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Introduction :

Dans ses Mémoires, Louise Michel laisse échapper ce cri révélateur: "Je parle peu, mais
j'écris". Cette remarque singularise d’emblée son auteur. En effet, la France bourgeoise du
dix-neuvième siècle ne fut guère tendre pour les femmes écrivains. Reléguées à leur univers
domestique privé, l'accès des femmes à l'espace public est restreint. Or, leur venue à
L'écriture met en danger justement ce partage des sphères. Face aux censures quasi
générales, les femmes écrivains eurent bien souvent recours aux pseudonymes masculins,
afin de pouvoir se faire publier tout en restant dans un anonymat protecteur. Louise Michel,
choisit la voie contraire. Loin de se cacher derrière un nom d'emprunt, elle profite de la
notoriété de son nom pour écrire. Institutrice et militante révolutionnaire, Louise Michel
s'engage dans la Commune de Paris en 1871. Étendard de la lutte pour l’éducation des
femmes, elle représente l’anarchie féminine au sein d’une société patriarcale. Dans cet
extrait de ses Mémoires, écrit en 1886, Louise Michel se présente comme porte parole des
femmes. Ces Mémoires constituent une synthèse des facettes de sa personne.Elle
s’adresse à la gente masculine tout en laissant paraître un appel à la révolte pour l’égalité
des sexes en dénonçant les travers de la société. Par conséquent, nous nous demanderons
dans quelle mesure Louise Michelle dénigre la société du 19e et se proclame militante
avant-gardiste de l’émancipation des femmes. Nous étudierons d’abord la critique de la
condition féminine du XIXe siècle à travers une réification de la femme, puis le dénigrement
sarcastique et hyperbolisé de la femme, et enfin, un cri et une revendication à la liberté.

Plan détaillé :

1. Louise Michel a travers une reification de la femme, critique la condition feminine


du 19e siècle.

A) La femme comme éternelle esclave de l’homme

Cet extrait développe une image terrible de la condition féminine, un double esclavage.

- Esclave est le prolétaire, esclave entre tous est la femme du prolétaire.


D’abord → esclavage économique / car le texte s’inscrit dans la réflexion marxiste sur la
lutte des classes entre le prolétariat et le capital, ici représenté par « l’entrepreneur ».

- La femme occupe la place d’un sous-prolétariat, sont réduites à un état encore pire
que celui des hommes
- La formule se veut percutante, et prend ainsi valeur de vérité.

“Et qui a pour son plaisir développé leur coquetterie et tous les autres vices agréables aux
hommes ?” l.30
Louise Michel sous entend que :

→ Tout ce que la femme fait pour soi est déstiné a la séduction et a la soumission de
l’homme.

→ Pas de plaisir pour soi. Le but d’une vie et l’ambition féminine serait de combler la gente
masculine
- “Un travail qui leur rapporte tout juste le fil qu'elles mettent, mais rapporte beaucoup
à l'entrepreneur” l.15

→ L’homme serait à l’épicentre de la société dans tout les domaines tandis que la femme
est sa prisonnière

→ fait écho aux thèmes d’actualité → inégalité des salaires entre les sexes. Prouve
l’avant-gardisme de Louise Michel.

- “l'homme tient à ce qu'elle reste ainsi, pour être sûr qu'elle n'empiétera pas sur ses
fonctions, ni sur ses titres.” l.41

→ accusation des hommes / sorte de complexe d’infériorité, ne veulent pas que les femmes
puissent atteindre leur niveau social et intellectuel.

→ sorte de malignité masculine dans cette citation.

B) En toute circonstance la femme sera toujours considérée comme prolétaire


- « Et le salaire des femmes ? » l.11

→ la réponse qu’elle donne à cette interrogation oratoire réduit la valeur du salaire


progressivement: « un leurre », « illusoire », « c’est pire que de ne pas exister ». l.12

→ les femmes commencent à avoir conscience de leur exploitation, et la refusent alors.

→ lexique imagé et violent : « crever de faim dans un trou, si elles peuvent, au coin d’une
borne et d’une route », « poussées par la faim, le froid, la misère ».

→ Cette violence suscite une pitié auprès des lecteurs.

→ Esclavage psychologique et moral

- “L'une, la prend qui veut; l'autre, on la donne à qui on veut.” l.8


- “Dans la rue, elle est une marchandise.” l.37

→ Nous observons une allégorie de la femme, la transformant en une chose banale et


accessible a tous.

→ L'être n’a plus de valeurs et n’a aucun libre arbitre. (peu importe la classe sociale “belle
fille .. dot”)

→ Style d’écriture déstabilisant pour les lecteurs de par la violence des propos
Ainsi Louise Michel affirme que les femmes en sont réduites à la misère

- « dans son ménage le fardeau l’écrase ».


→ le mariage est une autre forme d’esclavagisme / d’oppression
2. Un dénigrement sarcastique et hyperbolisé de la femme

A) Une critique acerbe de la société sous forme de réveil

Domination masculine qui fait de la femme la victime par excellence


→l’hyperbole qui amplifie son état d’asservissement : « Partout l’homme souffre dans cette
société maudite ; mais nulle douleur n’est comparable àcelle de la femme ». l.35

- “Il est probable qu'on les égorgerait tout de même, qu'ils tendent ou non le cou.” l.2
→ Un langage cru sur une réalité sordide.

