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Donc dés ce premier mouvement, si nous pouvons relever des aspects réalistes, bien d’autres
relèvent du comique carnavalesque. Derrière le masque d’Alcofribas, narrateur très présent dans le
texte, se cache un Rabelais ironique et critique de la médecine dite traditionnelle, et d’une acceptation
sans condition des textes bibliques.
2ème mouvement : Une naissance fabuleuse (lignes 14 à 20)
A cause de ce CC de cause -> un lien de cause à conséquence permet
contretemps l’enchainement des 2 &
placenta le champ à nouveau signe de l’érudition médicale de Rabelais
la veine cave lexical précis qui utilise ses compétences pour manier l’humour : le
épaules l’oreille du corps contraste entre le réalisme des termes et
diaphragme l’invraisemblance de la naissance est en effet
comique. La précision médicale accentue le caractère
absurde de la naissance)
traversa Une suite de mettent en scène un nourrisson qui décide de se sortir
continua verbes au d’affaire tout seul et se fraie un autre chemin que celui
sortit passé simple à conçu naturellement Il fait preuve de volonté et de
la voix active choix délibéré comme le montre « continua son
pastiche du chemin ». l’enfant déjà doué d’une capacité de raison
style épique extraordinaire opte intentionnellement pour le chemin
registre qui mène à la vie. L’héroïque nourrisson Gargantua
héroïcomique nait tel les grands héros et dieux antiques, nés aussi
de manière extraordinaire (Athéna sort de la tête de
Zeus, et Dyonisos de la cuisse de jupiter). C’est une
manière pour Rabelais d’inscrire son héros dans la
lignée des grands personnages mythologiques) Il y a
ici pastiche du style épique : avant même sa
naissance et en décrivant ses pérégrinations à travers
le corps de sa mère, Gargantua effectue une sorte
d’Odyssée intérieure. Il est déjà, avant même d’être
né, un nouvel Ulysse. On pourrait ici parler d’héroï-
comique, en raison du contraste entre le caractère
héroïque de l’aventure et le caractère trivial du
contexte.
• En outre, dès après sa naissance, le héros se
distingue des autres enfants par un comportement
exceptionnel. On retrouve ici un élément important des
« enfances » de héros, qui constituent un véritable
genre (voir Les Enfances du Cid), où il s’agit de
montrer que le héros adulte est déjà en germe dans
l’enfant en insistant sur ses exploits précoces ; mais ici
l’exploit en question est trivialisé, et qui plus est «
pantagruélisé », puisqu’il s’agit de réclamer à boire.
Dès qu’il fut né prop sub prop sub circonstancielle de temps marque le lien
circonstancielle chronologique, le passé simple insiste sur la rapidité
de temps de l’instant, une quasi simultanéité
comme les autres comparaison il n’est pas ordinaire mais extraordinaire (comme
bébés par la négative, précédemment):
« Mies ! mies ! miès !» injonction : allusion à une légende antique : un roi égyptien a fait
exclamative enfermer dans un isolement total deux nourrissons
afin de savoir quelle était la langue « naturelle ».
lorsque ceux-ci poussèrent leur premier cri, ce fut le
mot pain en phrygien, d’où la moquerie de Rabelais
mies (céréale dont on fait le pain)
« À boire ! A boire ! À à nouveau 3 non pas pour manger mais pour boire on peut
boire ! » injonctions comprendre qu’il demande à téter, mais vu le contexte
exclamatives A de beuverie, on peut aussi comprendre qu’il demande
nouveau un plutôt du vin comme le laisse entendre la comparaison
rythme ternaire à suivre,
noble
comme s’il invitait tout le monde présent ne boit pas du lait !.
le monde à boire
Et si fort qu’il fut hyperbole+ rappel de son caractère extraordinaire (c’est un
entendu de tout le jeux de mot géant ) et du registre comique toujours présent
pays de Beuxes et du comique avec
Bibarais. le verbe boire
en latin bibere
Bibarais
Ce nourrisson est donc extraordinaire de par bien des aspects, il se choisit un chemin à travers
le corps de sa mère pour naître comme les dieux et héros antiques, il a déjà des envies d’adultes et un
organe vocal surdimensionné. Mais ce qu’il réclame est prosaïquement de partager un moment de
beuverie commune. Cela crée une rupture comique avec le reste du texte et tourne à la parodie des
récits de héros extraordinaire. Mais de manière plus symbolique cet appel à boire pourrait correspondre
à une soif de connaissance qui caractérisera Gargantua et qui caractérise les penseurs humanistes.
Boire c’est aussi accepter ses besoins physiques humains (derniers mots de jésus rappelant son
humanité + son attachement à la vie terrestre : « j’ai soif »)
3ème mouvement : Un commentaire comique et critique du narrateur (ligne 21 à 29)
Je suppose que vous pronoms changement de ton, Alcofribas s’adresse à ses
ne croyez pas cette personnels P1 et lecteurs, il manifeste sa peur légitime que nous ne
étrange nativité P5, présent le croyions pas. On passe donc d’une énonciation
d’énonciation historique (on raconte une histoire au passé à la
troisième personne) à une énonciation de discours
(on s’adresse au présent à un interlocuteur)
Si vous n’y croyez pas, répétition du Alcofribas met au défi le lecteur puis le rejette Il y a
je ne m’en soucie verbe croire une ironie sous-jacente de la part de Rabelais,
guère évidemment, mais Alcofribas lui-même se montre
un peu trop insistant pour ne pas être lui-même
surenchère suspect :, puis effet d’insistance à travers la
Mais un homme de accumulative reformulation, la surenchère accumulative,
bien, un homme de l’expression du haut degré et le parallélisme
bon sens Alcofribas utilise donc l’insistance pour plaider la
expression du véracité, et Rabelais utilise un argument par
croit toujours haut degré l’absurde pour dénoncer la crédulité de ceux qui
croient sans réfléchir : c’est en effet paradoxal
parallélisme qu’un « homme de bon sens » croit (présent de
ce qu’on lui dit et ce syntaxique et vérité générale) tout ce qu’on lui dit sans réfléchir,
qu’il trouve écrit phonique -> adverbe « toujours » renforce les deux arguments.
