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INTRODUCTION

Tout comme les autres domaines, l’art est un secteur qui subit des évolutions à travers
le temps et cette évolution ne se fait pas sans heurts avec les concepts préexistants. C’est
également ce que va subir le tableau « les Demoiselles d’Avignon »de Pablo Picasso qui va
effectuer une grande révolution dans la sphère artistique notamment avec la naissance du
cubisme. Le cubisme se définit comme un mouvement artistique qui utilise les formes
géométriques de base comme moyen d’expression. En quoi consiste la particularité de cette
œuvre qui, à ses débuts, crée une réticence même parmi les professionnels et qui à la longue
séduit. Une présentation de l’auteur de l’œuvre, une description et interprétation de cette
dernière nous illuminera sur cette spécificité.

I-PRESENTATION DE L’ŒUVRE ET SON AUTEUR

Peintre, dessinateur et sculpteur espagnol, Pablo Ruiz Picasso est né à Malaga en


Espagne le 25 octobre 1881 et mourut le 08 avril 1973 à Mougins en France. Son œuvre
étudiée s’intitule « les Demoiselles d’Avignon » et fut terminée en 1907 à Bateau-Lavoir. Il
s’agit d’une peinture à huile sur toile qui mesure 243,9*233,7 effectuée sur des cahiers entiers
noircis avec des centaines de dessin préparatoires. Elle appartient à la catégorie des scènes de
genre. Elle est conservée en ce jour au Museum of Modern Art de New York. En 1900,
Picasso, âgé de 19 ans, quitte Barcelone pour Paris, où l’Exposition internationale a
sélectionné l’un de ses tableaux. En 1904, il s’installe au Bateau-Lavoir, un atelier situé à
Montmartre. Commencé durant l’hiver 1906, le tableau est laissé à l’état d’inachèvement
voulu, en juillet 1907.Titré à l’origine, contre l’avis de son marchand, « El Burdel de
Aviñón »en souvenir du Carrer d’Avinyó (la rue d’Avignon), rue chaude de Barcelone près de
laquelle vivait Picasso jeune, il ne prend son nom définitif de « les Demoiselles d’Avignon »,
donné par André Salmon, qu’en juillet 1916 a l’occasion du Salon d’Antin organisé par ce
dernier.
Pour les spectateurs de l’époque, ce n’est pas le sujet qui les choque mais sa
réalisation. Sur le conseil d’André Breton, le couturier et mécène Jacques Doucet achète le
tableau le 12 décembre 1924 pour la somme de 25 000 francs, Picasso recevant 2 000 francs
par mois jusqu’à concurrence de ces 25 000 francs. Dans une lettre, André Breton fait part
aussitôt de sa satisfaction pour cet achat qu’il avait déjà conseillé en décembre 1921.le tableau
est cédé en 1937 par la veuve Doucet à la galerie Jacques Seligmann pour 150 000 francs,
l’antiquaire exportant la toile dans sa galerie a New York, Jacques Seligmann &
Company.Alfred Barr l’acquiert en 1939 pour le Museum of Modern Art pour la somme de
200 000 francs.

II-DESCRIPTION DU TABLEAU

Cette toile met en scène, devant un rideau, cinq femmes nues aux corps et aux visages
anguleux, disloquées, occupant l’espace principal du tableau devant un fond compose
d’étoffes de plusieurs couleurs et qui sollicite le spectateur de leurs regards insistants. La
composition et le traitement des modèles semblent évoluer de la gauche vers la droite, allant
vers une représentation de plus en plus abstraite et décomposée des personnages. Au premier
plan et au centre du tableau, posée sur une table représentée de façon verticale, se trouve une
coupe de fruits dans laquelle sont posés un quartier de pastèque, une grappe de raisin ainsi
qu’une pomme et une poire semblables. N’étant pas représentées de façon réelle, et avec des
figures fragmentées en formes géométriques, sans respect des proportions du corps ;les cinq
femmes sont peintes dans un camaïeu incarnat qui contraste avec le bleu, le blanc et le marron
du rideau que la femme de gauche ouvre avec sa main. Les femmes du centre fixent les
spectateurs de leurs yeux exhorbités.Si leur visage est dessiné de face, leur nez est dessiné de
profil. La cinquième femme à droite est accroupie et nous tourne le dos. Le corps de ces
femmes semble déformé, représenté à la fois de profil, de trois quarts, de face et de dos, avec
des contours faits de segments de droites et d’angles vifs. Les formes sont fréquemment
soulignées par des contours blancs ou noirs qui accentuent leur déstructuration.
Dans ce tableau, Picasso néglige toutes les règles académiques : pas de sujet narratif,
aucune perspective, absence de réalisme voire de naturalisme dans l’exécution des modèles.
Selon ses dires, confirmés par une analyse des esquisses préparatoires, il apparait que devait
figurer, outre les cinq femmes, un marin et un étudiant en médecine tenant un crâne dans ses
mains. Les cinq femmes devaient manger, d’où le panier de fruit qui est resté, mais Picasso
n’a pas poursuivi dans son idée première.