- « attirées par les drôles et drôlesses qui vivent de ça ». → Louise michelle prend le
partie des prostituées en justifiant leur choix (cependant, ton sarcastique pour
amplifier leur misère)

→ Lexique péjoratif contre ceux qui profitent ainsi de la misère des femmes: « il y a des vers
dans toutes les pourritures ». l.18

→ image pathétique : « les malheureuses se laissent enrégimenter dans l’armée lugubre qui
traîne de Saint-Lazare à la Morgue » l.19

*Saint-Lazare → hôpital qui accueillait les prostituées, mais souvent trop tard pour les
soigner, d’où « la Morgue » /enterrer indignement.

→ La femme est ainsi déshumanisée , source de « dégoût » car méprisée « dans le


monde». l.40

- Louise Michelle dénonce la société du XIXe qui ferme les yeux volontairement sur la
condition de la femme.

B) Louise Michel accuse l’abstention des femmes dans une diatribe destiné aux
hommes

Dans cet extrait, l’homme se retrouve accusé. Cependant, Louise Michelle accuse aussi les
femmes qui restent dans le silence et qui subissent.

- « S’il n’y avait pas tant d’acheteurs, on ne trafiquerait pas sur cette marchandise »
l.23.

→ Le désir de l’homme entretient la prostitution (=la misère de la femme) Prostituées sont


critiquées alors qu’elles restent convoitées → hypocrisie masculine

→ l’homme est responsable de la corruption morale des femmes

- “Ce sont des armes maintenant, armes d'esclaves, muettes et terribles” l.33

→ Les femmes suivant les valeurs inégalitaires de la société /“Proudhon” décrédibilise le


combat des autres.
*Proudhon symbole de la misogynie enracinée chez les penseurs révolutionnaires

→ Hors mi les hommes, ces femmes sont un danger pour l’émancipation féminine = vivent
dans la dépendance et la soumission / terme “muette” montre l’abstention de ces femmes à
leur propre ascension sociale

→ récurrence du mot “armes” = allusion à la guerre / guerre des sexes ?

3. Un cri et une revendication à la liberté

A. A travers un ton pamphlétaire, louise michel fait appel à la révolte anarchiste


féminine

On observe, chez l’auteur, une joie quand elle se rend compte des façons dont les femmes
peuvent prendre leur revanche sur le « pante »

→ les femmes le volent : « Tant mieux ! « / « Pourquoi y allait-il ? » / mettre fin aux jours de
cet homme → l’approbation devient de l’enthousiasme : « Bravo ! Elle débarrasse les autres
d’un danger, elle les venge ». l.26

Le discours devient un appel à la vengeance

- « il n’y en a pas assez qui prennent ce parti-là ».

→ encourage les femmes à ruiner moralement et financièrement les hommes

→ Il faut désormais agir = fait appel à la révolte

- le terme “femme fatale” est utilisé → Elles retournent contre les hommes les artifices
que ceux-ci les ont forcées à utiliser.
- “Quelquefois les agneaux se changent en lionnes, en tigresses, en pieuvres”

→ la femme peut être féroce et dangereuse si elle le souhaite.

→ Louise Michel veut susciter chez la femme un sentiment de rebellion

les « titres »= marque du pouvoir → lexique imagé très méprisant


- « guenilles », « c’est trop rapiécé, trop étriqué pour nous ».

→ Sarcasme = peur des hommes face au pouvoir croissant des femmes


- « Vos titres ? Ah bah ! ... faites-en ce que vous voudrez» l.44

→ mépris met en valeur leur faiblesse .

→ Elle crée un contraste avec la force des femmes, affirmée d’abord par la menace =
« nous n’avons pas besoin du titre pour prendre vos fonctions quand il nous plaît ! » l.42
B. une émancipation intellectuelle et sociale

Dénonciation du manque de connaissance de la femme, lenfermant dans un asservissement


perpetuel

« Dans les couvents où elle se cache comme dans une tombe, l'ignorance l'étreint, les
règlements la prennent dans leur engrenage, broyant son cœur et son cerveau. » l.38

→ Couvent supposé éduquer les femmes → promesse d’une mort lente et douloureuse

→ bien loin d’être un refuge car celui-ci l'empêche de s’instruire/ Situation de stagnation

A la fin de l’extrait Louise Michel indique ses revendications :

- « Ce que nous voulons, c’est la science et la liberté » l.46

→ l’association des deux termes démontre l’importance de l’éducation dans le progrès de la


condition féminine.

Conclusion :

En somme, cet extrait des mémoires de Louise Michel, démontre les travers de la société du
XIXe siècle. L’auteur dévoile de manière polémique sa préoccupation pour la condition
féminine, se montrant précurseuse de son temps. Afin de réveiller les esprits, Louise Michel
utilise le sarcasme et le dénigrement pour arriver à ses fins et revendiquer les injustices que
subissent les femmes. Nous découvrons par la suite qu'elle inscrit ce texte dans un cadre
plus général, celui d’une révolution, car seule une nouvelle société pourra entraîner une
profonde modification des mentalités. Louise Michel souhaite que les femmes aient une
éducation plus approfondie pour les munir contre le patriarcat. La source des inégalités
viendrait du savoir. Nous pouvons associer cet aspect du texte a une maxime de l’auteur
humaniste Rabelais: “sciences sans conscience n'est que ruine de l'âme”. Louise Michel
aujourd'hui représente l’éprise de liberté féminine, et sera jusqua la fin de ses jours une
femme engagée pour les opprimés.

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