Est-ce contre notre loi, Questions qui miment un échange fictif : c’est l’occasion
contre notre foi, contre rhétoriques d’engager une réflexion critique sur la crédulité
la raison, contre les imposée par l’église catholique ;:
Saintes Écritures ? polyptote du
verbe croire c’est bien une critique des croyants trop crédules
Pour ma part, je redondance de la Alcofribas veut s’imposer donner son avis personnel
1ère personne du et veut influencer et diriger la pensée du lecteur
singulier,
dans la Sainte Bible argument pour convaincre son lecteur).
d’autorité
Et si telle avait été la nouvelle question pour convaincre son lecteur + association décalée
volonté de Dieu, diriez- rhétorique donc comique du nourrisson gargantua à jésus».
vous qu’Il n’aurait pu connotation mélange de sérieux et de comique. Alcofribas est
mener à bien cette religieuse de décrédibilisé par Rabelais
nativité ? « nativité
Ha ! de grâce ! 2 interjections et détournement comique de lexique religieux:
jeux de mot de
Rabelais sur la
2ème
n’emberlificotez jamais un impératif aux Alcofribas donne un ordre à son lecteur il lui donne
vos esprits avec ce sonorités l’ordre de ne pas trop réfléchir ! il nous conseille la
genre de pensées comiques paresse intellectuelle plutôt que de faire usage de
stupides notre raison : Au XVIème la foi en la seule religion
catholique était obligatoire. La Sorbonne (Rabelais
vise à l’intérieur du collège de la Sorbonne la
faculté de théologie) estimait ainsi avant tout que la
foi était une affaire de crédulité. On devait croire
parce qu’il en était décidé ainsi (expression foi du
charbonnier) Rabelais à travers l’absurdité du
raisonnement condamne cette croyance sans
réflexion d’Alcofribas (comment croire sans se
poser de question qu’un enfant peut naître par
l’oreille gauche !
Car je vous dis que, à présent de vérité argument se reposant sur la croyance commune :
Dieu rien n’est général Dieu est tout puissant, tout de suite décrédibilisé
impossible par la conclusion :
S’il le voulait, les Cette apologie est donc bien à entendre comme un appel à user
femmes auraient ironique de la d’un scepticisme modéré à ne pas croire tout ce
dorénavant leurs crédulité que dit l’église mais à faire fonctionner notre
enfants de cette façon, raison ;cette démarche n’empêche toutefois pas la
par l’oreille. foi, à condition quelle soit sincère et pas apprise
Alcofribas prend la parole et s’adresse avec force au lecteur pour lui enjoindre de croire en son
histoire. Il utilise des arguments moraux, d’autorité et plaise pour la croyance contre la réflexion. Le
registre employé par le narrateur passe du sérieux au comique. Rabelais derrière Alcofribas dresse un
constat ironique sur la croyance sans condition ni réflexion réclamée par l’église. En effet, En
employant le terme « nativité », Alcofribas fait directement référence au récit de la naissance de Jésus ;
en outre, l’enfant qui naît par l’oreille fait allusion à la métaphore selon laquelle Jésus a été conçu par
l’oreille, puisqu’en ange a annoncé cette naissance à Marie en lui soufflant la nouvelle à l’oreille. Mais
ce parallèle se fait lors d’un épisode scatologique, carnavalesque, où se mêlent tripes, excréments,
détails organiques peu ragoûtants… Il y a donc une satire religieuse et une réflexion sur la part de
merveilleux et d’invraisemblance qui entre dans les récits chrétiens
Nous assistons bien à une naissance burlesque où le nourrisson est tour à tour associé à des
héros de l’antiquité puis à un joyeux convive de beuverie, symboliquement on peut le voir également
comme un humaniste ayant soif de savoir. Cet accouchement est l’occasion pour Rabelais de traiter
avec ironie et de critiquer une médecine traditionnelle inefficace voire dangereuse. Dans le dernier
paragraphe du texte. Alcofribas prend la parole et veut convaincre son lecteur de la véracité de ses
dires mais il ne fait qu’appeler avec force à croire sans réfléchir ni raisonner. Il prend comme argument
l’église et la religion. En cela il permet à Rabelais de traiter avec ironie et de condamner la foi du
charbonnier. Il nous engage, en humaniste, à une foi sincère et réfléchie. Le propos de Rabelais
s’inscrit dans la logique humaniste qui a soif de connaissances, comme le nourrisson Gargantua, qui
souhaite un accès direct au texte religieux et ne veut pas croire sans penser, et qui est ouvert à
diverses acquisitions de compétences : la médecine, la religion. On retrouve une même critique sous
jacente au comique dans Histoire comique des états et empire de la lune de Cyrano de Bergerac