III-INTERPRETATION ET ANALYSE

En 1907, Picasso, jeune peintre espagnol termina son œuvre, après de très nombreux
essais préparatoires. A cette époque, le cubisme n’existait pas encore. La fin du XIXe siècle
avait vu apparaitre l’impressionnisme, ensuite vinrent l’expressionnisme et le fauvisme.
Picasso avait été déjà remarqué lors du salon d’Automne de 1905 et fait des rencontres
importantes comme celle de Matisse ou G. Stein, romancière intellectuelle. Ce tableau sera
donc l’élément fondateur d’un grand changement à la fois culturel et dans l’histoire de l’art. Il
concrétisera l’avènement du « cubisme »mais aussi opèrera une rupture stylistique et
conceptuelle avec l’intellectualisation de la démarche artistique.
Picasso aurait voulu s’opposer a l’idéal esthétique de Matisse en présentant une œuvre
provocante, choquante et délibérément inachevée. Les visages des Demoiselles de droite se
confondent en effet avec des masques africains et évoquent des femmes atteintes de syphilis
osseuse (Picasso qui avait très peur de la maladie et de la mort, ayant contracté cette MST) au
stade ultime de leur déformation.
Picasso, qui dessinait remarquablement, refusait brusquement de reproduire la nature
et en faisait ressortir le côté « primitif ».Toutes les formes sont grossières et anguleuses,
comme taillées à coups de serpe. Les visages des deux femmes situées à droite ont subi la
déformation la plus frappante et leurs masques grimaçants ont presque perdu toute humanité.
Dès 1906, Picasso s’était intéressé aux arts dits « primitifs », à la suite entre autres d’une
grande rétrospective de Gauguin et de visites au musée d’ethnographie de Chaillot.il avait été
particulièrement fasciné par les sculptures sur bois africaines, leurs formes épurées et leur
symbolique direct, à tel point qu’il en acheta plusieurs. Picasso passa neuf mois à peindre ce
tableau dont il subsiste plus de huit cents études. A l’origine, il s’agissait d’une scène de
maison close. Le titre, les Demoiselles d’Avignon, faisait allusion à un bordel de la Calle
d’Avignon, à Barcelone « El Burdel de Aviñón ».Dans la version définitive, toute connotation
narrative a disparu. Picasso a détruit toute harmonie et décompose l’espace perspectif en
facettes géométriques. En effet, ce sont les couleurs qui distribuent l’idée de profondeur et le
positionnement du point de fuite. La couleur froide du fond permet l’idée d’éloignement
quant au contraire, la couleur chaude des corps les ramène vers l’avant. En fin de compte, si
ce tableau traite deux thèmes classiques en peinture(le nu et la nature morte), il s’écarte
volontairement de toutes les règles traditionnelles de cet art.

CONCLUSION

Cette toile ouvre la voie au cubisme (1908-1914), dont l’apparition et le


développement, vont déterminer une révolution esthétique en France et qui change
complètement la face de l’art européen. Le terme cubisme est d’ailleurs employé par dérision
par le critique Louis Vauxcelles,lors d’une exposition consacrée à Georges Braque en
1908,pour dénoncer la « simplification terrible »des paysages et la réduction de tous « les
sites, figures et maisons à des schémas géométriques des cubes ».Ce tableau est considéré par
les contemporains comme une véritable rupture dans la représentation.Bref,dans ce tableau
Picasso, montre sa volonté de sortir du dessin conventionnel, en mettant en œuvre des
procédés innovants, une sorte de révolution visuelle établissant ainsi les bases du cubisme.

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