toute croyance ne se vaut pas.
76 NB : voir La science de la résurrection de Charpier sur les « EPM » (=NDE), qui ne
sont pas ce que vous en croyez.
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TRANS 1. On peut donc dire que la mort est le terme de la vie biologique car
80 cela semble plutôt juste, au plan individuel et biologique, mais sans prouver que ce
terme constitue un absolu indépassable. En effet, il s’agit avant tout de croyances
82 plus que de seuls savoirs. 2. Quel sens accorder alors aux discours qui soutiennent
que la mort est une fin seulement provisoire, et non absolue ?
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Quels sens et intentions attribuer ainsi aux discours qui tiennent la mort pour
86 une fin-arrêt provisoire de la vie ?
Dire que la mort n’est pas une fin définitive, n’est-ce pas avant tout pour se
88 rassurer ?
1. Il faut se rassurer des injustices du monde, et donc imaginer que la mort
90 ouvrirait sur un au-delà plus juste (« paradis » : voir vos références en histoire de
l’art, théologie, métaphysique… de Platon, République à Marx, Critique de la
92 philosophie du droit de Hegel) 2. mais aussi se rassurer face aux abîmes de la mort
comme anéantissement (Ionesco, Roi se meurt ; Camus, Sisyphe ; Freud, Avenir,
94 etc.). Donc dire que la mort n’est pas une fin absolue exprime un désir de justice et
de réassurance : son « sens ». Obj : mais ce discours n’a-t-il pas été dévié et utilisé
96 à des fins bcp moins justes ?
En effet, dire que la mort n’est qu’une fin apparente ou provisoire permet
98 souvent de dévaloriser la vie ou/et d’imposer une domination théologico-politique.
[NB : penser à Baudelaire était une bonne idée, à condition de développer son
100 « rejet » de la vie et de le théoriser]
1. logique du « martyre », notamment djihadiste, avec l’espoir de gagner le paradis
102 (qui seul compterait) en tuant les « mécréants » pour se venger des « injustices »
(Benslama, Le surmusulman ; G. Kepel, Terreur et martyre) [NB : imaginer que la
104 vie ne serait qu’un « test » en vue de l’au-delà n’est pas une croyance universelle,
pas même au sein des religions monothéistes. En outre, les croyances religieuses
106 évoluent, y compris au sein d’une même religion !] 2. Ou du moins d’imposer un
ordre social autoritaire, en se faisant l’interprète exclusif de la vie « d’après » :
108 critique de l’épicurien Lucrèce, De rerum, de Spinoza, Traité théologico-politique et
des Lumières… jusqu’à aujourd’hui). Par conséquent, nier que la mort soit une fin
110 absolue permet d’instaurer un ordre social et politique problématique. Ne faut-il
pas alors dire et reconnaître que la mort est bien la fin de la vie absolue ?
112 Le problème vient du fait que présenter la mort comme une fin définitive
peut produire un sentiment d’absurdité et donc de … non-sens.
114 1. Sentiment d’absurdité et de vanité de l’existence humaine : « vanités » ; En
attendant Godot ; existentialisme athée en général 2. Au risque de dévaloriser à
116 nouveau la vie humaine : Ames fortes de Giono ; Lettres à un ami allemand de
Camus ou Caligula de Sartre ; Frères Karamazov de Dostoïevski, etc. Ainsi, dire que
118 la mort est l’anéantissement de la vie risque de produire un effet de non-sens, et
ne revalorise pas forcément la vie.
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TRANS 1. Paradoxalement, le discours sur la fin définitive et provisoire


122 peuvent se rejoindre dans une forme de dévalorisation de la vie. 2. Cela dit,
comme ce n’est pas une nécessité, il importe de savoir s’il est possible de
124 déterminer en quel sens, souhaitable cette fois-ci, il possible de définir la mort
comme fin de la vie.
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En quels sens peut-on alors soutenir que la mort est la fin de la fin, s’il s’agit
128 d’éviter le non-sens de l’existence ? [NB : de multiples réponses/parcours existent !]
Peut-être pourrait-on considérer que la mort constitue la finalité de la vie
130 humaine, et qu’il faut s’y préparer.
1. Discours lié à la spécificité de la condition humaine : non pas seulement un
132 vivant, donc un mortel, mais un être se sachant mortel. Conscience « d’être-pour-
la-mort » selon Heidegger, Être et temps [repris par Sartre…] ; Pascal, Pensées. 2.
134 Donc préparation à mourir, avec a) soit préparation pour une autre vie éventuelle,
mais pbq a) soit désir de laisser une trace de son passage pour tenter de
136 « dépasser » la fin de la vie : enfants, œuvre d’art, trace historique, etc. (Arendt,
Condition) c) soit encore « philosopher c’est apprendre à mourir » (Montaigne,
138 Essais ; Shakespeare, Hamlet « readyness is all »…). Donc on peut dire que parler
de la mort comme finalité revient à s’y préparer. Objection spinoziste : « l’homme
140 libre ne rien à rien de moins qu’à la mort » (Ethique), cad que ce n’est peut-être
pas le plus important.
142 En réalité, on peut dire que la mort constitue une finalité de l’existence, non
pour subrepticement faire mine de la dépasser, mais afin de considérer que c’est à
144 partir de cette finalité que la vie « bonne » s’évalue.
1. Dire que la mort est la fin de la vie, non pour s’y préparer, mais pour savoir ce
146 qui est vraiment important… dans la vie. Replay de Grimwood [ou Epicure, encore]
cad choisir et agir, plutôt qu’attendre dans le non-sens beckettien. Cela oblige à
148 savoir ce qui est précieux et utile… ou non, parce que l’on dit et se rappelle que
nous allons mourir (« memento mori »), et qu’il est fort possible (quoique non
150 certain) que ce soit un anéantissement. 2. Dans ces conditions, importance de
préserver les conditions de la vie bonne ou/et juste (pas seulement de la
152 « survie »), pas seulement à titre individuel, mais collectif : moralement,
politiquement, écologiquement… [autant de références possibles ! NB : on
154 pourrait par exemple réfléchir sur le sens « autorisé » à dire cela (« peut-on »), cf.
les politiques autorisant ou non la réflexion sur ces questions].

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