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FICHE Tx.

4 / Extrait de Les Liaisons Dangereuses, Lettre 81, DE LACLOS (1782)

La société du XVIIIe siècle est partagée entre un héritage antique et des idées nouvelles annoncées et
défendues par notamment les philosophes des Lumières dont la révolution sera le révélateur.
Durant cette période-là, de nombreux philosophes se font connaître, défendant leurs idées souvent de
manière anonyme pour éviter d’être censurés, à savoir Voltaire mais également Rousseau ou même
Montesquieu. De son côté, Pierre Choderlos de Laclos propose en 1782, Les Liaisons Dangereuses, un
roman épistolaire, composé de 175 lettres et divisé en 4 parties. Ce roman présente une intrigue amoureuse
qui d'ailleurs se transforme en manipulation machiavélique. Celui-ci invite essentiellement à réfléchir sur la
condition féminine de la société de l’époque. L’intrigue est conduite par 2 libertins – à savoir la Marquise de
Merteuil et le Vicomte de Valmont ; ces deux personnages se jouent d’une société qu’ils jugent hypocrite et ils
repèrent leurs proies et se lancent principalement des défis. Dans cette œuvre, un jeu de séduction met en
place une sorte de duel sans pitié.
Dans le cadre de cette lettre, qui est la lettre 81 se situant dans la 2e partie du roman, la Marquise de Merteuil
retrace pour Valmont son parcours et son éducation qui feront d’elle une libertine : c’est un passage
autobiographique dans lequel celle-ci affirme clairement sa supériorité par rapport à Valmont et aux autres
femmes.
Dès lors, nous verrons en quoi le personnage de Mme de Merteuil ne correspond-t-il pas aux
représentations traditionnelles des femmes de cette époque-là ?
Afin d’y répondre, je verrais les 3 mouvements qui constituent l’extrait à savoir, Mme de Merteuil, une femme
qui diffère des autres femmes, puis la différence liée à l’art de la dissimulation avant d’analyser un personnage
ne correspondant pas aux personnages féminins de l’époque.
Je vais dès à présent passer à la lecture du texte…

Dans le cadre du premier mouvement, nous pouvons remarquer la prédominance du pronom “je”, et des
déterminants possessifs : “me”, “mes”, “mon” (lignes 1 à 4). Elle méprise les femmes de son temps par une
expression assez explicite : “ces femmes inconsidérées” (ligne 1) dans laquelle on remarque l’emploi d’un
déterminant démonstratif “ces” ayant une valeur ici, péjorative mais également le participe passé employé
comme adjectif : “inconsidérées”. L'interrogation rhétorique marque et renforce l’idée d’un mépris. Dès le
départ, cette lettre a un caractère oratoire, de par les interrogations présentes, elles nous donnent l’impression
que Mme de Merteuil s’adresse directement au vicomte avec l’emploi du pronom personnel “vous” (ligne 1).
Elle fait entendre sa différence par les expressions : “je dis mes principes”. Elle souligne avec “sans examen”
que les femmes sont d’une certaine manière passives et ne font guère appel à une intelligence. Elle se
dépeint comme auteure de sa propre vie : “et je puis dire que je suis mon ouvrage” (ligne 4) à la façon d’une
divinité créatrice. C’est une femme intelligente et maître de son destin qui s’oppose aux modèles féminins de
son époque.

Le passage du présent à l’imparfait entre les deux premiers paragraphes souligne une transition. Nous
comprenons qu’en société, les femmes sont spectatrices et sont éduquées de manière passive. Or, la
marquise se démarque et se présente comme autodidacte : “j’ai su en profiter pour observer et réfléchir”
(lignes 5/6). On trouve tout au long de la lettre, le champ lexical de l’éducation : “des règles”, “mes principes”,
“m'instruire”, “m’apprit”, “je m’étudiais”, “je me suis travaillée”. Cet apprentissage autodidacte la mène à la
découverte de l'hypocrisie et de la dissimulation qui règnent en société mais qu’elle pratique en premier lieu
parce qu’elle les subit : “j’étais vouée par état au silence et à l’inaction” (ligne 5), “les discours [...] qu’on
cherchait à me cacher” (ligne 7). Aux lignes 6 et 7, nous comprenons que certaines personnes ont cherché à
l’influencer. Ainsi, celle-ci rend compte que les femmes sont éduquées en leur imposant des principes, des
discours, en les contraignant à un certain mode de vie où leurs volontés ne sont pas prises en compte.
Seulement, elle rend compte de son intelligence, la démarquant des autres femmes par le connecteur logique
“tandis que” (ligne 6). Le terme de la dissimulation est clairement employé à la ligne 8 : “dissimuler”. Elle met
en avant une égalité de comportement à la ligne 15 : “dont je vous ai vu quelquefois si étonné” et se montre
ainsi comme étant l’égal des hommes. Une métaphore est employée à la ligne 17 en rapport avec une figure
allant à la guerre : “munie de ces premières armes” soulignant qu’il s’agit d’une femme de pouvoir. Son
assurance se définit par l’expression “sûre de mes gestes” (ligne 19) en opposition avec la fragilité qui est
évoquée aux lignes 25 à 27.

Elle prône également l'indépendance de l'esprit par l'expression : “dès ce moment, ma façon de penser fut
pour moi seule”, suivie de “et je ne montrai plus que celle qu’il m'était utile de laisser voir” aux lignes 20/21
mettant en évidence la bataille des Philosophes des Lumières qui mettent en avant la liberté individuelle. Un
parallèle est établi entre le talent de la manipulation et celui des politiques. A l’époque, la politique est dirigée
par les hommes. On retrouve ainsi l’idée que la marquise se considère comme l’égal des hommes. La fin de la
lettre cache et déguise une certaine critique avec la politique de son temps (ligne 25). Dans cette lettre
argumentative, la marquise de Merteuil propose une réflexion : les femmes ne peuvent pas être soumises à
un système souvent encadré uniquement par des modèles masculins.

En somme, cette lettre présente le portrait d’une libertine qui ne correspond pas aux représentations de
l’époque. Malgré tout, elle fait l’apologie du mensonge et de la dissimulation qui règnent en société et insiste
sur le rôle de l’intelligence dans l’éducation d’une femme. Cette lettre n’est pas sans rappeler le portrait d’un
autre personnage que nous avons pu étudier : Foedora dans La Peau de Chagrin, pour son énergie
destructrice.
Je vais maintenant traiter la question de grammaire. Il m’était demandé de…

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